Proposition de résolution - B9-0257/2022Proposition de résolution
B9-0257/2022

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur les menaces pour la stabilité, la sécurité et la démocratie en Afrique occidentale et sahélienne

2.5.2022 - (2022/2650(RSP))

déposée à la suite d’une déclaration du vice-président de la Commission/haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité
conformément à l’article 132, paragraphe 2, du règlement intérieur

Jan‑Christoph Oetjen, Petras Auštrevičius, Nicola Beer, Dita Charanzová, Olivier Chastel, Bernard Guetta, Ilhan Kyuchyuk, Nathalie Loiseau, Javier Nart, Urmas Paet, Dragoş Pîslaru, Frédérique Ries, María Soraya Rodríguez Ramos, Nicolae Ştefănuță, Dragoş Tudorache, Hilde Vautmans
au nom du groupe Renew

Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B9-0257/2022

Procédure : 2022/2650(RSP)
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B9-0257/2022
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B9‑0257/2022

Résolution du Parlement européen sur les menaces pour la stabilité, la sécurité et la démocratie en Afrique occidentale et sahélienne

(2022/2650(RSP))

Le Parlement européen,

 vu sa résolution du 16 septembre 2020 sur la coopération UE-Afrique en matière de sécurité dans la région du Sahel, l’Afrique de l’Ouest et la Corne de l’Afrique[1], et sa résolution du 25 mars 2021 intitulée «Une nouvelle stratégie UE-Afrique – un partenariat pour un développement durable et inclusif»[2],

 vu sa résolution du 20 mai 2021 sur la situation au Tchad[3],

 vu sa résolution du 25 novembre 2021 sur les violations des droits de l’homme commises par des entreprises militaires et de sécurité privées, en particulier le groupe Wagner[4],

 vu ses résolutions du Parlement européen du 17 février 2022 sur la mise en œuvre de la politique de sécurité et de défense commune – rapport annuel 2021[5] et sur la mise en œuvre de la politique étrangère et de sécurité commune – rapport annuel 2021[6],

 vu sa résolution du 1er mars 2022 sur l’agression russe contre l’Ukraine[7],

 vu la 41e session de l’Assemblée parlementaire paritaire du groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) et de l’Union européenne (UE), qui s’est tenue à Strasbourg (France) du 1er au 3 avril 2022,

 vu la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948,

 vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966,

 vu le protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO),

 vu l’acte constitutif de l’Union africaine,

 vu la charte africaine des droits de l’homme et des peuples,

 vu la charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance,

 vu l’accord de partenariat entre les membres du groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d’une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d’autre part, signé à Cotonou le 23 juin 2000 (accord de Cotonou)[8], dans sa rédaction modifiée en 2005 et 2010[9],

 vu le programme de développement durable à l’horizon 2030 et les objectifs de développement durable des Nations unies, notamment l’objectif nº 16 visant à promouvoir l’avènement de sociétés justes, pacifiques et ouvertes à tous aux fins du développement durable,

 vu la communication conjointe de la Commission et du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité du 9 mars 2020 intitulée «Vers une stratégie globale avec l’Afrique» (JOIN(2020)0004),

 vu la stratégie pour la sécurité et le développement du Groupe des cinq pays du Sahel (G5 Sahel) de septembre 2016, le cadre d’actions prioritaires intégré de février 2020, l’alliance Sahel et le partenariat pour la sécurité et la stabilité au Sahel,

 vu la déclaration conjointe du 28 avril 2020 des membres du Conseil européen avec les États membres du G5 Sahel du 28 avril 2020,

 vu le communiqué commun de la deuxième réunion des ministres des affaires étrangères de l’Union africaine (UA) et de l’Union européenne (UE) des 25 et 26 octobre 2021,

 vu la conférence sur le Sahel organisée le 17 février 2022 à Paris,

 vu la déclaration conjointe du sixième sommet UA-UE des 17 et 18 février 2022,

 vu les conclusions du Conseil du 21 février 2022 prolongeant et renforçant la mise en œuvre du concept de présences maritimes coordonnées dans le golfe de Guinée,

 vu la résolution 2590 (2021) du 30 août 2021 du Conseil de sécurité des Nations unies sur la reconduction des sanctions découlant de la résolution 2374 (2017) du Conseil de sécurité et sur la prorogation jusqu’au 30 septembre 2022 du mandat du groupe d’experts sur le Mali,

 vu la résolution 2250 (2015) du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies du 9 décembre 2015 sur le maintien de la paix et de la sécurité,

 vu le rapport du 11 novembre 2021 du Secrétaire général du Conseil de sécurité des Nations unies sur la force conjointe du groupe des cinq pays du Sahel,

 vu la résolution ES-11/1 de l'Assemblée générale des Nations unies du 1er mars 2022 sur l’agression contre l’Ukraine, 

 vu le programme des Nations unies pour les femmes, la paix et la sécurité,

 vu le communiqué du Conseil de paix et de sécurité de l’UA, tenue le 31 janvier 2022, sur la situation au Burkina Faso,

 vu la communication du président de la Commission de l’UA du 6 août 2021 suite aux attaques terroristes contre le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Tchad,

 vu la communication du président de la Commission de l’UA du 24 janvier 2022 sur la situation au Burkina Faso,

 vu le sommet extraordinaire de la conférence des chefs d’État ou de gouvernement de la CEDEAO du 3 février 2022, consacré à la situation politique au Burkina Faso, en Guinée et au Mali,

 vu la déclaration du vice-président de la Commission/haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, du 26 janvier 2022 sur le Burkina Faso,

 vu la résolution de l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE du 21 juin 2017 sur la situation sécuritaire dans la région sahélo-saharienne,

 vu les résolutions de l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE du 11 mars 2021 sur la démocratie et le respect des constitutions dans l’Union et les pays ACP, du 28 septembre 2021 sur le rôle des parlements dans le renforcement de la sécurité internationale et du 21 novembre 2019 sur l’incidence des médias sociaux sur la gouvernance, le développement, la démocratie et la stabilité,

 vu l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,

A. considérant que le Sahel et l’Afrique de l’Ouest jouent un rôle central dans la sécurité et la stabilité de l’ensemble du continent africain; que la situation sécuritaire dans ces régions s’est gravement détériorée ces dernières années, ce qui constitue une menace pour la sécurité régionale et internationale; que la sécurité de l’Europe et celle de l’Afrique sont étroitement liées; que la violence au Sahel ne cesse de croître depuis la chute du régime de Kadhafi en Libye en 2011 et qu’il s’agit en conséquence de l’une des régions les plus touchées par la prolifération des armes de petit calibre illicites; que le Sahel est l’une des régions les plus pauvres du monde;

B. considérant qu’en 2013, à la demande du gouvernement malien, l’armée française a lancé l’opération Serval pour chasser les groupes djihadistes et d’autres groupes rebelles armés du nord du Mali qui avaient entamé une offensive vers le centre du pays; que l’armée française a atteint avec succès l’objectif d’éviter que le Mali ne soit dépassé par ces militants et rebelles violents et armés;

C. considérant que de nombreuses missions internationales ont été lancées ces dernières années, notamment la mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali en 2013, la mission de l’Union européenne visant au renforcement des capacités au Niger en 2012, la mission de formation de l’Union européenne au Mali en 2013, la mission de l’Union européenne visant au renforcement des capacités au Mali en 2014, l’opération Barkhane en 2014, le G5 Sahel en 2014, la force conjointe du G5 Sahel en 2017, l’alliance Sahel en 2017, la coalition pour le Sahel en 2020 et la task force Takuba en 2020; qu’au cours de la dernière décennie, les institutions africaines de sécurité ont déployé des milliers de personnes dans des opérations de paix sur le continent;

D. considérant que plus de 200 membres de la force de maintien de la paix des Nations unies et plus de 50 militaires français des missions Serval et Barkhane, ainsi que de nombreux soldats africains, ont été tués au combat pour assurer la sécurité dans la région du Sahel; que de nombreux soldats européens et de l’ONU déployés dans la région ont été blessés;

E. considérant que malgré les nombreux efforts de maintien de la paix des pays du Sahel et de la communauté internationale, la situation dans la région reste très instable (PPE G); que des groupes terroristes, y compris les terroristes islamistes affiliés à l'EIIL/Daech, tels que Boko Haram, ont renforcé leur présence dans la région du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest et sont responsables de massacres, de tortures, de violences sexuelles, de disparitions forcées, de pillages et de déplacements forcés; que, selon le Centre d’études stratégiques de l’Afrique, l’année 2020 a connu une hausse sensible du nombre de meurtres attribués, entre autres, à la violence islamiste, comme en attestent les 4 250 décès signalés; qu’il y a actuellement quelque 3 millions de déplacés internes dans la région du Sahel;

F. considérant que les besoins humanitaires augmentent en raison des différentes crises qui s’entremêlent; que 20 millions de personnes nécessitent actuellement une aide humanitaire d’urgence au Sahel central; que les femmes et les enfants sont particulièrement vulnérables et sont les premières victimes de la crise;

G. considérant que les terroristes, les groupes armés, les milices et les trafiquants instrumentalisent un ensemble de difficultés complexes et cumulées dans la région, notamment la pauvreté, le manque d’accès aux services sociaux de base, l’insécurité alimentaire, la déforestation, la dégradation de l’environnement, la faiblesse des institutions, la corruption et le manque de confiance dans l’État;

H. considérant que la région est à l’heure actuelle durement touchée par les effets du changement climatique; que cela peut entraîner une nouvelle déstabilisation; que la marginalisation économique, sociale et environnementale engendre un risque sérieux de radicalisation en Afrique de l’Ouest et au Sahel;

I. considérant que la charge de la dette contribue à menacer la stabilité globale des pays de la région du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest;

J. considérant que les problèmes en matière de sécurité ont été exacerbés par la pandémie de COVID-19;

K. considérant que la consolidation de la démocratie en Afrique de l’Ouest et au Sahel est encore davantage fragilisée par les coups d’État militaires, les modifications constitutionnelles sur mesure, la répression des manifestations populaires, les restrictions relatives à la liberté de réunion, d’expression et de la presse, ainsi que les restrictions imposées aux partis et aux responsables politiques d’opposition;

L. considérant que les problèmes de sécurité accrus et que le mécontentement des citoyens à l’égard des gouvernements et de la communauté internationale ont conduit à un certain nombre de manifestations publiques exigeant davantage de réformes gouvernementales et une amélioration de la situation en matière de sécurité; que les accusations de corruption et de népotisme à l’encontre des autorités gouvernementales régionales ne sont pas un phénomène nouveau et ont entraîné une baisse constante de la confiance et de la satisfaction à l’égard des gouvernements et de leurs institutions; que, selon l’indice de perception de la corruption de 2021, les niveaux de corruption sont inégaux en Afrique de l’Ouest, le Cap-Vert et le Sénégal comptant parmi les plus performants en matière de réformes anticorruption;

M. considérant que les principes démocratiques dans leur ensemble et la coopération en matière de sécurité au Sahel ont subi d’énormes revers lorsque les militaires du Mali et du Burkina Faso ont renversé leurs gouvernements, notamment au Mali en août 2020, puis à nouveau en mai 2021 lorsque les militaires ont renversé le gouvernement qu’ils avaient précédemment mis en place, et en janvier 2022 lorsqu’un coup d’État a eu lieu au Burkina Faso; que cela montre que la région est en proie à une crise profonde;

N. considérant que la CEDEAO et l’UA ont organisé à de nombreuses occasions des échanges et des visites au Mali et au Burkina Faso afin de servir de médiateur et de trouver des compromis entre les différents acteurs; que la CEDEAO a souligné à de nombreuses reprises l’importance d’un calendrier clair pour le retour à des processus démocratiques, notamment une date imminente pour des élections démocratiques;

O. considérant qu’après le coup d’État en Guinée en septembre 2021 et l’arrestation du président Alpha Condé, récemment libéré, le pays restera exclu de la CEDEAO jusqu’au rétablissement de l’ordre constitutionnel; que le délai accordé aux autorités militaires pour fournir des précisions sur leur plan de transition avait été fixé au 25 avril 2022; qu’à cette date, ils ont sollicité un nouveau délai en vue de présenter un calendrier pour la transition;

P. considérant que le respect de la constitution nationale et de l’état de droit est à la fois essentiel pour garantir la paix et la stabilité et pour lutter contre le terrorisme et la sécurité militaire; que le maintien des principes démocratiques, notamment l’organisation d’élections libres et régulières, revêt une importance fondamentale pour permettre aux gouvernements de se prévaloir d’un large mandat public; que les citoyens d’Afrique occidentale et sahélienne soutiennent la démocratie et recherchent une participation équitable au processus démocratique;

Q. considérant que la participation des parlements nationaux à la prise de décision sur les questions de sécurité est essentielle à l’élaboration d’une stratégie à long terme en matière de sécurité et de stabilité sociétale;

R. considérant que la sécurité, le développement et la protection des droits fondamentaux se renforcent mutuellement et sont nécessaires à l’établissement d’une paix durable;

S. considérant que le rétrécissement de l’espace dévolu aux organisations de la société civile et les restrictions à la liberté de la presse dans certains pays de l’Afrique occidentale et du Sahel font peser des menaces graves sur la démocratie, l’état de droit et les droits fondamentaux;

T. considérant que l’Union et les pays ACP se sont engagés à œuvrer en faveur de la sécurité et du développement dans la région au moyen d’un partenariat politique, diplomatique et humanitaire;

U. considérant que l’UA coopère étroitement avec l’Union dans les efforts qu’elle déploie en faveur de la paix et de la stabilité; que les objectifs des acteurs régionaux de la sécurité, notamment de la CEDEAO et de la Force africaine en attente de l’UA coïncident avec l’intérêt de l’Union à aider les pays en difficulté à assurer la paix et la prospérité; que les dirigeants de l’Union européenne et de l’Union africaine sont convenus de renforcer la coopération en matière de paix et de sécurité sur le continent africain; que le protocole d’accord UA-UE sur la paix, la sécurité et la gouvernance et la facilité européenne pour la paix sont conçus pour lutter contre l’instabilité, la radicalisation, l’extrémisme violent et le terrorisme, et pour appréhender l’ensemble du cycle du conflit au moyen d’une approche intégrée;

V. considérant que le G5 Sahel, soutenu par l’Union européenne et l’Union africaine, assure la sécurité et le développement régional afin de lutter contre le terrorisme et d’apporter la stabilité dans la région du Sahel; qu’il a du mal à réaliser des avancées et à maintenir une large adhésion de l’opinion publique; que les activités financées par l’Union en matière de prévention des conflits, de médiation, de dialogue et de réconciliation sont encore limitées;

W. considérant que les efforts déployés par la communauté internationale ont tous mis un accent appuyé sur les réformes visant à consolider la démocratie et à renforcer la sécurité; que la plupart des pays de la région sont confrontés à l’incapacité de l’État de mettre efficacement en œuvre les réformes indispensables;

X. considérant que la présence d’entreprises militaires et de sécurité étrangères privées en Afrique de l’Ouest continue de déstabiliser la sécurité et l’environnement politique de la région; que le groupe Wagner, un groupe de mercenaires agissant pour le compte du gouvernement russe, est présent au Mali depuis qu’il y a été appelé par la junte militaire fin 2021; que ce groupe s’appuierait sur les infrastructures militaires russes, et que le ministère russe de la Défense participerait au financement, au recrutement, à la formation et à la protection des agents de Wagner; que le groupe Wagner est accusé d’avoir commis de graves violations des droits de l’homme;

Y. considérant que les experts des Nations unies ont conclu conjointement que le groupe Wagner s’était rendu coupable de violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme en République centrafricaine, notamment d’exécutions sommaires de masse, de détentions arbitraires, de violences sexuelles, de pillages, de disparitions forcées et de torture lors des interrogatoires;

Z. considérant que la Russie a activement propagé de fausses informations dans l’ensemble du Sahel dans le but de discréditer les initiatives européennes destinées à aider la région en y apportant stabilité et sécurité, et continue de le faire;

AA. considérant que l’Union européenne et ses missions relevant de la politique de sécurité et de défense commune ont fait l’objet de campagnes de désinformation et qu’il est urgent de leur les doter de moyens visant à assurer une communication stratégique efficace; que la désinformation a même permis d’accuser à tort l’armée française de massacres de masse dans la région de Gossi au Mali, bien que des preuves montrent que les Maliens et les étrangers soupçonnés d’appartenir au groupe Wagner sont à l’origine d’un montage abominable et fallacieux créé de toutes pièces;

AB. considérant que les multiples obstacles posés par le gouvernement malien de transition ont amené les acteurs internationaux à conclure que les conditions nécessaires à la poursuite de leur engagement militaire au Mali n’étaient plus réunies;

AC. considérant qu’à la demande de leurs partenaires africains, les acteurs européens et internationaux ont accepté de poursuivre leur action commune contre le terrorisme dans la région du Sahel, notamment au Niger et dans le golfe de Guinée, et ont entamé avec eux des consultations politiques et militaires en vue de définir les modalités de cette action commune d’ici juin 2022;

AD. considérant que la situation au Sahel est étroitement liée à la situation dans le golfe de Guinée; que la piraterie reste une menace pour la sécurité dans le golfe de Guinée; que le Conseil a prolongé de deux ans la mise en œuvre des présences maritimes coordonnées dans le golfe de Guinée;

1. exprime son inquiétude face à l’instabilité croissante au Sahel, qui compromet la sécurité et la stabilité des pays voisins et qui a de lourdes conséquences régionales et internationales; exprime sa solidarité avec les familles de toutes les victimes des attentats terroristes perpétrés dans l’ensemble de la région et leur présente ses condoléances; réaffirme son soutien résolu à la population de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel et à ses aspirations à la paix, au respect des droits de l’homme, à la sécurité, à la stabilité, au développement économique et au progrès social et démocratique; salue les nombreux efforts déployés par les acteurs locaux et internationaux en vue de favoriser la paix et le progrès dans l’ensemble de la région; est conscient que la situation en matière de sécurité au Sahel reste un énorme défi et que de nombreux civils ne se sentent pas en sécurité et sont victimes d’attentats terroristes;

2. se déclare très préoccupé par l’état général de la démocratie dans la région du Sahel et les récents coups d’État dans la région; invite les responsables des coups d’État à fixer des limites claires pour la durée de la transition politique, de garantir un retour rapide à l’ordre constitutionnel, à l’état de droit et aux pouvoirs civils, et de faciliter l’organisation d’élections transparentes et ouvertes à tous;

3. réaffirme avec force sa position selon laquelle toute coopération à long terme en matière de sécurité et de politique avec des acteurs de l’Union passe par un calendrier de retour à la démocratie réaliste prévoyant notamment des étapes claires et mesurables; rappelle qu’en l’absence d’un tel calendrier, toute coopération future avec des acteurs de l’Union européenne est amenée à être remise en question;

4. note que les coups d’État sapent les efforts visant à renforcer l’état de droit et à affirmer la légitimité démocratique des actions gouvernementales; rappelle qu’une transition et des réformes démocratiques véritables doivent être menées par des civils et permettre la participation pleine et active des organisations de la société civile, des femmes, des jeunes et des partis d’opposition; prie instamment les autorités de respecter et de protéger la liberté des médias et la liberté de réunion, d’association et d’expression;

5. souligne que de véritables dialogues nationaux associant tous les pans de la société civile sont nécessaires dans l’ensemble de la région pour ainsi poser clairement les contours de la démocratie de demain et définir notamment des objectifs concrets acceptés et partagés par les différents acteurs non militaires et non étatiques; demande à la communauté internationale de contribuer à la réalisation de ce dialogue en proposant de jouer un rôle de médiateur;

6. souligne que l’unité est le meilleur moyen de relever les nombreux défis auxquels la région est confrontée; soutient par conséquent les actions annoncées par l’UA et les mesures prises par la CEDEAO pour défendre la démocratie et l’état de droit;

7. demande aux responsables militaires de tous les pays du Sahel d’observer leurs engagements internationaux et notamment de respecter pleinement les droits de l’homme; soutient les efforts de la CEDEAO visant à élaborer une feuille de route pour les réformes et la responsabilisation en matière de droits de l’homme en vue de prévenir de nouvelles violations des droits de l’homme dans le cadre d’un effort global de résolution des différentes crises;

8. rappelle que l’instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale – Europe dans le monde ne soutient pas le financement de certaines opérations liées au secteur militaire ou de la sécurité de l’État ou susceptibles d’entraîner des violations des droits de l’homme dans les pays partenaires; reconnaît les multiples problèmes auxquels sont confrontées les régions du Sahel et du Sahara, tels que le changement climatique, les crises économiques et les attentats terroristes; invite l’Europe à se montrer plus solidaire en soutenant la région sur le plan politique et militaire, y compris par l’intermédiaire de la facilité européenne pour la paix, prévoyant une formation aux armes suffisante pour la défense, le développement et le respect des droits de l’homme; invite tous les États membres de l’Union à respecter leurs obligations en matière de droits de l’homme et à s’abstenir de transferts d’armes susceptibles d’alimenter les violations des droits de l’homme en Afrique occidentale et sahélienne;

9. rappelle le rôle important de la jeunesse africaine, qui peut contribuer à façonner un avenir prospère pour la région; demande que les femmes soient davantage associées et puissent activement participer à tous les niveaux du processus de décision démocratique ainsi qu’aux efforts de réconciliation et de consolidation de la paix; condamne le recours à la violence sexuelle et à l’intimidation sous toutes ses formes dans les situations de conflit, en particulier lors des coups d’État militaires;

10. fait valoir que l’appauvrissement croissant des peuples crée des conditions socio-économiques propices au développement de groupes criminels et terroristes; souligne que le manque d’accès aux services publics cruciaux pour les populations, comme l’eau, l’assainissement, la santé ou l’éducation, constitue le terreau socio-économique propice au développement du terrorisme; souligne l’importance de l’éducation comme assise afin de favoriser la croissance économique, de créer une société démocratique et de prévenir l’extrémisme;

11. insiste sur le rôle doivent jouer les parlements nationaux en matière de stabilité et la démocratisation; demande aux États de la CEDEAO d’intégrer davantage les organes démocratiques nationaux et régionaux en ce qui concerne les questions de sécurité; estime que toute intervention de l’Union devrait faire l’objet d’un débat au sein du parlement national concerné; invite l’Union et les pays de la CEDEAO à renforcer la coordination de l’assistance en matière de sécurité, d’aide au développement, d’aide humanitaire et de soutien à la démocratie, afin de garantir une approche intégrée en faveur de la paix et de la sécurité pour le développement durable de toute la région;

12. souligne l’importante contribution de l’Union et de ses États membres sur le plan de la coopération au développement et de l’aide humanitaire et se félicite des travaux de l’alliance Sahel visant à soutenir les efforts de développement déployés par les gouvernements du G5 Sahel; demande que le G5 Sahel devienne pleinement opérationnel et que les États membres de l’Union coopèrent étroitement avec le groupe à cet égard, au travers du renforcement des capacités financières, de l’échange d’équipements militaires et de formations efficaces aux opérations militaires et civiles;

13. rappelle que toute stratégie à long terme ne peut être couronnée de succès que si elle s’attaque aux causes profondes de l’extrémisme violent et améliore les conditions de vie des populations sur le terrain; est conscient que les causes profondes de l’extrémisme violent et du terrorisme sont complexes; souligne la nécessité de dynamiser les économies de la région, de favoriser la création d’emplois et de jeter les bases d’un développement durable à long terme; invite l’Union à adapter ses investissements et sa coopération au développement à l’objectif de lutte contre les causes profondes du terrorisme et de l’insécurité;

14. se déclare profondément préoccupé par l’aggravation sensible de la situation en matière de sécurité alimentaire dans toute la région de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel, qui touche actuellement des dizaines de millions de personnes en raison de la vulnérabilité actuelle et croissante des systèmes alimentaires agricoles et des chaînes d’approvisionnement de ces territoires; souligne que la région de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel est dépendante de l’approvisionnement en blé en provenance d’Ukraine; s’inquiète au plus haut point des conséquences alarmantes à court et moyen termes pour la sécurité alimentaire dans  la région de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel, provoquées par la guerre non provoquée de la Russie contre l’Ukraine, et des risques sérieux de voir resurgir des crises de faim et de nutrition dangereuses qui pourraient découler de cette guerre;

15. constate que l’Union européenne est le premier pourvoyeur mondial d’aide humanitaire et d’aide au développement; demande à l’Union et à ses États membres d’accroître le soutien financier et l’aide humanitaire pour répondre aux besoins urgents des populations touchées; regrette que plusieurs États membres de l’Union n’aient pas atteint l’objectif consistant à consacrer 0,7 % de leur revenu national brut à l’aide publique au développement;

16. salue les progrès réalisés par certains pays pour mettre un terme à la corruption; prie instamment les pays africains et européens de lutter contre tous les actes de corruption; souligne le lien entre corruption et criminalité environnementale, deux phénomènes qui sont une menace croissante pour la réalisation des ODD; prie instamment l’Union et ses États membres de tirer parti de la politique de lutte contre la corruption en renforçant les capacités en ce qui concerne les infractions reconnues comme relevant de la criminalité environnementale par l’Union européenne, Interpol et le programme des Nations unies pour l’environnement;

17. rappelle le lien toujours plus étroit entre le changement climatique et la stabilité régionale en Afrique de l’Ouest et au Sahel; invite les États de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel à coopérer avec les États membres l’Union européenne pour lutter contre les effets défavorables du changement climatique sur la sécurité et la stabilité dans la région;

18. rappelle que des institutions fortes sont nécessaires pour combattre le terrorisme et résoudre des problématiques qui se posent au niveau national; souligne l’importance de redéfinir une stratégie de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent dans les régions concernées, dans le respect des normes internationales, et demande que tous les auteurs de telles actions répondent de leurs actes et soient traduits en justice;

19. met l’accent sur la détermination de l’Union à s’engager de manière globale dans la région pour apporter un soutien politique, une assistance technique et financière, notamment en ce qui concerne les réformes du secteur de la sécurité, des formations militaires et un appui à la protection et au renforcement de la société civile, qui sont des aspects essentiels pour faire face aux menaces pesant sur la sécurité; invite les États de la CEDEAO et les États membres de l’Union à assurer la mise en œuvre effective du protocole d’accord sur la paix, la sécurité et la gouvernance;

20. rappelle et souligne que l’objectif de l’engagement européen a toujours été et reste d’éviter les souffrances de la population civile et à améliorer ses conditions de vie élémentaires; rappelle que les progrès en Afrique supposent de combiner capital humain et aide extérieure au développement; rappelle que la migration ne doit pas entraîner de fuite des cerveaux;

21. reconnaît que les diverses missions internationales n’ont pas atteint leur objectif premier qui constituait à pacifier l’ensemble de la région, et qu’un processus de réflexion sur les mandats et les rôles des missions et des politiques internationales est dès lors nécessaire; souligne qu’une révision des mandats et des engagements de l’Union devrait se concentrer sur le renforcement d’une coopération à caractère plus préventif avec les pays de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel ; prie instamment les pays de la CEDEAO et l’Union d’élaborer conjointement une nouvelle approche de la réforme du secteur de la sécurité et de l’assistance en matière de sécurité;

22. condamne la désinformation concernant l’Union et ses missions relevant de la politique de sécurité et de défense commune; invite l’Union européenne à se doter de tous les moyens nécessaires pour assurer une communication stratégique plus efficace;

23. souligne que tout soutien européen ou international ne devrait être envisagé qu’en complément d’efforts nationaux et régionaux; rappelle que les pays d’accueil doivent continuer de garder la main sur toutes les initiatives menées dans leurs pays respectifs; rappelle que, partant, ces initiatives doivent également bénéficier du soutien des dirigeants politiques et sociétaux pour être couronnées de succès;

24. reconnaît les succès obtenus dans la lutte contre les chefs des nombreux groupuscules islamistes armés et leur élimination; réaffirme la nécessité de combattre leurs initiatives de propagande et de recrutement dans le cadre de stratégies plus larges de lutte contre l’attractivité du terrorisme et le recrutement de terroristes; souligne dans le même temps la nécessité d’inciter les combattants à rompre avec les groupes extrémistes violents et d’intensifier les efforts pour les déradicaliser et les réintégrer dans la société;

25. critique vivement la décision du gouvernement malien de porter un coup d’arrêt à la coopération avec les acteurs européens, notamment la task force Takuba et l’opération Barkhane, en demandant le départ des contingents danois et français de son territoire et en refusant à un avion allemand l’autorisation de survoler l’espace aérien du pays;

26. condamne le déploiement au Sahel du groupe russe Wagner, qui est soutenu par le Kremlin; croit fermement que l’implication du groupe Wagner en Afrique de l’Ouest va à l’encontre de l’objectif de paix, de sécurité et de stabilité de cette région et qu'elle incompatible avec une coopération avec l’Union européenne dans les domaines de la sécurité et de la défense; invite tous les pays à se pencher sur les états de guerre du groupe Wagner, notamment en République centrafricaine; exprime sa plus vive inquiétude face aux nombreuses violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises par le groupe, qui continuent d’être signalées; condamne fermement les crimes commis en Afrique de l’Ouest et au Sahel par le groupe Wagner et d’autres entreprises militaires et de sécurité privées;

27. demande à tous les pays qui coopèrent avec le groupe Wagner, ou envisagent de le faire, de tenir compte l’évolution de la situation en Ukraine, où le régime russe mène une guerre brutale et inhumaine en violation flagrante du droit international; invite tous les États à ne pas être dupes sur la finalité des objectifs d’une présence russe dans leur pays et à prendre conscience du fait que la Russie et le groupe Wagner, qui est à sa solde, ne pensent qu’à leurs propres intérêts et qu’ils n’hésiteront pas à recourir à la force chaque fois qu’ils le jugent nécessaire, comme on le voit en Ukraine ou dans d’autres pays où la population civile paie un lourd tribut;

28. rappelle que la situation sécuritaire au Sahel a une incidence directe sur la sécurité des États côtiers d’Afrique de l’Ouest, ainsi que sur la sécurité du voisinage méridional de l’Union européenne; demande de procéder à une évaluation des insuffisances qui n’ont pas permis aux missions de formation de l’Union d’atteindre l’objectif ambitionné, à savoir former de manière adéquate les forces armées dans les pays partenaires afin de lutter contre le djihadisme; demande que les prochaines missions de formation de l’Union soient en mesure de pallier ces graves insuffisances;

29. rappelle que, dans le contexte de la relocalisation de l’opération Barkhane au Niger, des enseignements devraient être tirés afin de redéfinir les réponses en mettant davantage l’accent sur la prévention et sur une approche plus globale de la gouvernance, de la sécurité et de l’aide au développement;

30. est conscient de l’ambition de la jeunesse africaine de progresser vers une plus grande démocratie; salue les puissants mouvements démocratiques déjà établis dans la région sahélo-saharienne; exige que les régimes militaires actuels de la région ouvrent la voie à des processus exhaustifs, inclusifs et démocratiques;

31. souligne que la communauté internationale se doit d’intensifier sa coopération économique et politique avec les pays qui sont disposés à entreprendre des réformes, à obtenir des résultats et à servir ainsi de modèles régionaux à même de contribuer à la stabilité de toute la région; estime dès lors qu’il convient d’encourager et de soutenir davantage ces exemples positifs; salue les efforts déployés par certains pays en faveur de la démocratisation;

32. rappelle que la protection et la sécurité des civils sont l’une des missions essentielles de tout gouvernement et souligne que des mesures supplémentaires devraient être prises afin d’améliorer la protection des civils; propose que ces mesures comportent des méthodes de protection civile sans armes, à l’instar de celles déjà mises en place avec succès par les Nations unies dans d’autres situations de conflit;

33. invite les pays de la région et la communauté internationale à continuer de promouvoir la mise en œuvre de la résolution 2250 (2015) des Nations unies sur la jeunesse, la paix et la sécurité et réaffirme son soutien à la mise en œuvre du programme sur les femmes, la paix et la sécurité des Nations unies au Sahel;

34. salue les conclusions du Conseil prolongeant et renforçant la mise en œuvre du concept de présences maritimes coordonnées dans le golfe de Guinée; invite le Conseil à envisager de renforcer le concept dans le golfe de Guinée par le recours à des moyens aériens; demande une participation et une coopération accrues avec les États côtiers du golfe de Guinée grâce à l’instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale – Europe dans le monde et de la facilité européenne pour la paix;

35. charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au Conseil des ministres ACP‑UE, au Conseil des ministres ACP, aux États membres de l’Union africaine ainsi qu’aux secrétariats de la CEDEAO, de l’initiative d’Accra et du G5 Sahel.

 

Dernière mise à jour: 4 mai 2022
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