PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur le cinquième anniversaire de l’accord de paix en Colombie
26.4.2021 - (2021/2643(RSP))
conformément à l’article 132, paragraphe 2, du règlement intérieur
Jordi Solé, Diana Riba i Giner, Ernest Urtasun, Hannah Neumann, Ignazio Corrao, Bronis Ropė, Benoît Biteau, Francisco Guerreiro
au nom du groupe Verts/ALE
Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B9-0227/2021
B9-0229/2021
Résolution du Parlement européen sur le cinquième anniversaire de l’accord de paix en Colombie
Le Parlement européen,
– vu ses résolutions antérieures sur la Colombie, et notamment sur la situation des droits de l’homme en Colombie, ainsi que les résolutions sur le soutien à divers processus de paix précédents,
– vu «l’accord final visant à mettre fin au conflit armé et à construire une paix stable et durable» entre les Forces armées révolutionnaires de Colombie – Armée populaire (FARC-EP) et le gouvernement national de Colombie, signé le 24 novembre 2016,
– vu l’accord commercial entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la Colombie, le Pérou et l’Équateur, d’autre part[1], signé à Bruxelles le 26 juillet 2012, ainsi que l’accord d’exemption de visa entre l’Union européenne et la Colombie[2], signé le 2 décembre 2015,
– vu la création de la juridiction spéciale pour la paix en Colombie,
– vu la déclaration de la porte-parole du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) du 26 février 2021 sur la Colombie concernant la violence à l’égard des défenseurs des droits de l’homme,
– vu le rapport du Secrétaire général des Nations unies au Conseil de sécurité du 26 mars 2021 sur la mission de vérification des Nations unies en Colombie et la lettre du Secrétaire général des Nations unies au président du Conseil de sécurité du 24 février 2021,
– vu le communiqué de presse du Conseil de sécurité des Nations unies du 28 janvier 2021 sur la Colombie et le communiqué de presse du Conseil de sécurité des Nations unies du 21 janvier 2021 intitulé «Conseil de sécurité: quatre ans après l’Accord qui a mis fin à 50 ans de conflit, la Colombie toujours confrontée à la protection des anciens combattants»,
– vu la déclaration du 21 avril 2021 du représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies pour la Colombie, Carlos Ruiz Massieu,
– vu les communiqués de presse de la mission de vérification des Nations unies en Colombie du 6 avril 2021 sur le rapport trimestriel du Secrétaire général des Nations unies au Conseil de sécurité sur la mission de vérification des Nations unies en Colombie et du 26 mars 2021 sur l’attentat perpétré à Corinto, dans le département de Cauca,
– vu le commentaire de Liz Throssell, porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, du 19 février 2021 sur l’enquête menée par la Colombie sur les «faux positifs» au cours du conflit armé et la déclaration du Bureau des droits de l’homme des Nations unies du 15 décembre 2020 intitulée «Michelle Bachelet exhorte la Colombie à améliorer la protection de la population face à l’augmentation de la violence dans les zones reculées»,
– vu les conclusions de la visite virtuelle de deux jours en Colombie de la vice-secrétaire générale de l’Organisation des Nations unies, Amina Mohammed, le 30 octobre 2020, autour du thème «Les femmes jouent un "rôle moteur" dans la consolidation de la paix»,
– vu la note verbale du 29 janvier 2021 de la mission permanente de la Colombie auprès de l’Office des Nations Unies à Genève au Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme,
– vu le rapport du 8 mai 2020 du Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme sur la situation des droits de l’homme en Colombie,
– vu les observations finales du Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes du 14 mars 2019 concernant le neuvième rapport périodique de la Colombie,
– vu les observations finales du Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale du 22 janvier 2020 concernant les 17e à 19e rapports périodiques combinés de la Colombie,
– vu le prix Nobel de la paix 2016 décerné au président colombien Juan Manuel Santos «pour ses efforts déterminés afin de mettre un terme à la guerre civile qui dure depuis cinquante ans, une guerre civile dévastatrice qui a coûté la vie à au moins 220 000 Colombiens et a entraîné le déplacement de près de six millions de personnes»,
– vu l’accord régional sur l’accès à l’information, la participation du public et la justice en matière environnementale en Amérique latine et dans les Caraïbes, signé à Escazú, au Costa Rica, le 4 mars 2018,
– vu l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,
A. considérant que l’accord final pour la fin du conflit armé et la construction d’une paix stable et durable – l’accord de paix – signé le 24 novembre 2016 entre le gouvernement colombien et les forces armées révolutionnaires de Colombie-Armée populaire (FARC-EP) représente un progrès important dans la construction d’une paix stable, inclusive et durable en Colombie; que l’accord reconnaît toutes les victimes du conflit en tant que victimes, mais aussi et avant tout en tant que citoyens dotés de droits, et notamment du droit à participer à l’établissement de la vérité et à obtenir réparation pour les dommages qu’elles auraient subis dans le cadre du conflit armé, social et politique;
B. considérant que cinq ans après la mise en œuvre de l’accord de paix, la violence en Colombie reste effroyable, avec, par exemple, l’assassinat de dirigeants sociaux ou l’isolement et le déplacement forcé de population; que ce qui représentait une formidable chance historique pour la Colombie s’est soldé par une stagnation inquiétante dans certains domaines clés;
C. considérant que le système de justice transitionnelle établi par l’accord de paix continue de progresser pour apporter vérité, justice et réparation aux victimes de toutes les parties au conflit armé qui a duré des décennies en Colombie, afin qu’un tel conflit ne se reproduise pas; considérant que la juridiction spéciale pour la paix de Colombie, quelques années après sa création, a déjà pris des mesures pour empêcher que les atteintes graves aux droits de l’homme et les abus commis au cours du conflit armé ne restent pas impunis, et pour veiller à ce que les victimes obtiennent des réparations et des indemnisations; que l’instauration d’un dialogue permanent et fluide avec les autorités autochtones est en cours;
D. considérant que la situation reste particulièrement difficile pour les défenseurs de l’environnement et des droits de l’homme, notamment à ceux qui luttent pour défendre les territoires face aux projets du secteur agroindustriel ou des industries extractives; que la Colombie est actuellement le pays le plus dangereux au monde pour tous ceux qui défendent l’environnement, les territoires et les droits de l’homme, 177 de ces militants ayant été assassinés dans ce pays en 2020, soit 53 % de tous les défenseurs de l’environnement et des droits de l’homme tués à travers le monde;
E. considérant que l’impunité reste la règle et que les assassinats sont souvent précédés de campagnes de dénigrement agressives en ligne et hors ligne visant à discréditer le travail des défenseurs de l’environnement et des droits de l’homme; qu’il existe un décalage fondamental entre les responsabilités et les actions des entreprises, des investisseurs, des autorités locales et les droits des communautés, notamment celui d’être informé des nouveaux projets et de les rejeter; que, dans un contexte où le changement climatique et le déclin spectaculaire de la biodiversité constituent une menace sérieuse pour la sécurité alimentaire mondiale et où les communautés autochtones jouent un rôle essentiel dans la gestion durable de la nature, les défenseurs des droits des peuples autochtones sont souvent pris pour cible;
F. considérant que les dirigeantes sociales et les défenseuses de l’environnement et des droits de l’homme sont particulièrement vulnérables à la violence dans le pays, et que les progrès réalisés dans le cadre du programme complet de garanties pour les femmes leaders et les défenseuses des droits humains sont extrêmement limités; qu’en décembre 2020, le Forum spécial sur le genre a signalé que 10 de ses 16 membres n’étaient pas en mesure de remplir leurs fonctions de dirigeants parce qu’ils n’étaient pas protégés et que leur sécurité était menacée;
G. considérant que, conformément au rapport trimestriel du Secrétaire général des Nations unies au Conseil de sécurité sur la mission de vérification des Nations unies en Colombie, cinq priorités se renforçant mutuellement ont été identifiées pour la mise en œuvre complète de l’accord de paix en 2021: assurer la protection et la sécurité des anciens combattants, des communautés touchées par les conflits et des dirigeants sociaux; garantir la viabilité du processus de réintégration; renforcer la présence intégrée de l’État dans les zones touchées par les conflits; renforcer le dialogue constructif entre les parties; et renforcer les conditions de réconciliation;
H. considérant que les anciens combattants doivent constamment déménager pour préserver leur sécurité et que leurs proches sont également menacés, surtout leurs partenaires et leurs enfants, qui ne bénéficient d’aucune protection particulière; que 262 anciens combattants, dont sept femmes, ont été tués depuis la conclusion de l’accord de paix, et que 59 tentatives de meurtre et 21 disparitions ont par ailleurs été enregistrées; que les jeunes anciens combattants et les jeunes membres des communautés touchées par les conflits sont encore fréquemment victimes de violences et que, depuis la conclusion de l’accord de paix, 18 % des anciens combattants tués avaient moins de 29 ans;
I. considérant qu’en janvier 2021, la juridiction spéciale pour la paix a une nouvelle fois sommé le conseiller présidentiel pour la stabilisation et la consolidation, en tant que président du comité technique pour la sécurité et la protection, de présenter le plan stratégique pour la sécurité et la protection des anciens combattants et qu’elle s’est déclarée préoccupée par le fait que les mesures prises par le gouvernement et les organismes étatiques dans ce domaine étaient insuffisantes et mal coordonnées; que le conseiller présidentiel pour la stabilisation et la consolidation a présenté ce plan stratégique à la sous-direction de l’unité nationale de protection en mars 2021, donnant ainsi au parti politique Comunes la possibilité de formuler des observations;
J. considérant que les femmes anciennes combattantes des FARC-EP et membres du parti Comunes continuent de craindre pour leur sécurité; que des commissions ont été mises en place pour formuler des recommandations sur les questions spécifiques aux femmes dans le cadre des mécanismes de garantie de sécurité prévus par l’accord de paix; que ces commissions sont essentielles pour faire face aux dangers auxquels les femmes sont confrontées et pour renforcer les capacités des institutions publiques à lutter contre les risques qui touchent plus particulièrement les femmes;
K. considérant que la concentration des violences dans certaines régions s’explique par une présence limitée de l’État, et notamment le manque de services sociaux publics, une perte de confiance entre les communautés et les institutions, des niveaux élevés de pauvreté et la prolifération de groupes armés illégaux et d’organisations criminelles qui cherchent à prendre le contrôle des économies souterraines par la force;
L. considérant que la réponse du gouvernement colombien aux problèmes de sécurité rencontrés par les anciens combattants consiste principalement à militariser les territoires concernés et à déployer de manière préventive des forces armées et policières autour des anciennes zones territoriales de formation et de réintégration; que la sécurité en dehors des anciennes zones territoriales reste un problème;
M. considérant que les liens politiques de dialogue qui unissent l’Union européenne et la Colombie se fondent sur le respect mutuel dans le cadre du protocole d’accord du 28 novembre 2009 et sur l’existence, depuis 2009, d’un dialogue politique spécialisé en matière de droits de l’homme; qu’il existe, depuis 2013, entre l’Union européenne et la Colombie un cadre de coopération politique, économique et commerciale étroite créé par l’accord commercial entre la Colombie et le Pérou, d’une part, et l’Union européenne et ses États membres, d’autre part, qui comprend une disposition sur les droits de l’homme (article 1er) et, en particulier, un chapitre sur le commerce et le développement durable;
N. considérant le rôle clé de la société civile en faveur de la paix, qui regroupe des associations de défense des droits de l’homme, des associations de femmes, des communautés paysannes, des communautés afro-colombiennes et des populations autochtones, lesquelles ont lancé de multiples initiatives et propositions au niveau local, régional et national;
1. exprime son ferme soutien à la mise en œuvre de l’accord de paix et à l’instauration d’une paix stable et durable en Colombie; souligne que la réussite de la mise en œuvre de l’accord de paix est une priorité majeure non seulement pour la Colombie, mais aussi pour l’Union européenne et la communauté internationale dans son ensemble;
2. condamne avec la plus grande fermeté toutes les souffrances causées par les conflits et souligne que la mise en œuvre intégrale de l’accord de paix constituerait une étape importante pour garantir aux victimes des conflits le droit à une réparation complète, réelle et équitable des préjudices physiques, moraux et matériels qu’elles ont subis et pour s’assurer que de tels événements ne se reproduisent jamais;
3. salue l’effort politique gigantesque, le réalisme et la persévérance dont ont fait preuve le gouvernement colombien et les FARC-EP pour rapprocher leurs points de vue antagonistes et parvenir progressivement à un compromis qui a permis d’aboutir à l’accord de paix;
4. exprime son inquiétude face aux défis considérables que pose la protection des droits de l’homme en Colombie et est consterné par le niveau extrêmement élevé de violence dans le pays, qui a enregistré 53 % des assassinats de défenseurs de l’environnement et des droits de l’homme dans le monde en 2020;
5. réitère son appel en faveur du respect total et permanent des droits de l’homme par le système politique colombien et ses institutions et demande la protection de tous ceux qui défendent les droits de l’homme en Colombie, ainsi que le respect du droit à la liberté d’association et de manifestation pacifique;
6. rappelle que la Colombie est le deuxième pays le plus riche en biodiversité au monde; est consterné par le fait que les défenseurs de l’environnement font actuellement l’objet de discriminations, de déplacements forcés et d’attaques violentes, y compris de nombreux assassinats, pour le seul motif qu’ils défendent pacifiquement l’environnement; est particulièrement préoccupé par l’insécurité extrême à laquelle sont confrontés les défenseurs de l’environnement et leurs familles, notamment pendant la pandémie de COVID-19, au cours de laquelle les mesures gouvernementales n’ont pas eu d’impact positif sur leur vie et leur bien-être; demande au gouvernement colombien de fournir d’urgence une protection aux défenseurs de l’environnement et de ratifier l’accord Escazú à cette fin; invite la Commission, en particulier, à lancer un programme d’appui à l’accord d’Escazú, qui viserait entre autres à aider la Colombie à ratifier et à mettre en œuvre cet accord, à aider la société civile à s’engager en faveur de l’accord et à contribuer à sa mise en œuvre, et à fournir un soutien au Fonds de contributions volontaires établi au titre de cet accord;
7. regrette que la réponse du gouvernement colombien aux problèmes de sécurité rencontrés par les dirigeants sociaux, les défenseurs de l’environnement et des droits de l’homme, les anciens combattants et, plus généralement, la population locale, consiste principalement à militariser les territoires concernés et à déployer de manière préventive des forces armées et policières autour des anciennes zones territoriales de formation et de réintégration; dans ce contexte, demande au gouvernement colombien d’intensifier le dialogue avec les communautés locales et de prendre des mesures urgentes pour éviter de nouvelles victimes, notamment en appliquant les programmes de développement prévus dans l’accord de paix, comme les plans de développement à dimension territoriale (PDET) et le programme national de substitution des cultures illicites (PNIS), qui devraient accorder la priorité à la présence d’institutions publiques civiles dans les territoires concernés plutôt qu’à la militarisation croissante de ceux-ci;
8. souligne que la présence limitée de l’État dans certaines régions du pays, qui s’est prolongée et a été favorisée par le conflit vieux de plusieurs décennies, combinée à une perte de confiance entre les communautés et les institutions, a contribué à la persistance de la violence; souligne que l’accord de paix, grâce à ses différents programmes, rassemble aujourd’hui les communautés et les institutions pour promouvoir la paix et le développement et l’état de droit, en particulier dans les régions qui ont été touchées par le conflit dans le passé;
9. prie l’Armée de libération nationale (ELN) de mettre fin aux conflits et aux abus, et de s’engager sans plus tarder, de manière ferme et résolue, en faveur de la paix en Colombie; exhorte l’ELN à engager des négociations avec le gouvernement colombien selon le même calendrier et les mêmes principes que celles auxquelles participent les FARC-EP;
10. soutien sans réserve le système de justice transitionnelle ainsi que le mandat et les travaux des trois composantes du système intégré pour la vérité, la justice, la réparation et la non-répétition, qui sont confrontés non seulement aux défis inhérents à leurs mandats complexes, mais aussi aux actions d’acteurs armés illégaux qui entravent leur importante mission; se félicite de toutes les mesures prises par les trois composantes du système intégré visant à bâtir un avenir axé sur la consolidation de la paix; invite le vice-président de la Commission/haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR), le SEAE et les États membres à continuer d’exprimer leur soutien aux travaux de la juridiction spéciale pour la paix, de l’unité de recherche des personnes disparues et de la commission de la vérité, et à encourager leurs efforts concertés, malgré les nombreuses difficultés auxquelles elles sont confrontées; demeure néanmoins préoccupé par les retards dans la mise en œuvre de la législation et la réforme du système judiciaire qui ont été convenues, y compris dans ce qui est relatif à l’accord de paix et à la JEP;
11. souligne l’importance du rôle joué par l’unité d’enquête spéciale du bureau du procureur général dans la poursuite des auteurs et des instigateurs de crimes contre les anciens combattants et les dirigeants sociaux, dans la lutte contre l’impunité et dans la prévention de toute récidive; invite le gouvernement colombien et le bureau du procureur général à veiller à ce que l’unité reçoive le soutien et les ressources dont elle a besoin pour mener à bien son mandat, y compris des capacités supplémentaires au niveau local;
12. regrette que l’accord de paix ne soit généralement pas mis en œuvre de manière satisfaisante; ce qui accentue les divisions politiques et sociales qui existent dans le pays; exhorte le gouvernement colombien à accélérer et à considérer comme prioritaire la mise en œuvre de tous les chapitres de l’accord; constate avec inquiétude qu’environ 30 % seulement des dispositions de l’accord de paix ont été appliquées jusqu’à présent et que la mise en œuvre de 20 % d’entre elles n’a pas encore commencé;
13. invite le VP/HR, l’envoyé spécial pour la paix en Colombie, le SEAE et les États membres à maintenir la pression sur le gouvernement colombien et à insister pour que l’accord de paix soit pleinement mis en œuvre, que des progrès soient réalisés dans l’enquête sur les structures criminelles responsables des attaques contre les dirigeants sociaux et les défenseurs des droits de l’homme, et que des garanties et des mesures de sécurité préventives soient mises en place, notamment en veillant à ce que le mandat de la commission nationale de sécurité et de l’unité spéciale d’enquête sur le démantèlement des organisations paramilitaires qui ont pris la relève de la lutte armée soit exécuté;
14. réitère son ferme soutien à tous les défenseurs des droits de l’homme et de l’environnement en Colombie, ainsi qu’à leur travail; invite la délégation de l’Union et les représentations des États membres dans le pays à renforcer leur soutien à la société civile dans leurs relations avec les autorités colombiennes, à utiliser tous les instruments disponibles pour accroître leur soutien au travail des défenseurs des droits de l’homme et de l’environnement et, le cas échéant, à faciliter la délivrance de visas d’urgence et à fournir un refuge temporaire dans les États membres de l’Union;
15. se déclare préoccupé par la lenteur de la mise en œuvre de l’accord de paix, notamment en ce qui concerne ses aspects socio-économiques, y compris l’important chapitre sur la réforme rurale intégrale, dont les dispositions affichent le taux de mise en œuvre le plus faible de tous les chapitres – à peine 4 % en cinq ans; est également préoccupé par l’absence générale de progrès dans l’adoption des politiques publiques et de législation visant à démanteler les groupes armés illégaux, les organisations criminelles et leurs réseaux de soutien;
16. se déclare particulièrement inquiet par la reprise des épandages aériens d’herbicide à base de glyphosate sur les cultures illicites et met en garde contre les risques particulièrement élevés de la fumigation au glyphosate pour la santé et l’environnement; souligne, en outre, que la fumigation au glyphosate constitue une violation de l’accord de paix; rappelle qu’en 2014, la Cour constitutionnelle colombienne a ordonné la suspension des épandages aériens après que l’Organisation mondiale de la santé a désigné le glyphosate comme un herbicide susceptible de provoquer des cancers chez l’homme; souligne que l’utilisation du glyphosate a des effets majeurs sur l’ensemble de l’agriculture, et pas seulement sur les champs de coca, étant donné que les pesticides s’infiltrent dans le sol et dans les nappes phréatiques; souligne que ses nombreux effets néfastes sur la santé humaine, conjugués à la perte dévastatrice de cultures vivrières et de moyens de subsistance, peuvent déclencher une crise humanitaire touchant de nombreux agriculteurs, et pas seulement les cultivateurs de coca, et provoquer de nouveaux déplacements, les familles étant dans l’impossibilité d’installer des cultures vivrières sur des sols contaminés;
17. est particulièrement consterné par le fait que seule une très petite partie de toutes les initiatives visant les femmes et les groupes ethniques ont été effectivement mises en œuvre, puisque seulement 10 % des politiques visant les femmes ont été menées à bien et que 80 % des initiatives visant les groupes ethniques n’ont enregistré que des progrès minimes;
18. souligne que les violences sexistes sont un fléau persistant qui entrave le travail important des défenseuses de l’environnement et des droits de l’homme, le travail des femmes dirigeantes sociales, la réintégration des anciennes combattantes et la dignité des femmes colombiennes en général; déplore le fait que, malgré les efforts institutionnels, les autorités locales se concentrent encore souvent sur la médiation entre les victimes et les auteurs, ce qui a pour effet de priver les victimes du soutien global dont elles ont besoin, y compris de l’accès à la justice, et de normaliser la violence au sein de ces communautés; souligne que l’application du plan d’action dans le cadre du programme complet de garanties pour les femmes leaders et les défenseuses des droits humains est primordiale pour que les dirigeantes sociales et les défenseuses des droits de l’homme puissent continuer à jouer un rôle clé dans la consolidation de la paix; est préoccupé par le fait que les personnes LGBTI continuent de rencontrer des difficultés pour accéder aux services liés aux violences sexuelles et sexistes en raison de la stigmatisation et de la discrimination;
19. est préoccupé par le fait que les communautés ethniques restent confrontées à de graves problèmes de sécurité dans plusieurs régions, notamment à des violences à l’encontre de dirigeants de communautés autochtones et afro-colombiennes, de défenseurs des droits de l’homme et de l’environnement, ainsi que d’anciens combattants; souligne que, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies, dans le seul département de Chocó, les groupes armés illégaux ont privé 9 352 personnes de leur liberté et forcé 486 autres à se déplacer; est consterné par le fait que les mines antipersonnel sont toujours utilisées, ce qui affecte tout particulièrement les populations autochtones d’Emberá sur leurs territoires;
20. se déclare particulièrement préoccupé par la situation de la communauté autochtone d’Awá et par les actes violents auxquels sa population a été soumise dans le département de Nariño, situation qui s’est encore aggravée au cours de la pandémie de COVID-19; rappelle que les Awá sont mentionnés dans le chapitre de l’accord de paix traitant des groupes ethniques comme un groupe ethnique dont les droits doivent être protégés en priorité; demande, par conséquent, que la sécurité du peuple Awá soit renforcée et invite le gouvernement colombien à réaliser les investissements sociaux dont la côte Pacifique du département de Nariño a urgemment besoin, en particulier au profit des communautés autochtones, et à se conformer aux ordonnances 620/2017, 174/2011 et 004/2009 de la Cour constitutionnelle, qui reconnaissent à maintes reprises que le peuple autochtone Awá fait partie des peuples dont l’existence est en danger et menacée.
21. invite le SEAE et les États membres à soutenir en priorité, notamment financièrement, les actions visant à promouvoir la mise en œuvre de l’accord de paix, en accordant une attention particulière à la dimension de genre et à l’inclusion des populations autochtones, des communautés rurales et des communautés afro-colombiennes; exhorte le gouvernement colombien à renforcer d’urgence ses capacités institutionnelles en matière d’égalité des genres et d’inclusion des populations autochtones, des communautés rurales et des communautés afro-colombiennes, notamment en adoptant et en mettant en œuvre une stratégie spécifique de protection des anciennes combattantes, dans le cadre de la politique nationale de réintégration, afin de faire face aux risques distinctifs de sécurité auxquels ce groupe est confronté;
22. prie instamment le gouvernement colombien de coopérer pleinement et sérieusement avec les différents mécanismes des Nations unies afin d’atténuer la crise grave et persistante des droits de l’homme et d’accélérer la mise en œuvre des recommandations formulées par le rapporteur spécial des Nations unies à la suite de sa visite dans le pays en 2019, ainsi que par l’Union européenne et ses États membres, à l’occasion du dernier examen périodique universel;
23. réaffirme sa volonté de fournir toute l’aide possible pour soutenir la mise en œuvre de l’accord de paix final; réitère son appel au SEAE et aux États membres pour qu’ils garantissent un financement suffisant et transparent à cet égard, notamment par le biais de l’instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale (IVCDCI), et pour qu’ils accompagnent la phase d’après-conflit en garantissant des évaluations ex ante de l’impact sur les droits de l’homme, le contrôle parlementaire, la responsabilité et la participation des organisations de la société civile; souligne la nécessité pour les communautés locales et les organisations de la société civile d’avoir un accès direct à ce financement afin de pouvoir agir dans les domaines politiques prioritaires identifiés par les victimes et d’œuvrer en faveur de la vérité, de la justice et de la réparation et de veiller à ce que ces événements ne se reproduisent pas, afin de construire une paix stable et durable; demande une nouvelle fois à la Commission de veiller à ce que le Parlement européen soit pleinement associé au contrôle des fonds destinés à la Colombie et au processus de paix;
24. demande instamment à l’Union européenne et à ses États membres de prendre l’initiative de mettre en place un mécanisme de suivi et de rapport attendu de longue date sur les violations graves des droits de l’homme et sur l’accord de paix, lors de la prochaine session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, du Conseil de sécurité des Nations unies et d’autres enceintes politiques multilatérales; prie l’Union européenne et ses États membres de proposer une observation internationale de la mise en œuvre de l’accord de paix; souhaite le renouvellement du mandat de l’envoyé spécial pour le processus de paix en Colombie;
25. souligne que le dialogue entre les parties sur les questions politiques et techniques est essentiel pour surmonter les difficultés existantes alors que l’accord de paix entre dans sa cinquième année de mise en œuvre; invite les parties à l’accord à continuer de faire preuve d’un engagement résolu et à œuvrer de concert afin de réaliser des progrès dans la mise en œuvre; admire la résilience des Colombiens dans les zones touchées par le conflit, qui attendent toujours que la promesse de paix soit tenue;
26. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aux gouvernements et aux parlements des États membres, à l’Assemblée parlementaire euro-latino-américaine, ainsi qu’au gouvernement et au Congrès de la République de Colombie.