Proposition de résolution - B9-0172/2020/REV1Proposition de résolution
B9-0172/2020/REV1

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la protection européenne accordée aux travailleurs transfrontières et saisonniers dans le contexte de la pandémie de COVID-19

15.6.2020 - (2020/2664(RSP))

déposée à la suite de déclarations du Conseil et de la Commission
conformément à l’article 132, paragraphe 2, du règlement intérieur

Dragoș Pîslaru, Atidzhe Alieva-Veli, Monica Semedo, Cristian Ghinea, Vlad-Marius Botoş, Nicolae Ştefănuță, Sylvie Brunet, Ramona Strugariu, Marie-Pierre Vedrenne, Stéphane Bijoux, Véronique Trillet-Lenoir, Clotilde Armand, Anna Júlia Donáth, Ilana Cicurel, Abir Al-Sahlani, Radka Maxová, Dacian Cioloş, Dragoş Tudorache
au nom du groupe Renew
Jeroen Lenaers, Ioan-Rareş Bogdan, Gheorghe Falcă, Traian Băsescu, Mircea-Gheorghe Hava, Marian-Jean Marinescu, Dan-Ștefan Motreanu, Gheorghe-Vlad Nistor, Loránt Vincze, Cristian-Silviu Buşoi
au nom du groupe PPE
Agnes Jongerius, Gabriele Bischoff, Dan Nica, Victor Negrescu, Tudor Ciuhodaru, Mihai Tudose, Rovana Plumb, Adrian-Dragoş Benea, Carmen Avram, Claudiu Manda, Maria Grapini, Corina Crețu
au nom du groupe S&D
Petra De Sutter, Mounir Satouri, Damian Boeselager, Katrin Langensiepen, Ernest Urtasun, Rasmus Andresen, Diana Riba i Giner, Thomas Waitz, Romeo Franz
au nom du groupe Verts/ALE
Elżbieta Rafalska, Cristian Terheş
au nom du groupe ECR
Marc Botenga, Nikolaj Villumsen, Leila Chaibi, Manon Aubry, Pernando Barrena Arza, Marisa Matias, Anne-Sophie Pelletier, José Gusmão
au nom du groupe GUE/NGL


Procédure : 2020/2664(RSP)
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B9-0172/2020
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B9-0172/2020
Textes adoptés :

B9-0172/2020/REV

European Parliament resolution on European protection of cross-border and seasonal workers in the context of the COVID-19 crisis

(2020/2664(RSP))

Le Parlement européen,

 vu l’article 3, paragraphe 2, du traité sur l’Union européenne (traité UE),

 vu les articles 4, 9, 26, paragraphe 2, 45, 46, 48, 151, 153 et 168 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (traité FUE),

 vu le socle européen des droits sociaux, et en particulier ses principes 5, 6, 10, 12 et 16,

 vu la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs,

 vu la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne,

 vu la directive 2014/54/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative à des mesures facilitant l’exercice des droits conférés aux travailleurs dans le contexte de la libre circulation des travailleurs[1],

 vu le règlement (UE) nº 492/2011 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2011 relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union[2],

 vu la directive 2014/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février sur les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi en tant que travailleur saisonnier[3],

 vu la directive 2008/104/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative au travail intérimaire[4],

 vu le règlement (UE) n° 2019/1149 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 instituant l’Autorité européenne du travail[5],

 vu le règlement (CE) nº 987/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 fixant les modalités d’application du règlement (CE) nº 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale[6],

 vu le règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale[7],

 vu la directive du Conseil du 30 novembre 1989 concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé pour les lieux de travail (première directive particulière au sens de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 89/391/CEE)[8],

 vu la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services[9],

 vu la directive (UE) 2018/957 du Parlement européen et du Conseil du 28 juin 2018 modifiant la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services[10],

 vu la directive 2014/67/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 relative à l’exécution de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services et modifiant le règlement (UE) nº 1024/2012 concernant la coopération administrative par l’intermédiaire du système d’information du marché intérieur («règlement IMI»)[11],

 vu la directive 2000/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 septembre 2000 concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l’exposition à des agents biologiques au travail[12],

 vu la directive (UE) 2019/1937 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union[13],

 vu la directive 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2009 prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier[14],

 vu la communication de la Commission du 13 mai 2020 intitulée «Pour une approche coordonnée par étapes du rétablissement de la libre circulation et de la levée des contrôles aux frontières intérieures – COVID-19» (COM(2020)3250),

 vu la déclaration commune du 15 mai 2020 des partenaires sociaux européens de l’agriculture (groupe des employeurs des organisations professionnelles agricoles de l’Union européenne (GEOPA-COPA) et Fédération européenne des syndicats de l’alimentation, de l’agriculture et du tourisme (EFFAT)) sur le déploiement de travailleurs saisonniers originaires de pays européens dans l’Union européenne,

 vu les déclarations communes des partenaires sociaux du secteur européen de l’hôtellerie et de la restauration (EFFAT et l’association des hôtels, restaurants et cafés (HOTREC)), du 11 mars et du 27 avril 2020,

 vu les Lignes directrices pour la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs du secteur alimentaire pendant la pandémie de COVID-19 du 9 avril 2020 de l’EFFAT et de FoodDrinkEurope,

 vu la directive (UE) 2019/1152 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l’Union européenne[15],

 vu la directive 20011/98/UE du 13 décembre 2011 du Parlement européen et du Conseil établissant une procédure de demande unique en vue de la délivrance d’un permis unique autorisant les ressortissants de pays tiers à résider et à travailler sur le territoire d’un État membre et établissant un socle commun de droits pour les travailleurs issus de pays tiers qui résident légalement dans un État membre[16],

 vu le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières de 2018, notamment ses objectifs 5 et 22,

 vu la feuille de route européenne commune pour la levée des mesures de confinement liées à la pandémie de coronavirus,

 vu la déclaration commune des membres du Conseil européen du 26 mars 2020,

 vu la communication de la Commission du 13 mars 2020 sur une réponse économique coordonnée face à l’épidémie de COVID-19 (COM(2020)0112),

 vu la communication de la Commission du 30 mars 2020 sur les lignes directrices concernant l’exercice de la libre circulation des travailleurs lors de l’apparition d’un foyer de COVID-19,

 vu la communication de la Commission du 30 mars 2020 intitulée «COVID-19 – Orientations concernant la mise en œuvre de la restriction temporaire des déplacements non essentiels vers l’UE, la facilitation du régime de transit pour le rapatriement des citoyens de l’UE et les effets sur la politique des visas» (C(2020)2050),

 vu sa résolution du 17 avril 2020 sur une action coordonnée de l’Union pour combattre la pandémie de COVID-19 et ses conséquences[17],

 vu sa résolution du 4 juillet 2017 sur les conditions de travail et l’emploi précaire[18],

 vu le programme de développement durable à l’horizon 2030 de l’Organisation des Nations unies et ses objectifs de développement durable (ODD), en particulier les objectifs 3 et 8,

 vu les normes fondamentales du travail fixées par l’Organisation internationale du travail (OIT) ainsi que ses conventions et recommandations sur les conditions de travail,

 vu la convention 184 de l’OIT (sur la sécurité et la santé dans l’agriculture),

 vu la communication de la Commission du 13 mai 2020 intitulée «Tourisme et transport en 2020 et au-delà» (COM(2020)0550),

 vu les orientations de l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (EU-OSHA) du 24 avril 2020 intitulées «COVID-19: retour sur le lieu de travail – Adapter les lieux de travail et protéger les travailleurs»,

 vu l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,

A. considérant que la libre circulation est un droit pour les travailleurs et un principe fondamental de l’Union européenne, essentiel au bon fonctionnement du marché intérieur; que la mobilité des travailleurs devrait être non seulement libre mais aussi équitable; que le principe de l’égalité de traitement est inscrit à l’article 45, paragraphe 2, du traité FUE, qui interdit toute discrimination fondée sur la nationalité entre les travailleurs des États membres en ce qui concerne l’emploi, la rémunération et les conditions de travail et d’emploi; que ce principe s’applique également aux travailleurs transfrontières et saisonniers, qui doivent être traités sur le même pied d’égalité que les travailleurs ressortissants de l’État membre d’accueil, conformément à la législation de l’Union, qu’il s’agisse d’égalité des droits, des conditions de travail ou de protection;

B. considérant que les travailleurs transfrontières incluent non seulement les personnes qui exercent leur droit à la libre circulation pour travailler dans un État membre de l’Union tout en restant résidents dans un autre État membre, mais aussi les travailleurs frontaliers et les travailleurs détachés; qu’un travailleur frontalier est un travailleur salarié dans la zone frontalière d’un État membre de l’Union, mais qui retourne chaque jour ou au moins une fois par semaine à la zone frontalière d’un pays voisin où il réside et dont il est ressortissant; qu’un travailleur détaché est un salarié qui est envoyé par son employeur pour effectuer un service dans un autre État membre de l’Union à titre temporaire, dans le cadre d’un contrat de services, d’un détachement intragroupe ou d’une embauche par l’intermédiaire d’une agence de travail intérimaire; que les travailleurs saisonniers comprennent les ressortissants de l’Union et de pays tiers qui se rendent dans un État membre pour y vivre temporairement et y exercer une activité soumise au rythme des saisons;

C. considérant que plus de 17 millions de citoyens européens vivent et travaillent dans un pays de l’Union autre que celui dont ils possèdent, la nationalité (3,9 % de la population active totale en 2018); qu’on dénombre 1,5 million de travailleurs transfrontières dans l’Union; qu’on recense plus de 2,3 millions de travailleurs détachés dans un autre État membre que le leur;

D. considérant que la pandémie de COVID-19 fait peser une lourde menace sérieuse sur la santé publique et qu’elle a des répercussions sur la santé et la vie de toutes les personnes résidant dans l’Union ainsi que sur les systèmes de santé et de soins des États membres; que la crise a également eu des répercussions sur la société et l’économie européennes, en particulier sur les travailleurs et les secteurs qui se trouvent sont en première ligne; que tous les travailleurs sont touchés, quel que soit leur statut; que l’apparition de la pandémie a mis en lumière le lien intrinsèque entre l’équité et la sûreté de la mobilité;

E. considérant que de nombreux travailleurs transfrontières et saisonniers sont indispensables à la fourniture de biens et de services essentiels dans des secteurs économiques clés tels que l’agriculture et la production alimentaire, les transports, la logistique, la construction, les services sociaux, les soins, le travail social et le tourisme, la transformation et l’emballage des denrées alimentaires, la pêche, la sylviculture, les soins de santé et la recherche, les technologies de l’information et de la pharmacie, les infrastructures critiques et autres, et sont des maillons essentiels de la relance économique; que les modèles d’entreprise de certaines agences de travail temporaire dans ces secteurs favorisent la réduction des coûts du travail et la précarité des conditions de travail; que l’inspection du travail recense régulièrement des violations des droits du travail des travailleurs transfrontières et saisonniers dans ces secteurs;

F. considérant que les travailleurs transfrontières et saisonniers ont été durement touchés par la crise et par les mesures prises par les États membres pour contenir et prévenir la propagation du virus, à savoir les fermetures de frontières, les restrictions temporaires et les contrôles aux frontières intérieures; que la pandémie de COVID-19 a entraîné la fermeture de frontières et la cessation ou la suspension de nombreuses activités économiques, ce qui a entraîné une augmentation du chômage et de graves difficultés de retour dans le pays pour les travailleurs transfrontières et saisonniers qui, dans les États membres où ils occupaient leur emploi, se sont retrouvés bloqués sans revenu, protection ni transport et parfois sans logement et sans accès aux soins de santé et à la nourriture;

G. considérant que de nombreux travailleurs transfrontières et saisonniers sont employés dans le cadre de contrats de travail de courte durée qui ne leur accordent qu’une sécurité de l’emploi et une sécurité sociale minimales lorsqu’elles ne sont pas inexistantes et les maintient en-dessous des seuils nationaux au-delà desquels ils pourraient bénéficier de prestations sociales; que ces travailleurs sont souvent issus de régions, de minorités et de groupes sociaux pauvres et vulnérables, qu’ils s’agit souvent de travailleurs pauvres exposés au risque d’exclusion sociale et qu’ils peuvent être victimes de violations de leurs droits par les recruteurs, les agences ou les employeurs, situations que la pandémie a aggravées; que les travailleurs en mission de courte durée vivent souvent dans des logements collectifs, ce qui rend difficile la distanciation sociale et augmente les risques d’infection; que d’importants foyers de COVID-19 se sont déclarés dans des secteurs tels que la production alimentaire et que cela est susceptible de se produire de nouveau dans les secteurs et les lieux de travail où il est difficile d’observer la distanciation sociale, à moins que des mesures appropriées ne soient prises;

H. considérant que de nombreux travailleurs transfrontières et saisonniers sont rendus particulièrement vulnérables de par leurs conditions de travail et en ce qui concerne la santé et leur sécurité au travail dans le contexte de la crise de COVID-19; considérant que des signalement inquiétants concernant des violations des droits des travailleurs transfrontières et saisonniers concernant leurs conditions de travail et de vie ont été rapportés pendant la crise, notamment sur le temps de travail, les salaires minimums, les licenciements abusifs, les normes de santé et de sécurité sur le lieu de travail, l’absence d’instructions écrites et de panneaux d’affichage sur le lieu de travail, l’absence de transports sûrs et de logements décents répondant aux exigences sanitaires et où les mesures de distanciation sociale peuvent être maintenues, des modes de travail sous haute pression et non adaptés, des modalités de détachement et des pratiques de sous-traitance, le non-respect des restrictions de confinement et de l’aide au rapatriement, et une fourniture insuffisante d’équipements de protection individuelle (EPI); que ces signalements et la crise en général ont mis en évidence et exacerbé la précarité de nombreux travailleurs transfrontières et saisonniers, et démontré qu’il existait des lacunes dans la mise en œuvre et l’application de la législation existante pour leur protection; que nombre de ces travailleurs sont, dans la pratique, dépendants de leur employeur ou de leur agence de travail intérimaire, non seulement pour leurs revenus, mais aussi pour leur logement; qu’ils sont également nombreux à s’être retrouvés dans la rue après avoir été licenciés; qu’en raison de leur vulnérabilité, du manque d’informations ou de la crainte de perdre leurs revenus, leur logement ou leur statut de résident, ces travailleurs peuvent également hésiter à signaler des abus ou à s’absenter s’ils se sentent malades;

I. considérant que les travailleurs indépendants et entrepreneurs transfrontières ont également été durement touchés par la crise; que les actions et mesures prises par les États membres pendant la pandémie de COVID-19 pour compenser financièrement les travailleurs, travailleurs indépendants et entrepreneurs s’adressent principalement au marché du travail national et sont souvent dénuées de dispositions destinées aux travailleurs transfrontières, indépendants ou non;

J. considérant qu’un certain nombre de travailleurs ont été atteints par le coronavirus, et que des décès sont à déplorer dans plusieurs États membres; que l’accès de certains de ces travailleurs à des soins, une attention médicale et des équipements appropriés ainsi qu’à l’assurance santé et sociale était compliqué voire inexistant, même avant la crise; que la connaissance de leurs droits concernant les congés de maladie et l’accès même à ces congés sont également un problème;

K. considérant que l’Autorité européenne du travail a été créée en juillet 2019 dans le but de soutenir les États membres et la Commission dans l’application et le respect effectifs du droit de l’Union en matière de mobilité de la main-d’œuvre et de coordination de la sécurité sociale; que cette Autorité ne devrait atteindre sa pleine capacité opérationnelle que d’ici à 2024;

L. considérant que les organisations de la société civile et les partenaires sociaux ont joué un rôle important dans l’octroi d’aide aux travailleurs pendant la crise, tant dans leur pays d’origine que dans les États membres où ils sont employés;

M. considérant que la grande majorité des travailleurs frontaliers et saisonniers touchés par les effets économiques de la pandémie de COVID-19 n’ont pas encore été en mesure d’accéder à des droits adéquats en matière de protection et de sécurité sociales, du fait d’une mauvaise coordination entre les institutions de sécurité sociale des États membres, situation encore aggravée par la pandémie; que ces travailleurs se sont retrouvés dans des situations où ils ne pouvaient pas nécessairement bénéficier de mesures de soutien temporaire telles que des régimes de chômage partiel, des allocations de chômage adaptées et des mesures visant à faciliter le travail à domicile;

N. considérant que, pendant la crise, certains États membres ont pris des mesures pour remédier aux vulnérabilités que rencontrent les travailleurs migrants transfrontières et saisonniers dans le contexte de la pandémie de COVID-19 et reconnaître leur rôle dans nos sociétés;

O. considérant que les travailleurs frontaliers et les régions frontalières de l’Union ont également été durement touchés par la crise pour ce qui concerne l’emploi, l’accès aux conditions de travail et de télétravail, et qu’ils souffrent de l’insécurité juridique en ce qui concerne les régimes de sécurité sociale et les régimes fiscaux applicables;

P. considérant que le secteur agricole européen offre parfois des revenus inférieurs à la moyenne, pour une durée de temps de travail élevée, qu’il connaît un taux important d’accidents et de maladies et qu’il participe peu aux programmes d’éducation et de formation, en particulier ceux destinés aux travailleurs transfrontières et saisonniers; que les mauvaises conditions de travail dans ce secteur sont l’une des principales causes de la pénurie de main-d’œuvre dans certains États membres;

Q. considérant qu’il n’existe pas de méthode systématique de collecte de données ou de suivi numérique à l’échelle de l’Union permettant de disposer de données fiables sur le nombre total de travailleurs transfrontières et saisonniers touchés ou pour permettre aux travailleurs d’établir facilement et rapidement l’état de leur couverture sociale et de réclamer leurs droits acquis avant le début de la crise; que les municipalités manquent trop souvent d’informations sur les travailleurs transfrontières et saisonniers qui vivent et travaillent sur leur territoire;

R. considérant que la crise risque d’exacerber les problèmes actuels concernant la façon dont certaines agences de recrutement et employeurs locaux traitent les travailleurs transfrontières et saisonniers;

Défendre les droits, garantir la sécurité et faire respecter la législation en vigueur

1. salue les orientations données en permanence par la Commission dans le cadre de l’actuelle coordination pour une réaction commune de l’Union européenne à la pandémie de COVID‑19, notamment en ce qui concerne l’application des principes d’égalité de traitement et de non‑discrimination, ainsi que l’exercice du droit de circulation libre et équitable des travailleurs; souligne que les contrôles aux frontières, les dépistages médicaux et les restrictions en matière de circulation doivent rester proportionnés et exceptionnels, et que la liberté de circulation doit être rétablie dans son intégralité dès que cela sera jugé sûr compte tenu des situations nationales au regard de la COVID‑19; rappelle que le principe d’égalité de traitement ne se limite pas aux seuls travailleurs transfrontières et saisonniers dans les secteurs et professions essentiels mais s’applique à tous les travailleurs qui ont besoin de franchir des frontières intérieures dès lors que les secteurs dans lesquels ils travaillent sont également ouverts aux travailleurs locaux dans l’État membre d’accueil où le travail est exercé; demande aux États membres qui ne l’ont pas encore fait de lever dès que possible toutes les restrictions aux déplacements et toutes les mesures de confinement et de quarantaine discriminatoires pour les travailleurs transfrontières et saisonniers afin d’éviter des pénuries de main‑d’œuvre dans les secteurs essentiels, et dans l’intérêt des travailleurs, tout en garantissant leur santé et leur sécurité;

2. demande à la Commission et aux États membres de prendre des mesures qui garantissent aux travailleurs transfrontières et saisonniers ainsi qu’aux entrepreneurs et travailleurs indépendants transfrontières une protection adaptée contre la COVID‑19 et ses effets, y compris un accès aisé aux tests, ainsi qu’une information sur les risques et les précautions à prendre dans une langue qu’ils comprennent; demande, en outre, des mesures qui garantissent la protection de la santé et de la sécurité de ces travailleurs pendant leurs déplacements et des conditions d’hébergement décentes afin de garantir le respect de la distanciation sociale tant sur les lieux de travail que sur les lieux de résidence, ainsi que des solutions de rapatriement, en cas de nécessité, qui ne soient pas à la charge du travailleur; insiste sur la nécessité du respect de la législation en vigueur relative à l’accès aux droits sociaux, y compris leur transfert; insiste sur la nécessité de ne pas oublier les travailleurs transfrontières et saisonniers qui ont exercé leur droit de libre circulation en tant que citoyens de l’Union;

3. demande à la Commission et aux États membres d’encourager le travail des partenaires sociaux et des organisations de la société civile actives dans le domaine, de manière à ce que tout travailleur bloqué sur leur territoire du fait de la crise ou pour une autre raison ait accès sans délai et de manière adaptée aux services publics, à un soutien syndical, à un hébergement décent, à des équipements de protection individuelle, à des repas et à des soins de santé; se félicite de la participation des partenaires sociaux pour traiter des difficultés propres à chaque secteur en matière de mobilité et de droits des travailleurs transfrontières et saisonniers;

4. demande à la Commission et aux États membres de veiller, dans le contexte de la pandémie de COVID‑19, à l’égalité de traitement entre travailleurs saisonniers ressortissants de pays tiers et travailleurs saisonniers ressortissants de pays membres de l’Union, conformément à la directive 2014/36/UE, étant rappelé que ces travailleurs ressortissants de pays tiers ont les mêmes droits sociaux et du travail que les citoyens de l’Union;

5. demande à la Commission et aux États membres de garantir de toute urgence l’application en bonne et due forme et le respect de la législation européenne en vigueur s’agissant des droits des travailleurs transfrontières et saisonniers, notamment en ce qui concerne le droit à une rémunération identique pour un même travail au même endroit, y compris au moyen d’inspections du travail concertées et communes nationales et transfrontières; insiste sur la nécessité de mesures précises pour garantir avant le départ des travailleurs la bonne compréhension par les travailleurs de leurs contrats, droits et obligations, l’exhaustivité des informations données à leur sujet ainsi qu’un libre accès à ces contrats, droits et obligations, et pour garantir que ces contrats sont mis à la disposition des services de protection du travail compétents pour la zone d’emploi; demande aux États membres d’accroître les capacités des inspections du travail et de donner la priorité aux secteurs où les travailleurs sont exposés à des risques;

6. demande à la Commission de suivre l’application de ses orientations relatives à la libre circulation des travailleurs durant la pandémie de COVID‑19, ainsi que de publier de nouvelles orientations traitant spécifiquement du sujet des travailleurs transfrontières et saisonniers et des entrepreneurs et travailleurs indépendants transfrontières, des employeurs et des États membres dans le cadre de la pandémie de COVID‑19, notamment en ce qui concerne l’exercice du droit de circulation libre et équitable, l’hébergement décent, les conditions de travail et d’emploi obligatoires, ainsi que les obligations en matière de santé et de sécurité, y compris la nécessité de garantir la distanciation sociale durant les déplacements, dans le lieu d’hébergement et sur le lieu de travail, la protection offerte par la sécurité sociale et la coordination en la matière, l’accès aux soins de santé et la dispensation de soins de santé, la mise à disposition d’informations, par exemple des instructions écrites et des notices affichées sur le lieu de travail dans une langue comprise par les travailleurs, ainsi que l’échange de bonnes pratiques en ces matières; souligne la nécessité d’associer pleinement les partenaires sociaux à l’élaboration de ces orientations;

7. demande aux États membres de veiller à la qualité des hébergements des travailleurs transfrontières et saisonniers, qui ne doivent pas être liés à leur rémunération, doivent offrir des aménagements décents et des espaces privés aux locataires, et être loués par contrats écrits, contrôlés par les inspections du travail, ainsi que de fixer des normes en la matière;

8. demande à la Commission de donner la priorité à ce que l’AET devienne pleinement opérationnelle et travaille à apporter des informations pertinentes sur les droits et obligations des personnes en situation de mobilité professionnelle transfrontière, y compris au moyen d’un site internet unique au niveau de l’Union qui ferait office de portail d’accès aux sources d’informations et aux services aux niveaux européen et national; relève le manque de procédures harmonisées pour signaler les violations et les problèmes; demande donc à l’AET de mettre en place, en coordination avec les autorités des États membres compétentes, un dispositif européen au moyen duquel les travailleurs transfrontières pourront signaler anonymement des violations et de mettre en œuvre l’article 8, paragraphe 1, du règlement (UE) 2019/1149 en vue de réaliser des inspections concertées ou communes sur les cas de potentielles violations portés à sa connaissance;

9. demande à la Commission de proposer des solutions de long terme afin de lutter contre les pratiques de sous-traitance abusives et de protéger les travailleurs transfrontières et saisonniers employés tout au long des chaînes de sous-traitance et d’approvisionnement;

Encourager une mobilité juste et renforcer le marché intérieur

10. demande aux États membres et à la Commission de se préparer à d’éventuelles nouvelles vagues de COVID‑19 et demande une fois de plus la coordination des mesures nationales aux frontières et l’élaboration de mesures de sécurité pour les travailleurs mobiles, y compris des abris sûrs; juge nécessaire que des dispositions de mobilité permanente soient mises en place, ce qui suppose la désignation et le maintien de «corridors verts», assortis de mesures de sécurité et la fixation de conditions aux déplacements bien définies et communiquées; insiste, à cet égard, sur le rôle essentiel des autorités régionales et locales ainsi que des institutions transfrontières existantes, y compris dans la tenue et la mise à jour régulière d’un registre de tous les travailleurs transfrontières et saisonniers résidant dans chaque municipalité; insiste sur le fait que la santé et la sécurité de tous les travailleurs et le respect et l’application en bonne et due forme de l’ensemble des conditions de travail en vigueur, compte tenu de la vulnérabilité particulière des travailleurs transfrontières et mobiles durant et après la pandémie de COVID‑19, doivent servir de principes directeurs pour l’adoption de toute mesure de gestion de la crise et de la reprise;

11. rappelle le caractère important et impérieux d’une bonne coopération avec les pays tiers d’où proviennent un nombre élevé de travailleurs transfrontières, tels que les États de l’Espace économique européen (EEE), la Suisse et le Royaume-Uni;

12. insiste sur la nécessité d’une bonne coopération entre les États membres s’agissant du recueil de données relatives aux travailleurs transfrontières et saisonniers afin de réduire les différences entre les pratiques nationales, d’améliorer l’accès aux informations disponibles et de mettre en place un marché du travail intérieur prévisible et accessible; demande à l’AET de jouer un rôle actif dans le recueil et la coordination des données à des fins d’analyse de la mobilité professionnelle et des risques, conformément aux missions qui lui sont imparties dans son règlement fondateur;

13. estime que pour protéger les travailleurs transfrontières et saisonniers, les employeurs ont aussi besoin de règles claires et de sécurité juridique; invite les États membres à réunir et à tenir à jour sur les sites internet de leurs institutions nationales compétentes les informations relatives auxdites règles, y compris les règles concernant la COVID‑19 et les restrictions en matière de déplacements; invite la Commission à réfléchir à la possibilité de créer un portail ou une application mobile qui regrouperait les données des États membres afin d’apporter aux citoyens européens des informations précises et en temps réel sur les restrictions en matière de déplacement, complétées par les possibilités de déplacement et les voies d’accès disponibles en cas de réintroduction partielle ou totale de mesures d’urgence;

14. demande à la Commission et aux États membres de veiller à ce que les travailleurs transfrontières, notamment les travailleurs et les indépendants frontaliers touchés par la crise, dont ceux qui télétravaillent depuis leur pays de résidence, aient accès aux droits en matière de sécurité sociale, aux droits du travail et aux régimes fiscaux en vigueur, et bénéficient d’informations sûres quant à l’autorité compétente pour leur couverture, à ce qu’ils puissent bénéficier des mesures d’activité partielle aux mêmes conditions que les autres employés, et qu’ils ne pâtissent pas de la durée de leur séjour dans leur État membre de résidence du fait de la pandémie en ce qui concerne leurs droits fiscaux ou leurs droits à la sécurité sociale; demande que le temps travaillé en télétravail depuis l’étranger soit considéré comme du temps de travail presté dans le pays d’emploi;

Garantir la résilience, le passage au numérique et la transparence

15. demande à la Commission de lancer de toute urgence une étude des répercussions de la situation générale sur l’emploi et les conditions sanitaires et de sécurité des travailleurs transfrontières et saisonniers, y compris le rôle des agences de travail intérimaire, des agences de recrutement, des autres intermédiaires et des sous-traitants, afin d’identifier les lacunes dans la protection et l’éventuelle nécessité d’une révision du cadre législatif en vigueur, tel que le cadre législatif en matière de santé et de sécurité au travail, la directive 2014/36/UE relative aux travailleurs saisonniers et la directive 2008/104/CE relative au travail intérimaire, ainsi que leur pertinence à l’épreuve de la pandémie; souligne que les leçons tirées ne se révèlent pas seulement valides à l’aune de la crise de la COVID‑19, mais qu’elles appellent en sus un renforcement des prises de décisions fondées sur des données probantes afin de combler les lacunes des législations européennes et nationales, en temps de crise comme en temps ordinaire;

16. souligne qu’il incombe aux États membres de veiller à la stabilité, à la fiabilité et à la résistance aux crises de leurs systèmes de sécurité sociale et que l’Union met en place des règles communes pour protéger les droits en matière de sécurité sociale lors des déplacements intraeuropéens; demande à l’actuelle et aux futures présidences du Conseil, ainsi qu’aux États membres, de dialoguer avec le Parlement pour trouver un accord rapide et équilibré quant à la proposition de révision des règlements (CE) nº 883/2004 et (CE) nº 987/2009 relatifs à la coordination de la sécurité sociale afin d’adopter des règles modernisées et adaptées à leur objet, qui favorisent une mobilité équitable et des protections sociales pour tous les citoyens de l’Union, tout en garantissant une lutte efficace contre la fraude sociale et les violations en lien avec les droits sociaux des travailleurs mobiles; demande aux États membres, à cet égard, de mettre en œuvre de toute urgence toutes les composantes du système d’échange électronique d’informations sur la sécurité sociale afin de garantir une coopération plus efficace entre les institutions de sécurité sociale, ainsi qu’un traitement plus rapide et numérisé des dossiers individuels dans l’intérêt des personnes en situation transfrontière;

17. demande à la Commission de mettre à jour, au regard de la pandémie de COVID‑19, et de promouvoir ses pages internet qui informent sur les droits des travailleurs et sur les législations nationales applicables pour les travailleurs transfrontières et saisonniers, ainsi que sur les autorités nationales et régionales de protection du travail, et de lancer, en coopération avec les États membres, des campagnes d’information et de sensibilisation accessibles à destination des travailleurs transfrontières et saisonniers, auxquelles sont associées les partenaires sociaux et les organisations de la société civile de manière à mieux diffuser ces informations;

18. rappelle l’importance d’une protection en bonne et due forme des lanceurs d’alerte dans les États membres, y compris lorsqu’il s’agit de travailleurs transfrontières et saisonniers; encourage les États membres à aller au-delà des exigences minimales fixées par la directive 2019/1937 pour tous les travailleurs, quel que soit leur statut, et à réfléchir aux moyens d’appliquer leur législation nationale en matière de protection des lanceurs d’alerte aux travailleurs transfrontières ou saisonniers qui signalent des violations; souligne la nécessité de faire figurer dans les contrats de travail de manière transparente les possibilités existantes de signaler des violations et de recevoir un soutien sans craindre de représailles; souligne la nécessité d’assurer l’accès de ces travailleurs aux syndicats et aux organisations de la société civile, y compris dans le pays d’accueil;

19. estime que la mise en place d’un système numérique et dynamique d’identification et d’échange de données entre les États membres pourrait faciliter la lutte contre les violations et les affaires en lien avec les droits des travailleurs transfrontières et saisonniers, ainsi que contre le travail non déclaré, et contribuerait à déterminer les modalités de couverture par le système de sécurité sociale compétent; demande à la Commission, dans ce contexte, de lancer une analyse d’impact exhaustive sur la création d’un numéro de sécurité sociale européen numérique en vue de l’élaboration d’une proposition;

20. demande aux États membres de transposer de manière correcte et ambitieuse et dans les délais prévus la directive révisée relative au détachement de travailleurs, de manière à garantir la pleine égalité de traitement et l’entière protection des travailleurs détachés, et notamment à respecter l’obligation faite, à l’article 3, paragraphe 7, de la directive, à l’employeur de rembourser aux travailleurs détachés les allocations payées à titre de remboursement des dépenses effectivement encourues du fait du détachement, telles que les dépenses de voyage, de logement et de nourriture conformément à la législation et/ou aux pratiques nationales applicables à la relation de travail;

21. affirme nécessaire que la Commission, avec les États membres, remédie à l’absence de dispositions précises pour la création d’agences de travail intérimaire et de recrutement à destination des travailleurs transfrontières et saisonniers dans l’Union; rappelle l’existence de bonnes pratiques suivant lesquelles ces entreprises font l’objet de la délivrance par des services administratifs précis de licences attestant clairement de leur transparence;

22. prie instamment la Commission de veiller à ce que la stratégie «De la ferme à la table» et la révision à venir de la politique agricole commune tiennent compte des travailleurs agricoles en Europe, y compris saisonniers, migrants ou mobiles d’une autre manière;

23. demande à la Commission et aux États membres de remédier, le cas échéant, à la mauvaise image des travailleurs transfrontières et saisonniers; relève qu’il incombe aux États membres d’origine d’apporter à leurs citoyens employés comme travailleurs transfrontières et saisonniers un accès à des informations pertinentes sur les protections sociales et du travail, un soutien en cas d’accident du travail et une aide au rapatriement et à la réintégration, ainsi que de garantir le respect de leurs droits par les agences de recrutement, les sous-traitants et les autres intermédiaires opérant sur leur territoire;

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24 charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, au Conseil européen et à la Commission.

 

Dernière mise à jour: 16 juin 2020
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