Le Président. - L’ordre du jour appelle en discussion commune les rapports suivants:
- A6-0026/2005 de M. Goebbels, au nom de la commission des affaires économiques et monétaires, sur la situation de l’économie européenne - rapport préparatoire sur les grandes orientations des politiques économiques [2004/2269(INI)];
- A6-0025/2005 de M. Karas, au nom de la commission des affaires économiques et monétaires, sur les finances publiques dans l’UEM - 2004 [2004/2268(INI)].
Goebbels (PSE), rapporteur. - Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, chers collègues, le débat autour de la politique macroéconomique devient de plus en plus idéologique. Ainsi, une majorité conservatrice et libérale a déformé mon rapport préparatoire sur les grandes orientations des politiques économiques en écartant toute référence à la nécessité de coordonner les politiques économiques européennes, alors que l’article 4 du traité l’exige. La même majorité se refuse à l’évidence: le pacte de stabilité doit être ajusté aux cycles économiques et la Commission doit également juger la qualité de la dépense publique en analysant l’éventuel déficit d’un État. Heureusement, le Conseil Ecofin va bientôt démentir ces doctrinaires de la stabilité à tout prix. Pour couronner cet entêtement ultralibéral, la même majorité a voté deux amendements, l’un demandant la diminution du niveau général de la fiscalité, l’autre estimant inéluctable un accroissement généralisé du temps de travail. Pour certains collègues, cela représente probablement l’équilibre entre la flexibilité et la sécurité prôné par le rapport Koch. Plus de travail pour les salariés, moins d’impôts pour les riches.
Mais Monsieur le Président, essayons calmement de faire le point sur l’économie européenne. L’année 2004 fut un bon cru pour l’économie mondiale. Les échanges internationaux n’ont jamais été aussi importants. Le nouveau rapport du BIT note pourtant que malgré la forte croissance économique mondiale - plus 5% -, le chômage mondial n’a que faiblement régressé. Par contre, la pauvreté relative a fortement régressé. L’Union européenne n’a connu qu’une croissance faible et un très léger tassement du chômage, surtout dans les nouveaux pays membres. Par contre, la productivité des Vingt-cinq s’est améliorée, selon le BIT, «à un rythme supérieur à la moyenne mondiale». Cela explique probablement pourquoi l’Union est le premier exportateur de biens et de services et pourquoi l’Allemagne à elle seule fait mieux que les États-Unis, la Chine ou le Japon.
Une Europe premier exportateur mondial et premier acheteur mondial, qui arrive à équilibrer ses comptes, ne peut pas être en aussi mauvaise situation que ne le voudrait l’europessimisme ambiant. Je ne verserai pas dans un euro-optimisme béat. L’Union pourrait mieux faire. Il n’y a pas assez de croissance, il y a trop de chômage, surtout dans quelques grands pays, à commencer par les moteurs traditionnels de l’Union, l’Allemagne et la France. Pour les ultralibéraux, la cause est entendue. La faute en revient aux entraves à la politique de stabilité et à l’absence de réformes structurelles. Pourtant, des réformes structurelles furent réalisées dans de nombreux pays. Le gouvernement Raffarin a ainsi engagé une réforme des pensions, le chancelier Schröder a fait adopter Hartz 1, Hartz 2 et maintenant Hartz 3 et 4.
Mais sans croissance, les mesures structurelles les plus hardies s’essoufflent. C’est ce que dit le Comité de politique économique dans son rapport annuel sur les réformes structurelles, qui dit clairement que les gouvernements «ne récolteront pleinement les fruits de leur réforme structurelle en termes de croissance et d’emploi que dans un environnement macroéconomique approprié». S’il est vrai que le déficit global de la zone euro a progressé, tout en restant bien inférieur à celui des États-Unis ou du Japon, le résultat est étonnant pour les gardiens de l’orthodoxie. Le pacte de stabilité fut inventé pour empêcher que l’endettement public n’entraîne une hausse immodérée des taux d’intérêt et que, par voie de conséquence, l’euro ne devienne une monnaie faible. Or, la BCE a pu aboutir à des taux d’intérêt historiquement bas. L’euro est presque trop fort face au roi dollar. Malgré les turbulences et les marchés pétroliers, le taux d’inflation de la zone euro est resté très bas, le pouvoir d’achat des habitants de l’eurozone est supérieur à celui des Américains et des Britanniques.
À l’évidence, le problème de l’eurozone n’est pas le manque de stabilité mais le manque de croissance. En Allemagne et en France notamment, mais également en Italie, la demande intérieure est insuffisante. Tous les États ont réduit leurs investissements afin de limiter le déficit public. Comme les Allemands et les Français ne consomment pas assez, l’investissement privé reste également en panne. Pourquoi investir si la demande est atone? Par contre, le taux de l’épargne connaît des sommets dans l’eurozone, notamment en France et en Allemagne. Cela dénote un manque de confiance, une peur de l’avenir. Il y a pourtant un grand pays européen qui connaît une croissance appréciable, un taux de chômage plus acceptable: la Grande-Bretagne. Pourquoi? Le gouvernement britannique a soutenu la demande intérieure par une politique d’investissement plus active, par une politique fiscale ne s’enfermant pas dans une stabilité bêtement orthodoxe mais visant l’équilibre sur tout le cycle économique. En sus, les Britanniques consomment, même si cela se fait avec des taux d’endettement presque américains. Seul désavantage des Britanniques par rapport à la zone euro: ils payent des taux d’intérêt de base de 4,75% contre 2% dans la zone euro.
L’Union européenne et, surtout, l’eurozone ont besoin de plus de croissance. Cette croissance ne peut venir que de la demande interne, des investissements publics et privés et de la consommation. Près de 90% des échanges de l’Union se fait entre les Vingt-cinq. Même si l’Union reste compétitive dans les échanges mondiaux, la croissance ne peut pas venir de la demande extérieure. Alors que certains petits pays vivent essentiellement de la demande extérieure, les grands pays dépendent toujours, pour l’essentiel, de leur demande interne. D’ailleurs, ceux qui plaident pour une compétitivité de l’Europe basée sur le moins-disant social, le nivellement des salaires, devraient reconnaître que l’essentiel des échanges se fait avec des pays ayant un niveau de salaires et de charges sociales similaire à celui de l’Europe. Ce n’est donc pas en cassant les salaires, donc la consommation, que l’Union progressera. Il faut relancer la consommation, et surtout les investissements, de façon coordonnée. L’article 4 du traité appelle cette coordination des politiques économiques. Grâce à une réforme intelligente du pacte de stabilité, l’Union pourra renouer avec la croissance et l’emploi.
Karas (PPE-DE), rapporteur.- (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, les deux rapporteurs ont pour tâche de présenter non seulement la position de leur parti, mais aussi le rapport sur lequel un accord a été trouvé. Étant donné que, si les deux rapports ont été approuvés par une très large majorité, un groupe s’est largement abstenu sur les deux rapports, on comprend aisément que ces deux rapports aient donné lieu à un débat politique très animé au sein de notre commission, s’agissant de rapports portant sur des décisions concernant la voie à suivre plutôt que de rapports législatifs. Ce fait démontre l’importance des considérations et questions politiques fondamentales quant à la direction globale abordée dans les deux rapports.
Je limiterai mes commentaires au rapport tel qu’adopté. J’ai trois observations préliminaires à faire. Premièrement, l’Union européenne est une communauté de droit et, bien que nous soyons une communauté de droit, 12 États membres ont enfreint les dispositions du pacte de stabilité et de croissance ou du Traité depuis l’entrée en vigueur de ce pacte. Cinq d’entre eux font partie de la zone euro: le Portugal, l’Allemagne, la France, les Pays-Bas et la Grèce. Ils sont rejoints par le Royaume-Uni, auquel la procédure concernant les déficits excessifs n’est pas applicable, mais qui est néanmoins soumis à l’exigence définie à l’article 116, paragraphe 4, du Traité.
Ma deuxième observation préliminaire est que, si nous avons, en l’euro, une monnaie commune couronnée de succès, une monnaie qui a fait du marché intérieur un marché domestique, nous n’avons pas de politique budgétaire commune. C’est pourquoi nous avons besoin d’un cadre politique commun, de telle sorte que l’euro puisse réaliser pleinement son potentiel et que l’Union européenne atteigne ses objectifs politiques de croissance et d’emploi. Nous sommes toutefois en présence d’une contradiction: en 2002, seuls quatre États membres de la zone euro, totalisant 18% du PIB de la zone euro, avaient un budget plus ou moins équilibré, contre cinq États membres de cette même zone euro en 2004.
Ma troisième observation préliminaire est que la stratégie de Lisbonne nous offre une base pour parvenir à plus de croissance et d’emploi, ainsi que pour renforcer notre compétitivité. La réalité présentée dans le rapport est que, au cours de la dernière décennie, l’économie de l’UE a connu une croissance bien inférieure à son potentiel, avec une diminution non seulement des investissements privés, mais aussi des investissements publics bruts, qui, dans la zone euro, sont tombés de 4% du PIB au début des années 1970 à 2,4%.
Les conclusions qui en sont tirées diffèrent. D’aucuns montrent du doigt le pacte de stabilité et de croissance, parce que nous disons que les dispositions juridiquement contraignantes ne sont pas respectées, et d’autres disent que nous n’avons pas fait ce que nous avions à faire et que la volonté politique fait défaut. Nous devons entreprendre des réformes structurelles. Nous devons prendre les tendances démographiques comme point de départ pour modifier nos réalités. Le pacte de stabilité et de croissance est une réussite, dans la mesure où il met en lumière le débat politique sur les réformes structurelles nécessaires, sur l’échec des politiques budgétaires et sur les menaces qui pèsent sur l’euro, et fait naître ainsi le débat politique.
Une majorité au sein de la commission partage ce point de vue. Ce rapport, dont le thème est que nous avons besoin d’une volonté politique plus forte pour ce qui est de la mise en œuvre, d’un plus grand courage face aux réformes à long terme, d’une approche plus sérieuse et de moins d’excuses, déclare aussi que nous avons besoin d’une plus grande volonté pour les réformes, associée à une plus grande honnêteté vis-à-vis des citoyens. Le fait que l’Allemagne affirme à présent que les coûts de la réunification n’ont pas été pris en considération jusqu’ici montre à quel point ce débat est devenu hypocrite, parce que l’Allemagne respecte les critères de stabilité et de croissance depuis le début de la décennie. Elle est restée dans le droit fil du pacte de stabilité et de croissance et n’a eu aucune difficulté à le faire pendant 10 ans.
Je vous invite à soutenir le rapport à l’examen si vous espérez davantage de stabilité, de croissance et d’emploi, et si vous souhaitez le respect du droit européen et du Traité.
Almunia, membre de la Commission. - (ES) Monsieur le Président, je voudrais commencer, au nom de la Commission et en mon nom propre, par féliciter les deux rapporteurs pour les deux rapports à l’examen, MM. Goebbels et Karas, ainsi que tous les membres de la commission des affaires économiques et monétaires qui ont contribué à rédiger le texte dont nous débattons ici aujourd’hui en plénière.
Je dois dire que je souscris dans une large mesure à l’analyse faite dans chacun des rapports. S’agissant de la stratégie de Lisbonne, cinq ans après son approbation par le Conseil européen, nous pouvons tous convenir de la nécessité de réaffirmer les objectifs et les piliers de cette stratégie, de ratifier notre soutien à leur égard et d’exprimer nos regrets face au retard accusé dans la mise en œuvre des politiques nécessaires pour progresser dans la réalisation de ces objectifs.
Pour ce qui est de la situation des finances publiques et du cadre existant pour surveiller l’évolution des budgets et des comptes publics - le pacte de stabilité et de croissance -, nous sommes d’accord sur les valeurs de référence, sur les piliers établis dans le Traité. Pour l’essentiel, l’évolution des finances publiques au sein de l’Union économique et monétaire depuis l’entrée en vigueur du pacte a progressé dans la bonne direction, mais, comme l’a déclaré M. Karas, trop de pays, 10 pour l’instant, sont en situation de déficit excessif; certains États membres de l’Union ont des niveaux de dette publique supérieurs à 60% de leur produit national brut, qui est la valeur de référence inscrite dans le Traité. Aussi devons-nous réfléchir et chercher à améliorer l’application du pacte, de même que nous devons renforcer les instruments dont nous disposons pour faire de ce cadre de gouvernance budgétaire une réussite.
Pour ce qui est du premier rapport, je voudrais vous expliquer le point de vue de la Commission. Il est clair que l’Union européenne, et la zone euro en particulier, a un taux de croissance plus faible que ses concurrents, que les autres régions économiques du monde industrialisé, sans parler des pays émergents, qui ont des taux de croissance de 6, 7, voire 10%. Cette faible croissance crée une situation de chômage élevé et de manque d’emplois, et remet sérieusement en question la durabilité de notre modèle social ainsi que la durabilité de notre modèle de société en général.
Des réformes structurelles sont dès lors nécessaires et, en partant de ce point de vue, comme les honorables députés le savent, dans sa communication du 2 février, la Commission a proposé certaines lignes directrices pour se diriger vers une révision et une amélioration de la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne et défini une série de priorités basées sur trois éléments clés: premièrement, faire de l’Europe un lieu plus attrayant pour les investissements et le travail, en étendant et en approfondissant le marché intérieur, en améliorant la réglementation, en garantissant des marchés ouverts et compétitifs ainsi qu’en étendant et en améliorant les réseaux d’infrastructure européens; deuxièmement, améliorer la connaissance et l’innovation en tant que facteurs de croissance fondamentaux, en accroissant et en améliorant la recherche et le développement, en promouvant l’innovation et l’adoption de technologies de l’information et en contribuent à la création d’une base industrielle européenne solide; troisièmement, poursuivre l’objectif de créer des emplois plus nombreux et de meilleure qualité, en établissant des politiques capables d’attirer un plus grand nombre de personnes sur le marché du travail, en modernisant les systèmes de protection sociale, en améliorant la capacité d’adaptation des travailleurs et des entreprises et en investissant davantage dans le capital humain.
Sur la base de ces éléments, nous pouvons restaurer l’élan que les créateurs, les fondateurs, de la stratégie de Lisbonne - si je puis m’exprimer ainsi - avaient à l’esprit il y a cinq ans et rattraper le temps perdu. Dans le même temps, nous devrons agir avec un plus grand sens des responsabilités à l’échelon national, car il ne fait aucun doute que bon nombre des actions nécessaires pour faire réussir la stratégie de Lisbonne relèvent pour l’essentiel de la compétence nationale.
De l’avis de la Commission, le rôle de la politique macroéconomique à cet égard consiste à soutenir la croissance. Toutefois, accroître le potentiel de croissance dépend fondamentalement des réformes structurelles. Nous ne pouvons pas compter sur la politique macroéconomique pour y parvenir. Il faut confier cela à des réformes structurelles telles que celles qui figurent sur la liste présentée par la Commission européenne.
S’agissant du deuxième rapport - le pacte de stabilité et de croissance, la situation des finances publiques -, que M. Karas vient de présenter, je dois signaler que les négociations au sein d’Écofin progressent de façon tout à fait satisfaisante: des progrès supplémentaires ont été réalisés lors de la réunion de la semaine dernière. Il y aura d’autres réunions, de l’Eurogroupe le 7 mars et d’Écofin le 8 mars, qui seront très utiles pour parvenir à un accord.
Je suis optimiste quant à la possibilité de parvenir, à l’occasion du Conseil européen des 22 et 23 mars, à un accord qui maintienne les principes et les valeurs de référence du Traité, ainsi que les piliers de la discipline fiscale et budgétaire définis dans le Traité, que nous devons tous respecter. Cet accord devrait améliorer les instruments, de telle sorte que la gouvernance du pacte de stabilité et de croissance puisse empêcher les manquements que nous avons connus ces dernières années, contribuer à aider les pays qui connaissent des problèmes de déficit excessif à se redresser, à respecter les valeurs de référence du Traité, en termes tant de déficit que de dette, à placer davantage l’accent sur la durabilité et le long terme, car nous allons devoir relever le défi du vieillissement de la population, et, en même temps, à créer un lien plus étroit entre la discipline budgétaire, qui reste un élément nécessaire à la croissance, et la stratégie en faveur de la croissance, d’emplois plus nombreux et de la durabilité - autrement dit, la stratégie de Lisbonne -, parce que ces deux stratégies sont liées l’une à l’autre.
L’équilibre macroéconomique est une condition nécessaire à la croissance, mais d’autres politiques s’imposent: des réformes structurelles s’imposent. Ce sera une très bonne chose que ces deux questions importantes débattues aujourd’hui au Parlement et débattues au sein de la Commission et du Conseil se retrouvent au Conseil européen de mars, pour que nous puissions parvenir à un accord tourné vers l’avenir, qui améliore la relation entre ces deux stratégies et, bien sûr, garde à l’esprit les principes de chacune d’elles. L’une d’entre elle consiste en plus de durabilité, plus de cohésion sociale, plus de croissance, plus d’emplois et plus de compétitivité. L’autre consiste en une meilleure discipline budgétaire et en une plus grande durabilité des finances publiques, en tant que base nécessaire pour la stabilité économique, en vue de mettre en place les conditions dont tous les investisseurs, tous les créateurs de richesse, ont besoin pour regarder l’avenir avec davantage de confiance.
Hökmark (PPE-DE), au nom du groupe. - (SV) Monsieur le Président, je voudrais dire avant toute chose que les déficits des finances publiques dans différents pays sont symptomatiques des difficultés rencontrées par les économies nationales. Nous ne résoudrons pas ce problème en autorisant des déficits plus élevés. En réalité, nous risquerions alors de saper les conditions stables pour la croissance que représentent les faibles taux d’intérêt. Nous risquerions de freiner ce stimulant que les faibles taux d’intérêt offrent aux ménages et nous affaiblirions ces conditions de base pour la croissance à long terme, créées elles aussi par les faibles taux d’intérêt.
Il convient dès lors de souligner l’importance des réformes structurelles, comme l’a fait également le commissaire dans son allocution. Ce sont les économies européennes qui ont besoin de flexibilité, pas nos règles communes. C’est avec des conditions fondamentales communes pour les entreprises en construction que nous pouvons créer plus de prospérité et plus d’emplois. Il est regrettable que le groupe socialiste au sein de la commission des affaires économiques et monétaires ait choisi de s’abstenir lors du vote sur le rapport de M. Goebbels. Ce rapport renferme désormais une série de propositions pratiques pour élever le potentiel de croissance en Europe.
Nous estimons que des conditions de base améliorées pour le travail devraient exister, mais pas par les moyens que M. Goebbels vient de mentionner, à savoir en augmentant le temps de travail. Nous souhaitons créer des conditions de base améliorées pour permettre aux gens de travailler et pour leur permettre de travailler plus longtemps au cours de leur vie et, s’ils le désirent, pendant de plus longues heures aux différentes étapes de leur vie. Cela implique des changements en termes d’entreprise, de recherche et de marché intérieur. En cet instant même, nous sommes en période de grand changement, de par la concurrence que nous observons.
Maintenant, l’important est de garantir que nous rendions l’économie européenne encore plus forte grâce à une concurrence accrue. À cet égard, nous sommes préoccupés par la directive sur les services et par le renforcement de la concurrence dans un certain nombre de domaines. Voilà ce que nous devons faire, les objectifs étant plus de croissance, plus d’emplois et les meilleurs salaires en Europe.
Van den Burg (PSE), au nom du groupe. - (NL) Je vous remercie, Monsieur le Président. Je crois que M. Karas a eu raison de dire que, dans ce débat, le Parlement s’est engagé dans une sorte de bataille quant à la direction que nous devrions suivre, ainsi que dans un débat sur la façon d’aborder la politique macroéconomique dans l’Union européenne.
J’ai souvent la forte impression que, dans ce débat, le groupe du parti populaire européen (démocrates-chrétiens) et des démocrates européens, ainsi que certaines sections du groupe de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe sont en train de livrer la bataille précédente et, en restant calés dans les vieilles discussions, cherchent encore à réformer le pacte de stabilité et de croissance et ne font pas face aux défis qui nous attendent. J’ai aussi souvent l’impression que nous sommes en train de faire de la politique nationale et que cette Assemblée tient des débats nationaux au lieu de se concentrer sur la dimension européenne.
Mon groupe préfère l’approche pour laquelle la Commission a opté vis-à-vis de la réforme du pacte de stabilité et de croissance ainsi que l’approche adoptée par la présidence luxembourgeoise à cet égard. Je rappellerais les décisions prises par le Conseil Écofin du 13 septembre, qui donnent nettement la préférence à une réforme du pacte de stabilité et de croissance dans le contexte de discussions plus larges et en rapport avec la stratégie de Lisbonne et les grandes orientations de politique économique.
La réforme du pacte de stabilité devrait s’attaquer aux aspects préventifs, aux différences dans l’évolution économique des États membres et aux aspects correctifs, tout en promouvant également une amélioration de la procédure concernant les déficits excessifs. Ce qui est toutefois d’une importance capitale ici, et c’est ce que mon groupe voudrait souligner et dont le président Bush s’est récemment fait l’écho dans le contexte de la politique étrangère, c’est que nous poursuivions une véritable politique macroéconomique en Europe et, à cet égard, que nous traitions l’Europe comme une unité économique, comme une seule entité. Je pense que cela devrait réellement faire partie de notre politique macroéconomique, que nous ne devrions pas avant tout rivaliser les uns avec les autres en tant qu’États membres et créer des profils différents pour nous-mêmes, qui doivent également se justifier au sens du pacte de stabilité et de croissance, mais que nous devrions opter pour cette perspective européenne et adopter des politiques économiques en conséquence.
C’est la raison pour laquelle un examen approfondi de la stratégie de Lisbonne et de sa relation avec la réforme du pacte de stabilité et de croissance est nécessaire. C’est également pour cela que mon groupe tient encore à souligner, dans le cadre de ce débat, que nous devrions axer nos efforts sur les investissements, ainsi que sur la façon dont nous devrions, dans le respect des paramètres prescrits par ce pacte de stabilité et de croissance, établir une distinction entre les dépenses courantes et les dépenses vraiment destinées à investir dans cette économie de la connaissance à laquelle nous aspirons, en tant qu’élément de la stratégie de Lisbonne. Nous ne tenons pas à le faire d’une façon qui permette aux États membres de décider comment dresser leurs comptes de façon créative, mais en posant des choix clairement en faveur de l’Europe et en définissant notre stratégie à l’échelon européen, de sorte qu’il soit possible, par exemple, d’amortir les investissements à long terme, comme c’est le cas dans l’industrie.
Nous espérons que certaines de ces remarques seront abordées dans ces rapports et que cette discussion se poursuivra lors de la séance plénière de mars, au cours de laquelle nous procéderons à la révision de la stratégie de Lisbonne et préparerons le sommet de printemps.
Klinz (ALDE), au nom du groupe.- (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, une majorité des membres de la commission des affaires économiques et monétaires a convenu d’un rapport très équilibré, même si M. Goebbels prend aujourd’hui ses distances par rapport à ce rapport. Je pense qu’il importe que nous demandions à la Commission de prendre en considération les quatre points suivants.
Pour commencer, la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne a pris beaucoup de retard. Ce retard peut être attribué entre autres choses au fait que cette stratégie englobe un grand nombre d’objectifs. En novembre, le groupe Kok a recommandé de se concentrer sur un nombre limité de priorités. Voilà une stratégie sensée, et nous la soutenons. Nous encouragerions la Commission à orienter ses efforts sur les priorités proposées par le groupe Kok, et les déclarations faites par la Commission dans ce contexte nous laissent optimistes. Nous demandons également à la Commission d’analyser les meilleures pratiques dans les États membres et d’en tirer des leçons. Cette approche des meilleures pratiques nous permettra, sur la base des exemples couronnés de succès dans un État membre, d’adresser des recommandations à d’autres États membres.
Deuxièmement, la Commission devrait s’employer davantage encore à achever le marché intérieur, afin de montrer clairement aux consommateurs les avantages concrets du marché unique européen, sous la forme de produits et services moins chers et de meilleure qualité. Le commerce connaît encore des barrières dans certains domaines. C’est indéfendable, tant sur le plan du fonctionnement correct du marché intérieur que sur le plan de la concurrence loyale. Les citoyens doivent observer des progrès nets en la matière.
Troisièmement, nous ne sommes pas opposés à une réforme du pacte de stabilité et de croissance, contrairement à ce que M. Goebbels a laissé entendre, mais nous sommes contre un assouplissement du pacte, lequel garantit non seulement l’indépendance de la BCE, mais aussi la stabilité de l’euro. Nous partageons le souhait de la Commission de renforcer l’aspect préventif du pacte, mais cela ne signifie pas, comme M. Goebbels le suggère peut-être, qu’il devrait être permis d’avoir un déficit inférieur à 3% quand les choses vont bien, mais supérieur à 3% quand elles vont mal. Quand les affaires tournent, il faudrait constituer des réserves pour que le critère du déficit soit aussi respecté ou légèrement dépassé en périodes économiquement difficiles. Ainsi, l’accumulation globale de la dette peut être progressivement réduite.
J’en viens à présent à ma quatrième et dernière remarque. Les membres du groupe ALDE de la commission des affaires économiques et monétaires ont déposé un amendement sur les réformes structurelles nécessaires dans les États membres. Bien que cet amendement ait été accepté, il n’a pas été repris dans la version finale en raison d’une erreur - de qui, je n’en sais rien. Nous voudrions donc déposer à nouveau cet amendement ici en plénière, en tant qu’amendement oral. Cet amendement est formulé comme suit: le Parlement européen recommande aux États membres de mettre en œuvre les réformes structurelles attendues depuis longtemps afin d’améliorer le climat d’investissement en tant que condition préalable à la croissance économique.
Ce qui importe ici, c’est de souligner l’incroyable importance des réformes structurelles pour la croissance économique et de préciser clairement que la responsabilité en la matière incombe aux États membres. Il est grand temps que l’UE surmonte le problème de l’engagement continu de ressources excessives pour préserver des structures dépassées. En outre, les États membres devraient axer leur action sur le contrôle du marché noir, dès lors qu’il s’agit d’un obstacle à une croissance et une stabilité saines. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons progresser rapidement vers la réalisation des objectifs de Lisbonne.
Jonckheer (Verts/ALE), au nom du groupe. - Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, un économiste français assez réputé vient de publier un livre qui s’intitule «La politique de l’impuissance», et je pense que c’est un sentiment que beaucoup de nos concitoyens peuvent légitimement éprouver. J’ajouterai toutefois que cette politique de l’impuissance est en fait une stratégie délibérée choisie depuis Maastricht, depuis 1992, laquelle s’articule grosso modo sur trois axes: la réforme structurelle des marchés - comme on l’appelle dans notre jargon -, la réduction des déficits publics et un comportement axé sur la conquête des marchés extérieurs.
En plus, sur le plan institutionnel et du point de vue de la répartition des compétences, l’Union européenne a la compétence exclusive en matière de droit de la concurrence et d’union monétaire et, pour le reste, les États membres doivent se débrouiller et se faire concurrence entre eux. Je pense que quinze ans après - et malheureusement, je dirai - ce choix institutionnel est conforté par le Traité constitutionnel que j’approuve, même s’il contient de nombreuses lacunes. Quinze ans après, les résultats sont au rendez-vous, ou plutôt l’absence de résultat en terme de croissance, et surtout de qualité de la croissance, ainsi qu’en terme de création d’emploi.
Alors, notre message en tant que groupe des écologistes, Monsieur le Commissaire, consiste à dire qu’il faut réellement changer de stratégie. Nous avons l’impression que les discussions relatives au pacte de stabilité sont des discussions à la marge et qu’il nous faut, en réalité, si nous voulons vraiment obtenir des résultats meilleurs, mettre en place une politique plus volontariste menée au niveau de la zone euro, au sein de laquelle les ministres partagent finalement un cadre d’appui européen autour d’objectifs plus ambitieux et où l’on s’efforce d’obtenir une convergence entre les différentes économies nationales. Puisque j’ai peu de temps, j’évoquerai trois de ces objectifs.
Le premier consiste, me semble-t-il, en une détaxation massive du travail et des modes alternatifs de financement des systèmes de sécurité sociale, en tenant compte de la diversité des pays. Mais je pense qu’il est très important de pouvoir dire à tous les citoyens que ceux qui travaillent, ceux qui ont la chance de travailler, doivent pouvoir vivre décemment de leur travail. Et je pense que la réalisation de cet objectif passe par une détaxation massive du travail.
Deuxième objectif, et vous n’en serez pas étonnés, nous avons besoin d’une croissance de qualité, à savoir plus économe en énergie et beaucoup moins polluante. Regardez les documents de la Commission sur l’évaluation de la stratégie communautaire de développement durable: les résultats sont catastrophiques, d’où la nécessité absolue de changer de cap de ce point de vue là.
Troisièmement, enfin, il nous faut soutenir la demande interne au sein de l’Union. Il ne faut pas tout axer sur la conquête des marchés extérieurs, comme si l’économie était uniquement constituée de grandes entreprises ou de petites et moyennes entreprises innovantes s’attaquant aux marchés chinois et indien. Il faut soutenir la demande interne, ce qui suppose des investissements publics et privés et la diffusion d’un message clair des autorités publiques, tant au niveau de l’Union européenne qu’au niveau des États membres, disant que nous sommes fiers d’être européens, que nous avons bâti une union monétaire, de même qu’un marché intérieur. À présent, nous avons besoin d’une réelle union économique et sociale qui fasse que chacun ait un avenir devant lui.
Wagenknecht (GUE/NGL), au nom du groupe.- (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, en ce qui concerne la politique économique européenne, nous pourrions bien entendu continuer sur notre lancée. Sous prétexte de réformes structurelles prétendument nécessaires, nous pourrions continuer à réduire en miettes les structures sociales de l’Europe, à forcer les syndicats à capituler, sous les menaces de chômage et d’emplois de qualité encore inférieure, en exposant de plus en plus les services publics aux forces du marché et en limitant ainsi les services offerts à ceux dont le secteur privé peut tirer profit. Nous pourrions aussi, grâce à un nouveau cycle de dumping fiscal, créer une situation dans laquelle un employé au salaire moyen contribuera bientôt plus aux finances publiques que de nombreuses entreprises européennes dont les bénéfices se chiffrent en milliards.
Bien que nous puissions, bien entendu, poursuivre dans cette voie et nous assurer les ovations de ceux à qui une politique de ce genre profite, nous ne devrions pas essayer de berner les citoyens européens en leur faisant croire que cette politique promouvra la croissance et l’emploi. Qui pourrait raisonnablement croire que l’extension des heures de travail que ce rapport réclame créera des emplois supplémentaires plutôt que d’en détruire encore plus? Qui pourrait raisonnablement croire que des réductions supplémentaires des investissements publics stimuleront la demande intérieure plutôt que d’envoyer à la faillite un plus grand nombre de petites et moyennes entreprises? Qui pourrait raisonnablement croire, sur la base de l’expérience que nous avons acquise à ce jour en matière de privatisation, qu’elle accroît l’emploi au lieu de le réduire?
Il est vrai que les résultats économiques de la plupart des pays en Europe sont décevants, mais il est faux de suggérer que la cause en est un manque de compétitivité. Ces dernières années, les coûts salariaux ont diminué dans la majeure partie des pays européens. Cette tendance a été particulièrement marquée en Allemagne, où les employés ont dû accepter une réduction moyenne des salaires réels de jusqu’à 2% en l’espace des douze derniers mois.
Cela veut-il dire qu’un nombre particulièrement élevé d’emplois a été créé en Allemagne? Que du contraire! Le taux de chômage a atteint un niveau record. Par contre, on peut dire la même chose des exportations, et pas seulement en Allemagne. Si je dis cela, c’est parce que la seule chose que les priorités politiques définies dans le rapport à l’examen peuvent faire, c’est augmenter davantage encore le retour sur investissements des global players européens et des compagnies exportatrices. Cela fera sans doute plaisir à la Table ronde européenne des entrepreneurs, mais pour la plupart des gens, c’est un désastre. Mon groupe ne soutiendra jamais une politique de ce genre et nous ferons tout notre possible pour encourager ceux qui s’y opposent.
Whittaker (IND/DEM), au nom du groupe. - (EN) Monsieur le Président, le rapport de M. Goebbels constate avec franchise les différentes lacunes de l’Union européenne. Il reconnaît le fait qu’une croissance économique élevée est nécessaire pour atteindre un taux de chômage bas, pour payer les pensions et pour arriver à ce qu’il appelle la «cohésion sociale» ou la «protection sociale».
Pourquoi la croissance est-elle si basse? Plusieurs orateurs ont accusé le pacte de croissance et de stabilité. Certains affirment qu’il est interprété avec trop de rigueur et que les gouvernements ne dépensent pas assez; d’autres prétendent le contraire, à savoir que nous devons appliquer le pacte avec davantage de rigueur. Soit les uns soit les autres se trompent. J’ai l’impression que les deux camps se trompent.
M. Goebbels déclare que la croissance pourra augmenter si l’on encourage la concurrence, l’ingéniosité, l’esprit d’entreprise, l’initiative et la prise de risques, en particulier parmi les petites et moyennes entreprises. Permettez-moi d’analyser cette assertion. Il est vrai que les petites entreprises sont importantes; ce sont les grandes sociétés multinationales qui exercent leur influence sur tout, mais les emplois qu’elles créent sont situés en dehors de l’UE. Je ne pense cependant pas qu’il y ait un manque d’opportunités parmi les petites entreprises, que le capital-investissement soit insuffisant ou que les chefs d’entreprise n’osent pas prendre le risque de créer de nouvelles entreprises et d’engager du personnel. Pourquoi cela ne se fait-il pas? Et pourquoi, lorsque cela se passe, enregistre-t-on autant d’échecs? Parce que nous nous sommes écartés du bon chemin et leur avons rendu la vie dure.
Parlez-en aux patrons de petites entreprises. Ils vous diront tous la même chose: il y a trop de bureaucratie et trop de règles, surtout en ce qui concerne l’embauchage de personnel. Toutes ces difficultés sont dues au fait que l’UE entend avant tout adopter une direction centralisée dans le vain espoir de créer une société idéalisée en légiférant et en restreignant les activités. Citons comme exemple la directive sur le temps de travail et la pléthore de règles qu’elle introduit en vue du maintien de différents droits qui ont chacun pour effet majeur d’étouffer l’esprit d’entreprise et d’enrichir les juristes. Tout cela va à l’encontre des intérêts de l’employeur.
Nous voulons tous un taux d’emploi élevé et vivre dans une société compatissante et cohésive, mais cela n’est possible que dans une société riche. En essayant d’atteindre nos idéaux par la coercition, nous tuons la source de notre richesse. Nous devons absolument revoir l’ensemble de notre modèle.
Mes collègues des autres partis politiques britanniques continuent à croire qu’ils parviendront à convaincre l’Union européenne de la nécessité de modifier sa façon d’agir. Au sein du parti pour l’indépendance du Royaume-Uni, nous savons que cela sera impossible. Le seul moyen de préserver une certaine prospérité en Grande-Bretagne consiste à quitter l’UE. Nous aimerions que les autres États membres de l’UE, qui sont nos voisins, connaissent également la prospérité, mais leur adhésion aveugle à un modèle défectueux le leur empêche et nous préférons ne pas couler avec eux.
Ryan (UEN), au nom du groupe. - (EN) Monsieur le Président, nous avons tous été témoins du succès du marché intérieur, qui permet la libre circulation des biens, des personnes, des services et des capitaux. On constate aussi clairement le bon fonctionnement de la monnaie européenne commune. Cela doit inspirer la confiance tant aux citoyens européens qu’aux entreprises et aux investisseurs.
L’Union européenne ne sera un succès que si nous parvenons à garantir une vaste coordination économique entre les 25 États membres. Cela fait partie intégrante de la stratégie générale visant à mettre en œuvre le processus de Lisbonne afin de faire en sorte que l’Union européenne devienne, d’ici 2010, l’économie la plus compétitive du monde. Les gouvernements européens devront toutefois parvenir à un accord sur la manière dont s’appliqueront à l’avenir les règles régissant l’union économique et monétaire. Le fait est que certains pays sont confrontés à de graves déficits budgétaires, ce qui va clairement à l’encontre des critères définis par l’UEM.
Certains pays souhaitent assouplir les règles régissant le fonctionnement du régime de la monnaie unique et le rendre plus flexible. Il s’agit, selon moi, d’un problème auquel les gouvernements européens devraient s’atteler afin de garantir la possibilité de construire les projets d’infrastructure nécessaires dans les domaines des transports, de l’énergie et des télécommunications.
Je ne veux pas me montrer belligérant par rapport à la manière dont fonctionnent les critères de l’UEM, mais on ne peut continuer à permettre que certains pays rencontrent de graves déficits budgétaires et qu’ils violent clairement les règles soi-disant strictes régissant le fonctionnement du régime de la monnaie unique. De telles pratiques ébranlent la crédibilité du cadre général dans lequel fonctionne l’UEM.
Si nous voulons que la communauté internationale des investisseurs, au sens large du terme, ait un maximum de confiance à l’égard de l’union économique et monétaire de l’UE, celle-ci doit mettre de l’ordre dans sa propre maison. Nous avons tous pu constater à quel point les marchés monétaires peuvent être fluctuants. Si l’ensemble des États ne se conforment pas aux règles existantes et n’ont pas confiance dans le système, nous serons confrontés à un problème de crédibilité par rapport à cette question, et cela pour une période indéterminée.
Martin, Hans-Peter (NI). - (DE) Monsieur le Président, je crois que le rapport que nous avons sous les yeux est un signe supplémentaire de l’impuissance qui s’est emparée de l’Union européenne. Certains signes révèlent que les choses commencent à s’effondrer en raison d’un large éventail de tendances antinomiques. Bien que le marché intérieur soit en place, nous manquons de tout ce que nous savons être nécessaire à une politique économique raisonnable, et j’entends par là la nécessité d’un minimum de principes communs. Le résultat, c’est la plus grande redistribution des actifs financiers que l’histoire ait connue en temps de paix. Cela ne s’applique pas seulement à notre continuent, bien que la situation ici soit particulièrement difficile, du fait que nous avons une importante classe moyenne en train de se disloquer. Je regrette dès lors que ce rapport ne suggère aucune véritable approche pour lutter contre cela. J’estime qu’il était trop tôt pour l’élargissement et que, par conséquent, nous sommes en train de promouvoir le dumping salarial, de telle sorte que de très nombreuses choses contre lesquelles nous avions été mis en garde sont actuellement en train de se produire. La première approche à adopter doit être de créer une véritable transparence, de façon à garantir que toutes ces différences soient au moins claires pour tout le monde.
Radwan (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, nous discutons de la stratégie de Lisbonne et de la manière dont l’Europe envisage de devenir la région la plus compétitive au monde. Nous n’y sommes pas parvenus au cours des cinq années écoulées et nous avons à présent identifié le principal coupable: le pacte de stabilité et de croissance! D’aucuns disent que si nous laissions tomber le pacte, l’Europe s’en sortirait bien mieux, car cela nous permettrait de progresser davantage.
Je n’ai entendu personne parler de ce qu’il fallait faire au niveau national ni de l’endroit où il fallait chercher les coupables - au sein des États membres. L’Allemagne en est même venue à croire qu’il valait mieux réaliser des versements nets plus élevés à l’Europe en échange de l’abolition du pacte de stabilité et de croissance.
Monsieur le Commissaire Almunia, votre prédécesseur, le socialiste espagnol M. Solbes, a assuré à cette Assemblée à plusieurs reprises que le pacte de stabilité et de croissance était suffisamment flexible, et je ne peux que lui donner raison. Ce que je ne peux pas accepter, c’est que nous maintenions les critères des 3% et des 60% et, ensuite, comme le chancelier Schröder l’a fait, chercher à exclure certains facteurs juste avant ou même après la procédure. On essaie ensuite de nous convaincre que cela a été fait au nom de la stratégie de Lisbonne en nous disant que, désormais, dans la procédure, nous ne pouvons ou ne devons plus rien prendre en considération qui soit destiné à doper croissance. Cela doit entrer en ligne de compte. Les économistes allemands nous disent alors que nous nous retrouverons avec un déficit de l’ordre de 8 ou 10%. Les sanctions appropriées ne sont pas appliquées dans ce cas-ci.
Si nous voulons prendre Lisbonne au sérieux, nous devons d’abord prendre le pacte de stabilité et de croissance au sérieux et ne pas utiliser l’argument selon lequel 10 États membres ne le respectent pas. Je serais ravi si les limitations de vitesses étaient appliquées en disant que, si vous vous faites attraper trop souvent en excès de vitesse, on va simplement relever la limite applicable, de telle sorte que moins de personnes recevront des amendes à l’avenir! Les règles sont là pour qu’on les respecte.
Nous devons prendre la stratégie de Lisbonne au sérieux. Nous devons la prendre au sérieux lorsque nous concevons la législation communautaire, pour qu’à l’avenir, chaque nouvelle directive soit contrôlée pour vérifier si elle est en conflit avec les objectifs de Lisbonne ou si elle les promeut. Les États membres doivent s’assurer qu’ils ne torpillent pas la législation sur le marché intérieur lorsqu’elle ne leur sied pas, et la Commission doit sanctionner les États membres fautifs. La Commission devrait mettre sur pied l’étalonnage et l’annoncer le plus clairement possible. En Europe, nous devons réaliser que la terre est ronde et que nous sommes engagés dans la concurrence mondiale. Nous devons enfin réagir pour que les citoyens soient conscients que nous prenons cette question au sérieux.
Berès (PSE). - Monsieur le Président, M. Karas n’est plus là, mais j’aurais voulu lui dire que, moi aussi, je pense que l’Union européenne est une Communauté de droit. Et au-dessus du pacte de stabilité, il y a le traité. Or, dans le traité, il y a un article qui n’a pas été changé, qui dit que les États considèrent leur politique économique comme une question d’intérêt commun. Pour cela, la croissance dans l’ensemble de la zone euro est une question d’intérêt commun et je ne crois pas que le pacte de stabilité tel qu’il est aujourd’hui entre nos mains soit cet outil dont nous avons besoin.
À M. Radwan, je dirai que la question n’est pas de savoir s’il y a dépassement de vitesse; la question est de savoir si nous voulons une Mercédes en sous-régime et il me semble qu’aujourd’hui, le pacte de stabilité, c’est un peu cela.
Au sujet du pacte de stabilité, je voudrais faire trois observations. La première: je crois que la bonne réforme est celle qui permettra à l’Union européenne d’avoir enfin un outil macroéconomique au service de la stratégie de Lisbonne. Dans ce contexte, la question de «tenir compte des dépenses» sera un point majeur. Il ne s’agit pas d’ouvrir une négociation de marchands de tapis entre les revendications de tel ou tel État membre. Il s’agit de savoir où peut exister une valeur ajoutée pour une croissance européenne. Et ça, il n’y a que la Commission qui peut le dire car c’est elle qui incarne l’intérêt commun européen.
Deuxième observation: d’aucuns disent que sous le label «tenir compte des dépenses» pourrait figurer, pour des raisons comptables, la façon dont tel ou tel État membre engagerait des réformes structurelles en matière de retraite. Je crois que cela est dangereux car pour des raisons comptables, encore une fois, on entrerait dans des débats qui sont au cœur des éléments de la cohésion nationale.
Troisième observation: lorsque je regarde la façon dont on évalue la situation dans les États membres, on ne peut pas considérer que toute chose est égale par ailleurs. La situation économique dans un grand pays ou dans un petit pays, au regard du pacte de stabilité, n’a pas la même signification. Il ne suffit pas de dire tous les États sont égaux au regard du pacte. Chacun admet aujourd’hui dans les milieux économiques - mais c’est encore pour l’instant mal vu de le dire dans les milieux politiques - que l’utilisation de l’outil budgétaire n’a pas le même impact selon la taille de l’économie d’un pays. Aujourd’hui, deux pays comme la France et l’Allemagne se retrouvent dans une situation où ils sont à la fois responsables et victimes d’un état de fait dont aucun État membre de la zone euro ou de l’Union européenne dans son ensemble ne tire avantage. Personne n’a intérêt à voir l’économie de la zone euro plombée par une croissance trop faible au sein même de la principale économie de la zone euro. C’est même contraire au traité et à l’intérêt commun des États membres.
Starkevičiūtė (ALDE). - (LT) Je vous remercie, Monsieur le Président. Je tiens à dire que, à l’instant même, nous débattons de deux documents en même temps, lesquels ont été, pour l’essentiel, préparés avec brio et se complètent l’un l’autre. Ils doivent jeter les fondements économiques du pacte de stabilité et de croissance et d’un troisième groupe de documents dont nous débattons. Aussi, voyez-vous, peut-être cela vaudrait-il la peine de considérer que, si nous souhaitons envoyer un message clair à nos concitoyens, aux citoyens de l’Union européenne, à la communauté des entreprises et, finalement, à la communauté internationale, nous devrions sans doute accorder plus d’attention à certaines dispositions d’un document en particulier, qui jetterait les bases de la stabilité macroéconomique, le pacte de stabilité et de croissance. Il serait naïf de croire que nous pouvons maintenir ou consolider le pacte de stabilité et de croissance avec certaines dispositions juridiques ou certains critères. C’est l’expérience des réformes que mon pays a mises en œuvre ces quinze dernières années qui me permet de l’affirmer. Nous ne devons pas chercher les différences. Si nous voulons mettre en œuvre les réformes, c’est le consensus que nous devons rechercher. Je pense que nous pouvons nous mettre d’accord sur quatre points et notre expérience en matière de réformes nous apprend qu’ils peuvent avoir une influence positive sur l’économie. Premièrement, nous devons accorder notre attention aux investissements nécessaires à la productivité, car nous avons besoin d’investissements d’un certain type. Nous devons accorder notre attention aux réformes structurelles, bien que ces dernières soient impossibles sans mesures fiscales. Comme le chômage augmente en période de réformes structurelles, un soutien est de mise, mais on ne peut pas accorder toute son attention au seul soutien, car alors le budget n’est pas viable. Nous devons accorder notre attention à l’expansion des nouvelles entreprises. Autrement dit, nous devons tâcher de simplifier l’administration fiscale, afin que les petites entreprises puissent réussir en Europe. En ce qui concerne le quatrième point - et le plus complexe -, nous devons réaliser que les produits bon marché pullulent en Europe. Nous sommes entourés de pays producteurs à bon marché et il est temps que nous commencions à réfléchir à la manière de réduire les taxes, sans pour autant - cela va de soi - perturber l’équilibre macroéconomique. En effet, notre expérience en matière de réformes nous a appris qu’on pouvait accomplir beaucoup de choses en appliquant une meilleure administration fiscale. Il n’est pas surprenant de voir bon nombre de pays rencontrer des difficultés avec le transfert des bénéfices et la réduction de la taxe sur la valeur ajoutée. Il existe néanmoins plus d’une façon de mieux gérer les taxes et de réduire la charge fiscale, comme en atteste l’expérience de nos pays. Voilà, selon moi, la meilleure manière de mettre à profit les connaissances que nous avons accumulées. Je vous remercie.
Manolakou (GUE/NGL). - (EL) Monsieur le Président, les rapports sur les finances publiques dans l’UEM et sur l’état de l’économie européenne ne tiennent en aucun cas compte des problèmes de base qui sont communs aux travailleurs des États membres dans la mesure où leur cause est la même: la politique antipopulaire de l’Union européenne. Le fait que ces problèmes sont communs est tout à fait clair quand on voit les manifestations de travailleurs organisées dans la plupart des pays contre le coût de la vie, le chômage, les salaires peu élevés, les licenciements, la privatisation des secteurs des soins de santé, de l’éducation et des services sociaux, la prolongation du temps de travail, l’insécurité et l’incertitude quant à l’avenir.
Plutôt que de réagir à ce que je viens d’exposer, les rapporteurs se prononcent en faveur d’un respect plus strict du pacte de stabilité, avec des taxes exorbitantes et des programmes d’austérité antipopulaires pour lutter contre les déficits. Autrement dit, ce sont toujours les travailleurs qui paient, jamais la ploutocratie. Dans le même temps, ils demandent que la stratégie antipopulaire de Lisbonne soit appliquée sans délai, en vue de promouvoir une plus grande exploitation de la main-d’œuvre par le biais du travail intérimaire et à temps partiel, de la prolongation du temps de travail, du recul de l’âge de la retraite, de l’abolition de la participation gouvernementale à la sécurité sociale et de la mise en échec des conventions collectives. Telle est la nouvelle redistribution des richesses, avec des profits encore plus élevés pour les grandes entreprises et avec davantage encore d’inégalité et d’injustice. Ils réclament que l’économie européenne - et ils entendent par là la rentabilité des monopoles européens - soit revigorée par de nouvelles mesures d’austérité encore plus strictes et antipopulaires et que les travailleurs consentent à de plus grands sacrifices, pour leur propre bien, tout en demandant aux gouvernements de réduire même les dernières dépenses sociales minimales et de modifier immédiatement les systèmes d’assurance et de pension qui, disent-ils, sont inadéquats.
Voilà les philosophies et politiques de l’Union européenne qui poussent les travailleurs à exprimer leur sentiment en s’abstenant d’aller voter, comme lors des élections européennes, où le taux de participation électorale était de 40%, ou lors du récent référendum en Espagne sur la soi-disant Constitution européenne, où le taux était de 35-40%. Ces signes expriment le sentiment d’indifférence des travailleurs et c’est pourquoi ils tournent le dos à l’Union européenne. La meilleure réponse est toutefois une lutte sous la forme d’une désobéissance organisée à cette politique ainsi qu’une contre-attaque destinée à la changer radicalement.
Wohlin (IND/DEM). - (SV) Monsieur le président, la croissance de l’UE est manifestement en deçà de son niveau potentiel. L’UE a un taux de chômage élevé; elle enregistre un excédent des échanges courants par rapport aux autres pays; et le taux d’inflation est inférieur à celui visé dans le cadre de la politique monétaire. Comme le rapport l’indique, les réformes structurelles sont grandement nécessaires. Le rapport ne souligne toutefois pas assez que pas mal de pays ont besoin d’une politique plus expansive.
L’une des raisons de cette politique trop restrictive est la façon dont le pacte de stabilité et de croissance a été conçu. À mon sens, il a été mal construit, ce qui entraîne une politique trop restrictive dans certains pays. Cette erreur de conception réside dans le fait qu’une trop grande attention est accordée au déficit budgétaire, alors qu’elle devrait être portée au ratio d’endettement.
Un pays avec un ratio d’endettement inférieur à 60% de son PIB et qui maintient son inflation sous la barre des 2% verra son ratio d’endettement diminuer si son économie connaît une croissance réelle d’un point de pourcentage au moins et si son déficit budgétaire s’élève à 3%. Si un pays enregistre une croissance économique de 5% et présente un taux d’inflation de 2%, son PIB nominal augmentera de 7%. Le déficit budgétaire pourrait alors s’élever à 7% et le ratio d’endettement serait stable avec un tel déficit. Ce pays ne signifierait aucune pression pour la zone euro. L’accroissement de la dette serait stable et, partant, défendable à long terme. Le pays devrait probablement présenter une cote de crédit saine et ne devrait constituer aucun risque de crédit pour la zone euro dans son ensemble. Un déficit budgétaire de ce genre est défendable à long terme. Un déficit limité de 3% signifie que la dette nationale diminue continuellement proportionnellement au PIB. Dès lors qu’un ratio d’endettement de 60% du PIB est raisonnable économiquement parlant, il n’y a aucune raison d’imposer une telle restriction financière à ce pays.
Il est parfaitement normal pour de nouveaux pays à forte croissance de présenter des déficits significatifs de leur balance des paiements courants et des importations de capitaux. L’épargne privée peut probablement ne pas suffire; l’État aussi peut présenter un budget déficitaire. La conclusion à en tirer est que les pays dont le ratio d’endettement est inférieur à 60% de leur PIB et dont l’inflation est sous contrôle devraient être autorisés à poursuivre une croissance plus rapide et à mener une politique plus expansive. Ainsi, toute l’UE en serait stimulée. Je recommande une modification du pacte de stabilité et de croissance allant dans ce sens.
Angelilli (UEN). - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, le rapport sur les finances publiques dans l’UEM montre lui aussi clairement qu’il est nécessaire de réformer le pacte de stabilité et de croissance. Il ne fait aucun doute que le pacte a un rôle fondamental à jouer en termes de stabilité, mais il doit aussi servir à stimuler la croissance.
Nous sommes conscients que les ministres réunis au sein du Conseil Écofin sont en train de préparer le texte de la réforme, mais le Parlement ne peut rester en marge du débat. Il serait donc souhaitable que, avant la décision finale du Conseil, le Parlement ait l’occasion d’exprimer son avis sur les procédures de réforme du pacte en organisant un débat à ce sujet. Depuis le débat du mois de septembre, le Parlement semble adopter une attitude passive, alors qu’il devrait plutôt jouer un rôle déterminant dans ce processus de réforme, en permettant surtout à tous les députés et à tous les groupes d’esquisser les stratégies possibles.
Nous devons faire preuve de pragmatisme et de réalisme. Nous ne pouvons pas affirmer dans nos documents que nous devons être l’économie la plus compétitive au monde si, dans le même temps, les chiffres montrent clairement que la croissance stagne. Aussi le pacte doit-il être réformé. J’entends par là des façons plus flexibles d’appliquer le pacte en période de difficultés économiques, la nécessité de reconnaître comme il se doit les réformes structurelles entreprises par les États membres et, peut-être, l’exemption des dépenses d’investissement destinées à soutenir les objectifs - encore lointains - de la stratégie de Lisbonne.
Pour conclure, je crois que le Parlement doit reprendre son rôle actif dans ce débat, en tant que seule institution représentant directement les citoyens de l’Union.
García-Margallo y Marfil (PPE-DE). - (ES) Monsieur le Président, le rapporteur, M. Goebbels, se plaint du manque de coordination des politiques économiques. J’en conviens, mais je parviens à une conclusion différente.
Sans ces règles de coordination, rendre le pacte de stabilité plus flexible reviendrait à le rompre, et rompre le pacte de stabilité reviendrait à neutraliser les efforts de la Banque centrale pour maintenir les prix. Cela ferait monter les taux d’intérêt, cela retarderait la croissance, à laquelle nous aspirons tous, mais aussi la mise en œuvre des réformes structurelles et, ce qui est plus dangereux, cela menacerait sérieusement l’État-providence. Les ressources que nous dépensons à payer les intérêts et à rembourser la dette publique signifieront moins de ressources pour garantir les finances.
Ce dont nous avons besoin pour l’instant, c’est plus d’emplois et plus de productivité. Plus d’emplois, cela requiert avant toute chose une attention accrue aux segments de la population les plus en difficulté, et nous savons qu’il s’agit des femmes, des jeunes entre 15 et 25 ans et des personnes de plus de 55 ans. Et plus de productivité, cela implique plus d’investissements, plus d’efforts dans les investissements et le développement, et plus d’efforts dans l’éducation et la formation professionnelle en vue d’augmenter la productivité du travail.
L’allocution du commissaire me rappelle aussi - pour citer une fois encore M. Goebbels - ces discours de l’ancienne Union soviétique, qui disaient que la transition vers le socialisme se terminerait inévitablement l’année suivante. Lorsqu’ils ont réalisé que la transition était possible, ils en ont conclu que la transition était achevée et qu’ils en étaient déjà au communisme. Quelques années plus tard, le rideau de fer tombait.
Il n’est pas nécessaire d’affaiblir la stabilité macroéconomique, mais il est essentiel de continuer à insister avec plus de force, plus de vigueur, sur les réformes structurelles, en tant que seule garantie, en tant que seule formule sérieuse, pour parvenir à la croissance.
Bullmann (PSE). - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, M. Karas a déclaré tout à l’heure que nous traitions de décisions concernant notre direction future, et il a raison. L’on ne peut toutefois décider de la direction à prendre que si l’on peut apercevoir l’horizon. Pour être capable de prendre des décisions sur la direction future, vous devez être à jour dans votre analyse et vos propositions. À cet égard, je peux dire à la plupart des membres du groupe conservateur que, parmi tous les groupes, ils ne sont pas à jour dans leurs propositions contenues dans ces deux rapports et qu’ils ne sont pas en mesure d’apercevoir l’horizon.
Vous savez très bien que les orientations de politique économique constituent le document le plus fastidieux que produit Bruxelles chaque année. Quelles sont donc vos propositions au sein de la commission des affaires économiques et monétaires pour moderniser cet instrument? Où est votre contribution à un débat sérieux?
Réformes structurelles, dites-vous! Fort bien! L’Europe et ses États membres ont besoin de réformes structurelles. Mais vous savez pertinemment bien que les réformes structurelles ne peuvent fonctionner, ne peuvent conduire à davantage de croissance et d’emplois, que si elles font partie d’une politique industrielle active, partie d’une politique active en faveur des petites et moyennes entreprises et partie d’une politique budgétaire appropriée à notre situation économique. J’ai envie de pleurer en lisant vos propositions. Vous devriez lire une fois vos textes en entier avant de les adopter, ce ne serait pas du luxe!
Vous réclamez une réduction générale du niveau de taxation. Il vaudrait beaucoup mieux que vous discutiez avec nous d’une politique digne de ce nom pour les PME au lieu de mettre de telles absurdités dans vos rapports. Vous voulez allonger les heures de travail de tout le monde. Pourquoi ne pas nous aider à relever le taux d’emploi, pour que tout le monde puisse travailler? L’Europe a davantage à y gagner. C’est pourquoi vous n’aurez notre accord que si vous votez des amendements raisonnables. Faute de quoi nous ne pouvons soutenir ces absurdités.
Bourlanges (ALDE). - Monsieur le Président, la politique de l’Union européenne en matière économique est aujourd’hui composée de trois éléments: une ambition platonique - la stratégie de Lisbonne -, une contrainte méprisée - la maîtrise des dépenses publiques -, et une exigence ignorée - le soutien au pouvoir d’achat.
Une ambition platonique, la stratégie de Lisbonne. Qui ne peut souscrire aux objectifs fixés à Lisbonne? Qui ne peut souhaiter une économie de la connaissance, une meilleure formation des personnes, une progression de la recherche-développement, une société d’innovation? Qui ne souscrirait à ces objectifs? Mais qui ne voit, en revanche, que sous l’appellation de coopération ouverte, il n’y a en fait rien? Rien que la libre politique des États qui se donnent de temps à autre des rendez-vous imaginaires avec l’Union européenne: Conseil, Commission, Parlement, réduits à être des institutions du commentaire et du blâme. Ce n’est pas ainsi que nous gagnerons la partie.
Une contrainte méprisée, la maîtrise des dépenses publiques. Derrière une fausse querelle sur les instruments de la politique conjoncturelle et l’usage de la dépense publique entre keynésiens et libéraux, nous assistons depuis vingt-cinq ans à une dérive structurelle des dépenses publiques, à une aggravation systématique dans un certain nombre de grands pays, en particulier de l’endettement, qui empêche en fait nos enfants de maîtriser leur avenir. C’est ici le mort, c’est-à-dire le passé, qui se saisit du vif, c’est-à-dire de l’avenir.
Alors, dans cette affaire, on accuse la Banque centrale, bien à tort. Que lui reproche-t-on? Des taux d’intérêts trop élevés; ils n’ont jamais été si bas depuis la guerre. Une politique de l’euro trop élevée; ce sont évidemment les politiques américaines de déficit systématique, et non la vertu supposée des Européens, qui conduisent à cette situation. En vérité, nous sommes dans une situation où la Banque centrale n’a guère les moyens. Alors il y a le pacte de stabilité, et c’est un instrument à réformer. Que reproche-t-on au pacte de stabilité? D’être bête et méchant. Il est bête, il est méchant, tâchons de le rendre moins bête, tout en conservant sa vertu contraignante.
Enfin, et je terminerai par là, Monsieur le Président, une exigence ignorée: la stimulation du pouvoir d’achat. Qui ne voit que nous sommes actuellement dans un système où les salariés ont de moins en moins de moyens et de pouvoir d’achat par rapport aux actionnaires? Il y a des méthodes pour rétablir cela: diffusion de l’actionnariat, détaxation du travail, mais ces méthodes sont ignorées.
Alors, ce que je crains, Monsieur le Président, c’est que nous, nos institutions, l’Union européenne, soyons réduits à être le chœur antique d’une tragédie dont les seuls acteurs véritables sont les gouvernements nationaux.
Guerreiro (GUE/NGL). - (PT) Vu la réalité de la situation économique et sociale en déclin qui prévaut dans la majorité des pays de l’UE, le pacte de stabilité et de croissance est enfin remis en question, quoiqu’un peu tard, et seulement après que la France et l’Allemagne ne l’ont pas respecté. Cela dit, mieux vaut tard que jamais.
Malheureusement, les perspectives définies pour le Conseil Écofin du 8 mars n’apporteront guère de changement lorsqu’elles seront mises en œuvre. L’application soi-disant flexible du pacte de stabilité et de croissance dépendra de la capacité plus ou moins grande d’un pays à mettre en danger les systèmes de sécurité sociale, de pensions et de soins de santé et, comme plusieurs l’ont signalé, les réformes de l’administration publique. En d’autres termes, plus un État membre met en œuvre les politiques et objectifs consacrés dans la stratégie de Lisbonne et que nous considérons comme extrêmement onéreux, plus grande sera sa flexibilité à appliquer le pacte de stabilité, ce qui serait inacceptable.
Janowski (UEN). - (PL) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, le temps de parole qui m’est accordé ne me permettra pas d’approfondir le sujet, et je me contenterai par conséquent de souligner quelques points.
Pour commencer, l’argent et l’énergie gaspillés pour la bureaucratie excessive et trop souvent absurde représentent une contrainte majeure pour le développement économique de l’UE. Deuxièmement, les systèmes fiscaux des États membres devraient être étudiés en profondeur en vue de déterminer, entre autres choses, si le système de la TVA actuellement en vigueur constitue la meilleure solution. Il se pourrait bien qu’il existe d’autres taxes plus efficaces, et l’expérience nous a d’ailleurs appris que c’était bien le cas. Troisièmement, une analyse systématique de la situation économique de l’UE dans son ensemble et de chaque État membre en particulier doit être réalisée tous les trois ou quatre ans et s’accompagner d’un compte-rendu, à la fois pour identifier les progrès réalisés, si progrès il y a, et pour permettre de réagir suffisamment vite en cas de problème. Quatrièmement, le financement de la recherche destinée à stimuler le développement économique fait gravement défaut.
Enfin, je voudrais me pencher sur une question qui n’a pas encore été abordée. Tout cet intense débat économique et ces plans tous plus élaborés les uns que les autres et qui ont fait naître tant d’inquiétudes ne resteront que lettre morte si des mesures réelles ne sont pas prises pour empêcher le désastre démographique imminent au sein de l’UE. Ce ne sont pas des menaces en l’air. Les membres de cette Assemblée n’ont qu’à ouvrir les yeux pour regarder les statistiques de la population. Même si elles ne sont pas simples à lire, on ne peut pas se tromper sur le message qu’elles renferment. Si aujourd’hui il y a quatre personnes en âge de travailler pour une personne en âge d’être à la pension, dans trente ans, il n’y en aura plus que deux et, en conséquence, la question de la soutenabilité de cette situation se pose. Nous ne devrions pas oublier que la famille, qui inclut les parents et les enfants, est l’unité économique la plus fondamentale. Gary Becker, lauréat du prix Nobel en 1992, est allé jusqu’à dire que la famille, et le travail accompli au sein de la famille, représentait pas moins de 30% du revenu national. L’économiste français Jean-Didier Lecaillon a tenu des propos semblables et je pourrais en citer d’autres, dont Jean-Paul II, dont les paroles ont du poids. Charles de Gaulle est reconnu par tous comme étant un véritable homme d’État et il était tout à fait sérieux lorsqu’il a dit que si vous êtes pauvres et n’avez pas d’autre solution, vous devez investir dans la famille. Sapere aude Europa. Je vous remercie.
Claeys (NI). - (NL) Monsieur le Président, ce rapport contient une foule de propositions visant à supprimer le déficit créé lors de l’application de la stratégie de Lisbonne. Je tiens tout particulièrement à exprimer ma satisfaction à l’égard du paragraphe 7 du rapport, qui souligne le rôle éminent des petites et moyennes entreprises (PME) dans la création d’emplois et la prospérité en général. La création d’un climat encourageant l’esprit d’entreprise chez les jeunes revêt une importance toute particulière, un climat dans lequel la charge administrative et fiscale serait substantiellement réduite et dans lequel les PME auraient un accès plus aisé au capital-risque. Une autre conclusion est que ce rapport ne souffle mot du livre vert de la Commission sur l’immigration économique. C’est aussi bien comme ça, surtout au vu du niveau de chômage actuel. Le plaidoyer de la Commission en faveur de l’admission et de la stimulation d’une nouvelle immigration est stupide, contreproductif, mais aussi complètement déplacé, même si la Commission se fonde sur les objectifs de Lisbonne pour déposer cette proposition.
Lulling (PPE-DE). - Monsieur le Président, mes collègues des groupes ALDE et PPE-DE - les choses étant ce qu’elles sont dans ce débat - se réjouiront certainement d’apprendre que M. Goebbels s’est étendu dans la presse luxembourgeoise en affirmant que leurs amendements approuvés en commission reflétaient «le caractère foncièrement réactionnaire et néolibéral de ces deux groupes au Parlement». L’outrance de ses propos a bien sûr quelque chose de risible: elle suggère que cette Assemblée serait constituée à tout le moins de fieffés réactionnaires. Cependant, ces propos ont aussi de quoi inquiéter. Dans cet hémicycle, le groupe socialiste cultive volontiers une certaine ambiguïté en matière de principes de politique économique. Une fois qu’elle se retrouve chez eux, cette ambiguïté se transforme en véritable aversion.
Pour ma part, je ne pense pas qu’il soit superflu de souligner dans ce débat que les conditions d’une croissance saine et durable sont créées par des finances publiques saines et des prélèvements obligatoires raisonnables. La stabilité n’est pas un obstacle à la croissance, elle en est le préalable.
De notre côté, nous ne succomberons pas à ces mêmes travers de l’aveuglement idéologique et nous montrons beaucoup plus de pragmatisme. Il est des situations où des politiques plus interventionnistes s’avèrent nécessaires pour relancer la conjoncture économique, la question n’est pas là; la situation actuelle que connaît l’Europe ne relève pas ou peu de ce schéma. Découvrant un peu tard le keynésianisme, M. Goebbels voudrait l’accommoder à toutes les recettes et à toutes les sauces, même lorsque la situation ne s’y prête pas. Le creusement des déficits budgétaires supplémentaires ne fournit pas une solution à nos problèmes d’aujourd’hui. Si tel était le cas, les pays connus pour leur laxisme financier et budgétaire auraient été érigés en modèle depuis longtemps.
Enfin, dire que les Européens se doivent de travailler autant, sinon mieux, pour garantir leur niveau de vie face à la concurrence mondiale, Monsieur Bullmann, ne doit pas tenir davantage du crime de la pensée. L’exemplarité des 35 heures à la française en dit plus que tous les longs discours à ce sujet. M. Goebbels avance, bien sûr, un certain nombre de bonnes idées dans son rapport - comme celle de favoriser certains types d’investissements dans les services sociaux ou dans le développement durable - mais il semble mal s’accommoder de l’essentiel, à savoir que l’efficacité économique obéit à des règles bien définies et qu’il est dangereux de les nier.
Andersson (PSE). - (SV) Monsieur le Président, je voudrais avant tout dire à quel point je regrette que le représentant du groupe du parti populaire européen (démocrates-chrétiens) et des démocrates européens, M. Hökmark, ait quitté le débat. J’estime que la proposition émise par la commission est inacceptable pour nous, sociaux-démocrates, et ce pour trois raisons.
Tout d’abord, une augmentation générale du temps de travail n’est nullement nécessaire. Ce qu’il faut, c’est que plus de gens travaillent, et non une augmentation générale du temps de travail. Ensuite, une réduction globale des taxes en Europe ne résoudrait pas les problèmes. Comment se fait-il que les pays nordiques, qui ont la charge fiscale la plus lourde, enregistrent la croissance la plus élevée de l’UE? Cela laisse entendre que le groupe PPE-DE est complètement à côté de la plaque. Enfin, un équilibre est de mise dans le processus de Lisbonne. Les auteurs de cette proposition, telle qu’elle est pour l’instant, sont encore pires que la Commission dans ce sens que, pour l’essentiel, ils ne mettent l’accent que sur le premier pilier du processus de Lisbonne, alors que c’est la réciprocité entre les piliers qui importe.
Je conviens que les réformes structurelles sont nécessaires, mais le plus important est que, dans ce processus, la responsabilité sociale soit acceptée de part et d’autre dans l’industrie. M. Hökmark est originaire de Suède, où son parti caresse aujourd’hui les sociaux-démocrates dans le sens du poil. Dans le cadre du débat national chez nous, ils ne parlent pas de réductions de taxes ni d’augmentation du temps de travail. Mais ils le font toutefois dans cette Assemblée.
Durant l’après-guerre, la Suède a suivi une politique économique extrêmement réussie, à la seule exception des années 1991-1994. M. Hökmark était alors l’un des décideurs politiques en Suède. Il serait dommage que le groupe PPE-DE adopte cette politique néolibérale et la fasse sienne. Il en résulterait un antagonisme politique. Nous, sociaux-démocrates, nous voulons une politique équilibrée plutôt qu’une politique néolibérale. Une politique néolibérale ne résoudra pas les problèmes de l’Europe.
Czarnecki, Ryszard (NI). - (PL) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, c’est la toute première fois que nous sommes face à une situation dans laquelle une majorité d’États membres, à savoir 13 sur 25, sont en dehors de la zone euro et non à l’intérieur. En outre, les taux d’intérêt en Europe sont au plus bas depuis la Seconde Guerre mondiale et, pourtant, ils ne stimulent aucunement l’investissement. Nous devons reconnaître que la zone euro enregistre une faible croissance économique. Nous savons déjà que la consommation nationale restera faible les deux prochaines années, et cela vaut pour l’UE tout entière. Parallèlement, l’élargissement a entraîné une hausse substantielle des aspirations économiques des citoyens, et en particulier de ceux des nouveaux États membres de l’UE, dont mon pays, la Pologne. Ces aspirations ne cadrent pas avec une situation économique médiocre dans laquelle il est impossible de répondre aux attentes des consommateurs. Politiquement parlant, cela peut attiser l’euroscepticisme au fil du temps, ce qui est d’autant plus probable au vu des prévisions, en ce compris celles contenues dans le rapport Goebbels, qui suggèrent que les niveaux de chômage resteront élevés dans un avenir proche.
Les citoyens européens attendent la véritable croissance économique qu’ils se sont vu promettre à plusieurs reprises ces dernières années, par exemple lors de sommets de l’UE. Mais ils attendent aussi justice et traitement égal pour tous les États membres. En fermant les yeux sur les profonds déficits budgétaires de pays tels que l’Allemagne et la France, mais en sanctionnant lourdement les pays plus faibles et plus pauvres s’ils osent enregistrer un déficit, l’UE met en pratique une idée qui nous est familière et tirée de «La ferme des animaux»d’Orwell, à savoir que tous les hommes sont égaux, mais que certains sont plus égaux que d’autres. Voilà qui ne fait rien pour soutenir l’autorité de l’UE aux yeux des autres États membres. Bref, c’est un scandale.
Kauppi (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, permettez-moi de remercier en premier lieu mes collègues, M. Goebbels et M. Karas, pour leur travail préparatoire aux rapports sur les finances publiques.
Comme nous le savons, la croissance dans l’UE n’a pas été aussi bonne qu’espéré. Notre collègue, M. Karas, nous l’a signalé: la diminution de la part du PIB destinée aux investissements publics et privés est énorme par rapport aux années 1970. Vu l’absence de réformes structurelles et le bas taux des investissements, la croissance du PIB n’est pas satisfaisante. Nous ne pouvons toutefois pas compter exclusivement sur les investissements publics pour stimuler la croissance; nous devons offrir des incitants en vue de stimuler les investissements privés, qui constituent la véritable base d’une croissance durable en Europe.
Au cœur de ce débat figure l’avenir du pacte de stabilité et de croissance. Le pacte avait pour ambition d’équilibrer les budgets des États membres et d’engendrer des excédents budgétaires d’ici 2003. L’idée sous-jacente consistait à amener les États membres à rembourser leurs dettes en période de bonne conjoncture et à s’assurer qu’en réformant les structures du secteur public, leurs budgets pourraient être maintenus en équilibre en période de mauvaise conjoncture. Il n’est cependant pas facile pour nous qui faisons de la politique de refréner notre désir d’accroître nos dépenses en période de bonne conjoncture. C’est ce que montrent malheureusement les mauvais résultats enregistrés par de nombreux États membres par rapport au pacte.
Pour moi, le pacte est une très bonne chose. Les États membres qui ont assumé leur part de responsabilité et qui sont parvenus à contrôler leurs finances publiques - en particulier mon pays, la Finlande, - souffrent de l’irresponsabilité des États membres qui s’en fichent! L’ajout de certains éléments de flexibilité au pacte apparaît malheureusement inévitable. Méfions-nous cependant de trop diluer le pacte!
Trois problèmes doivent demeurer présents dans notre esprit. Primo, les règles doivent être les mêmes pour tous les États membres et les critères doivent être objectifs. Secundo, on ne peut exclure automatiquement des dépenses publiques aucune dépense telle que les investissements publics ou le financement de la recherche; ces dérogations permettraient aux États membres de les interpréter dans un esprit très novateur. Tertio, la flexibilité accordée aux États membres devrait être liée aux réformes entreprises en période de bonne conjoncture. Il n’est que juste d’accorder une certaine flexibilité aux États membres qui ont remboursé leurs dettes et réduit leurs déficits et de ne pas offrir une plus grande marge de manœuvre à ceux qui n’ont rien fait.
J’espère que ce sera le bon sens qui l’emportera et que le pacte de stabilité et de croissance se maintiendra. Si des modifications y sont apportées, essayons au moins qu’elles aillent dans la bonne direction.
(Applaudissements)
Rosati (PSE). - (PL) Monsieur le Président, les modifications proposées au pacte de stabilité et de croissance visent à rendre les règles fiscales plus flexibles et pratiques à l’intérieur de l’Union, tout en maintenant le principe fondamental de la discipline budgétaire. Ces modifications représentent à mon sens un pas dans la bonne direction, mais je voudrais souligner trois questions qui s’y rapportent.
Premièrement, les propositions de la Commission portent principalement sur le déficit budgétaire courant et attachent moins d’importance à la dette publique. J’estime que ce devrait être le contraire, car le facteur le plus déterminant pour la stabilité financière à long terme est l’ampleur de la dette par rapport au produit national brut, et non le déficit d’une année donnée. Cela signifie que des limites de déficit plus strictes devraient être définies pour les pays à la dette très élevée par rapport aux pays dont la dette est moins grande. Ces derniers peuvent se permettre un déficit plus élevé à court terme et ne devraient pas être punis pour avoir respecté les règles par le passé. Les niveaux de dette devraient donc constituer un critère plus important que le déficit courant.
Deuxièmement, la méthode utilisée pour calculer les déficits devrait tenir compte de la situation particulière des nouveaux États membres qui se sont engagés dans la tâche difficile de réformer leur système de pensions. Dans ces pays, les dépenses liées à ces réformes ont temporairement augmenté, parce qu’il faut non seulement financer les pensions actuelles, mais aussi constituer des fonds de pensions pour les générations futures. Ces dépenses ne devraient pas être considérées comme des dépenses publiques courantes aux fins du pacte de stabilité et de croissance, car elles n’augmentent pas la demande courante, mais contribuent plutôt à l’épargne nationale. Les nouveaux États membres ne devraient pas être punis parce qu’ils mènent des difficiles réformes structurelles.
Troisièmement, je voudrais suggérer au commissaire d’envisager d’exclure les dépenses associées aux paiements en faveur du budget communautaire lors de la définition des principes selon lesquels les déficits seront calculés aux fins du pacte de stabilité et de croissance. S’il est vrai que ces dépenses accroissent la demande dans toute l’UE, elles contribuent également à appliquer le principe fondamental de la solidarité. Cette solution permettrait aussi de parvenir plus facilement à un compromis sur la taille du budget de l’Union européenne pour la période 2007-2013. Je ferai remarquer que l’une des raisons pour lesquelles certains États membres réclament un budget «réduit» est que ce sont des contributeurs nets au budget communautaire. Merci beaucoup.
Samaras (PPE-DE). - (EL) Monsieur le Président, nous sommes en train de parler de compétitivité, mais la compétitivité est directement liée aux taux de change. Nous avons laissé l’euro devenir excessivement cher par rapport au dollar. Il est passé de 0,84 à 1,30, nuisant ainsi gravement à notre compétitivité.
La Banque centrale a pour ainsi dire sacrifié la compétitivité, où nous sommes à la traîne, afin de renforcer la stabilité, où nous sommes en bonne position. En d’autres termes, nous avons protégé notre point fort et exposé notre point faible. La cherté de l’euro a donc aggravé la récession. La récession a dissuadé les entreprises de prendre des risques d’investissement et d’innover. Autrement dit, quel est l’intérêt de la stratégie de Lisbonne? Regardez ce que font les Américains, les Russes, les Chinois et les Indiens. Alors que tous nos concurrents se concentrent sur la compétitivité et la croissance, nous nous concentrons sur les dépenses et la dette. Ils parviennent tous à de meilleurs rendements que nous, alors que nous pataugeons dans la récession chronique. Peut-être devrions-nous commencer à mettre en question notre policy mix économique? Tant que nous garderons le policy mix actuel, la stratégie de Lisbonne et le pacte de stabilité seront de plus en plus incompatibles. Gardez la stratégie de Lisbonne, mais assurez-vous que la politique monétaire appliquée par la Banque centrale apporte aussi sa pierre à l’édifice. Gardez le pacte de stabilité, à condition de placer l’accent sur la limitation des dépenses, et pas sur l’augmentation des recettes.
La Banque centrale européenne doit donner du mou à la politique monétaire, de sorte que les États membres puissent renforcer leur politique en matière de finances publiques, et notamment du côté des dépenses. Alors, quoi que la demande active perde en dépenses publiques, elle gagnera en exportations et nous éviterons des hausses de taxes. Voilà un policy mix qui combine prudence et croissance, mais, si nous voulons y parvenir, la Banque centrale doit coopérer. Bien sûr, la prudence est de mise, mais la prudence est une chose et l’inflexibilité en est une autre. Tant que nous confondrons prudence et inflexibilité, nous n’aurons ni prudence, ni croissance, ni compétitivité.
Bersani (PSE). - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je vais parler du rapport Goebbels et je voudrais féliciter notre collègue pour son excellente approche du sujet, axée sur l’équilibre à trouver entre la nécessité manifeste de revitaliser la politique économique et de croissance en Europe, d’une part, et l’objectif de la stabilité et les conditions pour y parvenir, d’autre part. Cela étant, au fil de ce débat, cet équilibre s’est perdu et ne peut être restauré que si nous nous comportons de façon raisonnable, comme l’a recommandé tout à l’heure Mme Lulling.
Il n’est pas raisonnable d’approuver un rapport qui n’affronte pas la nécessité de mieux coordonner les politiques économiques des États membres, pas plus que nous ne pouvons accepter qu’une déclaration de ce genre va à l’encontre de l’autonomie des autorités monétaires. Il n’est pas raisonnable d’approuver un rapport qui ne fait pas mention de la réforme du pacte de stabilité et de son lien avec les objectifs de Lisbonne, à un moment où nous nous rapprochons visiblement d’un accord. Il n’est pas raisonnable de déclarer qu’une réduction générale de la charge fiscale est vitale pour la compétitivité, si nous observons les excellents résultats de pays à la charge fiscale tant élevée que faible.
Dans tous les cas, je me demande si le Parlement européen devrait vraiment recommander une réduction générale et générique des taxes, alors qu’aucun État membre ne considérerait une telle proposition comme crédible dans les circonstances actuelles. De même, personne ne déclarerait raisonnablement qu’une augmentation générale et générique du temps de travail serait viable ou efficace. Lier trop étroitement la libéralisation et l’amélioration des services avec leur privatisation risque uniquement d’accroître la résistance à tout processus visant à libéraliser le marché.
Pour conclure, je crois que ce document renferme quelques conseils non négligeables et représente un effort honorable, mais, sur certains points, l’équilibre doit être restauré, en laissant de côté les revendications d’ordre idéologique et en apportant ainsi une contribution utile au débat sur l’économie qui se tient actuellement dans toute l’Europe.
Mann, Thomas (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, les États membres se sont engagés à avoir des budgets proches de l’équilibre ou excédentaires. Cet engagement a été pris dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance et des pays tels que l’Allemagne ne l’ont pas respecté en enregistrant des déficits. Bien qu’ils avancent l’excuse de problèmes cycliques, ils n’ont en fait pas entrepris les réformes structurelles nécessaires.
L’accord obtenu en 1997 dans l’intérêt de l’Europe par le ministre allemand des finances à l’époque, Theo Waigel, était une garantie, qui se voulait sérieuse, de prix stables, de discipline budgétaire et de capacité à réagir aux changements structurels, tels que la nécessité de financer une société au profil d’âge sans cesse croissant. Il ne s’agissait pas de politique néolibérale de gauche, c’était aussi dans l’intérêt de la main-d’œuvre.
La présidence luxembourgeoise a annoncé une modification du pacte, et non une partie de plaisir. Berlin veut abolir la procédure concernant les déficits excessifs, tandis que les plus petits pays de la zone euro insistent, à juste titre, sur le fait que ce pacte doit être observé à la lettre. Ils ont fait leur boulot.
M. Juncker a informé la commission des affaires économiques et monétaires qu’il n’était pas question de modifier le seuil de 3% ni la procédure des déficits excessifs. Je suis moi aussi favorable à ce que la Commission conserve ses prérogatives dans ce domaine, qui vont de l’envoi de lettres de mise en demeure à l’imposition d’amendes. Vous, malheureusement, vous avez annoncé une «interprétation intelligente» du pacte. Cela ne veut-il pas dire l’assouplir?
Vous avez déclaré, à raison, que la Grèce aurait à rendre des comptes si elle soumettait encore des données falsifiées. Corrigez-moi je vous prie si j’ai tort, mais, peu après, vous avez laissé entendre aux Allemands qu’ils pourraient considérer le coût de la reconstruction de l’Est comme une dette spéciale qui pourrait ne pas entrer dans le calcul. En entendant cela, d’autres pays sont venus dire que leurs propres investissements dans l’éducation, les installations militaires ou l’infrastructure devraient eux aussi être exclus. Lorsque vous entrez de la sorte dans le royaume de la comptabilité créative, vous pouvez envoyer le pacte aux oubliettes. Vous ne faites que jongler avec les chiffres et vous n’apportez aucune garantie aux citoyens de l’Europe.
Je soutiens l’excellent rapport de mon collègue, M. Karas; nous ne pouvons pas traiter la confiance en l’euro à la légère.
Rasmussen (PSE). - (DA) Monsieur le Président, c’est là un rapport constructif que nous présentent M. Goebbels et la commission. Je tiens également à remercier le commissaire Almunia pour sa contribution pleine de bon sens et pour son engagement à réformer le pacte de stabilité et de croissance, tel qu’il nous l’a présenté.
Ma contribution à cette Assemblée aujourd’hui portera sur deux des questions les plus importantes pour l’Europe. Les conservateurs et les libéraux de ce Parlement se concentrent sur les réformes structurelles - à propos desquelles je dois dire que nous sommes disposés à négocier -, non seulement au sein du Parlement européen, mais aussi dans chacun de nos États. Le groupe socialiste au Parlement européen, dont je suis le président, n’est pas opposé aux réformes. Nous voulons voir les réformes appropriées. J’ajouterai toutefois une chose: les problèmes majeurs de l’Europe n’incluent pas seulement la nécessité d’entreprendre des réformes structurelles; son deuxième plus gros problème est que la demande au sein de nos pays est trop timide.
Je voudrais lancer un appel sincère et urgent aux dirigeants des partis européens de centre-droit. D’après mon expérience personnelle en tant que Premier ministre et président de parti en Europe, je puis dire que nous n’obtiendrons pas le soutien des nos concitoyens en faveur des réformes si, en même temps, la demande et la croissance font défaut; ou, pour le dire autrement: il ne peut y avoir de réformes réussies sans croissance économique, ni de croissance économique durable sans réformes. Je lancerai donc un appel très urgent pour que la dimension européenne soit introduite. Qu’est-ce que la dimension européenne? Ce que la dimension européenne implique vraiment, c’est d’apprendre à faire les choses en même temps. Le marché intérieur souffre d’une demande insuffisante et nous pouvons y remédier en même temps si tous les ministres des finances, ainsi que M. Almunia, décident d’investir dans les objectifs de Lisbonne ces quatre prochaines années. Nous devrions ainsi obtenir la croissance supplémentaire dont nous avons besoin. C’est prouvé, et il serait fantastique que les partis de centre-droit ici aussi au Parlement puissent réaliser que nous devons investir et mettre en œuvre des réformes et que nous devons le faire en même temps.
Montoro Romero (PPE-DE). - (ES) Monsieur le Président, je me rallie à l’analyse exprimée ici ce matin et qui insiste sur la nécessité d’avoir plus de croissance et plus d’emplois en Europe.
Plus de croissance pour relever les défis qui nous sont lancés en tant qu’Européens: le défi de l’élargissement, le défi de créer des emplois pour nos femmes et nos jeunes. Plus de croissance pour que l’Europe puisse jouer le rôle de premier plan qui lui revient dans l’économie mondiale, car, sinon, l’économie mondiale ne connaîtra pas de croissance équilibrée. Comme M. Rasmussen vient de le souligner, cela signifie que les consommateurs et les investisseurs européens ont besoin de plus de confiance, ils ont besoin de politiques de confiance, de politiques, en résumé, sur lesquelles baser leurs décisions en matière de consommation et d’investissement. À son tour, cette confiance nécessite des finances publiques saines et un budget à l’équilibre. Un budget à l’équilibre signifie moins de taxes pour les travailleurs et pour les petites et moyennes entreprises, moins de taxes afin d’être plus compétitifs au sein de l’économie mondiale globalisée.
Ce serait une grave erreur de rendre le pacte de stabilité plus flexible et, Monsieur Almunia, Monsieur le Commissaire, la couverture médiatique des débats au Conseil Écofin n’inspire pas confiance. La confrontation entre les gouvernements européens quant à la promotion de la flexibilité du pacte de stabilité transmet un message négatif en termes de confiance des marchés. De même qu’un pacte de stabilité ferme, nous avons besoin de réformes structurelles. Nous avons besoin d’une économie plus flexible, pas d’une économie qui, en dernière analyse, profitera à quelques-uns, mais d’une économie équilibrée qui soutienne notre croissance sur la base de la flexibilité et de la compétitivité.
Langen (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, M. Rasmussen a déclaré que les réformes n’étaient pas possibles sans croissance économique. L’inverse est vrai aussi: la croissance économique en Europe n’est pas possible sans réformes. Particulièrement en Allemagne et en France, qui sont d’importants États avec un taux d’activité gouvernementale excessivement élevé, des taxes élevées et des systèmes sociaux trop complexes, les réformes sont une condition préalable à la croissance économique.
Nous discutons aujourd’hui des rapports Goebbels et Karas, qui font apparaître les difficultés face auxquelles nous nous trouvons, avec une politique monétaire commune combinée à des politiques budgétaires et fiscales décentralisées. Le pacte de stabilité et de croissance a été créé en tant que mécanisme de lien et que condition préalable. L’intention politique de réformer le pacte de stabilité et de croissance ébranlera les fondements mêmes du traité de Maastricht et de l’union monétaire européenne. Les règles de politique budgétaire comptent parmi les pierres angulaires de l’Union économique et monétaire. Les citoyens d’Europe se sont vu promettre que les emprunts publics seraient réduits, et cette promesse, juste six ans après, est reniée. Ces règles ont pour objectif de maintenir la crédibilité et la confiance quel que soit le gouvernement au pouvoir, et ce à n’importe quel moment. Il y a cependant un grave défaut de conception dans le pacte de stabilité et de croissance, un défaut dont vous, Monsieur le Commissaire, avez sans cesse évité de parler.
En ce qui concerne la procédure de surveillance, la Commission a trop peu de pouvoirs et de responsabilités. Les coupables portent un jugement sur eux-mêmes, ce qui n’augure rien de bon. Si le Conseil Écofin ne respecte pas les règles lui-même, la Commission est impuissante. Si la volonté d’appliquer la discipline budgétaire n’existe pas, les réformes ne seront d’aucune utilité non plus. Il ne s’agit pas seulement de règles, mais aussi de volonté politique. La Commission souhaite introduire de nouvelles règles pour les périodes économiquement favorables. C’est sans doute justifié, mais c’est naïf. Si les moyens de pression existants ne fonctionnent pas, comment peut-on espérer que cela fonctionne sur une base volontaire en situation économique favorable?
Les sociaux-démocrates et les communistes n’ont pas compris les changements qu’a apportés l’euro. Avant l’euro, le marché punissait les États fortement endettés de façon ouverte et très compréhensible, par le biais de taux d’intérêt élevés pour les emprunts publics, de taux d’inflation élevés et de la dévaluation. Pas plus tard qu’en 1992, les différences étaient de six points de pourcentage.
(Tapage)
Écoutez-moi, s’il vous plaît! Vous savez que j’ai raison. Six points de pourcentage! Cette différence n’existe plus. Les forces du marché obligeant les États à adhérer à la discipline financière n’existent plus. À moins que la BCE ne s’attaque à ce problème au moyen d’un système d’évaluation différenciée pour les emprunts d’État, l’euro ne restera pas stable à long terme.
Almunia, membre de la Commission. - (ES) Monsieur le Président, je tiens à remercier tous les honorables députés qui se sont exprimés pour leur contribution à ce débat, que j’ai trouvé très intéressant.
Je voudrais conclure en réitérant l’analyse de la Commission. À plusieurs moments de ce débat, des avis ont été attribués à la Commission que ni moi ni la Commission ne partageons.
La Commission et moi-même pensons que le principal défi en termes de renforcement de la croissance au sein de l’Union européenne et de la zone euro est d’accroître le potentiel de croissance. Pour ce faire, des réformes telles que celles proposées par la Commission dans sa communication sur la révision et la revitalisation de la stratégie de Lisbonne sont nécessaires.
Si nous n’augmentons pas le potentiel de croissance, la durabilité à moyen et long terme de notre économie et de notre modèle social ne sera pas possible et la stabilité macroéconomique et budgétaire à court terme sera sérieusement mise en péril par le manque de croissance. Telle est donc notre analyse et, en partant de là, la politique macroéconomique, comme le souligne le rapport Kok - et je suis tout à fait d’accord sur ce point - doit soutenir une stratégie de réformes structurelles qui augmente le potentiel de croissance en vue de soutenir cette croissance et d’empêcher le manque de liquidités, de financement et de demande de mettre en péril notre capacité à tirer profit de toutes les possibilités de croissance auxquelles nous sommes parvenus grâce aux réformes.
La Commission estime que la réussite de la revitalisation de la stratégie de Lisbonne est une priorité et, à cette fin, nous avons proposé dix priorités et nous avons envisagé comment améliorer la capacité de chaque État membre à mettre en œuvre la stratégie de Lisbonne en fonction de sa situation particulière, de telle sorte que nous puissions atteindre les objectifs qui font l’unanimité au sein de tous ces États et dans toute l’Union européenne. Ces objectifs n’ont pas été réduits dans la communication de la Commission et ont été confirmés tels qu’ils avaient été définis il y a cinq ans.
En ce qui concerne le pacte de stabilité, Monsieur le Président, je voudrais apporter quelques clarifications. Je crois que nous devrions tâcher de comprendre ce qui est en train de se produire ces jours-ci, au moment où le Conseil, avec le soutien de la Commission grâce à l’excellente coopération avec la présidence luxembourgeoise, tente de parvenir à un accord afin d’améliorer la façon dont nous appliquons les mécanismes de discipline budgétaire dans la pratique et afin de garantir que les objectifs poursuivis par le Traité, qui définit la stabilité budgétaire comme l’une des conditions de l’Union économique et monétaire, deviennent une réalité plus positive et tangible que ce n’est le cas pour l’instant.
Que faisons-nous? Premièrement, nous réitérons notre engagement ferme et clair envers les valeurs de référence inscrites dans le Traité. Les 3% sont inscrits dans le Traité et la Commission s’assurera que cette valeur de référence est respectée. Je voudrais préciser une fois encore, et je continuerai à le faire chaque fois que ce sera nécessaire, que ni la proposition de la Commission ni la position qui fait actuellement l’unanimité des ministres de l’Écofin ne proposent d’exclure du calcul du déficit quelconque catégorie de dépenses. Ce à quoi nous réfléchissons, conformément à l’article 104 du Traité, c’est aux facteurs importants qui devraient entrer en ligne de compte lorsque l’on analyse le pourquoi du déficit excessif et à ce qu’il conviendrait de faire pour restaurer l’équilibre et la durabilité des finances publiques, et ramener le niveau de déficit sous la valeur de référence.
Il est possible de faire la distinction, comme nous sommes précisément en train de le faire dans ce débat, entre n’exclure aucune catégorie de dépenses et, en même temps, tenir compte de facteurs économiques, allant de la composition des dépenses publiques à la situation du cycle, en passant par les réformes structurelles en cours, afin de déterminer comment la partie préventive du pacte est appliquée, où en sont les finances publiques en termes d’équilibre à moyen et long terme ou, en termes de procédure des déficits excessifs, quelles recommandations sont véritablement efficaces pour qu’un pays en situation de déficit excessif puisse retrouver son équilibre budgétaire. À cette fin, il est extrêmement important, et c’est le deuxième élément-clé de notre discussion, d’empêcher une application du pacte qui entraînerait dans la pratique des politiques pro-cycliques, dans la partie tant préventive que corrective de la procédure concernant les déficits excessifs.
Une des raisons les plus évidentes pour lesquelles certains pays ont enfreint la règle des 3% de déficit est que, lorsqu’ils se trouvaient aux points positifs de leur cycle économique, ils n’ont pas appliqué des politiques pro-cycliques, ils n’ont pas suffisamment consolidé leurs finances publiques. Il existe des instruments dans le Traité, tels que les alertes précoces, qui sont davantage encore renforcés dans la Constitution et directement attribués à la Commission, qui doit les utiliser plus efficacement. Qui plus est, chaque État membre doit définir des règles nationales qui viennent s’ajouter à la pression par les pairs exercée sur ceux qui, à l’échelon national, prennent des décisions sur la composition des recettes et des dépenses budgétaires et, partant, sur le déficit budgétaire de chaque État membre. Ces décisions, je vous le rappelle, restent une compétence nationale même si, comme l’a déclaré Mme Berès, le résultat combiné de ces décisions de politique budgétaire nationale présente un intérêt commun, puisque nous sommes dans une Union économique et monétaire.
En ce qui concerne la procédure des déficits excessifs, et c’est le point le plus difficile de notre débat, nous discutons de comment cette procédure devrait être lancée. Je répéterai notre position: aucune dépense ne sera exclue du calcul du niveau de déficit. Mais si vous relisez l’article 104 du Traité, vous verrez que, lorsque la Commission européenne informe le Conseil qu’un certain pays est, selon elle, en situation de déficit excessif, le Conseil est pleinement habilité, après une évaluation globale – article 104, paragraphe 6, du Traité -, à décider «s’il y a ou non un déficit excessif».
Nous essayons de garantir que les critères utilisés par la Commission lorsqu’elle informe le Conseil qu’un pays est en situation de déficit excessif coïncident avec les critères que le Conseil utilise alors, afin d’empêcher d’autres contradictions telles que celles qui se sont produites par le passé. De telle sorte que, tout en respectant les fonctions et compétences de la Commission - et la Commission n’est disposée à renoncer à aucune des compétences qui lui sont attribuées par le Traité - ainsi que celles du Conseil - qui n’est pas non plus disposé à renoncer à aucune des compétences qui lui sont attribuées par le Traité - dans le cadre de cette relation, de cette coopération, il n’y ait pas de contradiction qui paralyse la procédure, débouchant sur des conflits tels que ceux qui se sont présentés il y a tout juste un peu plus d’un an.
La gouvernance est très importante. Il est essentiel qu’il existe des règles nationales pour compléter les efforts d’appropriation des États membre en rapport avec les règles communes de discipline budgétaire. Il est essentiel que nous disposions de statistiques claires, fiables et à jour, telles que celles que nous avons vues récemment. Il est essentiel que les deux institutions, la Commission et le Conseil, coopèrent et il est extrêmement important qu’il y ait un soutien et un débat au Parlement, tel que celui d’aujourd’hui, et il ne fait pas de doute qu’il y en aura d’autres à l’avenir.
Il est essentiel que nous parvenions à un accord. Vous avez mentionné, et je partage cette crainte, la crédibilité de l’Union économique et monétaire et, en particulier, la crédibilité de notre monnaie unique sur les marchés. Les marchés ne comprendront pas que le Conseil européen de mars ne parvienne pas à un accord et chacun de nous, en fonction de nos responsabilités respectives, doit consentir le plus grand effort possible pour garantir que cet accord soit conclu et publié le 23 mars dans les conclusions du Conseil européen. Pour sa part, la Commission ne reculera devant aucun effort dans ce sens.
Je terminerai en reconnaissant l’excellente coopération dont fait preuve la présidence du Conseil, qui s’est fermement engagée à parvenir à cette réussite.
Le Président. - La discussion commune est close.
Le vote aura lieu aujourd’hui à 12 heures.
PRÉSIDENCE DE M. VIDAL-QUADRAS ROCA Vice-président