PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la crise de l'état de droit en Pologne et la primauté du droit de l'Union
19.10.2021 - (2021/2935(RSP))
conformément à l’article 132, paragraphe 2, du règlement intérieur
Ryszard Antoni Legutko, Mazaly Aguilar, Adam Bielan, Joachim Stanisław Brudziński, Jorge Buxadé Villalba, Ryszard Czarnecki, Margarita de la Pisa Carrión, Carlo Fidanza, Raffaele Fitto, Anna Fotyga, Michiel Hoogeveen, Ladislav Ilčić, Patryk Jaki, Krzysztof Jurgiel, Karol Karski, Beata Kempa, Izabela-Helena Kloc, Joanna Kopcińska, Zdzisław Krasnodębski, Elżbieta Kruk, Zbigniew Kuźmiuk, Beata Mazurek, Andżelika Anna Możdżanowska, Tomasz Piotr Poręba, Elżbieta Rafalska, Rob Rooken, Robert Roos, Bogdan Rzońca, Jacek Saryusz-Wolski, Raffaele Stancanelli, Beata Szydło, Dominik Tarczyński, Hermann Tertsch, Grzegorz Tobiszowski, Valdemar Tomaševski, Evžen Tošenovský, Witold Jan Waszczykowski, Jadwiga Wiśniewska, Jan Zahradil, Anna Zalewska, Roberts Zīle, Kosma Złotowski
au nom du groupe ECR
B9-0539/2021
Résolution du Parlement européen sur la crise de l'état de droit en Pologne et la primauté du droit de l'Union
Le Parlement européen,
– vu les articles 2, 5, 7 et 19 du traité sur l’Union européenne (traité UE),
– vu l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,
A. considérant que, le 7 octobre 2021, le Tribunal constitutionnel polonais a rendu un arrêt dans l’affaire K 3/21, dans lequel il indique que certaines interprétations de dispositions du traité UE allant dans le sens d’une primauté du droit international sur la Constitution polonaise, loi suprême de ce pays, violent la Constitution;
B. considérant que, le 12 octobre 2021, cet arrêt a été publié au Dziennik Ustaw, le journal officiel polonais, ce qui le rend obligatoire dans l’ordre juridique polonais;
C. considérant que, depuis 2005, le Tribunal constitutionnel polonais a indiqué à de nombreuses reprises que la primauté du droit constitutionnel sur d’autres sources du droit découlait directement de la Constitution polonaise; que ces arrêts ont été rendus par diverses formations du Tribunal constitutionnel dont les membres ont été élus parmi toutes les composantes politiques depuis l’adhésion de la Pologne à l’Union européenne;
D. considérant que, dès 2005, le Tribunal constitutionnel, présidé par le juge Marek Safjan, a défini le principe selon lequel «la Constitution est la loi suprême de la République de Pologne au regard de tous les accords internationaux qui la lient, y compris les accords de transfert de compétence dans certains domaines», et selon lequel «la Constitution bénéficie de la primauté en matière de validité et d’application sur le territoire de la Pologne»[1];
E. considérant que ce principe a été réaffirmé dans des arrêts ultérieurs du Tribunal constitutionnel, notamment l’arrêt du 19 décembre 2006 (P 37/05), qui déclare que «le Tribunal constitutionnel est tenu de considérer sa fonction de telle sorte que, dans les questions d’importance fondamentale et qui sont systémiques par nature, elle conserve la fonction de "court de dernier ressort" à l’égard de la Constitution polonaise», et l’arrêt du 24 novembre 2010 (K 32/09), qui indique que «le transfert de compétences à l’Union européenne ne peut pas violer le principe de suprématie de la Constitution et ne peut violer aucune disposition de la Constitution»;
F. considérant que les cours constitutionnelles de divers États membres de l’Union ont examiné la constitutionnalité du droit de l’Union à de nombreuses reprises et ont déclaré à de nombreuses occasions que les constitutions nationales primaient sur le droit de l’Union; que la Cour constitutionnelle fédérale allemande, la Cour constitutionnelle italienne, la Cour constitutionnelle tchèque et la Cour suprême danoise, notamment, ont estimé que le droit de l’Union et les activités de la Cour de justice de l’Union européenne pouvaient faire l’objet d’un examen par rapport aux normes constitutionnelles, y compris celles qui définissent les limites des compétences transférées à l’Union européenne par un État membre donné;
1. souligne que l’arrêt du Tribunal constitutionnel polonais du 7 octobre 2021 est conforme à la jurisprudence antérieure de ce Tribunal et de nombreux autres cours et tribunaux constitutionnels d’Europe;
2. estime que la Pologne a respecté les normes contraignantes du droit de l’Union dans la mesure où elles relèvent de domaines expressément et explicitement conférés à l’Union européenne par les traités;
3. souligne que l’arrêt n’affecte aucun domaine dans lequel l’Union européenne dispose de compétences qui lui ont été explicitement et littéralement conférées par les traités de l’Union;
4. estime que l’examen de la conformité du droit de l’Union à l’égard des constitutions nationales est une pratique ordinaire en Europe et que ce seul fait limite l’application du principe de primauté du droit de l’Union sur le droit national;
5. souligne que, de par leur fonction, les cours constitutionnelles des États membres sont légitimement les «gardiennes des constitutions» et qu’en dernier recours, c’est à la cour constitutionnelle qu’il revient de statuer sur la légalité et l’applicabilité des normes sur un territoire donné;
6. souligne qu’en vertu des traités, l’Union européenne n’est pas une superpuissance, mais une alliance d’États souverains;
7. fait observer que les arrêts des cours et tribunaux d’autres pays n’ont pas marqué le début d’un processus visant à quitter l’Union, ces arrêts ne faisant que souligner la primauté des constitutions nationales dans des domaines où l’Union ne dispose pas de compétences conférées par les États membres;
8. regrette que l’arrêt soit parfois décrit par ses opposants comme la preuve du souhait de la Pologne de quitter l’Union européenne;
9. charge son Président de transmettre la présente résolution à la Commission, au Conseil, ainsi qu’aux gouvernements et aux parlements des États membres.
- [1] Arrêt du 11 mai 2005 dans l’affaire K 18/04.