PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur les nouvelles répressions à l’encontre du peuple biélorusse, en particulier les cas d’Andrzej Poczobut et d’Ales Bialiatski
8.3.2023 - (2023/2573(RSP))
conformément à l’article 132, paragraphe 2, du règlement
Sandra Kalniete, Michael Gahler, Rasa Juknevičienė, Željana Zovko, David McAllister, Andrius Kubilius, Isabel Wiseler‑Lima, Vladimír Bilčík, Tomasz Frankowski, Andrzej Halicki, Arba Kokalari, Andrey Kovatchev, David Lega, Miriam Lexmann, Antonio López‑Istúriz White, Elżbieta Katarzyna Łukacijewska, Liudas Mažylis, Radosław Sikorski, Milan Zver
au nom du groupe PPE
Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B9-0164/2023
B9‑0164/2023
Résolution du Parlement européen sur les nouvelles répressions à l’encontre du peuple biélorusse, en particulier les cas d’Andrzej Poczobut et d’Ales Bialiatski
Le Parlement européen,
– vu ses résolutions précédentes sur la Biélorussie,
– vu les conclusions du Conseil européen des 21 et 22 octobre 2021,
– vu les déclarations du vice-président de la Commission/haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, du 25 mars 2021 sur les mesures ciblant l’Union des Polonais de Biélorussie, et du 17 janvier 2023 sur les procès de leaders de l’opposition et de journalistes,
– vu la déclaration des ministres des affaires étrangères du G7 du 4 novembre 2022,
– vu l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,
A. considérant que le régime biélorusse a poursuivi ses actes de répression contre le peuple biélorusse, des représentants de la société civile, des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, des militants de l’opposition et de nombreuses autres personnes étant persécutés pour des raisons politiques; que les poursuites pénales restent l’une des formes de répression les plus graves et les plus répandues;
B. considérant qu’en mars 2023, plus de 1 450 personnes figurent sur la liste des prisonniers politiques biélorusses tenue par le Centre des droits de l’homme «Viasna»; que 69 noms ont été ajoutés à la liste en février 2023; que Viasna a connaissance d’au moins 2 900 personnes condamnées dans des affaires pénales à caractère politique;
C. considérant que les arrestations arbitraires de personnes au motif qu’elles ont exercé leurs droits civils se poursuivent; que Viasna a fait état de 258 arrestations de ce type en février 2023, ainsi que de 195 cas de persécutions administratives à caractère politique; que des juges ont prononcé 31 peines d’emprisonnement administratif et 11 amendes au cours de la même période;
D. considérant qu’Ales Bialiatski, un fervent défenseur des droits de l’homme et fondateur du Centre pour les droits de l’homme «Viasna», a été arrêté le 12 février 2022 et a été maintenu en détention provisoire; que son procès pour raisons politiques a débuté le 5 janvier 2023 et s’est achevé le 3 mars 2023 par sa condamnation à 10 ans en colonie pénitentiaire et une lourde amende; qu’il a été reconnu coupable de «contrebande» et de «violation flagrante de l’ordre public»;
E. considérant qu’Andrzej Poczobut, journaliste et vice-président de l’Union des Polonais de Biélorussie, a été arrêté le 25 mars 2021, puis condamné à trois ans de prison pour «insulte publique au président biélorusse» et «incitation à la haine ethnique»; que, le 8 février 2023, le tribunal régional de Hrodna l’a reconnu coupable d’avoir encouragé des actions visant à porter atteinte à la sécurité nationale de la République de Biélorussie et d’avoir incité à l’hostilité ethnique, et l’a condamné à huit ans de prison dans une colonie pénitentiaire de haute sécurité;
F. considérant que les accusations portées contre Andrzej Poczobut et Ales Bialiatski sont largement considérées comme des accusations motivées par des considérations politiques et visant à réduire au silence les voix indépendantes et à supprimer la liberté d’expression et d’association;
G. considérant que les forces politiques démocratiques biélorusses continuent d’être persécutées; que le 17 janvier 2023 a marqué le début du procès par contumace de Svetlana Tikhanovskaïa, cheffe du Cabinet de transition uni, et de celui de membres du Conseil de coordination, dont Maryia Maroz, Olga Kovalkova, Pavel Latushka et Sergueï Dylevski; que, le 6 mars, Svetlana Tikhanovskaïa a été condamnée à 15 ans de prison, Pavel Latushka à 18 ans de prison et Maryia Maroz, Olga Kovalkova, Pavel Latushka et Sergueï Dylevski à 12 ans de prison chacun;
H. considérant que les autorités biélorusses ont violé à plusieurs reprises les droits de l’homme des citoyens du pays, y compris le droit à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association; que la répression continue de toucher tous les secteurs de la société, y compris les milieux universitaires, les médias et les défenseurs des droits de l’homme; que les persécutions individuelles se poursuivent sous couvert de lutte contre l’extrémisme et le terrorisme;
I. considérant que les prisonniers politiques font l’objet d’une répression supplémentaire, à savoir qu’ils sont maintenus dans des conditions interdites en vertu des obligations internationales de la Biélorussie, qu’ils sont soumis à des sanctions disciplinaires pour de faux motifs, qu’ils sont placés dans des cellules disciplinaires, que le niveau de sécurité de certains d’entre eux est relevé et que leur peine d’emprisonnement se trouve prolongée de façon arbitraire, que leur droit à la correspondance est violé et qu’ils sont privés de visites familiales sous des prétextes fantaisistes;
J. considérant que le régime a poursuivi ses actes de répression à l’encontre des avocats pour les punir de s’être exprimés sur des questions de droits, d’avoir représenté des clients dans des affaires à motivations politiques et de s’être exprimés contre la guerre en Ukraine; que, depuis août 2020, au moins 70 avocats ont perdu leur licence à la suite de décisions arbitraires du ministère de la justice ou de procédures de radiation répondant à des motivations politiques; qu’en 2022, sept avocats ont été poursuivis pénalement pour des raisons politiques et ont continué à faire l’objet de poursuites administratives, de détentions, de perquisitions et de harcèlement;
K. considérant que les autorités biélorusses continuent d’adopter des mesures qui restreignent les droits des Biélorusses vivant à l’étranger; qu’en 2022 et 2023, 58 personnes ont été arrêtées à leur retour en Biélorussie pour avoir participé aux manifestations de 2020 ou pour avoir partagé sur les réseaux sociaux des contenus considérés comme «extrémistes»;
L. considérant que le régime Loukachenko a pris des mesures de plus en plus répressives à l’encontre des minorités nationales en Biélorussie, en particulier contre la minorité polonaise, y compris la fermeture des écoles enseignant dans la langue minoritaire nationale, ainsi qu’à l’encontre des organisations de représentation de la minorité polonaise, comme l’Union des Polonais de Biélorussie; que le régime Loukachenko dénature la vérité et la mémoire historiques en diffusant des mensonges à propos des atrocités présumées commises contre des Biélorusses pendant la Seconde Guerre mondiale et immédiatement après par l’État clandestin polonais; que la minorité nationale polonaise fait l’objet d’une discrimination systématique depuis de nombreuses années;
M. considérant que, le 1er mars 2023, le bureau officiel de la Biélorussie démocratique a été ouvert à Bruxelles lors d’une cérémonie qui s’est déroulée en présence de Svetlana Tikhanovskaïa;
N. considérant que le régime illégitime continue de réprimer la liberté de religion et de conviction; que le régime a interdit toute activité de culte dans l’Église de la nouvelle vie de Minsk et arrêté le pasteur de cette église, Viachaslau Hancharenka, ainsi que le pasteur Antoni Bokun; que, le 26 septembre 2022, Minsk Heritage, l’agence immobilière qui contrôle le bâtiment de l’Église catholique rouge, a ordonné à la paroisse de retirer tous ses biens du bâtiment à la suite d’un incendie survenu dans des circonstances inexpliquées;
O. considérant que, selon le Conseil de coordination, rien qu’en 2022, huit prêtres catholiques romains, trois prêtres catholiques grecs, six prêtres orthodoxes et sept pasteurs protestants ont subi diverses formes de pression de la part du régime illégitime, allant d’amendes à de longues peines d’emprisonnement, y compris Sergueï Rezanovich, qui a été condamné à 16 ans d’emprisonnement en colonie pénitenciaire dans des conditions strictes; que les prisonniers politiques se voient systématiquement refuser l’accès aux écrits religieux et les visites de prêtres ou de pasteurs;
P. considérant que, le 7 septembre 2022, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a invité le secrétaire général du Conseil de l’Europe à mettre en place un groupe de contact sur la Biélorussie en coopération avec des représentants des forces démocratiques et de la société civile biélorusses;
1. réaffirme sa solidarité avec les Biélorusses qui continuent de se battre pour une Biélorussie souveraine, libre et démocratique, au péril de leur liberté et, de plus en plus souvent, de leur vie, et réclament instamment la libération immédiate et sans condition de tous les prisonniers politiques et de toutes les personnes détenues arbitrairement, ou arrêtées ou condamnées pour des motifs politiques, et l’abandon de toutes les charges pesant sur eux, ainsi que leur réhabilitation intégrale et leur indemnisation financière pour les préjudices qu’ils ont subis en conséquence de leur détention illégitime; exige la cessation de la violence d’État;
2. continue de condamner avec la plus grande fermeté possible la répression en cours à l’encontre de la société civile, des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes et des militants politiques en Biélorussie, y compris au moyen de procès motivés par des considérations politiques; condamne la répression systématique exercée par le régime Loukachenko à l’encontre des civils, qui a contraint des milliers de Biélorussie à fuir le pays depuis les élections frauduleuses du 9 août 2020; rappelle que la campagne de répression systématique en cours et le déplacement de civils contre leur volonté constituent de graves violations des droits de l’homme;
3. condamne la détention et la condamnation d’Andrzej Poczobut et d’Ales Bialiatski; dénonce les nombreuses violations de leur droit à un procès équitable et demande leur libération immédiate et inconditionnelle, ainsi que leur réhabilitation complète et leur indemnisation;
4. dénonce le fait que des procès à caractère politique se tiennent à huis clos et sans respect du droit, ce qui constitue une violation des obligations et engagements internationaux du pays, et se soldent par des peines sévères et injustifiées à l’encontre des dirigeants de l’opposition;
5. condamne la persécution de la minorité polonaise en Biélorussie et de ses représentants; invite les autorités biélorusses à cesser toutes les mesures prises à l’encontre de la minorité polonaise et à respecter ses droits, y compris le droit à l’éducation en polonais;
6. condamne une nouvelle fois fermement l’implication de la Biélorussie dans la guerre d’agression injustifiée et non provoquée menée par la Russie contre l’Ukraine et le soutien qu’elle apporte, y compris par le biais du «référendum» qui rétablit le statut nucléaire du pays, mais aussi en autorisant la circulation de troupes et d’armes, l’utilisation de l’espace aérien du pays, le ravitaillement en carburant et le stockage de munitions militaires; prend acte du fait que la Biélorussie est complice du soutien du terrorisme par l’État et complice d’un État qui utilise des moyens de terrorisme;
7. condamne la rhétorique belligérante utilisée par les dirigeants biélorusses contre l’Ukraine et la diffusion massive de propagande et de désinformation au sujet de la guerre d’agression; réaffirme qu’Alexandre Loukachenko et d’autres responsables biélorusses partagent la responsabilité des crimes de guerre commis en Ukraine et devraient répondre de leurs actes devant les tribunaux internationaux compétents ainsi que devant le tribunal spécial proposé qui serait chargé de juger le crime d’agression contre l’Ukraine; exprime son soutien aux volontaires et partisans biélorusses qui luttent pour l’indépendance de la Biélorussie et aident l’Ukraine à se défendre dans la guerre d’agression menée par la Russie;
8. demande à l’Union et à ses États membres de renforcer les sanctions de l’Union à l’encontre des personnes et entités responsables de la répression systématique à l’œuvre en Biélorussie, de veiller à leur bonne application et de combler les lacunes dans la réalisation de ces sanctions; demande que toutes les sanctions prises à l’encontre de la Russie en raison de la guerre d’agression contre l’Ukraine s’appliquent de façon strictement identique à la Biélorussie;
9. invite la Commission et les États membres à soutenir et à protéger les défenseurs des droits de l’homme et la société civile en Biélorussie, qui seront confrontés à une répression sévère, y compris, si nécessaire, en délivrant des visas d’urgence pour quitter la Biélorussie;
10. demande à la Commission d’accroître l’aide au renforcement des capacités qu’elle apporte aux syndicats indépendants, aux médias libres, à la société civile et aux militants en faveur de la démocratie biélorusses, qu’ils soient présents dans le pays ou en exil; invite la Commission et les États membres à continuer de soutenir la société civile biélorusse, les médias indépendants et les groupes et structures politiques démocratiques de ce pays, y compris le Conseil de coordination et le Cabinet de transition uni; invite les forces démocratiques biélorusses à maintenir et à promouvoir l’unité dans leur poursuite de l’objectif d’une Biélorussie libre, démocratique et indépendante;
11. souligne qu’il est nécessaire de mener une enquête approfondie sur les crimes commis par le régime de Loukachenko contre la population biélorusse; invite les États membres à appliquer de manière active le principe de compétence universelle et à préparer des procédures judiciaires contre les fonctionnaires biélorusses responsables ou complices de violences, de répression et de crimes contre l’humanité systématiques, y compris Alexandre Loukachenko;
12. invite la Commission, les États membres et le Service européen pour l’action extérieure à coopérer avec les partenaires internationaux, tels que le mécanisme de Moscou de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, ainsi qu’avec les défenseurs des droits de l’homme et la société civile sur le terrain pour assurer le suivi, la documentation et le signalement des violations des droits de l’homme, afin que par la suite, les auteurs aient à répondre de leurs actes et les victimes obtiennent justice;
13. invite les institutions de l’Union à prendre toutes les mesures nécessaires dans le cadre des institutions et procédures internationales, ainsi qu’auprès de la Cour pénale internationale ou d’autres juridictions ou tribunaux internationaux compétents, pour appuyer les enquêtes et les poursuites des actes liés à la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine perpétrés par les responsables politiques en Biélorussie, en particulier Alexandre Loukachenko, en tant que crimes de guerre et crimes contre l’humanité;
14. invite la Commission à mettre en place un groupe de travail qui ouvrira un dialogue politique avec les représentants de la Biélorussie démocratique afin de travailler à un accord multisectoriel global qui constituera le fondement de la coopération avec une Biélorussie démocratique une fois que le régime actuel ne sera plus au pouvoir; réaffirme que cette mise en place devrait s’accompagner d’un plan de ressources financières et administratives à mettre en œuvre afin de mener et de financer les réformes nécessaires dans le pays une fois que cela sera possible; souligne l’importance du nouveau bureau de la Biélorussie démocratique à Bruxelles, qui devrait jouer le rôle important de mission diplomatique de facto;
15. réaffirme qu’il importe de formaliser les relations entre les forces démocratiques biélorusses et le Parlement afin de renforcer la représentation biélorusse sur la scène internationale et dans les travaux des organisations internationales; rappelle, à cet égard, la mise en place du Cabinet de transition uni de Biélorussie et du Conseil de coordination en tant que partenaires de confiance et constructifs pour relever les défis qui touchent les relations régionales et bilatérales entre l’Union et la Biélorussie; demande, par conséquent, une nouvelle participation des représentants démocratiques officiels de Biélorussie à l’Assemblée parlementaire Euronest et à la délégation pour les relations avec la Biélorussie;
16. condamne à nouveau la récente décision du Comité international olympique (CIO) d’autoriser les athlètes biélorusses à participer sous drapeau neutre aux qualifications pour les Jeux olympiques de Paris de 2024, qui va à l’encontre de l’isolement multiforme de la Biélorussie par la communauté internationale et sera utilisée par le régime à des fins de propagande; invite les États membres et la communauté internationale à faire pression sur le CIO pour qu’il renonce à cette décision, qui discrédite le monde international du sport, et à adopter une position similaire pour tout autre événement sportif, culturel ou scientifique;
17. charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au vice-président de la Commission/haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au Conseil de l’Europe, à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, aux autorités de la République de Biélorussie ainsi qu’aux représentants de l’opposition démocratique biélorusse.