Proposition de résolution - B9-0201/2023Proposition de résolution
B9-0201/2023

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur la lutte contre la discrimination dans l’Union européenne – la tant attendue directive horizontale anti-discrimination

12.4.2023 - (2023/2582(RSP))

déposée à la suite des questions avec demande de réponse orale B9-0013/2023 et B9-0014/2023
déposée conformément à l’article 136, paragraphe 5, du règlement intérieur

Maria Walsh
au nom du groupe PPE
Sylvie Guillaume
au nom du groupe S&D
Sophia in ’t Veld
au nom du groupe Renew
Alice Kuhnke
au nom du groupe Verts/ALE
Malin Björk
au nom du groupe The Left


Procédure : 2023/2582(RSP)
Cycle de vie en séance
Cycle relatif au document :  
B9-0201/2023
Textes déposés :
B9-0201/2023
Débats :
Textes adoptés :

B9‑0000/2023

Résolution du Parlement européen sur la lutte contre la discrimination dans l’Union européenne – la tant attendue directive horizontale anti-discrimination

(2023/2582(RSP))

Le Parlement européen,

 vu le traité sur l’Union européenne (traité UE), et notamment ses articles 2, 3 et 6,

 vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (traité FUE), et notamment ses articles 10 et 19,

 vu la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après «la charte»), en particulier ses articles 20, 21 et 23,

 vu la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE),

 vu la proposition de directive du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction d’âge, de handicap, d’orientation sexuelle ou de convictions religieuses en dehors du marché du travail («directive horizontale anti-discrimination»), présentée par la Commission le 2 juillet 2008,

 vu la directive 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique[1] (directive relative à l’égalité raciale),

 vu la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail[2] (ci-après la «directive sur l’égalité en matière d’emploi»),

 vu la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal[3],

 vu le règlement (UE) 2021/692 du Parlement européen et du Conseil du 28 avril 2021 établissant le programme «Citoyens, égalité, droits et valeurs»[4],

 vu la communication de la Commission du 3 mars 2021 intitulée «Union de l’égalité: stratégie en faveur des droits des personnes handicapées 2021-2030» (COM(2021)0101), et la Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées ratifiée par l’Union et tous ses États membres,

 vu la communication de la Commission du 12 novembre 2020 intitulée «Union de l’égalité: stratégie en faveur de l’égalité de traitement à l’égard des personnes LGBTIQ pour la période 2020-2025» (COM(2020)0698),

 vu la communication de la Commission du 18 septembre 2020 intitulée «Une Union de l’égalité: plan d’action de l’UE contre le racisme 2020-2025» (ci-après le «plan d’action de l’UE contre le racisme») (COM(2020)0565),

 vu la communication de la Commission du 5 mars 2020 intitulée «Une Union de l’égalité: stratégie en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes 2020-2025» (COM(2020)0152),

 vu la communication de la Commission du 16 avril 2019 intitulée «Une prise de décision plus efficace en matière de politique sociale: renforcer le passage au vote à la majorité qualifiée dans certains domaines» (COM(2019)0186),

 vu le rapport de la Commission du 19 mars 2021 sur l’application de la directive 2000/43/CE du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique (directive sur l’égalité entre les races) et de la directive 2000/78/CE du Conseil portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (directive sur l’égalité en matière d’emploi) (COM(2021)0139),

 vu les orientations pour améliorer la collecte et l’utilisation des données relatives à l’égalité, élaborées en 2018 par le sous-groupe sur les données relatives à l’égalité du groupe de haut niveau de la Commission sur la non-discrimination, l’égalité et la diversité et publiées en 2021,

 vu les traités et instruments des Nations unies relatifs à la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en particulier la déclaration universelle des droits de l’homme, le pacte international relatif aux droits civils et politiques, la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et la convention relative aux droits des personnes handicapées,

 vu le programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations unies,

 vu les recommandations et rapports du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme, du Haut-Commissaire pour les minorités nationales et d’autres organes de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe,

 vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et notamment son article 14 et son protocole 12, qui interdisent la discrimination,

 vu la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) en la matière,

 vu les recommandations, rapports et résolutions de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance, du Comité directeur sur la lutte contre la discrimination, la diversité et l’inclusion, de l’Assemblée parlementaire, de la Commission de Venise et d’autres organes du Conseil de l’Europe,

 vu la charte sociale européenne,

 vu le socle européen des droits sociaux, notamment le troisième principe concernant l’égalité des chances, et la communication de la Commission du 4 mars 2021 sur le plan d’action relatif au socle européen des droits sociaux (COM(2021)0102),

 vu sa résolution du 13 décembre 2022 sur l’égalité des chances pour les personnes handicapées[5],

 vu sa résolution du 10 novembre 2022 sur la justice raciale, la non-discrimination et la lutte contre le racisme dans l’UE[6],

 vu sa résolution du 14 septembre 2021 sur les droits des personnes LGBTIQ dans l’Union européenne[7],

 vu sa résolution du 11 mars 2021 sur la déclaration de l’Union européenne en tant que zone de liberté pour les personnes LGBTIQ[8],

 vu sa résolution du 17 décembre 2020 sur la nécessité d’une formation du Conseil sur l’égalité des genres[9],

 vu ses résolutions du 25 octobre 2016[10] et du 7 octobre 2020 sur la création d’un mécanisme de l’Union pour la démocratie, l’état de droit et les droits fondamentaux[11],

 vu sa résolution du 19 juin 2020 sur les manifestations contre le racisme après la mort de George Floyd[12],

 vu sa résolution du 21 janvier 2021 sur la stratégie de l’Union européenne en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes[13],

 vu sa résolution du 26 mars 2019 sur les droits fondamentaux des personnes d’ascendance africaine en Europe[14],

 vu sa résolution du 12 février 2019 sur la nécessité de renforcer le cadre stratégique de l’UE pour les stratégies nationales d’intégration des Roms après 2020 et d’intensifier la lutte contre l’antitsiganisme[15],

 vu sa résolution législative du 2 avril 2009 sur la proposition de directive du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d’âge ou d’orientation sexuelle[16],

 vu ses résolutions sur la situation des droits fondamentaux dans l’Union,

 vu son débat du 22 octobre 2019 en session plénière à Strasbourg intitulé «Faire progresser la directive horizontale anti-discrimination»,

 vu les rapports et les enquêtes de l’Agence européenne des droits fondamentaux, en particulier son rapport intitulé «Égalité dans l’Union: 20 ans après la mise en œuvre initiale des directives sur l’égalité»[17],

 vu les questions au Conseil et à la Commission sur la lutte contre la discrimination dans l’Union européenne – la tant attendue directive horizontale anti-discrimination(O-000010/2023 – B9-0013/23 et O-000011/2023 – B9-0014/23),

 vu l’article 136, paragraphe 5, et l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,

A. considérant que la non-discrimination est un droit fondamental inscrit dans la charte et dans les traités, qui doit être pleinement respecté; considérant que l’Union européenne interdit la discrimination;

B. considérant que le principe de non-discrimination est l’une des valeurs communes de l’Union visées à l’article 2 du traité UE; qu’en vertu de l’article 10 du traité FUE, l’Union cherche à combattre toute discrimination dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions; que l’article 20 de la charte affirme que toute personne est égale en droit et que l’article 21 interdit toute discrimination fondée sur une série de motifs;

C. considérant que toute personne dans l’Union a le droit égal de devenir un membre actif et à part entière de la société et d’être traitée sur un pied d’égalité devant la loi;

D. considérant que la protection offerte par le cadre de lutte contre la discrimination de l’Union présente des lacunes considérables; que cette fragmentation conduit à une hiérarchie artificielle des motifs, ce qui limite l’étendue et la portée de la protection au niveau de l’Union contre la discrimination au travail et en dehors du travail; que si les motifs liés au sexe et à la race ou l’origine ethnique sont protégés dans une certaine mesure, les motifs de religion ou de conviction, de handicap, d’âge et d’orientation sexuelle ne bénéficient pas du même niveau de protection;

E. considérant qu’en 2008, la Commission a présenté une proposition de directive horizontale anti-discrimination (COM(2008)0426) couvrant un grand nombre de domaines, tels que l’éducation, la protection sociale, l’accès aux biens et services et la fourniture de biens et services; que le Parlement a arrêté sa position en mars 2009; que le Conseil n’a jamais adopté de position après plus de 15 ans; que, malgré les appels répétés du Parlement, la proposition reste bloquée au Conseil;

F. considérant que certains États membres ont bloqué des progrès concrets sur ce dossier spécifique au sein du Conseil;

G. considérant que la discrimination est en augmentation dans l’ensemble de l’Union; que l’absence de collecte de données comparables et désagrégées sur l’égalité par les États membres et la sous-déclaration des cas empêchent que la discrimination soit dûment documentée; qu’une personne sur cinq dans l’Union est victime de discrimination ou de harcèlement pour différents motifs ou combinaison de motifs[18];

H. considérant que la CJUE et la Cour européenne des droits de l’homme ont développé une jurisprudence abondante dans le domaine de l’égalité de traitement et de la lutte contre la discrimination depuis que la Commission a présenté la proposition de directive horizontale anti-discrimination en 2008; que la jurisprudence de la CJUE et de la Cour européenne des droits de l’homme a clarifié plusieurs questions d’interprétation du cadre de lutte contre la discrimination de l’Union et qu’elle fournit des orientations utiles pour l’application de la législation actuelle;

I. considérant que l’absence de mise en œuvre du cadre de lutte contre la discrimination de l’Union, de la jurisprudence de la CJUE et de la Cour européenne des droits de l’homme par les États membres demeure une préoccupation qui ne peut être ignorée;

J. considérant que la protection contre la discrimination n’est pas unifiée d’un État membre à l’autre, ce nuit aux personnes et à la société dans son ensemble;

1. regrette profondément que la directive horizontale anti-discrimination soit bloquée au Conseil depuis 2008; demande une nouvelle fois au Conseil de débloquer d’urgence cette directive après 15 ans d’inaction; souligne que cet objectif doit être atteint d’ici la fin de l’année et que le Parlement est prêt à une adoption avant la fin de la législature actuelle;

2. rappelle que les traités de l’Union et la charte consacrent le mandat et la responsabilité de l’Union en matière de lutte contre la discrimination et de promotion de l’égalité de traitement pour tous;

3. souligne que, selon le dernier rapport sur l’état d’avancement de la directive horizontale anti-discrimination, deux délégations ont maintenu des réserves générales, deux ont maintenu des réserves d’examen parlementaire et toutes les délégations ont maintenu des réserves générales d’examen; souligne que les questions au cœur des discussions au sein du Conseil comprennent les dispositions relatives au handicap, et en particulier la possibilité d’offrir aux États membres une prolongation excessive du délai de transposition en ce qui concerne leur obligation de prévoir des aménagements raisonnables; déplore qu’en dépit de la nécessité claire et urgente de prendre des mesures pour lutter de façon transversale contre la discrimination au niveau de l’Union, aucun progrès tangible n’ait été accompli à ce jour;

4. déplore que le Conseil ait ignoré les nombreuses demandes insistantes de débloquer le dossier, ainsi que les recommandations du Parlement, et invite instamment le Conseil à les intégrer dans son mandat et à prendre toutes les mesures appropriées pour lutter contre la discrimination dans l’Union;

5. invite les prochaines présidences du Conseil à envisager sérieusement la création d’une formation du Conseil sur l’égalité, notamment entre les hommes et les femmes, afin de faciliter les discussions de haut niveau sur ces questions et de permettre des discussions ministérielles appropriées sur le texte de cette directive; déplore que l’unanimité soit requise au Conseil en vertu de l’article 19 du traité FUE et demande que la clause passerelle soit activée;

6. souligne que l’adoption de la directive horizontale anti-discrimination offrirait un cadre global et crucial pour lutter contre la discrimination au niveau de l’Union et comblerait la lacune actuelle du cadre de lutte contre la discrimination de l’Union, qui garantirait une protection en dehors du marché du travail; souligne qu’il est urgent d’adopter une approche horizontale de la lutte contre la discrimination afin de supprimer la hiérarchie artificielle actuelle des motifs protégés, en accordant ainsi une protection à tous;

7. déplore l’absence persistante de mise en œuvre du cadre de lutte contre la discrimination de l’Union par les États membres; s’inquiète de ce que cela ait une incidence négative sur les individus et sur la société dans son ensemble[19]; prie instamment les États membres de veiller à la mise en œuvre intégrale et correcte du cadre actuel de l’Union en matière de lutte contre la discrimination;

8. invite la Commission à renforcer son suivi de la mise en œuvre de la législation en vigueur; rappelle sa position selon laquelle le rapport annuel de la Commission sur l’état de droit devrait être élargi pour inclure toutes les valeurs de l’article 2 du traité UE, y compris l’égalité de traitement et la non-discrimination; invite en outre la Commission à utiliser de manière proactive tous les outils disponibles pour faire respecter le droit de l’Union dans ce domaine, notamment en lançant et en faisant avancer des procédures en manquement à l’encontre des États membres;

9. demande que les États membres se conforment d’urgence à la jurisprudence de la CJUE et de la Cour européenne des droits de l’homme et que la Commission surveille sa mise en œuvre, en particulier dans le domaine de l’égalité de traitement et de la non-discrimination; invite la Commission à prendre des mesures en cas de non-respect;

10. se déclare profondément préoccupé par le manque de sensibilisation et de mise en œuvre de la charte au niveau national, comme l’a souligné l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne; invite la Commission à redoubler d’efforts pour promouvoir la charte et sa mise en œuvre correcte, ainsi que le cadre de lutte contre la discrimination de l’Union et la jurisprudence pertinente de la CJUE et de la Cour européenne des droits de l’homme, dans les États membres;

11. est préoccupé par le fait que, selon l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, les processus et systèmes actuels de signalement des expériences de discrimination sont souvent inefficaces et n’aident pas toujours les victimes de discrimination à demander réparation et à accéder à la justice; invite les États membres et la Commission à remédier à cette situation, ce qui permettrait à tous les citoyens européens de se sentir en mesure de révéler en toute sécurité tous les cas de discrimination auxquels ils ont pu être confrontés;

12. invite les États membres et la Commission à favoriser la collecte et l’utilisation de données relatives à l’égalité conformément à la législation de l’Union et à la législation nationale; souligne que la collecte obligatoire de données comparables et ventilées sur l’égalité est nécessaire pour veiller à ce que la discrimination soit dûment documentée tout en respectant pleinement le droit fondamental au respect de la vie privée, la protection des données à caractère personnel et la législation européenne et nationale pertinente;

13. déplore les tendances très préoccupantes en matière d’égalité de traitement dans plusieurs États membres, qui ont également été mises en évidence par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne[20]; invite la Commission à suivre de près le recul croissant des droits fondamentaux et l’augmentation des discriminations dans l’ensemble de l’Union; invite en outre la Commission à explorer toutes les voies possibles pour sortir de l’impasse politique de la directive horizontale anti-discrimination et pour lutter avec la même détermination contre toutes les formes de discrimination dans l’Union;

14. estime que toute mise à jour de la proposition de directive horizontale anti-discrimination par la Commission doit s’appuyer sur la position du Parlement, lutter contre la discrimination intersectionnelle et interdire explicitement toute discrimination fondée sur toute combinaison de motifs énumérés dans la charte;

15. charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.

 

 

Dernière mise à jour: 17 avril 2023
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