Proposition de résolution - B9-0263/2022Proposition de résolution
B9-0263/2022

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur les auditions en cours au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE en ce qui concerne la Pologne et la Hongrie

3.5.2022 - (2022/2647(RSP))

déposée à la suite d'une déclaration de la Commission
conformément à l’article 132, paragraphe 2, du règlement intérieur

Jeroen Lenaers
au nom du groupe PPE
Katarina Barley, Birgit Sippel, Juan Fernando López Aguilar, Sylvie Guillaume, Włodzimierz Cimoszewicz, Bettina Vollath
au nom du groupe S&D
Michal Šimečka, Sophia in 't Veld, Moritz Körner, Hilde Vautmans, Ramona Strugariu, Lucia Ďuriš Nicholsonová
au nom du groupe Renew
Gwendoline Delbos‑Corfield
au nom du groupe Verts/ALE
Malin Björk, Konstantinos Arvanitis
au nom du groupe The Left


Procédure : 2022/2647(RSP)
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B9‑0263/2022

Résolution du Parlement européen sur les auditions en cours au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE en ce qui concerne la Pologne et la Hongrie

(2022/2647(RSP))

Le Parlement européen,

 vu l’article 2 et l’article 7, paragraphe 1, du traité sur l’Union européenne (traité UE),

 vu la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne,

 vu sa résolution du 12 septembre 2018 relative à une proposition invitant le Conseil à constater, conformément à l’article 7, paragraphe 1, du traité sur l’Union européenne, l’existence d’un risque clair de violation grave par la Hongrie des valeurs sur lesquelles l’Union est fondée[1],

 vu la proposition motivée de la Commission du 20 décembre 2017 conformément à l’article 7, paragraphe 1, du traité sur l’Union européenne concernant l’état de droit en Pologne: «proposition de décision du Conseil relative à la constatation d’un risque clair de violation grave, par la République de Pologne, de l’état de droit» (COM(2017)0835),

 vu sa résolution du 1er mars 2018 sur la décision de la Commission de déclencher l’article 7, paragraphe 1, du traité sur l’Union européenne en ce qui concerne la situation en Pologne[2],

 vu sa résolution du 16 janvier 2020 sur les auditions en cours au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE en ce qui concerne la Pologne et la Hongrie[3],

 vu sa résolution du 17 septembre 2020 sur la proposition de décision du Conseil relative à la constatation d’un risque clair de violation grave, par la République de Pologne, de l’état de droit[4],

 vu sa résolution du 25 octobre 2016 contenant des recommandations à la Commission sur la création d'un mécanisme de l'Union pour la démocratie, l'état de droit et les droits fondamentaux[5],

 vu sa résolution du 7 octobre 2020 sur la création d’un mécanisme de l’Union pour la démocratie, l’état de droit et les droits fondamentaux[6],

 vu sa résolution du 26 novembre 2020 sur la situation des droits fondamentaux dans l’Union européenne — rapports annuels 2018 et 2019[7],

 vu sa résolution du 24 juin 2021 concernant le rapport 2020 sur l’état de droit de la Commission[8],

 vu sa résolution du 8 juillet 2021 sur les violations du droit de l’UE et des droits des citoyens LGBTIQ en Hongrie par suite de l’adoption de modifications de la législation au Parlement hongrois[9],

 vu sa résolution du 16 septembre 2021 sur la liberté des médias et la nouvelle détérioration de l’état de droit en Pologne[10],

 vu sa résolution du 21 octobre 2021 sur la crise de l’état de droit en Pologne et la primauté du droit de l’Union[11],

 vu sa résolution du 11 novembre 2021 sur le premier anniversaire de l'interdiction de fait de l'avortement en Pologne[12],

 vu la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne,

 vu les modalités types des auditions visées à l’article 7, paragraphe 1, du traité UE, approuvées par le Conseil le 18 juillet 2019,

 vu la décision du Collège des commissaires du 27 avril 2022 d’intenter une action contre la Hongrie au titre du règlement sur la conditionnalité liée à l’état de droit[13]

 vu l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,

A. considérant que l’Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, d’état de droit et de respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités, valeurs proclamées à l’article 2 du traité UE, reflétées dans la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et inscrites dans les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme; que ces valeurs, qui sont communes aux États membres et auxquelles tous les États membres ont librement souscrit, constituent la base des droits dont jouissent les personnes qui vivent dans l’Union;

B. considérant qu’un risque clair de violation grave par un État membre des valeurs inscrites à l’article 2 du traité UE ne concerne pas uniquement l’État membre dans lequel le risque se matérialise, mais qu’il a une incidence sur les autres États membres, sur leur confiance mutuelle, sur la nature même de l’Union et sur les droits fondamentaux de ses citoyens au titre du droit de l’Union;

C. considérant que l’article 7, paragraphe 1, du traité UE constitue une phase préventive dotant l’Union de la capacité d’intervenir en cas de risque clair de violation grave des valeurs communes; que cette action préventive prévoit un dialogue avec l’État membre concerné et a pour objectif d’éviter la suspension éventuelle de certains droits découlant de l’application des traités;

D. considérant que l’article 7, paragraphe 1, du traité UE a été déclenché par la Commission et le Parlement à l’égard de la Pologne et à l’égard de la Hongrie après la constatation de l’existence d’un risque clair de violation grave des valeurs sur lesquelles l’Union est fondée;

E. considérant que la pratique consistant à organiser des auditions a considérablement varié d’une présidence du Conseil à l’autre; que le Conseil a organisé jusqu’à présent cinq auditions sur la Pologne et trois auditions sur la Hongrie dans le cadre du Conseil des affaires générales;

1. prend acte des auditions organisées par le Conseil au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE en réponse aux menaces qui pèsent en Pologne et en Hongrie sur les valeurs consacrées à l’article 2 du traité UE; déplore que les auditions n’aient pas débouché sur une amélioration de l’état de droit, de la démocratie et des droits fondamentaux en Pologne et en Hongrie et que la situation dans les deux pays ait continué de se détériorer depuis le déclenchement de la procédure prévue à l’article 7, paragraphe 1, du traité UE, comme l’indiquent de nombreux rapports et de nombreuses déclarations de la Commission et d’organismes internationaux, tels que les Nations unies, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et le Conseil de l’Europe, et comme l’ont confirmé de nombreux arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne et de la Cour européenne des droits de l’homme;

2. invite le Conseil à véritablement s’engager à réaliser de réelles avancées dans les procédures en cours au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE conformément aux obligations de protection des valeurs inscrites à l’article 2 du traité UE qui sont les siennes en vertu des traités;

3. estime que les auditions devraient être organisées à une fréquence suffisante et selon des modalités appropriées, conditions préalables à l’efficacité de la procédure prévue à l’article 7, paragraphe 1, du traité UE; salue, à cet égard, la reprise des auditions relatives aux deux procédures par la présidence française; constate néanmoins avec inquiétude qu’en dépit des demandes répétées du Parlement, les auditions n’ont pas été organisées de manière régulière, structurée et ouverte; demande instamment aux présidences futures d’organiser les auditions de manière régulière et au moins une fois par présidence; invite le Conseil à s’assurer que les auditions organisées en vertu de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE tiennent également compte des dernières évolutions de la situation, y compris celles qui ont trait à des violations des droits fondamentaux;

4. rappelle le lien intrinsèque qui existe entre l’état de droit, la démocratie et les droits fondamentaux et rappelle au Conseil et à la Commission qu’il demande depuis longtemps d’inclure les violations persistantes de la démocratie et des droits fondamentaux partout dans l’Union, y compris les attaques contre la liberté des médias et les journalistes, les minorités, les migrants, les droits des femmes, les droits des personnes LGBTIQ+ et la liberté d’association et de réunion lors de l’évaluation de la situation de l’état de droit dans les États membres;

5. invite le Conseil à publier le procès-verbal intégral de chaque audition à l’issue de celle-ci et à rendre compte de celle-ci comme il se doit au Parlement; souligne que les auditions doivent être objectives, fondées sur des faits et transparentes et que les États membres concernés doivent coopérer de bonne foi tout au long du processus, conformément au principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, du traité UE;

6. souligne que les auditions ne seront efficaces que si le Conseil y donne suite en adressant des recommandations concrètes aux États membres en question, comme le prévoit l’article 7, paragraphe 1, du traité UE; presse le Conseil, compte tenu de la détérioration rapide de la situation dans les deux pays, d'adopter rapidement ces recommandations et de fixer des délais précis pour leur mise en œuvre; souligne que l’unanimité n’est pas requise au Conseil lorsqu’il s’agit de constater l’existence d’un risque clair de violation grave des valeurs de l’Union au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE ou d’adresser des recommandations concrètes aux États membres; suggère que si cette détérioration persiste, la Commission et le Conseil discutent de nouvelles mesures permettant de protéger les valeurs inscrites à l’article 2 du traité UE;

7. craint vivement que les modalités types des auditions visées à l’article 7, paragraphe 1, du traité UE ne garantissent pas au Parlement un traitement identique à celui de la Commission; insiste sur le fait que l’invitation du Parlement à une réunion officielle du Conseil reste due en vertu du droit d’initiative et du principe de coopération loyale entre les institutions, inscrit à l’article 13, paragraphe 2, du traité UE; demande une nouvelle fois au Conseil de tenir le Parlement rapidement et pleinement informé à chaque étape de la procédure;

8. regrette que, bien qu’elles y aient été officiellement invitées, plusieurs présidences du Conseil n’aient pas trouvé le temps de rencontrer toutes les commissions compétentes du Parlement; invite les ministres qui présideront le Conseil des affaires générales à l’avenir à se présenter devant les commissions compétentes du Parlement au moins une fois par présidence afin de tenir le Parlement au fait de ces procédures;

9. invite tous les États membres à respecter la primauté du droit de l’Union et recommande au Conseil de discuter des menaces qui pèsent sur la primauté du droit de l’Union dans le cadre des diverses procédures au cours au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE; estime qu’il est particulièrement inacceptable que la Pologne et la Hongrie continuent de ne pas mettre en œuvre un nombre important d’arrêts rendus par la Cour de justice de l’Union européenne et la Cour européenne des droits de l’homme; demande instamment de tenir compte de ce fait lors de l’évaluation de l’existence d’un risque clair de violation grave des valeurs inscrites à l’article 2 du traité UE;

10. invite la Commission à faire pleinement usage de tous les outils disponibles pour remédier aux violations, par la Pologne et la Hongrie, des valeurs inscrites à l’article 2 du traité UE, sur lesquelles l’Union est fondée, en recourant notamment à des procédures en manquement accélérées et à des demandes en référé devant la Cour de justice de l’Union européenne, ainsi qu’au règlement sur la conditionnalité liée à l’état de droit;

11. invite la Commission et le Conseil à ne pas approuver les plans nationaux de la Pologne et de la Hongrie dans le cadre de la Facilité pour la reprise et la résilience tant que les deux pays ne se seront pas pleinement conformés à toutes les recommandations par pays du Semestre européen dans le domaine de l’état de droit et n’auront pas mis en œuvre tous les arrêts pertinents de la Cour de justice de l’Union européenne et de la Cour européenne des droits de l’homme[14]; rappelle que la Commission devrait utiliser tous les instruments dont elle dispose pour veiller à ce que les citoyens et les résidents des États membres concernés ne soient pas privés du bénéfice des fonds de l’Union en raison de la violation de l’état de droit par leur gouvernement;

12. estime que les dernières évolutions des auditions en cours au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE mettent une nouvelle fois en évidence le besoin pressant d’un mécanisme de l’Union pour la démocratie, l’état de droit et les droits fondamentaux, tel que proposé par le Parlement, prenant la forme d’un accord interinstitutionnel et assorti d’un cycle politique permanent pour la démocratie, l’état de droit et les droits fondamentaux au sein des institutions de l’Union; regrette que la Commission et le Conseil refusent d’entamer des négociations sur cet accord interinstitutionnel et qu’aucune avancée n’ait été enregistrée au cours des six dernières années; invite une nouvelle fois la Commission et le Conseil à entamer immédiatement des négociations avec le Parlement sur cet accord;

13. prend acte du fait que, le 27 avril 2022, la Commission a enfin engagé la procédure formelle contre la Hongrie au titre du règlement sur la conditionnalité liée à l’état de droit en lui adressant une notification écrite; attend de la Commission qu’elle poursuive son action dans les plus brefs délais et attend du Conseil qu’il s’engage politiquement à mener à bien la procédure sans tarder et de manière prioritaire;

14. constate avec inquiétude que la Commission n’a pas engagé cette procédure à l’égard de la Pologne et demande à la Commission qu’elle procède à une nouvelle évaluation et qu’elle agisse au titre du règlement; déplore également que la Commission applique l’interprétation la plus restrictive du règlement pour évaluer les violations des principes de l’état de droit dans un État membre en excluant dans les faits qu’il existe un risque grave de porter atteinte à la gestion financière de l’Union et de ses intérêts financiers, condition à laquelle le mécanisme de conditionnalité doit être activé; rappelle que le règlement indique clairement que la mise en péril de l’indépendance du pouvoir judiciaire constitue une violation des principes de l’état de droit;

15. invite les ministres du Conseil des affaires générales à prendre pleinement en considération, lors de la prochaine audition sur la Hongrie au titre de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE, qui doit avoir lieu à la fin du mois de mai, les conclusions de la Commission dans la notification écrite que celle-ci a adressée à la Hongrie; souligne que les conclusions de la Commission devraient constituer des motifs suffisants pour que le Conseil adopte les recommandations que prévoit la procédure de l’article 7, paragraphe 1, du traité UE;

16. rappelle les conclusions de la mission du Parlement du 29 septembre au 1er octobre 2021 à Budapest[15] et de la mission du Parlement du 21 au 23 février 2022 à Varsovie[16], qui décrivent diverses violations par la Hongrie et la Pologne dans le domaine de la démocratie, de l’état de droit et des droits fondamentaux, notamment en ce qui concerne l’indépendance du pouvoir judiciaire, la liberté des médias, les attaques contre des acteurs de la société civile et la poursuite de la détérioration des droits des personnes LGBTIQ+ et des droits des femmes, ainsi que l’utilisation alléguée du logiciel espion Pegasus; invite le Conseil à utiliser pleinement ces conclusions dans ses travaux sur les procédures prévues à l’article 7, paragraphe 1, du traité UE;

17. charge sa Présidente de transmettre la présente résolution à la Commission, au Conseil, aux présidents, aux gouvernement et aux parlements respectifs de la Pologne et de la Hongrie, ainsi qu’aux gouvernements et aux parlements des autres États membres.

 

Dernière mise à jour: 4 mai 2022
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