PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur l’avenir du traité FNI et l’impact sur l’UE
12.2.2019 - (2019/2574(RSP))
conformément à l’article 123, paragraphe 2, du règlement intérieur
Helmut Scholz, Merja Kyllönen, Takis Hadjigeorgiou, Tania González Peñas, Rina Ronja Kari, Marisa Matias, Kateřina Konečná, Paloma López Bermejo, Eleonora Forenza, Dimitrios Papadimoulis, Stelios Kouloglou, Sabine Lösing, Luke Ming Flanagan au nom du groupe GUE/NGL
B8‑0131/2019
Résolution du Parlement européen sur l’avenir du traité FNI et l’impact sur l’UE
Le Parlement européen,
– vu sa résolution du 27 octobre 2016 sur la sécurité nucléaire et la non-prolifération[1],
– vu l’article VI du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), qui oblige les États dotés d’armes nucléaires à s’engager à poursuivre de bonne foi des négociations sur le désarmement nucléaire,
– vu le programme de désarmement des Nations unies,
– vu l’objectif 16 de développement durable des Nations unies, qui vise à promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et ouvertes à tous aux fins du développement durable,
– vu le traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (ci-après le «traité FNI») du 8 décembre 1987 entre les États-Unis d’Amérique et l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS),
– vu la déclaration du 2 février 2019 du secrétaire d’État américain sur l’intention des États-Unis de se retirer du traité FNI[2],
– vu les déclarations connexes des organisations de la société civile, notamment celle du 1er février 2019 de la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (ICAN), lauréate du prix Nobel de la paix, intitulée «US withdrawal from INF Treaty puts Europe (and the world) at risk» (Le retrait des États-Unis du traité FNI met l’Europe (et le monde) en danger)[3],
– vu l’article 123, paragraphe 2, de son règlement intérieur,
A. considérant que le traité FNI est fondamental pour la sécurité européenne; qu’il a contraint les deux parties à détruire leurs stocks de missiles de croisière et missiles balistiques nucléaires et conventionnels lancés depuis le sol et ayant une portée se situant entre 500 et 5 500 km, tout en leur interdisant de posséder, de produire et de tester en vol ces missiles; qu’il a permis la destruction de près de 2 700 missiles à courte et moyenne portée;
B. considérant que le traité FNI a contribué à l’établissement et au renforcement de la stabilité à l’époque de la guerre froide en réduisant considérablement le nombre de missiles en Europe, faisant de l’Europe le principal bénéficiaire du succès du traité FNI;
C. considérant que tant les États-Unis que la Russie ont accusé l’autre partie d’avoir violé le traité FNI; que les deux parties n’ont pas recouru au dialogue diplomatique pour répondre à leurs préoccupations réciproques; que la Commission de vérification spéciale instituée par le traité pour aborder notamment les questions de conformité n’a pas été convoquée; que la Russie a récemment invité des experts américains à examiner d’éventuelles violations et à en débattre;
D. considérant que les États-Unis se sont retirés du traité sur la limitation des systèmes de missiles antibalistiques en juin 2002; que de nouveaux systèmes de défense contre les missiles balistiques ont depuis été déployés en Europe de l’Est;
E. considérant que, le 20 octobre 2018, le président Trump a annoncé le retrait des États-Unis du traité FNI en raison de son non-respect par la Russie et de la non-participation de la Chine; que, tout en exprimant son intérêt pour la préservation du traité, la Russie a également annoncé son intention de suspendre sa participation;
F. considérant que l’annonce de l’intention des États-Unis de se retirer du traité FNI remet également en cause la probabilité d’une éventuelle coopération entre les États-Unis et la Russie en vue du renouvellement du nouveau traité sur la réduction des armements stratégiques (ci-après le «nouveau traité START»), qui expire en 2021; que le non-renouvellement du nouveau traité START porterait gravement atteinte au régime international de contrôle des armements, qui apporte depuis plusieurs décennies la stabilité en ce qui concerne les armes nucléaires;
G. considérant que le traité FNI est la pierre angulaire du maintien de la stabilité stratégique mondiale, de la paix dans le monde et de la sécurité régionale; que la préservation du traité contribuerait aux efforts visant à conserver d’autres accords existant en matière de contrôle des armements et de désarmement, dont le nouveau traité START, ainsi qu’à créer des conditions plus favorables pour les négociations sur la limitation des armements, le désarmement et la non-prolifération;
H. considérant que l’Europe et le reste du monde sont à la croisée des chemins face au choix entre la préservation du système de désarmement et de contrôle des armements nucléaires et une nouvelle course aux armements;
1. est profondément préoccupé par l’intention des États-Unis de se retirer du traité FNI et de suspendre les obligations qui leur incombent en vertu de ce traité; rappelle que cela fera peser un risque grave sur la sécurité et la paix de l’Europe et du reste du monde, exacerbera la concurrence militaire et entraînera la détérioration des relations entre les États dotés d’armes nucléaires;
2. invite les États-Unis et la Russie à redoubler d’efforts pour résoudre les questions de conformité au moyen du mécanisme de vérification prévu dans le traité et au travers de négociations; demande d’urgence aux deux parties de préserver et de renforcer le traité FNI en veillant à son respect strict et intégral;
3. invite la Russie et les États-Unis à reprendre le dialogue de façon constructive dans le but de réduire les tensions et de renforcer la sécurité et la stabilité internationales ainsi que les avancées dans la réduction des armes nucléaires; demande aux deux parties d’élaborer des mesures de coopération supplémentaires afin d’accroître la confiance mutuelle et de réduire les risques d’interprétation erronée ou de malentendu;
4. souligne que l’avenir incertain du traité FNI ne devrait pas compromettre d’autres accords de contrôle des armements; exhorte notamment les États-Unis et la Russie à renouveler le nouveau traité START avant son expiration en 2021;
5. se déclare vivement préoccupé par le fait que l’abandon du traité FNI est susceptible de faire de l’Europe le théâtre d’un affrontement nucléaire entre la Russie et les États-Unis; rejette fermement tout concept stratégique qui suivrait une logique de dissuasion, concept qui a mené le monde au bord du conflit nucléaire;
6. demande à l’Union européenne et à ses États membres de jouer un rôle de médiateur et de faciliter un dialogue axé sur les résultats sur la stabilité régionale et mondiale, le désarmement nucléaire et la non-prolifération; invite l’Union à ouvrir les négociations en vue d’instaurer un régime de paix européen garantissant la sécurité de tous, notamment des États situés dans le voisinage commun de l’Union et de la Russie, de viser le désarmement, de renforcer la démocratie et l’état de droit, de garantir tous les droits de l’homme, de faciliter les contacts avec la société civile et de promouvoir la coopération commerciale et économique; estime que l’OSCE pourrait être le cadre approprié pour lancer une telle discussion;
7. se déclare fortement préoccupé par le risque d’une reprise de la course aux armements nucléaires en Europe; rejette fermement tout projet de déploiement de nouvelles armes nucléaires en Europe et plaide en faveur du retrait immédiat des armes nucléaires américaines d’Allemagne, d’Italie, de Belgique et des Pays-Bas; s’oppose fermement au renforcement en cours des capacités militaires en Europe et demande qu’il soit mis un terme à cette nouvelle course aux armements;
8. demande à l’Union européenne et à ses États membres de faire du désarmement nucléaire une priorité de la politique étrangère et de sécurité; prie instamment les États membres de signer et de ratifier le traité des Nations unies sur l’interdiction des armes nucléaires;
9. déplore que les États dotés d’armes nucléaires continuent de moderniser leur arsenal, retardent les mesures visant à réduire ou à éliminer leurs armes nucléaires et adhèrent à une doctrine militaire de dissuasion nucléaire; demande aux États dotés d’armes nucléaires de cesser immédiatement l’amélioration qualitative, le développement, la production et le stockage d’ogives nucléaires et de leurs vecteurs, et s’inquiète du fait que cette évolution menace le TNP;
10. demande de toute urgence à tous les États dotés d’armes nucléaires de s’engager dans des négociations bilatérales et multilatérales sur le désarmement nucléaire;
11. rappelle que la construction d’un monde exempt d’armes de destruction massive est le seul moyen sûr d’éviter la plus grande catastrophe d’origine humaine possible; rappelle son plein engagement en faveur du maintien de régimes internationaux efficaces de contrôle des armements, de désarmement et de non-prolifération en tant que pierre angulaire de la sécurité mondiale et européenne; insiste sur son soutien plein et entier aux processus des Nations unies, aux travaux du Bureau des affaires de désarmement des Nations unies et au programme de désarmement lancé par le secrétaire général de l’Organisation des Nations unies, M. António Guterres; rappelle son engagement à poursuivre des politiques visant à faire progresser la réduction et l’élimination de tous les arsenaux nucléaires et à instaurer un monde exempt d’armes nucléaires;
12. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au Service européen pour l’action extérieure, aux États membres et aux Nations unies.