déposée conformément à l'article 106, paragraphes 2 et 3 et paragraphe 4, point c), du règlement intérieur
sur le projet de règlement de la Commission modifiant l’annexe II du règlement (CE) nº 396/2005 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les limites maximales applicables aux résidus d’acétamipride présents dans certains produits (D58389/03 – 2018/2902(RPS))
Commission de l'environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire
Députés responsable: Sylvie Goddyn, Michèle Rivasi, Frédérique Ries, Guillaume Balas, Younous Omarjee
Résolution du Parlement européen sur le projet de règlement de la Commission modifiant l’annexe II du règlement (CE) nº 396/2005 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les limites maximales applicables aux résidus d’acétamipride présents dans certains produits(D58389/03 – 2018/2902(RPS))
B8‑0556/2018
Le Parlement européen,
– vu la directive 2009/128/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d'action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable(1),
– vu le projet de règlement de la Commission modifiant l’annexe II du règlement (CE) nº 396/2005 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les limites maximales applicables aux résidus d’acétamipride présents dans certains produits (D058389/03),
– vu le règlement (CE) no 396/2005 du Parlement européen et du Conseil du 23 février 2005 concernant les limites maximales applicables aux résidus de pesticides présents dans ou sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux d’origine végétale et animale et modifiant la directive 91/414/CEE du Conseil, et notamment son article 14, paragraphe 1, point a)(2),
– vu l’évaluation ciblée de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) concernant certaines LMR existantes pour l’acétamipride et la modification des LMR existantes pour les olives de table, les olives à huile, l’orge et l’avoine, publiée le 16 mai 2018(3),
– vu l’avis émis le 19 septembre 2018 par le comité permanent des végétaux, des animaux, des denrées alimentaires et des aliments pour animaux,
– vu l'article 5 bis, paragraphe 3, point b, de la décision 1999/468/CE du Conseil du 28 juin 1999 fixant les modalités de l'exercice des compétences d'exécution conférées à la Commission(4),
– vu la proposition de résolution de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire,
– vu l'article 106, paragraphes 2 et 3 et paragraphe 4, point c), de son règlement intérieur,
A. considérant que l’acétamipride est un insecticide néonicotinoïde qui cible une série d’insectes, notamment les pollinisateurs;
B. considérant que les néonicotinoïdes, y compris l’acétamipride, sont des insecticides «systémiques», ce qui signifie qu’ils sont pulvérisés sur les végétaux qui absorbent ensuite les substances chimiques et les diffusent dans l’ensemble de la plante, dans les tissus, le pollen et le nectar; considérant que les insectes sont tués par l’acétamipride et d’autres insecticides systémiques de deux manières différentes: lorsqu’ils sont en contact avec le pesticide, par exemple lors qu’ils sont pulvérisés, et lorsqu’ils ingèrent des végétaux qui ont été exposés au pesticide;
C. considérant que les néonicotinoïdes sont réputés extrêmement toxiques pour les abeilles en raison d’une translocation systémique, ce qui a conduit la Commission à interdire trois d’entre eux;
D. considérant que, le 21 septembre 2017, l’EFSA a adopté un avis favorable sur la toxicité des néonicotinoïdes;
E. considérant que, le 28 février 2018, l’EFSA a publié des mises à jour de l’évaluation des risques pour trois néonicotinoïdes – la clothianidine, l’imidaclopride et le thiaméthoxame – confirmant que la plupart des utilisations des pesticides néonicotinoïdes représentent un risque pour les abeilles sauvages et les abeilles mellifères;
F. considérant que l’acétamipride fait partie des cinq néonicotinoïdes interdits en France, au même titre que le thiaclopride et les trois néonicotinoïdes, qui sont interdits dans l’ensemble de l’Union;
G. considérant que l’acétamipride est métabolisé dans le corps humain et qu’il produit un dérivé qui peut s’accumuler (N-desméthyl-acétamipride) et que sa présence provoque des symptômes d’intoxication(5);
H. considérant que plusieurs études récentes donnent à penser que l’acétamipride provoque des perturbations endocriniennes(6), (7), des effets sur le développement neurologique(8), (9), une neurotoxicité(10), une génotoxicité(11) et une immunotoxicité(12);
I. considérant que l’article 191, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (traité FUE) définit le principe de précaution comme l’un des principes fondamentaux de l’Union;
J. considérant que l'article 168 du traité FUE précise qu'un niveau élevé de protection de la santé humaine devra être garanti lors de l'élaboration et de la mise en œuvre de toutes les politiques et activités de l'Union;
K. considérant que la directive 2009/128/CE du Parlement européen et du Conseil vise à parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable dans l’Union en réduisant les risques et les effets des pesticides sur la santé humaine et sur l’environnement et en encourageant le recours à la lutte intégrée contre les ennemis des cultures et à des méthodes ou techniques de substitution, telles que les solutions de substitution non chimiques aux pesticides;
L. considérant que, bien que la Commission ait reconnu l’existence de graves problèmes(13) en ce qui concerne la légitimité démocratique du processus décisionnel en ce qui concerne les pesticides et leur utilisation, elle continue de proposer d’autoriser les néonicotinoïdes;
M. considérant que la proposition de la Commission visant à augmenter les limites maximales de résidus (LMR) pour l’acétamipride risque de donner lieu à un nouveau cas de non-respect du principe de précaution, compte tenu des doutes persistants quant aux effets de l’acétamipride sur la santé publique et l’environnement;
N. considérant que les observations de l’EFSA sur la demande visant à relever les LMR pour l’acétamipride sur les olives de table et les olives à huile montrent de toute évidence qu’aucune évaluation des incidences sur l’environnement, y compris sur les pollinisateurs, n’a été réalisée;
O. considérant que les conclusions de l’EFSA dans son avis du 16 mai 2018 sont formulées sur la base de considérations théoriques, en particulier en ce qui concerne l’estimation de la dose journalière maximale recommandée; que la nature théorique de certains éléments dans l’analyse de l’EFSA suscite des doutes quant à la capacité de cet organisme à s’appuyer sur des faits empiriques et, par conséquent, à refléter la réalité dans ses résultats;
P. considérant que l’EFSA conclut qu’il existe un risque «improbable» pour la santé publique dans le cas d’une augmentation des LMR pour l’acétamipride; que cet avis présente toutefois un certain degré de probabilité et laisse donc planer le doute quant à la sécurité effective des nouvelles LMR;
Q. considérant que, dans son avis du 16 mai 2018, l’EFSA recommande de supprimer les LMR pour les olives de table et les olives à huile, comme indiqué dans le tableau récapitulatif figurant à l’annexe I, mais ne fournit pas d’éléments de preuve suffisants indiquant que cela n’entraînerait pas de risque pour l’environnement, en particulier pour les pollinisateurs;
R. considérant que l’acétamipride a été utilisé à grande échelle pour contenir la crise de Xyllela fastidiosa qui touche le sud de l’Europe depuis 2013, en ciblant le vecteur de la bactérie et non la bactérie elle-même; que bien qu’il n’existe pas de remède connu pour les arbres affectés, il y a des alternatives pour lutter contre la propagation de la bactérie tueuse d’oliviers Xylella fastidiosa, telle que l’utilisation de systèmes de caméras hyperspectrales et thermiques pour détecter la maladie avant que les symptômes ne soient visibles(14), la mise en quarantaine des arbres et l’enlèvement des arbres malades;
1. s’oppose à l’adoption du projet de règlement de la Commission;
2. estime que le projet de règlement de la Commission excède les compétences d’exécution prévues dans le règlement (CE) n° 396/2005;
3. estime que le projet de règlement de la Commission n'est compatible ni avec l'objectif ni avec la teneur du règlement (CE) n° 396/2005;
4. fait observer que la LMR européenne actuelle pour l’acétamipride dans les olives de table et les olives à huile passera de 0,9 à 3 mg/kg;
5. propose, au contraire, que la LMR européenne pour l’acétamipride dans les olives de table et les olives à huile soit abaissée à 0,5 mg/kg, comme indiqué dans le tableau de l’annexe II;
6. souligne que le relèvement à 3 mg/kg de la LMR permettrait de pulvériser au moins quatre fois plus d’acétamipride sur les arbres et les olives;
7. estime que la décision d’enregistrer l’acétamipride ne peut se justifier, étant donné que les éléments probants ne permettent pas d'établir que les risques inacceptables pour les animaux, la sécurité alimentaire et les pollinisateurs seront évités;
8. estime que l’augmentation de la toxicité pour les pollinisateurs est le résultat d’un effet cocktail(15) obtenu du fait de l’utilisation de plusieurs pesticides et insecticides, y compris l’acétamipride;
9. fait observer que l’utilisation d’acétamipride comme pesticide pour lutter contre des insectes pourrait avoir une incidence sur les pollinisateurs(16);
10. constate que le projet de règlement de la Commission prévoit la possibilité d’une augmentation ultérieure des teneurs d’acétamipride dans les olives de table et les olives à huile;
11 estime que l’avis de l’EFSA n’a pas tenu compte du risque pour la santé humaine et pour les abeilles; invite les États membres et l’EFSA à faire preuve d’une plus grande vigilance à l’égard de la santé du public et des pollinisateurs lors de l’évaluation des demandes de LMR;
12. demande à la Commission de retirer son projet de règlement;
13. demande à la Commission de présenter une nouvelle proposition s'appuyant sur le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne qui respecte le principe de précaution;
14. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres.
ANNEXE I
Examen ciblé des teneurs maximales existantes pour les résidus d’acétamipride, EFSA Journal
B.4.
LMR proposées
Code (a)
Marchandise
LMR UE
existante (mg/kg)
Résultat de l’évaluation
MRL
(mg/kg)
Commentaire
Définition des résidus applicable: acétamipride
1300010
Pommes
0.8
0.4
Une LMR de repli est proposée (b)
1300020
Poires
0.8
0.4
Une LMR de repli est proposée (b)
140030
Pêches
0.8
0.2
Une LMR de repli est proposée (b)
242020
Choux pommés
0.7
0.4
Une LMR de repli est proposée (b)
243010
Choux chinois
1.5
-
Une LMR de repli n’a pu être proposée (c)
243020
Choux verts
1.5
-
Une LMR de repli n’a pu être proposée (c)
251020
Laitues
3
1.5
Une LMR de repli est proposée (b)
251030
Scaroles/endives à larges feuilles
1.5
0.4
Une LMR de repli provisoire est proposée (d)
252010
Épinards
5
0.6
Une LMR de repli est proposée (b)
252020
Pourpiers
3
0.6
Une LMR de repli est proposée (b)
252030
Cardes/côtes de bettes
3
0.6
Une LMR de repli est proposée (b)
270030
Céleris
1.5
-
Une LMR de repli n’a pu être proposée (e)
161030
Olives de table
0.9
3
Les nouvelles utilisations prévues de l’UE sont suffisamment étayées par des données et aucun risque pour les consommateurs n’a été identifié.
402010
Olives à huile
0.9
3
500010
Grains d'orge
0.01*
0.05
500050
Grains d'avoine
0.01*
0.05
-
Autres denrées d'origine végétale
Voir le règlement (UE) 2017/626
Voir le règlement (UE) 2017/626
Les LMR existantes peuvent être maintenues (f)
Définition des résidus applicable: somme de l'acétamipride et de N-desméthyl-acétamipride, exprimée en acétamipride
-
Autres denrées alimentaires d'origine animale
Voir le règlement (UE) 2017/626
Voir le règlement (UE) 2017/626
Les LMR existantes peuvent être maintenues (g)
MRL: Limite maximale de résidus
indique que la LMR est fixée à la limite de quantification.
a) Code marchandise tel que repris dans l’annexe I du règlement (CE) no 396/2005.
b) La LMR européenne existante a été considérée comme potentiellement préoccupante. Les données à l’appui d’une LMR de repli ont été soumises par les États membres et aucun risque pour les consommateurs n’est identifié pour cette LMR de repli.
c) La LMR européenne existante a été considérée comme potentiellement préoccupante. Aucune utilisation n’est actuellement autorisée dans l’Union qui pourrait être retenue pour trouver une LMR de repli. L’EFSA propose d’abaisser la LMR à la limite de quantification appropriée et de retirer les autorisations correspondantes dans l’Union.
d) La LMR européenne existante a été considérée comme potentiellement préoccupante. Les données à l’appui d’une LMR de repli ont été soumises par les États membres et aucun risque pour les consommateurs n’est identifié pour cette LMR de repli. Néanmoins, la LMR de repli ainsi trouvée devrait être confirmée par la présentation de données complémentaires.
e) La LMR européenne existante a été considérée comme potentiellement préoccupante. Les données sur les résidus en faveur de bonnes pratiques agricoles (BPA) de repli n’ont pu être obtenues et une LMR de repli n'a pu être trouvée. L’EFSA propose d’abaisser la LMR à la limite de quantification appropriée et de retirer les autorisations correspondantes dans l’Union.
f) La LMR européenne existante n’a pas été considérée comme potentiellement préoccupante.
g) La LMR européenne existante n’a pas été considérée comme potentiellement préoccupante. En outre, le retrait des utilisations existantes les plus critiques sur les choux verts et les pommes et les utilisations prévues sur l’orge et l’avoine ne devraient pas avoir d’incidence sur les LMR calculées pour les animaux d’élevage.
Marfo, J. T., Fujioka, K., Ikenaka, Y., Nakayama, S. M. M., Mizukawa, H., Aoyama, Y., et al., ‘Relationship between Urinary N-Desmethyl-Acetamiprid and Typical Symptoms including Neurological Findings: A Prevalence Case-Control Study’, PLOS ONE 10(11): e0142172, 2015, https://doi.org/10.1371/journal.pone.0142172
Kong, D., et al., ‘Acetamiprid inhibits testosterone synthesis by affecting the mitochondrial function and cytoplasmic adenosine triphosphate production in rat Leydig cells’, 2017, https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28395332
Çamlıca, Y., et al., ‘Toxic effect of acetamiprid on Rana ridibunda sciatic nerve (electrophysiological and histopathological potential)’, 2018, https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29536770
Şenyildiz, M., et al., ‘Investigation of the genotoxic and cytotoxic effects of widely used neonicotinoid insecticides in HepG2 and SH-SY5Y cells’, 2018, https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29591886
Le 27 avril 2018, les représentants des États membres réunis au sein d’un comité permanent ont soutenu une proposition de la Commission visant à restreindre encore davantage l’utilisation des trois néonicotinoïdes imidaclopride, clothianidine et thiaméthoxame, dont le réexamen scientifique (https://www.efsa.europa.eu/en/press/news/180228) a permis de conclure que leur utilisation extérieure nuit aux abeilles. La protection des abeilles est une question importante pour la Commission, dans la mesure où elle concerne la biodiversité, la production alimentaire et l’environnement. À l’initiative du président Juncker, pour qui il s’agit d’une priorité, le collège des commissaires a examiné la question le 29 mars 2017. Les restrictions convenues ont été plus loin que les mesures mises en place depuis 2013. Toute utilisation en extérieur des trois substances a été interdite et les néonicotinoïdes concernés ont été autorisés seulement dans des serres permanentes où il n’y a pas de contact avec les abeilles. Le commissaire européen chargé de la santé et de la sécurité alimentaire, Vytenis Andriukaitis, s’est félicité du vote, tout en soulignant que «la Commission avait proposé ces mesures il y a plusieurs mois, sur la base de l’avis scientifique de l’Autorité européenne de sécurité des aliments. J’estime que la santé des abeilles revêt une importance capitale, car elle concerne la biodiversité, la production alimentaire et l’environnement».
‘Previsual symptoms of Xylella fastidiosa infection revealed in spectral plant-trait alterations’, in Nature Plants, Vol. 4, pp. 432-439, 25 juin 2018, https://www.nature.com/articles/s41477-018-0189-7
Traynor, K. S., Pettis, J. S., Tarpy, D. R., Mullin, C. A., Frazier, J. L., Frazier, M., van Engeldsorp, D., ‘In-hive Pesticide Exposome: Assessing risks to migratory honey bees from in-hive pesticide contamination in the Eastern United States’, in Scientific Reports 6, 15 septembre 2016, http://www.nature.com/articles/srep33207