12. Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC)
Le Président. - L’ordre du jour appelle la déclaration de la Commission sur le résultat de la 10e conférence des parties organisée à Buenos Aires par la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.
Dimas,Commission. - (EL) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je voudrais dire en premier lieu que je me rallie totalement à ce qu’a dit le président au sujet de la catastrophe sans précédent qui a frappé l’Asie du Sud-Est et féliciter le Parlement européen pour avoir répondu immédiatement à la question de l’aide, aide que l’Union européenne débloquera en conséquence.
Je dois dire que l’Union européenne a fait preuve non seulement de générosité, mais également de rapidité et d’efficacité dans la réponse qu’elle a apportée à cette tragédie sans précédent. Elle s’est mobilisée immédiatement. Le lendemain de la catastrophe, des experts de l’Office d’aide humanitaire ECHO et du comité en matière de protection civile se sont rendus au Sri Lanka et en Thaïlande afin de contribuer à la coordination, à l’identification des problèmes, à l’évaluation de l’ampleur des dégâts et du besoin en certains produits, et à améliorer la coordination dans l’acheminement de ceux-ci. Ils resteront très certainement sur place pendant un certain temps afin de participer aux efforts encore plus importants qui sont fournis pour réhabiliter et reconstruire la région et afin de garantir la continuité de l’aide de l’Union européenne.
Je tiens tout d’abord à vous remercier de m’avoir donné l’occasion de débattre avec vous ce soir des résultats de la 10e conférence des parties à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, qui s’est tenue à Buenos Aires le mois dernier. Avant toute chose, je dois dire que le président de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire, M. Florenz, et sept autres membres y ont assisté et que leur participation a joué un rôle crucial. Ils nous ont soutenus, aidés et conseillés tout au long des négociations, jusqu’au bout. En particulier le dernier jour, nous sommes restés en contact permanent lors des négociations très ardues qui se sont tenues là-bas. Certes, les résultats n’ont pas été spectaculaires. Toutefois, ils ont dépassé nos attentes, en particulier les résultats que nous anticipions avant la ratification du protocole de Kyoto par la Russie, autrement dit, avant que nous ne confirmions l’entrée en vigueur du protocole de Kyoto. Dès lors, nous pouvons dire que, dans l’ensemble, les résultats sont positifs. En voici quelques exemples.
Le premier point, et probablement le plus important, concerne la discussion sur l’après-Kyoto, protocole qui devrait débuter en 2005. Nous avons récolté de nombreuses réactions à ce sujet. Les États-Unis et certains pays en développement refusaient pratiquement toute discussion. Pour être exact, ils ont même refusé de discuter de la possibilité d’entamer des discussions en 2005. Après d’âpres négociations, comme je l’ai dit précédemment, nous sommes parvenus à un accord grâce à une proposition soumise par l’ambassadeur argentin, M. Estrada. Il suggère en effet d’organiser un séminaire en mai sur deux questions essentielles: la situation actuelle d’une part, et - nous avons insisté pour qu’elle soit incluse - l’évolution des événements d’autre part. Il s’agit d’un premier pas, hésitant selon moi, mais un premier pas tout de même, dans la direction de négociations, d’une discussion sur les répercussions des changements climatiques au-delà de 2012. Je dois dire que nous avions des alliés lors de ces négociations, ce qui représente une évolution importante. Il s’agissait de nombre de pays en développement, tels que le Brésil, l’Afrique du Sud et de nombreux autres pays africains, qui étaient hésitants auparavant, mais ont soutenu, cette fois-ci, les efforts que nous déployons pour entamer les débats.
Un autre point très important concerne l’accord sur un programme de cinq ans visant à aider les pays en développement à se conformer aux obligations en matière de changement climatique. À ce propos, je peux dire que ces pays, qui ont également tout à gagner de ce programme, nous ont considérablement soutenus.
Le troisième point important concerne certaines précisions sur le mécanisme pour un développement propre. C’est l’un des mécanismes prévus par le protocole de Kyoto et qui revêt aujourd’hui une grande importance eu égard à l’entrée en vigueur du protocole et la mise en application du système d’échange de droits d’émission pour le dioxyde de carbone au sein de l’Union européenne. De nombreuses applications seront soumises à l’approbation du bureau exécutif à Bonn, lequel doit donc être renforcé et devenir plus transparent. Il est nécessaire de lui allouer des fonds si l’on veut qu’il soit efficace et en mesure d’accompagner le fonctionnement des mécanismes de Kyoto.
Une autre question liée au mécanisme pour un développement propre a trait au système d’enregistrement, indispensable au bon fonctionnement de l’ensemble du système d’échange prévu. Il existe également d’autres questions techniques qui sont très importantes, mais qui ne reçoivent pas l’attention qu’elles méritent. Nous avons discuté de tous ces éléments et avons abouti à des solutions et des accords.
Je pense que l’Union européenne a réalisé une présentation majeure du système d’échange de droits d’émission de dioxyde de carbone, entré officiellement en vigueur depuis le 1er janvier. Cette présentation a démontré et, dans un certain sens, assis le rôle de pionnier que joue l’Union européenne dans le domaine des changements climatiques et a suscité un vif intérêt. Des ministres de pratiquement tous les pays ont pris part à la discussion sur le système d’échange, qui a été suivie de multiples rencontres bilatérales avec des pays désireux de coopérer, tels que la Norvège, qui possède un système d’échange opérationnel depuis le 1er janvier, le Japon et le Canada. Même les États-Unis ont manifesté un certain intérêt, sans toutefois pouvoir participer étant donné qu’ils n’ont pas signé le protocole de Kyoto. Ce système est restreint et ne s’applique qu’aux pays signataires du protocole de Kyoto.
Enfin, je tiens à dire que le point le plus important est que nous avons mis en place un réseau grâce aux contacts bilatéraux que les députés européens et nous-mêmes entretenions soit avec les parlementaires nationaux, soit avec d’autres délégations. Cette mise en réseau nous permettra d’être en mesure de convaincre les pays que nous devons rallier à notre cause si nous voulons promouvoir les objectifs fixés pour la période postérieure à 2012, en particulier les États-Unis, la Chine et l’Inde, avec lesquels nous devons absolument trouver un moyen de parvenir à un accord.
Pour terminer, la discussion que nous avons eue à Buenos Aires et l’issue de celle-ci, globalement positive, ont pour nous été l’occasion de stimuler le dialogue au sein de l’Union européenne sur ce qui se passera après 2012. Deux possibilités s’offrent à nous. D’une part, nous avons eu le Conseil des ministres qui s’est tenu le 20 décembre et qui a réaffirmé l’engagement de l’Union européenne à éviter que la température moyenne de la planète n’augmente de plus de deux degrés Celsius au cours des prochaines années, de même que la nécessité de fixer des plafonds de pourcentage plus ambitieux pour les émissions de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre. D’autre part, nous avons le Conseil européen de printemps, pour lequel la Commission prépare deux documents: un rapport de travail sur les coûts et les avantages de l’action ou de l’inaction dans le domaine des changements climatiques et une communication de la Commission sur l’évaluation des stratégies requises pour la période postérieure à 2012 et sur ce que nous ferons d’ici là. Bien évidemment, nous attendons également la contribution du Parlement européen en la matière.
Je voudrais dire que les résultats obtenus à Buenos Aires, considérés comme maigres par la presse et les médias, sont meilleurs que ce que les médias ont laissé entendre. Je répète une nouvelle fois que ces résultats ne sont pas ceux que nous attendions, mais qu’ils sont meilleurs que ceux que nous escomptions avant de partir. Pour cette raison, nous pouvons dire qu’ils sont globalement positifs.
Florenz (PPE-DE), au nom du groupe. - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, j’approuve totalement, Monsieur le Commissaire, ce que vous venez de dire. Je pense que, dans l’ensemble, la conférence est une réussite, même si nous n’avons peut-être pas pu imposer les chiffres que nous souhaitions, ni atteindre l’objectif poursuivi. Je voudrais maintenant remercier une nouvelle fois le président néerlandais en exercice du Conseil, qui, bénéficiant de votre aide, Monsieur le Commissaire, est réellement parvenu à fusionner ces trois institutions européennes en une seule et même équipe, ce qui permettra à l’Europe de jouer à l’avenir un rôle crucial sur la scène internationale non seulement via l’euro, mais également dans les domaines de la politique environnementale et climatique. À ce propos, l’Union, selon moi, joue non seulement le rôle de pionnier, mais détermine également la direction à prendre. L’objectif que nous poursuivons est d’assurer notre capacité à participer aux choix des moyens servant à atteindre nos objectifs, tant en Europe que dans le reste du monde.
Il y a quelques semaines, l’Agence européenne pour l’environnement, installée à Copenhague, a déclaré clairement que, munis des instruments à notre disposition, nous étions sur la bonne voie. En plus, vous venez juste de parler de la mise en œuvre. Par conséquent, il était logique que, à Buenos Aires, nos trois institutions influencent les décisions sur ce qui se passera après 2012, année qui marquera le 10e anniversaire du protocole de Kyoto. En effet, nos industries ont besoin de données leur permettant de calculer si elles sont à même de trouver une base juridique pour leurs investissements après 2012. Il est dès lors important que cette Assemblée prenne également d’autres mesures afin de nous rapprocher des objectifs que nous nous sommes fixés.
Il s’agit certes d’une tâche pour les industries d’Europe et du monde entier, mais nous devons aussi prendre notre courage à deux mains pour inclure également les voyages, les transports et le fioul domestique. Je ne sais que trop bien que ces mesures auront du mal à passer au niveau politique. Toutefois, si, à l’avenir, il revient uniquement à l’industrie de mettre en œuvre les objectifs de Kyoto, le coût que celle-ci devra supporter, aussi bien en Europe que dans le reste du monde, sera immense. Il nous faut d’autres épaules pour nous aider à porter ces fardeaux.
Par conséquent, vous avez eu raison, Monsieur le Commissaire, de mentionner les mesures d’économie d’énergie prises en Europe. Vous faites bien de vouloir une efficacité énergétique plus grande et nous devons, nous aussi, bien évidemment, promouvoir les énergies renouvelables intelligemment. Voilà le fond de ma pensée et j’espère que nous progresserons à ce niveau.
Buenos Aires présentait bien sûr quelques aspects moins réjouissants, et, moi qui ne me cache pas d’être l’ami des États-Unis, j’ai été peiné et très déçu par leur approche carrément destructrice. Pourtant, il y a des raisons d’espérer - peut-être pas en se tournant vers le gouvernement américain, mais vers dix États américains qui ont entrepris des initiatives contre les gaz à effet de serre, en totale indépendance par rapport à Washington. On observe également des signes vraiment prometteurs le long de la frontière canadienne et ailleurs. J’irais même jusqu’à dire que, en ce qui concerne la politique des transports, l’Europe peut apprendre d’États comme la Californie. Aux États-Unis également, je pense que la démocratie de bas en haut va faire bouger les choses dans ce domaine, et c’est un point que je ne peux qu’encourager.
Permettez-moi une nouvelle fois de remercier chaleureusement M. Dimas et M. Van Geel, le président en exercice du Conseil, pour avoir jeté les arguments européens dans la balance. Le fait que la balance n’a pas penché du côté souhaité n’était pas notre problème. Nous n’abandonnerons pas la lutte, convaincus que nous sommes de labourer le bon sillon, image que, étant moi-même agriculteur, je me plais à utiliser.
Je vous remercie de votre patience, Monsieur le Président.
PRÉSIDENCE DE M. ONESTA Vice-président
Corbey (PSE), au nom du groupe. - (NL) Monsieur le Président, en premier lieu, je tiens également à remercier M. Florenz pour avoir emmené la délégation comme il l’a fait, ainsi que M. Dimas et la présidence néerlandaise pour l’excellente relation de travail.
Je commencerai par le pôle Nord, qui se réchauffe plus vite que prévu: les glaciers fondent, le permafrost se dégèle et les forêts voient leurs contours se modifier. Les habitants du pôle Nord sont maintenant obligés de changer de mode de vie afin de s’adapter au réchauffement climatique. Les sociétés du pôle Nord vivent à petite échelle ce à quoi la planète tout entière sera bientôt confrontée. Une double tâche s’impose: s’adapter aux changements climatiques tout en les contenant au maximum.
Au vu de cet immense défi, les résultats de la conférence de Buenos Aires sur les changements climatiques sont particulièrement décevants. Certes, le fait qu’il ait été possible de maintenir le processus de Kyoto sur les rails grâce à un séminaire est une bonne chose. Bien sûr qu’il est positif que l’Union européenne se soit imposée et que ce séminaire ait permis d’étudier la situation future, mais il s’agit de résultats lamentables et maigres.
Nous devons également constater que l’UE se retrouve de plus en plus isolée. Naturellement, plusieurs États américains sont disposés à s’engager dans la réduction des gaz à effet de serre et, en effet, notre système d’échange de droits d’émission suscite un certain intérêt. Il est également vrai que très peu de scientifiques à l’heure actuelle contestent l’influence des activités humaines sur le climat. Nous devons apprécier notre bonne fortune, mais l’on retiendra surtout de Buenos Aires que l’urgence ressentie en Europe n’est pas partagée dans d’autres régions du monde. Et je me demande pourquoi. Le gouvernement américain ne se sent-il pas responsable? Est-ce dû à un manque de discernement de la part du reste du monde ou à un manque d’adresse diplomatique de notre part? Notre force de persuasion faiblit-elle?
Nous devons malheureusement en conclure que l’UE ne possédait pas l’influence nécessaire. Des objectifs contraignants pour la période postérieure à 2012 valent la peine d’être poursuivis, mais ce souhait est malheureusement devenu un cheval de bataille européen. L’UE devra être extrêmement bien préparée pour le séminaire du printemps. Il convient également de soumettre des propositions pratiques, ce qui requiert une capacité de direction et une certaine force de persuasion, mais, avant tout, du courage. Des propositions sensées, productives et solides doivent être mises sur la table sans plus tarder. L’UE devra également s’ouvrir à des approches adoptées dans d’autres pays. Je distingue au moins trois solutions que nous devons tous examiner.
Premièrement, nous devons nous concentrer davantage sur les ajustements à faire et sur l’aide à apporter aux pays en développement, en particulier, pour qu’ils soient capables de procéder à ces ajustements. Les interventions des délégations d’Afrique et d’Amérique centrale présentes à Buenos Aires se sont toutes ouvertes sur une présentation de changements climatiques peu agréables. Procéder à des adaptations n’est pas facile, mais il ne fait aucun doute qu’il faudrait davantage que de l’aide lorsque de grandes catastrophes frappent. L’adaptation du mode de vie est fondamentale et des programmes crédibles doivent être élaborés à cet effet.
La deuxième solution concerne le transfert des technologies, point pour lequel nous devons nous investir totalement, en abandonnant nos réserves idéologiques vis-à-vis du mécanisme pour un développement propre.
Troisièmement, nous devrons consacrer beaucoup moins d’énergie à une approche nationale et à des objectifs nationaux, et nettement plus à des objectifs sectoriels. Dans les discussions que notre délégation a menées, l’approche sectorielle a été considérée comme viable. Nous devrons nous attabler avec les industries de l’acier, du ciment et du papier. Ces secteurs doivent faire face à une concurrence internationale et la fixation d’objectifs internationaux en fonction de la technologie la plus adaptée est donc la meilleure façon d’avancer. L’OMC peut jouer un rôle à ce niveau.
Davies (ALDE), au nom du groupe. - (EN) Monsieur le Président, si les résultats de la conférence des parties qui s’est tenue à Buenos Aires sont meilleurs que prévu, les attentes de la Commission devaient être très limitées dès le départ. Le commissaire a reçu son baptême du feu dans le monde très difficile des négociations sur le changement climatique. J’espère que cet épisode lui a donné l’envie de résoudre les problèmes et de rassembler le monde derrière un objectif commun.
Les habitants de Carlisle sont aujourd’hui confrontés aux pires inondations jamais enregistrées, un déluge sans précédent s’étant produit ces derniers jours. J’espère que cette Assemblée se joindra à moi pour rendre hommage aux service de secours, aux organisations de bénévoles et aux nombreux citoyens pour le travail qu’ils ont accompli en s’efforçant d’atténuer les problèmes et, en particulier, pour leurs actions d’aide aux personnes âgées et aux autres se trouvant en situation de détresse.
Il est impossible d’affirmer avec certitude que ces inondations constituent un signe révélateur d’un réchauffement global, mais les événements climatiques extrêmes ont été désignés parmi les conséquences du changement climatique. Les inondations de Carlisle, notamment, soulignent l’importance de voir l’Union continuer à guider le monde dans le cadre de l’élaboration de politiques visant à lutter contre les effets du réchauffement global.
Ces dernières semaines, le gouvernement britannique a fait part de sa détermination à faire en sorte que la question du changement climatique figure en bonne place dans son agenda lorsqu’il occupera la présidence. Il est donc particulièrement surprenant que ce même gouvernement hypothèque le lancement du système d’échange des droits d’émission, principale mesure européenne visant à réduire les rejets de gaz à effet de serre.
Le plan d’allocation du Royaume-Uni a été présenté par le gouvernement britannique et approuvé par la Commission en juillet dernier. Londres est revenue trois mois plus tard avec un plan révisé réclamant des quotas plus généreux et plus nombreux, nettement supérieurs à ceux demandés par les autres gouvernements. Le gouvernement britannique menace de saisir la justice si les plans ne sont pas approuvés. Cela ressemble à une extraordinaire démonstration d’incompétence ou de mauvaise foi. Les belles paroles du gouvernement britannique sonnent désormais particulièrement creuses.
Avant que le commissaire ne clôture ce débat, je voudrais qu’il explique exactement la situation actuelle à cette Assemblée. En l’état actuel des choses, le Royaume-Uni participe-t-il au système d’échange des droits d’émissions ou non? Vos services juridiques vous indiquent-ils, Monsieur le Commissaire, que Londres a des arguments valables ou l’approbation finale des allocations du système d’échange de droits d’émission incombe-t-elle à la Commission, comme l’indique la directive? La position actuelle et les retards survenus engendrent-ils de véritables problèmes quant au succès à long terme du système?
J’espère que le commissaire sera en mesure de répondre à ces questions. J’espère qu’il comprend qu’il ne sera pas condamné par l’ensemble des députés britanniques s’il se prononce très clairement sur cette question.
Frassoni (Verts/ALE). - (EN) Monsieur le Président, la COP 10 marquait le 10e anniversaire de l’entrée en vigueur de la convention-cadre sur les changements climatiques. Il s’agissait également de la première COP organisée avec la certitude que le protocole de Kyoto entrera en vigueur. Cette réunion a été décrite par un observateur comme des «pourparlers sur les pourparlers concernant l’avenir».
Nous ne pouvons dissimuler les très évidentes difficultés à initier un débat sur la période postérieure à 2012. Nous ne sommes pas surpris, puisque le Conseil n’a pas réussi lui non plus à se mettre d’accord sur les quotas à attribuer et qu’il est toujours difficile d’évoquer l’avenir alors que la situation présente reste à ce point insatisfaisante, comme c’est le cas pour le moment.
La COP 10 a également constitué un forum pour des centaines d’événements annexes, de conférences de presse, de réunions, d’ONG et d’intervenants. C’est un point auquel nous attachons de l’importance, car si nous souhaitons que le protocole de Kyoto devienne une réalité, nous avons besoin de bien davantage que des gouvernements pour le mettre en œuvre.
Je voudrais souligner deux résultats de la COP 10. Le premier est l’obstruction parfaitement manifeste et ouverte pratiquée par les États-Unis. Monsieur le Commissaire, vous n’avez pas abordé cette question, mais je pense que vous devriez. Vous devriez également nous dire ce que vous comptez faire à cet égard. Ce ne fut pas seulement une déception majeure, ce fut un obstacle majeur, un changement de stratégie. Les États-Unis n’affirment plus qu’ils ne signeront pas et qu’ils s’abstiendront de pratiquer l’obstruction. Ils vont au contraire de faire obstruction. Ils le font et continueront à l’avenir.
Monsieur le Commissaire, nous souhaiterions connaître vos impressions quant au fait que l’Union doit se préparer à négocier le cadre du protocole de Kyoto sans que les États-Unis ne demandent l’exclusion des pays qui ne sont pas signataires du protocole. C’est une question dont nous devons commencer à débattre.
Le second point, qui a déjà été soulevé, est la décision de convoquer un séminaire d’experts gouvernementaux. Le mandat est très vague, à l’instar de ce qu’ont déjà indiqué de nombreux intervenants, mais l’existence d’une volonté politique rendra les choses possibles et nous pourrons lancer une discussion sérieuse - avec ceux qui le souhaitent - sur les engagements postérieurs à 2012.
Qu’attendons-nous de la Commission et du Conseil? Ils doivent, selon nous, se préparer à la réunion de Bonn, prévue en mai, en élaborant une proposition globale sur une future politique climatique qui soit cohérente au vu des engagements pris par l’Union de maintenir le réchauffement mondial à +2°C maximum par rapport aux niveaux antérieurs à l’industrialisation et d’atteindre le pic d’émissions mondiales durant les deux prochaines décennies.
Deuxièmement, la troïka européenne doit se lancer dans une action diplomatique d’envergure afin d’aborder et de prendre en considération les inquiétudes légitimes des pays en développement. Ne nous leurrons pas à ce niveau. Faute d’allouer des ressources sérieuses aux mesures d’adaptation, les pays en développement ne suivront pas, alors que nous voulons qu’ils luttent à nos côtés.
Troisièmement, l’Union doit redoubler d’efforts pour atteindre les objectifs de Kyoto et au-delà. Il est évident que si nos États membres ne sont pas en mesure de respecter le protocole de Kyoto aujourd’hui, nous ne serons pas crédibles à l’avenir.
(IT) Monsieur le Commissaire, vous avez omis un autre élément qu’il convient, selon moi, de souligner dans ce débat: l’attitude du ministre italien, M. Matteoli, qui s’est isolé du reste de la délégation européenne. Je ne pense pas qu’il faille faire preuve de diplomatie à ce sujet. En effet, nous avons tous défendu la position européenne alors que M. Matteoli s’est clairement distancié de celle-ci, de manière inopportune, donnant lieu à un certain malaise, tant pour vous que pour le reste de la délégation européenne. Son attitude trouve une explication très simple: M. Matteoli et son gouvernement ne pensent pas qu’agir dans le cadre du protocole de Kyoto dans le but de limiter les effets des changements climatiques doit devenir une priorité absolue, ni aujourd’hui ni après 2012.
La Commission, le Conseil et ce Parlement devraient commencer à réfléchir à des moyens de convaincre les pays européens qui ne respectent pas encore le protocole de Kyoto de faire un pas dans la bonne direction.
Musacchio (GUE/NGL), au nom du groupe. - (IT) Monsieur le Président, même la toute récente catastrophe provoquée par le tsunami nous montre combien notre relation avec la nature est fondamentale pour garantir la survie des hommes et de la civilisation. C’est justement cela que menace les changements climatiques. La réduction drastique des émissions de CO2 est donc devenue l’une des premières priorités et un facteur qui devrait conditionner chaque décision dans les domaines économique et social.
L’Europe s’est engagée en faveur des objectifs de Kyoto et de l’après-Kyoto, ce qui met davantage en lumière l’immense responsabilité du gouvernement américain, qui reste encore opposé à la ratification de Kyoto ou à l’examen de l’après-Kyoto, lequel était censé avoir lieu à Buenos Aires. Même l’Europe, je dois l’admettre, est encore loin de jouer pleinement son rôle: elle a autorisé que l’on dénature le protocole de Kyoto en introduisant le système d’échange de droits d’émission et, surtout, ne met pas en pratique, loin s’en faut, les réductions des émissions convenues. En fait, les émissions sont encore en augmentation et, dans certains pays comme l’Italie, enregistrent même une hausse substantielle.
Nous devons nous pencher sur la raison d’une telle évolution de la situation. Le fait est que l’on a laissé la réalisation des objectifs de Kyoto aux seuls mécanismes du marché, en vain jusqu’à présent. Et ce alors que la mondialisation du libre-échange a donné naissance à une multitude de facteurs perturbateurs: la production s’est déplacée dans des pays moins sévères en matière de protection de l’environnement, entraînant par conséquent une hausse des émissions; les pays riches gaspillent davantage d’énergie dans les transports et pour les usages domestiques; et la privatisation et la libéralisation du secteur de l’énergie, au lieu de promouvoir des économies d’énergie et des sources d’énergie propres, ont conduit à une concurrence entre les sources de pollution traditionnelles.
Si nous souhaitons - comme nous le devons - mettre Kyoto en pratique et faire encore plus que ce qu’il prescrit, nous devons adopter une approche totalement différente: tous nos efforts dans les domaines de la recherche scientifique, de la politique énergétique et des infrastructures, doivent tendre à la réalisation de cet objectif par le biais d’un plan stratégique majeur, correctement structuré, financé adéquatement et basé sur la participation démocratique.
Nous avons besoin d’un programme nettement plus complet que les anciennes formules du marché, tombées en désuétude, qui représente plutôt le vrai défi d’un avenir durable: une nouvelle économie sociale et environnementale, articulée autour de principes de démocratie et de solidarité avec le reste de la planète. Tout cela apparaît encore plus clairement et semble encore plus inévitable lorsque nous réalisons que le protocole de Kyoto n’est que le premier tout petit pas. À Buenos Aires, le gouvernement américain a empêché quiconque d’aborder ce qu’il importe de réaliser concrètement pour l’après-Kyoto: à savoir un changement révolutionnaire nécessaire. Je dois reconnaître que le gouvernement italien s’est joint à cette position réactionnaire.
Telle est la véritable mission qui attend une Europe différente, une Europe capable de parler au reste du monde dans l’optique que je viens de définir et, avant tout, de mener des actions concrètes afin de créer une tout autre configuration de celle qui, malheureusement, prévaut à l’heure actuelle.
Blokland (IND/DEM), au nom du groupe. - (NL) Monsieur le Président, ces dernières années, cette Assemblée a tenu nombre de débats sur la nécessité d’une politique climatique. Le mois prochain, le protocole de Kyoto entrera en vigueur, il est donc utile de revenir sur les décisions prises ces dernières années. Ce qui me frappe, c’est que l’on accorde moins d’attention à la politique en matière de climat. Il devient de plus en plus difficile d’obtenir une majorité pour la prise des décisions qui s’imposent. Selon moi, cela provient du fait que nous remarquons très peu les changements climatiques et que les répercussions néfastes seront ressenties avec le plus d’acuité dans les pays lointains. Certaines personnes s’imaginent également que la réduction des gaz à effet de serre aura un impact négatif sur la croissance économique.
Je voudrais attirer l’attention des députés sur une étude réalisée par l’IIASA, l’Institut international pour l’analyse des systèmes appliqués, situé à Laxenburg en Autriche. Les scientifiques ayant participé à cette étude ont démontré que la politique climatique peut être appliquée de manière bien moins onéreuse, à condition qu’elle soit liée à la politique d’amélioration de la qualité de l’air. Il s’ensuit dans ce cas une réduction considérable des coûts nets, mais nous devrions également envisager de réglementer d’autres gaz que le CO2. Ainsi, une politique ne doit pas être financièrement lourde pour être efficace.
Je voudrais également profiter de l’occasion pour attirer l’attention de la Commission sur les problèmes liés au système d’échange de droits d’émission. La directive a fait l’objet de nombreuses interprétations, ce qui risque de causer des problèmes considérables. Par exemple, dans plusieurs pays, l’industrie chimique n’a pas été incluse dans le champ d’application de la directive. D’autres États membres y ont vu une raison d’exclure leur industrie chimique du champ d’application de la directive dans le but d’éviter toute distorsion de concurrence.
En outre, dans certains États membres, les amendes infligées aux entreprises qui dépassent leur quota d’émission sont fiscalement déductibles. Le marché intérieur manque, une nouvelle fois, de règles harmonisées. Je voudrais que M. Dimas me dise s’il en est conscient ou non et s’il est possible de proposer une modification de la directive afin de bannir ces pratiques. De même, dans certains États membres, l’industrie bénéficie du soutien de l’État. Dans mon pays, les Pays-bas, le gouvernement a dégagé 600 millions d’euros pour acheter des droits d’émission à l’étranger, ce qui a débouché sur une réduction moins importante des émissions de l’industrie. Je souhaiterais entendre l’avis du commissaire sur ce point également.
Lors du débat sur cette directive, cette Assemblée a adopté deux de mes amendements, qui auraient dû empêcher ce genre de problème. Or, je constate que nous n’y avons quand même pas échappé. Notre politique en matière de climat devrait tendre à améliorer la qualité de notre environnement. C’est ce que nous avons décidé et nous devrions nous y tenir. La Terre ne nous appartient pas; nous n’en sommes que des occupants temporaires.
Aylward (UEN), au nom du groupe. - (EN) Monsieur le Président, je salue l’entrée en vigueur du protocole de Kyoto à la date du 16 février, 132 pays ayant ratifié les dispositions de l’accord. La ratification récente du protocole par le gouvernement russe confère un statut juridique à cet instrument. Aux termes de cet accord, l’Union européenne s’engage à réduire d’ici 2012 les émissions de gaz à effet de serre de 8% par rapport aux niveaux de 1990. Je salue la promulgation de la directive relative au système communautaire d’échange des droits d’émission, qui contribuera à garantir le respect par l’Union européenne des obligations internationales sérieuses prévues par le protocole de Kyoto.
Le point négatif réside dans le fait que certains pays tels que l’Australie et les États-Unis n’ont pas souscrit aux modalités de cet accord. Personne n’ignore que les États-Unis représentent plus de 24% de l’ensemble des rejets annuels de gaz à effet de serre. L’efficacité de Kyoto se trouve affaiblie par le refus de Washington de signer l’accord. Le tableau n’est toutefois pas aussi sombre qu’il n’y paraît pour l’Amérique dans ce dossier politique. La Californie, état le plus peuplé des États-Unis, a d’ores et déjà adopté la taxe Pavley, dont l’objectif est de réduire l’utilisation des gaz à effet de serre de 22% d’ici 2012 sur son territoire. Je me réjouis de constater que d’autres états lui emboîtent le pas. Dix-neuf d’entre eux souhaitent mettre en œuvre cette initiative visant à réduire les rejets de gaz à effet de serre. Il est évident qu’un nombre croissant d’entreprises et de citoyens américains voient d’un œil favorable la lutte contre le changement climatique.
L’Union européenne doit utiliser toutes les voies diplomatiques à sa disposition pour motiver et persuader le gouvernement américain d’instaurer des mesures de réduction des rejets de gaz à effet de serre. Ceci peut et doit être fait par l’intermédiaire des structures de sommets transatlantiques entre les États-Unis et l’Union européenne. Nous avons besoin d’une approche internationale coordonnée pour aborder le changement climatique. Le protocole de Kyoto est actuellement l’unique cadre international existant au sein duquel les pays signataires peuvent coordonner leur approche de la question.
Le gouvernement britannique assumera la présidence de l’Union européenne dans le courant de cette année. J’espère, en sa qualité d’allié indéfectible de l’actuelle administration américaine, qu’il sera dans une position diplomatique de premier choix pour inciter le gouvernement américain à avancer dans ce dossier de manière plus constructive.
Gollnisch (NI). - Monsieur le Président, mes chers collègues, s’agissant du réchauffement climatique, sujet sur lequel l’ignorance va de pair avec des jugements très tranchés, je me bornerai à quelques questions.
Première question: y a-t-il vraiment réchauffement important et durable? Cela semble maintenant solidement établi, notamment grâce aux mesures effectuées sur les masses océaniques ou sur les grands glaciers.
Deuxième question: ce réchauffement n’a-t-il que des effets négatifs? Ce n’est pas nécessairement le cas, en Sibérie, par exemple, où la taïga et la toundra pourraient laisser place à d’autres paysages, mais il en va différemment, certes, des progrès terribles de la désertification en Afrique ou des catastrophes météorologiques du type El Niño.
Troisième question: si l’on décide de lutter contre ce phénomène, est-il certain qu’il soit dû essentiellement à l’activité humaine? Il y a eu des réchauffements et des glaciations quatre fois au moins au cours du quaternaire, qui ne pouvaient être imputés à l’homme.
Quatrième question: si le réchauffement est bien dû aux rejets dans l’atmosphère de gaz à effet de serre tels que le gaz carbonique, issus de la combustion par l’homme des sources d’énergie organiques fossiles, des mesures s’imposent assurément, mais est-il utile que l’Europe occidentale fasse un effort au prix de sa propre compétitivité, alors que d’autres puissances, comme les États-Unis et la Chine, respectivement premier et deuxième pollueurs mondiaux, s’en lavent les mains, compromettant à coup sûr le succès de l’opération, ceci malgré les informations encourageantes venant de certains États américains que vient de nous donner l’orateur précédent?
Enfin, cinquième et dernière question: la reforestation systématique, l’utilisation d’énergies renouvelables ou nouvelles doivent sans aucun doute être encouragées. Mais il faut être réaliste, il faudra beaucoup de temps avant qu’elles suffisent aux besoins. En attendant, ne devrait-on donc pas, même d’un point de vue écologique, s’interroger sur la diversification des sources d’énergie et notamment le recours au nucléaire? Le Front national français, il y a vingt-cinq ans, a été la première force politique à attirer légitimement l’attention sur les risques de l’énergie nucléaire, prédiction hélas vérifiée par la catastrophe de Tchernobyl. Mais la science progresse et la technologie peut évoluer: la fusion utiliserait la matière sans laisser les déchets, durablement dangereux, des procédés actuels. Et en attendant que l’on progresse dans cette voie, même dans le procédé de fission, il peut exister des éléments, comme le thorium, qui présentent moins de risques que ceux que l’on connaît aujourd’hui. C’est sans aucun doute dans cette voie que la science peut s’engager: il y faut un effort considérable et il faut qu’il soit libre de tout dogmatisme.
Doyle (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, l’utilisation du terme «réussite» dans ce contexte dépend des attentes de chacun. Sa signification diffère d’une personne à une autre. Il est selon moi difficile de parler de «réussite» sans prendre en considération les interactions et les discussions en marge du sommet de Buenos Aires. À Buenos Aires, j’ai trouvé la réussite en évoquant avec d’autres collègues - en particulier un nombre élevé de représentants politiques et économiques américains et d’autres délégués américains - le soutien dont nous bénéficions sur le terrain, aux États-Unis et en Australie, contrairement à la position de l’administration Bush et, bien entendu, à celle du Premier ministre australien sur le protocole de Kyoto et le changement climatique. Tel est le sentiment de réussite que j’ai ramené de Buenos Aires. Il existe un soutien considérable et croissant de la part de neuf ou dix états américains et même de certaines entreprises actives dans le secteur de l’énergie, de certaines compagnies pétrolières et de l’Amérique économique en général. Ce soutien continue de s’étendre.
Je mesure également la réussite à l’aune des progrès de la Chine et de l’attitude des autorités chinoises - la Chine étant un pays en développement confronté à des défis démographiques considérables. Le Brésil change lui aussi d’attitude et suit notre voie. Voilà comment je mesure la véritable réussite de Buenos Aires, en tant que révélateur des progrès réalisés depuis les COP précédentes auxquelles j’ai assisté.
Pour semer encore un peu plus le trouble, il s’agissait de la COP 10 alors que la COP 11 arrive l’année prochaine. Nous avons la réunion spéciale pour poursuivre les discussions. Nous ne sommes pas autorisés à l’appeler post-Kyoto ou post-2012, mais nous ne pouvons ignorer que le débat en sera imprégné. Par ailleurs, l’année prochaine aura lieu la MOP 1, ce qui sèmera davantage la confusion dans l’esprit du profane! Je pense que cet événement implique la rencontre des parties signataires de Kyoto, à la différence de la conférence des parties, qui ont toutes signé l’accord initial. Ces deux groupes de réunions différents, bien que similaires, iront probablement de pair. Le commissaire pourrait peut-être nous donner de plus amples informations à ce sujet.
Je souhaite remercier M. Florenz d’avoir dirigé la délégation parlementaire. Je vous remercie également, Monsieur le Commissaire, d’avoir impliqué les députés. Je voudrais cependant que la participation du Parlement aux différentes COP soit davantage structurée, surtout au niveau de la MOP 1. J’espère que vous avez trouvé notre contribution gratifiante et utile. Je voudrais qu’elle soit encore mieux structurée, même si je sais qu’il existe certaines réticences à ce sujet du côté du Conseil. Il s’agit toutefois d’une suggestion qui doit être examinée sérieusement et d’urgence à ce niveau.
Nous ne pouvons nous permettre d’échouer. Le protocole de Kyoto est le seul recours. Une focalisation renforcée sur les rapports coût-bénéfice et une tarification transparente des conséquences environnementales du changement climatique et du réchauffement de la planète contribueront à convaincre les marchés qui doutent encore de l’importance de Kyoto. Elle démontrera que l’ensemble des inconvénients et des coûts à court terme seront plus que compensés par les gains à moyen et long terme pour les pays développés comme pour les pays en développement.
Tarand (PSE). - (ET) Ces deux dernières semaines, la catastrophe qui a frappé l’Asie du Sud-Est a bouleversé le monde entier. Les causes du tsunami et des changements climatiques planétaires ne sont pas liées, bien sûr, à moins de mesurer le temps en millions d’années et de tenir compte de la dérive des continents, qui, il est vrai, provoque des tremblements de terre et des changements climatiques. Les êtres humains ne peuvent se représenter ce qu’impliquent des périodes de millions d’années. Le fait d’en discuter est donc de peu d’utilité pour les responsables politiques. L’année 2004 a foisonné de nouveaux signes d’une accélération du réchauffement de la planète: la fonte des glaciers du Groenland s’accélérant subitement, fonte qui entraînera une hausse globale de sept mètres du niveau des océans, pour ne citer qu’un exemple. En septembre dernier, le Premier ministre britannique Tony Blair a consacré l’un de ses discours aux changements climatiques. Dans celui-ci, il déclarait que, d’ici 2100, le niveau des océans aurait augmenté de 88 cm, ce qui, compte tenu de la situation démographique actuelle, constituerait une menace pour environ cent millions de personnes. On est bien loin du nombre de victimes causées par le récent tsunami. Cependant, le temps dont nous disposons afin de nous y préparer est différent également - au lieu de deux heures, nous avons encore presque un siècle devant nous. Néanmoins, en prenant comme point de départ la conférence de Rio, nous avons déjà perdu 10% du temps que nous avions et, disons-le, d’une manière plutôt peu constructive.
Il est vrai que j’ai participé à la conférence de Rio et que, lorsque j’étais encore climatologue spécialiste de l’histoire du climat, je me suis attaché à reconstruire la chronologie des gels du port de Tallinn en remontant jusqu’en 1500. La ville de Tallinn se situe dans une région sensible de la mer Baltique, où, chaque année, la mer est amenée à se poser la question shakespearienne suivante: «Être ou ne pas être - gelée?» Entre le XVIe et le XXe siècle, on dénombre de six à huit hivers par siècle sans aucun gel. Pour le XXe siècle, surtout à partir des années 1970, on compte 16 hivers sans aucun gel. Pour le nouveau millénaire, quatre hivers sur cinq n’ont pas connu de gel. Paradoxalement, il est triste de constater que plusieurs gouvernements estoniens se sont succédé dans un bâtiment donnant une vue magnifique sur la baie de Tallinn et n’ont pas remarqué cet indicateur crucial des changements climatiques ou ont été incapables d’en tirer des conclusions pour la politique en matière d’énergie. La gestion de l’entreprise nationale de production d’électricité en Estonie, s’inspirant de l’exemple des monopoles américains dans les secteurs du pétrole et du charbon, se poursuit dans l’esprit de l’industrialisation poussée à son paroxysme d’il y a cinquante ans. La consommation d’eau nécessaire à la production d’électricité à l’aide de schiste bitumineux est subventionnée à telle enseigne qu’elle place l’Estonie parmi les plus grands consommateurs d’eau de la planète, aux côtés d’États désertiques pratiquant l’agriculture d’irrigation. Lorsque l’on pense que l’eau potable coûte trois euros le litre à l’aéroport de Tallinn, on comprend pourquoi la production d’électricité en Estonie bénéficie de subventions se chiffrant aux alentours de trois milliards d’euros par an. Dans le même temps, l’Estonie est à la traîne par rapport à d’autres États européens dans l’utilisation de sources d’énergie renouvelables, malgré le potentiel élevé en matière de biocarburants et d’énergie solaire. Ce que je tente de faire passer, c’est que, alors que je reconnais les progrès réalisés à la COP-10 de Buenos Aires ainsi que le rôle de chef de file de l’Union dans la lutte contre les changements climatiques, je pense qu’il est grand temps que la Commission européenne et le Parlement unissent leurs efforts afin de convaincre les pays membres retardataires de modifier leurs politiques énergétiques, en faisant appel aux fonds structurels le cas échéant.
Schlyter (Verts/ALE). - (SV) Monsieur le Président, alors que nous sommes en train de discuter de Kyoto, les petits pays insulaires se préparent pour leur conférence sur les problèmes climatiques qui aura lieu dans l’indifférence générale de l’autre côté du globe, bien que leurs populations entières soient menacées d’exil en raison de la destruction de l’environnement.
Quinze grands icebergs dérivent vers le nord en direction de la Nouvelle-Zélande. Dans ma ville natale, les hivers durent 40 jours de moins que lorsque j’étais enfant. La quasi-totalité des glaciers est en train de fondre. Les tempêtes sont devenues plus fréquentes, comme celle qui a soufflé sur le nord de l’Europe pas plus tard que ce week-end. Il est inadmissible de contester les effets plus longtemps. Même si l’on ne peut pas imputer toutes les tempêtes et tous les dégâts aux changements climatiques, la fréquence accrue de ces phénomènes résulte clairement de l’irresponsabilité généralisée.
L’UE doit maintenant se concentrer sur les problèmes que connaît le monde d’aujourd’hui. Nous ne pouvons pas nous contenter de séminaires et de chiffres à atteindre. Nous devons fournir des efforts considérables et énergiques en faveur de l’adoption de décisions législatives qui ont des effets pratiques. Prenons donc les commandes. Seuls vous, les commissaires, êtes habilités à soumettre des propositions de hausse des taxes minimales sur les combustibles fossiles. Vous devez agir sans plus attendre s’agissant d’une taxe sur le dioxyde de carbone pour les vols intracommunautaires ou, également, s’agissant d’une taxe climatique sur les importations issues de pays industriels qui ne remplissent pas les objectifs de Kyoto. Cela pousserait sans aucun doute le gouvernement Bush à agir, surtout si quelques États américains progressistes étaient dispensés de payer cette taxe.
Cependant, Kyoto ne suffit pas. Pas besoin d’attendre 2012 pour s’en rendre compte. Nous devons nous atteler dès maintenant à la rédaction d’un plan d’action afin de réduire les émissions de 30% au moins d’ici 2020. Nous savons déjà que c’est la moindre des choses que nous pouvons faire afin d’assurer les besoins des générations futures en matières premières et de garantir aux pays pauvres des matières premières en suffisance ainsi que des conditions climatiques stables.
McDonald (GUE/NGL). - (L’oratrice s’exprime en irlandais)
Je souhaite profiter de cette opportunité pour saluer la conférence de Buenos Aires sur les changements climatiques en tant qu’action d’envergure dans la lutte contre le réchauffement de la planète. La convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques reste l’épine dorsale de l’effort mondial contre les changements environnementaux. Je soutiens la résolution et je souhaite saluer le rôle que l’Union européenne a joué et continue de jouer en mettant en œuvre des actions progressistes pour combattre le changement climatique.
Je tiens tout particulièrement à exprimer mon inquiétude quant au fait que les États-Unis, principal émetteur de dioxyde de carbone du monde, n’étaient pas disposés à examiner de nouvelles approches visant à réduire le changement climatique, même si la participation de plusieurs états américains à diverses initiatives s’y rapportant est encourageante. La non-ratification du protocole de Kyoto par Washington affaiblit toutefois considérablement cet accord. Celui-ci doit bénéficier de notre soutien collectif tout entier. C’est un pas dans la bonne direction, même s’il est encore limité. Un effort nettement plus important des différents pays et de l’industrie, bien entendu, est toutefois indispensable pour lutter efficacement contre le changement climatique à long terme.
Les objectifs fixés en matière de stabilisation des concentrations de gaz à effet de serre sont peu ambitieux, mais ils sont d’une importance fondamentale pour obtenir une nette diminution des niveaux de rejet dans notre atmosphère. Je salue l’affirmation figurant dans la résolution, selon laquelle les émissions mondiales doivent être réduites de moitié d’ici 2050 afin de maîtriser le réchauffement de la planète. Il s’agit d’un objectif auquel nous devons tous œuvrer.
Le changement climatique reste un problème crucial pour l’humanité. Il requiert une action globale, peut-être plus en Europe qu’ailleurs. Un rapport récent de l’Agence européenne de l’environnement indique que notre continent se réchauffe plus rapidement que le reste du monde, avec des conséquences potentiellement dévastatrices, telles que des vagues de chaleur plus fréquentes, des inondations, l’élévation du niveau des mers et la fonte des glaciers. Le rapport dépeint le sombre tableau d’une Europe dévastée par le changement climatique.
Nous avons besoin d’un plan mondial de limitation des concentrations de gaz à effet de serre critiques. Nous avons besoin, pour définir des objectifs plus ambitieux en la matière, d’un véritable engagement et de changements majeurs au niveau des processus de fabrication, de la méthode de production de l’énergie et, bien évidemment, de notre mode de vie collectif.
(L’oratrice continue en irlandais)
Krupa (IND/DEM). - (PL) Monsieur le Président, il va sans dire que l’Union européenne peut jouer un rôle essentiel en ce qui concerne le problème de longue date qu’est le réchauffement climatique, mais ce ne sera possible que si l’autodiscipline, la solidarité et la vérité l’emportent sur les incertitudes de la législation en vigueur et sur la falsification et la manipulation pratiquées dans de nombreux domaines, notamment dans celui de l’échange des droits d’émission.
Même s’il est vrai que le protocole de Kyoto est une réussite internationale, qui contraint les pays industrialisés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, le niveau de réduction de ces émissions auquel les négociations ont abouti représente un compromis politique. Il ne reflète pas les exigences posées par les scientifiques, lesquels ont calculé que les émissions de dioxyde de carbone doivent diminuer de 60% si l’on veut stopper les changements climatiques, et non pas de 5% ou de 8%. L’UE se glorifie de ces chiffres alors qu’ils ont été atteints au détriment de pays dans lesquels l’industrie a été malheureusement détruite dans le cadre des préparations à l’adhésion. Des changements dans l’affectation des sols ou, en d’autres termes, dans la gestion forestière, ont également servi d’instrument au profit de la politique climatique au titre du protocole de Kyoto.
Pourtant, on manque toujours de données vraiment fiables quant au volume de dioxyde de carbone absorbé grâce à la reforestation. Ce n’est qu’après d’autres recherches que l’on disposera de ces données. Les plans de boisement entrepris dans le cadre du mécanisme pour un développement propre ont donc donné lieu à une grande controverse. De tels plans valent bien sûr la peine qu’on s’y attarde, mais nous, en tant que Polonais, sommes opposés à l’éventuelle transformation de la Pologne en forêt vierge dans laquelle une riche élite se plairait à chasser.
Le fardeau de la lutte contre les effets des changements climatiques devrait être réparti équitablement, chaque pays supportant une charge proportionnelle à sa responsabilité. Les pays riches, développés et fortement industrialisés en ont retiré des bénéfices immenses par rapport aux pays en développement et sont en grande partie responsables de la destruction de l’environnement. Toutefois, ils rechignent fortement à prendre des engagements financiers. Cela vaut aussi bien pour les États-Unis que pour les États membres de l’Union. Nombre de pays commencent également à se demander si les engagements pris dans le cadre de Kyoto ne seraient pas davantage un obstacle à la transformation requise qu’un coup de pouce en faveur de celle-ci. Nous reconnaissons que, nonobstant ces lacunes, il est utile d’avoir des conventions en place. Toutefois, sur le plan de la réduction des émissions, des engagements plus exigeants devraient être pris.
Martin, Hans-Peter (NI). - (DE) Monsieur le Président, le président de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire a été l’un des premiers de cette Assemblée à qualifier les résultats de Buenos Aires de positifs. Rien que le fait qu’il soit nécessaire de présenter ces progrès dérisoires sous un jour favorable montre à quel point nous sommes devenus peu exigeants.
Telle est la façon dont je conçois les choses. Toutefois, il existe un autre paramètre, le temps, et il nous est compté. Si nous fermons les yeux pendant un bref instant et écoutons ce débat en laissant éventuellement tomber le mot «Kyoto», le contenu de ce qui a été dit jusqu’à présent nous rappelle, au détail près, la grande conférence mondiale sur l’environnement qui s’était tenue à Rio de Janeiro en 1992. Nous connaissions déjà le problème à ce moment-là et nous savions comment la situation allait évoluer. Toutefois, à l’époque, nous étions nettement plus optimistes, pensant que nous étions capables de contenir le réchauffement climatique par rapport au niveau antérieur à l’industrialisation à 0,5 degré d’ici 2050, et voilà que nous nous contenterions de le limiter à 2 degrés. Il s’agit là d’une évolution extrêmement dangereuse, tout simplement parce que - au-delà de la question de la démocratie qui occupe nombre de députés européens, au-delà de la question sociale qui se fait de plus en plus pressante maintenant que la mondialisation repart de l’avant - la question de l’écologie n’est pas encore résolue.
Aussi terrible que cela puisse paraître, on en viendrait presque à souhaiter disposer de preuves démontrant que l’ampleur du séisme sous-marin désastreux qui a frappé l’Asie du Sud-Est a quelque chose à voir avec le réchauffement de la planète, ce qui aurait peut-être incité tous les pays à entreprendre un effort commun pour lutter contre ce phénomène, à l’instar de l’effort qui est fourni pour faire face aux conséquences de cette catastrophe.
D’après moi, tout le problème des changements climatiques, et il est de taille, c’est que nous n’avons pas d’ennemi commun, que personne ne propose d’alternatives dans ce domaine et que nous continuons, il est vrai, à tenir de nombreux discours, sans toutefois joindre le geste à la parole.
Oomen-Ruijten (PPE-DE). - (NL) Monsieur le Président, la conférence sur les changements climatiques de Buenos Aires n’a pas abouti aux résultats escomptés. Lors de la ratification, nous avions espéré une avancée significative et voulions, dans la mesure du possible, définir exactement ce qu’il convient de faire après 2012. Si l’on tient compte des articles parus dans la presse ces dernières semaines, j’ai parfois l’impression que nous nous dénigrons les uns les autres lorsque nous nous concentrons uniquement sur ces deux aspects.
Nous savons tous, bien sûr, que les États-Unis se sont prononcés contre la ratification. Nous constatons également que la croissance rapide en Inde et en Chine jouera automatiquement un rôle dans l’implication de ces pays dans la politique climatique. Cependant, nous n’apprécions pas suffisamment les éléments positifs. Je partage l’avis du commissaire selon lequel l’aspect positif est d’être parvenu à des résultats. Cent vingt-huit États ont déjà signé le traité sur le climat. Même aux États-Unis et au Canada, comme Mme Doyle l’a fait remarquer il y a peu, de plus en plus d’États soutiennent et souhaitent suivre notre politique.
Cependant, si nous voulons adopter une politique climatique à long terme, nous obtiendrons des résultats uniquement si nous approfondissons et élargissons la discussion. Cela signifie par conséquent que nous devons impliquer les pays en développement, bien davantage que ce que jusqu’à présent. Comme l’a suggéré le commissaire, nous devrions leur proposer cette technologie propre et notre aide, de sorte qu’ils puissent lancer cette technologie sans plus attendre et accomplir un bond de géant.
En réalité, ce raisonnement vaut également pour la Chine et l’Inde. Ces pays aussi doivent être stimulés. Du reste, en ce qui concerne l’approfondissement, nous devrons continuer à influencer les autorités de l’Amérique du Nord, qui, à l’heure actuelle, veulent adopter une politique différente. Tout en congratulant M. Pieter Van Geel pour les résultats obtenus, qui lui ont déjà valu de nombreuses félicitations, je ne doute pas une seule seconde que, sous le contrôle du commissaire actuel, l’on cessera de dire que seule l’Europe agit en matière de politique climatique, car, ce faisant, nous ne ferions que nous isoler davantage. Non, nous devons faire en sorte que tout le monde participe en élargissant la discussion et en l’approfondissant plus efficacement. Je suis certaine que le bilan de la situation que nous recevrons bientôt, la note sur l’évolution de la situation, nous permettra de sortir de cet isolement.
Lichtenberger (Verts/ALE). - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, nous venons à peine d’entamer le nouveau millénaire et pourtant, nous avons déjà deux étés catastrophiques derrière nous: l’un au cours duquel toute l’Europe centrale s’est retrouvée sous eau et l’autre pendant lequel de nombreux pays européens ont souffert de la canicule. Cependant, aucun de ces deux événements n’a débouché sur de meilleurs résultats lors de la conférence, lesquels auraient été nécessaires pour résoudre les problèmes une fois pour toutes.
Je voudrais parler aujourd’hui des transports, l’un des principaux domaines problématiques associés à Kyoto. Le fait est que, alors qu’il est vrai que des progrès, quelques-uns du moins, ont été réalisés tant dans les domaines de la production de chaleur que de l’industrie, que certains problèmes ont été résolus et que des solutions technologiques sont possibles, le secteur des transports est encore celui qui enregistre le taux de croissance le plus élevé et dont on peut dire qu’il compromet et réduit à néant toutes les solutions élaborées et mises en œuvre par les autres secteurs dont les émissions ont des répercussions négatives sur le climat. Le transport annihile tout ce que nous avons réalisé dans la lutte contre le réchauffement climatique. Il est donc nécessaire de cibler ce domaine.
Monsieur le Commissaire, je n’entends jamais votre voix lorsque des États européens, qui se sont engagés à atteindre des objectifs dans le domaine du climat, font exactement l’inverse et augmentent leurs émissions. Vous n’élevez jamais la voix lorsque ces États ne mènent pas d’actions ciblées pour réduire les émissions liées au trafic. Nous devons tous agir à ce niveau, et ce que vous devez faire, c’est faire de cette politique une réalité au sein de l’Union européenne, ce qui signifie dans ce cas jouer pleinement la carte des transports publics et stopper la hausse du trafic, dont les voitures sont les seules à profiter, tous le reste étant négligé.
Manolakou (GUE/NGL). - (EL) Monsieur le Président, l’adhésion de l’Union européenne et d’autres nations industrialisées impérialistes à la doctrine de la maximisation des bénéfices pour les grandes entreprises empêche malheureusement d’atteindre un objectif essentiel et acceptable - corroboré par des études scientifiques - consistant à réduire les émissions et à limiter les changements climatiques, qui auront des conséquences désastreuses pour l’avenir de la planète elle-même.
La promesse faite par la Commission selon laquelle le système d’échange des droits d’émission de gaz à effet de serre et d’autres mécanismes flexibles protégeront, au lieu de mettre en danger, la compétitivité de l’économie européenne n’est pas convaincante. Au lieu de réduire ses émissions conformément à ses objectifs, elle les a augmentées de 3 unités, confirmant à quel point l’approche adoptée à Kyoto pour lutter contre les changements climatiques est complexe, instable et, en définitive, inefficace. Pourtant, des solutions existent. Elles doivent juste être encouragées directement, et non indirectement. Il s’agit de mesures visant à réduire considérablement les émissions de gaz, telles que la promotion des sources d’énergie renouvelables, l’utilisation de biocarburants, un recours accru à l’énergie thermique produite dans les centrales électriques, une protection adéquate des forêts et le recours à celles-ci afin d’absorber le dioxyde de carbone de l’atmosphère. Or, que voyons-nous? Des mesures inefficaces comme l’échange de droits d’émission sont mises en avant, ce qui démontre bien que des solutions qui pourraient vraiment inverser la tendance dangereuse et assurer la pérennité de la planète sont écartées au profit de la rentabilité des grandes entreprises.
Giertych (IND/DEM). - (PL) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, les changements climatiques sont des phénomènes naturels. À des périodes plus chaudes succèdent des périodes plus froides. Les activités humaines ont-elles une quelconque influence sur ce phénomène? J’en doute fortement. Les experts ne s’entendent pas sur ce point et aucune preuve convaincante n’a encore pu être avancée. Pourtant, il ne fait pas l’ombre d’un doute que la hausse des niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère influe positivement sur la production de plantes et que tout excès de carbone dans l’atmosphère est absorbé efficacement par la biosphère, formée par les forêts, l’humus et les mers.
Cependant, il ne fait aucun doute non plus que le CO2 émis lors de procédés de combustion industriels s’accompagne toujours d’émissions d’autres gaz dont on sait qu’ils nuisent à l’environnement, notamment aux forêts, à la production agricole, aux monuments architecturaux et, surtout, à la santé humaine. Tous les efforts visant à réduire la combustion doivent par conséquent être dûment reconnus. Étant donné que les effets négatifs de la combustion ne connaissent pas de frontières, tout investissement doit être partagé en se basant sur des conventions internationales. Le protocole de Kyoto est logique en ce sens qu’il transfère les coûts propres à la réduction de la combustion de pays qui ont entrepris des actions en la matière vers des pays trop passifs dans ce domaine.
Les changements climatiques ont toujours existé, ils existeront toujours. Il y a peu de choses que nous puissions faire à ce niveau. Néanmoins, les émissions anthropiques de gaz dans l’atmosphère constituent un problème que l’humanité doit résoudre par la collaboration. Cette approche mérite notre soutien inconditionnel et l’initiative encourageant le recours à des sources d’énergie renouvelables et à des technologies économiques devrait être particulièrement saluée. Ce sont des efforts coûteux et, sans aucune solidarité au niveau international, la situation ne s’améliorera pas. Toutefois, nous ne devons pas croire ceux qui prétendent que les émissions de gaz à effet de serre sont responsables de toutes les catastrophes naturelles, tous les grands vents, les inondations, les sécheresses ou les tsunamis. Restons les pieds sur terre et tenons-nous en aux faits. Je vous remercie.
PRÉSIDENCE DE M. MOSCOVICI Vice-président
Korhola (PPE-DE). - (FI) Monsieur le Président, il y a un an, j’ai assisté à la conférence sur les changements climatiques de Milan, et il faut reconnaître que la situation a quelque peu évolué depuis. À cette occasion, nous avions rencontré des représentants de la délégation américaine, comme ce fut également le cas cette année à Buenos Aires. Alors que, à Milan, les représentants américains contestaient encore formellement la responsabilité de l’homme dans les changements climatiques, leur attitude était moins rigide cette fois-ci. Ils ont dû reconnaître les faits, à telle enseigne qu’ils ont accepté de discuter de l’éventuelle responsabilité humaine dans les changements climatiques.
Cependant, malgré cet aveu, le chemin à parcourir est encore long avant que nous ne persuadions les États-Unis de s’engager dans la lutte universelle contre le réchauffement climatique. Il convient donc de faire preuve de davantage de bon sens. Les exemples montrant que la prise de mesures préventives est nettement moins coûteuse que la réparation des dégâts une fois que les catastrophes se sont produites ne manquent pas. C’est la raison pour laquelle les États-Unis commettent une erreur monumentale en termes économiques en refusant de participer à la coopération dans le domaine climatique et en mettant la planète tout entière en danger afin de préserver leur compétitivité.
Un autre progrès enregistré à Milan était l’implication de la Russie, qui a permis l’entrée en vigueur du protocole de Kyoto. Il s’agit là d’un geste politique capital, mais sera-t-il suivi d’actions concrètes? Nul ne le sait encore. Je redoute le pire: que les objectifs climatiques fixés par le protocole de Kyoto restent lettre morte.
Pourquoi devrait-il en être ainsi? Lors de la conférence, le ministre du logement, de l’aménagement du territoire et de l’environnement des Pays-Bas, pays occupant la présidence tournante de l’UE, a déclaré à juste titre que le problème qui se posera avec acuité à l’avenir est celui des émissions de la Chine, dont le taux de croissance a grandement surpris les parties à la convention. Aucune mesure disciplinaire ne peut être prise dans le cadre du protocole de Kyoto étant donné que la Chine ne compte pas parmi les pays industrialisés auxquels les restrictions d’émissions s’appliquent dans la première phase. Par conséquent, Kyoto est totalement impuissant pour résoudre deux problèmes de taille: les États-Unis, qui sont actuellement responsables du quart des émissions de gaz à effet de serre dans le monde entier, et la Chine, qui devrait enregistrer, selon les estimations, des émissions quatre fois supérieures au taux américain d’ici une dizaine d’années. Cela signifie que les émissions au niveau mondial auront doublé d’ici dix ans. Si tel est le cas, nous périrons tous.
Il est grand temps que nous remédiions à la situation dès maintenant afin de renforcer la politique climatique, en particulier en Chine et en Inde, de manière à éviter de commettre des erreurs qu’il sera impossible de réparer plus tard en attendant le début de la deuxième phase. Il convient de casser certains tabous associés au protocole de Kyoto et de dire que, à certains égards, il ne permet pas de résoudre le problème du réchauffement climatique.
Il semblerait que, en raison des objectifs de réduction des différents pays, les pays qui sont parties à la convention soient dans l’impasse, devant constamment lutter pour protéger leurs propres intérêts. En conséquence, nous avons besoin d’une «dynamique internationale pour le carbone» contraignante, dont personne ne peut être exclu. Dans l’économie de marché en cours de mondialisation, c’est le seul moyen d’empêcher le capital international de déplacer sa production dans des contrées où les limites d’émission ne dépassent pas les normes environnementales. Pour cela, nous devons établir des pourcentages d’émission par tonne produite qui serviront de critères d’émission pour l’industrie et prévoir une définition prudente du minimum théorique d’émission pour différents secteurs. Il est urgent que nous appréhendions l’énergie d’une façon totalement neuve, en l’articulant surtout autour de l’économie d’énergie, de l’augmentation de l’efficacité et des formes d’énergie renouvelables et non polluantes.
Pour terminer, je tiens à témoigner toute ma gratitude au commissaire Dimas, qui a dûment tenu compte des avis des députés européens tout au long de la conférence.
Gutiérrez-Cortines (PPE-DE). - (ES) Monsieur le Président, je pense qu’il ne se trouve personne qui ait œuvré plus que la Commission européenne dans la lutte contre les changements climatiques et à la sensibilisation à ce problème dans le monde entier. Toutefois, je suis également d’avis que, si la Commission peut se prévaloir d’être l’instance qui a soulevé le problème, ses efforts doivent être accompagnés de mesures scientifiques à grande échelle afin de faire en sorte que les paroles soient traduites en actions. Notre Europe de belles paroles doit devenir une Europe plus efficace et plus scientifique.
À cet égard, je pense que, après l’organisation de réunions successives à Kyoto et en d’autres endroits, il est nécessaire, voire urgent, de s’atteler entièrement à la problématique des changements climatiques. Nous avons réalisé des études approfondies pour connaître les causes du mal, mais pas pour découvrir les avantages. À cette fin, je voudrais que l’une des propositions soumises durant ce mandat soit d’examiner de plus près la relation entre l’agriculture et l’environnement.
J’inclus le reboisement dans l’agriculture. Par exemple, un hectare d’orangers qui produit 40 000 kilos par an ou quatre tonnes de matière végétale exerce-t-il une quelconque influence positive sur les changements climatiques? Autre exemple, l’agriculture méditerranéenne influence-t-elle positivement les changements climatiques?
Il y a lieu de mettre un terme à cette confrontation l’agriculture et l’environnement, et l’une des manières d’y parvenir est de considérer les avantages de l’agriculture, qui offre des puits de carbone, et de déterminer également quel type de reboisement convient le mieux et ce qui sera le plus bénéfique à l’environnement. De cette manière, nous pourrons mettre sur pied des politiques positives afin d’inclure toutes les activités, l’industrie bien sûr, mais également l’agriculture. Selon moi, le chemin sera encore long avant d’y parvenir.
Pour cette raison également, si, comme on a pu le lire dans le dernier rapport, l’Espagne, la Grèce et la Méditerranée sont les régions qui souffriront le plus des changements climatiques, j’estime qu’il est du devoir de la Commission de mener les études nécessaires et de proposer des solutions.
Jordan Cizelj (PPE-DE). - (SL) Mesdames et Messieurs, les changements climatiques représentent le défi le plus important et le plus sérieux auquel le monde est confronté aujourd’hui, il n’y a aucun doute là-dessus. Ce défi transcende les frontières nationales autrefois tracées par les nations et les responsables politiques.
Alors que nous nous efforçons aujourd’hui de prévenir les changements climatiques, ou du moins de les atténuer, notre action ne doit pas s’arrêter aux frontières nationales. Si nous voulons traiter cette problématique efficacement, nous devons clairement reconnaître que nous en sommes tous responsables.
À cet égard, nous pouvons parler d’une responsabilité politique à plusieurs niveaux: premièrement, de la responsabilité de chaque pays, pris individuellement, qui contribue à la pression collective exercée sur l’environnement et, deuxièmement, de la responsabilité découlant de la solidarité entre les régions développées et sous-développées de la planète. Toutefois, la responsabilité probablement la plus importante est la responsabilité intergénérationnelle. En effet, les conséquences des changements climatiques sont durables et affecteront la vie de nombre de générations futures.
Les hommes et les femmes politiques et les pays de l’Union européenne doivent relever le défi afin de rester les pionniers de ce processus mondial. Nous devons mettre en œuvre le protocole de Kyoto avec plus de sérieux et faire le maximum pour que cet accord soit également respecté par des États non européens qui ne se sont pas encore engagés à le mettre en œuvre, mais qui, globalement, influent sur l’environnement dans des proportions relativement grandes.
L’Union européenne doit jouer un rôle de première ligne dans la lutte contre les changements climatiques, et ce pour deux raisons en particulier. Elle possède une expérience précieuse en matière de politique environnementale et s’est également considérablement investie dans la recherche qui pourrait contribuer à réduire la pression sur l’environnement. J’attends donc de l’Union européenne qu’elle exige clairement des normes environnementales strictes après Kyoto également. Ce genre d’approche permettra à l’Union de redorer son blason auprès de ses citoyens de même que sur la scène internationale.
Caspary (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, cela fait des millions d’années que le climat de notre planète est soumis à des changements naturels. La plupart des scientifiques cités ces derniers mois pensent que l’accélération des changements du climat de notre planète est due aux activités humaines et, surtout, des émissions de dioxyde de carbone qu’elles produisent - peut-être même que ce seraient justement les 3% émis par les activités humaines qui influenceraient le climat, c’est du moins ce qu’ils prétendent.
Les changements climatiques en cours affecteront essentiellement la jeune génération d’aujourd’hui et les prochaines générations. D’après nos connaissances actuelles, nous devons agir avec prudence, à savoir réduire les émissions de CO2 à l’échelle planétaire en utilisant l’énergie plus efficacement et en faisant encore plus appel aux sources d’énergie renouvelables et à l’énergie nucléaire. Je vous donnerai juste un chiffre pour illustrer mes propos: au cours de l’année 2004, les centrales nucléaires ont évité à la planète environ 2,5 milliards de tonnes de dioxyde de carbone. C’est le double des quantités établies par Kyoto pour la période 2008-2012. Permettez-moi de le répéter: le double.
Cependant, dans quelle mesure pouvons-nous faire confiance à nos connaissances actuelles sur les changements climatiques? Est-il vrai que les êtres humains sont responsables de l’accélération des changements? Les 3,5% de CO2 émis par les êtres humains produisent-ils vraiment des effets? Dans quelle mesure le climat est-il influencé par l’intensité du rayonnement solaire? La vapeur d’eau est un gaz à effet de serre, quel effet a-t-elle? Quels autres paramètres influencent-ils notre climat? Si la température de la planète augmente, cette hausse est-elle due à une plus forte concentration de CO2 ou est-ce exactement l’inverse? Rien de tout cela n’est encore connu avec certitude. Bien que de nombreux modèles laissent penser que l’effet de serre résulte des activités humaines, aucune preuve irréfutable n’a encore été avancée.
Comme dit précédemment, nous devons faire preuve de prudence et réduire les émissions de CO2 le plus possible. Toutefois, dans le même temps, nous devons, sans plus tarder, investir davantage dans la recherche sur le climat et soutenir également les chercheurs qui pensent à contre-courant.
Si, pour le bien de l’humanité, nous voulons être en mesure de prendre les bonnes décisions dans les plus brefs délais et sur la base de données fiables, il nous faut une large palette d’avis. Si nous disposons de données solides, nous serons à même de persuader d’autres États d’adopter la même approche que nous.
Belet (PPE-DE). - (NL) Monsieur le Président, quoi que l’on en pense, je trouve les résultats de Buenos Aires décevants. Kyoto arrivera à échéance en 2012, c’est-à-dire demain. Et rien n’est prévu pour l’après-Kyoto. Le séminaire de suivi à Bonn n’est malheureusement à peine plus qu’un palliatif.
Monsieur le Commissaire, l’Union européenne ne peut plus se permettre d’attendre des États bornés tels que les États-Unis. Nous devons prendre la direction des opérations, sans devoir couper l’herbe qui se trouve sous nos pieds. Nous devons, plus que jamais, adopter une politique de récompense pour les entreprises industrielles qui investissent résolument dans des technologies respectueuses de l’environnement. Outre cela, nous devrons déployer beaucoup plus d’efforts, surtout dans le secteur des transports, comme l’a déclaré M. Florenz au début du débat. À cet égard, le septième programme-cadre pour la recherche et le développement est le cadre rêvé pour mettre en place des programmes ambitieux. Pourquoi ne pas viser haut et proposer des dates limites concrètes? Pourquoi ne pas ambitionner - osons être concrets - un transport ne produisant aucune émission sur les routes européennes d’ici 2020?
Je voudrais terminer par une question à l’attention du commissaire. Pensez-vous également que nous devons libérer des ressources supplémentaires, par exemple sous la forme d’un taux d’imposition nul - disons les choses telles qu’elles sont - afin d’encourager et de promouvoir énergiquement l’utilisation des biocarburants? Vous pourriez bien devenir aux yeux des générations à venir le meilleur ami de notre planète Terre. À votre place, je ne manquerais pas une occasion comme celle-là.
Karas (PPE-DE).- (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, nous avons certes obtenu des résultats positifs, mais pas dans les proportions souhaitées. Les choses bougent en effet, mais pas suffisamment. Des centaines de symposiums sont organisés, mais cela ne se reflète pas dans les actions prises. Nous poursuivons nos objectifs tant bien que mal, en ayant l’impression que le temps nous file entre les doigts. Les changements climatiques constituent l’un des grands défis du XXIe siècle - c’est ce qui figure dans notre résolution -, mais je me demande si nous en sommes seulement conscients, si nous avons pleinement compris la portée de ce phénomène et s’il nous inquiète réellement.
Malheureusement, je pense qu’entre la prise de conscience, d’une part, et le sentiment de responsabilité et l’action, d’autre part, il coulera encore beaucoup d’eau sous les ponts. Nous sommes impuissants lorsqu’il s’agit de prendre les mesures politiques nécessaires, même si divers événements nous rappellent leur nécessité et nous y encouragent. Les conséquences sur l’environnement, l’économie et la société sont évidentes, mais nous ne nous sentons pas encore suffisamment en danger. Nous accusons tour à tour les transports, le fioul domestique et l’industrie, le monde industrialisé ou encore les pays en développement, et nous manquons de vue d’ensemble. Avec Lisbonne à l’esprit, ne serait-il pas opportun de parler non seulement des dommages causés, mais également du potentiel de croissance et de la compétitivité de l’Europe? Les technologies que nous exportons vers d’autres continents ne sont pas neuves mais vieilles et, alors que nous parlons de responsabilité globale, nous ne tenons absolument pas compte du proverbe qui dit: ne fais pas aux autres ce que tu n’aimerais pas que l’on te fasse.
Alors que nous évoquons 2012, nous ne donnons même pas de garanties aux entreprises actuelles sur les conditions dans lesquelles elles devront travailler lorsque nous y serons. Si nous voulons agir à temps, nous avons besoin de ces conditions-cadres. Nous avons également besoin d’études sur l’incidence de Kyoto au profit des mesures prises dans les domaines de l’industrie et des transports.
Dimas,Commission. - (EN) Monsieur le Président, de très nombreuses suggestions utiles ont été présentées ce soir. Durant le prochain Conseil européen de printemps, première étape importante des débats de l’Union européenne concernant notre future stratégie en matière de changement climatique, la Commission soumettra une communication que mes collègues et moi sommes en train de préparer. Celle-ci sera capitale pour les débats du Conseil de printemps. Je compte y intégrer une série de recommandations spécifiques ainsi que bon nombre des suggestions présentées ce soir. Je remercie les députés à l’origine de ces propositions constructives.
En ce qui concerne Buenos Aires, son degré de réussite peut se mesurer à l’aune de critères objectifs et, comme je l’ai déclaré, nos attentes objectives étaient limitées. Cela ne signifie toutefois pas que nous n’avons pas d’objectifs d’envergure et que nos souhaits sont dépourvus d’ambitions. Nous œuvrerons à ces objectifs, car le monde en a besoin.
Nous avons enregistré certains progrès à Buenos Aires. La décision d’organiser en mai un séminaire devant examiner les réponses actuelles et nouvelles au changement climatique constitue un début encourageant pour le dialogue et le débat sur la politique climatique mondiale de l’après 2012. L’accord portant sur l’instauration d’un programme de travail d’adaptation représente également une avancée majeure, pas uniquement pour les pays développés, mais également, et surtout, pour les pays en développement.
Je pense globalement que la conférence des parties a été une réussite. Je conviens toutefois qu’il nous faut renforcer notre dialogue avec des pays clés tels que l’Inde, la Chine, les États-Unis, bien entendu, et la Russie. Washington affirme suivre une approche différente, en investissant beaucoup dans la recherche et le développement, mais son acceptation de participer à ce séminaire et d’effectuer des présentations concernant l’avenir me semble être une petite avancée.
Nous devons continuer et renforcer notre dialogue avec ces pays, comme l’ont suggéré nombre d’honorables députés, dans des contextes multilatéraux et bilatéraux. Conformément aux propos de Mme Frassoni, nous aurons avec la troïka de très nombreuses réunions avec des pays tels que les États-Unis, la Chine, l’Inde et les pays en développement. Nous devons également continuer à démontrer le sérieux qui est le nôtre dans ce domaine et l’importance que nous accordons à la lutte contre le changement climatique. Nous devons guider par l’exemple, comme l’a suggéré Mme Corbey.
Le système européen d’échange de droits d’émission et sa réussite seront très importants à ce niveau et nous devons continuer à souligner le besoin de voir les autres se joindre à nous dans le cadre de ces efforts. Comme je l’ai indiqué précédemment, la Norvège, le Canada et le Japon ont fait preuve d’intérêt et nous devrions voir de quelle manière nous pouvons coopérer avec les États-Unis, qui - à l’exception des neuf états du nord est et de la Californie - possèdent des systèmes d’échange pour d’autres gaz à effet de serre, mais pas pour le dioxyde de carbone. Toutefois, le problème à ce niveau, c’est qu’ils n’ont pas signé le protocole de Kyoto.
Voyons de quelle manière nous surmonterons cet obstacle. Une coopération avec les autorités locales et régionales pourrait s’avérer très intéressante, surtout pour trouver un soutien dans la lutte contre le changement climatique dans les différents pays du monde ainsi qu’en termes de contacts avec les pays en développement, tels l’Inde et la Chine. Je dois reconnaître à cet égard, à l’instar de ce qu’a affirmé un intervenant, que les petits États insulaires étaient de notre côté. Il est également très important qu’ils nous soutiennent pleinement dans nos desseins.
Il importe, dans nos contacts avec ces pays, de placer les avantages de la lutte contre le changement climatique dans le contexte plus large du développement durable. En ce qui concerne la pollution aérienne locale, M. Blokland a suggéré que nous soulignions les avantages dans d’autres secteurs. Or, la lutte contre le changement climatique déploiera d’importants effets bénéfiques dans ces pays. Il est très important de mettre en exergue l’éco-innovation et les technologies environnementales qui pourraient être très compétitives et donner l’avantage de l’initiative à l’industrie européenne et aux industries de ces pays, pour qu’ils innovent de manière réellement bénéfique pour l’environnement.
On a dit que nous n’aidions pas les pays les moins développés autant que nous le pourrions. Je tiens à souligner que près de la moitié des fonds destinés à ces pays sont fournis par l’Union européenne. Les États-Unis ne participent absolument pas puisqu’ils considèrent que ce volet fait partie du protocole de Kyoto. Nous devons financer des projets, c’est-à-dire des projets planifiés, et non des projets uniques et isolés marqués du sceau de l’inefficacité.
Tant de questions ont été posées, je ne répondrai spécifiquement qu’à certaines d’entre elles. M. Blokland a demandé si l’industrie chimique participerait au système communautaire d’échange des droits d’émission. Ce n’est pas possible en l’état actuel des choses. Nous sommes toutefois en train de débattre sur ce qui se passera à l’issue de la première phase de l’échange de droits d’émission. Nous l’intégrerons probablement. La combustion utilisée par les installations chimiques est couverte.
M. Davies a posé une question concernant le Royaume-Uni et le plan d’allocation national. La décision concernant le plan britannique a été prise le 7 juillet 2004 et Londres peut éviter de prolonger l’incertitude dans laquelle sont plongées les entreprises britanniques en agissant sur la base de cette décision. Elle nous a envoyé une lettre en date du 23 décembre présentant certaines informations sur les deux questions concernant Gibraltar et les nouveaux arrivants et nous demandant des allocations supplémentaires et supérieures. Nous sommes toujours en train d’examiner les détails techniques et juridiques de cette requête. En principe, la Commission considère qu’un État membre ne peut présenter qu’un seul plan d’allocation national.
Concernant la biomasse et les biocarburants, plusieurs instruments visant à stimuler l’utilisation de la biomasse sont d’ores et déjà en vigueur. Ils incluent une directive sur les biocarburants ainsi qu’une autre sur l’électricité issue de sources d’énergie renouvelables. L’année dernière, la communication de la Commission relative à l’énergie renouvelable annonçait un programme d’action relatif à la biomasse qui devrait être présenté fin 2005. Les émissions provenant de la biomasse sont neutres. Les rejets découlant de sa consommation ne sont pas soumis aux quotas.
Je ne suis pas en mesure de répondre à toutes les questions et à toutes les suggestions que j’ai notées durant le débat pendant le temps qui m’est imparti. Je tiens toutefois à souligner une nouvelle fois l’importance d’intégrer dans la coopération des pays en développement tels que la Chine et l’Inde. Ils se préoccupent de leur avenir et s’inquiètent fortement de toute limitation ou réduction. Nous devons leur donner des incitants, pour qu’ils sachent que leur développement ne sera pas entravé par quelque accord futur que ce soit. Nous devons trouver une méthode de coopération et atteindre les objectifs que nous avons mentionnés précédemment: une augmentation maximale de la température de 2°C.
Quant aux États-Unis, ils investissent massivement dans la recherche. Même à ce niveau - j’ai entendu certaines personnes affirmer qu’il existait des doutes sur les preuves scientifiques des causes anthropogéniques du changement climatique et de son impact -, des rapports très récents publiés en 2004 prouvaient sans le moindre doute que le changement climatique est le résultat des activités humaines. Les États-Unis affirment adopter une approche différente. Ils n’ont pas ratifié et ne ratifieront pas le protocole de Kyoto. Nous devons toutefois trouver un moyen de les intégrer dans notre action de lutte contre le changement climatique. Ce problème ne touche pas un pays isolé ou la seule Méditerranée, où les effets seront pires que dans les autres régions du monde: les scientifiques affirment que la température y aura augmenté de plus de cinq degrés d’ici la fin 2100. C’est une augmentation importante. On peut imaginer à quel point cette situation affectera l’agriculture et le tourisme, par exemple, et modifiera le mode de vie de la population. J’ai entendu dire que les effets seraient positifs en Sibérie. Ce n’est pas vrai. Nous ignorons l’impact qu’aura le changement climatique ainsi que les régions du monde qui seront touchées.
La science a prouvé qu’il fallait lutter contre le changement climatique causé par l’activité humaine. C’est ce que nous devons faire et essaierons de faire. Avec votre collaboration, l’Union européenne continuera à jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre le changement climatique.
(Applaudissements)
Le Président. - J’ai reçu, en conclusion de ce débat, une proposition de résolution (1). Le débat est clos.