Proposition de résolution - B9-0457/2023Proposition de résolution
B9-0457/2023

PROPOSITION DE RÉSOLUTION sur l’efficacité des sanctions de l’Union européenne à l’encontre de la Russie

6.11.2023 - (2023/2905(RSP))

déposée à la suite de déclarations du Conseil et de la Commission
conformément à l’article 132, paragraphe 2, du règlement intérieur

Anna Fotyga, Angel Dzhambazki, Witold Jan Waszczykowski, Kosma Złotowski, Jadwiga Wiśniewska, Ryszard Czarnecki, Bogdan Rzońca, Elżbieta Rafalska, Jacek Saryusz‑Wolski, Adam Bielan, Eugen Jurzyca, Assita Kanko, Cristian Terheş, Joachim Stanisław Brudziński, Alexandr Vondra, Veronika Vrecionová, Anna Zalewska, Hermann Tertsch
au nom du groupe ECR

Voir aussi la proposition de résolution commune RC-B9-0453/2023

Procédure : 2023/2905(RSP)
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B9-0457/2023
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B9‑0457/2023

Résolution du Parlement européen sur l’efficacité des sanctions de l’Union européenne à l’encontre de la Russie

(2023/2905(RSP))

Le Parlement européen,

 vu ses précédentes résolutions sur l’Ukraine et la Russie,

 vu la charte des Nations unies, les conventions de La Haye, les conventions de Genève et leurs protocoles additionnels ainsi que le statut de Rome de la Cour pénale internationale,

 vu l’accord d’association entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et l’Ukraine, d’autre part[1], ainsi que l’accord de libre-échange approfondi et complet y afférent entre l’Union européenne et l’Ukraine, signé en 2014,

 vu l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,

A. considérant que la Fédération de Russie, avec le soutien actif du dictateur biélorusse Alexandre Loukachenko, poursuit sa guerre d’agression illégale, non provoquée et injustifiée contre l’Ukraine, qui a commencé dès 2014 avec l’occupation de la Crimée et de certaines parties des oblasts de Donetsk et de Louhansk, mais qui s’est intensifiée le 24 février 2022 pour devenir le plus grand conflit militaire sur le continent européen depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale;

B. considérant que les politiques antérieures à l’égard de la Fédération de Russie n’ont pas réussi à mettre un terme à son impérialisme et n’ont abouti qu’à des guerres d’agression de plus en plus ruineuses, de sorte que toute autre issue que la victoire de l’Ukraine serait intolérable pour la paix internationale, les droits de l’homme et la démocratie;

C. considérant que, même après 2014, l’Union européenne et certains de ses États membres ont poursuivi une politique de coopération étroite avec la Fédération de Russie dans de nombreux domaines, notamment l’énergie, mais aussi dans le secteur spatial et même dans le domaine militaire, malgré les appels à y mettre fin; que des entreprises européennes, telles que Siemens, ainsi que des entreprises ayant participé à la construction du pont du détroit de Kertch, ont fait fi de manière flagrante des sanctions de l’Union et ont contribué à renforcer les capacités de la Russie, alimentant ainsi de nouvelles agressions; que, malgré une mise en lumière par les médias, de telles affaires scandaleuses n’ont pas fait l’objet d’enquêtes et de poursuites appropriées, lesquelles auraient eu un effet dissuasif sur d’autres entreprises;

D. considérant que l’Union européenne a adopté 11 trains de sanctions à l’encontre de la Russie afin d’affaiblir sa force militaire et d’entraver sa capacité à mener une guerre à grande échelle; que ces mesures comprennent des sanctions personnelles visant plus de 1 800 personnes, la déconnexion de dix grandes institutions financières russes – dont la plus grande banque russe, Sberbank – du système international de messagerie financière SWIFT, l’interdiction d’exporter vers la Russie (transit compris) des biens et/ou des technologies à double usage, des moteurs de drone, des armes, des armes à feu civiles, des munitions, des véhicules militaires et des équipements paramilitaires, la fermeture de l’espace aérien, des ports maritimes et des routes de l’Union pour les aéronefs, navires et opérateurs de transport russes, un plafonnement des prix du pétrole brut et des produits pétroliers russes exportés vers des pays tiers et l’interdiction de fournir des services de transport maritime; que, bien que ces sanctions aient, dans une certaine mesure, amoindri la capacité du Kremlin à mener sa guerre non provoquée, elles devraient s’accompagner d’autres mesures, telles que la poursuite du soutien militaire à l’Ukraine;

E. considérant que, selon les estimations, l’Union a gelé 300 milliards d’euros de réserves de la banque centrale russe et 19 milliards d’euros appartenant à des oligarques russes, tandis que les États-Unis et d’autres alliés occidentaux ont bloqué ou saisi plus de 58 milliards de dollars d’actifs détenus ou contrôlés par des Russes sanctionnés;

F. considérant qu’en réaction à l’acte d’agression, de nombreuses entreprises internationales ont décidé de quitter le marché russe, mais qu’un nombre important d’entreprises ayant leur siège dans l’Union et dans les pays du G7, en particulier en Allemagne, en France, en Italie, en Grèce, en Slovénie, en Autriche et en Espagne, continuent d’exercer leurs activités et d’investir en Russie et alimentent ainsi l’économie de guerre de la Russie;

G. considérant que la Russie dépend de la volonté de personnes et d’entités de pays tiers pour le réapprovisionnement de ses forces militaires et la poursuite de sa guerre haineuse contre l’Ukraine; que, selon des informations crédibles, la fourniture d’armes et d’équipements militaires se poursuit, non seulement en provenance de la Corée du Nord et de l’Iran, mais aussi, et de plus en plus, de la Chine;

H. considérant que, neuf ans après le début de l’agression russe contre l’Ukraine, Raiffeisen, le plus grand établissement de crédit occidental toujours actif sous le régime de Poutine, a tiré près de la moitié de ses bénéfices – qui ont fortement augmenté en 2022 – de ses activités russes, alors que les voix s’élèvent pour que l’établissement cesse ses activités dans le pays;

I. considérant que les stratagèmes employés par la Russie pour contourner les sanctions sont de plus en plus sophistiqués, notamment quand il s’agit de la vente de pétrole, principale source de financement de sa guerre;

J. considérant que les pays de l’Union ont importé pratiquement la même quantité de gaz naturel liquéfié (GNL) russe de janvier à septembre 2023 qu’au cours de la même période l’année précédente, certains ayant augmenté de 40 à 50 % leurs importations de GNL, tandis que les entreprises allemandes Technip et Linde ont joué un rôle essentiel dans le développement par la Russie du projet «Arctic LNG 2», qui a récemment été ajouté au régime de sanctions des États-Unis;

K. considérant que la Russie a créé une «flotte fantôme» de pétroliers capables de fonctionner sans assurance ni autres services occidentaux, et ce afin de contourner l’embargo sur le pétrole imposé par l’Union;

L. considérant que la Russie est en mesure de se procurer un nombre important de composants informatiques nécessaires à la production de missiles balistiques et de croisière grâce à son programme spatial (ROSCOSMOS), qui lui permet d’acquérir des technologies ayant des applications tant civiles que militaires;

M. considérant que de nombreuses entreprises, notamment en Serbie, en Arménie, au Kazakhstan, en Turquie, en Inde et en Chine, sont prêtes à prendre des risques considérables pour satisfaire les demandes russes d’achat de biens frappés d’interdiction par l’Union;

N. considérant que la Russie a établi de nouvelles voies d’importation de biens à double usage, principalement via la Chine, la Turquie, Chypre et les Émirats arabes unis, pays qui sont devenus des plateformes pour l’exportation, la réexportation et le transbordement de technologies et d’équipements de fabrication étrangère vers la Russie; que la quantité de ces importations a déjà dépassé les niveaux d’avant la guerre; qu’à titre d’exemple, les importations russes de microprocesseurs et/ou de semi-conducteurs sont passées de 1,82 milliard de dollars en 2021 à 2,45 milliards de dollars en 2022 (en glissement annuel);

O. considérant que, selon certaines sources, la Russie a importé en 2022 des aéronefs sans pilote de Chine, de Hong Kong, d’Inde, de Turquie ainsi que de pays de l’Union, à savoir les Pays-Bas et l’Allemagne;

P. considérant qu’en l’absence de sanctions visant le commerce des céréales russes, le Kremlin a tiré parti du blocus céréalier de la mer Noire pour écarter agressivement l’Ukraine de ses marchés traditionnels et accroître ses propres exportations, et a continué d’exporter des céréales volées dans les territoires occupés de l’Ukraine;

1. réaffirme son soutien indéfectible à l’indépendance, à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine, à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues, et affirme que la politique de l’Union est de voir l’Ukraine sortir victorieuse de l’invasion et rétablie dans ses frontières de 1991 internationalement reconnues; condamne de nouveau avec la plus grande fermeté la guerre d’agression illégale, non provoquée et injustifiable de la Russie contre l’Ukraine;

2. exige que la Russie et ses mandataires cessent toutes leurs actions militaires, en particulier les attaques génocidaires contre les zones résidentielles et les infrastructures civiles, ainsi que le transfert forcé d’enfants ukrainiens vers la Fédération de Russie et la Biélorussie, et que la Russie retire complètement et inconditionnellement l’ensemble de ses forces militaires et mandataires tout comme leurs équipements militaires de l’ensemble du territoire internationalement reconnu de l’Ukraine;

3. salue le dernier train de sanctions annoncé le 2 novembre 2023 par les États-Unis et demande le maintien d’une coordination étroite des mesures restrictives visant à affaiblir la capacité de la Russie à poursuivre son agression;

4. demande la préparation et la mise en œuvre rapides d’un nouveau train de sanctions de l’Union qui renforcerait et rendrait plus efficaces les mesures restrictives déjà en place et compliquerait les tentatives de la Russie et des pays tiers de contourner ces mesures, notamment:

a. en imposant des mesures visant à perturber tous les maillons de la chaîne d’approvisionnement militaire russe et en ciblant les acteurs extérieurs qui chercheraient à appuyer les efforts de guerre de la Russie, notamment par la production de drones et de missiles;

b. en infligeant des sanctions supplémentaires visant des acteurs économiques russes puissants, notamment, entre autres, les entreprises russes encore présentes sur les marchés de l’Union, telles que Lukoil, en réduisant la coopération de l’Union avec Moscou dans le domaine des combustibles nucléaires et en intégrant la société d’État russe de l’énergie atomique Rosatom dans le régime de sanctions;

c. en interdisant l’importation de diamants russes et en sanctionnant l’entreprise publique Alrosa, et en déployant à grande échelle des systèmes de suivi de l’origine des diamants fondés sur les nouvelles technologies;

d. en renforçant l’application du plafonnement des prix du pétrole et le respect du plafonnement des prix, notamment en exigeant que les attestations de prix pour les cargaisons de pétrole russe ne puissent être délivrées que par des négociants agréés figurant sur une liste d’autorisation et en exigeant de tous les pétroliers transitant par les eaux territoriales européennes qu’ils vérifient qu’ils sont en ordre d’assurance contre les marées noires;

e. en infligeant des sanctions complètes à toutes les compagnies pétrolières et gazières russes, y compris Gazprom, Gazpromneft, Rosneft, Surgutneftegas, Lukoil, Tatneft, Transneft, Sibur, Zarubezhneft et Novatek;

f. en imposant des sanctions complètes à Gazprombank, qui était auparavant exemptée de sanctions afin de faciliter les échanges dans le domaine de l’énergie;

g. en soumettant à une imposition intégrale les compagnies pétrolières et gazières occidentales demeurant en Russie;

h. en interdisant totalement les importations de GNL en provenance de Russie et toute coopération technologique visant à développer et servir le secteur du GNL;

i. en restreignant l’accès aux technologies de l’information et de la communication et leur développement futur, notamment en frappant d’interdiction la maintenance des services en nuage et en élargissant les sanctions à l’encontre des entités et des personnes qui financent et développent des technologies de pointe, mènent des recherches dans ce domaine ou importent de telles technologies pour le compte de la Russie;

j. en bloquant l’accès de la Russie aux services pétroliers occidentaux;

k. en sanctionnant les entreprises russes de services pétroliers;

l. en dialoguant avec les pays de l’OPEP+ afin d’éviter que l’économie russe ne soit revigorée par les bénéfices tirés des exportations de pétrole;

m. en limitant l’exportation de biens à double usage en harmonisant les définitions des biens considérés comme «à double usage» et en appliquant des restrictions de manière cohérente entre les pays;

n. en appliquant une procédure d’autorisation plus stricte pour les exportations et en se dotant d’une capacité de coercition accrue, en accordant une attention particulière aux produits faisant l’objet de sanctions qui sont vendus à des intermédiaires et à des pays étroitement liés à la Russie et susceptibles d’agir en tant qu’intermédiaires pour les entreprises russes;

o. en expulsant la Russie d’organisations internationales ou en suspendant son appartenance à de telles organisations, dont le Conseil de sécurité de l’ONU, l’Organisation mondiale du commerce, l’Organisation mondiale des douanes et le Fonds monétaire international, et en bloquant la participation de la Russie à des manifestations sportives et culturelles;

p. en imposant des sanctions secondaires aux entreprises de pays tiers qui approvisionnent la Russie en biens militaires et à double usage;

q. en mettant fin immédiatement à toute coopération avec la Russie au titre des programmes spatiaux et à la fourniture de tout matériel lié à de tels programmes;

r. en imposant des sanctions complètes aux dix plus grandes banques russes (Sberbank, VTB Bank, Gazprombank, Alfa-Bank, Rosselkhozbank (la banque agricole russe), the Credit Bank of Moscow, Bank Otkritie, VEB, Promsvyazbank et Sovcombank);

s. en fixant des échéances pour la sortie des banques étrangères restantes sur le marché russe, en particulier Raiffeisen, la plus grande banque occidentale toujours active en Russie, et en menaçant les établissements de pays tiers de sanctions secondaires afin de remédier aux faiblesses du dispositif;

t. en dialoguant avec les principales entreprises qui continuent d’exporter des biens vers la Russie et en informant l’opinion publique sur l’utilisation de ces biens dans le cadre de la guerre contre l’Ukraine, afin d’engager ces entreprises à respecter leurs modèles de responsabilité sociale et à prendre des mesures proactives pour faire cesser les transferts de technologie;

u. en sanctionnant les intermédiaires et les entreprises de pays tiers qui sont utilisés pour contourner le régime de sanctions actuel;

5. regrette la décision de nombreuses entreprises occidentales de continuer à commercer avec la Fédération de Russie, ce qui remet en question la volonté de leurs gouvernements de se dissocier de l’économie du régime dictatorial agresseur; invite ceux qui, jusqu’à présent, ont privilégié le profit au détriment de la responsabilité sociale des entreprises et de la décence publique à quitter le marché russe et à profiter de l’occasion pour s’engager dans le plan de redressement et de reconstruction de l’Ukraine, qui constituera le plus grand projet d’investissement en Europe;

6. invite les autorités compétentes à enquêter sur les violations les plus flagrantes des sanctions et à prendre des mesures répressives, par exemple dans le cas de la livraison par Siemens de turbines à la Crimée occupée, ou encore au sujet des entreprises qui ont participé à la construction du pont du détroit de Kertch; insiste sur le fait que les entreprises qui enfreignent les sanctions de l’Union devraient être exclues de tout fonds de l’Union, coopérer pleinement aux enquêtes et remédier à la situation;

7. invite l’Union et ses États membres à collaborer plus étroitement avec les partenaires internationaux afin d’éviter tout nouveau contournement des sanctions imposées à la Russie et toute nouvelle violation du contrôle des exportations par leur intermédiaire; demande, en outre, une coordination accrue avec les partenaires démocratiques, en particulier le G7, et se félicite des récentes sanctions américaines visant à perturber la chaîne d’approvisionnement de la Russie pour les biens les plus prioritaires;

8. invite les États membres et le Service européen pour l’action extérieure à faire pression sur les pays tiers, en particulier ceux qui aspirent à l’adhésion à l’Union ou à des liens plus étroits avec l’Union, pour qu’ils cessent d’aider la Russie à contourner les sanctions de l’Union et qu’ils fassent à leur tour pression sur leurs entreprises afin qu’elles cessent de coopérer avec la Fédération de Russie;

9. souligne que la Biélorussie doit aussi appliquer ces mesures restrictives; constate que, malgré de nombreuses demandes en ce sens, la Biélorussie n’applique pas les sanctions imposées à Moscou, inflige des violences inacceptables à ses citoyens, coopère avec la Russie dans le cadre de l’agression contre l’Ukraine et, avec la Russie, instrumentalise la migration à des fins politiques et mène des actions hybrides ciblant l’Union européenne;

10. réaffirme sa ferme conviction que la Russie doit payer la facture de la reconstruction de l’Ukraine, étant donné qu’il est logique que l’auteur de l’agression paye pour ses crimes de guerre et répare tous les dégâts; invite de nouveau, à cet égard, la Commission et les États membres à prendre l’initiative d’élaborer un mécanisme multilatéral permettant de superviser, de faire respecter et de verser les réparations russes à l’Ukraine et permettant d’utiliser à cette fin les fonds et les actifs gelés à la suite de l’invasion russe;

11. charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au Conseil, à la Commission, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au secrétaire général de l’Organisation des Nations unies, au Conseil de l’Europe, à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, au Haut‑Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, au Comité international de la Croix-Rouge, à la Cour pénale internationale, au Président, au gouvernement et au Parlement de la Fédération de Russie et au Président, au gouvernement et au Parlement de l’Ukraine.

 

Dernière mise à jour: 7 novembre 2023
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