Index 
Compte rendu in extenso des débats
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Mercredi 11 mai 2005 - Strasbourg Edition JO
1. Ouverture de la séance
 2. Composition du Parlement: voir procès-verbal
 3. Banque mondiale
 4. Situation au Kirghizstan et en Asie centrale
 5. Heure des votes
 6. Denrées alimentaires destinées à une alimentation particulière
 7. Nomination d’un membre de la Banque centrale européenne
 8. Régime de contingentement pour la production de fécule de pomme de terre
 9. Reconnaissance des qualifications professionnelles
 10. Simplification de l’organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes
 11. Aménagement du temps de travail
 12. Séance solennelle
 13. Explications de vote
 14. Corrections de vote: cf. procès-verbal
 15. Approbation du procès-verbal de la séance précédente: cf. procès-verbal
 16. Futur de l’Europe soixante ans après la seconde guerre mondiale
 17. Heure des questions (Conseil)
 18. Exercice 2006
 19. État prévisionnel du Parlement européen pour 2006
 20. Service européen d’action extérieure
 21. Evaluation du Cycle de Doha suite à l’accord de l’OMC du 1er août 2004
 22. Ordre du jour de la prochaine séance: cf. procès-verbal
 23. Levée de la séance


  

PRÉSIDENCE DE M. FRIEDRICH
Vice-président

 
1. Ouverture de la séance
  

(La séance est ouverte à 9h05)

 

2. Composition du Parlement: voir procès-verbal

3. Banque mondiale
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  Le Président. - L’ordre du jour appelle les déclarations du Conseil et de la Commission sur la Banque mondiale.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Monsieur le Président, je peux effectivement, au titre de cette déclaration du Conseil au sujet de la Banque mondiale, vous confirmer que la Banque mondiale joue un rôle très significatif sur le plan global dans le domaine du financement du développement. Il est clair que la gestion à la fois politique et administrative de la Banque mondiale est, de ce fait, un sujet d’une très grande importance. Toutefois, en tant que représentant de la Présidence du Conseil de l’Union, je ne suis, hélas, pas en mesure de prendre position au nom du Conseil, ni de faire rapport des travaux menés par le Conseil sur ce sujet.

En effet, l’Union en tant que telle - et à ce sujet aussi, je dirai hélas! - ne joue aucun rôle dans la définition de la politique et dans le fonctionnement de la Banque mondiale. Il appartient donc aux États membres de l’Union qui sont également membres des organes de la Banque mondiale de définir leur position vis-à-vis de la Banque. Le Conseil n’a, de ce fait, pris aucune position sur les matières en question car il n’a aucune compétence pour le faire. Aucune instance du Conseil n’a discuté d’une stratégie pour la Banque mondiale, ni de la coordination d’une éventuelle position commune européenne à cet égard, ni des procédures décisionnelles qui existent au sein de cette institution.

Je peux par ailleurs ajouter que les États membres s’emploient à coordonner leur position pour avoir plus de poids au sein des institutions internationales, y compris des institutions financières internationales telles que la Banque mondiale, un exercice qui n’implique toutefois pas le Conseil en tant qu’institution puisque, je le répète, il n’existe pas de compétence communautaire dans ce domaine.

Il est vrai aussi que M. Wolfowitz, qui a été proposé pour le poste de président de la Banque mondiale, est venu à Bruxelles où il a rencontré le président du Conseil Ecofin, M. Junker, et les représentants des autres gouverneurs européens de la Banque. Lors de cette réunion, d’un caractère totalement informel, la stratégie future de la Banque mondiale en rapport avec le financement du développement a effectivement été évoquée avec le président proposé par le gouvernement américain, ce qui est d’ailleurs conforme aux usages.

Je ne peux donc que regretter que le Conseil n’ait pas de compétence en cette matière. Peut-être faudra-t-il un jour entamer une réflexion sur une meilleure coordination des États membres de l’Union européenne au sein de ces institutions internationales où ils représentent effectivement, par leur poids collectif, un plus grand nombre, même comparés aux États-Unis.

 
  
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  Joaquín Almunia, membre de la Commission. - (ES) Monsieur le Président, en tant que commissaire en charge des relations avec les institutions financières internationales, je suis ravi de l’opportunité qui m’est donnée d’expliquer au Parlement ce que la Commission pense des relations de notre institution avec la Banque mondiale.

La Banque mondiale et l’Union européenne constituent les deux principaux acteurs mondiaux dans la lutte contre la pauvreté et dans le financement de l’aide au développement.

Ce Parlement sait bien que l’Union consacre près de la moitié de l’aide publique totale aux pays en développement et que, de surcroît, dans la majorité des cas, elle est le principal partenaire commercial de ces pays, ce qui illustre l’accent mis sur la solidarité dans le cadre de notre politique internationale.

La politique de développement de la Communauté a pour objectif premier de réduire et, en définitive, d’éradiquer la pauvreté. Pour ce faire, il faut soutenir le développement économique, social et environnemental durable, promouvoir l’intégration progressive des pays en développement au sein de l’économique mondiale et combattre l’inégalité.

Les honorables députés savent que l’Union s’est fermement engagée à contribuer à la réalisation des objectifs du millénaire, par le biais de l’augmentation et de l’optimisation du financement de l’aide au développement, de l’amélioration de la cohérence entre les politiques de développement et, surtout, d’une attention accrue à l’égard de l’Afrique.

En rapport avec chacune de ces questions, sur proposition de mon collègue, M. Michel, la Commission a récemment proposé des mesures spécifiques, dont Louis Michel a eu - je l’espère - l’occasion de débattre au sein de ce Parlement.

Je voudrais commenter brièvement les deux premières questions: les niveaux de financement et la nécessité de renforcer la cohérence entre nos politiques de développement.

S’agissant du financement, l’Union a fait part, à l’occasion du sommet de Monterrey, de son engagement à accroître l’aide officielle au développement, qui passerait ainsi du niveau de 2002, soit 0,33% du PIB, à 0,39% en 2006, en guise de premier pas vers l’objectif de 0,7% à l’horizon 2015.

Le mois dernier, la Commission a proposé deux objectifs supplémentaires et étroitement liés pour 2010: un objectif intermédiaire, pour l’ensemble de l’Union, de 0,56% du PIB pour l’aide au développement, ainsi qu’un objectif individuel à chaque État membre pour l’aide officielle au développement, qui se monterait à un minimum de 0,51% pour les États membres qui appartenaient à l’Union avant l’élargissement, et à 0,17% en 2010 pour les nouveaux États membres.

Cela étant, quelle que soit l’importance de réaliser cet effort, il n’est pas suffisant. L’aide mise à part, les politiques des pays développés ont une influence considérable sur la capacité des pays en développement à atteindre les objectifs du millénaire et, à cet égard, la Commission souligne l’importance de la cohérence entre les politiques de développement et, pour la première fois, s’engage à cet égard dans ces communications.

Pour ce qui est des relations avec la Banque mondiale, je voudrais aborder deux questions: la coopération opérationnelle entre la Commission et la Banque, et la représentation de l’Union européenne à la direction de la Banque mondiale.

Les relations entre la Commission et la Banque mondiale ne datent pas d’hier. Nous avons le même agenda en termes de réduction de la pauvreté et, bien entendu, nous partageons les mêmes objectifs du millénaire. La Banque mondiale travaille pour réaliser ces objectifs, au moyen de ses principales lignes opérationnelles et par l’évaluation des progrès réalisés sur la voie de ces objectifs dans le cadre du rapport mondial de suivi.

La Commission et la Banque collaborent étroitement au niveau de la fourniture de l’aide, par le biais de l’accord de fonds fiduciaire, signé en 2001 et amendé en 2003. Dans le cadre de cette coopération, l’Union a participé à plusieurs fonds fiduciaires, pour une contribution totale de plus de 1,5 milliard d’euros depuis 2000.

Les ressources destinées à la lutte contre le SIDA et d’autres fonds spécifiques, tels que l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE), en sont d’autres exemples.

Qui plus est, tant la Commission que la Banque œuvrent de plus en plus sur la base des stratégies nationales de réduction de la pauvreté définies par les pays en développement eux-mêmes.

Outre ces objectifs mondiaux, la coopération avec la Banque mondiale se concentre également sur certaines régions géographiques prioritaires, à l’égard desquelles nous réalisons des analyses conjointes, nous organisons des dialogues communs sur les mesures politiques et nous conjuguons nos efforts pour coordonner la programmation financière en faveur des pays les plus proches des frontières de l’Union. Ainsi, nous ne parlons pas seulement de l’action coordonnée entre la Banque mondiale et les institutions européennes dans les pays qui appartiennent déjà à l’Union, mais aussi, bien entendu, dans les pays candidats et les pays couverts par la politique de voisinage, notamment les Balkans occidentaux, l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient, ainsi que dans les pays appartenant à la Communauté des États indépendants.

En ce qui concerne ces pays, la coopération de l’Union, par l’intermédiaire de la Commission et de la Banque mondiale, vise à garantir que les politiques appliquées sont complémentaires et contribuent à l’intégration de l’acquis communautaire. Elle met particulièrement en exergue le développement des institutions, l’environnement et ses infrastructures, la réforme économique et le développement du secteur privé.

À cet effet, la Commission et, parfois, la Banque européenne d’investissement, ont signé trois protocoles d’accord avec la Banque mondiale ces cinq dernières années.

Ces protocoles servent de cadre pratique à la coopération renforcée en termes de dialogue économique et d’assistance technique et financière. Ils couvrent la coordination de nos activités dans les domaines visés par la politique de voisinage de l’Union et, dans les prochains mois, le protocole d’accord s’étendra aux nouveaux États membres et aux pays candidats, l’objectif étant d’inclure les Balkans occidentaux.

Je voudrais pour terminer formuler quelques remarques au sujet de la représentation de l’Union au sein des organes de direction de la Banque mondiale.

La Banque rassemble actuellement 184 États, dont les 25 États membres de l’Union européenne. À la Banque, ces États membres de l’Union représentent 28% des voix, contre 16% pour les États-Unis.

Néanmoins, ces 28% ne reflètent pas en pratique le véritable poids de l’Union. La contribution de l’Union européenne aux financements alloués est même supérieure à 28%. À cet égard, l’exemple fourni par le dernier rapport d’enquête de l’Association internationale de développement est révélateur. À cette occasion, les contributions des bailleurs de fonds ont changé de façon spectaculaire, la part communautaire passant de 48 à 60%, alors que celle des États-Unis est tombée à 13,8%, soit le niveau le plus bas dans l’histoire de cette organisation.

Bien que ces chiffres illustrent la participation de l’Union tant au capital de la Banque qu’à son financement, nous ne tirons pas pleinement profit de ce poids en raison d’un manque d’uniformité dans la représentation de l’Union au sein des organes de direction de la Banque. C’est pourquoi, malgré que, numériquement parlant, les États membres de l’Union dominent le Conseil des gouverneurs de la Banque, ils ont globalement moins d’influence que les États-Unis.

Pour l’instant, la Commission ne participe que comme observateur aux réunions du comité de développement de la Banque, le principal organe décisionnel de cette institution. Cette situation est identique à celle du comité monétaire et financier international du Fonds monétaire international et ne correspond pas du tout à l’influence de l’Union européenne sur la coopération au développement, par rapport à son influence effective au sein de la Banque mondiale ou dans la vie du système monétaire international, grâce à notre monnaie unique, dans le cas du Fonds monétaire international.

La Commission insiste sur le fait que, si l’Union veut mettre un terme à cette disparité entre son influence et sa contribution et qu’elle tient à renforcer sa présence sur la scène internationale, elle doit parler d’une seule voix. Si elle parvient à présenter une position européenne unique, l’Union augmentera sa visibilité et son influence. À cet égard, force est de noter que la coordination de l’Union avec les organes de direction de la Banque a peu progressé.

Par exemple, depuis l’année dernière, les directeurs exécutifs de l’Union européenne à la Banque mondiale ont des réunions annuelles avec des membres de ce Parlement, avec la Commission et avec des représentants d’organisations non gouvernementales.

Les directeurs exécutifs de l’Union à la Banque mondiale ont convenu de se réunir une fois par semaine pour échanger leurs points de vue et un fonctionnaire de la Commission dépêché par notre délégation à Washington participe régulièrement à ces rencontres.

La Commission s’emploie à améliorer la coordination avec les directeurs exécutifs européens à Washington, mais l’objectif ultime doit être une représentation unifiée de l’Union au sein des organes de direction de la Banque mondiale. Avant de prendre cette décision, il faudra bien sûr en étudier avec soin les implications juridiques et budgétaires, mais cela ne doit pas nous empêcher de réfléchir sérieusement à la manière de progresser vers cet objectif.

Pour conclure, notre coopération avec la Banque mondiale est ancienne et intense, surtout au niveau du soutien accordé aux pays en développement. La Commission souhaite maintenir et renforcer ces excellentes relations de travail et améliorer la coordination, tant avec la Banque mondiale au niveau opérationnel qu’entre les représentants des États membres dans les organes de direction de la Banque. De cette manière, l’Union s’exprimerait d’une seule voix et aurait l’influence qu’elle mérite au sein de la Banque.

 
  
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  Anders Wijkman, au nom du groupe PPE-DE. - (SV) Monsieur le Président, je tiens à remercier MM. Schmit et Almunia pour leur contribution. Beaucoup de choses peuvent être dites à propos de la Banque mondiale, de sa gouvernance et, surtout, de la façon dont ses directeurs sont désignés. La récente élection de M. Wolfowitz démontre que les qualifications requises pour cette mission particulière jouent un rôle moins important que les mérites politiques. Elle révèle que la nomination des hauts fonctionnaires dans le système international laisse encore beaucoup à désirer.

Le temps de parole qui m’est imparti est toutefois limité et je me concentrerai donc sur les relations entre l’UE et la Banque mondiale. MM. Schmit et Almunia ont tous deux souligné la faiblesse actuelle qui résulte du manque d’unité de nos actions et de nos paroles. Pour ce qui est du Parlement, nous avons eu récemment une réunion avec les directeurs européens de la Banque mondiale et ceux-ci ont réclamé de commun accord, et avec insistance, une action plus unie de la part de l’UE dans les questions liées au développement, dans tous les domaines et en particulier au niveau du travail de la Banque mondiale. Il y a environ un mois, nous avons aussi eu une réunion avec Jeffrey Sachs au sein de la commission du développement, et il nous a demandé pourquoi, étant donné que l’UE dégageait au titre de l’aide un flux monétaire immensément plus important que le reste du monde, son action n’était pas davantage concertée. Ainsi, a-t-il dit, notre travail serait plus efficace et donnerait de meilleurs résultats. Nous aurions aussi une plus grande influence dans toutes les dimensions de ce contexte fondamental.

Le fait est que tant M. Schmit que M. Almunia ont souligné dans leur contribution que quelque chose faisait défaut pour l’instant. Comment sommes-nous censés agir de façon plus concertée et plus unie en matière de politique étrangère si nous restons aussi divisés au sein de ces institutions internationales? Ce qui est caractéristique aussi, c’est que, dans les pourparlers actuels sur la future composition du Conseil de sécurité, nous ne parlons pas du tout de la question de savoir si l’UE, en tant qu’organe uni, devrait ou non avoir une place au sein du Conseil de sécurité ni du fait que ce qui compte encore, en revanche, c’est que les États membres agissent sur une base nationale.

D’où je suis, je ne peux qu’insister pour que nous changions les choses à ce niveau. Nous devons coopérer de façon plus concertée et nous devons harmoniser nos efforts tout autrement, pour obtenir réellement les résultats que nous escomptons des actions menées par l’UE et être à même d’assumer une plus grande responsabilité sur la scène mondiale.

 
  
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  Poul Nyrup Rasmussen, au nom du groupe PSE. - (DA) Monsieur le Président, Messieurs Schmit et Almunia, permettez-moi de remercier ces deux derniers orateurs pour leur contribution de ce jour au sujet de la Banque mondiale. J’ai la conviction qu’ils se sont concentrés sur ce qui est fondamentalement nécessaire. Il ne fait aucun doute que, cinq années après la signature de la déclaration du millénaire en 2000 sur les besoins fondamentaux des pays en développement jusqu’en 2015 - j’étais moi-même l’un des signataires -, nous devons constater à présent que la situation n’a pas évolué dans la bonne direction. Au contraire, elle a malheureusement évolué dans la mauvaise direction dans la plupart des domaines.

Il ne fait non plus aucun doute que, ces 15 dernières années, 54 pays sont devenus encore plus pauvres et qu’un milliard de personnes vivent aujourd’hui avec moins de deux euros par jour. La Banque mondiale ne fonctionne pas aussi bien qu’elle le devrait. Plusieurs réformes d’envergure sont en cours, mais il nous faut encore nous attaquer à une série de problèmes. Je rejoins parfaitement M. Almunia lorsqu’il souligne que l’Europe peut parler d’une seule voix et je proposerais d’aborder quatre tâches que j’estime urgentes.

La première tâche prend sa source dans le besoin réel de l’Europe de trouver un moyen d’agir de façon concertée au sein de la Banque mondiale. Si nous y parvenons, nous aurons 27,98% des voix, contre 16,39% pour les États-Unis. Pour l’instant, le pays européen qui a le plus grand nombre de voix derrière les États-Unis est l’Allemagne, avec 4,49%. Je ne parle pas d’un nouveau conflit d’intérêts, je parle d’un bien meilleur équilibre au sein de la Banque mondiale ainsi que de la nécessité - et c’est la deuxième tâche - de réclamer une réforme des règles et conditions de prêt et d’insister pour qu’elle soit entreprise. Nous devons garantir la coordination entre la Banque mondiale, le Fonds monétaire international et l’aide des Nations unies aux pays en développement. Ainsi, nos efforts iront dans le même sens, au lieu de se recouper.

La troisième tâche a trait à la nécessité de réformer le consensus de Washington. Nous devons véritablement cesser d’exiger la même chose des pays pauvres que des pays riches et contribuer à construire des États sains et forts dans les pays en développement, pour qu’ils puissent avoir le droit de prendre part avec nous à la politique de développement. Monsieur le Président, notre quatrième et dernière tâche est de prendre vraiment au sérieux le rapport de l’OIT, ce que la Banque mondiale devrait faire également. «Des emplois convenables pour tous», voilà l’instrument essentiel pour éradiquer la pauvreté.

Je terminerai en disant, tout comme MM. Almunia et Schmit, combien j’estime important pour l’Europe désormais d’assumer aussi toute la responsabilité découlant du fait que nous sommes la plus grande organisation au monde en matière d’aide aux pays en développement. Nous devrions assumer la responsabilité de veiller à ce que la Banque mondiale agisse elle aussi en conséquence.

 
  
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  Johan Van Hecke, au nom du groupe ALDE. - (NL) Monsieur le Président, lorsque la Banque mondiale a été créée en 1944, les sept pays les plus riches, le G7, se taillaient, et de loin, la part du lion de la production mondiale totale de biens. De nos jours, ils en produisent à peine la moitié. Au moment de la création de la Banque mondiale, les États-Unis étaient le principal créancier. Aujourd’hui, ils sont le plus grand débiteur. Il y a soixante ans, les pays en développement étaient encore incapables de se défendre et aujourd’hui, leur influence dans les négociations multilatérales, dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce, par exemple, ne peut plus être ignorée.

Tout cela indique que la Banque mondiale a de toute urgence besoin de réformes radicales. Tant que les pays en développement n’auront rien à dire ou presque, dans sa politique et sa prise de décisions, la Banque mondiale restera perçue comme un instrument de contrôle aux mains des soi-disant riches, plutôt que comme une institution internationale axée sur la stabilité et le développement, dans un esprit de respect mutuel et de partenariat solide.

La Banque mondiale compte à présent un département des relations extérieures, qui emploie plus de 300 personnes et qui est décrit par la Banque elle-même comme l’un des plus importants départements destinés à rafraîchir son image. Néanmoins, une question reste sans réponse, celle de savoir s’il n’existe pas une autre façon de procéder, notamment par une meilleure implication des pays en développement dans ses opérations, en rendant enfin le processus décisionnel plus transparent et en contrôlant mieux les dépenses. Bref, je suis de ceux qui estiment que la Banque mondiale a grandement besoin de se ressourcer - non pas financièrement, mais intérieurement. En effet, au sein de cette organisation internationale, qui est considérée comme l’une des plus importantes et faisant le plus autorité, il semblerait que le temps se soit arrêté pendant plus de 50 ans en termes de structure, de fonctionnement et de mentalité.

 
  
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  Monica Frassoni, au nom du groupe des Verts/ALE. - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je remercie sincèrement les membres des autres groupes qui ont soutenu notre proposition de débattre de la question de la Banque mondiale, et ce même si je savais parfaitement, comme la majorité d’entre nous, que le Conseil ne pourrait en dire guère plus que ce que M. Schmit a déclaré ce matin. Nous devons cependant avoir conscience du fait qu’une situation insatisfaisante peut et doit être changée, a fortiori parce qu’il s’agit - à mon sens - d’un secteur où la volonté politique peut vraisemblablement nous aider.

Il n’est pas nécessaire d’invoquer les grands articles du Traité pour garantir que le Conseil et la Commission, ainsi que le Parlement - c’est absolument essentiel -, puissent œuvrer à l’amélioration de la question de la coordination européenne ou, du moins, l’inscrire à l’ordre du jour. Néanmoins, la coordination européenne ne devrait pas se limiter au travail parfaitement utile de la coopération technique et financière, mais doit aussi se concentrer sur les politiques de la Banque mondiale - ces mêmes politiques au sujet desquelles nous n’avons pas un mot à dire - relatives aux procédures de nomination et aux critères d’allocation de financement. Je crois que ce sont là les trois points sur lesquels l’action du Parlement européen pourrait être mieux ciblée: nous le pouvons si nous le voulons.

Je pense, Monsieur le Président en exercice - et vous pouvez me corriger si jamais vous décidez de réagir -, qu’il ne s’agit pas ici de compétence, mais bien de volonté politique: si le Conseil le veut, il peut agir, tout comme la Commission, et il en va de même pour le Parlement.

S’agissant de la procédure de nomination, nous savons très bien que des directives ont été adoptées entre 2000 et 2001 afin de la rendre plus transparente et acceptable. Ces directives ont été ignorées, ce qui, d’un point de vue politique, est loin d’être insignifiant: une fois encore, la question n’est pas de nature procédurale ou institutionnelle. Les États-Unis ont rejeté le premier candidat proposé par les Européens pour présider le Fonds monétaire international. Les pays d’Europe n’ont pas agi de la sorte lorsque M. Wolfowitz a été désigné candidat à la présidence de la Banque mondiale. Ils auraient pu le faire. Il a suffi de deux coups de téléphone pour convaincre deux Premiers ministres ou chefs de gouvernement européens et ainsi passer outre les directeurs exécutifs. Je crois que nous aurions parfaitement pu éviter cela si nous l’avions voulu.

Concernant la qualité des politiques de la Banque mondiale, rien ne nous garantit aujourd’hui que certaines percées limitées initiées par M. Wolfersohn se poursuivront. Je fais référence à la gouvernance et à la question de la corruption. J’estime que nous devrions tâcher de faire impression dans ce domaine aussi. Il existe toute une série de projets très controversés, tels que le grand barrage sur la rivière Nam Theun au Laos ou le projet de mine au Guatemala, qui se heurtent à une opposition de toutes parts et auxquels, pourtant, nos directeurs exécutifs ont donné le feu vert. Si ce Parlement et l’opinion publique avaient eu connaissance de ces questions, ils auraient plus que probablement agi différemment. Outre les affirmations d’impuissance, je voudrais également entendre quelques preuves de volonté d’agir.

 
  
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  Luisa Morgantini, au nom du groupe GUE/NGL. - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je remercie Mme Frassoni pour avoir clarifié de façon aussi directe les questions mises sur la table.

J’estime que la nomination de M. Wolfowitz à la tête de la Banque mondiale a mis une fois de plus en évidence le manque de démocratie et de transparence qui caractérise le processus de sélection et de nomination à la présidence de l’institution financière la plus importante au monde en matière de développement. Elle a également mis la commission du développement de ce Parlement sous les feux des projecteurs. Nous voudrions penser que le président de la Banque mondiale développe une approche positive dans le domaine de la résolution des conflits interculturels, alliée à un engagement incontestable en faveur du multilatéralisme, ainsi que, bien sûr, un engagement personnel pour garantir l’égalité sociale et la lutte contre la pauvreté.

Même sans vouloir juger cette personne, toutefois, qui est bien connue en tout cas comme l’un des plus fervents partisans de la doctrine de la guerre préventive, sans parler de l’exportation de la démocratie par les armes - on ne sait jamais, même saint Paul s’est converti sur la route de Damas -, il semblerait que la Banque mondiale n’ait guère évolué par rapport au cadre mis en place à Bretton Woods, il y a aujourd’hui plus de 60 ans. C’est aussi le cas du système de votes et de sièges, qui doit être revu, en partie pour répondre aux demandes des pays du Sud et des mouvements qui réclament depuis quelques années un Sud différent et une participation.

L’Union européenne a promis de garantir et de faciliter l’augmentation du niveau de copartenariat des pays en développement dans les processus décisionnels économiques mondiaux, en ce compris au sein des institutions financières internationales. Toutefois, mis à part les accords et engagements pris par l’UE - à Monterrey, Barcelone et Johannesburg -, il serait correct et logique de garantir la bonne gouvernance dans la gestion d’une institution qui exige un copartenariat à titre de condition préalable pour obtenir l’accès au financement.

Le non-respect des critères de démocratie et de transparence sape les fondements, la légitimité et la crédibilité des institutions internationales, dans un monde où nous ressentons le besoin d’institutions internationales fortes et légitimes qui promeuvent la participation: il suffit de lire l’ouvrage d’Aminata Toure, qui révèle son expérience tragique de la gestion de la Banque mondiale au Mali.

L’Union européenne peut jouer un rôle fondamental quant à la garantie de cette légitimité; c’est vrai, l’Union européenne doit précisément jouer ce rôle, mais pour ce faire, elle doit parler d’une seule voix: une meilleure coordination entre les directeurs européens doit se développer, étant donné que l’Europe détient 30% des voix à la direction de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international.

L’Union européenne est - faut-il le répéter - le principal bailleur de fonds du monde et pourtant, elle oublie souvent de compléter ses dons par une action politique efficace. Les députés européens peuvent jouer un rôle important. Ils l’ont d’ailleurs montré lors d’une réunion à New York. Des réponses claires s’imposent: la réforme démocratique des processus doit toutefois également viser à renverser l’asymétrie entre les économies du Nord et du Sud.

Je pense que nous devons enclencher le développement. En revanche, les politiques de la Banque mondiale ont souvent eu des effets dévastateurs sur les populations. Cette constatation vaut notamment pour la privatisation et les besoins fondamentaux, puisqu’il semblerait futile, comme l’a dit M. Watson, que les marchés des pays en développement débordent de produits que les habitants ne peuvent pas acheter parce qu’ils n’ont pas travail ou pas d’argent à leur consacrer.

 
  
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  John Whittaker, au nom du groupe IND/DEM. - (EN) Monsieur le Président, dans l’Union européenne, nous sommes très forts pour le prêchi-prêcha sur la nécessité de la réduction de la pauvreté dans les pays pauvres. Mais quelles que soient les apparences, ce n’est pas le sujet de la discussion d’aujourd’hui. Comme l’a clairement déclaré M. Almunia, c’est une question d’influence.

Je ne ferai pas de commentaires sur le caractère judicieux de la nomination de M. Wolfowitz à la tête de la Banque mondiale, mais l’hostilité initiale de l’Union européenne à son endroit s’est adoucie. L’Union européenne a besoin d’un soutien à la nomination de Pascal Lamy à la tête de l’Organisation mondiale du commerce ainsi que de son candidat (peut-être Mme Amos?) à la tête du Programme des Nations unies pour le développement. D’où le commentaire d’«Action Aid» selon lequel le soutien de l’Union européenne à M. Wolfowitz est un pur «bricolage», et des remarques similaires de la part d’autres ONG.

Sans vouloir diminuer la valeur que représente, pour les nations pauvres, l’aide de la Banque mondiale et de l’Union européenne, des conditions équitables de commerce auraient pour ces pays une valeur bien supérieure à celle de n’importe quel montant d’aide ou allègement de la dette. C’est le commerce, plutôt que les coups de main ponctuels, qui permettent aux nations pauvres de s’aider elles-mêmes, comme l’affirmaient les Indonésiens après le tsunami.

Malheureusement, l’Union européenne semble exceller dans la création de pauvreté en poursuivant son propre agenda: par exemple, verser de l’argent comptant à la Mauritanie, à l’Angola et au Mozambique en échange de leur droit de pêcher en dehors de leurs eaux territoriales, et appauvrir ainsi leurs pêcheurs; ou bien des accords de partenariat économique au titre desquels l’Union européenne tente d’acheter le consentement des nations pauvres à ses politiques protectionnistes.

Il ne fait aucun doute que cette rhétorique se poursuivra. La réalité, c’est que les actions de l’Union européenne est mue davantage par ses propres intérêts que par la philanthropie, et ses propres intérêts sont servis au mieux par la nomination aux postes clés de personnalités de l’Union européenne.

 
  
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  Hans-Peter Martin (NI). - (DE) Monsieur le Président, si vous me le permettez, je consacrerai le peu de temps dont je dispose pour faire une suggestion.

Le 18 mai, la Commission se penchera sur l’initiative européenne pour la transparence. Une large palette d’idées a été présentée, l’une d’entre elles étant de revoir la conception des sites web de l’UE. Ne serait-il pas possible que le Conseil et la Commission, ainsi que, bien sûr, le Parlement, décident très concrètement de lancer un site web amélioré expliquant clairement ce que la Banque mondiale fait réellement et les progrès que nous, Européens, avons réalisés jusqu’ici au sein de cette institution, et qui présente également nos représentants au sein de la Banque, les projets spécifiques en question et les opportunités qui nous sont offertes de nous faire entendre?

Pourquoi dis-je tout ceci? Ayant suivi le débat à l’écran, je suis obligé de parvenir à la conclusion regrettable que presque tout ce qui a été dit l’a déjà été il y a 20 ans. À mon avis, il ne sera possible de réaliser les réformes nécessaires - et la majorité des députés sont d’avis que la Banque mondiale en a plus que jamais besoin - que si des procédures transparentes sont utilisées pour assurer la publicité des dossiers.

 
  
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  Othmar Karas (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, les propos qui ont été tenus au cours de ce débat démontrent une fois encore très clairement que nous sommes un donateur majeur au niveau mondial, mais pas encore un grand acteur en termes politiques. Il ne suffit pas d’expliquer simplement pourquoi il en est ainsi et de le déplorer. Nous sommes appelés à réagir et nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour que cette réaction se produise sans délai, afin de combler le fossé entre ce que nous sommes et ce que nous voudrions être. Sans quoi nous serons incapables d’honorer nos engagements, tant au sein de l’UE qu’en dehors.

Le rapport du Conseil et le rapport de la Commission n’étaient vraiment ni l’un ni l’autre des rapports sur la Banque centrale, mais bien des analyses fouillées de nos lacunes. Les deux rapports soulignent clairement que le problème n’est pas à trouver au niveau de la Banque mondiale, mais bien chez nous. Comme l’a dit le président en exercice du Conseil, notre problème, c’est que ce sont les États membres qui sont compétents en la matière et non le Conseil, même si l’on ne pourrait nous reprocher de penser que cela revient au même. En leur qualité de membres du Conseil, les États membres devraient faire tout leur possible pour garantir que le Conseil prenne des mesures afin de combler ces lacunes.

Il a été proposé de débuter ce processus ultérieurement. Au lieu de reporter, nous devrions le commencer maintenant, sans délai. La Constitution nous donne l’opportunité de le faire, dans la mesure où elle confère un statut juridique à l’Union européenne. Nous devons mettre ce statut à profit pour répondre aux défauts de notre représentation extérieure.

À mon sens, les politiques que nous suivons avec le FMI, la Banque mondiale, l’OMC, l’ONU et la BEI sont liées entre elles. Tous nos représentants au sein de ces institutions doivent accorder leurs violons et être coordonnés par une seule personne si nous voulons nous acquitter de nos missions à travers le monde. L’influence croissante de la mondialisation sur nos actions renforce la nécessité d’un ordre mondial, d’un ordre socio-économique et d’un ordre de principes. Nous ne serons pas à même de jouer notre rôle adéquatement au sein de ces organisations si nous ne commençons pas par établir un ordre de ce genre au niveau de l’UE. C’est à nous d’agir, pas à la Banque mondiale.

 
  
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  Margrietus van den Berg (PSE). - (NL) Monsieur le Président, M. Wolfowitz a adopté par le passé une position assez unilatérale et nous l’avons considéré comme quelqu’un d’intransigeant. Il est désormais président de la Banque mondiale, une institution de développement multilatéral. En termes monétaires, il s’agit à l’évidence d’un remarquable exemple de blanchiment. Cette élection est aussi gênante pour l’Europe. Comme quelqu’un l’a dit il y a un moment, il existe de nouvelles procédures dans le cadre desquelles nous avons notre mot à dire, mais il n’a fallu aux États-Unis que quelques coups de téléphone pour le faire élire. Nous n’avions pas convenu à l’avance d’un candidat commun, contrairement à ce qui s’est passé avec M. Lami pour l’OMC. Dans le cas de la Banque mondiale, nous sommes arrivés en retard et nous étions divisés. Voilà l’erreur que nous avons commise, selon moi, et un rapport du Conseil et de la Commission a eu l’honnêteté de le reconnaître.

Inutile de dire qu’il ne s’agit pas seulement d’un candidat commun, mais aussi d’une politique commune. Tout le monde sait que, en ce qui concerne le consensus de Washington, les institutions internationales, multilatérales et financières adoptent des positions et des priorités qui correspondent rarement à la politique de développement et de lutte contre la pauvreté que nous, en Europe, voudrions adopter à l’échelon international. La question n’est pas nécessairement d’aller dans l’une ou l’autre direction. Ce qu’il nous faut, c’est un équilibre. Pour trouver cet équilibre et pouvoir placer les objectifs sociaux, la réduction de la pauvreté et les objectifs du millénaire au premier plan au sein de la Banque centrale, il faut que nous parlions d’une seule voix. Pour ce faire, une action conjointe s’impose. Je me rallie à ce qui a été dit il y a un instant: la nouvelle Constitution peut nous donner une plus grande envergure et, dans un certain sens, un devoir d’agir au sein de ces institutions sous la bannière européenne et de parler d’une seule voix.

Ce n’est pas rien: nous fournissons 60% des prêts à des conditions favorables et nous avons un pourcentage de voix bien plus élevé, mais nous sommes en même temps, à toutes fins utiles, absents. Nous ne tolérerions jamais pareille situation dans le domaine du commerce. Je crois que toute la question est là. Nous avons aussi besoin de cohérence. En Afrique, par exemple, la Banque mondiale a été impliquée dans l’initiative prioritaire sur l’éducation. La Commission ne souhaite pourtant participer d’aucune façon à cette initiative, parce que les documents de stratégie nationale pour cette région concernent les routes et les infrastructures, mais pas l’éducation. Nous ne sommes donc pas à la hauteur, alors que dans cette Assemblée, nous réclamons à corps et à cris une action cohérente, commune.

Le problème est donc des deux côtés. Le Conseil et la Commission ne pourraient-ils pas étudier une nouvelle fois, sur la base de la nouvelle Constitution, le lancement éventuel d’une initiative, du moins en termes politiques et économiques, au nom de la Banque mondiale? Nous devons également occuper une position plus forte en termes de coopération. La position actuelle est en effet pour le moins décourageante. Ni le Conseil ni la Commission ne sont disposés à l’occuper. Après tout, ils se sont montrés tous deux très convaincants et à la fois pessimistes. Mettons le cap sur l’avenir allegre.

 
  
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  Ignasi Guardans Cambó (ALDE). - (ES) Monsieur le Président, la Banque mondiale est à l’évidence un instrument efficace et pourrait l’être davantage encore, mais je ne pense pas que ce soit la nouvelle présidence qui pose problème. Je ne crains pas particulièrement que la nouvelle présidence de la Banque mondiale ne redirige les énergies, qui étaient jusqu’à présent orientées vers d’autres domaines, en vue d’optimiser le fonctionnement de la Banque mondiale.

Le problème vient de nous, de l’hypocrisie du discours européen, dans lequel nous passons notre temps à expliquer à nos concitoyens que l’Europe veut avoir une influence sur le monde, que nous voulons contribuer à la paix dans le monde. C’est aussi ce que les gouvernements disent à leurs propres électeurs, mais ensuite, ils ne remuent même pas le petit doigt pour traduire ces paroles et ces promesses en actions.

L’Union européenne en tant que telle n’a aucune influence au sein de la Banque mondiale. Nous n’avons pas besoin d’une nouvelle Constitution pour cela, c’est une question de volonté politique et de cohérence. Le commissaire Almunia l’a parfaitement expliqué. Nous avons 25 États membres qui ne se parlent pas à la Banque mondiale et nous nous devons de le condamner en cette enceinte. Il est très aisé de protester contre la nomination de M. Wolfowitz, et peut-être devrions-nous le faire, mais il devrait être encore plus facile pour nous de condamner l’incapacité de nos gouvernements à se coordonner en matière de politiques, de nominations et de critères d’allocation de financements.

 
  
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  Frithjof Schmidt (Verts/ALE). - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, le problème le plus urgent qui se pose à nous en ce qui concerne les politiques de la Banque mondiale, c’est la politique de cette dernière en matière d’ajustement structurel. La Banque mondiale soutient des programmes d’ajustement structurel depuis des dizaines d’années et, pourtant, ceux-ci n’ont souvent eu que des résultats médiocres, par exemple dans le cas de la privatisation des services.

La fourniture d’eau l’illustre bien, dans la mesure où, même si elle a été privatisée et que l’infrastructure a été mise en place, le prix de l’eau a grimpé si vite que les groupes les plus pauvres de la société n’en ont plus les moyens. Autre exemple: la politique commerciale, dès lors que soumettre l’octroi de prêts à une clause de libéralisation forcée et d’ouverture des marchés affaiblit la position de négociation des pays en développement lors des cycles de l’OMC. Tout ceci va clairement à l’encontre des objectifs de la politique de développement de l’UE, qui, notamment, donnent un rôle fondamental à l’approvisionnement en eau dans la lutte contre la pauvreté et renforcent la capacité de négociation des pays en développement lors des cycles de l’OMC. Voilà donc une ligne d’attaque essentielle à adopter pour changer les politiques de la Banque mondiale.

La réforme qui en est pour l’instant à sa phase initiale ne changera absolument rien. Ce que l’on appelle la nouvelle politique de sélection des prêts, censée être mise en place sous peu, constitue pour l’essentiel un aveu d’impuissance pour plus de trente années de politiques de la Banque mondiale. En bref, cela signifie que les pays qui ont participé aux programmes d’ajustement structurel de la Banque mondiale ces dernières années ou décennies sans parvenir à de bons résultats et sans avoir rien gagné recevront à présent des fonds pour venir à bout de leurs problèmes sociaux les plus urgents. Les pays qui n’ont pas participé correctement recevront moins de crédits. Cette distinction entre bons élèves et mauvais élèves est extrêmement discutable et, à mon sens, la Commission et le Conseil ont le devoir d’insister pour que, à tout le moins, ceci se fasse selon des critères clairs, transparents et faciles à comprendre. Je crois qu’ils ont également le devoir de prier instamment la Banque mondiale de changer radicalement sa stratégie de réduction de la pauvreté, dans le cadre de la réforme des Nations unies et des objectifs du Millénaire pour le développement.

 
  
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  Proinsias De Rossa (PSE). - (EN) Monsieur le Président, je dois dire que je suis choqué par la déclaration faite ici, aujourd’hui, par le Conseil, et selon laquelle pas un seul membre du Conseil n’a fait le moindre effort en vue d’obtenir une position commune concernant notre position à la Banque mondiale, ou même de faire usage du pouvoir dont nous disposons en matière financière et en termes de vote sur la Banque mondiale, et ce en dépit du fait que tous les chefs d’État ont récemment apposé solennellement leur signature au bas de la Constitution européenne, qui déclare que nous voulons mettre fin à la pauvreté dans le monde, et malgré le fait que tous les États membres ont approuvé les objectifs du Millénaire pour le développement.

Il existe encore des États qui rechignent à honorer leur engagement d’atteindre l’objectif d’une aide au développement égale à 0,7% du PIB, qui existe depuis des décennies. Mon propre État a solennellement déclaré l’an dernier à l’Assemblée générale des Nations unies qu’il atteindrait ces 0,7% du PIB à l’horizon 2010. Cette année, voici qu’il annonce qu’il n’atteindra pas ce chiffre, non pas parce que nous n’aurions pas l’argent, mais parce que le gouvernement entend dépenser cet argent pour gagner les prochaines élections!

Il est clair que les gouvernements des États membres de l’Union européenne sont plus intéressés par le commerce que par l’éradication de la pauvreté. Ils sont plus intéressés par une consolidation de leur position au sein de l’Organisation mondiale du commerce qu’ils ne le sont par la consolidation de leur position à la Banque mondiale dans le but de réaliser les objectifs de l’Union. Serait-ce trop demander à cette Assemblée que de cesser de se contenter de déclarations pour passer à la mise en place d’une commission ad hoc afin que nous puissions mettre au point une position commune pour l’Union européenne et la Banque mondiale, puis pousser ensuite le Conseil et la Commission à adopter la position du Parlement sur cette question?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Monsieur le Président, je tiens d’abord à remercier les honorables députés pour ce débat extrêmement intéressant ainsi que pour les messages très utiles qu’ils ont adressés à la direction du Conseil mais aussi de la Commission. Je distinguerai deux ou trois questions. Je commencerai par le poids de l’Union dans les institutions financières, et tout particulièrement au sein de la Banque mondiale. Permettez-moi de parler un instant au nom de la présidence et non pas en tant que représentant du Conseil.

Il est vrai que, si nous étions actionnaires dans une entreprise privée, nous gérerions très mal notre part de capital dans cette entreprise. Mais comme vous le savez, c’est un peu plus compliqué et nous ne sommes pas dans cette configuration. Nous sommes dans une autre configuration, de nature politique. Néanmoins, je dois dire que le message selon lequel l’Union européenne doit mieux coordonner ses positions au sein de ces organisations, et notamment au sein de la Banque mondiale, relève d’une nécessité absolue puisque, comme beaucoup d’entre vous l’ont dit, nous sommes bien en deçà de notre poids réel, de notre poids financier, mais aussi de notre poids politique.

À ce propos, je tiens à indiquer qu’il existe peut-être dans le traité un article qu’il faudrait lire à deux fois et éventuellement exploiter pour donner suite au débat que nous avons mené ce matin. Je veux parler de l’article 99 du traité - qui est d’ailleurs également repris dans le projet de Constitution - et qui prévoit que les États membres peuvent, sur la base d’une proposition, mieux coordonner leurs positions au sein des institutions financières et des conférences financières internationales. Je crois donc que la question de la représentation de l’Union dans les enceintes internationales - et tout particulièrement dans les enceintes financières internationales - reste posée. Je n’ai pas besoin de revenir sur les difficultés que cela comporte.

Deuxième question que vous avez soulevée et qui est un peu liée à la première, c’est la réforme des institutions financières internationales, et notamment de la Banque mondiale. Je crois que, sur ce point, le rôle de l’Union européenne est capital. Nous devons effectivement - et c’était aussi en partie le but de la rencontre informelle avec M. Wolfowitz - pousser le nouveau président de la Banque mondiale à poursuivre la réforme, non seulement du fonctionnement de la Banque mondiale, mais aussi de ses politiques. Je pense là aussi que le rôle de l’Union européenne peut être d’autant plus important que l’Union parle d’une seule voix. On en revient un peu à la question du poids de l’Union européenne dans les institutions internationales. Il est certain que, dans ces institutions, il faudra mieux tenir compte des nouveaux équilibres du monde, mieux intégrer un certain nombre de nouveaux acteurs internationaux, de nouvelles puissances économiques, sans oublier les pays en développement.

Le dernier point porte sur la politique d’aide au développement. Le commissaire a d’ailleurs donné sur ce point un certain nombre d’éléments d’information. L’Union européenne est le plus grand donateur; elle fournit plus de 50% de l’aide au développement. Je dois dire que nous nous sommes lancés dans l’examen de nouvelles formes de financement de l’aide au développement. Le dernier Conseil Ecofin a travaillé sur ces modes de financement. Vous connaissez tous l’idée qui a été émise de créer certaines taxes pour précisément respecter, voire augmenter, le taux d’aide au développement, et je peux vous dire que, lors de sa réunion informelle qui se tiendra les 13 et 14 mai à Luxembourg, l’Ecofin compte bien revenir sur ces modes de financement nouveaux de l’aide au développement en vue notamment d’assurer le respect des objectifs du sommet du millénaire qui va avoir lieu en septembre.

 
  
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  Joaquín Almunia, membre de la Commission. - (ES) Monsieur le Président, je voudrais commencer par me rallier à tous les discours qui ont fait référence à la nécessité d’une coordination plus étroite des États membres de l’Union européenne dans leurs activités, dans la prise de décisions, dans l’orientation des mesures politiques et dans la stratégie de la Banque mondiale.

Au moyen des instruments dont elle dispose, la Commission s’efforce d’influencer et de guider les politiques de la Banque mondiale dans le droit fil de nos objectifs en termes de politique de développement et d’aide officielle au développement. Dans mon premier discours, j’ai parlé des protocoles d’accord, des fonds fiduciaires, par l’intermédiaire desquels nous agissons, en combinant les ressources de la Banque mondiale et les ressources budgétaires de l’Union européenne dans toute une série d’activités et de régions du monde, partout où nous considérons que ces actions sont en phase avec les objectifs définis par l’Union européenne et avec nos priorités dans le domaine de l’aide au développement, ainsi qu’avec nos politiques de soutien au développement dans les pays les plus pauvres du monde.

Ensuite, je répéterai ce que j’ai dit dans mon discours initial et dont beaucoup d’entre vous se sont faits l’écho, à savoir la nécessité de progresser vers la création d’une seule voix pour l’Union européenne à la Banque mondiale et au sein d’autres institutions internationales.

Certains d’entre vous ont dit que l’entrée en vigueur de la Constitution ferait office de tremplin vers cet objectif, et il est vrai que l’entrée en vigueur de la Constitution, la personnalité unique de l’Union et l’élan politique représenté par la mise en œuvre de la Constitution doivent nous aider à progresser vers la réalisation de cet objectif. Mais il est vrai aussi, comme vient de le souligner le président en exercice du Conseil, qu’en vertu du Traité actuel, dont les dispositions sont actuellement en vigueur, l’Union devrait d’ores et déjà parler d’une seule voix au sein de nombreux organes, en ce compris à la Banque mondiale et au Fonds monétaire international, à tout le moins en ce qui concerne la zone euro.

Il est toutefois un autre élément pour nous aider. Je ne sais si cet élément correspond à la volonté de tous les États membres, mais je crois qu’il correspond à la volonté collective de l’Union, de cette Assemblée, de la Commission et du Conseil. L’Europe tient à devenir un acteur mondial, comme l’a dit M. Karas, mais certains pays qui vont devenir des acteurs mondiaux exigent que les organes de direction soient réformés quant à la façon dont les différents pays et régions du monde sont représentés au sein des institutions financières internationales et, surtout, à la Banque mondiale. Face à cette pression, l’Union européenne ne peut pas réagir en ordre dispersé, elle doit répondre à l’unisson, en empruntant cette voie unique.

Je voudrais faire un commentaire au sujet de la nomination du nouveau président de la Banque mondiale. Vous le savez, la Commission européenne ne participe d’aucune manière à cette procédure, mais M. Wolfowitz deviendra président de la Banque mondiale le 1er juin. À compter de cette date, nous voulons que la Banque mondiale continue de travailler aux aspects positifs qui ont caractérisé la présidence de M. James D. Wolfensohn ces dix dernières années. Et lors des deux occasions qui m’ont été données ces dernières semaines de discuter personnellement, en tant que membre de la Commission, avec M. Wolfowitz, voici ce que je lui ai dit: à partir du 1er juin, la Commission européenne et l’ensemble de l’Union veulent que la Banque mondiale poursuive dans la direction positive empruntée sous la présidence de M. Wolfensohn. Je peux vous dire également que, jusqu’ici, la réponse de M. Wolfowitz indique qu’il s’engage à poursuivre le travail sur ces aspects positifs. J’espère qu’après le 1er juin, nous constaterons que c’est bel et bien le cas.

 
  
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  Le Président. - Le débat est clos.

 

4. Situation au Kirghizstan et en Asie centrale
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  Le Président. - L’ordre du jour appelle les déclarations du Conseil et de la Commission concernant la situation au Kirghizstan et en Asie centrale.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés, je suis particulièrement heureux de l’occasion qui m’est offerte d’intervenir au nom du Conseil sur ces sujets importants concernant cette région essentielle qu’est l’Asie centrale. Cette région est importante pour l’Union européenne à de nombreux points de vue: géopolitique, géostratégique mais aussi économique.

Nonobstant un certain nombre d’améliorations récentes, la situation au Kirghizstan reste critique. La nouvelle dynamique politique est structurée selon des lignes d’allégeances personnelles et régionales et les partis politiques jouent un rôle purement nominal. L’élection présidentielle est prévue pour le 10 juillet et un second tour pourrait avoir lieu le 24 juillet. Les risques liés aux enjeux sécuritaires et la situation économique incertaine pourraient compliquer la campagne présidentielle. En effet, la campagne électorale pour l’élection présidentielle se transforme de plus en plus en compétition entre les deux candidats principaux de la scène politique du pays, à savoir M. Koulov et M. Akaïev.

De ce fait, la stabilité du pays dépend en grande partie d’un éventuel rapprochement entre ces deux leaders politiques. Un compromis entre eux pourrait inclure un engagement à respecter le résultat des élections, ce qui devrait être normal dans une démocratie, à condition que le candidat perdant puisse occuper le poste de Premier ministre. Toutefois, à l’heure actuelle, les contacts informels entre les deux camps n’ont pas encore débouché sur des résultats tangibles. À ce propos, le principal message de la communauté internationale, y compris de l’OSCE et de l’Union européenne, durant cette campagne présidentielle devrait mettre l’accent sur l’importance de réaliser des élections libres et impartiales.

Toutefois, la tenue d’élections démocratiques ne garantira pas automatiquement un processus de démocratisation pleinement abouti. Plusieurs questions politiques resteront à l’ordre du jour, notamment la réforme constitutionnelle, les élections parlementaires anticipées, l’indépendance des médias et le développement d’une vie politique basée sur des partis politiques organiquement développés.

La question de la réforme constitutionnelle a déjà été évoquée dans le débat électoral. Le parlement a constitué un conseil constitutionnel, qui devrait établir les principes de la réforme constitutionnelle à mettre en œuvre après les résultats des élections. Néanmoins, différents acteurs politiques affichent des positions tout à fait opposées en la matière. La conjoncture économique ne s’améliore pas de façon significative et l’ordre public reste précaire. Les saisies de terrain autour de Bichkek constituent des risques aigus de désordre. Les questions ethniques sont au centre de la discussion politique. En général, la situation des minorités ethniques reste une cause de préoccupation.

Tous les acteurs internationaux les plus importants, y compris la Russie, sont favorables au maintien de la stabilité et de la sécurité intérieure au Kirghizstan. Les nouveaux dirigeants du pays ont maintenu avec succès de bonnes relations avec tous leurs pays voisins, tout particulièrement avec le Kazakhstan et l’Ouzbékistan. Le travail de l’OSCE pour le Kirghizstan sera bientôt finalisé et le gouvernement kirghize devrait l’approuver dans les jours qui viennent. La Commission européenne a annoncé récemment son intention de consacrer 25 millions d’euros au Kirghizstan pour 2005.

Comme vous le savez, la situation générale en Asie centrale demeure préoccupante. Plusieurs facteurs créent une atmosphère d’incertitude autour des pays de cette région. Tout d’abord, les menaces les plus importantes pour la stabilité régionale de l’Asie centrale résident dans un manque de réformes économiques, dans la persistance des régimes autoritaires en place et dans la présence répandue de phénomènes de corruption, de crime organisé et de trafic de drogue. Nous avons parlé hier de la question de la drogue en Afghanistan. Or, ces pays se trouvent sur le chemin de la drogue.

Les droits politiques des populations se dégradent dans la majorité de ces pays. La coopération régionale n’a pas atteint un seuil suffisant en raison du manque de confiance et à défaut de volonté politique chez les acteurs étatiques de la région. L’appauvrissement et le manque de croissance des pays de l’Asie centrale ont exacerbé les tensions socio-économiques. La proximité géopolitique de l’Afghanistan et certains facteurs internes ont permis à l’extrémisme islamique de s’étendre et, comme je viens de le signaler, ont facilité le trafic de drogue. Les conflits potentiels au seuil des États de la région et entre eux peuvent être attisés par l’imbrication de minorités ethniques sur le territoire de ces pays.

Les questions spécifiques à soulever vis-à-vis de la situation dans certains pays de la région sont nombreuses. Je vais rapidement les passer en revue. Au Kazakhstan, les élections parlementaires qui ont eu lieu en septembre 2004 n’étaient pas à la hauteur des critères internationaux normalement acceptés. L’opposition, en dépit d’un soutien grandissant dans la population, a seulement obtenu un siège. L’actuel président est enclin à demander des élections présidentielles avant la fin de son mandat présidentiel en janvier 2006. La mainmise du gouvernement sur le processus législatif, l’opposition, les médias, la société civile et les systèmes financiers est préoccupante. La situation des droits de l’homme est en train de se dégrader.

En Ouzbékistan, l’opposition légale n’a pas pu participer aux élections parlementaires du 26 décembre 2004. Le programme de réforme du pays n’a pas progressé et la pauvreté s’est encore étendue. Il y a un risque réel dans ce pays que le fondamentalisme islamiste progresse de plus en plus au sein de la population.

Au Turkménistan, l’absence de la liberté d’expression et de débats démocratiques ainsi que l’impossibilité d’entretenir une opposition effective au gouvernement et l’inexistence de tout programme de réformes structurelles sont des facteurs majeurs de préoccupation.

Finalement, au Tadjikistan, la situation du pays se caractérise par deux problèmes principaux: les querelles endémiques entre provinces et une crise économique prolongée.

Nonobstant les problèmes et les difficultés de la région que je viens de détailler, l’Union européenne considère que les relations avec la région ont une importance capitale et l’Union européenne est prête à soutenir la transition de ces pays vers des économies de marché efficaces mais aussi vers des démocraties qui fonctionnent.

Le directeur général adjoint pour les relations extérieures de la Commission européenne a récemment visité quatre républiques d’Asie centrale. Le 12 mai, le comité conjoint UE-Turkménistan se tiendra à Ashkabad. En marge du comité conjoint, une réunion ad hoc aura lieu dans le but de faire avancer le dialogue sur la question des droits de l’homme. Une troïka de l’Union européenne rencontrera des représentants des cinq pays de la région à la fin du mois de juin à Tashkent. À Bruxelles, se tiendront respectivement le comité de coopération avec le Kirghizstan en juin et les conseils de coopération avec le Kazakhstan et le Kirghizstan en juillet.

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. OUZKÝ
Vice-président

 
  
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  Maat (PPE-DE). - (NL) Monsieur le Président, avant que le commissaire ne prenne la parole, je pense qu’il faudrait apporter quelques précisions, car j’ai entendu deux dates pour les élections présidentielles au Kirghizstan, à savoir le 10 et le 18 juin. Elles ne sont plus d’actualité à ma connaissance. Pour autant que je sache, les élections présidentielles se tiendront le 10 juillet. Je pense qu’il serait utile, avant le début du débat parlementaire, que le Conseil ou la Commission…

(Le président retire la parole à l’orateur)

 
  
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  Le Président. - Monsieur Maat, il ne s’agit pas d’une motion de procédure.

 
  
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  Almunia, membre de la Commission. - (ES) Monsieur le Président, c’est pour moi un honneur de participer à cette séance plénière afin d’évoquer avec vous la situation dans une région d’importance stratégique majeure: l’Asie centrale et, en particulier, la République kirghize.

Suite au renversement du président Akaïev, suite aux protestations massives du 24 mars en réponse aux violations des normes internationales et de l’OSCE au cours des élections législatives de février et mars, le haut représentant de l’Union pour la politique étrangère et de sécurité commune, M. Solana, et la commissaire en charge des relations extérieures, Mme Ferrero-Waldner, qui n’a malheureusement pu se joindre à nous, ont instamment prié la République du Kirghizstan de rechercher une méthode de réconciliation nationale fondée sur l’instauration d’un dialogue et d’un consensus permettant au processus de réforme politique de progresser.

La République du Kirghizstan se voit offrir une chance unique de mettre en place une véritable démocratie multipartite en Asie centrale et d’éliminer la corruption qui a tant contribué à cette crise. Cette chance est aux mains des dirigeants politiques de ce pays, qui doivent démontrer leur engagement sans réserve à l’égard d’une progression réelle dans le domaine des réformes politiques. Le meilleur moyen d’y parvenir, c’est de prendre des mesures afin de garantir la mise en place d’une démocratie multipartite, le respect des droits de l’homme et l’existence de l’État de droit, conformément aux engagements internationaux pris par le Kirghizstan.

Je voudrais souligner que la libéralisation politique, d’une part, et la préparation et la tenue d’élections libres, équitables et transparentes, d’autre part, doivent s’appliquer au futur scrutin présidentiel. Celui-ci devrait, selon les informations dont nous disposons, avoir lieu le 10 juillet. Ces élections seront étroitement surveillées par l’Union et par l’ensemble de la communauté internationale. Les références démocratiques de la République du Kirghizstan s’amélioreront si le gouvernement provisoire applique les recommandations formulées dans le rapport de mission final du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’OSCE, publié en mars de cette année.

L’Union prépare, sous l’égide de l’OSCE, par le truchement de son mécanisme de réaction rapide, une série de mesures d’assistance aux élections et aux réformes législatives dans le domaine électoral.

L’Union presse le Kirghizstan de créer un environnement dans lequel les médias et les journalistes nationaux puissent exercer leurs droits et leurs libertés, conformément aux engagements internationaux. J’estime que l’OSCE est en mesure de conseiller les autorités dans ce domaine.

Il importe de lutter plus efficacement contre la corruption dans tous les pays d’Asie centrale, celle-ci ayant été identifiée comme étant l’une des principales causes des événements du Kirghizstan.

Je voudrais maintenant vous parler de la coopération entre l’Union et l’ensemble des pays d’Asie centrale. À la fin de l’année dernière, l’Union a lancé une initiative visant à améliorer le dialogue politique avec la région. À cette fin, la troïka des directeurs régionaux de l’Union a rencontré ses homologues d’Asie centrale en décembre dernier à Bichkek.

Ce dialogue politique entre l’Union européenne et l’Asie centrale peut sans aucun doute contribuer à modifier l’avenir des relations entre les deux régions, sachant qu’il se déroule dans un contexte constructif. La Commission se réjouit de l’intérêt dont ont fait preuve les cinq pays d’Asie centrale envers ce processus.

La réussite du dialogue dépend du degré d’implication des deux parties. À cet égard, l’Union sera toujours favorable à la libéralisation économique et, bien entendu, à la démocratisation politique de l’Asie centrale. Le processus de dialogue pourrait se concentrer sur des problèmes communs aux deux régions: la lutte contre le terrorisme, le trafic de drogues et la traite des êtres humains, le blanchiment d’argent, l’immigration illégale, l’énergie, les transports et le renforcement de la coopération économique.

Le dialogue politique entre l’Union et l’Asie centrale faciliterait l’intégration régionale dans la région et donnerait une orientation politique à la coopération entre les deux régions.

L’Union examine les démarches à entreprendre par la suite. La réunion entre la troïka communautaire et les ministres des affaires étrangères d’Asie centrale qui aura lieu à la fin du mois de juin à Tachkent représentera une belle opportunité de poursuivre l’examen du processus de dialogue.

L’Union prie instamment les cinq pays d’Asie centrale de poursuivre le processus de libéralisation politique. Un pays ne peut prospérer au bénéfice de ses citoyens, jouir de la stabilité et de la sécurité et promouvoir l’intégration régionale de manière substantielle qu’en garantissant un développement économique lié à une libéralisation politique, à l’État de droit et au développement d’une société civile active, dont l’un des composants essentiels est la liberté de la presse. Je suis persuadé qu’il s’agit de la meilleure manière de renforcer les liens entre l’Asie centrale et l’Union.

La Commission escompte une amélioration de la coopération entre l’Union européenne et les pays de la région de la mer Caspienne, comme convenu lors de la conférence ministérielle sur l’énergie et les transports qui a eu lieu en novembre dernier à Bakou. D’un point de vue politique, l’énergie est devenue une question de sécurité. Les deux régions ont intérêt à coopérer afin d’optimiser et d’approfondir l’intégration de nos systèmes et de nos marchés énergétiques.

L’intensification de la coopération entre l’Union et l’Asie centrale dépend d’aspects tant politiques qu’économiques et, dans ce contexte, l’Union reste désireuse de fournir une assistance à cette importante région.

 
  
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  Elmar Brok, au nom du groupe PPE-DE. - (DE) Monsieur le Président en exercice du Conseil, Monsieur le Commissaire, nous oublions souvent cette région parce qu’elle se trouvait autrefois dans l’ombre de l’Union soviétique et ne s’est donc pas développée de manière indépendante. Aujourd’hui pourtant, la région présente une importance stratégique considérable en raison de ses réserves de gaz et de pétrole, de son rôle prépondérant en termes d’approvisionnements en énergie, etc. Cette importance stratégique est également la conséquence de l’intérêt croissant que porte la Chine à cette région, de la progression du fondamentalisme musulman et du fait que plusieurs de ces pays se retrouvent entraînés dans le trafic de drogues.

Nous devons regarder la réalité en face: cette érosion de la démocratie, de l’État de droit et des droits de l’homme complique de plus en plus la coopération avec la région, le respect des accords de partenariat et de coopération existants et la conclusion ou la ratification de nouveaux accords. Nous devons aussi comprendre que les régimes de ce type se transforment en îlots d’instabilité plutôt que de stabilité, comme nous l’ont démontré les élections au Kirghizstan et les événements antérieurs survenus en Ukraine.

Les effets sur nos intérêts grandissent à mesure que se développe l’instabilité dans une région présentant une importance géographique aussi critique. C’est pour cette raison que je voudrais inviter cette Assemblée à donner clairement la priorité à une stratégie commune dans ce dossier, au lieu d’aborder des problèmes individuels et que je tiens à souligner l’importance de soutenir réellement le processus démocratique dans ces pays.

Mes commentaires suivants s’adressent au Conseil et à la Commission. Selon moi, il est dans l’intérêt de tous que nous parvenions à un accord avec les États-Unis qui ne considère plus le pays comme un simple camp de base provisoire pour l’Afghanistan, et avec la Russie, dont l’attitude à l’égard des évolutions de ce type est souvent influencée par de vieilles convictions. Il est dans l’intérêt des trois partenaires de stabiliser la région, mais nous n’y parviendrons que si nous collaborons pour instaurer la démocratie et l’État de droit. Nous devrions en faire une nouvelle priorité.

 
  
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  Jan Marinus Wiersma, au nom du groupe PSE. - (NL) Monsieur le Président, je pense que nous reconnaissons tous aisément notre obligation, face aux événements survenant au Kirghizstan, de regarder en face la situation de toute la région et de débattre ce qu’il convient de faire pour l’Asie centrale, les intérêts de l’Union et ce que nous pouvons faire pour améliorer la situation et stabiliser la région. Les événements du Kirghizstan sont, en soi, mémorables. La ressemblance avec ce que nous avons vu en Ukraine est frappante. Nous devons, dans le même temps, nous rappeler que ce qui s’est passé au Kirghizstan n’était pas, bien entendu, une révolution orange et que nous devons attendre de voir comment les choses évolueront, en particulier à la lumière des élections équitables et libres devant s’y tenir. En ce qui concerne les élections, l’Union européenne et l’OSCE doivent jouer un rôle central dans leur observation, garantissant ainsi au peuple kirghize que les élections ont été équitables et que le gouvernement en place est légitime et capable de contribuer au développement de ce pays.

Si tout ceci se déroule comme prévu, nous pensons que l’Union européenne devrait également réfléchir à la manière d’aider le Kirghizstan dans ce nouveau contexte, car l’effet sur les autres pays de la région sera bénéfique. Sans entrer dans une analyse détaillée de la situation de l’Ouzbékistan et d’autres pays d’Asie centrale, je tiens à signaler que les pays voisins du Kirghizstan sont eux aussi confrontés à des problèmes majeurs dont l’Union européenne devrait se préoccuper. C’est d’ailleurs notre question principale à la Commission: nous avons une stratégie pour la Russie et nous avons la nouvelle politique de voisinage pour de nombreux pays, mais que faire pour l’Asie centrale? Quelles initiatives, visant notamment à soutenir l’évolution au Kirghizstan, pouvons-nous escompter dans les années à venir? Comme nous pouvons le voir, il ne s’agit pas uniquement de préserver l’approvisionnement énergétique, mais aussi de renforcer les liens avec ces pays et, dans une certaine mesure, d’européaniser l’Asie centrale - j’entends à ce titre la diffusion et l’instauration de valeurs partagées par l’Union européenne, le Conseil de l’Europe et l’OSCE. Nous espérons que la Commission et le Conseil présenteront de nouvelles initiatives dans cette optique.

 
  
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  Ona Juknevičienė, au nom du groupe ALDE. - (LT) Je préside la délégation pour les relations avec les républiques d’Asie centrale et la Mongolie et nous nous rendrons prochainement dans cette région, en Asie centrale, au Kirghizstan notamment. La plupart des députés européens croient la nouvelle qui s’est répandue dans le monde, faisant état d’une révolution des tulipes au Kirghizstan. Je voudrais exprimer mon avis sur ce sujet, dans une perspective légèrement différente peut-être. Je pense qu’un mouvement a effectivement eu lieu dans ce pays, un mouvement populaire. Toutefois, déclarer qu’il s’agit d’une révolution, à l’instar de ce qui s’est produit en Ukraine et en Géorgie, serait aller vite en besogne selon moi, et j’invite le Parlement à être plus prudent lorsqu’il emploie ces termes. Pourquoi dis-je ceci? Parce que le rôle du peuple n’est pas assez clair. Que veut la nation et que veulent les dirigeants? C’est à ce niveau qu’il faudrait voir une différence.

Toutefois, cette région est particulièrement importante pour le Parlement européen et l’Union européenne pour deux raisons. Premièrement, certains pays d’Asie centrale, le Kazakhstan notamment, comptent parmi les plus importants partenaires commerciaux de l’Union européenne dans le domaine des ressources énergétiques. En outre, vous savez peut-être que les pays voisins de cette région, la Chine par exemple, souhaitent ardemment les attirer de leur côté. C’est pourquoi nous devons porter une attention particulière à une coopération régulière et résolue en aidant ces pays à instaurer la démocratie. Nous devons prendre exemple sur les États-Unis d’Amérique en matière de participation active dans cette région, et c’est avec regret qu’il faut signaler que l’Union européenne n’est pas vraiment très active, pas réellement efficace avec ses programmes. Nous devons l’admettre. La Commission a beau affirmer que nous sommes l’un des principaux bailleurs de fonds dans cette région, que nous octroyons des moyens financiers importants, ces fonds ne sont pas utilisés avec efficacité. Quel est notre objectif? Quel objectif l’Union européenne devrait-elle viser en Asie centrale, dans tous les pays et en particulier au Kirghizstan à l’heure actuelle? Garantir la démocratie, la stabilité et l’ordre. Réaliser une étroite coopération entre ces pays. Comme je l’ai dit précédemment, la visite de la délégation aura lieu entre le 14 et le 20 mai. Au terme de la visite, nous serons en mesure d’informer les députés européens de la situation réelle au Kirghizstan et dans la région. Je tiens aussi à signaler qu’une réunion de coordination des activités ayant lieu dans cette région se déroulera avec les représentants américains le 2 juin. J’invite tous les députés à y participer.

 
  
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  Özdemir, au nom du groupe des Verts/ALE. - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Président en exercice du Conseil, Monsieur le Commissaire, ne disposant que d’une minute pour m’exprimer, je voudrais me concentrer sur un seul aspect de ce dossier. Je soutiens les commentaires des orateurs précédents, puisque je crois moi aussi que nous devrions principalement veiller à reconnaître le rôle majeur joué par l’OSCE en Asie centrale. Cette constatation est particulièrement pertinente en matière de prévention des conflits, mais elle se vérifie également dans le domaine de la gestion des crises et du respect de l’État de droit, des droits de l’homme et des normes démocratiques. N’oublions pas que l’OSCE est également très active dans d’autres dossiers, tels le soutien à la société civile ou les mesures visant à protéger les minorités.

Nous devons tout particulièrement saluer les actions menées par l’OSCE dans cette région, en particulier celles touchant à l’observation et à la préparation des prochaines élections devant avoir lieu au Kirghizstan en juin 2005. Ces activités ont pour objet de garantir le déroulement du scrutin conformément aux normes internationales et européennes. La question de la formation policière joue aussi un rôle de premier plan à cet égard, au Kirghizstan en particulier.

Pour conclure, je demanderais au Conseil et à la Commission de veiller à assurer une étroite collaboration avec l’OSCE. Nous devrions en particulier mettre à profit l’expérience accumulée dans ce domaine par M. Peterle, l’envoyé spécial de l’OSCE dans cette région.

 
  
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  Maštálka, au nom du groupe GUE/NGL. - (CS) Mesdames et Messieurs, je tiens à remercier le commissaire pour ses remarques préliminaires. Je voudrais également dire à quel point je salue les changements politiques intervenus au Kirghizstan, sachant qu’ils nous permettront également de clarifier nos objectifs de politique étrangère.

A première vue, tout paraît simple. Les élections au Kirghizstan ont été truquées, à la suite de quoi le président s’est trouvé contraint d’abandonner le pouvoir en raison des protestations populaires, Bichkek étant la suivante à être touchée par l’effet domino qui avait auparavant renversé les gouvernements de Tbilissi et Kiev. Moscou soutenait un président non démocratique et a essuyé une défaite.

Pourtant, dans le même temps, il devient également évident que la révolution kirghize présentait une dimension sociale forte, laquelle constituait essentiellement une révolte contre l’ordre oligarchique ayant vu le jour durant la privatisation. C’est un phénomène commun à tous les anciens pays socialistes, où existent des groupes qui étaient ou sont au cœur du pouvoir politique, que ce soit en raison de leurs contacts anciens ou de leurs liens ethniques ou politiques avec les personnes actuellement aux commandes. Les représentants de ces groupes ont constitué des fortunes colossales grâce à la privatisation, ce qui a provoqué des fractures majeures au sein de la société, mais leur a aussi donné les moyens nécessaires et le souhait d’entrer en politique.

Toutefois, ce soulèvement au Kirghizstan se distingue également de ses homologues sur d’autres aspects. Il s’est produit dans le pays possédant le régime le plus libéral d’Asie centrale. Toute oligarchie en conclurait que plus les restrictions imposées à la liberté d’une société sont nombreuses, plus elle a de chances de se maintenir au pouvoir. De surcroît, la situation au Kirghizstan se distingue de celle de l’Ukraine parce que la russophobie n’y a joué aucun rôle, par exemple.

Je voudrais, à cet égard, réitérer l’appel que j’ai lancé en demandant de faire en sorte que la politique communautaire démontre que l’Union européenne est une institution soutenant les idéaux de l’État de droit et de justice sociale. Nous devons par conséquent soutenir les forces désireuses de renforcer l’ordre constitutionnel et la justice sociale, tant au Kirghizstan qu’ailleurs.

 
  
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  Johannes Blokland, au nom du groupe IND/DEM. - (NL) Monsieur le Président, à une époque telle que la nôtre, au moment où nous célébrons la libération de l’Europe du joug nazi par les forces alliées, nombre d’Européens nourrissent des sentiments partagés. En fin de compte, la fin de l’oppression allemande a ouvert la voie à des décennies d’oppression de l’Union soviétique, en Asie centrale également. Le mois dernier, le Kirghizstan s’est débarrassé d’un dirigeant autoritaire au terme d’élections inéquitables. Tant le gouvernement que les citoyens de ce pays craignent de voir les extrémistes musulmans tirer parti de l’instabilité politique. Les organisations terroristes islamiques en particulier, Hizb ut-Tahrir notamment, qui cherchent à imposer l’Islam au monde entier, constituent une menace pour l’ensemble de la région de l’Asie centrale. Il convient dès lors de se féliciter que la région combatte cette radicalisation islamique dans la lutte contre le terrorisme international.

Malheureusement, les régimes autoritaires de la région ne traitent pas ce problème adéquatement, ce qui les confronte notamment à de nombreux problèmes en matière de liberté de culte. Il est un fait que les gouvernements d’Asie centrale doivent s’efforcer de maîtriser les évolutions radicales de l’Islam, mais l’obligation incombant aux Églises chrétiennes de s’enregistrer auprès du gouvernement est, selon moi, excessive. Il ne faut craindre aucune attaque de ce côté.

Nous recevons régulièrement des informations faisant état des problèmes majeurs rencontrés par des communautés chrétiennes enregistrées et non enregistrées, ceux-ci allant même jusqu’à la persécution. Permettez-moi de citer un seul exemple. Au Kazakhstan, Valery Pak de la communauté baptiste non enregistrée de Kyzyl-Orda est menacé et poursuivi depuis plusieurs années. Cette situation doit cesser, car tous les pays d’Asie centrale prévoient la liberté de culte dans leur constitution. Je prie instamment le Conseil et la Commission de soutenir ces pays dans leur lutte contre le fondamentalisme musulman, tout en leur demandant de rendre compte des problèmes de liberté de culte, de l’obligation d’enregistrement des Églises - en particulier de la situation des communautés baptistes non enregistrées -, ainsi que des injustices à l’encontre de Valery Pak et d’autres.

 
  
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  Fotyga, au nom du groupe UEN. - (PL) Je tiens tout d’abord à féliciter la présidence pour son excellent travail d’analyse détaillée de la situation en Asie centrale et au Kirghizstan en particulier. Je voudrais, si vous me le permettez, ajouter quelques commentaires concernant la situation dans ce pays.

Il s’est écoulé un mois et demi depuis le renversement de régime au Kirghizstan. Pourtant, la situation est loin d’être stable, ce qui constitue une source de troubles importants dans les pays voisins. Nous avons noté plusieurs signes encourageants indiquant un retour à la normale, tel notamment le fait qu’une dyarchie n’ait vu le jour ni au niveau parlementaire ni au niveau du chef d’État. Je fais principalement allusion à la démission du président Akaïev en avril. Toutefois, des événements de nature à provoquer de grandes inquiétudes se sont également produits. Il s’agit notamment de plusieurs incidents autour d’un décès mystérieux aux implications politiques qui a donné lieu à de nombreuses interrogations sur la véritable nature des changements survenus. Je pense que la manière dont les prochaines élections présidentielles se dérouleront fera figure de test décisif pour ces changements. À cet égard, je voudrais souligner le rôle essentiel joué hier, aujourd’hui et demain certainement, par l’OSCE au Kirghizstan. La supervision de la campagne électorale et du scrutin proprement dit doit se concentrer tout particulièrement sur les aspects du processus électoral ayant directement abouti aux protestations au Kirghizstan et au renversement du pouvoir, par exemple l’exclusion de candidats et l’achat de votes. L’attitude des autorités kirghizes à l’égard de la convocation d’élections législatives anticipées sera également déterminante.

Je voudrais faire, si vous me le permettez, un dernier commentaire sur la base de ma propre expérience de la vie publique en Pologne. Une fois qu’une société commence à se battre pour ses droits inaliénables, ce processus devient irréversible et inévitable, quelle que soit la durée du combat. Le soutien que fournit l’Union à ces changements devrait par conséquent en tenir compte et devrait se concentrer sur la société civile. Je suis en faveur d’un soutien financier de l’Union, mais il doit être tributaire du respect de critères liés aux droits de l’homme et à l’État de droit.

 
  
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  Ryszard Czarnecki (NI). - (PL) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je garde un souvenir vivace de la visite que j’ai effectuée au Kirghizstan il y a quelques années. C’est un pays d’une grande beauté sauvage qui peut se targuer de réserves naturelles en eau abondantes, une ressource naturelle importante dans cette région du monde. Les yeux de la planète se sont récemment tournés vers le Kirghizstan à l’occasion du renversement de son dirigeant de longue date, le président Akaïev. Quelques-uns, notamment certaines personnes présentes dans cette Assemblée, ont naïvement interprété ceci comme étant un événement similaire à celui qui s’était précédemment produit en Géorgie et en Ukraine. La vérité est pourtant tout autre. Les nouveaux gouvernements géorgien et ukrainien se donnent beaucoup de mal pour s’assurer que leurs pays mènent des politiques d’indépendance à l’égard de Moscou. Au Kirghizstan toutefois, le nouveau pouvoir politique est tout aussi pro-russe que son prédécesseur, sinon plus. La situation dans le pays reste loin d’être stable, comme en témoigne la récente tentative d’assassinat sur la personne de M. Erkinbaïev, candidat à la présidence. On ne peut envisager les événements actuels du Kirghizstan dans une optique manichéenne, même si certains observateurs occidentaux semblent le souhaiter.

Il est essentiel que l’Union joue un rôle plus actif dans cette partie du monde, elle ne peut laisser les peuples concernés à la merci des Russes et des Américains. Ceci dit, nous devrions bien évidemment coopérer avec les premiers comme avec les seconds dans ce dossier.

 
  
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  Maat (PPE-DE). - (NL) Monsieur le Président, je me réjouis que la Commission ait levé le malentendu sur la communication du Conseil concernant la date du scrutin: c’est le 10 juillet. Tout le mérite en revient par conséquent à la Commission, qui était mieux informée. Je voudrais répéter les paroles de la présidente de la délégation pour les relations avec l’Asie centrale, qui nous a d’ores et déjà conseillé de ne pas comparer la situation au Kirghizstan avec celle de l’Ukraine. Le temps nous dira si la révolution est la même ou si une poignée de responsables a mis en branle un processus différent. La situation au Kirghizstan diffère sensiblement: sa démocratie se divise selon des lignes ethniques et régionales ce qui, en soi, ne complique pas les choses et ne change rien au fait que l’Union européenne ferait bien d’investir en Asie centrale. Les investissements sont trop faibles actuellement et il est frappant de voir que jusqu’à récemment, les deux pays les plus pauvres, la Mongolie - un pays méritant d’être félicité pour l’absence de tout problème en matière de démocratie et de droits de l’homme - et le Kirghizstan, obtenaient les meilleurs résultats.

Une révolution étant maintenant en marche au Kirghizstan, nous devrions tirer parti de la situation. Je me réjouis des 25 millions de la Commission, mais cette somme me paraît dérisoire. L’Union devrait procéder comme suit dans un proche avenir. J’appelle le Conseil et la Commission, ainsi que le Parlement, à miser sur les élections en dépêchant sur place une solide délégation d’observateurs le 10 juillet et en soutenant l’OSCE, de manière à garantir le bon déroulement du scrutin. En effet, le bon déroulement des élections inspirera confiance à la population, à l’égard des élections législatives suivantes également. Il importe par ailleurs que l’Union européenne investisse davantage dans l’enseignement et la coopération économique, car il est vraiment incroyable que les groupes fondamentalistes islamiques se taillent actuellement la part du lion des investissements étrangers dans l’enseignement. Cette situation doit prendre fin. C’est pour l’Europe un défi d’investir davantage au Kirghizstan, en particulier dans les domaines de l’enseignement et de la coopération économique. Le pays a également besoin de solides accords de libre-échange à cette fin.

Permettez-moi encore d’ajouter une note critique concernant cette région. Je voudrais que la Commission nous dise ce qu’elle compte faire au sujet de la répression croissante au Kazakhstan, avec notamment la récente fermeture de Respublika, principal journal d’opposition, et l’emprisonnement de sa journaliste Irina Petruchova en Russie sur demande des autorités kazakhes.

 
  
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  Bernadette Bourzai (PSE). - Monsieur le Président, chers collègues, beaucoup de choses ont été dites dans les interventions précédentes sur lesquelles je ne reviendrai pas. Globalement, je souscris à la teneur du projet de résolution commune qui nous a été proposé.

Néanmoins, je souhaite souligner l’importance de trois points. Tout d’abord, les difficultés économiques et sociales sont une cause centrale du déclenchement des événements au Kirghizstan. En effet, une situation de forte précarité et de pauvreté a constitué un terreau fertile, propice au développement des manifestations et au renversement du régime d’Askar Akayev qui, depuis 1991, avait fait main basse sur l’économie kirghize. Des pratiques inacceptables, associant la corruption et le népotisme, ont renforcé un mécontentement sourd mais légitime de la population, qui aspire à une amélioration de sa situation et nous devons rester attentifs à ces aspirations. Ainsi, s’il convient de soutenir le processus de transition démocratique en cours, une attention particulière doit être apportée à la sincérité et à la transparence des élections, et à la mise en place d’une politique de dialogue et de réconciliation nationale. Seul un gouvernement légitime et stable pourra mener à bien les réformes nécessaires au mieux-être des citoyens kirghizes.

Ensuite, les enjeux liés au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales constituent un autre aspect essentiel de la situation actuelle. L’Union européenne doit s’assurer que le processus de démocratisation se base sur un véritable pluralisme politique mais permet aussi la libre activité et l’indépendance des médias et des ONG. Les actions de coopération engagées par l’OSCE et dans le cadre du programme TACIS doivent être soutenues et encouragées.

Enfin, il me semble nécessaire d’élargir la réflexion relative aux événements kirghizes dans une perspective régionale embrassant toute l’Asie centrale. La démocratisation kirghize pourrait ainsi apparaître comme un espoir, un exemple à suivre pour d’autres pays d’Asie centrale, victimes de violations des droits de l’homme. Les situations récentes de durcissement de la législation visant les ONG et les groupes d’opposition appellent une attitude d’écoute et de vigilance particulière de la part de l’Union européenne face à l’évolution des situations politiques dans la région.

 
  
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  Charles Tannock (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, le Kirghizstan est une petite république musulmane d’Asie centrale d’une incroyable beauté naturelle et riche de fières traditions nomades. Le Kirghizstan a été annexé par la Russie en 1864, mais il n’a obtenu son indépendance de l’Union soviétique qu’en 1991. Il a récemment défrayé la chronique, à la suite des élections législatives du 27 février, lorsque des irrégularités électorales ont provoqué une protestation générale partie du sud du pays. Le Président, accusé de corruption et de trucage des élections, s’est vu contraint de prendre la fuite.

Hier, lors d’une visite officielle en Géorgie, le président Bush a lancé un appel à la liberté et à la démocratie partout dans le monde communiste. Le Kirghizstan est un pauvre pays montagneux, à l’économie majoritairement agricole, mais il a procédé à d’importantes réformes du marché sous la direction de l’ex-président Akaev. Celui-ci s’est distingué en adoptant des politiques économiques relativement libérales, et il a mis en place un système de régulation amélioré et une réforme agraire. Le Kirghizstan a été le premier pays de la CEI à être accepté au sein de l’OMC, et la plupart des entreprises publiques ont été vendues, même si, de manière regrettable, le clientélisme et la corruption ont été monnaie courante.

Il faut espérer que sa révolution - s’il s’agit bien d’une révolution - le placera solidement sur le chemin de la démocratie, du respect des droits de l’homme et de la bonne gouvernance. Il pourrait être un modèle pour des États limitrophes tels que l’Ouzbékistan, le Kazakhstan et le Tadjikistan, qui maintiennent des systèmes autoritaires se trouvant seulement en transition partielle. Mais les litiges frontaliers entre le Kirghizstan et ses voisins retardent le processus de délimitation des frontières avec le Tadjikistan en particulier, mais aussi avec l’Ouzbékistan.

De plus, la culture illégale de cannabis et de pavot pour les marchés de la CEI, et le peu de mesures adoptées pour éradiquer les cultures illégales de produits stupéfiants posent d’autres problèmes. Le Kirghizstan sert également de point de transit aux marchés d’Asie du Sud-Ouest, et aux stupéfiants destinés à la Russie et au reste de l’Europe.

Les élections présidentielles sont prévues pour le mois de juillet: j’ai eu confirmation de cette nouvelle sur l’internet. Le Parlement européen devrait assurément envoyer des observateurs pour superviser la transition démocratique du Kirghizstan.

(Applaudissements)

 
  
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  Grabowska (PSE). - (PL) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, le Parlement européen est évidemment très désireux de coopérer avec le Kirghizstan ainsi qu’avec d’autres pays d’Asie centrale, comme en témoigne l’accord de partenariat et de coopération conclu en 1995. Les questions intéressant le Parlement sont les droits de l’homme, la démocratisation de la vie quotidienne, la protection environnementale et l’énergie. Elles doivent bénéficier d’une attention particulière.

Lors de son adoption en 1993, la constitution kirghize était porteuse de très grands espoirs. Bien qu’amendée à quatre reprises depuis lors, elle demeurerait potentiellement une bonne base en vue de nouveaux changements démocratiques dans le pays. Pourtant, si la Constitution prévoit officiellement l’indépendance du système judiciaire et doit garantir le respect des droits de l’homme dans le pays, les observateurs ont signalé que les réformes mises en place sous son égide étaient insuffisantes, que la corruption restait endémique et que le salaire des juges était insuffisant. Selon ces observateurs, la désignation des membres de la Cour constitutionnelle, des juges de la Cour suprême et des médiateurs de la Cour d’arbitrage par le président viole les principes démocratiques. Ils ont mis en garde contre un recul des droits de l’homme sous prétexte de lutte antiterroriste.

L’Union européenne peut et doit assurer le soutien financier qu’elle octroie systématiquement pour renverser ces tendances négatives. Elle peut et doit de surcroît fournir son soutien moral d’usage en étant présente là où celui-ci est nécessaire, là où la démocratie a besoin d’être soutenue et là où la restauration de l’État de droit s’impose.

 
  
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  Mölzer (NI). - (DE) Monsieur le Président, le nouveau millénaire semble avoir déclenché une vague de changements, en particulier dans les nouveaux États de l’ex-Union soviétique. Les facteurs externes tels que la lutte pour la puissance et le contrôle des oléoducs ne constituent pas la cause principale des «révolutions colorées» d’Asie centrale, même si les États-Unis et la Russie ont sans aucun doute tenté en coulisse de jouer de leur influence. En revanche, il est bien plus probable que ces révolutions étaient le résultat d’une modernisation progressive des anciennes républiques soviétiques. Les peuples d’Asie centrale en ont assez des structures obsolètes et rigides, ils veulent un changement rapide sans effusions de sang. La population espère également que ces changements engendreront un redressement économique et amèneront la prospérité, bien entendu.

En principe, les réformes de ce type sont susceptibles d’engendrer des changements positifs. Il semblerait toutefois qu’une vacance partielle du pouvoir soit apparue au Kirghizstan, d’où un risque de changement de disposition et d’enfoncement du pays dans le chaos et la guerre civile. Il est dans l’intérêt de l’Union de tendre une main secourable et de donner des conseils afin de stabiliser la situation politique. Toutefois, une ingérence excessive de notre part pourrait avoir l’effet inverse, affectant l’équilibre progressivement mis en place dans le pays. Après tout, le Kirghizstan veut démontrer qu’il est capable de mettre en œuvre des mesures de reconstruction par ses propres moyens. Le fait qu’une révolution de ce type puisse s’étendre à n’importe quel moment doit aussi nous inciter à la réflexion, car il ne serait pas surprenant que cette tendance se poursuive dans d’autres pays connaissant une situation similaire, tels le Kazakhstan, le Tadjikistan et le Turkménistan. L’Union doit se préparer sans délai à cette éventualité. Je rejoins également le commentaire fait par l’un des orateurs précédents sur le besoin de ne pas laisser cette zone aux États-Unis et à la Russie uniquement.

 
  
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  Alojz Peterle (PPE-DE) . - (SL) Au terme du soulèvement politique au Kirghizstan, lequel n’est pas tout à fait comparable aux événements survenus en Ukraine et en Géorgie, les principales causes de l’instabilité dans les domaines économique, social et autres demeurent présentes. Bien entendu, le nouveau gouvernement ne pourra résoudre les problèmes accumulés avant les élections présidentielles du 10 juillet ni plusieurs mois après celles-ci.

J’ai personnellement assisté à la révolution en tant qu’envoyé spécial du président en exercice de l’OSCE qui, selon moi, opère sur place avec une réussite certaine et avec le soutien de l’Union européenne et des Nations unies. Je vous remercie de vos paroles aimables concernant le travail de l’OSCE, qui s’efforce essentiellement pour l’instant de garantir des élections libres, d’améliorer la sécurité et le dialogue politique entre les candidats présidentiels. Nous savons qu’il existe des différences majeures entre le Nord et le Sud. Pour cette raison, bien que ce ne soit pas la seule, une instabilité politique pourrait voir le jour avant les élections proprement dites. Bien entendu, après le 10 juillet, la communauté internationale devra d’urgence fournir une aide de longue haleine afin de mettre en œuvre des réformes en matière politique, économique et sociale.

Je me réjouis que le commissaire Almunia ait déjà souligné l’aspect stratégique, suivi en cela par M. Brok et d’autres orateurs. J’ai personnellement signalé à plusieurs reprises le besoin de voir l’Union européenne repenser sa relation avec cette région qui ne fait pas partie de l’Europe au sens large, mais qui est plus proche de nous que ne le laissent entrevoir les apparences. Je pense que nous devons aussi intégrer dans cette relation, comme l’a déclaré M. Brok, la dimension transatlantique et russe. Je souhaite, en tout état de cause, que le Parlement affiche ses intentions à l’égard du Kirghizstan en dépêchant une solide équipe d’observateurs. Je peux aussi vous assurer que le parlement kirghize attend l’arrivée de notre délégation parlementaire avec impatience.

 
  
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  Beglitis (PSE). - (EL) Monsieur le Président, l’annonce des élections présidentielles de juillet prochain ne constitue pas, pour l’instant du moins, une condition sine qua non à l’instauration de la stabilité politique et à la démocratisation du pays. Tous les députés ont évoqué les graves problèmes du Kirghizstan.

L’Union européenne devrait toutefois travailler en étroite collaboration avec l’OSCE pour organiser et superviser les élections et accroître l’aide humanitaire et le soutien financier par l’intermédiaire du programme TACIS et du système de préférences généralisées.

La région de l’Asie centrale ne peut constituer une nouvelle terre de conflits entre les grandes puissances - les États-Unis, la Russie et la Chine - dans le but de s’assurer le contrôle stratégique des ressources énergétiques.

L’Asie centrale a accueilli, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, de nouvelles bases militaires, et sa militarisation se poursuit dangereusement.

L’Union européenne a intérêt à jouer le rôle de force stabilisatrice dans la région. Le rapport stratégique adopté par l’Union européenne en 2002 pour la période 2002-2006, lequel porte sur les pays de cette région, doit être revu et étoffé en tenant compte de la nouvelle situation émergente. Je crois et j’appelle la Commission à lancer immédiatement la rédaction d’un nouveau rapport stratégique pour la région, sans attendre 2006.

La démocratisation, la coopération régionale, la lutte contre le trafic de drogues et le fanatisme religieux croissant, représentent des défis de taille qu’il faudra relever dans les années à venir. Il importe que l’ONU s’implique plus activement dans ce sens.

 
  
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  Stenzel (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, l’effet domino positif qui a vu le jour lors du réveil démocratique de l’Ukraine et de la Géorgie vient de s’étendre à un troisième pays. Ce qui s’est produit au Kirghizstan illustre bien, une fois de plus, la manière dont la nomenklatura post-soviétique perd le pouvoir, même si les événements dans ces trois pays ne sont pas nécessairement comparables. Le régime Akaïev s’est effondré sans la moindre intervention extérieure, à la suite d’une révolte populaire spontanée. La fraude électorale et les fortunes colossales amassées par une famille politique caractérisée par le népotisme, qui traitait le pays comme sa propriété personnelle, entre autres choses, ont tout simplement poussé à bout la patience de la population.

Voici bientôt 15 ans que l’Union soviétique disparaissait. Ce ne fut pourtant pas le désastre géopolitique auquel M. Poutine, président de la Fédération de Russie, a tenté de nous faire croire, mais bien une chance géopolitique. L’action indispensable lancée par l’OSCE et le BIDDH, une agence de l’OSCE actuellement dirigée par un Autrichien, est le seul facteur externe auquel nous pouvons prêter une influence sur le cours des événements.

Poutine semble avoir tiré les enseignements des erreurs qu’il a commises en Ukraine et l’opposition kirghize a également habilement joué la partie en lui annonçant à l’avance le renversement imminent de celui qui était alors chef du gouvernement. C’est pour cette raison que Poutine n’est pas intervenu pour soutenir le système, qu’il n’a pas non plus misé sur le mauvais cheval comme en Ukraine, même si le président Akaïev est allé chercher refuge à Moscou après son éviction du pouvoir, fuyant clandestinement le pays dans un tapis roulé. La Russie ne peut que se réjouir de la présence de démocraties stables et non corrompues.

Quelles leçons l’Union devrait-elle tirer de tous ces événements? La première, c’est que nous devons soutenir la démocratisation dans cette région. La seconde, c’est que nous devons veiller à renforcer la démocratie et à soutenir la société civile, au Kazakhstan en particulier, pour que l’assistance financière ne tombe pas en de mauvaises mains. Le Kazakhstan est bien plus grand, plus riche et sensiblement plus important en termes géopolitiques que le Kirghizstan qui, bien que pittoresque, n’est qu’un petit pays.

 
  
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  Rouček (PSE). - (CS) Il ressort de ce débat que deux tendances s’observent au Kirghizstan, ainsi qu’en Asie centrale bien entendu. La première est une détérioration de la situation politique et une érosion des droits de l’homme et des libertés civiles. La seconde est l’importance stratégique croissante de toute cette zone, les ressources énergétiques situées dans des pays tels que le Turkménistan, l’Ouzbékistan et le Kazakhstan jouant à ce niveau un rôle non négligeable.

Puisque je ne dispose que d’une minute pour m’exprimer, je voudrais me concentrer brièvement sur deux domaines dans lesquels l’Union européenne doit fournir une assistance. Il ne fait aucun doute que la défense des droits de l’homme, des libertés civiles, du processus électoral au Kirghizstan et de la société civile constitue le premier d’entre eux.

Le second domaine, qui n’a pas fait l’objet d’une attention particulière dans cette Assemblée, est le soutien à la coopération régionale ou, en d’autres termes, aux États membres d’Asie centrale dans leur lutte contre le terrorisme, le trafic de drogues, ainsi qu’en matière de coopération énergétique et d’utilisation des réserves d’eau, par exemple. L’Ouzbékistan et le Kazakhstan possèdent des ressources énergétiques et il existe des réserves d’eau considérables au Kirghizstan. Je souhaiterais savoir, en d’autres termes, de quelle manière la Commission estime qu’elle-même et l’Union européenne peuvent soutenir cette coopération régionale.

 
  
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  Gawronski (PPE-DE). - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, puisque nous devons aussi examiner la présente résolution et que personne ne l’a fait jusqu’à présent à ma connaissance, je dirais que cette résolution est réaliste et objective. Je me réjouis que tous les groupes politiques, ou peu s’en faut, l’aient soutenue, ce qui démontre l’unité du Parlement européen et renforce sa crédibilité.

Avant toute chose, nous devons saluer la décision de l’Europe de se tourner vers le Kirghizstan. En effet, l’Union est absente depuis bien trop longtemps, comme vient de le souligner M. Brok, et porte une part de responsabilité pour avoir toléré le régime Akaïev et d’autres systèmes semblables de cette région. Il est toutefois vrai que lorsque notre délégation communautaire a rencontré Askar Akaïev à Bichkek il y a deux ans, il semblait sincère et convaincant en affirmant qu’il ambitionnait de rendre l’État plus démocratique et plus transparent. Nous l’avons peut-être cru à l’époque, mais ce n’est certainement plus le cas.

La résolution rappelle la fragilité de la situation au Kirghizstan. C’est d’autant plus justifié qu’à l’inverse de l’Ukraine et de la Géorgie, comme l’a souligné Mme Stenzel, le résultat final n’a en aucun cas été atteint. Il existe en ce moment précis une dangereuse vacance du pouvoir. La résolution aborde également la question des dissensions internes au sein de l’opposition qui semblerait actuellement détenir le pouvoir, unie dans sa lutte contre le régime Akaïev uniquement, alors que ses références démocratiques s’entachent de sa collaboration passée avec le régime dictatorial du président déchu.

C’est pour cette raison que le point 4 de la résolution présente une importance capitale. Tout en espérant une réforme constitutionnelle d’envergure, il met en garde contre les dangers d’un système de prise du pouvoir similaire à son prédécesseur qui ne différerait que par les dirigeants politiques concernés. Ce danger existe. Les États-Unis fournissent un soutien financier et moral aux forces démocratiques kirghizes et nous devons aussi commencer à faire de même.

 
  
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  Olajos (PPE-DE). - (HU) Monsieur le Président, les changements intervenus dans la région des NEI l’année dernière indiquent que les systèmes post-soviétiques font face à une crise et qu’ils ne se sont pas montrés à la hauteur dans le domaine des réformes économiques, politiques et sociales. En Asie centrale, le Kirghizstan en est l’exemple le plus frappant. Malheureusement, force est de reconnaître que certains dirigeants ont une nouvelle fois tiré des conclusions erronées des révolutions colorées et ont, au lieu de rectifier leurs erreurs révélées par les événements, barré les routes susceptibles de constituer une issue à la crise pour eux, leur pays et leur peuple.

Nous avons appris avec tristesse que les événements du Kirghizstan avaient contraint le président du Kazakhstan voisin à mettre en place certaines mesures drastiques. Il semble que les propositions de résolutions amendant le processus électoral et le travail des médias aillent dans la mauvaise direction et que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe ait critiqué le projet de loi sur la sécurité nationale lors d’un forum ouvert. C’est particulièrement regrettable, puisque la communauté internationale s’est jusqu’à présent réjouie de prendre acte des progrès du Kazakhstan en matière de restructuration sociale et économique et de sauvegarde de la paix et de l’harmonie entre les différentes nationalités et confessions. Nous espérions sincèrement voir le Kazakhstan être le premier pays de la région des NEI à mériter l’enviable et responsable désignation à la présidence. C’est peut-être ce qui rend d’autant plus regrettables la fermeture du quotidien d’opposition Respublika sous un prétexte fallacieux et les deux attaques physiques brutales subies en moins d’un mois par Zharmakhan Tuyakbai, candidat potentiel de l’opposition. Le fait que la police soit restée sans réaction alors que des dizaines de jeunes sbires attaquaient l’intéressé ne peut être le fruit du hasard. Il ne nous reste plus qu’à espérer que le chef d’État est fermement décidé à trouver et punir les coupables.

La démocratie implique une concurrence honnête entre adversaires politiques. Or, ces attaques sont contraires à ce principe. Nous devons dire qu’il incombe en permanence aux autorités de mettre en place des conditions garantissant l’égalité des chances et l’honnêteté des pratiques lors des batailles politiques menées dans le pays concerné.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Monsieur le Président, j’aimerais d’abord corriger une erreur que j’ai commise quant à la date des élections au Kirghizstan. M. Maat a dit que ces élections étaient prévues le 10 juillet. Cette information a été communiquée le 6 mai; je vous prie donc de bien vouloir m’excuser pour cette erreur.

Je tiens également à remercier les honorables parlementaires qui sont intervenus pour toutes les analyses extrêmement utiles qu’ils ont développées, tout à fait adaptées à l’importance de cette région. Le rôle géopolitique et géostratégique que joue cette région pour l’Union européenne a été clairement exprimé; cela implique effectivement que l’Union européenne soit davantage présente dans cette région. Nous avons tout intérêt à ce que la stabilité de cette région soit mieux assurée, ce qui implique d’abord que l’aspiration de ces pays à consolider leur indépendance assez récente doit être soutenue. Je pense que dans ce contexte, l’Union européenne peut jouer un rôle important en maintenant l’équilibre nécessaire entre la Russie, d’un côté, et les États-Unis, et éventuellement la Chine, de l’autre.

La stabilité est d’autant plus essentielle, plusieurs intervenants l’ont souligné, que ce sont des États qui connaissent encore des fragilités internes et qui, dès lors, sont particulièrement exposés à la menace terroriste, à la menace fondamentaliste. Nous devons donc agir avec ces États pour qu’ils évoluent pour devenir des démocraties où les droits de l’homme sont davantage respectés, où ce régime démocratique se renforce. Cela ne sera possible que si nous aidons ces États à promouvoir leur développement économique. Il s’agit là de pays assez divers; un pays comme le Kirghizstan a en effet une situation économique fort différente de celle d’un pays comme le Kazakhstan, un des États potentiellement les plus riches. À cet égard aussi, l’Union européenne peut jouer un rôle extrêmement important. Nous avons déjà, depuis les années 90, des accords de coopération avec ces États et, dans le cadre de ces accords de coopération, nous tenons régulièrement des réunions à la fois sur la coopération que nous sommes en train de développer et sur une forme de dialogue politique.

Le message qui transparaît d’ailleurs dans votre résolution, que je salue, est qu’un rôle politique important revient à l’Union européenne. Ce rôle, nous pouvons le jouer en étroite liaison, notamment pour tout ce qui touche aux questions de droits de l’homme et de transition démocratique, avec l’OSCE.

 
  
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  Almunia, membre de la Commission. - (ES) Monsieur le Président, je tiens moi aussi, à remercier l’ensemble des députés pour leurs contributions à ce débat, qu’ils ont exprimées dans leurs interventions, dans le but d’identifier la vision la plus précise possible, partagée par toutes les institutions de l’Union, quant à la situation réelle, aux défis et aux stratégies et instruments dont nous disposons pour instaurer la liberté, le respect des droits de l’homme et la démocratie dans les pays d’Asie centrale. En effet, cet aspect ne sera pas uniquement crucial pour les aspirations des citoyens de la région en question. La stabilité, la prospérité et la démocratisation des États de cette région constitueront indubitablement un élément majeur de notre propre sécurité également.

Premièrement, les élections du 10 juillet sont d’une importance capitale. Il est essentiel que ces élections se déroulent dans une atmosphère paisible, avec la garantie que les citoyens votants seront respectés.

Dans ce contexte, mon intervention initiale, que nombre d’entre vous approuvent, soulignait le rôle crucial de l’intervention de l’OSCE. J’ai également exprimé l’avis de la Commission, laquelle estime que le rôle lui incombant dans la bonne marche de ces élections doit être combiné au rôle de premier plan joué par l’OSCE. En tout état de cause, je l’ai également souligné dans mon intervention initiale, nous avons fait usage des mécanismes dont nous disposons et nous avons fourni 1,3 million d’euros afin de garantir le bon déroulement du processus électoral.

Il serait également souhaitable, si aucune décision n’a encore à été prise à cet égard, qu’une délégation de députés de cette Assemblée assiste à ces élections à titre d’observateur afin de garantir que le scrutin populaire se déroule conformément à toutes les règles démocratiques ou d’essayer d’améliorer les conditions.

Je voudrais également faire un deuxième commentaire sur le besoin de stratégie régionale, d’approche régionale. Nombre d’entre vous l’ont signalé et la Commission en convient. Il existe depuis 2002 une stratégie élaborée à la suite de la visite de l’ancien commissaire responsable des affaires étrangères, adoptée à la fin de l’année 2002. Elle vise principalement à promouvoir la stabilité et la sécurité dans la région, le développement économique durable, en donnant surtout la priorité à la réduction de la pauvreté et à la défense des droits de l’homme.

En appliquant cette stratégie, sachant que l’un des principaux intérêts de l’Union européenne dans cette région réside, d’un point de vue économique, dans les ressources énergétiques, la réunion des ministres de l’énergie qui a eu lieu en novembre de l’année dernière est très importante et nous pensons qu’il faut continuer dans cette direction. En juin prochain, la troïka et les ministres des affaires étrangères de cette région se rencontreront dans le cadre d’une autre réunion importante afin d’évaluer la situation et de continuer à faire progresser la mise en œuvre de cette stratégie.

Par conséquent, toute chose faisant avancer l’élaboration des éléments de notre stratégie, une approche régionale commune pour la région, avec toutes ses dimensions de démocratisation, de lutte contre la pauvreté, de défense, de garantie de nos intérêts économiques, de protection des droits de l’homme, recevra le soutien de la Commission bien entendu. La totalité du contenu de la résolution de cette Assemblée est dès lors le bienvenu dans cette optique.

Enfin, en ce qui concerne le cas particulier mentionné par M. Maat dans son intervention - le cas de violation des droits de l’homme -, nous ne disposons pas actuellement d’informations précises concernant le dossier qu’il a évoqué. Je demande à M. Maat, même si je sais qu’il n’est pas présent dans cette Assemblée actuellement, de nous tenir au courant, de sorte que nos représentants dans ce domaine puissent collecter toutes les informations nécessaires que nous transmettrons ensuite à ce Parlement.

 
  
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  Le Président. - Pour clore le débat, j’ai reçu six propositions de résolution(1) déposées sur la base de l’article 103, paragraphe 2, du règlement.

Le débat est clos.

Le vote aura lieu demain.

(La séance, suspendue à 11h10, est reprise à 11h30)

 
  
  

PRÉSIDENCE DE MME ROTH-BEHRENDT
Vice-présidente

 
  

(1) Cf. procès-verbal.


5. Heure des votes
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  La Présidente. - L’ordre du jour appelle l’heure des votes.

(Pour les résultats détaillés des votes: cf. procès-verbal)

 

6. Denrées alimentaires destinées à une alimentation particulière

7. Nomination d’un membre de la Banque centrale européenne

8. Régime de contingentement pour la production de fécule de pomme de terre

9. Reconnaissance des qualifications professionnelles
  

Avant le vote

 
  
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  Stefano Zappalà (PPE-DE), rapporteur. - (IT) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, l’amendement 54, qui fait partie du bloc 1, prévoit l’intégration dans l’annexe 5 de tableaux supplémentaires, qui doivent être considérés comme complémentaires au tableau 22 de la position commune du Conseil: ils ne le remplacent pas, ils le complètent! J’ai apporté cette précision, car les choses ne sont pas claires en l’état et parce que je veux qu’il soit acté qu’il s’agit d’une position convenue.

 
  
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  La Présidente. - Vos remarques seront inscrites au procès-verbal. Les services linguistiques seront priés de procéder à un examen minutieux des différentes versions linguistiques et de leur contenu.

 

10. Simplification de l’organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes

11. Aménagement du temps de travail
  

Avant le vote sur l’amendement 49

 
  
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  Mario Borghezio (IND/DEM). - (IT) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, j’ai pris la parole pour proposer un amendement oral. Je demande d’adjoindre deux adjectifs - «publique et privée» - au terme «sécurité», afin d’étendre cette protection judicieuse aux employés du secteur privé de la sécurité, qui sont fréquemment pénalisés et ne disposent pas d’une protection adéquate au niveau syndical.

 
  
  

(Plus de 37 députés s’étant opposés à la prise en considération de cet amendement oral, celui-ci n’a pas été retenu)

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. BORRELL FONTELLES
Président

 

12. Séance solennelle
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  Le Président. - Vos Altesses Royales, c’est pour moi un grand honneur, en tant que Président du Parlement européen, d’accueillir en ces lieux aujourd’hui le chef d’État actuellement en charge de la présidence de l’Union européenne.

Sire, au nom de mes collègues et en mon nom personnel, je vous souhaite la bienvenue. Votre présence dans notre Assemblée démontre bien votre intérêt pour l’intégration européenne et le rôle important joué par votre pays dans ce processus. Votre visite entretient un lien historique avec celle de votre père, le Grand-duc Jean, voici près de quinze ans, le 22 novembre 1990.

L’Union européenne comptait alors 12 États membres et 340 millions de citoyens. Aujourd’hui, nous sommes plus de deux fois plus nombreux: 25 pays et 455 millions d’Européens. Ces chiffres illustrent le long chemin parcouru et montrent que, dans l’intervalle, nous sommes parvenus à réunifier un continent en partageant les mêmes valeurs.

Votre pays, le Luxembourg, a toujours été un défenseur loyal et déterminé de l’intégration européenne et votre présidence a une nouvelle fois démontré que les soi-disant «petits» pays - petits par la taille, mais grands par l’histoire - peuvent produire de grandes présidences et apporter un supplément de savoir-faire à l’intégration européenne, grâce au travail de responsables politiques intelligents, qui ont fait preuve d’une disponibilité constante à l’égard de ce Parlement.

Lorsqu’on tourne le regard vers le passé, c’est pour constater que le nom de votre pays, le Luxembourg, est associé à des moments importants de l’histoire européenne, tels que le compromis de Luxembourg de 1966, qui permit de ramener la France à la table de la Communauté. C’est là un moment magnifique de l’histoire européenne: il porte le nom de votre pays. Aujourd’hui, aux trois quarts de votre mandat, la présidence luxembourgeoise est d’ores et déjà un succès et je suis sûr que ce sera plus encore le cas d’ici à ce qu’il s’achève.

(Applaudissements)

Sire, durant votre présidence de l’Union, le gouvernement de votre pays a obtenu un accord quant au pacte de stabilité, dans le respect des principes fondamentaux qui le régissent; il a réorienté la stratégie de Lisbonne et nous venons de signer au Luxembourg les traités d’adhésion avec la Roumanie et la Bulgarie. Nous ne pouvons toutefois nier que le dossier le plus délicat, celui des perspectives financières 2007-2013, doit encore être conclu. Espérons que les efforts de la présidence luxembourgeoise le mèneront à bonne fin.

Monseigneur, depuis votre accession au titre de Grand-duc en octobre 2000, vous n’avez cessé de vous soucier de l’ensemble des habitants de votre pays, en veillant notamment à la bonne intégration des différentes nationalités qui y vivent et en évitant toute forme d’exclusion sociale. Nous savons que votre épouse, la Grande-duchesse María Teresa, vous aide dans cette tâche et c’est un honneur pour nous de la recevoir, elle aussi, aujourd’hui dans cette enceinte.

(Applaudissements)

Ensemble, vous perpétuez les liens qui unissent votre famille à votre peuple et poursuivez sur la voie ouverte par votre père, conciliant tradition et modernité. C’est peut-être le meilleur résumé de ce qu’est le Luxembourg aujourd’hui: la meilleure synthèse jamais créée par des êtres humains entre tradition et modernité.

Sire, je vous cède la parole.

(Applaudissements)

 
  
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  Henri de Luxembourg, S.A.R. Le Grand-Duc Henri de Luxembourg. - Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, voici quinze ans, en 1990, à la veille d’une Présidence luxembourgeoise, mon père le Grand-Duc Jean eut le privilège de s’adresser à cette éminente Assemblée. Certains d’entre vous siégeaient déjà à l’époque sur les bancs du Parlement européen. Il me tient à cœur de les saluer tout particulièrement pour la constance de leur engagement au service de l’Europe.

Monsieur le Président, les aimables paroles que vous venez de prononcer à l’adresse de mon pays me touchent profondément. Avec la Grande-Duchesse, comme au nom de tous ceux qui nous accompagnent dans ce déplacement, je vous remercie de m’accueillir avec tant de chaleur.

1990 - 2005: que de changements, je dirais même que de bouleversements, dans ce laps de temps, y compris dans cette superbe ville de Strasbourg! Le nouvel et splendide édifice dans lequel nous nous trouvons, la taille des travées de cet hémicycle sont une traduction concrète des mutations historiques qui se sont opérées sur notre continent. Que l’on se rappelle les énormes espoirs nourris par les uns comme les fortes inquiétudes éprouvées par les autres devant l’ampleur des défis auxquels nous ont confrontés la fin du communisme et la réconciliation de notre continent. Le moment n’est-il pas venu de mesurer le chemin parcouru depuis, en reconnaissant au passage nos indéniables réussites?

Il reste aussi que ces derniers mois, à l’occasion des cérémonies marquant le 60e anniversaire de la fin des hostilités, nous nous rappelons volontiers que ce qui a porté notre entreprise sur les fonts baptismaux, c’était le vœu de rendre la guerre désormais impossible entre nous.

Comme vous, Monsieur le Président, j’étais à Auschwitz où, avec nombre de chefs d’État et de gouvernement, nous avons pleuré en silence, nous souvenant de ces millions de victimes innocentes disparues ou mutilées dans les conditions les plus atroces. Je voudrais relever également ce jour-là la présence - ô combien significative - des présidents des groupes politiques de ce Parlement.

C’est le devoir de mémoire qui nous a rassemblés ce jour-là, et c’est avec une vigilance renouvelée, pour que l’histoire ne se répète pas, que ce devoir doit continuer à inspirer notre engagement au service de l’intégration européenne. Sur cette toile de fond, vous me voyez très heureux de pouvoir partager aujourd’hui avec vous quelques réflexions qui pour d’évidentes raisons transcendent le programme de notre Présidence.

Monsieur le Président, mes réflexions me conduisent d’abord à un rappel lucide de nos acquis. Tout observateur reconnaîtra que le chemin parcouru ces quinze dernières années abonde en réussites indéniables, d’aucuns diraient même spectaculaires. Ainsi, l’Europe apparaît aujourd’hui plus forte, car réunie autour de valeurs communes qu’elle est capable de promouvoir dans le monde. Ensemble, nous avons su conjurer le risque de voir notre Union dégénérer en une simple zone de libre-échange. Au lendemain de la réunification allemande, réalisée dans la foulée de l’Acte unique lui-même précédé par un élargissement fort réussi au sud, nous avons créé ensemble, dans l’épreuve, une monnaie unique qui force aujourd’hui respect et admiration.

Notre Union a été en mesure de s’élargir à l’est. Qu’il me soit permis de vous faire part de l’émotion ressentie récemment à Luxembourg au moment où les plus hauts responsables bulgares et roumains ont à leur tour signé l’acte d’adhésion de leur pays. L’Europe a ainsi su répondre aux aspirations légitimes de ces peuples qui ont tant souffert d’une idéologie qui leur a refusé durant quarante ans la reconnaissance de leurs droits les plus élémentaires.

(Applaudissements)

Nous avons aboli nos frontières intérieures ouvrant à 450 millions de citoyens un espace unique de liberté et de sécurité.

Dans le respect de leurs alliances, des États membres sont intervenus de manière autonome en République démocratique du Congo (RDC). Nos troupes ont pris la relève de l’OTAN en Bosnie-Herzégovine. En Afghanistan, la présence européenne est essentielle pour conduire la transition du pays vers une démocratie authentique.

Face à la mondialisation, nous nous sommes toujours efforcés de faire de l’Europe un pôle d’excellence par rapport aux géants économiques que sont l’Amérique, le Japon, la Chine, l’Inde et le Brésil. Parallèlement à cela nous avons su faire nôtre la devise «l’union fait la force» pour ce qui est d’apparaître dans le monde comme une référence crédible en termes de démocratie et de solidarité envers les pays en développement. Je pourrais enfin mentionner les progrès énormes accomplis au niveau de la sécurité alimentaire. Au lendemain de négociations longues et ardues, l’hygiène des denrées alimentaires des 450 millions de consommateurs sera régie par les mêmes normes.

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, vous devinez que je pourrais encore multiplier les exemples. Qu’il me soit permis de constater ici que la part prise par le Parlement européen dans la réalisation de ces réussites a été décisive à bien des égards. Tantôt incitateur, tantôt aiguillon, votre Parlement a su conquérir une place éminente dans les équilibres institutionnels de notre Union. Ce faisant, le Parlement européen a fait sien le constat fait en son temps par Jean Monnet, je cite: «Nous n’avons que le choix entre les changements dans lesquels nous serons entraînés et ceux que nous avons su vouloir et accomplir».

Le rappel de ces indéniables réussites et l’hommage ainsi rendu aux élus européens ne me dispensent pas de constater avec beaucoup de lucidité que nombre de nos concitoyens, et parmi eux beaucoup de jeunes, éprouvent comme un malaise vis-à-vis de la construction européenne. Force est de constater que chez les nouveaux membres, la fraîcheur et l’enthousiasme de faire partie de cette grande famille sont encore manifestes.

Cependant, les égoïsmes ont tendance à se substituer à l’élan qui animait les pères de l’Europe. Les débats en cours dans les États membres à propos de la ratification du traité constitutionnel sont révélateurs à cet égard. Beaucoup d’intervenants donnent l’impression qu’ils se sentent marginalisés par rapport aux enjeux du processus d’intégration. Ils se disent désabusés vis-à-vis des responsables politiques. Toutefois, faute d’alternative crédible, personne n’a été en mesure jusqu’ici de proposer un autre modèle.

(Applaudissements)

Incontestablement, la foi dans cette construction s’est émoussée. Comme l’a constaté un chroniqueur fort avisé: «Les fondements de l’après-guerre - la réconciliation, la solidarité face au danger communiste, la reconstruction - sont devenus de purs ornements». Face à cette morosité ambiante, nos structures démocratiques donnent souvent une impression de blocage et d’impuissance.

Comment expliquer ces doutes, ce désarroi, ces jugements négatifs? Certains philosophes, tel le Français Marcel Gauchet, nous disent que c’est dû au moment, c’est-à-dire à notre époque faite de changements de cap gigantesques.

Quand le changement est relativement lent, comme cela fut le cas dans les années 1970 et 1980, l’adaptation se fait sans trop de peine. En revanche, quand il produit un bouleversement des repères traditionnels, comme celui que nous connaissons en particulier à travers la mondialisation, c’est une autre affaire! Il faut digérer les ruptures, réinventer de nouvelles balises, reconstruire des instruments. Bref redéfinir des perspectives et des visions.

Il me plaît de rappeler à ce propos une réflexion de Michel Rocard. Je le cite: «L’un des drames de l’Europe tient au fait qu’elle est vouée à l’intendance». Et de fait, il convient de reconnaître avec l’ancien Premier ministre qu’il est attristant et par conséquent fort peu mobilisateur pour l’esprit de nos citoyens, en particulier pour les jeunes, que l’Union soit le domaine privilégié de l’argent, du capital, de l’investissement, des normes et des subventions.

Force est d’admettre qu’il s’agit là de domaines certes importants, mais ô combien arides, qui ne sauraient guère susciter beaucoup d’émotion. Or, rappelons-nous que dès le début de la construction européenne, rien n’aurait été possible sans la conjugaison d’une vision du cœur et de la compétence.

Avec l’émergence de cette grande Europe, le moment n’est-il pas venu de se poser la question centrale qui demeure toujours la même: pourquoi voulons-nous vivre ensemble et partager tout ou partie de notre destin?

À coup sûr la réponse ne va pas de soi. Ce sont 450 millions d’êtres humains, avec leurs décisions propres et leurs ambitions, avec leurs faiblesses et leurs passions, mais surtout avec leurs forces et leurs qualités prodigieuses, qui sont le véritable enjeu. Pourtant, ces êtres humains sont censés partager une même destinée historique sur un même territoire: notre Europe.

L’aventure européenne ne peut se conjuguer qu’autour de peuples et de nations, traduction de notre grande diversité. Chacune de ces nations représente un territoire avec ses beautés et ses richesses, mais aussi avec ses cicatrices que le temps a inscrites dans nos mémoires.

En faisant la part de ce qui doit être conservé et de ce qu’il faut considérer comme obsolète, la première tâche de notre Union est de concilier l’héritage du passé avec les défis du futur. C’est à partir d’elle-même, de sa façon d’avancer et de se construire, qu’elle doit à présent inventer sa légitimité.

Face à de puissants pôles de développement, comment surmonter les risques d’un déclin que personne n’est en mesure de maîtriser individuellement? Mais surtout, comment réunir dans la solidarité les conditions pour un nouvel essor? Posée en ces termes, cette renaissance de l’Europe - à laquelle il y a lieu d’identifier notre ambition collective - devrait être le projet de société des générations qui s’apprêtent à prendre la relève.

Pour convaincre nos citoyens, rappelons-nous que le bien-être et la prospérité d’un peuple ne sauraient se comptabiliser exclusivement en termes de PIB. Veillons aussi à ne pas construire une Europe bénéfique pour quelques-uns et où prolifèrent simultanément des situations d’exclusion sociale, de violence sous toutes ses formes, de chômage et de désintérêt pour la préservation de notre environnement.

Rappelons-nous aussi que la meilleure courbe de croissance n’a que peu d’intérêt si elle ne traduit pas par un meilleur accès aux biens les plus élémentaires que sont l’enseignement, la culture, la santé, la justice sociale et surtout le travail!

(Applaudissements)

Pour définir ce projet de société, la meilleure méthode reste le débat démocratique. Ce débat ne peut à l’évidence se limiter à ce Parlement, comme, du reste, vous l’avez souhaité avec beaucoup de pertinence dans votre résolution sur le traité établissant une Constitution pour l’Europe.

Comme il y est indiqué, il convient de promouvoir, avec le concours des organisations civiles, de nos sociétés, l’implication active des citoyens dans les discussions portant sur la ratification. Je me réjouis de constater que votre message n’est pas resté lettre morte. Au contraire, reconnaissons que les débats sont animés. Les thèses défendues et les options avancées laissent parfois, il est vrai, un espace démesuré à la démagogie voire à des contrevérités.

(Applaudissements)

Je ne peux que souhaiter que les éminents membres de cette Assemblée s’investissent directement et qu’au-delà des appartenances politiques, apparaisse une même ambition: faire de l’Europe l’acteur de sa propre histoire. Je ne fais que répéter ce que mon père vous a dit à ce titre en 1990: «Vous êtes les mandataires élus de nos pays. Sachez mobiliser et entraîner derrière vous toutes les forces créatrices».

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, pour pouvoir vivre ensemble, il nous faut mieux nous comprendre. Pour cela, nous devons nous enrichir de nos diversités.

Le peuple luxembourgeois est en quelque sorte, au regard de sa spécificité sociologique, «condamné» à découvrir l’autre. Ceci est également vrai pour ce qui est de sa prospérité. Dans les innombrables déplacements que j’ai effectués durant les vingt-cinq dernières années et qui m’ont conduit à visiter tous les continents, j’ai très vite compris que le Grand-Duché en tant que tel ne pouvait susciter à lui seul l’intérêt d’investisseurs potentiels.

En revanche, le fait que mon pays, certes modeste par sa taille, se trouve au centre de l’Union et solidement ancré dans cet espace privilégié fut souvent décisif dans nos démarches de modernisation et de diversification de notre économie.

Pour le Luxembourg, le choix de l’Europe reste de ce fait un choix naturel. L’histoire nous a montré que l’existence de notre nation à l’état isolé pouvait à n’importe quel moment être remise en question, qu’elle aurait pu disparaître et cela elle le sait. Nous mesurons notre privilège d’État membre fondateur de la construction européenne.

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, pour conclure il me plaît de livrer à votre jugement une réflexion de Milan Kundera, qui s’est exprimé en ces termes très peu de temps après la chute du communisme: «Il me semble souvent - disait-il - que la culture européenne connue recèle une autre culture inconnue, celle des petites nations.[...] On suppose que les petits sont nécessairement les imitateurs des grands. C’est une illusion. Ils sont même très différents.[...] L’Europe des petites nations est une autre Europe, elle a un autre regard et sa pensée forme souvent le vrai contrepoids de l’Europe des grands».

(Applaudissements)

Mon intention aujourd’hui était aussi de rappeler ce particularisme tout en vous remerciant pour votre attention.

(L’Assemblée, debout, applaudit son altesse royale le Grand-Duc Henri de Luxembourg)

 
  
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  Le Président. - Au nom du Parlement européen, je voudrais vous remercier, Sire, des propos que vous avez tenus et qui témoignent de votre connaissance profonde de notre intégration politique, dont votre pays est un acteur et un témoin privilégié.

Vos propos sont également un encouragement pour le travail quotidien de cette institution et il ne me reste qu’à vous souhaiter, à vous et à votre épouse, un agréable séjour à Strasbourg durant le reste de votre visite parmi nous.

(Applaudissements)

(La séance solennelle est levée à 12h30)

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. ONESTA
Vice-président

 

13. Explications de vote
  

Rapport Berès (A6-0094/2005)

 
  
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  Luís Queiró (PPE-DE), par écrit. - (PT) J’ai voté en faveur de ce rapport, d’abord parce que toutes les règles en vigueur garantissant la bonne participation des États membres au processus ont été respectées et, ensuite, parce que le Parlement a livré une évaluation favorable du candidat approuvé.

 
  
  

Rapport Wojciechowski (A6-0096/2005)

 
  
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  Hélène Goudin, Nils Lundgren et Lars Wohlin (IND/DEM), par écrit. - (SV) Nous sommes opposés à la politique agricole commune telle qu’elle se présente aujourd’hui et dénonçons les changements qui, sur le plan des principes, ne revêtent guère d’importance dans le système en vigueur. Nous demandons un réexamen en profondeur et la refonte de la politique agricole commune dans son ensemble et trouvons donc qu’il est difficile d’isoler certains domaines, tel que le sujet actuellement soumis au vote.

Nous sommes d’avis que le contingentement pour la production de fécule de pomme de terre, soumis à nos suffrages, ne doit en aucun cas être étendu. L’UE doit au contraire abolir tous les systèmes de contingentement dans le domaine de l’agriculture.

 
  
  

Rapport Zappalà (A6-0119/2005)

 
  
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  Ilda Figueiredo (GUE/NGL), par écrit. - (PT) Aujourd’hui, le Parlement a adopté la position commune sur la proposition de directive présentée par la Commission en 2002. Beaucoup d’eau a passé sous les ponts entre-temps et un certain nombre d’aspects qui n’étaient pas couverts par le texte initial y figurent désormais.

La version actuelle traite de plusieurs situations - les professions salariées et libérales, la prestation temporaire de services et les professions «réglementées» (médecins, infirmières, architectes) -, bien que sous des angles différents.

Divers amendements visent aussi à définir le rôle des associations professionnelles traitant de la question de la reconnaissance des qualifications et à la mise en place d’un comité unique à cette fin. Les amendements visent aussi à la représentation des professions au sein du nouvel organe et à l’instauration d’une carte professionnelle individuelle reprenant des informations sur la carrière professionnelle du titulaire.

 
  
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  Hélène Goudin, Nils Lundgren et Lars Wohlin (IND/DEM), par écrit. - (SV) Nous soutenons les structures et les règles qui évitent toute discrimination à l’égard de ressortissants d’autres pays sur le marché du travail. Nous sommes des partisans sincères d’un marché intérieur flexible et ouvert au sein de l’UE. Nous pensons toutefois qu’il devrait revenir aux différents États membres de juger des qualifications professionnelles qui doivent faire l’objet d’une reconnaissance mutuelle. Malheureusement, la directive ne tient pas suffisamment compte des besoins nationaux et des conditions essentielles. Les systèmes éducatifs varient d’un État membre à l’autre et, dans la pratique, il est donc difficile de reconnaître l’ensemble des qualifications professionnelles. Nous soutenons l’amendement qui recommande que la directive ne s’applique pas aux notaires dans l’exercice de leurs prérogatives publiques.

 
  
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  Alexander Lambsdorff, Barbara Weiler et Joachim Wuermeling (PPE-DE), par écrit. - (DE) En l’état, cette directive n’apporte pas encore de solution satisfaisante à un problème qui se pose quant aux qualifications professionnelles allemandes. Après modification de la législation allemande, cette directive aura pour conséquence de voir les qualifications allemandes de compagnon (Geselle) et de maître artisan (Meister) placées dans la même catégorie, alors que les maîtres artisans sont tenus de suivre une formation supplémentaire exigeante étendue sur de nombreuses années.

Il serait cependant possible d’insérer la qualification de maître artisan dans une catégorie plus élevée en l’incluant dans l’annexe II de la directive. Nous avons voté en faveur du compromis dans l’espoir que le comité pour la reconnaissance des qualifications professionnelles, qui - en vertu de l’article 58 de la directive - aura la charge de ces questions, répondra à cette requête avant la fin du délai de transposition.

 
  
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   Marine Le Pen (NI), par écrit. - La reconnaissance des qualifications professionnelles au sein de l’Union serait un réel progrès si elle ne s’inscrivait pas dans une stratégie plus large visant à l’élimination des frontières nationales qui sont considérées comme autant d’obstacles à la libre circulation des biens et des personnes. Le nomadisme est désormais promu au rang de valeur communautaire en faisant de la mobilité géographique et professionnelle, l’alpha et l’oméga, du nouvel homme européen.

Le système de reconnaissance des qualifications devra s’adapter aux changements qui pourraient se produire dans le monde du travail ou dans les systèmes d’enseignement, conformément à la philosophie ultralibérale qui anime les institutions européennes. Dans cet esprit, la Commission a défini une politique sociale très particulière qui encourage la qualification et la mobilité des travailleurs sur des conditions minimales de formation censées permettre une meilleure adaptabilité aux marchés du travail.

D’autre part, des organismes réglementaires et professionnels ont exprimé de nombreuses préoccupations concernant l’avenir de certaines professions et la qualité des formations dispensées selon les pays, notamment en matière de santé publique.

Enfin, la directive sur la reconnaissance des qualifications professionnelles est la conséquence de celle sur la libéralisation des services. Autant dire que la directive Bolkestein est plus que jamais d’actualité!

 
  
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  Lulling (PPE-DE), par écrit. - Nous avons besoin d’une directive relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles pour assurer la liberté d’établissement et la libre prestation de services dans le marché unique sans discrimination en ce qui concerne le niveau de qualifications professionnelles. Ce principe n’est pas contesté. Il faut éviter de faire un amalgame avec la fameuse proposition de directive «Bolkestein» dont l’objectif est de créer un véritable marché unique des services et dont nous discuterons ici-même au cours des prochains mois pour l’amender là où elle doit l’être.

Pour ce qui est des amendements qui nous sont soumis dans le cadre du projet de recommandation pour la deuxième lecture, je partage la préoccupation des milieux artisanaux de mon pays, qui redoutent une dévalorisation des qualifications professionnelles exigées au niveau de l’établissement, non compatible avec la stratégie de Lisbonne et l’importance de la formation y soulignée. Le souci légitime de faire fonctionner un véritable marché unique ne doit jamais conduire à un nivellement par le bas. Il est dans l’intérêt bien compris des entreprises et des consommateurs d’assurer des produits et des services qualifiés. Voilà pourquoi j’ai voté pour les amendements qui ont justement pour but de renforcer la sécurité juridique des agents économiques.

 
  
  

Rapport Herranz García (A6-0121/2005)

 
  
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  Ilda Figueiredo (GUE/NGL), par écrit. - (PT) Nous avons voté pour ce rapport parce qu’il propose d’améliorer le fonctionnement des organisations de producteurs via l’introduction d’un système de gestion des crises et la promotion des fruits et légumes et de leurs variétés locales, attendu que la consommation de fruits et légumes apporte une contribution positive à la santé publique.

Je conviens avec le rapporteur qu’il nous faut promouvoir la mise en place d’organisations de producteurs dans les régions où ce type d’activité est très peu présent, comme dans le cas du Portugal. Je souhaite aussi souligner l’importance qu’il y a à garantir la sécurité juridique aux organisations de producteurs et à simplifier leurs procédures de contrôle par la mise en place de critères harmonisés en matière de vérifications opérées par les diverses autorités nationales et communautaires sur les programmes opérationnels.

Nous saluons aussi «la mise en place d’un système efficace de gestion des crises de marché afin d’éviter le désarroi de tout un secteur en cas de fortes chutes des prix». Pour ce qui est de sa mise en œuvre dans la pratique et de la «caisse de sécurité»’ évoquée dans le rapport, cela devrait passer intégralement par des ressources communautaires, car cela constituerait la solution la plus équitable à cette situation.

 
  
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  Hélène Goudin, Nils Lundgren et Lars Wohlin (IND/DEM), par écrit. - (SV) Le rapport vise à simplifier l’organisation communautaire du marché des fruits et légumes. Toutefois, il laisse inchangées les structures existantes de la politique agricole commune. Nous ne pouvons par conséquent pas approuver ce rapport.

 
  
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  Luís Queiró (PPE-DE), par écrit. - (PT) Tout le monde sait que l’agriculture est très importante pour le Portugal. Dans ce contexte, mon pays devrait chercher à protéger un domaine qui dépasse les intérêts d’une profession spécifique et touche à ceux de la nation dans son ensemble. J’ai donc voté pour ce rapport, car j’estime que cette proposition répond aux attentes des organisations de producteurs et car je plaide pour la mise en place d’un modèle idoine pour le régime d’aide aux produits transformés.

 
  
  

Rapport Cercas (A6-0105/2005)

 
  
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  Joseph Muscat (PSE). - (MT) J’ai voté contre la suppression de la clause de renonciation (opt-out), destinée à permettre à un travailleur de travailler plus de huit heures supplémentaires par semaine pour des raisons pratiques, en fonction des besoins des travailleurs et de l’industrie maltaise. Sur ce point, un consensus existe entre tous les partenaires sociaux du pays.

Je suis favorable à ce que nous limitions le temps de travail et générions un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie familiale. Vous devez cependant comprendre que, dans notre pays, il n’y a pas de marché de la location, alors même que les terrains sont rares et chers. Chaque cellule familiale, en particulier les jeunes, empruntent des milliers de livres sterling pour acquérir un lieu où vivre. Ils s’engagent pour de nombreuses années à verser d’importantes sommes d’argent - qui constituent une bonne part de leurs revenus, dont ceux des heures supplémentaires - afin de payer leur maison ou leur appartement.

Nombre de ces familles se retrouvent dans une situation - qu’elles n’ont pas voulue, mais qui est dictée par le marché - de dépendance substantielle vis-à-vis des revenus tirés des heures supplémentaires, non pas pour se permettre des caprices, mais pour satisfaire à ces engagements. Les familles les plus vulnérables sont les familles à faibles revenus.

Limiter le nombre d’heures supplémentaires ne les aiderait pas, mais reviendrait à les clouer davantage à la croix. Qui leur donnera l’argent dont ils ont besoin? L’Union européenne? Le parti travailliste avait attiré l’attention sur ce problème et nous sommes là pour tenter de le résoudre. Je crains fort cependant que la pente soit raide.

 
  
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  John Attard-Montalto (PSE). - (EN) Monsieur le Président, je souhaite expliquer pourquoi je n’ai pas voté conformément à la ligne du parti sur la plupart des amendements au rapport Cercas. La raison en était qu’après avoir pris en considération les réunions informelles tenues avec les principaux syndicats de mon pays, il en a résulté qu’à l’heure actuelle, Malte n’est pas économiquement en mesure de mettre en œuvre la directive sur le temps de travail.

Comme l’a expliqué mon collègue qui vient de s’adresser à cette Assemblée, les classes sociales à bas revenus ne seraient pas en mesure d’honorer leurs engagements si leurs revenus n’étaient pas complétés par les heures supplémentaires et d’autres prestations.

 
  
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  Carlo Fatuzzo (PPE-DE). - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, j’ai demandé à un échantillon représentatif des 20 millions de retraités italiens, dont un grand nombre m’ont élu au Parlement européen afin de les représenter, comment je devrais voter sur la question de la réduction du temps de travail. Ledit échantillon a répondu ce qui suit: «certains veulent nous faire travailler toute notre vie durant, chaque année de notre vie professionnelle, plus autant de mois, de semaines, de jours et d’heures de la journée qu’il est possible et concevable d’exiger, et - comme si cela ne suffisait pas - ils voudraient que nous touchions notre pension le moins longtemps possible et que le montant soit aussi faible que possible. La seule chose que nous puissions espérer est d’être au moins en mesure de travailler aussi peu que possible durant la journée de travail.» J’ai donc voté en faveur du rapport Cercas et des amendements qui visent à la réduction du temps de travail.

 
  
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  James Hugh Allister (NI), par écrit. - (EN) J’ai voté contre ce rapport relatif à la directive sur le temps de travail parce qu’il y est question que les travailleurs perdent leur droit à choisir d’être exemptés de la semaine de travail de 48 heures maximum. Cette proposition représente une ingérence intolérable dans la liberté individuelle de choix et la liberté individuelle tout court, et caractérise bien l’état d’esprit de Bruxelles, qui consiste à vouloir nous dicter tous les aspects de notre vie socio-économique.

Malheureusement, l’amendement visant à préserver la clause d’opting-out n’a pas été adopté, et le reste de l’Europe se met donc en ordre de bataille pour nous imposer une directive sur le temps de travail dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle n’est pas du tout soutenue au Royaume-Uni. C’est l’un des insupportables fardeaux de l’adhésion à l’Union européenne, et une mise en garde salutaire contre le contrôle grandissant de Bruxelles que la nouvelle Constitution voudrait nous imposer, étant donné le dogme socio-économique qu’elle contient dans sa partie III.

 
  
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  Derek Roland Clark (IND/DEM), par écrit. - (EN) Les parlementaires du parti UKIP (parti de l’indépendance du Royaume-Uni) ont voté CONTRE l’amendement 37, car la directive sur le temps de travail est déjà en vigueur et continuera d’exister. Nous visons par conséquent à atténuer les pires de ses aspects. Il est actuellement possible de déroger à la semaine de 48 heures lorsqu’un individu ou un groupe signe un accord avec l’employeur. La Commission européenne souhaite conserver les possibilités de dérogation, le rapport Cercas entend les éliminer.

L’amendement 37 était présenté comme une «proposition de rejet de la proposition de la Commission». En votant contre cet amendement, le parti de l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP) cherchait à rétablir la position de la Commission, et donc à conserver les possibilités de dérogation.

 
  
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  De Keyser (PSE), par écrit. - À l’heure où le Traité constitutionnel exige de la gauche un OUI de combat, je considère que les amendements que le rapport CERCAS a su imposer à la directive sur le temps de travail sont une victoire, tant la pression de la droite était forte. Mais cette victoire ne peut masquer le recul social qui persiste dans le texte voté aujourd’hui. En particulier:

1) l’opt out est maintenu pendant trois ans

2) l’annualisation du temps de travail ne sera plus négociée par les partenaires sociaux. C’est donc un recul sur un thème capital, celui du contrôle de la flexibilité.

3) certes, les périodes de temps «improductif» - garde,...- restent comptabilisées dans le temps de travail, mais des exceptions pourront permettre de les calculer de manière spécifique.

Le Traité constitutionnel veut introduire davantage de dialogue social, mais la directive actuelle le réduit. De plus, cette directive touche à un des acquis fondamentaux des luttes du siècle dernier: la réduction de temps de travail, et la régulation des heures à la journée. C’est la raison pour laquelle, tout en saluant les efforts de CERCAS et du groupe socialiste pour faire reculer l’ultralibéralisme dont la directive porte l’empreinte, j’ai voté pour l’abstention.

 
  
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  Proinsias De Rossa (PSE), par écrit. - (EN) Je soutiens entièrement le rapport Cercas en tant que pas important vers une semaine de travail de 48 heures dans l’ensemble des 25 États membres à partir de 2010. Il éliminera l’actuelle clause d’opting-out et mettra en place de nouvelles conditions strictes définissant de quelle manière le «temps de garde» peut être comptabilisé dans le cadre de la semaine de 48 heures. Le temps de travail restera calculé sur une période de 4 mois, avec des dérogations possibles pour calculer sur 12 mois - soumises à un contrôle plus sévère par l’intermédiaire de la négociation collective.

Une réglementation correcte du temps de travail constitue une pierre angulaire de l’Europe sociale. Elle permet de concilier vie professionnelle et vie familiale et s’attaque à une question importante concernant la santé et la sécurité.

Il est complètement aberrant qu’une clause d’opting-out soit possible en matière de législation sur la santé et la sécurité, et il importe qu’il y soit mis un terme aussi vite que possible. Le plus grand des risques est que cette clause d’opting-out soit étendue à tous les États membres, ce qui rendrait superflue la réglementation sur le temps de travail, et aurait pour conséquence une course vers le bas.

La date de 2010 indiquée pour la mise en œuvre donne aux deux parties de l’industrie le temps de négocier de nouveaux accords prenant en considération la semaine de 48 heures. La Confédération européenne des syndicats (CES) soutient entièrement ce rapport, car il offre aux travailleurs de toute l’Union européenne un compromis équitable.

 
  
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  Mia De Vits (PSE), par écrit. - (NL) Je me suis abstenue lors du vote sur le rapport Cercas portant sur la révision de la directive relative au temps de travail. Le texte de compromis adopté ne peut être considéré comme un progrès pour l’Europe sociale. Nous devrons rester très vigilants pour préserver les acquis sociaux.

Primo, la directive se fonde sur la flexibilité, et non sur la santé et la sécurité des travailleurs.

Secundo, même si l’opt-out, qui permet aux États membres de s’écarter des dispositions en vigueur en matière de temps de travail, prendra fin à terme (3 ans), cela n’empêche pas les États membres qui en font la demande de préciser le temps de travail sur la base de contrats individuels et de contourner, ce faisant, les garanties sociales offertes par les accords négociés pendant trois ans.

Tertio, la possibilité ouverte en matière d’annualisation du temps de travail par voie législative revient à nier un droit exclusif de la concertation sociale.

Bien que le Parlement décrive le temps de garde comme du temps de travail, les périodes inactives du temps de garde peuvent être soumises à un «mode de calcul spécifique» (via une convention collective ou une disposition légale), sans aucune garantie pour les travailleurs concernés.

Par ailleurs, la division entre périodes actives et inactives du temps de garde menace d’être étendue à d’autres secteurs.

 
  
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  Ilda Figueiredo (GUE/NGL), par écrit. - (PT) Nous nous réjouissons de ce que le Parlement n’a pas adopté un grand nombre des propositions contenues dans la position de la Commission à propos de la nouvelle directive sur le temps de travail, qui constitue l’un des aspects les plus dangereux des attaques menées contre les droits des travailleurs et menace les conquêtes faites au cours d’une lutte plus que centenaire, affectant des millions de travailleurs et leurs familles.

Nous saluons la suppression de l’opt-out, trois ans après l’adoption d’une nouvelle directive, à laquelle nous avons contribué.

Nous regrettons profondément qu’une classification de période inactive ait été acceptée et qu’il ne soit pas tenu compte des arrêts de la Cour de justice. Cela ouvre la porte à la poursuite de la déréglementation sur le lieu de travail, ce qui compliquera encore la tâche en matière de conciliation entre vie privée et vie professionnelle et de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs. S’ajoute à cela la possibilité d’annualisation du temps de travail. D’où notre vote contre.

 
  
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  Hélène Goudin, Nils Lundgren et Lars Wohlin (IND/DEM), par écrit. - (SV) Pour des questions de principe intangibles, nous jugeons que l’UE ne devrait pas prendre de décisions quant à la durée du travail dans les États membres. C’est là une question qui doit être réglée par les parlements et les partenaires sociaux dans chaque État membre. Nous avons choisi de soutenir les amendements qui ouvrent la voie à une plus grande autodétermination nationale, mais votons contre la résolution dans son ensemble.

 
  
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  Louis Grech (PSE), par écrit. - (EN) Sur le principe, je suis d’accord avec la majorité des vues et des arguments exprimés dans ce rapport. Toutefois, à Malte, de nombreux travailleurs effectuent de longs horaires de travail parce qu’ils ont besoin de le faire pour joindre les deux bouts ou satisfaire d’autres engagements.

Dans certains domaines, la directive est inflexible et aurait des répercussions néfastes sur l’économie de notre petite île et sur tous ses acteurs.

La mise en œuvre de ce rapport pourrait nuire à nos tentatives visant à protéger les emplois et, éventuellement, à en créer sans égratigner le modèle social.

La possibilité de choix et la compétitivité des travailleurs, d’une part, ainsi que la fourniture efficace de services de santé publique et la création de conditions de sécurité, d’autre part, sont toutes vitales pour le bien-être du peuple maltais, et il n’est pas possible d’échanger l’une contre l’autre.

Il est par conséquent essentiel pour Malte de conserver le droit des individus à choisir de déroger.

Cette position jouit d’un large consensus à Malte, y compris auprès des syndicats.

Un large éventail de notre population ne considère pas ce rapport comme pouvant bénéficier à Malte. Pour toutes ces raisons j’ai donc le sentiment, pour ma part, qu’il n’est pas encore opportun de voter en faveur de ce rapport.

 
  
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  Richard Howitt (PSE), par écrit. - (EN) Ma propre région - l’est de l’Angleterre - subit les horaires de travail les plus longs de tout le Royaume-Uni, un dixième des personnes employées dans les transports travaillant plus de 60 heures par semaine, le même nombre d’opérateurs de machines travaillant plus de 56 heures par semaine, d’employés commerciaux qualifiés travaillant plus de 53 heures par semaine, et de travailleurs de la construction et de l’entreposage plus de 50 heures par semaine. Tout comme il était juste d’introduire le salaire minimum pour lutter contre le problème des salariés pauvres, il est temps à présent de mettre fin aux horaires de travail excessifs, qui voient les travailleurs intimidés et exploités, qui alimentent le stress et autres problèmes de santé, et qui nuisent à la vie familiale. C’est pourquoi je soutiens entièrement la fin, moyennant de nécessaires clauses de sauvegarde, de la possibilité pour le Royaume-Uni de déroger aux règles communautaires en matière de temps de travail.

 
  
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  Lang (NI), par écrit. - Le rapport Cercas, approuvé, malgré de nombreuses lacunes, par les élus du Front National, demande la suppression de la clause «d’opt out» que la Commission européenne proposait de maintenir. Cette clause permettant à certains États membres de repousser la durée légale du temps de travail hebdomadaire au-delà de 48 heures aggravait le dumping social européen. En effet dans une Europe sans frontières, les entreprises françaises soumises aux 35 heures ne pourraient pas résister à leurs concurrents installés dans les pays européens, appliquant la clause «d’opt out».

Cependant ne nous faisons pas d’illusions. L’adoption du rapport de monsieur Cercas n’est qu’une étape. Aujourd’hui en première lecture, le Parlement européen a fait reculer la Commission européenne car beaucoup de députés craignaient la sanction des électeurs français le 29 mai.

 
  
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  Lienemann (PSE), par écrit. - J’ai voté l’amendement 37 demandant le rejet de ce projet de directive qui conserve les points négatifs de la précédente législation comme l’opt-out et engage l’annulation du temps de travail.

Le rapporteur Monsieur Cercas cherche cependant à manifester l’intention du Parlement Européen d’obtenir l’abandon de l’opt-out d’ici trois ans, véritable poison pour l’avenir du droit social européen. Je crois nécessaire de le soutenir dans ce but. Je ne peux accepter néanmoins qu’en contre partie il permette le calcul des 48 heures maximum sur la base de 12 mois et permette le calcul et l’annualisation du temps de travail, tant exigée par le patronat ainsi qu’une réduction de la prise en compte du temps de garde.

Ce compromis n’est pas satisfaisant et ne constitue en rien une étape de progrès que nous serions en droit de l’Union Européenne. Il consacre même des reculs.

Nous sommes au début de la procédure législative et le vote en faveur du rapport Cercas n’est qu’un soutien à la démarche engagée pour l’abandon de l’opt-out. Néanmoins, à la fin de l’étape de codécision, je n’approuverai pas un texte de travail sur une base de 48 heures.

 
  
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  Kartika Tamara Liotard (GUE/NGL), par écrit. - (NL) Dans la pratique, la proposition de révision de la directive sur le temps de travail faite par la Commission européenne est préjudiciable pour des millions de travailleurs en Europe. L’opt-out demeure, alors qu’il est avéré qu’il mène à des semaines de travail plus longues et affecte la santé des travailleurs. Cette option devrait être supprimée au plus vite, de préférence en 2008, et je soutiens le compromis proposé par M. Cercas à cette fin. Nous estimons que l’extension de la période de référence de quatre mois à un an, avec des pics de semaines de 65 heures, est une manifestation féodale digne du XIXe siècle et c’est pourquoi nous devons nous en tenir à la période de référence de quatre mois. Enfin, il faut respecter l’arrêt de la Cour de justice européenne en ce qui concerne les temps de garde.

La Commission répond de manière unilatérale au souhait des entreprises, qui aspirent à une plus grande flexibilité. En fait, la semaine de travail de 48 heures, telle que nous la connaissons, est d’ores et déjà archaïque. La durée hebdomadaire du travail avoisine actuellement les 40 heures et la grande majorité des travailleurs aspire à la voir réduite. C’est pourquoi je plaide pour une norme européenne en matière de temps de travail, afin de poursuivre la redistribution du travail et de mieux concilier travail, vie de famille, prise en charge et éducation.

 
  
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  Lulling (PPE-DE), par écrit. - Je considère qu’il est nécessaire de modifier la directive de 1993 sur l’aménagement du temps de travail pour mieux répondre aux nouvelles réalités. Mais elle devra assurer un niveau élevé de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, donner aux entreprises une plus grande flexibilité dans la gestion du temps de travail, permettre une meilleure compatibilité entre vie professionnelle et vie familiale.

Cela sonne comme si l’on voulait résoudre la quadrature du cercle. J’estime que notre contribution devrait permettre un allongement des périodes de référence. Je suis pour l’annualisation qui peut aussi intéresser les travailleurs et qui permettra de faire face aux fluctuations de la demande, notamment saisonnière.

Concernant le problème du temps de garde, j’aurais pu vivre avec la proposition de la Commission qui respecte le principe de subsidiarité parce qu’elle stipule que la période inactive du temps de garde n’est pas considérée comme temps de travail, à moins que la loi nationale ou une convention collective n’en dispose autrement.

Enfin, je considère que le maintien de la clause de l’opt-out est incompatible avec l’objectif de la directive.

 
  
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  Cecilia Malmström (ALDE), par écrit. - (SV) Le temps de travail est une chose qui doit être réglée par la législation nationale et que l’UE ne doit pas prendre en charge. Toutefois, il existe d’ores et déjà au niveau communautaire une directive qui réglemente le temps de travail, et la présente directive vise à amender ce texte. Le parti libéral s’est donc déclaré favorable à ce qu’on veille à ce que les différentes règles de la directive sur le temps de travail soient aussi constructives que possible. Nous avons défendu le principe de subsidiarité et un marché du travail qui soit flexible tout en protégeant la santé des employés.

Malheureusement, le Parlement a fait passer une réglementation aussi volumineuse que détaillée, dont nous pensons qu’elle pourrait nuire aux petites entreprises en Europe. C’est pourquoi nous avons rejeté la proposition dans son ensemble.

 
  
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  Toine Manders (ALDE), par écrit. - (NL) À la suite de l’adoption de l’amendement 10, la délégation néerlandaise du parti populaire pour la liberté et la démocratie a jugé devoir voter contre la proposition de la Commission relative à l’aménagement du temps de travail telle qu’amendée. Aux yeux de la délégation du VVD, le fait que l’Europe impose de considérer comme du temps de travail l’intégralité du temps de garde, y compris les périodes inactives et les périodes de repos, est un exemple d’ingérence bruxelloise qui ne fera qu’aliéner davantage le soutien à l’Europe, au moment même où elle en a le plus besoin.

 
  
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  David Martin (PSE), par écrit. - (EN) Je félicite mon collègue, M. Cercas, pour son excellent rapport.

Il est parvenu à un compromis admirable entre les besoins d’un marché du travail flexible et la protection des travailleurs, à titre individuel, contre les dommages que les longs horaires de travail peuvent causer à leur santé et à leur sécurité, ainsi qu’à l’équilibre entre vie professionnelle et vie familiale.

L’annualisation de la semaine de 48 heures permettra aux entreprises de faire face aux fluctuations saisonnières, aux augmentations subites de la demande ou aux situations de crise.

L’employé se verra garantir des horaires raisonnables répartis sur l’ensemble de l’année.

La fin de la possibilité de dérogation offrira une protection aux travailleurs qui, avec la directive actuelle, sont soumis à une pression qui les pousse à abandonner leurs droits.

 
  
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  Andreas Mölzer (NI), par écrit. - (DE) Les solutions appliquées avec succès par le passé ne suffisent plus à surmonter les problèmes auxquels nous faisons face actuellement en matière de hausse du chômage et de conjoncture chancelante.

La relation d’emploi «normale» est de moins en moins la norme et la société dans laquelle nous vivons gagne sans cesse en flexibilité, ce qui se traduit par de nouveaux modes d’organisation du temps de travail, tels que le travail à temps partiel et les comptes épargne-temps. Ceux qui veulent faire carrière n’ont d’autre choix que la flexibilité.

Dans le même temps, nous sommes cependant confrontés au problème de la baisse du taux de natalité en Europe: tenter d’inverser la tendance par le recours à l’immigration serait une erreur désastreuse. À cet égard, l’équilibre entre travail et vie familiale jouera un rôle de plus en plus essentiel.

Les parents sont souvent poussés dans leurs derniers retranchements pour concilier travail et devoirs familiaux. La flexibilité du temps de travail ne profitera aux entreprises et aux familles qu’à la condition d’apporter les changements nécessaires aux structures d’assistance, telles que celles de prise en charge d’enfants, afin de permettre de tels changements. Si certains pères et certaines mères de jeunes enfants se voient contraints d’arrêter de travailler, l’Europe pourrait bien avoir d’ores et déjà loupé le coche.

 
  
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  Claude Moraes (PSE), par écrit. - (EN) Aujourd’hui, les députés européens du parti travailliste ont voté pour un paquet de compromis sur le temps de travail proposé par les groupes PSE et PPE-DE du Parlement européen. Celui-ci sera maintenant soumis aux gouvernements pour être examiné dans le cadre du Conseil de l’Union européenne. Il est conforme à notre vote de 2004, et soutient le principe qui se trouve au cœur de cette directive, à savoir la santé et la sécurité des travailleurs, ainsi que l’objectif consistant à permettre de concilier vie professionnelle et vie familiale et à augmenter la productivité.

Les députés européens du parti travailliste comprennent les difficultés d’adaptation rencontrées par le Royaume-Uni et d’autres pays, mais grâce à certaines dispositions contenues dans le rapport, telles que l’extension de la période de référence à 12 mois, ces difficultés sont surmontées.

Nous reconnaissons que le temps de garde équivaut au temps de travail, comme l’a stipulé la Cour de justice des Communautés européennes dans les dossiers SIMAP et Jäger. Ces arrêts, qui représentent un tournant, ont des conséquences pour le National Health Service et les systèmes de santé des États membres, mais, en autorisant les États membres à calculer eux-mêmes cette partie du temps de travail, le paquet de compromis que nous sommes parvenus à définir est suffisamment flexible.

Les députés européens du parti travailliste espèrent qu’un vote positif lors de la première étape de la procédure garantira l’adoption d’un rapport sur le temps de travail qui sauvegarde la santé et la sécurité des travailleurs, fasse de l’équilibre entre vie professionnelle et vie familiale une réalité, tout en prévoyant un degré de flexibilité nécessaire.

 
  
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  Luís Queiró (PPE-DE), par écrit. - (PT) La divergence claire entre le vote intervenu en commission en charge des questions d’emploi et celui intervenu au sein de la commission responsable des questions industrielles est, en soi, symptomatique du déséquilibre qu’on retrouve dans la version soumise au vote et dans nombre des amendements déposés.

Pour ma part, j’ai confiance dans un modèle qui préserve avant toute chose le principe de subsidiarité et offre aux États membres une marge suffisante pour adapter les règles en matière de temps de travail à leur situation économique spécifique. La priorité est de pouvoir s’adapter en toutes circonstances aux réalités économiques et aux besoins spécifiques de chaque pays, pour autant que soient respectées des valeurs fondamentales, car c’est là l’un des principes directeurs essentiels de la législation nationale et c’est certainement vrai dans le cas du Portugal.

En tout état de cause, toute réglementation faisant preuve d’une rigidité excessive est nuisible à l’économie, à l’industrie et au secteur des services et, partant, affecte tant les travailleurs que les personnes à la recherche d’un emploi.

 
  
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  Kathy Sinnott (IND/DEM), par écrit. - (EN) Dans le rapport sur le temps de travail, comme dans tout rapport relatif au travail, je vérifie si la main-d’œuvre la plus importante en Europe, à savoir les personnes au foyer, est prise en considération. Or, elle ne l’est pas.

C’est particulièrement triste, car un document qui traite du nombre d’heures durant lesquelles quelqu’un travaille au cours de la semaine s’applique à ces personnes plus qu’à tout autre catégorie de travailleurs dans l’Union européenne. Nous aurions pu, et aurions dû, examiner des questions telles que le «temps de garde» concernant les personnes au foyer. C’est là beaucoup plus qu’une occasion manquée. C’est de la discrimination et de l’exclusion à l’encontre de personnes qui effectuent de longs, longs horaires de travail, de personnes qui sont toujours en temps de garde.

Pouvons-nous décider d’examiner la situation des personnes au foyer et de les inclure à l’avenir dans nos recommandations sur le travail? Pouvons-nous arrêter toute discrimination à l’encontre de cette importante main-d’œuvre qui se voit déjà confrontée à une discrimination dans le domaine des revenus?

 
  
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  Konrad Szymański (UEN), par écrit. - (PL) Ma position dans ce dossier est fondée sur la conviction que le temps de travail hebdomadaire, élément essentiel de la vie économique et sociale dans les États membres de l’UE, ne doit pas être réglementée au niveau européen.

Le temps de travail s’inscrit dans le cadre du droit du travail, adopté dans tout pays démocratique par un parlement représentant toutes les parties concernées dans la politique de l’emploi. Cela suffit à garantir le respect des droits des employés et des employeurs.

Le vote d’aujourd’hui est à marquer d’une pierre noire pour les entreprises et la prospérité européennes. Le «oui» prononcé par la gauche et les libéraux implique l’adoption par cette Assemblée de la proposition de renforcement de la directive sur le temps de travail. Ce texte deviendra à l’avenir l’un des actes législatifs européens les plus dommageables, car il revient tout bonnement à transférer les problèmes rencontrés par les économies française et allemande à l’ensemble des autres pays, et notamment aux pays opposés à de telles mesures, tels que la Pologne, la Grande-Bretagne et l’Irlande. Les médecins, les infirmières et certains journalistes seront les plus durement touchés par les restrictions imposées en matière de temps de travail hebdomadaire et l’inclusion des périodes de repos dans le temps de travail et, au bout du compte, la compétitivité de l’économie européenne en pâtira encore un peu plus.

En l’occurrence, les tentatives du Parlement de justifier son choix en évoquant la stratégie de Lisbonne sont le comble de l’hypocrisie.

 
  
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  Georgios Toussas (GUE/NGL), par écrit. - (EL) Le groupe parlementaire du parti communiste grec votera contre la directive sur «l’aménagement du temps de travail», car il s’agit d’une attaque vengeresse de l’UE, des gouvernements urbains et des grandes entreprises contre les droits de la classe laborieuse.

Le but des propositions avancées par la Commission et le rapporteur est de saper la notion de temps de travail en introduisant deux nouveaux termes - périodes «actives» et «inactives» du temps de garde - et une plus grande flexibilité du temps de travail, afin d’accroître les profits des grandes entreprises.

Le temps désigné sous le nom de période inactive du temps de garde n’est pas assimilé à du temps de travail, alors que l’employé est à la disposition de l’employeur.

La boîte de Pandore a donc été ouverte et le droit du travail annihilé. La définition du temps de travail et la durée de la journée de travail font l’objet d’une lutte des classes entre les travailleurs et le grand patronat depuis de nombreuses années.

Les conséquences pour la classe laborieuse sont douloureuses: davantage de travail non rémunéré, imposé au gré des besoins de la production capitaliste, sapant de ce fait les conventions collectives de travail; intensification de l’esclavage; augmentation des accidents du travail; aggravation des conditions d’assurance et de pension; réductions draconiennes du temps libre pour les activités sociales et éclatement de la vie familiale.

Le parti communiste de Grèce contribue à la reconfiguration et au renforcement de l’orientation du mouvement ouvrier en fonction des classes sociales, afin d’engager des changements radicaux et de satisfaire les besoins actuels des travailleurs et des classes les plus modestes de la société.

 
  
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  Anders Wijkman (PPE-DE), par écrit. - (SV) La question de la réglementation du temps de travail est complexe. Pour l’essentiel, ma conviction vis-à-vis de cette directive est que les questions de cet ordre devraient avant tout être réglées à l’échelon national. Dès lors, lorsque la proposition relative à l’opt-out - règle qui, par ailleurs, n’est pas appliquée en Suède - a été rejetée, au même titre que la proposition visant à calculer le temps de travail moyen sur une période de plus de quatre mois, j’ai jugé bon de voter contre la proposition dans son ensemble.

 
  
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  Le Président. - Nous en avons à présent terminé avec la explications de vote. Je vous signale que la séance reprendra tout à l’heure à 15 heures avec les déclarations sur le futur de l’Europe soixante ans après la seconde guerre mondiale.

 

14. Corrections de vote: cf. procès-verbal
  

(La séance, suspendue à 12h40, est reprise à 15 heures)

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. BORRELL FONTELLES
Président

 

15. Approbation du procès-verbal de la séance précédente: cf. procès-verbal

16. Futur de l’Europe soixante ans après la seconde guerre mondiale
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  Le Président. - L’ordre du jour appelle les déclarations sur le futur de l’Europe soixante ans après la Seconde Guerre mondiale.

Comme vous vous en souviendrez, lundi dernier, jour qui coïncidait avec la journée de l’Europe, j’ai fait une déclaration sur la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe. En outre, ce mois de mai marque aussi le premier anniversaire de l’adhésion de dix nouveaux pays.

Étant donné cette triple coïncidence, la conférence des présidents a décidé de tenir aujourd’hui un débat sur le futur de l’Europe soixante ans après la Seconde Guerre mondiale, qui soit plus qu’une simple commémoration, plus qu’un simple coup d’œil en arrière: un coup d’œil vers notre futur sur la base du souvenir de notre passé.

MM. Juncker et Barroso sont ici pour l’introduire …

(Applaudissements)

... ils étaient récemment à Moscou pour assister aux manifestations organisées pour commémorer la fin de la guerre et ils nous rejoignent à présent pour ce débat qui, comme je l’ai dit - et j’insiste sur ce point - tentera d’anticiper notre avenir et pas seulement de rappeler le passé.

Nous vous remercions pour les efforts que vous avez consentis tous les deux afin d’être présents parmi nous. Votre présence ici rehausse sans conteste notre débat. Comme de coutume, je vous cède d’abord la parole.

 
  
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  Jean-Claude Juncker, président en exercice du Conseil - Monsieur le Président, Monsieur le Président de la Commission, Mesdames et Messieurs les Députés, soixante années se sont écoulées depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Ce souvenir du 8 mai 1945, date de la capitulation du IIIe Reich, est une ardente obligation et je voudrais féliciter le Parlement européen de ne pas avoir manqué aujourd’hui de se souvenir du 8 mai 1945.

L’obligation de se souvenir est une obligation ardente. Elle est surtout ardente, me semble-t-il, pour ceux qui sont nés après la Deuxième Guerre mondiale, les hommes et les femmes de ma génération. Et lorsque nous nous souvenons du 8 mai 1945, de la capitulation de la démocratie allemande en 1933 et de la période terrible qui sépare ces deux dates, nous devons le faire, nous les jeunes, du moins par rapport à la génération concernée, avec beaucoup de retenue.

Ceux qui, comme moi, sont nés après la Deuxième Guerre mondiale, en 1954, 1955 et plus tard, doivent se souvenir avec retenue parce qu’ils n’ont pas été les témoins directs de la tragédie qui s’était abattue sur le continent européen. Nous n’avons pas vu, comme l’ont vu ceux qui nous ont précédés, les camps de concentration et les prisons où furent tués, torturés et humiliés les hommes, jusqu’à leur abaissement le plus total. Nous n’avons pas vu, comme eux, les champs de bataille, parce que nous n’avions pas à les traverser, la mort dans l’âme, sans parler de la mort physique très souvent. Nous n’avons pas pu ni dû observer, comme eux ont pu et dû le faire, les longs cortèges de prisonniers de toutes les nations qui traversaient l’Europe, constituant en fait un seul cortège funèbre continental. Nous n’avons pas, nous qui sommes nés après la Deuxième Guerre mondiale, été confrontés à des choix dramatiques, individuels ou collectifs. Nous n’avions pas à dire non, nous n’avions pas à dire oui, nous pouvions vivre dans le soleil de l’après-guerre, tous les choix dramatiques nous ont été épargnés.

Se souvenir du 8 mai 1945 est un acte qui alimente la mémoire collective. C’est très important au moment où les souvenirs directs, où l’expérience vécue de la guerre ou de l’immédiat après-guerre - le vécu direct avec le paquet d’expériences personnelles et de sentiments nobles - sont en train de se transformer en histoire, avec tout ce que l’histoire par rapport aux souvenirs comporte de distance et de grilles de lecture soi-disant objectives. Aujourd’hui, les témoins directs de cette époque terrible de l’histoire continentale sont en train de disparaître. Émouvants, les vétérans russes sur leurs camions sur la place Rouge, émouvant ce long cortège de ceux qui ont fait la guerre pour eux et pour nous et qui, déjà aujourd’hui, ne savent plus marcher alors que tous, nous savons vers quoi ils sont en train de marcher. L’obligation de se souvenir est une obligation ardente.

Se souvenir, pour les hommes et les femmes de ma génération, veut dire également que nous devons nous souvenir avec retenue mais aussi avec beaucoup de reconnaissance. La reconnaissance, d’abord, pour la génération de nos pères et de nos grands-parents qui, revenus des champs de bataille, revenus des camps de concentration, libérés des prisons, avaient tant de raisons de baisser les bras, de ne rien faire, de pleurer sur leur sort. Mais ils ont reconstruit l’Europe et ils ont fait de l’Europe le plus beau continent qui soit. Soyons reconnaissants devant l’extraordinaire performance de la génération de ceux qui ont dû faire la guerre et qui ont voulu faire la paix!

(Applaudissements)

Lorsqu’on se souvient, lorsqu’on éprouve cette ardente obligation du souvenir, il faut aussi dire la vérité. Le 8 mai 1945 fut pour l’Europe une journée de libération.

(DE) Le 8 mai 1945 a été aussi un jour de défaite. La défaite du fascisme et du national-socialisme, ainsi que la fin de la capitulation de la démocratie face aux terribles événements qui avaient eu lieu depuis 1933. Mais par dessus tout, il s’est agi d’un jour de libération pour l’Allemagne.

(Applaudissements)

Je voudrais dire aux représentants élus du peuple allemand présents dans cette Assemblée que les Allemands n’ont jamais été d’aussi bons voisins qu’aujourd’hui.

(Applaudissements)

Dire la vérité, le 8 mai, le 9 mai, le 10 mai, c’est aussi se montrer reconnaissant à l’égard de ceux qui ont joint leurs forces et leur énergie aux forces et à l’énergie européennes pour libérer le continent européen. Je voudrais, avec soixante années non pas de retard mais de distance, dire combien nous les Européens nous devons être reconnaissants à ces jeunes soldats américains et canadiens qui, de l’autre côté de l’océan, sont venus en Europe pour libérer l’Europe, ignorant jusqu’à l’existence même d’un certain nombre de pays à la libération desquels ils ont contribué. Nous ne devrions jamais l’oublier.

(Applaudissements)

Ma remarque s’adresse aux soldats de l’Armée rouge. Quelles pertes! Quel nombre excessif de biographies interrompues parmi les Russes qui, pour la liberté de l’Europe, ont donné vingt-sept millions de morts! Nul n’est besoin d’être épris, bien que je le sois, d’un grand amour pour la Russie profonde et pour la Russie éternelle pour reconnaître que la Russie a bien mérité de l’Europe.

(Applaudissements)

Je voudrais rendre un hommage particulier à un peuple d’Europe qui a su dire non alors que d’autres, trop souvent, étaient tentés par un petit oui. Je voudrais ici, aujourd’hui, rendre hommage au peuple britannique qui a su dire non et sans l’apport duquel rien n’aurait été possible.

(Applaudissements)

Mais la liberté retrouvée, au début du mois de mai 1945, n’était pas égale partout. Nous, dans notre partie occidentale de l’Europe, confortablement établis dans nos vieilles démocraties, nous pouvions, après la Deuxième Guerre mondiale, vivre dans la liberté, dans une liberté retrouvée dont nous connaissions le prix. Mais ceux qui vivaient au centre de l’Europe et ceux qui vivaient à l’Est n’ont pas connu la liberté que nous avons connue pendant cinquante ans.

(Applaudissements)

Ils étaient soumis à la loi d’un autre. Les pays Baltes, dont je voudrais saluer la venue en Europe et auxquels je voudrais dire combien nous sommes fiers de les avoir avec nous, ont été incorporés de force dans un ensemble qui n’était pas le leur. Ils étaient soumis non pas à la pax libertatis, mais à la pax sovietika qui n’était pas la leur. Ces peuples, ces nations qui sont allés de malheur en malheur ont plus souffert que tous les autres Européens.

(Applaudissements)

Les autres pays de l’Europe centrale et de l’Europe orientale n’ont pas connu cet extraordinaire volume d’autodétermination que nous avons pu connaître dans notre région d’Europe. Ils n’étaient pas libres. Ils devaient évoluer sous le régime de principe qui leur fut imposé. Je dis, avec énormément de tristesse dans le cœur, tout le mal qu’aujourd’hui on dit de l’élargissement. Mais je dis aujourd’hui, alors que la Deuxième Guerre mondiale vient enfin de se terminer: vive l’élargissement!

(Applaudissements)

Cette Europe d’après-guerre qui, sans la guerre, n’aurait jamais pu devenir l’Europe telle qu’elle est aujourd’hui; cette Europe, née des cendres de la guerre, n’aurait jamais vu le jour s’il n’y avait pas eu ceux qu’on appelle les pères fondateurs de l’Europe - les Schuman, les Bech, les Adenauer, les de Gasperi, et d’autres - qui, de cette phrase d’après-guerre «plus jamais la guerre», pour la première fois de l’histoire du continent, ont fait un espoir, une prière et un programme. Il faut aujourd’hui se souvenir avec émotion, avec reconnaissance de ceux qui ont eu le courage de dire oui après avoir dit non.

Ils n’auraient pas pu le faire s’ils ne s’étaient pas sentis transportés par les sentiments nobles et profonds de leurs peuples. On ne fait rien de grand contre la volonté du peuple. Si on a pu faire l’Europe comme nous l’avons faite, après la Deuxième Guerre mondiale, c’est que les peuples européens ne voulaient plus jamais revivre ce que le continent européen avait vécu comme tragédie, deux fois, au cours du XXe siècle.

Il y a les pères fondateurs de l’Europe qui sont connus; il y a les peuples qui évoluaient dans l’ombre et qui partageaient ces nobles sentiments et puis, il y a les philosophes, les penseurs, les hommes politiques dont, trop souvent, on ne se souvient pas: Léon Blum, qui a rêvé de l’Europe dans une prison française; le grand Spinelli incarcéré sur une île d’Italie par les fascistes italiens; d’autres qui n’ont pas de nom mais auxquels nous devons beaucoup. Je voudrais saluer ceux qui, oubliés ou dans l’anonymat, ont rendu possible ce qui fut fait après la Deuxième Guerre mondiale.

(Applaudissements)

Il y avait la partie libre de l’Europe et la partie de l’Europe qui était paralysée par ce funeste décret de l’histoire, le décret de Yalta, qui voulait que l’Europe soit à tout jamais divisée en deux parties, des parties qui très souvent se regardaient en chiens de faïence et entre lesquelles nous avons trop souvent été incapables de jeter des ponts. La guerre froide - c’est ainsi que tendrement on appela cette autre période tragique de l’histoire européenne - a paralysé les meilleures énergies de l’Europe; elle n’a pas permis aux meilleurs talents de l’Europe d’exprimer tout ce qu’ils avaient de bénéfique à exprimer si on les avait laissé faire.

Personnellement, je suis né en décembre 1954, mais je préfère dire que je suis né en 1955. J’ai grandi tout d’abord dans le respect de la performance de la génération de mon père, si je peux me permettre cette digression, qui a connu un sort doublement terrible, parce que les Luxembourgeois nés entre 1920 et 1927 étaient enrôlés de force dans la Wehrmacht et portaient un uniforme qui n’était pas le leur, un uniforme qui servait des ambitions qui n’étaient pas les leurs. Terrible sort que de devoir porter l’uniforme de celui qui est votre ennemi. La même remarque vaut d’ailleurs pour les Alsaciens et les Lorrains auxquels je rends hommage.

J’ai grandi dans l’atmosphère de la guerre froide où le monde, paraît-il, était plus facile à comprendre. Il y avait ceux qui étaient avec nous et ceux qui étaient contre nous. On ne savait pas pourquoi on aimait ceux qui étaient avec nous, mais on savait qu’on devait détester les autres. On savait que la menace était de l’autre côté et ceux qui étaient de l’autre côté pensaient que la menace était de notre côté. Que de chances perdues! Que de temps perdu en Europe suite à ces stupides analyses de l’immédiat après-guerre.

Réjouissons-nous, aujourd’hui, de ne plus devoir nous référer à la logique implacable de la guerre froide et de pouvoir faire la paix entre les deux parties de l’Europe.

(Applaudissements)

Je pense souvent - sans doute parce que je ne le suis pas - aux sages de l’Europe, à Churchill par exemple. Le grand Churchill, en 1947, lorsque le premier congrès du mouvement européen s’est réuni à La Haye et lorsque vit le jour l’idée de créer le Conseil de l’Europe devant le refus de l’Union soviétique de laisser participer les autres pays de l’Europe centrale et de l’Europe orientale à la fois au plan Marshall et à la construction du Conseil de l’Europe, a déclaré avec ce don prophétique qui était le sien: «Nous commençons aujourd’hui à l’Ouest ce qu’un jour nous allons terminer à l’Est». Mesdames et Messieurs, soyons fiers d’y être parvenus.

(Applaudissements)

Je me rappelle des propos de Victor Hugo qui, en 1849, écrivait «Un jour viendra en Europe où le seul champ de bataille sera l’ouverture des marchés sur des idées; viendra en Europe le jour où les boulets et les bombes seront remplacés par les votes». Soyons fiers d’y être parvenus aujourd’hui.

Soyons fiers de pouvoir le dire au Parlement européen, représentation élue des peuples d’Europe, dont les membres sont les héritiers de ceux qui ont su dire non lorsqu’il fallait dire non, les héritiers de ceux qui ont su dire oui lorsque le oui était la seule option qui restait. Soyons reconnaissants à ceux qui ont dit non lorsqu’il fallait dire non et soyons fiers de tous ceux qui, aujourd’hui, disent oui à la grande Europe, à l’Europe qui a vu son histoire et sa géographie se réconcilier. Soyons fiers de ceux qui ne veulent pas que l’Europe se transforme en une zone de libre-échange et soyons fiers de ceux qui, comme nous, comme des millions d’autres, pensent que l’Europe est un continent compliqué qui mérite mieux qu’une zone de libre-échange. Soyons fiers de l’Europe que ceux qui étaient là avant nous ont construite et comportons-nous en dignes héritiers.

(L’Assemblée, debout, ovationne l’orateur)

 
  
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  José Manuel Barroso, président de la Commission. - (PT) Monsieur le Président, Monsieur le Président en exercice du Conseil, Mesdames et Messieurs les Députés, chers amis, c’est un grand honneur pour moi de représenter la Commission pour cette cérémonie devant ce Parlement qui représente les Européens. Aujourd’hui, nous regardons vers le passé et vers le futur. Nous sommes là pour nous souvenir, pour reconnaître et construire.

Commençons par le passé. Le plus grand conflit mondial a été la source de sentiments mitigés parmi tous ceux qui ont survécu, une source de soulagement pour beaucoup, une source de vide, certainement, et souvent une source de crainte du futur, de crainte que le monde d’après-guerre ne soit pas meilleur - qu’il soit même pire - que l’ancien.

C’est pour cela que nous nous souvenons. Nous nous souvenons de l’ampleur de la destruction qui a ravagé l’Europe en particulier. Presque aucun pays n’a été épargné. Ce que certains ont appelé la «guerre civile européenne» a révélé l’inhumanité dont l’homme est capable vis-à-vis de l’homme. Nous, les Européens, nous sommes souvent fiers des grandes réalisations de notre civilisation et de notre culture, des grands triomphes de l’esprit européen, mais nous devons toutefois reconnaître en toute humilité que certaines des pires horreurs perpétrées par la race humaine ont eu lieu en Europe au cours du XXe siècle.

Cependant, nous devrions également nous souvenir des histoires extraordinaires de triomphe contre l’adversité, du chemin de l’exil pris par tant d’Européens dans l’espoir de trouver une vie meilleure, certains traversant des montagnes et des mers pour réaliser leur rêve d’une existence heureuse et pacifique. Certains l’ont trouvé simplement en rentrant chez eux. Rappelons-nous de ceux qui n’ont pas eu cette chance, ceux pour qui l’étincelle de la liberté s’est éteinte alors qu’ils l’avaient à peine entrevue, ceux pour qui un cauchemar a remplacé l’autre.

Nous devons reconnaître qu’une chose remarquable est née des ruines de l’Europe en 1945. Laissez-moi vous citer l’un des visionnaires de l’époque, prononçant un discours à Zurich, en 1946. Il disait: «Je vais maintenant vous dire une chose qui va vous étonner. Le premier pas dans la recomposition de la famille européenne doit être un partenariat entre la France et l’Allemagne. C’est seulement par ce biais que la France pourra retrouver la direction morale et culturelle de l’Europe. Il ne pourra y avoir aucune renaissance de l’Europe sans […] une grande Allemagne spirituelle». Churchill avait raison. On a facilement tendance à oublier aujourd’hui le courage qu’il a fallu pour prononcer ces mots à cette époque. Ce qu’il a dit était épatant.

D’autant plus épatants furent les actes qui ont inscrit ces mots dans la réalité. Nous devons nous souvenir de l’extraordinaire détermination manifestée par Robert Schuman, Jean Monnet, Konrad Adenauer, Alcide de Gasperi et d’autres et de l’œuvre accomplie, reconstruire plutôt que se réfugier dans la vengeance. Nous devons également nous rappeler et reconnaître à sa juste valeur la vision des dirigeants transatlantiques, qui ont aidé à assumer le fardeau de la reconstruction plutôt que de lui tourner le dos.

Avant de continuer, faisons une pause, car ce que les pères fondateurs ont commencé était remarquable mais incomplet. Comme l’a dit la Commission dans sa déclaration du 9 mai: pour des millions de personnes, la véritable liberté n’est venue qu’avec la chute du mur de Berlin et non pas avec la fin de la seconde guerre mondiale. Après 1945, elles ont perdu leurs libertés et leurs possibilités d’agir, à peine les avaient-elles retrouvées. Dans certains cas, elles ont perdu le contrôle politique de leur pays; dans d’autres, elles ont perdu leur indépendance. Pour de nombreux peuples d’Europe, la fin de la seconde guerre mondiale signifie paix et liberté; mais pour certains, cela signifie seulement la paix, mais pas encore la liberté.

Il ne faut pas oublier ce qu’était l’Europe. Il y a soixante ans, sur ce continent, nous avons connu l’holocauste. Il y a environ 30 ans, plusieurs pays du sud de l’Europe, y compris le mien, étaient toujours dominés par des dictatures. Jusqu’à il y a environ 15 ans, la moitié de l’Europe ne connaissait pas la liberté et la démocratie. C’est pourquoi j’ai du mal à comprendre que l’on ne soit pas optimiste sur l’avenir de l’Europe lorsqu’on voit où elle en est aujourd’hui et qu’on la compare à ce qu’elle était il y a seulement quelques années.

(Applaudissements)

Cependant, ceci n’est heureusement pas la fin de l’histoire. Ce que les dirigeants européens des années 1940 et 1950 ont construit fut une lumière et un aimant: une lumière, au cours des sombres années, pour ceux qui n’avaient aucune perspective d’atteindre la paix, la prospérité et la stabilité dont les autres Européens jouissaient et une force d’attraction extraordinairement puissante pour les personnes et les pays qui regagnaient leur liberté et voyaient en la Communauté européenne - comme on l’appelait alors - une sorte de catalyseur pour la transformation de leurs pays.

Pour ma génération, l’Europe a toujours été synonyme de démocratie. Lorsque j’avais 18 ans, avec d’autres, j’étais déterminé à libérer mon propre pays d’un régime autoritaire moribond et réactionnaire. C’est pourquoi j’admire particulièrement, comme de nombreuses personnes de ma génération, les efforts extraordinaires que les peuples de République tchèque, d’Estonie, de Hongrie, de Lettonie, de Lituanie, de Pologne, de Slovaquie, de Slovénie, de Roumanie et de Bulgarie ont faits pour conquérir la démocratie et qui témoignent de la véritable idée de l’Europe, celle de la démocratie. Cela devrait être, et c’est d’ailleurs, avec une immense fierté que l’Union européenne et ses institutions accueillent ces nouveaux membres et ces peuples, de même que ceux de Malte et de Chypre.

Cette transformation est donc digne de reconnaissance et de commémoration. Pourquoi? Parce qu’il semble qu’actuellement elle soit quelque peu oubliée. Il est trop facile aujourd’hui de considérer comme acquis les fondements solides de la nouvelle Europe dans laquelle nous vivons, une Europe de liberté et de valeurs partagées.

C’est pourquoi il faut le dire: l’Union européenne ne peut pas être victime de son propre succès. L’intégration d’une telle variété de membres unis par un projet commun est une réalisation vraiment extraordinaire. C’est un défi extraordinaire, celui que nous relevons tous. Je suis convaincu que la mise en œuvre de ce formidable projet, qui concernera bientôt 27 pays et 500 millions de personnes, va se poursuivre en dépit des turbulences qui ne manqueront pas de survenir de temps à autre.

Toutefois, cette mise en œuvre se fait parfois si paisiblement que nous courons le danger d’oublier ce qui a précédé. Les récits des conflits meurtriers ravageant l’Europe semblent désormais être confinés aux livres d’histoire. Ils faisaient pourtant la une des journaux il y a encore dix ans, quand il y avait des massacres dans certains pays des Balkans.

Sur notre continent, on peut dire: plus jamais ça! C’est facile de le dire, mais l’histoire de l’Europe démontre que nous devons travailler à la paix et non la tenir pour définitivement acquise. Cette perspective n’est sans doute guère réjouissante car aujourd’hui en Europe, il y a des problèmes, des craintes. À Berlin, dans le grand bâtiment qui abritait autrefois ce que la RDA appelait son parlement, est inscrit le mot Zweifel, ce qui veut dire: doutes. Il y a des doutes et des craintes, surtout auprès des jeunes. Leurs craintes sont sérieuses: la crainte de trouver ou de ne pas trouver un emploi, la crainte face à un monde plus compétitif perçu parfois comme un défi. Mais il s’agit de la crainte de trouver ou de ne pas trouver un emploi, pas la crainte de trouver ou de ne pas trouver son propre pays.

Il convient à présent de trouver une façon efficace de remédier aux difficultés, réelles ou perçues comme telles, liées à l’intégration des marchés. Il n’est pas question de conflits armés entre des concurrents qui deviennent adversaires ou ennemis. C’est pourquoi pour faire face à ces craintes, nous devons suivre l’exemple des générations qui nous ont précédés; nous devons faire preuve de la même imagination et du même courage. Rappelons-nous que le partenariat ambitieux que nous avons conclu en Europe a été la source des révolutions pacifiques qui ont apporté la liberté et la démocratie à des millions d’Européens!

L’exemple de l’Europe - l’Europe des Six, des Dix, des Douze, des Quinze et maintenant des Vingt-cinq - a été la vraie force motrice de la démocratisation en Europe du Sud, en Amérique latine et, par la suite, en Europe centrale et orientale. Rappelons-nous que la liberté, c’est la force motrice qui stimule la croissance, l’emploi, l’investissement, et qui offre à un plus grand nombre d’Européens la chance d’une vie meilleure.

La vitalité de la démocratie et la modernité de nos sociétés témoignent de notre capacité à réinventer notre continent. De son marché intérieur à ses frontières extérieures, de la promotion de la cohésion interne à la défense du développement durable et de l’environnement, de la dimension de la solidarité à celle de la justice aux quatre coins du globe - car nous ne voulons pas une Europe fermée sur elle-même -, l’Union européenne construit toujours l’Europe. Elle le fait par étapes concrètes qui améliorent le quotidien de ses citoyens. La ratification de la Constitution consolidera ces réalisations, posera les fondements d’avancées encore plus importantes dans le futur.

Aujourd’hui donc, rappelons-nous cette terrible guerre et ce qui en a découlé. Dans notre travail axé sur l’avenir, laissons-nous inspirer par l’ambition visionnaire et la détermination des dirigeants et des citoyens qui nous ont précédés, de la réconciliation à la coopération et de la coopération à l’Union!

(Applaudissements)

 
  
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  Hans-Gert Poettering, au nom du groupe PPE-DE. - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Président en exercice du Conseil européen, Monsieur le Président de la Commission, Mesdames et Messieurs, en 1945 - il y a soixante ans - l’Europe était un champ de ruines. Une guerre barbare avait fait plus de 55 millions de morts, des millions et des millions de déracinés, de réfugiés ou de déplacés. Des parents ont perdu des enfants, des femmes ont perdu leur mari, des enfants ont perdu des pères. À la fin mars 1945, mon propre père, soldat de deuxième classe dans l’armé de terre, était porté disparu. Ce n’est que bien plus tard que nous avons appris qu’il figurait parmi les morts. Je ne l’ai jamais vu.

En 1945, de nombreuses villes européennes étaient dévastées; l’économie européenne était ruinée. Dans le monde, le nom de l’Europe suscitait la crainte et l’effroi. La responsabilité du déclenchement de la Deuxième Guerre mondiale ne fait pas de doute: Le régime national-socialiste illicite en Allemagne a attisé ses illusions raciales et ses revendications de pouvoir dans un enfer d’agression contre tous les autres peuples d’Europe. La tentative d’extermination des Juifs devait être le pire de ses crimes. Le totalitarisme national-socialiste a conduit l’Europe toute entière à la ruine. Lorsque la fin est arrivée, en 1945, le peuple allemand figurait lui-même parmi les victimes, au moment où les vainqueurs étaient peu nombreux sur le terrain.

Au lieu de vainqueurs, il y avait des survivants, certains chanceux et d’autres malheureux; les premiers à l’Ouest et les autres en Europe centrale et orientale. L’aide prévoyante des Américains a permis à la vie de renaître à l’ouest du continent, avec la liberté, le respect pour la dignité humaine, la démocratie et une économie de marché fondée sur le droit. Comme on vient de nous le rappeler, c’est Winston Churchill qui a esquissé la vision des États-Unis d’Europe - et permettez-moi d’ajouter que l’Europe ne serait pas complète sans la Grande Bretagne. Après 1945, l’Europe est ressuscitée à partir de la côte atlantique. Ses peuples, épuisés mais heureux de pouvoir recommencer dans la liberté, se sont rassemblés. Robert Schuman est passé à la postérité et sera toujours honoré pour avoir tendu la main aux Allemands et les avoir invités à se joindre à ce nouveau commencement. Sans la magnanimité des Français, l’Europe ne serait restée qu’une idée creuse - permettez-moi de dire que maintenant que l’Union européenne connaît un autre nouveau commencement avec une constitution unique, l’Europe aura besoin que la France soit plus que jamais impliquée de manière constructive à l’avenir.

(Applaudissements)

En 1945, les peuples d’Europe centrale, orientale et du sud-est espéraient, eux aussi, un nouveau commencement. Ils espéraient avoir la chance de vivre en liberté et en paix, comme les peuples qui appartenaient à la même culture européenne. Ils ont fait l’amère expérience que la paix sans la liberté n’apporte qu’une libération partielle du joug de l’injustice totalitaire. Leurs espoirs ont été réduits à néant par la prise de pouvoir des soviétiques. Bien que le totalitarisme du national-socialisme ait été vaincu en 1945, le totalitarisme stalinien a divisé l’Europe et imposé sa loi injuste aux populations d’Europe centrale, orientale et du sud-est. Toutefois, les survivants moins heureux de la Deuxième Guerre mondiale n’ont pas perdu espoir - l’espoir d’une Europe partagée, intellectuellement, moralement et politiquement renouvelée, avec la perspective de la prospérité pour tous ses citoyens. Ils ont finalement donné forme à cet espoir par une révolution pacifique, dont le mot d’ordre a été Solidarność. Il aura fallu des décennies pour abattre le mur.

(Applaudissements)

Élu à cette Assemblée depuis les premières élections européennes directes en 1979, je vois le débat d’aujourd’hui - que nous tenons en même temps dans la dignité et avec la gravité qui lui sied - comme une occasion de se réjouir de l’unité de l’Europe, une occasion de se réjouir aussi en présence de représentants de huit pays d’Europe centrale, qui jouissent des mêmes droits que nous.

(Applaudissements)

C’est en 1989 que le double fardeau du totalitarisme a disparu d’Europe. 1989 nous a appris le pouvoir des valeurs de l’Europe pour nous tous et combien nous devons compter sur l’exemple d’hommes et de femmes courageux pour conserver notre liberté. Après 1989, l’Europe a pu respirer à nouveau avec ses deux poumons, pour reprendre l’expression de ce grand pape dont nous nous souviendrons toujours, Jean-Paul II.

(Applaudissements)

Les peuples d’Europe occidentale ont accompli un travail précieux, indispensable pour préparer ce jour. Ce qu’ils ont fait durera. La création de l’Union européenne, aux valeurs communes, centrée sur la dignité humaine, l’union supranationale dans une communauté libre avec ses propres lois contraignantes a été la réponse résultant de l’occasion offerte par la fin de la guerre. L’unification européenne est un projet de paix et de liberté.

Tous les Européens ont à présent la chance et le devoir de parcourir le chemin que leur offre une Europe réunifiée. Ensemble, nous sommes aujourd’hui engagés dans la construction d’une Europe qui défend ses valeurs pour le bien de tous ses citoyens. L’Europe peut apporter à présent une seule réponse à la guerre et au totalitarisme, en accélérant le pas vers l’Union européenne des peuples et des États, avec persévérance, conviction intérieure et acceptation de la diversité, qui fait la force et la splendeur de l’Europe. Le débat actuel sur la Constitution européenne est une grande occasion pour nous de nous rappeler ces aspects fondamentaux, car, pour la première fois dans l’histoire de l’Europe, nos valeurs et nos idéaux sont inscrits dans une constitution.

L’Europe n’est pas une simple construction politique, mais un espace de vie intellectuel. C’est pour cette raison que la réponse à la terrible guerre, dont nous commémorons la fin aujourd’hui avec gratitude, se devait d’être une réponse morale, un «plus jamais ça» contre l’absence de liberté qui conduit à la guerre, un «plus jamais ça» contre la guerre qui prive les hommes de leur liberté. Voilà qui résume la motivation de la construction d’une nouvelle Europe, une Europe qui rejette le totalitarisme, l’arrogance nationaliste et l’inhumanité égalitaire, une Europe qui refuse qu’un de ses États domine les autres, une Europe qui affirme la dignité caractéristique de chaque personne, l’équilibre des intérêts des groupes sociaux et des peuples, une Europe du respect et de la diversité, qui tire sa force de cette diversité, une Europe de la démocratie et du droit.

La réconciliation intérieure a fortement progressé: réconciliation des peuples et des États d’Europe. Nous voulons - et nous devons - achever ce travail de réconciliation interne, comme nous voulons aussi nous réconcilier avec le peuple de Russie et les peuples de la Fédération de Russie. Dans cette période de notre histoire qui commence, l’Europe devra néanmoins chercher la réconciliation dans le monde et avec le monde qui nous entoure plus que par le passé. Les guerres de l’Europe se sont transformées en guerres mondiales. L’unification de l’Europe doit profiter au monde. Nous devons être reconnaissants aux députés de cette Assemblée - et je souhaite remercier mon collègue M. Brok en particulier - qui ont rédigé une résolution qui exprimera, demain, nos valeurs.

Nous nous souvenons en ce moment de toutes les victimes de la Deuxième Guerre mondiale, de toutes les souffrances et destructions. Nous rappelons combien la paix et la liberté vont ensemble et que notre travail doit servir à l’humanité, en commençant par la promotion du dialogue interculturel.

Là où ce dialogue avec le monde donne ses fruits, nous défendrons les valeurs qui nous soutiennent dans notre marche vers l’avenir. C’est en cela que cette journée du souvenir peut nous donner une nouvelle mission, nous faire travailler ensemble pour construire un monde meilleur - un monde plus pacifique et un monde plus libre.

(Vifs applaudissements)

 
  
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  Martin Schulz, au nom du groupe PSE. - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, lorsque nous pensons au 8 mai 1945 et que nous nous rappelons ce qui s’est passé ce jour-là, nous pensons à la période qui l’a précédé et aussi à la période qui l’a suivi. Il est impossible à n’importe quel Allemand de cette Assemblée de penser à cette date sans se rappeler en même temps sa propre nationalité. Le groupe pour lequel je m’exprime comprend des députés qui viennent d’Allemagne, le pays qui a voulu cette guerre, qui a préparé cette guerre, qui l’a déclenchée et qui l’a organisée impitoyablement.

Je m’exprime aussi au nom de députés qui viennent de Pologne, le premier pays envahi par l’armée allemande, et au nom de députés des pays - le Royaume-Uni et la France - qui étaient les plus actifs parmi les Alliés et qui ont permis de faire tomber Hitler en combinant leur puissance. À mes côtés, siège Poul Nyrup Rasmussen, qui a été de longues années durant le premier ministre du Danemark, un pays que l’Allemagne hitlérienne a renversé et occupé du jour au lendemain - mon père faisait partie des soldats occupants.

Je parle aussi au nom de députés provenant de pays qui ont souffert de la dictature longtemps après la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Mon groupe comprend un avocat qui a défendu des victimes du régime franquiste, un autre député qui a été lui-même victime, qui a subi la torture dans les caves de la police secrète. Certains collègues de mon groupe viennent du Portugal et de Grèce, ce sont des femmes et des hommes qui - comme vous, Monsieur le Président de la Commission - se sont réjouis dans leur jeunesse de voir disparaître les dictateurs de leur pays. Dans mon groupe, il y a mon ami Józef Pinior, qui sera le prochain intervenant à s’exprimer au nom du groupe et qui a été torturé dans les prisons communistes en tant que syndicaliste et social-démocrate.

C’est un privilège pour moi de pouvoir m’exprimer au nom de toutes ces personnes, un privilège que je dois à l’Union européenne. Nous pouvons tous être reconnaissants de tout cela aux hommes et aux femmes qui ont dû assumer la responsabilité, après le 8 mai 1945, du travail d’unification qu’ils ont mené. Comme le président en exercice du Conseil l’a dit, ce jour-là, le 8 mai 1945, il fallait tirer les leçons et les bonnes leçons ont été tirées. L’histoire de l’Union européenne, l’histoire de l’Europe d’après le 8 mai 1945, est une réussite. C’est l’histoire de la ferme détermination qui est née des ruines, l’histoire d’un «plus jamais ça!». Ce «plus jamais ça!» n’a pas été lancé dans le vide. Il a pris forme, des formes dans lesquelles nous travaillons aujourd’hui, dont nous bénéficions aujourd’hui, des formes qui me permettent de représenter des personnes de foi juive, qui permettent à mon groupe d’accueillir des députés musulmans, des députés qui ont souffert et d’autres qui ont appris de la souffrance des autres. Elles nous permettent de trouver un terrain d’entente en affirmant une chose: la leçon du 8 mai doit être celle-ci, pour que le principe de «plus jamais ça» reste permanent, il faut se battre tous les jours pour lui. Pour notre démocratie, pour notre Europe, notre combat se poursuit jour après jour.

Souvenons-nous aujourd’hui des causes, de la période qui l’a précédé, caractérisée par une vision unique. Il est unique dans l’histoire de la race humaine qu’un État fasse de l’extermination d’autres peuples et races son objectif et sa nature. Jamais auparavant et jamais depuis, un État n’a justifié sa raison d’être en tant qu’État par la nécessité d’anéantir les Juifs, les Slaves, les Roms, les Sintis et les handicapés. C’est un fait unique dans l’histoire de l’humanité. C’est la chose extraordinaire au sujet du IIIe Reich; les nazis voulaient qu’il ne subsiste aucune trace des Juifs d’Europe.

Il y a quelques semaines, je me suis rendu au mémorial Yad Vashem, à Jérusalem. Je suis descendu dans les couloirs et les allées souterraines qui retracent le sort des millions de victimes. Le directeur de Yad Vashem, qui m’a guidé, m’a dit: «Chaque jour, je descends dans cet enfer et je les vois - les photos, rien qu’elles. C’est l’enfer.» Je suis ensuite remonté, j’ai traversé un couloir et j’ai pénétré dans le nouveau musée, qui possède une longue baie vitrée et là, dans la lumière du soleil, j’ai vu la ville de Jérusalem. «Chaque jour,» m’a dit le directeur de Yad Vashem, «quand j’émerge de cet enfer et que je découvre cette vue, je sais qu’ils n’ont pas réussi. Nous sommes vivants. Nous avons gagné, pas les nazis».

Chaque souvenir, chaque jour de commémoration, chaque nom que nous lisons est une victoire sur les criminels qui ne voulaient rien laisser subsister. Si nous pensons à eux, le peuple juif, les Roms et les Sintis, continuent de vivre, tout comme ceux qui ont été assassinés pour leurs convictions politiques, tout comme les porteurs de handicap. Ils restent dans nos souvenirs, où ils continuent de vivre.

(Applaudissements)

Tant de victimes, tant de noms! Anne Frank était une petite fille juive, dont le seul crime a été d’être une petite fille juive à Amsterdam. Souvenons-nous aujourd’hui d’Anne Frank. Sophie Scholl était une jeune étudiante allemande dont le seul crime a été d’être une personne droite, elle fut décapitée à l’âge de 18 ans pour avoir distribué des tracts dénonçant le régime nazi. Je pense aussi à Krzysztof Baczynski, un jeune poète polonais, abattu à Varsovie par un tireur allemand. Trois noms sur 55 millions de victimes! Trois noms cités pour représenter toutes les autres victimes. Je répète: trois noms que nous invoquons et qui représentent tous ceux dont nous devons nous souvenir.

Ces dernières semaines, nous nous sommes souvent interrogés sur le sens de notre Union européenne; on nous a souvent demandé ce qu’elle représente. Ce qu’elle représente est décrit dans nos discours aujourd’hui. La continuation jusqu’à ce jour de ce travail d’unification, qui permet encore de surmonter la division, de contenir le racisme, d’exclure tous les antisémites, les racistes et les nazis de la communauté des démocrates, de mépriser ces criminels, d’énumérer leurs méfaits et de s’en souvenir - c’est la base, la fondation morale et intellectuelle de notre Union européenne, l’Union construite par nos pères et les pères de nos pères.

Entre-temps, l’Europe a un héritage; l’Union européenne n’est plus une nouveauté. Elle a maintenant 60 ans, puisqu’elle est née en principe le 8 mai 1945. Aujourd’hui, nous avons un héritage à gérer si nous voulons le transmettre. Si nous nous soucions de cet héritage, sachant que nous avons le devoir de rappeler que le IIIe Reich a représenté le côté le plus sombre de la race humaine, à partir duquel nous avons tiré les bonnes conclusions en créant cette Union, alors nous, les hommes et femmes politiques européens, nous permettrons aux jeunes qui nous écoutent dans les tribunes de cette Assemblée de pouvoir se réjouir d’un avenir plus radieux que celui de leurs pères et de leurs grands-pères.

(Applaudissements soutenus)

 
  
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  Graham Watson, au nom du groupe ALDE. - (EN) Monsieur le Président, le poète britannique John Donne constatait que: «Nul homme n’est une île, complète en elle-même, mais chaque homme est un morceau de continent, un morceau de l’ensemble. Si une motte de terre peut être engloutie par la mer, l’Europe est le moins que l’on puisse faire».

C’était en 1624, depuis maintenant plus de 300 ans les peuples et les États continuent de mener des guerres sur notre continent. Le tribalisme et la haine sont l’atroce héritage de l’Europe. Si nous ne l’avions pas appris plus tôt «la guerre devant mettre fin à toutes les guerres» aurait dû nous montrer la futilité et le traumatisme de la guerre organisée. Notre réveil de ce cauchemar a conduit à la Ligue des nations, mais nous avons continué encore à distiller les fruits des avancées scientifiques dans la course aux armes de destruction massive. À la fin de la seconde guerre mondiale en Europe, le 8 mai 1945, plus de 40 millions de personnes avaient perdu la vie.

Une personne cynique pourrait dire que les Européens du XXe siècle sont un peu longs à la détente. Il a fallu deux guerres sanglantes et un continent ruiné pour nous enseigner qu’une Europe unie valait mieux que la somme de ses parties.

Même alors, nous ne fûmes pas tous en mesure de réaliser nos aspirations de paix et de liberté. Alors que pour la plupart des Européens, mai 1945 marque la libération de leur pays de la tyrannie nazie et le début d’un nouveau chemin vers la paix et la reconstruction, pour ceux qui se sont retrouvés du mauvais côté du Rideau de fer, une tyrannie a rapidement été remplacée par une autre. Deux générations supplémentaires ont été privées de la liberté dont nous jouissons maintenant. En tant qu’étudiant à l’Université Karl Marx de Leipzig en 1976, j’ai pu voir cela de mes propres yeux.

Nos perspectives historiques sont inévitablement différentes, mais cela doit être un débat sur l’avenir et non sur le passé. Réjouissons-nous que l’Europe soit unie dans la paix et que nous puissions siéger ensemble dans une même assemblée législative avec une série d’institutions supranationales communes qui gouvernent et décident sur des sujets qui nous préoccupent mutuellement.

C’est l’impératif d’interdépendance qui a permis à l’Union européenne de se constituer et a finalement vu l’effondrement du bloc soviétique. Nous avons commencé par le charbon et l’acier, les pierres angulaires de l’Europe de l’après-guerre; nous avons construit le marché commun, la base de la prospérité dont mes parents n’avaient pas osé rêver; nous avons fait de la monnaie unique une réalité pour 300 millions d’Européens à l’aube de ce nouveau siècle.

Alors que nous commémorons le 60e anniversaire d’une paix durable, nous voyons que l’Europe a parcouru un long chemin, par paliers progressifs, pour construire une solidarité entre nos peuples. Il ne fait aucun doute que l’Union européenne est un succès: liberté, égalité, fraternité sont devenues des éléments de notre tissu social et législatif commun. Pourtant, il n’y a aucune garantie pour que cela soit toujours ainsi et nous sommes maintenant à la croisée des chemins, représentée par le Traité constitutionnel. Serons-nous capables d’avancer et de consolider cette ère de paix, de stabilité et de prospérité sans précédent ou bien fondra-t-elle devant nos yeux pour être remplacée par une nouvelle rivalité nationale et une stratégie du bord de l’abîme?

Un chroniqueur du Financial Times nous rappelait la semaine dernière l’extrême finesse de notre enveloppe civilisée, l’extrême faiblesse de la voix de la conscience humaine lorsque la tentation nous détourne des règles de droit et du respect de la personne humaine. C’est un défi que nos États membres doivent relever en se prononçant sur la ratification de la Constitution.

Une Europe pacifique et prospère a toujours été basée sur le postulat que la force réside dans la convergence et les mandats partagés. La coopération s’est développée grâce au commerce pour englober la politique sociale, l’emploi, l’immigration, la justice, la police et la politique étrangère. Les révolutions en Europe centrale et orientale nous ont libérés du joug de Yalta, mais nous sommes confrontés à de nouveaux défis. Nous devons, par exemple, relever le défi de nourrir, vêtir et loger une population mondiale croissante alors que des personnes de plus en plus nombreuses sont poussées à l’immigration par la guerre, la faim ou le désespoir absolu. Nous devons également relever le défi du trou dans la couche d’ozone, de la fonte des calottes glaciaires, de la montée du niveau de la mer et du changement climatique. Il y a également la menace du crime organisé au niveau international. Certaines bandes criminelles sont maintenant bien plus puissantes que certains gouvernements nationaux, apportant la misère à beaucoup d’entre eux, par le commerce de la drogue et des armes légères et la traite des êtres humains, et travaillant main dans la main avec les terroristes. Aucun de nos pays agissant seul ne peut relever ces défis. Afin de fournir à nos concitoyens la sécurité, la prospérité et les opportunités qu’ils attendent de leur gouvernement, nous devons travailler ensemble. Travailler aussi avec les États-Unis et le Canada auxquels nous devons tant et dont nous partageons largement les valeurs, non seulement pour affronter ensemble des défis communs, mais aussi pour les rassurer sur cette nouvelle Europe plus puissante.

L’Europe a la capacité d’être un symbole de l’espoir, un modèle de tolérance, de diversité et de stabilité, dans un monde où ces attributs sont encore rares. Nous devons insister sur une législation respectant les droits ou nous verrons nos droits s’éroder. Nous pouvons ratifier la Constitution européenne et mettre notre confiance dans la démocratie et un gouvernement responsable ou nous pouvons continuer à confier trop de pouvoir à des mains non élues. Nous pouvons tendre la main de l’amitié aux plus démunis ou nous enfermer dans un havre de prospérité illusoire. Nous pouvons accueillir la Roumanie, la Bulgarie, la Turquie et les pays des Balkans occidentaux et accepter que l’Europe soit diverse et plurielle ou continuer de traiter chacun avec hostilité et suspicion. La convergence n’est pas seulement un idéal, c’est une nécessité économique et politique. Il est temps de dépasser les égocentrismes nationaux pour atteindre une plus grande convergence. La coopération est la voie que nous devons suivre afin de faire face ensemble aux défis globaux.

L’Europe a un rôle moteur à jouer dans l’ère de la gouvernance globale. C’est une force de stabilisation et une référence pour les autres pays et les autres peuples. Le commerce et la coopération peuvent apporter à d’autres les fruits que nous avons récoltés. C’est pour cette raison que mon groupe se félicite des contacts renforcés avec la Russie et la République populaire de Chine. L’histoire devrait cependant nous apprendre à ne pas être un instrument de soutien aux régimes autoritaires. Les libéraux et les démocrates voient d’un œil préoccupé l’orientation de certaines politiques du Conseil: humilier les Américains dans une sorte d’enchères au rabais des normes relatives aux droits de l’homme serait un affront à la dignité pour laquelle les peuples d’Europe se sont tant battus.

De même que nul homme n’est une île, nul pays n’est une île. Nous sommes unis pour être les gardiens de ce monde fragile, au service de ses habitants. Laissons l’Europe montrer l’exemple de la dignité de la différence et relever le défi.

(Applaudissements)

 
  
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  Daniel Marc Cohn-Bendit, au nom du groupe des Verts/ALE. - Monsieur le Président, je suis né un mois avant 1945. Mes parents ont quitté l’Allemagne il y a 72 ans. En 1933, mon père était avocat, il défendait le Secours rouge et il aurait dû être arrêté. Je suis né exactement neuf mois après le débarquement des alliés en Normandie. Je suis un enfant de la libération, d’une invasion militaire qui a libéré le sol européen et a permis à mes parents de faire un enfant, un «enfant de la liberté».

C’est pourquoi notre mémoire, ma mémoire, est pavée d’horreurs. Auschwitz, l’horreur, l’anus mundi qui a montré le pire dont l’être humain est capable. Kolima, l’anus mundi qui a montré ce que l’idéologie politique la plus barbare est capable de faire. Oradour-sur-Glane, qui a montré ce qu’une occupation militaire peut engendrer. Katyn, qui a montré qu’on peut libérer et détruire en même temps. Toute l’élite polonaise a été massacrée par l’armée rouge pour empêcher que le peuple polonais puisse se constituer et se créer un État indépendant. Nous avons ensuite continué à commettre des massacres incomparables et pourtant comparablement mortels et cruels. Il y a eu les massacres des guerres coloniales, il y a eu Srebrenica il y a dix ans maintenant, jour pour jour.

C’est en raison de ces massacres que des hommes et des femmes, qui n’appartiennent pas à mon parti politique, mais dont je reconnais la grandeur pour avoir réussi - parce qu’ils ont réussi - à construire cette Europe, que ce soit De Gaulle ou Adenauer, Willy Brandt ou Helmut Kohl, François Mitterand, peu importe, ont fait quelque chose d’extraordinaire. Et nous, nous sommes des enfants de l’Europe, ceux qui sont nés après 1945, mais nous sommes des enfants de l’antitotalitarisme. Cette Europe s’est créée pour éviter à tout jamais la résurgence du totalitarisme, qu’il soit de gauche ou de droite. Pour reprendre une chanson connue par d’aucuns: il n’est pas de sauveur suprême, ni Dieu, ni César, ni tribun, ni communisme, ni néolibéralisme. Il n’existe pas d’idéologie libératrice des êtres humains. Il n’existe qu’une petite chose très fragile que beaucoup raillent et qui s’appelle tout simplement «démocratie».

(DE) Mes chers amis, Mesdames et Messieurs, il est toujours aisé ou difficile pour un Allemand de parler de «la guerre, 60 après». L’Allemagne a connu à la fois le national-socialisme, avec toute sa barbarie, et le totalitarisme communiste. L’Allemagne est donc aussi un symbole de l’Europe et si notre génération a bien une obligation, c’est celle de dire la vérité. Je ne dirai pas à l’Assemblée quelles doivent être les tâches politiques de l’Europe, car nous pouvons le faire jour après jour. Ce qui m’intéresse, c’est uniquement de savoir avec quel sérieux nous considérons cette obligation antitotalitaire. Si nous agissons réellement, nous ne devons pas, nous ne pouvons pas, négliger les droits de l’homme et le respect de la dignité humaine au nom d’une quelconque Realpolitik.

(Applaudissements)

Nous devons parler aux Russes, mais nous devons également parler de la Tchétchénie. Nous devons parler des crimes. Nous devons parler aux Chinois, mais nous devons également parler de l’oppression du peuple Chinois. Nous ne pouvons dire simplement «levons l’embargo» et passer au point suivant à l’ordre du jour. Pour que les Chinois reçoivent quelques armes. Pour qu’on leur vende quelques Transrapides. Avec une histoire comme celle de l’Europe derrière nous, nous ne pouvons tout simplement pas faire cela!

(Applaudissements)

C’est parce que nous sommes contraints à la vérité, parce que nous croyons en l’Europe, que nous tous, quand nous modelons et nous organisons l’Europe du futur, nous devons nous rappeler ce que l’Europe a été et ce qu’elle ne doit plus être à l’avenir.

Ce sont des jours comme celui-ci que je suis fier - comme quelqu’un qui pense à l’histoire de l’Europe en ces termes - de faire campagne pour une constitution qui incarne l’héritage de l’Europe antitotalitaire. Je suis convaincu que nous allons gagner; cette constitution deviendra réelle en Europe. C’est ce que je crois; c’est une obligation qui nous incombe pour le bien de nos enfants, qui hériteront de ce que nos parents nous ont confié.

(Applaudissement)

 
  
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  Francis Wurtz, au nom du groupe GUE/NGL. - Monsieur le Président, le beau discours de M. Junker et certains accents des interventions qui l’ont suivi tranchent avec la teneur si décevante et préoccupante du projet de résolution qui nous est soumis au nom de la plupart des groupes à l’occasion du 60e anniversaire de la capitulation nazie. Je suis convaincu que dans la plupart des familles politiques représentées au sein de notre Assemblée, des hommes et des femmes éprouveront un sentiment de malaise devant ce texte, qui n’est pas loin d’amorcer une révision de l’histoire.

Lorsqu’une institution comme la nôtre évoque cet événement fondateur de l’Europe et du monde d’aujourd’hui que fut la victoire de tous les alliés - américains, britanniques et soviétiques - de la coalition antihitlérienne, chaque mot compte. Gageons que nombreux sont celles et ceux qui s’attendaient à lire dans une telle déclaration des phrases telles que: «le 8 mai 1945 est un jour de libération pour l’Europe». Pourquoi pas, puisque c’est la vérité, c’est un jour auquel l’armée soviétique contribua de manière décisive.

Sans du tout faire l’impasse sur l’oppression stalinienne, nombre d’Européens auraient sans doute également souhaité, face aux manifestations diverses de nostalgiques du IIIe Reich, entendre de notre part qu’excuser les atrocités nazies en montrant du doigt les crimes staliniens est inacceptable d’un point de vue intellectuel et moral, voire entendre - concernant la guerre du souvenir qui oppose actuellement les républiques baltes à la Russie - qu’il faut garder à l’esprit la part de responsabilité de l’Allemagne nazie dans la tragédie des États baltes.

Une précision, chers collègues: toutes les formulations que je viens de suggérer sont en fait extraites d’un article publié avant hier dans le quotidien français Le Figaro sous la signature de M. Michael Mertes, ancien conseiller de l’ex-chancelier Helmut Kohl. Il s’agit de votre famille politique, chers collègues du PPE! Dieu merci! Nous avons perdu cette guerre, conclut-il en ajoutant une phrase que je vous propose de méditer: la façon dont on envisage le passé nous en apprend plus sur nos attitudes présentes que sur le passé lui-même.

À l’heure ou l’Union européenne consulte ses citoyens sur un projet de Constitution, comment ceux-ci interpréteront-ils une conception de l’Europe élargie qui commence par remettre en cause la pierre angulaire de la vision de l’Europe et du monde, née le 8 mai 1945, à savoir que le nazisme ne fut pas une dictature ou une tyrannie parmi d’autres mais bien la rupture absolue avec toute civilisation?

Nous sommes prêts, pour notre part, à un débat sans tabou sur les crimes du stalinisme comme sur le pacte germano-soviétique de sinistre mémoire ou encore sur l’histoire des pays baltes. Mais rien, absolument rien ne doit permettre de banaliser le nazisme, dont - faut-il le rappeler? - le but déclaré était d’exterminer les sous-hommes et d’élargir l’espace vital de la race supérieure par la guerre totale. Voilà pourquoi nous étions en droit d’attendre du Parlement européen un texte sur le 8 mai 1945 d’une tout autre hauteur de vue. Et peut-être n’aurait-il même pas été superflu, voyez-vous, de rendre hommage à cette occasion à ces combattants anonymes, qui sans autre ambition que celle de vivre et d’agir en hommes et en femmes debout, se sont engagés dans la résistance au péril de leur vie qu’ils ont été si nombreux à sacrifier pour notre liberté. De même, un mot, un seul, sur l’horreur d’Hiroshima et de Nagasaki et de ses dizaines de milliers de morts dans un pays vaincu n’aurait pas été de trop.

Vraiment, le Parlement européen a cette fois manqué un rendez-vous avec l’histoire. Aussi mon groupe refuse-t-il unanimement de cautionner cette résolution étrangère à l’idée que nous nous faisons de l’Europe à vingt-cinq, à vingt-sept ou à trente.

Je laisse le mot de la fin à un dirigeant européen qui avait, il y a vingt ans, trouvé les mots justes pour parler du 8 mai 1945, et ce dans le pays où c’était le plus difficile de les formuler franchement. Je veux parler de l’ancien président allemand, Richard von Weizsaecker. Je me permets de le citer.

(DE) «Nous avons la force de regarder la vérité en face de notre mieux, sans embellissement et sans distorsion. [...]

Chaque jour, une chose est devenue de plus en plus claire, et il faut le dire aujourd’hui au nom de nous tous: le 8 mai a été un jour de libération. Il nous a tous libérés de l’inhumanité et de la tyrannie des nazis».

(Applaudissements)

 
  
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  Maciej Marian Giertych, au nom du groupe IND/DEM. - (PL) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, la Deuxième Guerre mondiale a commencé en septembre 1939 lorsque mon pays, la Pologne, a été envahi et occupé par l’Allemagne et l’Union soviétique. Cette partition de la Pologne était le résultat du pacte Molotov-Ribbentrop, signé une semaine auparavant à Moscou. La Pologne n’a pas été conquise par des escadrons des partis nazi et communiste, mais par les armées régulières de ses voisins, en d’autres termes par la Wehrmacht, la Luftwaffe et la Kriegsmarine allemandes et par l’Armée rouge. Il faut ajouter que le parti national-socialiste, avec le chancelier Hitler à sa tête, gouvernait l’Allemagne de l’époque après avoir accédé au pouvoir à la suite d’une décision démocratique de l’électorat allemand. Staline et le parti communiste gouvernaient la Russie après avoir été portés au pouvoir par la révolution.

Nous fêtons le 60e anniversaire de la capitulation de l’Allemagne, qui a eu lieu le 8 mai 1945 et qui symbolise la fin des actes injustifiés commis par l’Allemagne nazie dans les pays occupés. Cette date ne symbolise pourtant pas la fin des méfaits commencés avec l’invasion soviétique de la Pologne en 1939. Nous avons gagné la guerre contre l’Allemagne, mais nous avons perdu la guerre contre la Russie, à la suite de quoi une puissance étrangère, un système économique étranger et une idéologie étrangère nous ont été imposés de force.

Nous avons combattu sur tous les fronts au cours de la Deuxième Guerre mondiale et nous étions présents lors des premiers et des derniers coups de feu. À compter de 1941, l’Union soviétique était notre alliée dans la guerre contre l’Allemagne. Nous reconnaissons le rôle joué par la Russie dans la défaite de l’Allemagne nazie et ses pertes énormes. Mais il n’en reste pas moins que la Russie a agi comme si elle avait conquis la Pologne. Qui plus est, nos alliés occidentaux dans la lutte contre l’Allemagne étaient également les alliés de l’Union soviétique et ils ont consenti à notre asservissement à Yalta. Nous avons dû nous libérer petit à petit, tout d’abord en décollectivisant l’agriculture, ensuite en libérant l’Église, ensuite en faisant accepter les petites et moyennes entreprises et enfin en obtenant la liberté de constituer des syndicats, ainsi que la liberté de parole et la liberté politique.

La seule aide que nous ayons reçue du reste du monde dans ce processus a pris la forme de la course aux armements, que les États-Unis ont gagnée à la longue et en particulier à travers la réussite du programme de la «Guerre des étoiles» de Reagan, qui a affaibli l’Union soviétique. La présence de troupes américaines en Europe et l’existence de l’OTAN ont permis à l’Europe occidentale de vivre en paix au cours des 60 années écoulées. À présent, les pays d’Europe centrale et orientale, qui soit sont membres de l’OTAN, soit ont formé des partenariats pour la paix, recueillent les fruits. Chacun d’entre nous partage le désir de paix et de liberté, d’un futur façonné selon nos désirs.

Les personnes de ma génération, qui ont connu directement la Deuxième Guerre mondiale, ne sont plus là pour longtemps et nous devons veiller à ce que les générations futures se souviennent de la vérité sur cette guerre. Pour nous, les Polonais, il est extrêmement douloureux que de si nombreux médias occidentaux utilisent des expressions que nous trouvons insultantes telles que «camps de concentration polonais», voire «chambres à gaz et crématoires polonais», comme le Guardian britannique a eu l’audace de l’écrire. Il est un fait que certaines de ces usines de la mort étaient situées sur le territoire polonais, mais le fait est qu’elles étaient allemandes et non polonaises. Tous les Allemands n’en sont pas responsables et nous reconnaissons que la nation allemande a pris ses distances par rapport à son honteux héritage nazi, mais nous tenons à nous assurer que les générations futures n’associeront pas la Pologne aux crimes commis par les nazis, parce que la Pologne n’en était pas responsable.

De même, le peuple russe n’est pas responsable des crimes commis sous Staline, à savoir les déportations, les goulags, le génocide commis à Katyn et l’assujettissement de l’Europe centrale et orientale. Ce sont les dirigeants communistes de l’État soviétique qui étaient responsables de ces crimes. Les Russes ont souffert aussi de l’asservissement. Nous voulons nous réconcilier avec le peuple et l’État russes, mais nous leur demandons de prendre clairement leurs distances par rapport à leur héritage communiste. Les dirigeants actuels de l’Allemagne et de la Russie, les pays qui ont commencé la Deuxième Guerre mondiale, viennent cependant d’accorder une interview commune au journal allemand Bild, dans laquelle ils tentent de détourner l’attention de tout ce qui ne concerne pas leurs relations mutuelles et les pertes qu’ils ont subies.

Nous essayons actuellement d’établir des relations de bon voisinage à la fois avec l’Allemagne et la Russie. Il y a bien longtemps, en 1961, les évêques polonais ont adressé une lettre restée célèbre aux évêques allemands qui contenait cette phrase: «nous pardonnons et demandons pardon». Nous adoptons la même approche pour nos relations actuelles avec la Russie, mais le pardon et la réconciliation ne signifient pas qu’il faille oublier. Nous souhaitons donc qu’il n’y ait plus jamais de génocide, d’assujettissement d’une nation par une autre, d’agression et de guerre.

 
  
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  Wojciech Roszkowski, au nom du groupe UEN. - (PL) Monsieur le Président, chaque nation a connu des expériences très différentes de la Deuxième Guerre mondiale, le débat que nous avons aujourd’hui est donc peut-être le débat le plus important concernant l’identité européenne depuis des années. Si nous souhaitons vraiment nous rassembler pour former une seule communauté spirituelle européenne, nous devons tous nous efforcer de comprendre en profondeur les expériences historiques des nations européennes. Pour cela, nous devons parler très franchement de certaines questions.

La résolution pour commémorer le 60e anniversaire de la fin de la guerre découle d’un compromis obtenu de haute lutte. Dans l’ensemble, elle dépeint fidèlement les conséquences de la guerre. Mais il manque une référence au lien qui existe entre le début et la fin de la guerre ou aux opinions sur la guerre qui circulent actuellement en Russie. Munich et la partition de la Tchécoslovaquie ont été les premiers actes d’agression d’Hitler, mais il ne fait pas de doute que le pacte Molotov-Ribbentrop a constitué le véritable appel à la guerre. La Pologne a été victime de la coopération entre le IIIe Reich et l’URSS en septembre 1939, suivie de l’invasion par l’Allemagne de la Norvège, du Danemark, de la Belgique, des Pays-Bas, du Luxembourg, de la France, de la Yougoslavie et de la Grèce, ainsi que de l’invasion par l’Union soviétique de la Finlande, de la Lituanie, de la Lettonie et de l’Estonie. Staline n’a pas rejoint de son propre gré les Alliés dans leur lutte contre l’Allemagne. Au contraire, il a refusé de coopérer avec la France et la Grande-Bretagne. Ce n’est qu’après l’attaque d’Hitler contre l’Union soviétique en juin 1941 qu’il s’est assuré l’aide des Britanniques et des Américains en rejoignant une nouvelle coalition, qui devait finir par vaincre le IIIe Reich.

Pourtant, même si l’Armée rouge a supporté le poids principal de la guerre, le système soviétique n’a connu aucun changement. L’archipel du goulag a continué de s’étendre et le nombre de ses victimes peut être comparé au nombre des citoyens soviétiques tombés durant la guerre. La coopération entre les Trois Grands reposait donc sur un simple semblant de valeurs communes, raison pour laquelle il a été impossible de les maintenir après la fin de la guerre. Juste avant sa mort, Roosevelt a admis que l’Amérique ne pouvait pas traiter avec Staline, car celui-ci avait rompu toutes les promesses qu’il avait faites. Mais cette admission est arrivée trop tard. L’Europe était divisée et l’Europe orientale tombait entre les mains du totalitarisme stalinien. La Pologne figurait parmi les pays concernés, elle avait été la première à opposer une résistance à Hitler à l’époque où l’allié de ce dernier était Staline. Les forces armées polonaises constituaient un quart des forces alliées et proportionnellement ce pays a enregistré les plus grandes pertes humaines au cours de la guerre.

Malheureusement, la Russie rechigne aujourd’hui à reconnaître le rôle ambigu de l’URSS durant la guerre. Le président Poutine est revenu à une interprétation stalinienne de la Deuxième Guerre mondiale et de ses répercussions. Il affirme que le pacte Molotov-Ribbentrop est un traité international normal. La Russie a officiellement nié que Staline a attaqué la Pologne en 1939, qu’un génocide a été commis à Katyn et que l’URSS a occupé les États baltes. Elle a même dit que la conférence de Yalta avait apporté la démocratie en Pologne.

Viktor Yerofeyev, un écrivain russe célèbre, a écrit récemment que la Russie est suffisamment éclairée pour ne faire aucune distinction entre le totalitarisme stalinien et le régime d’Hitler. Si la Russie était effectivement éclairée, il y aurait tout lieu d’espérer qu’elle se réconcilie avec l’Europe. Tout signe de réhabilitation de Staline doit cependant constituer pour nous tous un signal d’alarme.

Pourquoi est-ce si important maintenant? M. Poutine a dit que la réconciliation entre la Russie et l’Allemagne pourrait servir d’exemple à l’Europe. Malheureusement, toute réconciliation fondée sur une interprétation stalinienne de l’histoire déclenche la sonnette d’alarme, qui sonne particulièrement fort à Varsovie, à Vilnius, à Riga et à Tallinn.

Le peuple polonais et les autres nations d’Europe centrale pensent qu’il ne sera pas possible d’obtenir la paix et la réconciliation en Europe si les nations situées entre l’Allemagne et la Russie sont écartées de l’équation de cette manière. L’Assemblée doit comprendre que la Pologne et l’Europe centrale se sentent mal à l’aise chaque fois que les superpuissances de l’Europe occidentale et la Russie se serrent la main par dessus leur tête.

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. MAURO
Vice-président

 
  
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  Philip Claeys (NI). - (NL) Monsieur le Président, il est extrêmement important que nous commémorions en ce moment la fin de la Deuxième Guerre mondiale, il y a 60 ans. Il est bon également qu’à cette occasion, on souligne encore une fois que la liberté et la démocratie ne vont pas de soi, qu’il faut les soutenir. Les atrocités du national-socialisme composent une page noire de l’histoire européenne et les orateurs précédents ont eu raison de souligner qu’il y a peu de chose, sinon rien, à ajouter à cela.

Il est néanmoins regrettable que l’Europe occidentale consacre si peu d’attention à un fait historique, à savoir que, il y a 60 ans, les peuples d’Europe orientale ont été officiellement abandonnés à l’occupation soviétique, aux régimes communistes dictatoriaux, qui n’avaient rien à envier aux nazis en termes d’horreur et de crime. L’Armée rouge était à Varsovie dès 1944, elle attendait simplement que les nazis écrasent le soulèvement. Il y a soixante ans, tout l’Occident chantait les louanges de Joseph Staline, un tyran qui avait déjà tué à l’époque des millions de personnes et qui, avec la connivence de l’Occident libéré, allait continuer à en tuer des millions d’autres, à l’intérieur et à l’extérieur de la Russie.

Il est temps que la Russie mette de l’ordre dans son passé, comme l’Allemagne l’a fait. Officiellement, des pays tels que l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie ont été libérés par l’Armée rouge. Vaira Vike-Freiberga, présidente de Lettonie, a souligné que les États baltes n’ont pas été libérés en 1945, bien au contraire. Permettez-moi de la citer: «c’était l’esclavage, c’était l’occupation, c’était la soumission et la terreur stalinienne».

Les dirigeants européens présents à Moscou il y a quelques jours n’ont pas pris la peine d’aborder cette réalité. Ce qui a été la libération pour les Européens de l’Ouest il y a 60 ans a été un nouveau calvaire pour l’Europe de l’Est, la différence étant que les nouvelles dictatures pouvaient compter sur le soutien actif et la sympathie de nombreux responsables politiques, de médias, d’intellectuels et de nombreuses autres personnes en Europe occidentale, dont certaines étaient stipendiées en fait par les services secrets soviétiques. Il conviendrait peut-être, 60 après, d’aborder ces questions. L’Europe ne pourra peut-être laisser reposer l’histoire une bonne fois pour toutes qu’après la tenue d’une sorte de procès de Nuremberg du communisme, non pas dans la tentative d’ouvrir d’anciennes plaies, mais dans l’intention de ne jamais oublier, en ayant à l’esprit l’avenir de nos enfants et de nos petits-enfants.

Je suis choqué de voir un commissaire européen faire état, par des photos placées sur son site internet, de son admiration pour quelqu’un tel que Fidel Castro. Je suis choqué quand des intellectuels et des décideurs politiques continuent de nier ou d’atténuer l’avènement de l’extrémisme islamique. Jean-François Revel a déjà parlé de la tentation totalitaire. S’il y a une leçon à tirer des atrocités de la Deuxième Guerre mondiale, c’est qu’il ne faut pas laisser de deuxième chance au totalitarisme, où qu’il puisse apparaître.

 
  
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  József Szájer (PPE-DE). - (HU) «Du sang versé par nos pères dans les batailles surgit la paix, à travers notre souvenir et notre regard: notre devoir est de créer l’ordre dans nos affaires communes; et cela sera dur». Le grand poète hongrois né il y a un siècle, Attila József, nous rappelle que nous les Européens, qui nous sommes livrés à tellement de guerres entre nous, nous avons à mettre de l’ordre dans de nombreuses affaires communes.

Dans une lettre adressée récemment à Vitautas Landsbergis et à moi-même, M. Frattini a écrit que votre histoire est notre histoire aussi. Lorsque nous commémorons la fin de la Deuxième Guerre mondiale en Europe, nous ne devons pas oublier que la fin de la guerre a apporté quelque chose de différent à chaque nation européenne. Il y a soixante ans, dans le cas des nations les plus chanceuses, elle a marqué la fin d’une longue souffrance et de destructions incommensurables. Nous nous inclinons devant tous ceux qui ont accompli un sacrifice pour la paix. Par contre, une autre dictature malfaisante attendait l’autre moitié de l’Europe avec son lot de souffrance et de destruction. D’une nuit à l’autre, sans lueur du jour, d’une occupation à l’autre sans indépendance, d’une dictature inhumaine à l’autre sans liberté.

Kányai Istvánt, le père hongrois de la représentante slovaque, Zita Pleštinská, assise ici derrière moi, parmi nous, a été pourchassé de la même manière par les nazis et les fascistes avant de connaître l’enfer des camps de concentration soviétiques pendant neuf ans. Celui qui libère un captif d’une prison pour l’enfermer dans une autre prison est un geôlier, pas un libérateur. Le prisonnier le considère non pas comme quelqu’un qui lui a donné sa liberté, mais comme quelqu’un qui la lui a ôtée. Pour de nombreuses nations européennes, la liberté tant attendue est arrivée cinquante ans après le 8 mai 1945. La dernière étape de cette liberté a eu lieu le 1er mai 2004, qui marquait la fin de l’ordre mondial issu de Yalta. En réalité, la Deuxième Guerre mondiale a pris fin le 1er mai 2004. C’est pourquoi il serait plus approprié de commémorer la fin de la guerre ici, dans la capitale de l’Europe réunifiée, plutôt qu’à Moscou.

Les nations d’Europe ont contemplé les deux côtés du même mur: les fils barbelés nous ont séparés pendant un demi-siècle. Nous avons supporté l’insupportable, enduré le système mis en place par l’Armée rouge soviétique, qui est restée après la libération, le génocide, la purification ethnique et de classe, les assassinats, la torture, la déportation et la privation des droits de personnes innocentes au nom de l’idée progressiste socialiste. Le système imposé aux nations d’Europe centrale par le communisme soviétique a été une conséquence directe du plan dont Staline a parlé devant le Politburo le 19 août 1939 pour expliquer le pacte Molotov-Ribbentrop. Je cite: «L’expérience des vingt dernières années a montré que, en temps de paix, il est impossible de maintenir un mouvement communiste suffisamment fort en Europe pour qu’un parti bolchevique s’empare du pouvoir. La dictature d’un tel parti ne sera possible qu’à la suite d’une guerre majeure.»

Nos nations se sont élevées à plusieurs reprises contre la dictature des partis bolcheviques: à Berlin en 1956, en Hongrie et à Poznañ en octobre 1956, en Tchécoslovaquie en 1968 et en Pologne en 1980. L’Occident a salué nos révolutions, il a témoigné sa sympathie, pour tolérer ensuite que l’Union soviétique écrase et réduise au silence dans un bain de sang ces expressions du désir de liberté. Chers collègues, notre histoire est votre histoire aussi. Néanmoins, nous, les nations libérées de l’occupation soviétique il y a une décennie, nous ne bénéficions d’aucune compassion quant à notre histoire récente. Après la guerre, l’Europe occidentale s’est redressée avec fierté et a commencé à prospérer en paix. Sans que nous ne soyons coupables, nous avons été privés de ce processus, qui a engendré la situation actuelle, dans laquelle certains de ceux qui ont eu de la chance en Europe, et même ici dans ce Parlement, veulent tirer un profit personnel en brandissant le spectre des citoyens bon marché des nouveaux États membres afin d’effrayer leur propre population, des citoyens dont le pays a connu une crise économique à cause de l’économie socialiste inefficace qui leur a été imposée.

Mais de nombreuses personnes en Europe occidentale ne comprennent pas pourquoi l’étoile rouge à cinq pointes, comme le swastika, est devenue le symbole de la haine et de l’oppression. Notre histoire est aussi votre histoire. Il y a soixante ans, les puissances nazies ont été vaincues par les nations d’Europe. La classe politique discréditée a disparu. Aucune place ne porte le nom d’Hitler et aucune statue n’a été érigée pour commémorer les tueurs nazis. Un demi-siècle plus tard, l’Union soviétique et le régime communiste se sont effondrés eux aussi. De la même manière, le communisme yougoslave, qui a poursuivi sa route sans l’occupation soviétique, a connu une défaite honteuse. Les successeurs du système communiste vaincu sont des hommes d’affaires éloquents qui demandent le respect, des politiciens responsables pour ainsi dire. En Russie, on a recommencé à ériger des statues à la gloire de Staline et l’occupation soviétique est à nouveau qualifiée de libération. On semble vouloir entendre parler de moins en moins des atrocités de la dictature communiste.

Chère Assemblée, nous ne pouvons pas appliquer deux poids deux mesures. Auschwitz, le massacre de la forêt de Katyn, l’occupation nazie et la double occupation soviétique des États baltes, les dictatures injustes démembrant les sphères d’intérêt de l’Europe, les frontières dessinées par la force et les pactes, la déportation de nations entières, les meurtres, la torture, l’inhibition des personnes, les échanges de population, les murs qui séparent les nations, le piétinement des droits de l’homme et des minorités, voilà des injustices flagrantes, indépendamment de ceux qui les ont commises.

Soixante ans après la fin militaire de la guerre, il est temps d’affronter ces questions. Le sacrifice énorme de l’armée soviétique mérite le respect et les honneurs. L’armée d’occupation ne mérite pas quant à elle notre respect; elle a imposé sa propre dictature opprimante sur une partie des nations européennes. Aussi longtemps que nous ne pourrons pas appeler une atrocité par son nom, qualifier un meurtre comme tel, aussi longtemps que nous comparerons un pécher à un autre, la guerre continuera de faire rage dans notre tête et les blessures ne guériront pas. Jésus dit que la vérité rend libre. La réunification de l’Europe nous donne l’occasion d’un nouveau commencement. Autrefois gagnants et perdants, oppresseurs et opprimés, nous pouvons aujourd’hui construire une Europe commune, démocratique fondée à la fois sur la vertu de la dignité humaine ancrée dans la tradition chrétienne, avec l’espoir d’un avenir plus radieux et des générations à venir plus heureuses. Écoutons Attila József, écoutons le poète et mettons de l’ordre dans nos affaires communes!

 
  
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  Józef Pinior (PSE). - (PL) Mesdames et Messieurs, aujourd’hui, cette Assemblée commémore le 60e anniversaire de la fin de la Deuxième Guerre mondiale, qui a été la guerre la plus terrible de l’histoire. Elle a fait des millions de morts et a conduit à l’annihilation des Juifs, tout en plongeant l’Europe dans les profondeurs de la sauvagerie, de la dévastation économique et de la déchéance morale. Nous devons nous incliner en souvenir de cette époque et commémorer les victimes de cette guerre.

Mesdames et Messieurs, bien que certains moments clés de notre mémoire collective nous permettent de nous rassembler pour construire une communauté politique, chaque nation européenne se souvient du XXe siècle à sa façon, parce que les nations et les peuples ont traversé des événements historiques et politiques différents. Il y a toutefois une chose qui nous unit tous: nous nous rappelons des victimes de la guerre et de la lutte pour la liberté et la démocratie. C’est le souvenir de ces événements qui constituent la base de notre identité commune européenne. Aujourd’hui, nous commémorons les victimes de la terreur nazie dans les pays occupés par le IIIe Reich. Nous honorons aussi les victimes de l’Holocauste, en d’autres termes le génocide commis contre les Juifs en Europe durant la Deuxième Guerre mondiale, qui fut un crime sans équivalent dans l’histoire de l’humanité. Nous commémorons la victoire des nations alliées sur le IIIe Reich et en particulier le rôle joué par les États-Unis d’Amérique dans la libération de l’Europe. Nous commémorons tous les soldats qui sont morts pour débarrasser le monde du nazisme et les 14 millions de soldats qui ont combattu dans l’Armée rouge. Nous commémorons les pertes subies par tous les acteurs au cours de la Deuxième Guerre mondiale, ainsi que ceux qui ont été victimes de Staline pendant la guerre. Le massacre d’environ 20 000 citoyens et prisonniers de guerre polonais à Katyn et dans d’autres camps et prisons en Union soviétique au printemps 1940 est devenu un symbole. Nous rendons hommage à ceux qui ont lutté pour la liberté, la démocratie et les droits de l’homme. Nous nous souvenons en particulier du mouvement héroïque de la résistance, qui a combattu le fascisme et l’occupation dans les différents pays. Les idéaux de ce mouvement et le sens du sacrifice de ses membres dans une guerre à sens unique sont notre véritable héritage, quelque chose aussi dont nous pouvons être fiers et un excellent exemple pour les jeunes Européens.

Je voudrais commémorer aujourd’hui le mouvement de résistance du ghetto de Varsovie et les membres de l’organisation militaire juive qui ont pris les armes le 19 avril 1943 afin de défendre le ghetto juif créé à Varsovie par les puissances occupantes. Sans aucune chance de l’emporter sur le plan militaire, en combattant comme ils l’ont fait en pleine guerre et au cœur de l’Europe dirigée par les nazis, ils ont donné à leur lutte un sens plus profond. Aujourd’hui, leur héroïsme constitue le plus fort témoignage de l’esprit humain de tous les temps et un témoignage des fondements moraux de l’Europe que nous avons construite. Pour faire écho aux sentiments exprimés dans un tract de l’organisation militaire juive, nous combattons pour votre liberté et la nôtre, pour votre dignité humaine et sociale et la nôtre, votre honneur national et le nôtre.

Mesdames et Messieurs, nous rappelons que la fin de la guerre n’a pas apporté une véritable libération, une véritable indépendance et une véritable démocratie à toutes les nations d’Europe. La fin de la guerre a engendré de nouvelles formes d’oppression et un manque de souveraineté et de démocratie pour l’Europe centrale et orientale, ainsi que pour les États baltes. Elle a engendré aussi des violations des droits de l’homme fondamentaux sous le status quo totalitaire qui fut imposé de ce côté-ci de l’Europe par l’Union soviétique, la perte d’indépendance de l’Estonie, de la Lituanie et de la Lettonie, leur incorporation dans l’Union soviétique. Tout au long du XXe siècle, les socialistes, les sociaux-démocrates et la gauche démocratique se sont opposés à toutes les formes de dictature et à tous les régimes non démocratiques. Nous sommes un mouvement politique qui a toujours été du côté de la démocratie et des droits de l’homme, que ce soit dans les États baltes, en Europe centrale et orientale ou dans les pays du sud de l’Europe, où les dictateurs ont pris le pouvoir après la Deuxième Guerre mondiale, à savoir le Portugal, l’Espagne et la Grèce.

Mesdames et Messieurs, je m’exprime aujourd’hui au Parlement européen à Strasbourg, sur un sol qui porte les cicatrices des guerres et de l’effondrement de l’Europe. Nos aïeux se sont battus ici dans des armées opposées. Nous nous rencontrons à présent en tant que citoyens et députés européens représentant une Europe unie. Depuis les années 50, l’intégration européenne et la construction d’une Communauté européenne ont été notre réponse à la guerre. Les conflits entre les nations de l’Europe ont été surmontés dans le processus de création des institutions européennes et cela reste le cas aujourd’hui. L’Union européenne qui est la nôtre aujourd’hui est le produit de trois processus démocratiques majeurs, à savoir la défaite du fascisme dans la guerre, la chute des dictatures dans le sud de l’Europe à la fin des années 70 et la victoire de la démocratie en Europe centrale et orientale, ainsi que dans les États baltes.

Un modèle d’ordre international est en train de naître en Europe sur la base de la paix et de la coopération; une communauté est en train de naître dans le respect de la dignité humaine, de la liberté, de la démocratie, de l’égalité, de l’état de droit et des droits de l’homme, dont les droits des minorités.

Les différents peuples qui vont former l’Union européenne, qui compte à présent 25 États membres, ont vécu une histoire différente. La ratification de la Constitution pour l’Europe permettra d’instaurer une Europe unie, avec pour objectifs la paix, la justice et la solidarité dans le monde. Cette Europe peut devenir également un espace privilégié de l’espérance humaine, pour reprendre la phrase utilisée dans le préambule au traité constitutionnel. Nous avons accompli ensemble un long chemin, d’une Europe dévastée par la guerre, les régimes totalitaires et la misère humaine, à une Europe démocratique dans laquelle les nations libres au sein de l’Union européenne créent ensemble un futur européen.

 
  
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  Jan Jerzy Kułakowski (ALDE). - (PL) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, 60 ans après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le futur de l’Europe dépend en grande partie de deux conditions de base. La première est que l’histoire des événements qui se sont déroulés pendant la Deuxième Guerre mondiale soit généralement reconnue et la deuxième est qu’une vision commune de l’intégration européenne se dégage sur la base de cette histoire.

La manière dont les personnes se souviennent de l’histoire peut différer selon que la fin de la guerre a représenté pour elles une véritable libération. Les Polonais se souviennent de quelques dates importantes qui ont fait de la Deuxième Guerre mondiale un événement tragique. La première date est le 1er septembre 1939, quand Hitler a attaqué la Pologne. Cette date a marqué le début du cauchemar de l’occupation, de la répression et des camps de concentration, au cours duquel les forces d’occupation se sont efforcées d’annihiler la nation et le peuple polonais. Ce fut aussi une époque de faits héroïques de la part de l’État et de la société dans la clandestinité. Les Polonais se souviennent aussi du 17 septembre 1939. Bien que cette date résonne moins aux oreilles de l’Europe occidentale, elle est pour nous à la fois pénible et hautement significative, c’est le jour où l’Union soviétique a attaqué la Pologne. Cette attaque venait dans la foulée de la conclusion du pacte Molotov-Ribbentrop entre Hitler et Staline, qui prévoyait une nouvelle partition de la Pologne. Les autres dates sont 1943, année de la découverte des crimes commis à Katyn en 1940, à savoir le massacre de dizaines de milliers d’officiers et de responsables polonais ordonné par Staline, pour la simple raison qu’ils étaient des serviteurs de l’État polonais. 1943 et 1944, dates de deux soulèvements héroïques. Le premier soulèvement est celui du ghetto de Varsovie, qui s’est terminé par une défaite, ou plutôt une extermination, et le deuxième est celui de Varsovie, que les troupes soviétiques ont regardé de la rive occidentale de la Vistule sans bouger. La dernière date dont les Polonais se souviennent est 1945, date de la Conférence de Yalta. Cette conférence a mené au rideau de fer qui a divisé l’Europe pendant 44 années, séparant mon pays, la Pologne, de la démocratie occidentale et de l’intégration. C’est tout ce que je tenais à dire sur notre manière de nous souvenir de l’histoire.

En ce qui concerne la vision commune de l’intégration européenne, je voudrais souligner un point fondamental. Nous nous souvenons des crimes qui ont été commis par des systèmes, ainsi que des victimes de ces systèmes. En aucun cas ces souvenirs ne doivent ni ne peuvent diviser les nations et les peuples. Tel est le message de Solidarité, le mouvement social polonais qui a déclenché la libération de l’Europe orientale et qui célèbre aussi son 25e anniversaire cette année. Ce mouvement a été le moteur de la reprise des relations entre les deux parties de l’Europe, qui avaient été séparées par les décisions prises à Yalta. Pour lui emboîter le pas, je voudrais dire catégoriquement que la solidarité doit être le principe directeur de notre futur commun.

Je voudrais conclure en demandant à tous les députés de voter pour cette résolution.

 
  
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  Tatjana Ždanoka (Verts/ALE). - (EN) Monsieur le Président, je pense qu’une Europe pacifique et prospère doit être fondée sur le respect des droits de l’homme. Pour cette raison, je ne peux pas approuver la résolution de M. Brok. Bon nombre de ses assertions créeraient une base juridique pour la violation des droits de l’homme et conduiraient à une grande injustice dans mon pays, la Lettonie, de même que dans l’Estonie voisine.

La proposition de résolution déclare que les pays d’Europe orientale étaient sous occupation soviétique depuis des décennies. Dans le cas de la Lettonie et de l’Estonie, une telle approche aurait des conséquences dangereuses pour plus d’un demi-million de personnes qui s’y sont installées au cours de ces décennies. M. Toomas Ilves d’Estonie expliquait récemment dans le Baltic Times ce que cette affirmation signifierait: «la protection des minorités dans les États baltes deviendra insensée». De plus, il y a deux semaines, le parlement letton a accepté de reconsidérer la déclaration demandant au Parlement européen une exemption de l’obligation d’accepter les citoyens étrangers et leurs descendants qui avaient immigré en Lettonie pendant la période d’occupation.

Mon père était officier dans la marine soviétique. Il a participé à la défaite de l’armée d’Hitler et de ses alliés locaux, Arājs, Cukurs et autres, responsables de la liquidation de 80 000 juifs lettons, y compris les grands-parents de mon père. De plus, mon père a été jeté hors de l’armée car il était juif, conformément aux ordres de Staline. Je n’accepterai jamais que mon père soit considéré comme un occupant, je n’accepterai jamais non plus que ma mère, une Russe orthodoxe, venu de St Pétersbourg à Riga en 1950, soit susceptible d’être rapatriée, comme le prévoit le projet de déclaration letton. L’affirmation contenue dans la résolution du Parlement européen encouragera les législateurs lettons à accepter cette déclaration dans un futur très proche. Je ne souhaite pas que les pays baltes deviennent de nouveaux Balkans. En tant que parlementaires, nous sommes pleinement responsables des mots que nous prononçons.

 
  
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  Giusto Catania (GUE/NGL). - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, le 8 mai 1945 a été la date qui annonçait la fin de la Deuxième Guerre mondiale, mais elle a été aussi la date qui a scellé la fin des dictatures fascistes et nazies en Europe. Ce jour-là, l’Europe s’est libérée du spectre de l’autoritarisme. Cette date annonçait aussi le début d’une Europe qui aspirait à la paix et à la justice sociale.

L’Europe a été libérée par la résistance d’hommes et de femmes, des partisans qui ont jeté les fondations institutionnelles et morales de cette Europe. L’Europe a été libérée par ceux qui se sont battus à Stalingrad; elle a été libérée par les troupes alliées américaines et canadiennes, et aussi par l’armée soviétique. Cette date peut être considérée comme la pierre angulaire de la construction d’une nouvelle Europe.

Cette page de l’histoire est malheureusement trop souvent pillée et assaillie par les révisionnistes. Même ce débat est vicié par un élan indéniablement révisionniste. En mêlant indistinctement le 8 mai 1945 aux crimes du stalinisme, nous rendons un mauvais service à la commémoration de la libération de l’Europe. Je voudrais être clair sur ce point: pour ce qui est des convictions politiques, des données personnelles et de l’épanouissement culturel, mon groupe et moi-même n’éprouvons aucun problème à condamner fermement les horreurs du stalinisme; toutefois, dans ce débat, certains essayent subrepticement de ranimer les théories de Nolte, qui font l’amalgame entre le nazisme et le communisme, et pas seulement le stalinisme.

En vérité, les valeurs de paix et de justice sociale ont été menacées en un siècle non seulement par le stalinisme, mais aussi par le colonialisme, l’impérialisme et le néolibéralisme: de l’Algérie au Viêt Nam, du bombardement de Belgrade aux massacres de Sabra et Shatila, jusqu’aux événements du 11 septembre 1973 à Santiago du Chili.

Il faut rendre service à l’histoire: le souvenir du passé est un don crucial qui nous permet d’affronter l’avenir et de construire les perspectives de cette Europe. Il n’existe qu’une seule manière de rendre l’Europe plus forte: nous devons bannir le mot «guerre» de notre vocabulaire. L’Europe doit jouer un rôle actif dans l’édification d’un monde pacifique, qui s’étend de l’Irak à l’Afghanistan, en passant par la Palestine. En guise de conclusion, l’Europe doit être plus courageuse et faire autorité; nous devons changer le fameux dicton latin et dire si vis pacem para pacem, autrement dit si tu veux la paix, prépare la paix. Telle doit être la lumière qui nous guide.

 
  
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  Nigel Farage (IND/DEM). - (EN) Monsieur le Président, je me demande parfois quels arguments plaident en faveur de l’Union européenne. Ils ne peuvent certainement pas être économiques, car nous ne vivons pas dans un monde où les barrières commerciales sont élevées et il est certain qu’il existe maintenant une économie globale. Ils ne peuvent certainement pas non plus être démocratiques, car ce Parlement est le seul élément démocratique de l’Union européenne et il est pratiquement inutile.

Cependant, s’il y avait un argument en faveur de l’Union européenne qui me ferait changer d’avis, ce serait le fait que l’Union européenne nous donne, nous garantisse, la paix. Cependant, tout ceci est fondé sur une série de fausses suppositions. Ce ne sont pas les États nations démocratiques qui ont provoqué la Première et Seconde Guerres mondiales. Si nous regardons en arrière dans l’histoire, nous constatons que les démocraties abouties ne se font pas la guerre entre elles.

C’est pourquoi il est faux et presque mensonger de déclarer que c’est l’UE qui a maintenu la paix en Europe au cours des cinquante dernières années. Quelle guerre a-t-elle donc empêchée? Le Portugal avait-il l’intention d’attaquer l’Italie au milieu des années 1970? Quelle guerre éventuelle pourrait-elle donc avoir stoppée? S’il y a eu un garant de la paix au cours des cinquante dernières années, il s’agit avec certitude de l’OTAN, un exemple de coopération intergouvernementale.

Le président Borrell a parlé de la réunification de l’Europe. Je me demande parfois ce qu’il évoque véritablement. Le plus important est de savoir si l’UE peut garantir la paix. Une fédération peut-elle garantir la paix? Ça n’a pas été le cas en Yougoslavie ou en URSS, ça n’a pas non plus été le cas aux États-Unis d’Amérique qui, vous vous en souvenez, ont vécu l’une des guerres civiles les plus amères et les plus sanglantes de l’histoire de l’humanité. Si nous continuons à vendre ce projet, qui repose sur un mensonge, aux peuples d’Europe, nous avons toutes les chances de causer et d’alimenter d’amers ressentiments et un nationalisme extrême. Ce que nous devons faire, c’est dire la vérité sur nos ambitions aux peuples d’Europe et leur donner des référendums libres et justes, sinon nous allons droit au désastre.

 
  
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  Ģirts Valdis Kristovskis (UEN). - (LV) Mesdames et Messieurs, soixante ans après la Deuxième Guerre mondiale, je peux dire avec conviction que l’Union européenne est le meilleur modèle de coopération entre les pays jamais expérimenté à ce jour sur le vieux continent. En Europe, le dialogue a remplacé les guerres, mais la réconciliation, la profonde compréhension de la vérité historique et l’entrelacs mutuel des intérêts des États et des responsables politiques ne sont toujours pas au rendez-vous.

Oui, nous commémorons ensemble une des plus grandes victoires de l’humanité sur l’idéologie nazie. Nous nous souvenons des victimes du fascisme et nous nous inclinons en mémoire des combattants morts. Oui, il est satisfaisant de voir que, toutes tendances confondues, le Parlement européen a pu s’unir autour de la résolution concernant la fin de la Deuxième Guerre mondiale et pour la première fois évaluer et condamner simultanément les crimes des régimes nazi et communiste en même temps. Mesdames et Messieurs, notre déclaration commune affirme sans ambiguïté qu’il ne peut y avoir de réconciliation sans vérité historique, que seul une Europe forte peut apporter des solutions sur la manière de surmonter l’héritage du passé, qui se fonde sur l’injustice et les 50 années de dégradation sociale, politique et économique pour les nations qui sont restées prisonnières. Malheureusement, notre déclaration ne dit pas tout. Nous ne pouvons pas non plus accepter ce que Jean-Claude Juncker a dit hier à Moscou. Il a dit qu’il incombe aux générations futures de régler ces problèmes. Seuls les forts appellent les choses par leur vrai nom. Il y a quelques jours à Riga, George Bush a déclaré sans ambiguïté que «l’accord de Yalta s’inscrit dans la tradition injuste de Munich et du pacte Molotov-Ribbentrop. Une fois de plus, quand des gouvernements puissants négociaient, la liberté des petites nations était en quelque sorte élastique. Cette tentative de sacrifier la liberté pour le bien de la stabilité a donné naissance à un continent divisé et instable». La véritable guerre froide en Europe, qui a duré pratiquement 50 ans, confirme ses dires. Tous le monde au Parlement européen sait que l’OTAN, l’union de l’Atlantique nord, est née pour promouvoir la sécurité européenne dans le climat de peur d’une invasion par le régime soviétique totalitaire, cynique et agressif. Cela confirme le fait que pour l’Occident, à la suite de la Deuxième Guerre mondiale, on ne pouvait pas faire confiance à un allié comme Staline. L’empire malfaisant créé par Staline était inacceptable, même si avant cela la victoire sur l’idéologie nazie avait été célébrée en commun.

Mesdames et Messieurs, il faudrait bien garder ce que je viens de dire à l’esprit lorsque nous pensons au futur de l’Europe. Soixante années se sont écoulées depuis la Deuxième Guerre mondiale et l’Europe façonne son futur avec ses alliés. Malheureusement, la Russie, héritière de l’URSS, continue de nier son influence sur les pays d’Europe orientale et l’occupation de mon pays, la Lettonie, de la Lituanie et de l’Estonie. Ce reniement de la vérité historique, la défense délibérée des crimes du régime communiste, est humiliant. Il équivaut à mépriser les victimes, les morts et les blessés de ce régime, et pourtant cela se passe aujourd’hui. La Russie essaye de saisir les occasions de manipuler l’opinion publique mondiale. Elle maintient le problème des non-citoyens en Lettonie sous les feux de l’actualité et l’exagère, tout en continuant de violer les droits de l’homme des victimes du régime soviétique totalitaire et de leurs proches, en niant leurs souffrances et leurs pertes. Cette attitude de la Russie ne contribue pas à favoriser sa réconciliation avec les États d’Europe orientale et baltes, qui ont recouvré leur liberté. Il faut une véritable condamnation des crimes du communisme et un règlement de leurs conséquences au nom de la stabilité future de l’Europe. Je vous demande de voter pour la résolution!

 
  
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  Jana Bobošíková (NI). - (CS) Mesdames et Messieurs, l’histoire des nations de l’Union européenne n’a pas été un long fleuve tranquille. Ces nations se sont battues les unes contre les autres, se sont trahies et ont commis des atrocités les unes envers les autres. Ce sont les Européens qui ont accouché de l’idée de la suprématie de la race aryenne, de la solution finale pour les autres races et des chambres à gaz. Qui plus est, au début, le reste de l’Europe est resté sans bouger alors que cette idée était concrétisée.

Je regrette de dire qu’on n’a pas encore tiré un trait sur cette période. Soixante ans après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, certains députés de cette Assemblée refusent de voter pour une résolution condamnant l’Holocauste, persistent à mettre la souffrance des victimes de la Deuxième Guerre mondiale sur le même pied que celle de ses architectes, déforment le passé et ne font pas correctement la différence entre les causes et les effets du conflit le plus épouvantable de tous les temps.

Les discours récents de plusieurs représentants importants des États membres et des institutions européennes commémorant le 60e anniversaire de la fin de la guerre ont montré qu’ils sont obsédés par l’idée que notre âge d’or de prospérité et de paix résulte directement de l’histoire de l’Union européenne. Pour le bien des générations futures, nous ne devons pas oublier que c’est loin d’être le cas. La paix en Europe peut tout aussi bien être attribuée à la présence de troupes américaines sur le sol européen et la prospérité peut s’expliquer par la croissance économique en Asie et aux États-Unis, ainsi que par l’augmentation du commerce international. En ce qui concerne la liberté, des révolutions ont eu lieu dans plusieurs pays européens, dont le mien, sans aucune aide de Bruxelles.

Je m’inquiète de voir que la démocratie et la prospérité que nous sommes parvenus à atteindre sont à présent menacées. Le potentiel de l’Europe à agir comme un acteur global sera diminué par l’incompréhensible et injuste Constitution européenne, qui profite à certains pays au détriment d’autres. La distance entre les responsables politiques et le monde réel constitue un facteur supplémentaire qui menace l’avenir de l’Europe, les citoyens des États membres comprenant de moins en moins le langage des institutions européennes et de leurs représentants. Où va l’Europe si les citoyens ne comprennent pas ses dirigeants? Deviendra-t-elle la proie facile du populisme de la pire espèce, simplement parce que personne ne la comprend?

Je crois fermement qu’aucune campagne médiatique ne parviendra jamais à accroître la confiance de la population dans l’idée d’une Europe commune. La seule manière d’y parvenir consiste à mettre en œuvre des mesures concrètes et compréhensibles, qui apportent des solutions aux problèmes réels. L’incapacité des dirigeants européens à promouvoir la croissance et l’approche euronationaliste timorée concernant les questions économiques constitue une réponse loin d’être satisfaisante aux faits concrets de l’économie mondialisée.

Je représente les citoyens d’un pays qui a souffert du rideau de fer, qui est tombé il y a quinze ans. Aujourd’hui, on tente d’ériger de nouveaux «rideaux» en Europe pour éloigner les États-Unis, le textile chinois, la main-d’œuvre bon marché et de nombreux demandeurs d’asile. Nous ne résoudrons pas les problèmes auxquels l’Union européenne est confrontée en nous isolant du monde.

Compte tenu du manque d’intérêt des citoyens et de la récession économique, il devient évident que la manière actuelle de gouverner l’Europe doit changer pour que l’Europe soit compétitive.

Je crois que les dirigeants de l’UE doivent avoir le courage de s’avouer et d’avouer à la population que la stratégie de Lisbonne revitalisée et la Constitution européenne injuste mènent à une impasse et non à plus de justice, plus de liberté ou de prospérité. La seule bonne réponse à l’état actuel de l’économie et de la politique mondialisées consiste à être ouvert, à limiter notre ingérence dans les affaires économiques, à baisser les taxes, à permettre aux États-nations d’agir avec plus de souplesse et à coordonner les politiques au niveau communautaire d’une manière raisonnable et uniquement quand cela s’avère nécessaire.

 
  
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  Le Président. - J’ai reçu une proposition de résolution(1), déposée sur la base de l’article 103, paragraphe 2, du règlement.

Le débat est clos.

Le vote aura lieu jeudi.

Déclaration écrite (article 142)

 
  
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  Pedro Guerreiro (GUE/NGL). - (PT) Cette commémoration du 60e anniversaire de la victoire sur le nazisme/fascisme a donné lieu à un exercice répugnant de révisionnisme et de distorsion historique, dont fait partie la proposition de résolution inacceptable déposée par la commission des affaires étrangères.

Loin d’être naïve, cette falsification lamentable de l’histoire vise à remplir certains objectifs très spécifiques.

Le but consiste à effacer la contribution essentielle de l’Union soviétique et la lutte glorieuse de son peuple pour détruire la machine à tuer brutale des armées et des régimes nazis et fascistes, ainsi que son rôle décisif pour contenir l’agression impérialiste au cours de la période de l’après-guerre.

Cette proposition de résolution vise à réduire au silence et à diffamer le rôle glorieux et héroïque des communistes dans la lutte antifasciste.

Elle veut atténuer l’horreur nazie, ses millions de morts dans les camps de concentration, les millions d’hommes, de femmes et d’enfants tués, et la destruction systématique de pays entiers.

Elle veut dissimuler le fait que l’ascension de Hitler au pouvoir a bénéficié du soutien des capitaux allemands et de la complicité des grands intérêts capitalistes, qui ont nourri l’espoir jusqu’à la fin que la machine de guerre nazie détruirait l’ennemi principal, l’Union soviétique.

Elle cherche, tout comme il y a soixante ans, à défendre l’indéfendable, à savoir l’agressivité impérialiste et militariste, l’agression perpétrée contre la souveraineté des peuples.

Elle n’y parviendra pas!

 
  

(1) Cf. procès-verbal.


17. Heure des questions (Conseil)
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  Le Président. - L’ordre du jour appelle l’heure des questions (B6-0236/2005) conformément à l’article 109 du règlement. Nous examinerons une série de questions au Conseil.

 
  
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  Le Président. - La question n° 1 est retirée.

Question n° 2 de M. Robert Evans (H-0284/05):

Objet: Situation des enseignants qualifiés aux États-Unis

Le Conseil sait-il que le Bureau National des Relations du Travail (NLRB) des États-Unis d’Amérique a privé les enseignants qualifiés travaillant dans les universités privées, de la protection de la législation américaine du travail? Le droit de s’organiser collectivement en syndicat fait partie des droits de l’homme. Le Conseil est-il disposé à faire pression sur l’administration Bush pour permettre aux syndicats universitaires de s’organiser afin de préserver la qualité de l’emploi, les libertés académiques et les normes intellectuelles des universités américaines?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Monsieur le Président, concernant la situation des enseignants qualifiés aux États-Unis, je peux répondre à l’honorable M. Robert Evans que le Conseil n’est pas informé de la situation exposée dans cette question.

Le type de relations professionnelles mentionnées par l’honorable parlementaire relève de la seule compétence des États membres. C’est pourquoi, bien que les questions relatives aux droits de l’homme constituent une partie importante du dialogue régulier entre l’Union européenne et les États-Unis, l’Union n’est pas en mesure de débattre de ce type de relations professionnelles avec les autorités américaines.

 
  
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  Robert Evans (PSE). - (EN) Je vous remercie pour cette réponse, même si ce n’était pas tout à fait celle que je souhaitais. Ce sujet ne mérite certainement pas que 25 pays agissent individuellement. C’est un problème très sérieux.

Nos relations avec les États-Unis ne se limitent pas au commerce et aux affaires financières, de même, ce problème ne concerne pas seulement les États-Unis, ni uniquement les citoyens américains, car un bon nombre d’Européens enseignent dans ces institutions américaines. Maintenant, je crois comprendre que le doyen de l’université de Columbia à New York a émis des instructions sur la façon dont il souhaitait que les enseignants qualifiés soient traités et punis.

Je souhaite dire à la présidence, par solidarité et pour la défense de la législation internationale du travail, que nous ne devrions pas rester silencieux sur le sujet et nous tenir à l’écart en permettant un abus flagrant des droits des travailleurs. Bien que cela se passe aux États-Unis, cela pourrait aussi concerner des citoyens européens. Je l’encourage à y retourner pour voir ce qui peut être fait de plus.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Je suis au regret de ne pas pouvoir répondre autre chose que ce que j’ai déjà dit, mais je prends bonne note malgré tout des commentaires de l’honorable député. Chaque pays doit certainement, et je partage absolument ce point de vue, respecter les lois internationales régissant le travail. C’est un point que je retiens et qui pourra certainement, comme je l’ai dit, être évoqué dans le cadre des relations avec les États-Unis.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 3 de M. Posselt (H-0294/05):

Objet: Dispositions relatives aux minorités en Macédoine et en Serbie

Les dispositions relatives aux minorités en vigueur en Serbie - en particulier en Voïvodine, dans le Sandjak de Novi Pazar et la vallée de Presevo - sont-elles conformes aux normes européennes? Quelle appréciation le Conseil porte-t-il sur ces dispositions, par rapport aux normes prévues par l’accord d’Ohrid pour la Macédoine?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Le Conseil suit de près l’évolution de la situation relative aux droits des minorités dans les Balkans occidentaux. La dernière analyse réalisée quant aux droits des minorités en Serbie-et-Monténégro est celle présentée par la Commission dans son étude de faisabilité pour l’ouverture des négociations sur un accord de stabilisation et d’association avec la Serbie-et-Monténégro. La situation concernant les droits des minorités dans l’ancienne République yougoslave de Macédoine quant à elle a été décrite dans le dernier rapport annuel de la Commission élaboré dans le cadre du processus de stabilisation et d’association.

En général, la situation en matière de droits des minorités dans la région des Balkans occidentaux s’est améliorée au cours de ces dernières années, bien que des progrès importants restent encore à faire. Au lieu d’établir une comparaison entre les dispositions prises vis-à-vis des minorités en Serbie-et-Monténégro et dans l’ancienne République yougoslave de Macédoine, le Conseil entend continuer à encourager les deux pays, compte tenu de leur situation tout à fait spécifique, à poursuivre une politique des minorités complètement conforme aux normes européennes.

 
  
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  Bernd Posselt (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, l’accord d’Ohrid a imposé à la Macédoine des conditions très contraignantes pour la protection des minorités. Je souhaiterais qu’il n’y ait pas deux poids, deux mesures, et il me semble que c’est le danger ici. Il s’agit de deux points en particulier: le Sandzak de Novi Pazar et la Voïvodine, où les problèmes concernant les minorités restent extrêmement sérieux, et c’est sur cela que je souhaite attirer votre attention.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Je conviens volontiers de l’importance d’attirer l’attention du Conseil sur le traitement des minorités dans les régions que vous venez d’indiquer et d’établir une sorte de comparaison avec la protection des minorités selon l’accord d’Ohrid.

Cependant, je crois qu’il s’agit de deux situations différentes qui doivent être évaluées en tant que telles. L’Union ne manquera certainement pas, dans le cadre du développement de ses relations avec la Serbie, d’insister fortement sur la protection des minorités dans les régions auxquelles vous avez fait référence.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 4 de M. Davies (H-0295/05):

Objet: Commerce direct avec la partie nord de Chypre

Quelle réponse le Conseil a-t-il donné à la suggestion faite par le commissaire Rehn, lors de la réunion de janvier de la commission des affaires étrangères, selon laquelle, dans une tentative de sortir de l’impasse actuelle, la Commission était disposée à envisager l’ajout de l’article 308 du traité CE en tant que seconde base juridique des règlements en matière d’aide et de commerce?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Comme cela a déjà été souligné en réponse à des questions similaires, le Conseil n’a cessé d’affirmer son attachement à la poursuite des efforts pour la réunification de Chypre et son souhait est que tous les Chypriotes puissent bientôt se retrouver ensemble, en tant que citoyens chypriotes et européens d’une île réunie au sein de l’Union européenne.

Dans cette perspective, l’Union européenne s’est employée à examiner des mesures susceptibles de mettre un terme à l’isolement de la communauté chypriote turque et à faciliter la réunification de Chypre en encourageant le développement économique de la communauté chypriote turque. Certaines mesures ont déjà été prises à cet effet, comme le règlement dit de la ligne verte, adopté en 2004 et récemment amendé afin d’en élargir le champ d’application et d’en augmenter l’efficacité.

Un travail important a également été réalisé autour d’autres mesures, à savoir les propositions de la Commission concernant, d’une part, l’instrument de soutien financier visant à encourager le développement économique de la communauté chypriote turque et, d’autre part, les échanges avec les zones où le gouvernement de la République de Chypre n’exerce pas de contrôle effectif. L’adoption de ces deux propositions n’est pas encore possible car il reste des difficultés à surmonter, en particulier pour ce qui est des échanges directs.

C’est à cette dernière proposition que l’honorable parlementaire se réfère plus particulièrement. L’hypothèse avancée par le commissaire Rehn lors de la réunion de janvier de la commission des affaires étrangères du Parlement, concernant l’éventuelle modification de la base juridique de cette proposition, n’a pas, à ce jour, été présentée au Conseil. Il appartient, en effet, à la Commission de modifier en ce sens sa proposition, si elle le souhaite. La Présidence ne peut évidemment pas, à ce stade, préjuger des délibérations éventuelles du Conseil à cet égard.

Je dois noter, néanmoins, qu’il y a des avis juridiques qui ne confirment pas l’approche de la Commission quant à la base juridique retenue initialement par elle. Le Conseil peut, par l’intermédiaire de la Présidence, assurer une fois de plus l’honorable parlementaire qu’il poursuivra ses efforts afin de favoriser l’intégration économique de l’île et l’amélioration des rapports entre les deux communautés chypriotes et avec l’Union européenne.

 
  
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  Sarah Ludford (ALDE), suppléant l’auteur. - (EN) Je remercie le président en exercice du Conseil pour cette réponse. J’ai l’impression que chacun se rejette la faute. Cela fait au moins un an que le Conseil s’est engagé à mettre fin à l’isolement des Chypriotes turcs à la suite de leur «oui» au plan Annan de l’ONU, en faveur d’un compromis politique, qui a remporté deux tiers des voix. On peut se demander quelle confiance accorder aux promesses de l’UE devant cet exemple de parole non tenue. Comme l’a souligné le ministre, le commerce direct et le soutien à l’économie du nord de l’île serviront le compromis politique. Il n’est dans l’intérêt de personne que les Chypriotes turcs aient un revenu et un développement économique tellement inférieur à celui des Chypriotes grecs.

Quand exercera-t-on des pressions sérieuses pour tenir effectivement cette promesse faite il y a un an? Pendant ce temps, les Chypriotes turcs sont laissés dans leur isolement, perdant confiance dans les promesses de l’UE. Je dois avouer que je ne peux les blâmer. Quand pouvons-nous nous attendre à voir ces deux réglementations approuvées?

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. DOS SANTOS
Vice-président

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Je peux vous dire simplement, Madame, que votre question vient à point nommé, puisque dans une heure et demie, moi-même, en tant que représentant de la Présidence, et le commissaire Rehn, allons nous rendre à Chypre pour essayer de discuter des problèmes que vous venez d’évoquer. Je crois qu’il est tout à fait dans l’intention de la Présidence d’obtenir, dans les meilleurs délais, le règlement de ces problèmes et de se conformer ainsi aux engagements politiques que le Conseil a pris en avril dernier.

 
  
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  Le Président. - Son auteur étant absent, la question n° 5 est caduque.

Question n° 6 de M. Mitchell (H-0299/05):

Objet: Respect des engagements pris par les États membres de l’UE en matière d’aide

Un rapport commun d’Oxfam, d’ActionAid et du Réseau européen sur la dette et le développement vient d’être publié; il évalue les performances des États membres de l’UE dans le domaine du développement. Lors de l’Assemblée générale des Nations unies en 1970, les pays riches de la planète étaient convenus de consacrer 0,7% du RNB à l’aide au développement, au plus tard en 1980. Vingt-cinq ans après cette échéance, seuls cinq pays ont atteint cet objectif, dont quatre sont des États membres de l’UE. Beaucoup d’autres pays n’ont pas tenu leurs promesses en matière d’éradication de la pauvreté. L’Irlande, par exemple, a abandonné son projet de parvenir au taux cible de 0,7% d’ici à 2007.

Étant donné que la présidence luxembourgeoise a fait de la lutte contre la pauvreté le principal objectif de son programme, usera-t-elle de son influence pour inciter les États membres à renouveler leurs engagements en matière d’aide? Comment entend-elle en outre assurer la réalisation des objectifs de l’UE dans le secteur de l’aide au développement?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Les propositions de la Commission qui identifient les mesures à prendre pour accélérer la réalisation des objectifs du Millénaire sont sur la table du Conseil, au niveau du groupe de travail, depuis le 14 avril 2005. La Présidence luxembourgeoise a l’intention de tout mettre en œuvre pour que le Conseil soit en mesure, lors de sa session des 23 et 24 mai prochains, de définir les grandes lignes de ses engagements renouvelés qui viseront pour l’essentiel, premièrement, à fixer de nouveaux objectifs intermédiaires d’accroissement des budgets d’aide publique à l’horizon 2010, individuels et relatifs à l’Union dans son ensemble, en vue de parvenir à un effort global de 0,7% du revenu national brut en 2015; deuxièmement, à accélérer les réformes pour améliorer la qualité de l’aide; troisièmement, à reconsidérer la manière dont l’Union européenne, à travers son propre modèle de développement durable, par ses politiques internes et externes, peut influencer les conditions du développement. Il s’agit là de la cohérence des politiques au service du développement, qui constitue un élément fondamental de notre approche en matière de coopération et de développement et quatrièmement, à faire bénéficier l’Afrique, en priorité, de ces nouvelles orientations et saisir les opportunités nouvelles d’un partenariat entre les deux continents.

L’Union européenne est pleinement consciente de l’importance et de l’urgence de la tâche. Dans ce contexte, le Conseil européen, lors de sa réunion des 22 et 23 mars, a invité la Commission et le Conseil à accélérer leurs travaux, notamment en ce qui concerne les diverses composantes du volet «développement» de façon à finaliser les positions sur les différents sujets et à permettre à l’Union européenne de jouer un rôle actif lors des discussions à venir en vue du sommet des Nations unies du mois de septembre 2005. J’ai déjà annoncé ce matin que le Conseil Ecofin, après avoir, lors de sa dernière réunion, délibéré des nouveaux modes de financement possibles, va revenir sur cette question lors de la réunion informelle qu’il tiendra ce week-end.

 
  
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  Gay Mitchell (PPE-DE). - (EN) Je souhaite faire remarquer au président en exercice du Conseil que ce seuil de 0,7% a été approuvé il y a 35 ans et qu’à la date d’aujourd’hui seulement cinq États, quatre d’entre eux étant des États membres de l’UE - quatre sur vingt-cinq - ont atteint ce seuil de 0,7%. En 2025, il y aura deux milliards d’habitants de plus sur cette planète, 90% d’entre eux naîtront dans le tiers-monde. Quelle sorte de monde allons-nous laisser aux générations futures? Nous venons de parler de la Seconde Guerre mondiale. Que construisons-nous pour nos enfants et nos petits-enfants? Quelles mesures sérieuses prendra le Conseil afin de s’assurer que les États membres respectent leurs obligations?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Je pense effectivement qu’il existe une nouvelle volonté de s’orienter clairement et résolument vers l’objectif de 0,7%. Je partage évidemment ce qui vient d’être dit par l’honorable député: cela fait trop longtemps. On parle en effet depuis plus de 30 ans de cet objectif. Il est temps maintenant de le mettre en œuvre et il est vrai que les délais qui ont été fixés sont peut-être encore excessivement longs.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 7 de M. David Martin (H-0302/05):

Objet: Mordechai Vanunu

Lors de l’heure des questions du 23 février 2005, l’auteur de la présente question a demandé au Conseil de bien vouloir rappeler aux Israéliens que M. Mordechai Vanunu avait été enlevé illégalement - en fait littéralement kidnappé - sur le sol européen, qu’il avait été jugé en Israël pour des faits qu’il aurait commis il y a vingt ans et qu’il serait donc fallacieux de prétendre qu’il détient encore des secrets pouvant nuire à Israël. À cette occasion, l’auteur de la présente question avait également demandé au Conseil d’inviter le gouvernement israélien à cesser de persécuter cette personne, à lui permettre de quitter Israël, pour s’installer dans l’Union européenne, si tel est son souhait.

Quelles mesures le Conseil entend-il prendre, étant donné que le gouvernement israélien semble continuer à persécuter M. Vanunu?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Depuis mon intervention devant le Parlement en février dernier, le gouvernement israélien a, à notre grand regret, décidé de prolonger de 12 mois supplémentaires les restrictions imposées à la libération de M. Mordechai Vanunu l’année dernière. En outre, un procès est en cours, dans lequel M. Vanunu est accusé d’avoir enfreint ces restrictions et à l’issue duquel il risque une autre peine de prison. Il semble que cette affaire soit pour les autorités israéliennes d’une sensibilité extrême. Ces autorités paraissent vouloir protéger, par ce biais, la sécurité de l’État d’Israël. En prenant sa décision de prolonger les restrictions imposées à M. Vanunu, le gouvernement israélien a affirmé que celui-ci avait encore des informations à divulguer.

Ceci dit, près de 20 ans après les faits, il est aussi légitime de reconnaître à un individu ayant passé 18 ans en prison ses droits fondamentaux, comme la faculté de vivre dans la dignité, libre et en paix. Nous allons donc poursuivre le dialogue avec les autorités israéliennes, notamment sur cette question de respect des droits de l’homme, dans le cadre du dialogue politique que nous menons avec elles, ainsi que dans la mise en œuvre de la politique de voisinage à laquelle le gouvernement d’Israël s’est engagé à coopérer, sur les questions de sécurité et de non-prolifération des armes de destruction massive, et, précisément, sur le respect des droits de l’homme.

 
  
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  David Martin (PSE). - (EN) Je remercie le président en exercice du Conseil pour sa réponse qui fut aussi utile que possible dans ces circonstances. Cependant, il est clair pour moi que l’attitude d’Israël est passée de la protection de la sécurité de l’État à la persécution de cet homme. J’espère vraiment que le Conseil maintiendra la pression sur Israël pour qu’il soit acquitté. Mordechai Vanunu a été élu recteur de l’université de Glasgow, dans mon pays, et nous souhaiterions vraiment beaucoup qu’il puisse venir à l’université prendre ses fonctions. C’est pourquoi j’espère que le Conseil maintiendra la pression.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Le Conseil prend note et fera ce que je viens de dire.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 8 de M. Beglitis (H-0306/05):

Objet: Violation de droits fondamentaux de Grecs de Géorgie

Des délits sont commis actuellement en Géorgie contre la population grecque. Des agressions sont perpétrées dans la région de Tsalka, berceau de la population grecque de souche. Des familles grecques ont été assassinées et d’autres chassées de leurs villages, comme le dénoncent les organisations des Grecs natifs. Dans le même temps, problème il y a avec la propriété immobilière de la population grecque: il ressort d’informations que, au cours des sept dernières années, quelque 7 000 «envahisseurs» se sont emparés d’habitations et de biens, qu’ils refusent de restituer à leurs propriétaires légitimes.

Le Conseil est-il au courant de ces faits? Quelles mesures a-t-il l’intention de prendre pour que la protection des droits fondamentaux des Grecs de Géorgie soit assurée? La présidence et M. Solana ont-ils l’intention d’entreprendre une démarche auprès du gouvernement de Tbilissi (Tiflis) à ce sujet? M. Solana est-il disposé, en collaboration avec l’OSCE, le Conseil de l’Europe et la Commission des droits de l’homme de l’Organisation des Nations unies, à déposer un rapport au sujet de la situation des droits de l’homme des Grecs de Géorgie?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Le Conseil tient d’abord à remercier l’honorable parlementaire pour les informations qu’il a communiquées au sujet de la violation des droits fondamentaux des Grecs de Géorgie. Dans le dialogue politique que l’Union européenne entretient avec la Géorgie, le Conseil a, à maintes reprises, exprimé ses préoccupations quant à la nécessité d’améliorer la protection des droits de l’homme dans ce pays partenaire. L’Union continuera de mettre à profit toutes les occasions qu’elle aura de faire part de ses préoccupations concernant les droits de l’homme en Géorgie, notamment dans le cadre de sa coopération avec l’OSCE, le Conseil de l’Europe et la Commission des droits de l’homme des Nations unies.

Le Secrétaire général et haut représentant pour la PESC a nommé le 17 janvier 2005 M. Michael Matthiessen pour être son représentant personnel pour les droits de l’homme. Le représentant spécial de l’Union européenne pour le Caucase du Sud, M. Talvitie, aide également la Géorgie à mener à bien des réformes politiques et économiques, notamment en ce qui concerne l’État de droit, la démocratisation, les droits de l’homme, la bonne gestion des affaires publiques, le développement et la réduction de la pauvreté.

Le Conseil, dans ses conclusions du 25 avril, a relevé l’importance de ces objectifs et renouvelé son engagement de développer, dans le cadre de ses relations, et notamment de la politique européenne de voisinage, ces différents éléments. Lors de la rédaction et de la négociation du plan d’action relatif à la politique européenne de voisinage entre l’Union européenne et la Géorgie, l’Union européenne insistera sur la nécessité d’améliorer la protection des droits de l’homme dans ce pays. Le Conseil a donc l’intention de suivre de très près l’évolution de la situation de la communauté grecque et de soulever la question auprès des autorités géorgiennes chaque fois qu’il y aura lieu de le faire.

Le Parlement européen souhaitera peut-être lui aussi aborder cette question lors de la prochaine réunion du comité de coopération parlementaire Union européenne-Géorgie, qui, d’après mes informations, aura lieu les 13 et 14 juin 2005.

 
  
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  Panagiotis Beglitis (PSE). - (EL) Monsieur le Président, je souhaite remercier le président en exercice du Conseil pour sa réponse. Je suis totalement d’accord avec les principes de base qu’il a définis pour nous.

Cependant, le problème ne concerne pas seulement les principes de base: il s’agit de ce que nous pouvons faire, concrètement, au sein de l’Union européenne, pour protéger les droits de l’homme et des minorités en Géorgie et à travers le monde. Quels leviers et quels mécanismes de contrôle pouvons-nous actionner, au sein de l’Union européenne, pour persuader les autorités géorgiennes ou faire pression sur elles afin qu’elles respectent les droits de la minorité grecque.

Je dis cela, car j’ai devant moi le rapport du représentant spécial de l’Union européenne pour les droits de l’homme en Géorgie - puisque vous avez fait référence à lui -, daté du 12 avril, qui décrit la situation des droits de l’homme, et je dois dire qu’il décrit une situation très déplaisante pour les Grecs de Géorgie.

Que faisons-nous? De quels instruments disposons-nous dans le cadre de nos relations avec la Géorgie? Je pense que c’est cela qui importe aujourd’hui.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - La Géorgie a traversé une période de grands troubles mais s’est engagée maintenant sur la voie de la démocratisation. Elle cherche par ailleurs le rapprochement avec l’Union européenne. Je crois que ce rapprochement avec l’Union européenne, notamment dans le cadre de la politique européenne de voisinage, devrait permettre d’exercer également une pression sur les autorités géorgiennes pour les amener à respecter non seulement les droits de l’homme en général, mais surtout aussi les droits des minorités. Je crois donc que, dans le cadre des relations entre l’Union européenne et la Géorgie, cette question devra occuper une place importante. C’est d’ailleurs parce que la Géorgie veut se rapprocher de l’Europe, et notamment de l’Union européenne, que nous serons plus à même de défendre aussi les droits des minorités grecques auxquelles vous avez fait référence.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 9 de M. Moraes (H-0309/05):

Objet: Décennie de l’inclusion des Roms 2005-2015

Le 2 février 2005, à Sofia, huit chefs d’États et de gouvernements ont lancé la «Décennie de l’inclusion des Roms 2005-2015». Ils se sont engagés à œuvrer dans le but d’éliminer la discrimination et de combler l’écart inacceptable qui existe entre les Roms et le reste de la société.

Comment le Conseil compte-t-il contribuer à la concrétisation des objectifs de cette initiative? Le Conseil est-il prêt à faire régulièrement état de l’évolution de l’intégration des Roms au sein de la société européenne?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Le Conseil se félicite de l’engagement pris par plusieurs chefs d’État et de gouvernement, le 2 février 2005, à Sofia, d’éliminer toute forme de discrimination à l’égard des Roms d’ici à 2015. Je n’ai pas besoin de rappeler les débats que nous venons d’avoir sur la fin de la Deuxième Guerre mondiale et sur les souffrances encourues par les populations roms. Cet engagement est une initiative majeure compte tenu du fait que, depuis le 1er mai 2004, les communautés roms sont devenues la minorité ethnique la plus importante au sein de l’Union européenne. En raison de la spécificité de leur situation, leur intégration constitue un défi de grande ampleur en matière de protection des droits fondamentaux et d’inclusion sociale.

Comme l’honorable parlementaire le sait certainement, l’Union européenne a, à maintes reprises, lors des négociations d’adhésion des nouveaux États membres, ainsi qu’avec la Bulgarie et la Roumanie, évoqué la situation des Roms comme étant un domaine requérant l’attention politique des gouvernements de ces États, à la lumière notamment des critères politiques de Copenhague concernant plus particulièrement la nécessité de garantir le respect ainsi que la protection des minorités.

S’agissant de faire face au défi de l’intégration des communautés roms, la responsabilité principale en incombe aux autorités nationales, ainsi qu’aux collectivités régionales et locales où les Roms sont les plus représentés. Les acteurs de la société civile ainsi que les Roms eux-mêmes ont également un rôle capital à jouer. De leur côté, les États membres peuvent également mettre en œuvre au niveau communautaire différents programmes politiques et instruments pertinents en matière de non-discrimination, d’égalité de traitement et d’insertion sociale. Ils peuvent en particulier recourir à la directive 2000/43 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique. Cette directive couvre en effet un large éventail de domaines où la discrimination à l’égard des Roms peut survenir: emploi, formation, éducation, protection sociale, accès aux biens et aux services et accès au logement.

Enfin, les Fonds structurels, et en particulier le Fonds européen de développement régional et le Fonds social européen, peuvent financer un certain nombre d’initiatives en faveur de la communauté rom. C’est le cas notamment de l’initiative communautaire Equal qui est financée par le Fonds social européen et qui développe de nouvelles approches pour lutter contre la discrimination et les inégalités qui, sur le marché de l’emploi, visent spécifiquement la communauté rom.

 
  
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  Claude Moraes (PSE). - (EN) Je vous remercie pour cette réponse. Elle reflète l’importance du défi auquel nous sommes confrontés, car les Roms sont maintenant la plus grande minorité homogène dans l’Union européenne élargie.

Sommes-nous conscients de l’inaction des États membres, par exemple, de leur défaut de transposition de la directive relative à l’égalité de traitement et de l’article 13 de la directive sur l’égalité des races, pour lesquels la Commission prend des mesures d’application? Sommes-nous conscients du fait que les États membres sont très en retard dans la transposition de la législation existante qui permettrait la protection de la communauté Rom, notamment dans le domaine de l’emploi? C’est un problème sérieux. Le problème Rom, vu son étendue, peut-il être mentionné dans les déclarations finales de la présidence luxembourgeoise afin de s’assurer que la présidence du Royaume-Uni qui lui succède prendra ce problème avec autant de sérieux?

 
  
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  David Martin (PSE). - (EN) Je souhaite insister, auprès du président en exercice du Conseil, sur le dernier point évoqué par mon collègue. Ce serait un signe très positif si ce problème pouvait être soulevé au niveau des chefs d’État ou de gouvernement et si le communiqué final y faisait référence. Les Roms ont l’impression d’être considérés comme quantité négligeable au sein de l’Union européenne. Ce serait un signe positif à leur intention et cela servirait peut-être de guide pour encourager les États membres à prendre des mesures appropriées.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - D’abord, je dirai que le droit communautaire doit être appliqué intégralement par tous les États membres. Je crois que c’est un devoir qu’ont tous les États à partir du moment où ils deviennent membres de l’Union européenne.

J’aimerais ajouter que le programme d’action communautaire contre la discrimination vise à promouvoir des mesures destinées à combattre la discrimination fondée sur l’origine raciale ou ethnique. L’un des domaines prioritaires identifiés dans le programme de travail pour 2004 ciblait spécifiquement l’intégration des Roms sur le marché de l’emploi. Il s’agit pour tous les États membres qui comptent des minorités roms sur leur territoire d’inclure ces minorités dans leurs programmes d’action nationaux en matière de marché du travail. Je pense qu’il s’agit d’utiliser les instruments communautaires que j’ai cités précédemment pour encourager et amener les États membres à traiter de cette manière l’intégration sociale des minorités roms.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 10 de M. Seppänen (H-0311/05):

Objet: «Paquet nucléaire»

La Commission a transmis ses nouvelles propositions de directive concernant la sûreté des centrales nucléaires et la destination finale des déchets radioactifs. Le dossier ne semble pas avoir fait, sous l’actuelle présidence en exercice, de progrès notables au Conseil. Quel est l’avis du pays exerçant la présidence sur les raisons qui ont empêché le dossier d’avancer? Quand peut-on s’attendre à un progrès en la matière?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Comme le Conseil l’a déjà indiqué dans sa réponse à la question 1778 posée par M. Rübig, le processus d’examen des propositions de la Commission a conduit le Conseil à adopter le 28 juin dernier des conclusions sur la sûreté nucléaire et la sûreté de la gestion des combustibles irradiés et des déchets radioactifs.

Ces conclusions réaffirment la détermination de la Communauté et de ses États membres à maintenir un niveau élevé de sûreté. En même temps, il s’agit de faciliter - je cite ces conclusions - le choix d’un ou de plusieurs instruments dans le cadre du traité Euratom susceptibles de contribuer plus efficacement à garantir la sûreté nucléaire et la gestion sûre du combustible irradié et des déchets radioactifs sans exclure aucun instrument et en conformité avec les principes relatifs à l’amélioration de la législation.

En application de ces conclusions, un plan d’action a été mis au point au second semestre 2004. Il s’articule autour de trois volets: sûreté des installations nucléaires; sûreté de la gestion du combustible irradié et des déchets radioactifs; financement du démantèlement des installations nucléaires et de la gestion sûre du combustible irradié et des déchets radioactifs.

Dans ce cadre, la Présidence luxembourgeoise a élaboré le programme de travail qui détaille les tâches à exécuter et a constitué les trois groupes d’experts chargés des différents volets de ce plan d’action. Sur la base de ce programme et compte tenu du calendrier des diverses instances internationales dont les travaux sont pertinents pour les tâches à réaliser, un rapport d’ensemble est envisagé pour la fin 2006.

Je peux vous assurer que le Luxembourg attache une importance capitale à ce sujet. Toutefois, force est de constater qu’il existe des minorités de blocage qui ne nous permettent pas d’avancer plus rapidement sur cette voie.

 
  
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  Jonas Sjöstedt (GUE/NGL), suppléant l’auteur. - (SV) Monsieur le Président, je souhaite remercier le Conseil pour sa réponse à la question de M. Seppänen. J’ai deux questions de suivi à poser. La première concerne le fait de savoir si le Conseil pense que le stockage définitif des déchets radioactifs est un problème d’intérêt commun et que l’UE devrait tenter de parvenir à des solutions communes pour différents États membres concernant, par exemple, le lieu et la façon dont leurs déchets seront définitivement stockés. Ma seconde question concerne le traité Euratom. L’un des points de discussion dans le cadre des négociations sur la nouvelle Constitution se rapportait, bien sûr, au fait de savoir si le traité Euratom serait maintenu, comme la Constitution le lui permet. Le Conseil pense-t-il qu’il serait devenu plus difficile de mener une politique supranationale dans ce domaine si la base juridique du traité Euratom n’avait pas existé?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Commençons par le traité Euratom. Il y a eu, en marge de la Convention, des initiatives pour demander précisément une réforme du traité Euratom. Je pense qu’effectivement, il serait temps de procéder à une réforme en profondeur de ce traité. Mais nous savons que cette réforme est une entreprise extrêmement difficile, vu que tous les États membres ne partagent pas la même approche en matière de développement du secteur nucléaire. Certains pensent, d’ailleurs, qu’il ne faut simplement pas développer le secteur nucléaire. C’est un peu pour cette raison que nous sommes restés dans une situation de blocage.

Sur la question des dépôts, je vous ai dit déjà que des concertations étaient en cours entre des experts pour trouver une meilleure manière d’assurer le dépôt des déchets nucléaires. Je peux vous garantir que, dans le contexte des travaux menés actuellement, la Présidence fera tout pour faire avancer cette question en gardant à l’esprit la sécurité, la sûreté et la protection maximale de l’environnement, mais aussi des personnes.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question nº 11 de Mme Kratsa-Tsagaropoulou (H-0312/05):

Objet: Report de la date d’entrée en vigueur du nouveau code pénal en Turquie

Le premier ministre turc, Tayip Erdogan, a récemment annoncé la décision de son gouvernement de reporter la date d’entrée en vigueur du nouveau code pénal révisé, prévue au départ dans le courant de ce mois d’avril.

Étant donné que la révision et l’application du nouveau code pénal étaient une des conditions impératives imposées par les institutions communautaires en ce qui concerne l’alignement de la Turquie sur l’acquis communautaire, que pense le Conseil de ce report? A-t-il été informé officiellement par le gouvernement turc des raisons de ce report mais également de la date définitive d’entrée en vigueur du nouveau code et, dans l’affirmative, quelle réponse a-t-il donné au gouvernement turc? Le Conseil estime-t-il que la non application du nouveau code pénal pourrait avoir des conséquences sur le début des négociations, prévu le 3 octobre 2005, avec ce pays candidat?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Le code pénal constitue l’un des six textes législatifs spécifiques mentionnés par la Commission dans sa recommandation d’octobre 2004 qui, selon les conclusions du Conseil européen des 16 et 17 décembre 2004, doivent être mis en vigueur avant l’ouverture des négociations d’adhésion.

L’Union est informée de la décision prise par le gouvernement turc de reporter la date d’entrée en vigueur de ce code. Les autorités turques ont indiqué que l’entrée en vigueur du nouveau code pénal était désormais prévue pour le 1er juin 2005 au lieu du 1er avril 2005. La Turquie a déclaré son intention de saisir cette occasion pour apporter au texte des modifications en vue notamment d’améliorer les dispositions relatives à la liberté d’expression et à la liberté de la presse.

Dans la récente réunion du Conseil d’association avec la Turquie, l’Union européenne a fait référence à ce sujet important et encouragé la Turquie à revoir ses dispositions en vue de répondre aux préoccupations de l’Union dans ce domaine et à se mettre en conformité avec les principes et les critères de Copenhague.

 
  
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  Rodi Κratsa-Τsagaropoulou (PPE-DE). - (EL) Monsieur le Président, je souhaiterais vous demander, plus spécifiquement, si vous suivez les progrès de la réforme du code pénal, la direction dans laquelle elle s’oriente et le calendrier pour son application. Avez-vous des exigences particulières? Avez-vous fixé un calendrier? Cela sera-t-il un problème important pour vous, avant le 3 octobre, lorsque vous examinerez les critères et les obligations de la Turquie?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Je pense vraiment que Commission et Conseil suivent très attentivement les développements de cette question cruciale et importante. Je n’ai, à ce stade, aucune raison de douter de la ferme intention des autorités turques d’adopter et de mettre en œuvre un code pénal revu à juste titre pour les raisons que je vous ai indiquées. C’est pourquoi je crois qu’il n’y a pas de raison de mettre en doute les décisions qui ont été prises par le Conseil européen.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 12 de M. Papadimoulis (H-0317/05):

Objet: Peine de mort

Il se peut que Saddam Hussein soit condamné à mort. L’Union européenne est résolument en faveur de la suppression, ou de la non-exécution, de la peine capitale et en faveur du droit à un procès équitable. Le président irakien a déclaré que signer l’arrêt d’exécution de Saddam Hussein ferait violence à ses convictions en matière de droits de l’homme, qu’il promeut, et à sa position de principe en faveur de la suppression de la peine capitale. Cela étant, le Conseil pourrait-il dire ce qu’il compte faire pour manifester une nouvelle fois l’opposition de l’Union européenne à la peine capitale en soi?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - La position de l’Union européenne en faveur de l’abolition de la peine de mort est bien connue; elle est activement défendue par l’Union européenne dans ses relations avec les pays tiers ainsi qu’au niveau multilatéral, conformément aux orientations de l’Union européenne en ce qui concerne la peine de mort.

Le Conseil a réagi en juillet 2004 face au rétablissement de la peine de mort en Irak en soulevant à plusieurs reprises cette question auprès des autorités irakiennes et il continuera à le faire à l’avenir.

 
  
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  Αdamos Αdamou (GUE/NGL), suppléant l’auteur. - (EL) Je vous remercie, Monsieur le Ministre, pour votre réponse à la question de M. Papadimoulis. Je n’ai aucune remarque à faire.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 13 de Mme Pack (H-0319/05):

Objet: Assurer la participation aux élections et l’égalité des chances des partis politiques représentant la minorité nationale hongroise en Roumanie

Les conditions de participation aux élections des partis politiques représentant des minorités ethniques en Roumanie sont définies par la loi: au moins 15% du nombre total de citoyens appartenant à la minorité ethnique doivent être membres du parti, et dans chacune des 15 régions de Roumanie, plus de 300 signatures doivent respectivement avoir été recueillies. Le Congrès du Conseil de l’Europe notait le 16 juillet 2004 que ces exigences n’avaient été appliquées à aucun des partis déjà représentés, et la Commission de Venise du Conseil de l’Europe constatait, le 6 décembre 2004, que les conditions imposées aux minorités nationales pour présenter leurs candidats aux élections étaient prohibitives (avis n° 300/2004), qu’il était donc impossible de remplir ces conditions. Dans son rapport sur la Roumanie, la Commission européenne faisait observer pour sa part que l’enregistrement des partis représentant des minorités nationales pour les élections était considérablement entravé par divers obstacles administratifs.

De quelles autres informations le Conseil dispose-t-il concernant cet état de fait en Roumanie? Quelles mesures a-t-il prises pour y remédier? Eu égard à la prochaine adhésion de la Roumanie, quelles mesures entend-il prendre pour modifier cette situation et permettre aux minorités nationales en Roumanie de bénéficier d’un droit de représentation démocratique correspondant aux normes européennes?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Tout comme la Commission et le Parlement, le Conseil a souligné, tout au long du processus d’élargissement, l’importance particulière de la protection des minorités ainsi que de l’égalité des chances dans la représentation politique de ces minorités.

Plus particulièrement, lors de la dernière réunion du conseil d’association UE-Roumanie, avant donc la signature du traité d’adhésion, l’Union a noté que le pluralisme politique était un principe essentiel de toute démocratie et qu’il était fondamentalement lié au respect des critères politiques de Copenhague. Elle a engagé instamment la Roumanie à modifier toutes les dispositions législatives restrictives touchant aux partis politiques et à l’organisation des élections locales qui avaient, dans le passé, empêché certains partis de prendre part aux scrutins.

Le Conseil est bien conscient des problèmes que rencontrent certains nouveaux partis politiques représentant des minorités ethniques en Roumanie pour se faire enregistrer en vue des élections. L’évolution de ces questions continuera d’être suivie au regard des critères politiques de Copenhague dans l’exercice de suivi renforcé de la préparation de la Roumanie à l’adhésion.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 14 de Mme Wallis (H-0322/05):

Objet: Ratification de la Convention de La Haye du 19.10.1996 concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants

Les États membres ont adopté deux instruments internationaux fondamentaux concernant la protection des enfants et leur famille. L’un est le règlement du Conseil (CE) n° 1347/2000(1) relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale des enfants communs. Le second est la Convention de La Haye de 1996 qui traite des questions de la responsabilité parentale dans les relations entre les États membres de l’UE et les pays tiers. En tant qu’instruments complémentaires, ils étaient censés entrer en vigueur à peu près à la même époque.

Les États membres devaient déposer leurs instruments de ratification avant le 1er janvier 2005. Le Conseil peut-il confirmer que le processus est actuellement bloqué par le Royaume-Uni et l’Espagne en ce qui concerne l’application de la Convention à Gibraltar? La présidence peut-elle indiquer quelles mesures elle envisage de prendre pour régler ce problème, en vue de fournir un cadre juridique dans les cas d’enlèvement d’enfants entre les États membres de l’UE et des pays tiers?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Le Conseil tient à rappeler à l’honorable parlementaire qu’il estime que la Convention concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants conclue à La Haye le 19 octobre 1996 apporte une précieuse contribution à la protection des enfants au niveau international et qu’il est donc souhaitable que ces dispositions soient appliquées dans les meilleurs délais. C’est dans ce sens que le Conseil a pris la décision, le 19 décembre 2002, d’inviter les États membres à signer cette Convention dans l’intérêt de la Communauté.

Quant à la ratification de cette Convention, le Conseil souhaiterait informer l’honorable parlementaire qu’il y a accord général sur l’opportunité de ratifier cette Convention et qu’un dernier problème subsiste, qui concerne Gibraltar. Le Conseil s’attend à ce que tous les efforts soient déployés par les deux États membres susceptibles de trouver une solution sur ce point, de sorte que la Convention puisse être ratifiée par les États membres dans l’intérêt de la Communauté, si possible avant la fin de 2005.

 
  
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  Diana Wallis (ALDE). - (EN) Je suis reconnaissante au président, mais il me semblait que cela devait être ratifié en mars. Des lettres adressées à la conférence de La Haye n’ont reçu aucune réponse et cela donne une bien piètre image aux parents et aux autres personnes qui auraient voulu bénéficier de cette convention, à la fois au sein de la Communauté et dans les pays tiers. Cela adresse aussi un message fâcheux au monde extérieur. J’espère que l’assurance que vous nous avez donnée, qu’elle entrera en vigueur avant la fin de l’année, se révélera exacte.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 15 de M. Ryszard Czarnecki (H-0323/05):

Objet: Budget pour la période 2004-2007

Dans le cas où le budget pour la période 2004-2007 ne pourrait faire l’objet d’un compromis au cours de la présidence luxembourgeoise, le Conseil pourrait-il indiquer si la question risque de s’éterniser jusqu’au début de l’année 2006? Se pourrait-il que la présidence britannique refuse de prendre une décision finale sur cette question?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - En réponse à cette question et aux suggestions qui sont faites, je ne peux que répéter que la Présidence luxembourgeoise reste fermement déterminée à conclure un accord politique sur les perspectives financières en juin 2005. C’est d’ailleurs le cas aussi pour la très grande majorité des députés de votre Parlement. Aucun autre scénario n’est donc envisagé et la Présidence actuelle ne doute pas qu’indépendamment du résultat, les futures présidences assumeront avec sérieux les responsabilités qui leur incomberont.

 
  
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  Ryszard Czarnecki (NI). - (PL) Monsieur le Président, je souhaite remercier le Conseil de nous avoir informés que la présidence est déterminée à parvenir à un accord. Je trouve cela très réconfortant. Cependant, je suis alarmé par les derniers rapports qui nous sont parvenus sur ce compromis, car ses conditions seraient très désavantageuses pour les nouveaux États membres, tels que la Pologne, et peut-être plus encore pour la République tchèque et la Hongrie. Selon moi, il est absolument crucial que l’on parvienne à un compromis au cours de la présidence luxembourgeoise, en d’autres termes, au cours des six premiers mois de cette année. Par égard pour la présidence luxembourgeoise et pour nous tous, j’espère qu’un tel compromis sera atteint, mais je pense qu’il est essentiel qu’il gagne la faveur du public dans nos pays.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - La Présidence luxembourgeoise compte sur le soutien ferme et résolu de votre Parlement pour parvenir à un accord. Par ailleurs, j’espère qu’avec la bonne volonté de tous les gouvernements, nous pourrons y arriver.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 16 de Mme Geringer de Oedenberg (H-0327/05):

Objet: Groupement européen de coopération transfrontalière (GECT)

Compte tenu du débat en cours sur les principes de fonctionnement, de financement et de contrôle du tout nouvel instrument que constitue le Groupement européen de coopération transfrontalière (GECT), quelle est la position initiale du Conseil et quelle est la direction prise par les débats à propos des possibilités de mise en place de cet instrument et de ses perspectives de développement?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Le groupement européen de coopération transfrontalière fait l’objet de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil soumise par la Commission le 14 juillet 2004. Cette proposition de règlement est en cours d’examen par l’un des groupes de travail du Conseil qui se consacre notamment aux actions structurelles. À la suite des discussions menées au sein de ce groupe depuis l’été passé, la Présidence a présenté, le 19 avril, un texte de compromis, accessible au public, qui sert de base aux travaux du groupe chargé des actions structurelles. Il est donc impossible de dire à ce stade quelle sera la position du Conseil au moment où cette discussion sera clôturée. Bien évidemment, comme il s’agit d’un règlement adopté selon la procédure de codécision, le Parlement est partie prenante dans la procédure.

 
  
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  Lidia Joanna Geringer de Oedenberg (PSE). - (PL) Je vous remercie, Monsieur le Président, Monsieur le Président en exercice du Conseil. Je connais bien sûr cette proposition de règlement, mais il y a un bon nombre de questions que je souhaiterais poser au Conseil afin d’entendre son opinion. L’article 159, paragraphe 3, du traité instituant la Communauté européenne prévoit que certaines actions peuvent être adoptées en dehors des Fonds afin de mettre en application les objectifs de cohésion économique et sociale fixés par le Traité. C’est pourquoi je souhaiterais savoir de quels types d’actions il s’agit, en dehors de quels Fonds elles sont adoptées, et s’il y a des projets pour mettre en place de nouveaux Fonds dans ce but. De plus, il est fait référence à la coopération transnationale, interrégionale et transfrontalière pour la première fois dans la note explicative de la proposition de règlement. Dans les articles plus tardifs, seule la coopération transfrontalière est mise à l’honneur. Je souhaiterais savoir si cela implique qu’une telle coopération sera restreinte ou que les opportunités de coopération qui existaient jusqu’ici dans le cadre du programme Interreg IIIA seront maintenues.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Effectivement, vous vous référez à l’article 159, troisième alinéa, du traité qui prévoit que des actions spécifiques peuvent être arrêtées en dehors des fonds visés au premier alinéa de cet article pour réaliser l’objectif de cohésion économique et sociale prévu par le traité. Il peut s’agir d’actions de coopération transfrontalière, ou d’autres actions structurelles.

Je ne peux pas vous fournir davantage d’informations, puisque le groupe de travail a précisément pour tâche de définir les autres actions structurelles qui peuvent faire l’objet de ces mesures prévues à l’article 159, troisième alinéa.

 
  
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  Le Président. - Son auteur étant absent, la question n° 17 est caduque.

Question n° 18 de M. Van Hecke (H-0332/05):

Objet: Soutien du processus électoral au Burundi

Dans une déclaration, l’Union européenne se réjouit du bon déroulement du référendum sur une nouvelle constitution au Burundi, mais y incite aussi ce pays à franchir aussi rapidement que faire se peut les autres étapes du processus électoral fixées dans les accords de paix.

Quelles initiatives concrètes le Conseil et les États membres ont-ils d’ores et déjà prises afin de soutenir le processus électoral au Burundi et pour contribuer à assurer, après les élections aussi, la stabilité du pays dans le long terme?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - L’Union européenne suit avec attention et appuie le processus de paix au Burundi. Dans ce contexte, elle se félicite du bon déroulement du référendum en vue de l’adoption d’une nouvelle Constitution, organisé au Burundi le 28 février de cette année. L’adoption de la Constitution a constitué une étape essentielle sur la voie du rétablissement de la paix et de la stabilité au Burundi et dans l’ensemble des régions des grands lacs.

Tout au long des négociations en vue d’un cessez-le-feu et de la période de transition de trois ans, l’Union est demeurée en contact étroit avec les parties présentes au Burundi, tant par la présence de M. Ajello, représentant spécial de l’Union européenne, que par un certain nombre de visites des présidences successives de l’Union européenne. Notre soutien s’est exprimé par de nombreuses déclarations et démarches effectuées non seulement au Burundi même mais également dans les pays limitrophes et en Afrique du Sud. C’est d’ailleurs cette dernière qui a pris l’initiative des négociations en vue d’un cessez-le-feu, tout d’abord sous l’égide du président Mandela puis de M. Zuma, vice-président.

L’Union européenne a participé au financement du déploiement de troupes africaines au Burundi, l’Union africaine ayant ensuite pris la relève, et elle prête son concours à l’actuelle mission des Nations unies dans ce pays. L’Union européenne a promis 4,4 millions d’euros pour l’organisation des élections et elle exerce, en coopération avec l’initiative régionale, des pressions en vue de l’établissement d’un calendrier électoral avant l’expiration de la période de transition récemment prolongée jusqu’au 26 août.

La contribution de l’Union européenne aux élections couvre un tiers du budget global prévu pour celles-ci et nous préparons une mission d’observation qui sera présente au Burundi pour les élections législatives qui doivent se dérouler le 4 juillet. Le programme indicatif national qui a été signé en août 2003 dans le cadre du 9e FED alloue 172 millions d’euros en faveur du Burundi, en particulier dans les domaines du développement rural, de l’assistance budgétaire et de la bonne gestion des affaires publiques, des domaines qui, s’ils bénéficient d’un soutien, devraient contribuer à maintenir une stabilité durable dans le pays après les élections.

 
  
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  Johan Van Hecke (ALDE). - Monsieur le Président, je voudrais simplement remercier M. le ministre pour cette réponse extrêmement claire.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 19 de M. Hans-Peter Martin (H-0334/05):

Objet: Nouveau statut des députés

Le renouvellement du statut des députés européens connaît actuellement un nouveau démarrage. Il ne s’agit pas uniquement d’établir un système général de rémunération adéquat, mais aussi de rendre transparents et de réduire de nombreux privilèges dont bénéficiaient jusqu’à présent les députés européens. Au nombre de ces privilèges figurent des indemnités journalières excessives, des forfaits pour frais de secrétariat en l’absence de documents justifiant de frais effectifs, le remboursement somptueux de frais de maladie sur le budget du Parlement, ainsi qu’une assurance-vie gratuite.

De quelle manière le Conseil a-t-il l’intention d’exercer une influence sur le Parlement européen en ce qui concerne la transparence et la réduction de tels privilèges?

Le Conseil est-il disposé à publier intégralement le document du 26 avril 2005, contenant sa position sur le statut des députés, sous la forme qui avait été prise pour base des négociations?

Comment le Conseil entend-il empêcher que de nouveaux privilèges soient introduits par la petite porte - par exemple par des décisions des questeurs du Parlement européen - et de quelles possibilités dispose-t-il pour imposer l’économie et l’utilisation efficace des ressources budgétaires affectées au Parlement européen ou pour les faire récupérer par ce dernier?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - La question du statut des députés qui fait l’objet de la question de l’honorable parlementaire et notamment les principes à appliquer pour le remboursement des frais des membres du Parlement européen font actuellement l’objet des négociations et des discussions en cours entre le Parlement européen et le Conseil. Je ne peux en dire davantage pour l’instant étant donné que ces discussions ne sont pas encore clôturées, de sorte qu’il serait prématuré aujourd’hui de faire des commentaires plus développés à ce sujet.

 
  
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  Hans-Peter Martin (NI). - (DE) Monsieur le Président, je pose des questions très spécifiques. Je vous prie donc d’y répondre.

Pourquoi ne pas rendre le document de travail public? C’est sur ces positions que porte ma question, en fin de compte, et vous faites référence à l’introduction de ma question. Je dois dire au Conseil que, sous cette forme, l’heure des questions n’a aucun sens. Y a-t-il un problème avec le document de travail du 26 avril 2005? Pourquoi ne pouvons-nous pas le voir? Il est d’une importance fondamentale pour nous. Je vous lirais mes questions si mes 30 secondes n’étaient pas déjà écoulées. Je vous prie de nous donner une réponse!

 
  
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  Piia-Noora Kauppi (PPE-DE). - (EN) Nous avons appris que le Coreper a discuté aujourd’hui de ce problème et qu’il sera traité par les services juridiques du Conseil et du Parlement et adopté ensuite, le 23 mai, lors de la réunion du Conseil. Pouvez-vous nous assurer que, lorsque le Conseil aura pris sa décision finale, nous aurons accès à toute la documentation avant que le Parlement n’ait à rendre sa décision finale? Pouvez-vous nous promettre que nous aurons toutes les informations sur ce thème et pouvez-vous confirmer ce calendrier?

 
  
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  Anna Hedh (PSE). - (SV) Monsieur le Président, je souhaite marquer mon accord avec M. Martin sur le fait qu’en tant que députés européens, nous pourrions renoncer à de nombreux privilèges. En ce qui concerne l’indemnité de déplacement, je souhaiterais en tout état de cause connaître l’avis du Conseil. Je puis vous assurer que les sociaux-démocrates remboursent tout, à part les frais de déplacement réels. Dans mon cas, ils s’élèvent à 6 300 euros pour un peu plus de six mois. Nous pourrions utiliser ces sommes pour faire beaucoup plus au sein de l’UE.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - D’abord, je dois corriger ce que Madame a dit, puisque il n’y a pas eu de Coreper aujourd’hui; le Coreper n’a donc pas pu discuter de quelque proposition que ce soit en matière de statut.

Je peux simplement confirmer qu’une discussion est en cours sur un certain nombre d’aspects du statut, essentiellement d’ailleurs sur la base de ce qui avait été proposé au Conseil par le Parlement, il y a à peu près deux ans. Je rappelle au demeurant qu’il appartient au Parlement européen d’établir le statut, après approbation, effectivement, du Conseil. J’ajouterai que le Conseil a un intérêt particulier, au moins aussi important que votre Parlement, à voir ce statut adopté. Dès lors qu’il y aura un accord, je pense que le statut pourra entrer en vigueur, si le Parlement le souhaite.

Pour ce qui est de toutes ces questions de fait, ce sont des décisions qui doivent être prises, dans le cadre du règlement, par le Parlement lui-même et je peux vous assurer aussi, Monsieur Martin, que le Conseil insiste beaucoup sur l’importance de la transparence en matière de frais. Vous n’êtes pas le seul, le Conseil insiste autant que vous sur ce point.

 
  
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  Le Président. - J’appelle la

question n° 20 de M. Casaca (H-0340/05):

Objet: Utilisation d’une norme générique à des fins spécifiques

L’une des deux entreprises de raffinage de sucre au Portugal - qui bénéficie du soutien de la Commission européenne - a voulu prendre une mesure de précaution contre la betterave des Açores tendant à interdire les expéditions de sucre provenant de cette région, en faisant valoir que les expéditions traditionnelles de cette entreprise devaient être calculées sur la base de la moyenne de trois années où ces expéditions n’étaient pas effectuées, à savoir 1989, 1990 et 1991.

La justice portugaise a saisi la Cour européenne de justice d’une question préjudicielle, sur laquelle la Cour a statué (affaire C-0282/00) en amenant la justice portugaise à rejeter le processus soutenu par la Commission européenne, décision qui fait actuellement l’objet d’un recours.

La Commission européenne, qui ne s’est pas conformée à l’arrêt précité, a tenté de l’inverser par tous les moyens. L’un de ceux-ci a consisté à modifier les conditions visées par le règlement (CEE) n° 1600/1992(2), sur la base desquelles la Cour de justice n’a, à ce jour, pas donné raison à la Commission européenne, en amendant le règlement de telle sorte que les expéditions traditionnelles des Açores soient calculées sur la base de la moyenne des années 1989, 1990 et 1991, ce qui équivaut à les interdire.

La modification proposée par la Commission européenne (COM(2004)0687 final) à l’article 4 du règlement s’avère ainsi être une modification d’une norme générique qui a pour unique objectif d’éliminer la concurrence de la betterave açorienne.

Le Conseil n’estime-t-il pas qu’il est illégitime de modifier des normes générales à des fins spécifiques? N’estime-t-il pas que l’utilisation du pouvoir d’initiative afin d’imposer par la législation ce qui a été refusé par la Cour de justice de Luxembourg correspond à un abus de pouvoir?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Le sujet soulevé dans cette question fait l’objet de la proposition de règlement du Conseil portant mesures spécifiques dans le domaine de l’agriculture en faveur des régions ultrapériphériques de l’Union présentée par la Commission le 24 octobre 2004. Cette proposition de règlement a été discutée de façon générale par un des groupes de travail du Conseil. La Présidence luxembourgeoise va convoquer incessamment une nouvelle réunion de ce groupe afin d’accélérer les travaux, en vue d’un accord au niveau du Conseil, dès que le Conseil disposera de l’avis du Parlement européen concernant la proposition de règlement concernée. Pour ce qui est de la manière dont la Commission européenne exerce son droit d’initiative garanti par les traités, il n’appartient pas au Conseil de se prononcer.

 
  
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  Paulo Casaca (PSE). - (PT) Monsieur le Président, je souhaite vous adresser toutes mes félicitations et tous mes vœux, car c’est la première fois que je prends la parole depuis votre entrée en fonction.

Je souhaiterais, si vous le permettez, remercier la présidence du Conseil pour son investissement dans le suivi de ce problème, qui n’est pas moins important que d’autres, même s’il concerne une minorité périphérique de l’UE. Je voudrais vous demander, Monsieur le Président, si la présidence luxembourgeoise a l’intention de continuer à accorder, d’ici à la décision finale, les mêmes soin et d’attention qu’elle a portés jusqu’à aujourd’hui à ce problème et, donc, si ce niveau d’engagement sera maintenu.

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Je tiens à vous remercier pour vos souhaits de réussite.

Je peux vous assurer que la Présidence luxembourgeoise accorde une importance particulière aux problèmes des régions ultrapériphériques et, en l’occurrence, aux problèmes de l’agriculture dans ces régions ultrapériphériques. Nous espérons pouvoir mener à bien ce dossier, comme vous l’avez souhaité.

 
  
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  Le Président. - La question n° 21 est retirée. Leurs auteurs étant absents, les questions nos 22 et 23 sont caduques.

Question nº 24 de M. Ó Neachtain (H-0347/05):

Objet: Palestine

Selon le Conseil, «aider l’Autorité palestinienne à faire les efforts indispensables pour assumer la responsabilité du maintien de l’ordre public et améliorer sa police civile et sa capacité à faire appliquer les lois est et demeurera une priorité pour l’Union européenne».

Dans ce contexte, l’Union européenne a récemment institué le bureau de coordination de l’Union européenne pour le soutien de la police palestinienne à Ramallah.

Le président en exercice pourrait-il dire ce que seront exactement les compétences de ce «bureau» et préciser quelles ressources financières seront mises à sa disposition pour lui permettre de mener utilement à bien ses fonctions?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - Le bureau de coordination de l’Union européenne pour le soutien de la police palestinienne appuie le représentant spécial de l’Union européenne pour le processus de paix au Moyen-Orient. Il a pour fonction de coordonner l’aide apportée par les États membres de l’Union européenne et, le cas échéant, celle apportée par les donateurs internationaux à la police civile palestinienne. Il opère en coopération avec l’Autorité palestinienne. Ce faisant, il fournit des conseils pratiques tant à la police civile palestinienne qu’aux personnes chargées des questions de police au sein de l’Autorité palestinienne. Au niveau stratégique, il assure la liaison avec les autres parties intéressées et surveille la transformation de la police. L’unité comprend quatre conseillers principaux de l’Union en matière de police et un chef de bureau local. Le recrutement de deux conseillers supplémentaires est en cours.

Sur la base d’un mémorandum d’entente entre le représentant spécial de l’Union, M. Marc Otte, et le département du développement international du gouvernement du Royaume-Uni, les coûts de mise en place et de fonctionnement pour la première année ont été financés par le Royaume-Uni pour un montant de 390 000 euros. Un montant supplémentaire de 220 000 euros a été versé par le Royaume-Uni pour un régime d’aide en faveur de petits investissements, administré par le bureau de coordination de l’Union.

De par la nature de sa fonction, le bureau de coordination de l’Union identifie, propose et aide à gérer un certain nombre de projets d’aide bilatérale spécifique dont certains ont déjà été lancés. Ces projets visent notamment à rénover le centre de formation de la police de Jéricho, à assurer la formation et à fournir des équipements en matière de maintien de l’ordre public, à réaliser un audit des infrastructures et des équipements de communication.

Ces projets, financés et mis en œuvre par les États membres de l’Union européenne et d’autres donateurs, constituent la partie essentielle de la somme importante des aides financières, matérielles et techniques apportées à la police civile palestinienne. Le mécanisme approprié et indispensable pour la mise en œuvre est assuré par le bureau de coordination de l’Union européenne, de même que son cadre stratégique.

Les salaires et les coûts d’hébergement des conseillers principaux en matière de police sont pris en charge par les États membres qui les détachent et doivent être considérés comme des contributions supplémentaires en nature. Un soutien administratif est également assuré par l’unité de police, située à Bruxelles.

Le format initialement retenu pour la mise sur pied du bureau de coordination de l’Union européenne présente l’avantage d’être léger et flexible du point de vue administratif, ce qui permet à l’Union européenne de répondre avec rapidité et efficacité dans un cadre approprié aux besoins de la police civile palestinienne, qui sont identifiés conformément à l’orientation politique donnée par le Conseil et rappelée dans la question.

 
  
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  Seán Ó Neachtain (UEN). - (EN) Je souhaite remercier le président en exercice du Conseil pour sa réponse très complète. Ce travail est très encourageant. Pourrait-il indiquer si cela se poursuivra, à l’avenir, avec une responsabilité collective accrue? Ce type de coopération est vital pour l’instant.

 
  
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  Paul Rübig (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Président en exercice du Conseil, ma question concerne le bureau de coordination à Ramallah. L’un des problèmes principaux, sur place, concerne le chômage. Pensez-vous qu’il soit possible que ce bureau de coordination se charge également de la coordination des activités économiques entre l’Europe et l’État palestinien?

 
  
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  Nicolas Schmit, président en exercice du Conseil. - D’abord concernant les questions de sécurité, je peux simplement dire que, compte tenu de l’évolution qui semble maintenant se dessiner, compte tenu des élections qui ont eu lieu dans les territoires palestiniens, l’Union européenne devra s’engager plus durablement pour aider à mettre en place tous les dispositifs de sécurité permettant au processus de paix de se poursuivre, et arriver ainsi à l’objectif qui est la création d’un État palestinien.

Pour ce qui est de la coopération économique, il faudra étudier dans quelle mesure l’Union européenne, à travers l’aide économique importante qu’elle accorde aux territoires palestiniens, contribue à étoffer le bureau concerné.

Vous savez maintenant que M. Wolfensohn sera le représentant de la Banque mondiale dans les territoires palestiniens pour coordonner les actions en matière d’aide économique: nous en avons parlé ce matin. Il faudra travailler en étroite collaboration avec le bureau de M. Wolfensohn et il faudra étudier si le bureau européen n’offre pas le cadre approprié pour que cette coopération puisse effectivement se concrétiser et être aussi efficace que possible.

 
  
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  Le Président. - Le temps attribué à l’heure des questions étant épuisé, les questions nos 25 à 28 recevront une réponse écrite(3).

L’heure des questions est close.

 
  
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  Brian Crowley (UEN). - (EN) C’est une motion de procédure, je souhaite m’excuser auprès du président en exercice du Conseil et de vous, Monsieur le Président, de ne pas avoir été présent pour ma question. J’étais à une autre réunion dans le bâtiment Winston Churchill et c’est pendant que je revenais ici que la question est tombée.

 
  
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  Le Président. - C’est noté, Monsieur Crowley. De toute façon, je répète ce que j’ai dit précédemment: je déclare que l’heure des questions est close.

(La session, suspendue à 18h20, est reprise à 21h05)

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. McMILLAN-SCOTT
Vice-président

 
  

(1) JO L 160 du 30.6.2000, p. 19.
(2) JO L 173 du 27.6.1992, p. 1.
(3) Cf. annexe «Heure des questions».


18. Exercice 2006
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  Le Président. - (EN) L’ordre du jour appelle la présentation par la Commission de l’avant-projet de budget général pour l’exercice 2006.

 
  
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  Dalia Grybauskaitė, membre de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, la Commission souhaite présenter l’avant-projet de budget que nous avons adopté le 27 avril. C’est le dernier budget de l’actuelle perspective financière. Dans notre projet, nous nous concentrons sur les principaux objectifs politiques approuvés par la Commission et le Parlement relatifs à quatre principaux domaines politiques: la relance de l’agenda de Lisbonne, la sécurité et la solidarité, l’élargissement et les relations extérieures. J’aborderai ces quatre domaines politiques.

La priorité centrale de ce budget est la relance de l’agenda de Lisbonne dont le but est de renforcer la croissance économique et de créer des emplois. Le budget européen contribue à cet objectif par trois séries de politiques: les politiques internes, le développement agricole et les politiques structurelles.

En ce qui concerne les politiques internes, une augmentation de 2% est envisagée. Contribuant directement aux objectifs de Lisbonne, la recherche et le développement enregistreront une augmentation de 4,7%.

La politique agricole commune contribue aussi largement aux objectifs de la stratégie de Lisbonne. L’année 2006 sera la première année où les fonds destinés aux aides directes seront transférés au profit de dépenses en faveur du développement rural, qui connaîtront une hausse de 13,6%.

Les Fonds structurels européens dans leur ensemble connaîtront une augmentation de 5% pour atteindre 44,6 milliards d’euros. Leur mission essentielle est d’accroître le potentiel de croissance des régions en retard de développement et d’augmenter les opportunités d’emploi. L’addition de toutes ces mesures contribue aux objectifs de la stratégie de Lisbonne et représente au moins un tiers du budget.

Pour revenir aux autres objectifs principaux du budget, notamment la solidarité et la sécurité, la proposition de la Commission prévoit des mesures visant à améliorer la sécurité sociale et environnementale, à garantir les droits fondamentaux et à promouvoir la citoyenneté active, notamment des jeunes. La lutte contre le terrorisme, l’amélioration de la sécurité alimentaire, des transports et de l’approvisionnement énergétique font également partie des mesures prioritaires pour lesquelles l’avant-projet de budget propose une augmentation de 5%.

Pour conclure sur les politiques internes, je souhaite souligner que la proposition de la Commission laisse suffisamment de marge aux autorités budgétaires, et notamment au Parlement, pour augmenter le budget des programmes qu’il considère nécessaires. Ces augmentations devront cependant être discutées avec le Conseil. La Commission est, bien sûr, prête à aider et à soutenir cette initiative.

La priorité suivante est de faire de l’élargissement un succès. L’intégration progressive des nouveaux États membres se reflète dans toutes les rubriques internes, avec une augmentation particulièrement forte pour les politiques structurelles - jusqu’à 30% - et de développement rural - jusqu’à 9%. Sur le plan administratif, cette intégration progressive se reflète aussi dans la demande de 700 nouveaux postes.

Pour les pays candidats, la Commission propose de ne budgétiser que les montants qui ont déjà été avalisés pour chacune des stratégies de préadhésion. Afin de soutenir ces stratégies de préadhésion, la Commission demande également 100 nouveaux postes de personnel externe.

Dans le domaine des relations extérieures, il n’est pas possible, dans les limites du plafond fixé, de mettre en place les nouvelles priorités de 2006 et d’assurer, dans le même temps, la continuité des programmes de coopération en cours. C’est pourquoi la Commission propose d’avoir recours à l’instrument de flexibilité pour la majeure partie de l’aide à la reconstruction pour l’Asie. Nous voudrions mettre l’accent sur le fait que, pour la cinquième fois en sept ans, le plafond fixé à Berlin ne sera pas suffisant.

J’en viens maintenant aux chiffres totaux du budget 2006. La proposition de la Commission mentionne des montants de 112,6 milliards d’euros en paiements et de 121,3 milliards d’euros en engagements. Les augmentations sont respectivement de 6% et de 4%. Ceci représente 1,02% du revenu national brut de l’Union européenne en paiements et 1,09% du revenu national brut de l’Union européenne en engagements.

Gardant à l’esprit les négociations en cours sur les futures perspectives financières, je souhaite souligner que la Commission demande ce qui est nécessaire et suffisant, à ce stade, pour financer les politiques de l’Union en 2006. Il faut garder à l’esprit que nous parlons aujourd’hui du budget annuel. Cet avant-projet de budget pour 2006, qui représente déjà 1,02% du revenu national brut de l’UE en paiements, ne tient pas compte des besoins de l’élargissement futur à la Bulgarie et à la Roumanie, ni de l’intégration complète des nouveaux États membres, notamment en ce qui concerne l’agriculture et les politiques de cohésion qui ont déjà été décidées ni, bien sûr, de l’investissement accru dans la croissance et l’emploi, prévu dans le cadre de la relance de l’agenda de Lisbonne.

Je suis persuadée que ce sera une année importante pour nous tous et je puis vous assurer que la Commission tentera d’aider les autorités budgétaires à atteindre un bon compromis sur le budget 2006 pour l’Union et ses citoyens.

 
  
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  Giovanni Pittella (PSE), rapporteur. - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, mon espoir est que la comparaison qui suivra la présentation de ce soir apportera des résultats favorables. J’espère que cet exercice financier sera positif; toutefois, en vérité c’est les premiers signes ne sont que partiellement encourageants.

Je salue avec plaisir le travail de Mme Grybauskaitė, dont le projet de budget propose des solutions positives à certains problèmes qui sont chers au Parlement et qui apparaissent dans ses orientations. Je veux parler de la modulation des dépenses agricoles en faveur du développement rural, de l’augmentation de la ligne budgétaire 2 relative à la politique régionale, de la hausse des fonds alloués à la jeunesse et à la culture, ainsi que de l’accroissement du budget accordé aux agences.

Je ne peux pas en dire autant de la ligne budgétaire 4 sur l’action extérieure et l’aide aux PME. Mme Grybauskaitė nous a informés que l’assistance directe dans le cadre de la stratégie de Lisbonne représente plus d’un tiers du projet de budget. Nous le vérifierons poste par poste, mais à première vue, il me semble que les montants sont insuffisants. Même si cette évaluation était incorrecte, toutefois, la référence à l’accord conclu au sujet du développement durable lors du Conseil européen de Göteborg est sans nul doute insuffisante: il ne peut y avoir de croissance compétitive sans croissance durable.

En outre, la proposition ayant trait à l’action extérieure semble décevante. C’est indubitablement un vieux sujet sensible, une blessure douloureuse qui est rouverte à chaque procédure budgétaire. S’il avait adopté une approche plus courageuse, le Conseil aurait anticipé ses responsabilités et aurait recueilli le plein appui du Parlement.

En général, nous attendions plus d’impulsion, mais nous adopterons toutefois une position constructive. Il n’est pas dans notre intérêt de répertorier les dépenses, mais de défendre les droits du Parlement et de l’Union européenne.

 
  
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  Janusz Lewandowski (PPE-DE), président de la commission des budgets. - (PL) Monsieur le Président, Madame la Commissaire, il semblerait que de nombreux députés qui sont absents considèrent la présentation d’aujourd’hui comme une procédure de routine. Ce n’est pas du tout mon cas ni celui de la commissaire, qui me comprend même lorsque je parle polonais.

Qu’a donc de si spécial l’exercice 2006? Premièrement, il s’agit du dernier exercice des perspectives financières actuelles. En d’autres termes, de nouvelles tâches onéreuses sont apparues alors qu’elles ne figuraient pas dans nos plans précédents et, par conséquent, les financements risquent d’être serrés, surtout pour les troisième et quatrième lignes budgétaires. Nous devons inévitablement conclure d’autres accords avec la présidence, qui sera d’ici là britannique.

Deuxièmement, 2006 est une période de transition vers les nouvelles perspectives financières. À ce titre, 2006 nous pose un problème concernant le niveau des paiements, qui est de pratiquement 7 milliards d’euros inférieur au plafond des paiements, exprimé en pourcentage du RNB fixé dans les perspectives financières, et de 1,03% inférieur au niveau de 2005. Nous devons réfléchir attentivement afin de déterminer si cela suffira pour répondre à nos besoins réels en 2006.

Bien que certains traits du budget 2006 ne changent pas par rapport aux exercices précédents, il y a quelques nouvelles priorités, parmi lesquelles une tentative visant à revigorer la stratégie de Lisbonne par une nouvelle injection de fonds. D’après la commissaire, le financement de cette stratégie augmentera de 8%, ce qui entraînera une réduction d’autres domaines de dépenses sous la troisième ligne budgétaire. J’ajouterais qu’une augmentation des subventions ne saurait remplacer les véritables réformes, qui sont l’essence de la stratégie de Lisbonne. Une autre nouvelle priorité concerne plusieurs défis auxquels nous sommes confrontés en matière de politique étrangère. Il s’agit surtout de la reconstruction des pays dévastés par le tsunami et de l’aide apportée par l’UE en faveur du réveil de la démocratie et de la société civile qui se produit de l’autre côté de notre frontière orientale. Il ne fait aucun doute que cette priorité nous obligera à utiliser l’instrument de flexibilité. Une autre priorité, qui a été ajoutée par notre rapporteur, est la jeunesse. Ce sera une caractéristique distinctive de la stratégie budgétaire du Parlement en 2006.

J’ai déjà souligné les liens étroits qui existent entre les négociations relatives au budget annuel et celles portant sur les perspectives financières pluriannuelles. Il est évident qu’il sera plus facile pour nous de négocier le budget 2006 avec la présidence britannique et que ces négociations se dérouleront dans une atmosphère plus conviviale, si la présidence luxembourgeoise parvient à conclure les négociations sur les perspectives financières pluriannuelles. Je ne sais pas s’il s’agit d’un objectif réaliste, mais je crois que nous devrions tous le partager.

 
  
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  Le Président. - (EN) J’ai cru comprendre que le document de l’avant-projet de budget était entre les mains du secrétariat de la commission, mais que d’autres copies seraient disponibles plus tard dans la semaine.

Le débat est clos.

 

19. État prévisionnel du Parlement européen pour 2006
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  Le Président. - L’ordre du jour appelle le rapport (A6-0106/2005) de M. Dombrovskis, au nom de la commission des budgets, sur l’état prévisionnel des recettes et des dépenses du Parlement pour l’exercice 2006 (2005/2012(BUD)).

 
  
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  Valdis Dombrovskis (PPE-DE), rapporteur. - (LV) Madame la Commissaire, Mesdames et Messieurs, les priorités ci-après ont été mises en évidence dans l’état prévisionnel des recettes et des dépenses pour le budget 2006 du Parlement européen.

La première priorité consiste à achever avec fruit le cycle d’élargissement de l’UE de 2004 en intégrant pleinement les représentants des nouveaux États membres de l’UE dans les institutions de l’UE, ainsi qu’à préparer le cycle d’élargissement de 2007 pour l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie. La situation actuelle est préoccupante: bien que plus d’une année se soit déjà écoulée depuis le dernier élargissement, de nombreux postes permanents qui ont été réservés pour les nouveaux États membres ne sont toujours pas pourvus. L’on prévoit que d’ici la fin de l’année 2005, seulement 78% des postes permanents accordés aux nouveaux États membres seront pourvus. Le secrétaire général du Parlement européen devra donc soumettre un rapport expliquant les raisons du retard encouru et formuler des propositions pour remédier à la situation. Un des problèmes qu’il convient de mettre en évidence dans ce dossier est la paperasserie excessive et la lenteur des procédures de recrutement du personnel.

La deuxième priorité est l’utilisation efficace et bien ciblée des ressources budgétaires du Parlement européen. Cette priorité couvre des questions telles que la concentration des dépenses institutionnelles de l’UE sur les tâches fondamentales, le soutien des demandes de création de nouveaux postes permanents dans le budget uniquement après évaluation de la possibilité de redistribution des ressources et du personnel dans le cadre du budget existant, le soutien de nouvelles initiatives uniquement après évaluation de leur impact sur le budget et la coopération interinstitutionnelle, avec pour objectif l’utilisation économique et efficace des ressources budgétaires.

Bien entendu, la question de la somme de plus de 200 millions d’euros par an qui est dépensée en plus du reste pour permettre au Parlement européen de siéger à Strasbourg est toujours d’actualité. Le principal problème a trait à la maintenance de deux bâtiments parlementaires en parallèle, l’un à Bruxelles et l’autre à Strasbourg. Il faut reconnaître que ce dossier relève de la juridiction du Conseil européen.

La troisième priorité concerne l’amélioration de la terminologie budgétaire de l’UE pour la rendre plus complète et transparente, de sorte que les contribuables comprennent mieux la manière dont leurs ressources sont utilisées. Des améliorations devront être apportées au projet de terminologie qui a été proposé, pour que celui-ci remplissent davantage ces critères.

Puisqu’on parle du budget du Parlement européen, je voudrais souligner qu’un plafond des dépenses budgétaires totales sera fixé après une évaluation minutieuse des besoins justifiés. Atteindre un plafond de 20% du total des dépenses administratives n’est pas une fin en soi. La proposition émise par le secrétaire général du Parlement européen fixe le budget 2006 du Parlement à 1,3416 milliards d’euros. Nous nous réjouissons du soutien témoigné par la commission des budgets en faveur de la proposition des rapporteurs de diminuer cette somme de 20 millions d’euros. L’expérience des dernières années, au cours desquelles des sommes considérables de ressources inexploitées ont été réaffectées, certains fonds n’ayant même pas été utilisés du tout, démontre que nous avons la possibilité de dépenser avec davantage de prudence l’argent des contribuables européens. Le plafond définitif des dépenses issues du budget du Parlement européen sera fixé en première lecture. Je tiens à mettre en évidence les aspects importants du travail que le Parlement devra accomplir en 2006: premièrement, mieux expliquer aux citoyens de l’UE le travail du Parlement européen, en mettant surtout l’accent, à cet égard, sur le rôle joué par les bureaux d’information du Parlement européen dans les États membres de l’UE; et deuxièmement, préparer le Parlement à jouer un rôle plus important dans le domaine législatif, comme le prévoit le traité constitutionnel de l’UE.

Enfin, je voudrais souligner que l’année 2006 marquera la fin des perspectives financières actuelles. À ce sujet, la question du montant des crédits de paiement issus du budget commun de l’UE pour 2006 est particulièrement d’actualité. Il importe que le montant total de l’engagement budgétaire et des crédits de paiement de 2006 corresponde aux engagements pris par l’UE, y compris aux engagements liés à l’élargissement de l’Union.

Je voudrais prier le Conseil de l’UE de reconsidérer sa position concernant le budget communautaire pour 2006, qui a artificiellement bloqué le montant des crédits de paiement. Si nous voulons que l’UE soit perçue comme un partenaire fiable, il est essentiel qu’elle honore ses engagements, y compris les engagements qu’elle a pris en rapport avec son élargissement. Il est important que, dans ces perspectives financières, les engagements qui ont été contractés soient reflétés proportionnellement dans le budget de 2006.

 
  
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  Markus Ferber, au nom du groupe PPE-DE. - (DE) Monsieur le Président, Madame la Commissaire, Monsieur le Secrétaire général, Mesdames et Messieurs, permettez-moi également de remercier chaleureusement notre rapporteur, M. Dombrovskis, de s’être chargé - et de continuer à se charger - de la tâche ingrate de s’occuper du budget du Parlement; tâche pour laquelle il peut s’attendre davantage que les éloges et la réjouissance de ses collègues députés et à laquelle il se consacre avec une bonne dose de passion. Donc, avant tout, un tout grand merci pour ce travail de la part du groupe du parti populaire européen (démocrates-chrétiens) et des démocrates européens.

Je voudrais juste soulever une question qui me tient véritablement à cœur. De combien d’argent le Parlement a-t-il besoin? Le chiffre de «20% de frais administratifs» est susurré dans les couloirs de cette Assemblée comme une vérité irréfutable. Cette année uniquement, en 2005, Monsieur le Secrétaire général, près de 50 millions d’euros excéderont ce qui est nécessaire, simplement parce que nous devons nous tenir à ce chiffre magique de 20%, et même si rien ne justifie qu’on les dépense.

La situation sera plus ou moins la même en 2006. Aujourd’hui déjà, dans votre avant-projet de budget, adopté par le Bureau, il est fait référence à 90 millions d’euros de fonds inutilisés. Je me demande vraiment ce que cet argent fait là. Devons-nous véritablement vider les poches des Européens et permettre que cet argent soit ajouté à un budget gonflé tout en sachant que nous ne pourrons pas le dépenser? De mon point de vue, la question est de savoir si la stratégie adoptée est bien la bonne à long terme.

Je recommande donc que l’argent dont nous n’avons pas besoin et dont - comme nous pouvons déjà le constater - nous n’aurons pas besoin l’an prochain ne soit pas du tout intégré dans le budget.

J’aurais apprécié que M. Onesta, qui a rédigé des amendements sur le sujet, soit présent aujourd’hui en cette Assemblée pour assumer la responsabilité des propositions qu’il a faites. Toutefois, l’une des raisons pour lesquelles ces fonds ne seront ni utilisés ni dépensés pour d’autres choses est que nous savons bien que nous aurons besoin de cet argent si nous recevons un statut. Je vous en prie, élaborons un budget d’austérité pour ce Parlement.

 
  
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  Louis Grech, au nom du groupe PSE. - (EN) Monsieur le Président, permettez-moi tout d’abord de faire part de mes remerciements au rapporteur pour son rapport. Dans l’ensemble, nous sommes d’accord avec l’essentiel de ses arguments. Naturellement, nous partageons son point de vue selon lequel il convient de déployer davantage d’efforts pour améliorer la rationalisation, la responsabilité financière et la rigueur et la discipline budgétaire.

Le recrutement du personnel semble être un domaine problématique. Je présume qu’il serait correct de supposer que les demandes en personnel sont fondées sur des besoins justifiés et réalistes. Par conséquent, il est très difficile de comprendre ou de justifier les retards dans la sélection et le recrutement liés à l’élargissement. Il convient d’agir pour rectifier la situation et résoudre cette question urgente. Cela dit, je ne suis toutefois pas d’avis qu’il faille considérer le recours à des postes temporaires, en tant que solution intermédiaire, de fortune, comme une solution de remplacement viable. Si j’apprécie le raisonnement à la base de cet argument, je crains que ce type de compromis, s’il est accepté, aboutisse à une incurie professionnelle, qui risquerait de se refléter de temps à autre dans nos futurs budgets.

En outre, le rapporteur nous propose une réduction de la marge de la réserve pour imprévus. En principe, nous convenons que les crédits doivent porter sur des activités spécifiques et nous devons éviter l’annulation de crédits à la fin de l’exercice.

Néanmoins, nous devons tenir compte des défis à relever dans un avenir proche et des incertitudes qui persistent, notamment quant aux services linguistiques, aux investissements immobiliers, au statut des députés ou à l’adoption du statut des assistants de députés, que nous soutenons pleinement.

Dans ce contexte, il serait prudent d’accepter l’amendement proposant de prendre la décision définitive à ce sujet ultérieurement. En effet, je pense que le rapporteur a bien fait de reporter la décision définitive sur l’accord reposant sur l’honneur lié au niveau du budget à 20% de la rubrique 5. Je conviens que ce point de référence n’est pas soumis à une règle absolue et irréfutable, raison pour laquelle nous ne devons pas hésiter à remettre cet accord en cause et à le modifier lorsque nous sommes convaincus que c’est nécessaire. Toutefois, je ne pense pas que ce soit le cas et il serait inopportun de supprimer ces lignes directrices pour le moment.

L’ironie de la chose, c’est que la stabilité de cette indication de 20%, si elle est mise à profit de manière efficace, pourrait apporter une certaine rigueur et une efficacité budgétaires saines. Naturellement, nous sommes d’accord que pour parvenir à l’efficacité budgétaire, nous devons regarder d’un œil critique toutes les formes de dépenses, utiliser à meilleur escient les ressources et éviter les gaspillages et les chevauchements de fonctions.

Nous devons continuer à nous concentrer sur les services et les activités de base, ce qui m’amène à un autre point important. Bien que ce soit justifié, nous n’avons pas encore ressenti entièrement l’effet de l’opération «placer la barre plus haut». Il me semble que seuls quelques objectifs ont été atteints à ce jour. Dans la mesure où les structures nécessaires sont en place, nous sommes en droit d’attendre du prochain exercice budgétaire la réalisation de la plupart des objectifs et la mise en œuvre de la réforme visant à supprimer les goulets d’étranglement à découvert et secrets.

Sur un autre plan, nous nous félicitons grandement de la proposition d’améliorer le service des visiteurs. D’après mon expérience très brève et limitée au sein du Parlement européen, je pense que les programmes sont un outil pratique et direct permettant d’améliorer la perception de l’UE. En outre, ils ont un effet multiplicateur, qu’il convient de ne pas sous-estimer.

Je salue également chaleureusement la proposition d’améliorer la stratégie de communication et d’information. Au fil des années, nous n’avons pas réglé ce problème de manière suffisante. Nous savons qu’il existe un obstacle entre l’UE et ses citoyens, qu’il soit réel ou perçu comme tel. On pourrait, et on doit, redoubler d’efforts sur cet aspect important. Si nous voulons réellement que nos citoyens considèrent le Parlement européen comme leur parlement et qu’il représente leurs aspirations, nous devons mettre en œuvre rapidement une stratégie d’information et de communication efficace. Telle devrait être l’une de nos grandes priorités. Si nous n’y parvenons pas, nous aurons fait échouer un objectif véritablement crucial.

Enfin, je félicite une fois encore M. Dombrovskis, pas seulement pour son rapport, mais parce qu’en tant que nouveau député, issu d’un nouveau pays, il est la preuve que ce processus d’intégration peut être productif et efficace.

 
  
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  Kyösti Tapio Virrankoski, au nom du groupe ALDE. - (FI) Monsieur le Président, je tiens tout d’abord à remercier et à féliciter le rapporteur, M. Dombrovskis, pour son excellent rapport. Le budget du Parlement est d’une grande complexité administrative et exige une bonne connaissance des méthodes de travail et des procédures du Parlement. Le rapporteur a fait du bon travail, ce qui se reflète, par exemple, dans le nombre limité d’amendements. Je lui souhaite bonne chance à l’avenir également.

Le budget du Parlement reste caractérisé par les manquements provoqués par l’élargissement. Bien que les nouveaux États membres nous aient maintenant rejoints depuis plus d’un an, un nombre considérable de postes qui ont été créés pour eux ne sont toujours pas pourvus. Les services administratifs du Parlement estiment même qu’un peu moins de 80% des postes seront pourvus d’ici la fin de l’année. La situation semble être particulièrement délicate dans le secteur linguistique. Comme il est vrai que le fonctionnement démocratique du Parlement européen nécessite le multilinguisme et des services linguistiques efficaces, il convient d’accorder toute l’attention requise à la bonne marche et au fonctionnement efficace du service linguistique.

Le rapporteur s’est concentré, à juste titre, sur la présentation du budget. Ce dernier requiert un développement continu. À l’instar du budget de la Commission, le budget du Parlement doit être développé sur la base des activités, afin de clarifier et de valider la responsabilité personnelle. L’on doit pouvoir déduire clairement le degré d’efficacité de la présentation. À l’avenir, nous devrons également établir divers indicateurs qui fourniront une base d’analyse des mesures adoptées.

Il importe particulièrement de prêter attention à l’efficacité avec laquelle le Parlement travaille. L’opération «Placer la barre plus haut» est particulièrement importante pour tous les députés du Parlement. Ceux-ci doivent prendre des décisions sur des questions qui sont plus compliquées que jamais. C’est pourquoi il sera nécessaire d’accorder une aide supplémentaire au travail législatif.

Le budget du Parlement a toujours été maintenu à un niveau correspondant à 20% des dépenses administratives. Dans la mesure où il a été possible de faire preuve de rigueur dans les dépenses parlementaires, particulièrement grâce à une bonne politique immobilière, il semblerait qu’il existe actuellement une marge de manœuvre assez large: jusqu’à pas moins de 90 millions d’euros. Étant donné l’excédent de l’année dernière, il est impossible à ce stade de prévoir quels seront les besoins véritables. Par conséquent, la décision finale sur la réserve pour imprévus doit être remise à l’automne. Il ne sera pas nécessaire d’augmenter le budget du Parlement, sauf si de bonnes raisons le justifient. La limite des 20% ne doit pas être un objectif que nous devons essayer d’atteindre, mais bien un plafond auto-imposé. Le rapport qui se trouve devant nous offrira une base adéquate pour le travail de suivi.

 
  
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  Sergej Kozlík (NI). - (SK) Monsieur le Président, Madame la Commissaire, honorables collègues, le dernier sondage d’opinion étudiant l’attitude des citoyens slovaques vis-à-vis de l’Union européenne a donné une réponse claire. Un an après l’adhésion à l’UE, 83% de la population slovaque émet un avis positif sur cette étape, et aujourd’hui, le parlement slovaque a ratifié le projet de Constitution pour l’Europe. D’autre part, les citoyens slovaques sont devenus extrêmement sensibles aux problèmes liés aux contraintes qui pèsent sur l’exercice du mandat des députés, surtout des députés représentant les nouveaux États membres. Ces contraintes sont dues aux longues procédures administratives, au sein du Parlement européen, en matière de fourniture d’une assistance linguistique, de capacités de traduction adéquates et de disponibilité de services d’interprétation dans les commissions parlementaires et les groupes politiques.

La proposition de résolution sur le budget du Parlement européen déposée par M. Dombrovskis - et je saisis l’opportunité qui m’est donnée de le remercier pour son excellent travail - répond judicieusement à la situation. Il est néanmoins regrettable que la formulation initiale de la proposition de résolution, qui qualifiait d’inacceptables les retards dans le recrutement de nouveau personnel, ait été remplacée dans la version actuelle par un adjectif plus édulcoré, «déplorables» Une aide linguistique inadaptée sape le principe d’égalité des chances et limite l’exercice du mandat des députés, tout spécialement des députés des nouveaux États membres. Ce problème constitue avant tout une pratique discriminatoire contraire à l’esprit d’une Europe unie, une Europe que nous avons rejointe en tant que nouveaux membres, et est véritablement inacceptable.

Il serait à la fois déplorable et inopportun que le soutien des citoyens des nouveaux États membres à une Europe unie vienne à diminuer en raison des manquements dans l’administration du Parlement européen plutôt qu’en raison des contraintes budgétaires.

 
  
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  Laima Liucija Andrikienė (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, je voudrais souligner trois points: le niveau global du budget du Parlement, la politique du personnel et la politique d’information.

S’agissant du niveau global du budget du Parlement, la proposition du secrétaire général fixe le budget du Parlement à 20% de la rubrique 5, à savoir 1 340 millions d’euros. Je soutiens fermement la proposition du rapporteur de réduire les crédits de la réserve pour imprévus de 30 millions d’euros et d’ajouter un montant de 10 millions d’euros à la réserve liée aux bâtiments. Le rapport souligne également que le niveau du budget du Parlement doit être déterminé sur la base de besoins justifiés et nous rappelle que les crédits de conciliation doivent être évités.

Il convient d’améliorer la politique du personnel du Parlement européen, de manière à accélérer les procédures de recrutement afin de remplir les 750 postes inoccupés au sein de l’administration du Parlement européen et de créer un système de promotion véritablement basé sur le mérite.

Le rapport met également l’accent sur sa préoccupation face à l’accélération du processus de remplacement du personnel auxiliaire par du personnel sous contrat et demande des informations précises à cet égard. Je suggère que le Parlement européen invite le secrétaire général à étudier des solutions afin d’atténuer les effets de l’abolition du statut des agents auxiliaires des groupes politiques qui attendent la fin des procédures de recrutement. Nous devons exhorter le secrétaire général à présenter une proposition au Bureau visant à modifier les règles internes en matière de recrutement adoptées par celui-ci le 3 mai 2004, de manière à permettre aux groupes politiques de bénéficier des mêmes dispositions dans le domaine que celles qui s’appliquent à l’administration du Parlement.

Le dernier point, qui n’est pas le moindre, concerne la politique d’information. Le rapporteur est favorable à l’amélioration du service des visiteurs et au renforcement du rôle des bureaux extérieurs. Il souligne que pour établir le contact avec les citoyens, la politique de communication des États membres doit tenir compte des différences nationales.

Enfin, je voudrais remercier M. Dombrovskis pour son excellent rapport.

 
  
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  Hans-Peter Martin (NI). - (DE) Monsieur le Président, ce rapport est un double scandale parce qu’il reflète amèrement l’opinion de la majorité en cette Assemblée et qu’il dévoile les ruses grâce auxquelles ce Parlement fonctionne. Au début, ce rapport était formulé en termes très généraux, mais, par le biais d’amendements oraux, certaines décisions y ont été incorporées afin que, sur l’excédent attendu du Parlement - qui se chiffre à 90 millions d’euros pour 2006 -, 60 millions d’euros soient simplement mis dans la réserve - où, comme nous le savons, toutes sortes de choses peuvent arriver au cours du budget - et que 10 millions d’euros supplémentaires soient mis de côté pour les bâtiments, bien que plusieurs personnes, y compris le secrétaire général ici présent, aient toujours précisé que nous n’avons pas réellement besoin de cet argent.

Au lieu de rendre simplement cet argent au contribuable européen, au lieu de faire quelque chose qui profiterait à la réputation de cette Assemblée et de démontrer que, oui, nous avons compris le message et nous pouvons nous en sortir avec moins d’argent, cet argent a été frauduleusement ajouté au budget par le biais d’amendements, et il est intéressant de remarquer que ces amendements étaient oraux. Pourquoi dis-je que cet argent a été ajouté frauduleusement? Je dis cela parce que, en tant que membre à part entière de la commission en question et ayant droit de vote, j’ai fait objection à ces amendements, et mes objections ont tout simplement été passées sous silence. Je n’ai toujours pas reçu de réponse aux objections que j’ai adressées au Bureau et au président de cette Assemblée. D’après une lettre non datée, ce n’était pas comme cela que ça devait se passer. C’est un sujet de litige.

Je vais recourir à tous les moyens juridiques à ma disposition. Ni cette résolution ni ce rapport n’ont été produits dans les règles. Le vote ne peut pas non plus avoir lieu demain. Dans l’intérêt du contribuable européen, j’exhorte les quelques personnes ici présentes à voter contre ce rapport et, surtout, contre ces parties spécifiques du rapport. Des propositions signées seront présentées à cet effet.

 
  
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  Le Président. - Pourriez-vous confirmer la réception de la lettre du président du Parlement en réponse aux plaintes que vous avez déposées? Faute de quoi, je vous enverrai un huissier, qui vous en fournira une copie.

 
  
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  Hans-Peter Martin (NI). - (DE) Monsieur le Président, aujourd’hui, à l’heure du déjeuner, j’ai reçu par fax une lettre non datée en anglais, je suppose que c’est de celle-ci que vous parlez. Permettez-moi d’ajouter que d’autres députés ont reçu, en l’espace de trois jours, des réponses fleuves et que cette affaire précise a été traînée en longueur en dépit d’avertissements répétés. Je tiens également à signaler que j’ai déjà répondu à cette lettre, par un non ferme. Je considère que cette affaire est traitée de manière irrégulière et illégale.

 
  
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  Hynek Fajmon (PPE-DE). - (CS) Monsieur le Président, Madame la Commissaire, Mesdames et Messieurs, le budget du Parlement pour 2006 se doit de refléter un certain nombre de priorités clés exposées dans le rapport Dombrovskis.

En ma qualité de député d’un nouvel État membre, je voudrais éveiller l’attention de l’Assemblée sur plusieurs problèmes pratiques directement liés au fait que certains aspects du mode de fonctionnement du Parlement n’ont toujours pas été modifiés depuis l’élargissement de l’année dernière. Ma première préoccupation a trait au fait que les langues officielles ne se sont toujours pas vu accorder un statut égal, bien qu’une année se soit écoulée depuis l’élargissement, et que l’interprétation n’est pas disponible dans les langues de toutes les personnes présentes aux nombreuses commissions et réunions de délégation. La distribution des documents dans les langues officielles des États membres a pris beaucoup de retard.

Ces problèmes sont une conséquence directe de la lenteur des progrès en matière de recrutement de fonctionnaires des nouveaux États membres au sein de l’administration du Parlement, et l’interprétation et la traduction ne sont pas les seuls services à être affectés. Le nombre de ressortissants des nouveaux États membres travaillant au Parlement demeure très faible, et nous sommes encore loin de pourvoir tous les postes dont le financement a été prévu dans le budget.

Ces retards, qui sont vraiment très importants, ne peuvent en aucun cas être justifiés. D’après le rapport Dombrovskis, il est probable que seuls 78% des postes qui ont déjà été créés seront pourvus d’ici la fin de l’année. J’estime que des mesures urgentes doivent être adoptées pour rectifier cette situation et pour garantir une représentation égale des citoyens des nouveaux États membres au sein de l’administration du Parlement.

En outre, je trouve intolérable que les indications «Parlement européen» qui se trouvent dans les bâtiments du Parlement ne soient toujours pas disponibles dans toutes les langues de l’UE. Mon attention a été attirée sur ce fait par le premier groupe de visiteurs qui est venu de République tchèque en novembre 2004 et, en dépit des rappels que j’ai envoyés au questeur, rien n’a été fait pour y remédier.

Toutefois, les services offerts aux visiteurs du Parlement fonctionnent relativement bien. J’ai déjà invité deux groupes de citoyens à Strasbourg, et leurs réactions m’ont donné à penser que ces visites étaient extrêmement importantes à leurs yeux. Néanmoins, nous pouvons continuer à améliorer la manière dont nous communiquons avec le public. J’ai le regret de dire qu’aucun support publicitaire n’est disponible en tchèque ou dans les autres langues des nouveaux États membres, et il n’y a pas de copies de la Constitution européenne pour les visiteurs des nouveaux États membres. Je pense qu’il convient de remédier à cette situation dans un avenir proche.

 
  
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  Zbigniew Krzysztof Kuźmiuk (PPE-DE). - (PL) Monsieur le Président, Madame la Commissaire, Mesdames et Messieurs, je souhaite parler de l’état prévisionnel du budget du Parlement pour 2006 et du rapport de M. Dombrovskis sur cet état prévisionnel. Le projet de budget général de l’UE pour 2006 a été présenté il y a peu devant l’Assemblée et je voudrais donc commencer par formuler trois remarques sur ce projet.

Premièrement, en tant que représentant de la Pologne, un nouvel État membre, je suis alarmé par le montant extrêmement faible des paiements prévus dans ce budget, à savoir 1,02% du RNB de l’UE. À ce sujet, il convient de souligner que, au titre des perspectives financières actuelles, le plafond des paiements pour 2006 est de 1,08% du RNB, c’est-à-dire 7 milliards d’euros de plus en termes absolus.

Deuxièmement, je voudrais faire remarquer que c’est la Commission européenne qui a proposé ce montant de paiements alors qu’il y a fort peu, elle préconisait des paiements annuels moyens de 1,14% du RNB dans les perspectives financières 2007-2013. Selon moi, il ne sera pas facile d’expliquer aux citoyens européens comment il sera possible de financer toutes les dépenses de l’UE sur un total de 112 milliards d’euros, avec des paiements dont on s’attend à ce qu’ils atteignent environ 130 milliards d’euros en 2007.

Troisièmement, je trouve curieux que ce budget prévoie une augmentation significative, ou plus précisément une augmentation de 6,2%, des dépenses administratives tandis que les dépenses relatives à l’action extérieure ont chuté de 2% et que les dépenses sur la stratégie de préadhésion ont diminué de pas moins de 4% par rapport à 2005.

Pour embrayer sur ma remarque précédente, je voudrais soulever la question des dépenses budgétaires du Parlement en 2006. Celles-ci devraient se chiffrer à 20% du total des dépenses administratives, c’est-à-dire à 1 342 millions d’euros. Cela représente une augmentation de 5,5% par rapport à 2005. Il convient de souligner que la principale raison de cette augmentation du financement est de garantir la disponibilité de fonds pour mener à bien l’élargissement de l’UE à 10 nouveaux États membres et de permettre la préparation et l’allocation des fonds nécessaires pour l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie en janvier 2007. Je saisis cette opportunité pour faire remarquer que seuls 78% des emplois liés à l’élargissement, dont le financement était prévu dans les budgets 2004 et 2005, seront pourvus d’ici la fin 2005. C’est extrêmement alarmant.

En conclusion, je voudrais féliciter M. Dombrovskis pour avoir rédigé un rapport exhaustif sur les dépenses du Parlement en 2006. Ce rapport couvre non seulement les questions relatives à l’élargissement, mais aussi celles qui ont trait à la qualité et à l’efficacité du travail du Parlement, en particulier du travail réalisé par les députés sur les documents rédigés dans leur propre langue. Il détaille également les problèmes que nous rencontrons pour rapprocher le Parlement et les fruits de son labeur des citoyens.

 
  
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  Paul Rübig (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, je souhaite spécialement remercier M. Dombrovskis et les autres qui ont contribué à ce rapport. Il n’existe aucun autre parlement au monde - du moins, je crois - qui fasse économiser chaque année au contribuable un montant en millions d’euros à deux chiffres. Une telle économie d’argent est louable. Comme nous le savons, nous encourageons fortement l’adoption du statut, qui, tout en soulageant les budgets nationaux d’une charge énorme, entraînera des dépenses supplémentaires pour le Parlement. Si nous y ajoutons le prix moyen d’un fonctionnaire, cette mesure de précaution - à l’instar de ce que le statut va nous offrir - est particulièrement digne d’attention et d’éloges.

À l’avenir, nous aurons pour mission d’expliquer cette Europe qui est la nôtre bien mieux qu’elle ne l’a été. Nous devons sensibiliser les citoyens au travail du Parlement. L’une des principales critiques émises pendant les élections était que les citoyens en savent trop peu sur les activités politiques de l’Assemblée. J’invite les personnes qui ont des responsabilités dans cette Assemblée à consacrer plus d’efforts à la politique d’information qu’elles n’ont eu l’habitude de le faire.

 
  
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  Janusz Lewandowski (PPE-DE), président de la commission des budgets. - (EN) Monsieur le Président, je réponds aux réserves de M. Martin quant aux aspects juridiques, et non au fond des amendements.

L’ensemble des amendements oraux qu’il a mentionné a été remis la veille du vote au sein de la commission des budgets à ses membres et ne suscitait aucune réserve. Après avoir voté en faveur de plusieurs d’entre eux, M. Martin s’est mis à émettre des réserves, sans toutefois mentionner clairement les articles sur lesquels il les fondait. J’ai donc poursuivi le vote, dans la mesure où nous disposions du soutien unanime de la commission des budgets. Voilà mon explication.

(Applaudissements)

 
  
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  Hans-Peter Martin (NI). - (DE) Monsieur le Président, je voudrais faire une déclaration conformément à l’article 145. Les dires de M. Lewandowski ne sont pas tout à fait exacts. La pratique dans cette Assemblée, tant en plénière qu’en commission, est que si un amendement se voit opposer une objection qui est proportionnelle au quorum - c’est-à-dire une personne qui fait objection en commission ou 37 députés qui se lèvent dans cette Assemblée -, l’amendement ne peut pas être mis aux voix. Je voudrais signaler au président de la commission des budgets que cette pratique et cette règle ne dépendent pas du moment où cet amendement oral est déposé. Nous savons tous que l’amendement écrit entre généralement plus dans les détails.

L’événement que j’ai décrit vient de se répéter ce lundi à la commission du contrôle budgétaire, dont le président - issu également d’un nouvel État membre - ne cessait de demander s’il y avait des objections à un amendement oral alors qu’il était clair pour tout le monde qu’une objection aurait entraîné la suppression du vote.

Ce qui se passe ici est une tentative d’échapper à ses responsabilités et d’éviter d’admettre que quelque chose a été fait d’une manière qui ne devrait pas être possible. J’insiste sur le fait que, pour ce qui est du fond - ce temps de parole m’a été accordé, j’y ai droit au titre du règlement -, j’ai effectivement fait référence à l’article 150, qui précisément…

(Le président retire la parole à l’orateur)

 
  
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  Le Président. - La commissaire pour le prochain débat n’est pas encore arrivée. Autrement, je n’aurais pas permis ces interventions.

Le président a écrit à M. Martin. La lettre dispose que les objections de M. Martin ne portaient pas sur des problèmes linguistiques, mais sur le fond de chaque amendement. Cela étant, le président estime que la décision prise par le président de la commission parlementaire de poursuivre le vote était conforme au règlement et à la pratique en la matière.

Étant donné que M. Martin a indiqué avoir l’intention de soulever la question une fois encore demain, je suggère qu’il suive la procédure. Je ne veux pas poursuivre sur ce point maintenant.

Je voudrais ajouter, Monsieur Martin, que j’espère ne pas vous avoir entendu accuser le président de la commission parlementaire de déformer les faits. Vous devez faire très attention à ce que vous dites. Selon l’interprétation que j’ai écoutée, vous suggériez qu’il mentait. Vous ne pouvez dire cela.

Le secrétaire général a écouté avec une grande attention les interventions de tous les collègues. Je vous suis pleinement reconnaissant.

Le débat est clos.

Le vote a lieu demain à 12 heures.

 

20. Service européen d’action extérieure
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  Le Président. - L’ordre du jour appelle la question orale (B6-0233/2005) à la Commission posée par M. Leinen, au nom de la commission des affaires constitutionnelles, sur les aspects institutionnels du service européen d’action extérieure.

 
  
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  Bastiaan Belder, au nom du groupe IND/DEM. - (NL) Monsieur le Président, je pense qu’en tant que députés de cette Assemblée nous avons le devoir de nous soucier de l’heure exacte à laquelle commencent les débats, et les absents n’ont pas d’excuse. Nous disposons de moyens suffisants pour savoir quand nous pouvons assister à un débat dans cette salle. De plus, je devrais dire que, en toute honnêteté, puisque la Commission répond rarement à mes questions pertinentes, je ne suis pas du tout intéressé par la position de la Commission. Ceci dit juste en passant.

Le ton anxieux sur lequel le président de la commission, M. Leinen, a posé sa question m’a à la fois stupéfié et amusé. Cette nervosité trahit la crainte d’un fervent partisan de la Constitution de voir l’une des innovations les plus remarquables que contient celle-ci, à savoir l’avènement d’un ministre européen des affaires étrangères, se transformer en cheval de Troie intergouvernemental. Il semble que ce ministre et sa machinerie administrative, le Service européen d’action extérieure, fassent maintenant naître des doutes dans l’esprit de ceux mêmes qui en sont partisans, mais il est beaucoup trop tard pour reculer. Le vendredi 6 mai, Henry Kissinger expliquait clairement aux journalistes de Die Welt que la mise en place d’un numéro de téléphone ne résoudra pas le manque de politique extérieure commune. En fait, je vous recommande à tous de lire cet article. Après tout, ce qui importe, c’est le contenu de ce qui se dira quand le téléphone sonnera.

Une fois encore, l’Union européenne commet l’erreur classique de remédier au manque d’accord politique par des mesures purement institutionnelles. Une analyse honnête de ces mesures institutionnelles révèle que le système de la double casquette, glorifié mais désastreux, perturbe l’équilibre institutionnel des institutions européennes. L’avènement d’un ministre européen des affaires étrangères va à l’encontre de l’importante maxime selon laquelle les diverses institutions opèrent indépendamment l’une de l’autre. Le paragraphe 7 de l’article I-26 dispose en effet que «les membres de la Commission ne sollicitent ni n’acceptent d’instructions d’aucun gouvernement, institution, organe ou organisme». Il semble que cette disposition ne s’applique pas au futur vice-président de la Commission. Je mets au défi tous les partisans de cette nouvelle fonction de réfuter ce point.

Ce ministre, mais également le Service européen d’action extérieure, seront une source permanente de tension interinstitutionnelle, sans parler du financement des fonctionnaires employés par ce service, ni des relations avec les diplomaties nationales auxquelles nous avons consacré une autre belle audition qui s’est conclue sur des nombreux points d’interrogation. Toutefois, M. Leinen faisant le grand écart, c’est de la petite bière en comparaison des compétences athlétiques et acrobatiques dont le futur ministre et chef du service extérieur devra faire preuve.

En tant que fervent opposant à ce traité constitutionnel, j’espère qu’il sera rejeté par la France, tout comme il le sera dans mon pays. Si cela n’était pas le cas, il sera nécessaire que nous contrôlions étroitement et en permanence cette dangereuse aventure appelée l’Union européenne.

 
  
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  Jo Leinen (PSE), rapporteur. - (DE) Monsieur le Président, je reviens d’une réunion publique organisée en Lorraine sur la Constitution européenne, où la majorité des participants étaient favorables à la nomination d’un ministre européen des affaires étrangères qui serait à la tête d’un Service d’action extérieure. Je suis convaincu que tous les peuples d’Europe sont du même avis à ce sujet: Eurobaromètre, par exemple, fait constamment état du désir populaire d’entendre l’Europe parler d’une seule voix sur la scène mondiale. C’est pour cette raison qu’une disposition en la matière a été prévue dans la Constitution européenne.

Un ministre des affaires étrangères donnerait un visage aux valeurs européennes et défendrait les intérêts européens dans le monde. Pour accomplir ces tâches, il aura évidement besoin du Service d’action extérieure dont nous avons parlé. Son double rôle rend le système assez complexe et c’est à ce problème que nous devons trouver une solution. Je pense que nous devons le faire dans l’esprit de la Constitution. Or, que veut l’esprit de la Constitution, sinon que l’ancien deuxième pilier, avec son approche plutôt intergouvernementale, soit intégré à la méthode communautaire? Toute la question, lors des débats à la Convention et à la conférence intergouvernementale, était d’intégrer ce qui était le deuxième pilier à une Union européenne ayant une personnalité juridique et conçue pour agir, aux plans interne et externe, en tant qu’entité unique.

L’article 296 de la Constitution dispose que le service extérieur sera établi sur décision du Conseil, après consultation du Parlement et approbation de la Commission. C’est le point que nous discutons aujourd’hui. La Commission a un rôle à jouer dans le façonnement du Service d’action extérieure. Nous, les députés de cette Assemblée, nous craignions que le Conseil ne soit allé très loin dans son travail, qu’il n’ait brûlé les étapes et qu’il n’ait déjà des plans précis en tête, tandis que la Commission restait trop hésitante et adoptait une approche trop réservée à l’égard en la matière. C’est pour cette raison que nous avons soulevé aujourd’hui la question de savoir comment la Commission entend assurer que la méthode communautaire continuera à être développée et garantie dans le domaine des relations étrangères, comment - en termes administratifs et financiers - le service sera organisé et comment le Parlement sera en mesure de contrôler ses activités.

Nous devrions utiliser tous les moyens disponibles pour prévenir l’installation d’une troisième bureaucratie parallèlement à l’administration de la Commission et du Conseil; ce qui serait la pire des choses qui puisse arriver. La question se pose alors, évidemment, de savoir si le Service d’action extérieure fait partie du Conseil ou de la Commission, et c’est à ce propos que nous devons envisager l’existence, dès maintenant et dans de nombreux pays, de délégations qui pourraient devenir des ambassades de l’UE. Je pense qu’il serait juste et bon de faire de ce service - en ce qui concerne son organisation et son budget - une partie de la Commission plutôt que du Conseil.

Il ne fait aucun doute que le Conseil aurait un rôle important à jouer, car il est parfaitement clair que le service existerait pour mettre en œuvre les décisions prises par le Conseil en tant qu’entité politique. Des exemples de ce type de dualités existent dans de nombreux pays, y compris en Allemagne où, à certains niveaux administratifs, des bureaux servent à la fois les autorités locales et l’État. Loin d’être sans précédent, ce système pourrait fonctionner dans ce cas aussi.

Nous devons également décider de ce que le Service d’action extérieure est censé faire ou s’abstenir de faire. Je ne crois pas qu’il soit avisé de créer une autorité mammouth qui aurait une part de responsabilité dans tous les portefeuilles, de celui du commerce du commissaire Mandelson à celui de la politique de développement du commissaire Michel. Ceux-ci doivent être partagés entre un Service d’action extérieure traditionnel, dont le ministre des affaires étrangères aura la responsabilité, et d’autres directions générales et commissaires avec leurs attributions. Le fait que le ministre des affaires étrangères soit également vice-président de la Commission permettrait évidemment un regroupement des pouvoirs et des responsabilités et garantirait la cohérence dans ce domaine.

Nous sommes impatients de savoir ce que la Commission a à nous dire et nous espérons que ce qui est fait relativement à cette importante question respecte l’esprit de la Constitution et en sera la manifestation.

 
  
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  Margot Wallström, vice-présidente de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, les nouvelles dispositions dans le domaine des relations extérieures définies dans le traité constitutionnel offrent l’occasion à l’Union européenne d’améliorer l’efficacité et la cohérence de son action extérieure. Il s’agit d’une bonne raison de ratifier le traité constitutionnel, espérons-le.

Nous devons en particulier rassembler autant que possible les deux piliers de l’action extérieure de l’Union: les relations extérieures de la Communauté et la politique étrangère et de sécurité commune. Cette démarche nous permettra d’accroître notre influence, de mieux faire entendre notre voix et elle nous aidera à promouvoir nos valeurs et nos intérêts européens partout dans le monde. C’est pour cette raison que la Commission soutient la création du poste de ministre européen des affaires étrangères, qui portera une double casquette. En effet, la Commission a proposé cette idée à la Convention. Il s’agit d’une amélioration logique et nécessaire de la structure mise en place par les traités de Maastricht et d’Amsterdam.

Le futur ministre, fort de son expérience en tant que haut-représentant, sera en même temps vice-président de la Commission. En tant que membre du collège, il sera pourvu de compétences communautaires et aura accès aux outils de la méthode communautaire, qui seront indispensables à l’accomplissement de ses missions. Il s’ensuit que nous sommes fortement favorables à la création d’un service européen d’action extérieure efficace, qui permettra au ministre/vice-président d’exercer sa fonction avec efficacité et dans le respect des procédures communautaires.

La Constitution entérine les responsabilités importantes de la Commission dans le domaine de la politique étrangère, y compris son rôle dans la représentation extérieure de l’Union et dans l’exécution du budget. Elle renforce le rôle qu’elle joue dans la coordination et la cohérence des différents domaines de la politique extérieure, un dossier qui incombera spécifiquement au ministre/vice-président.

Aux termes de la Constitution, et du présent Traité d’ailleurs, la Commission exécutera le budget sous le contrôle du Parlement. Il faudra respecter les droits du Parlement, qui agit en tant qu’autorité budgétaire dans l’exécution du budget opérationnel et administratif et joue un rôle dans la programmation pluriannuelle.

Le président Barroso et le haut-représentant Solana ont convenu de collaborer étroitement. Comme vous le savez, la future proposition de création des services sera déposée par lui, en tant que ministre, et décidée par le Conseil, après la consultation du Parlement et le consentement de la Commission.

La Commission, dont le ministre/vice-président, tentera de préserver et de promouvoir la méthode communautaire, qui a fait ses preuves et a obtenu de bons résultats dans les relations extérieures. De manière plus générale, la Commission protégera l’équilibre institutionnel activement et avec vigilance.

Les États membres ont entamé les discussions sur la création du service européen d’action extérieure et commencent à comprendre les questions complexes impliquées. Les capitales continuent de se livrer à un exercice de réflexion et de compréhension, notamment concernant le statut du futur service. Tout le monde en général convient de la nécessité de lui conférer une nature sui generis, mais les idées diffèrent quant à l’orientation à lui donner dans la pratique.

Permettez-moi d’évoquer brièvement la question du statut administratif du nouveau service, par rapport à la Commission et au Conseil, qui est un élément clé du projet de résolution de la commission des affaires constitutionnelles. Les différents points concernés sont encore en cours de discussion, il est dès lors trop tôt pour donner une réponse définitive. Il faudra respecter les différentes exigences imposées par la Constitution, notamment s’agissant de l’inclusion de fonctionnaires issus de la Commission, du Conseil et des services diplomatiques nationaux. La responsabilité de la Commission dans l’exécution du budget et dans les politiques communautaires doit être préservée. Parallèlement, il convient d’éviter le double emploi. Les synergies et l’efficacité doivent orienter les préparations, une action extérieure plus solide et plus cohérente devant tenir lieu de principe de base.

La prochaine étape sera un rapport d’évaluation conjoint transmis par le haut-représentant et la Commission au Conseil européen de juin. Dans ce contexte, les avis du Parlement sont importants et je suis par conséquent ravie de participer à votre débat aujourd’hui.

Je conclus en répétant que la Commission partage l’objectif des députés de sauvegarder et de renforcer la méthode communautaire et le rôle de la Commission et du Parlement dans ce processus. Parallèlement, je pense que nous avons comme objectif commun de créer de nouvelles structures qui puissent véritablement contribuer à améliorer l’efficacité, la cohérence et l’influence des politiques et des actions de l’Union dans le monde.

Naturellement, il demeure des incertitudes sur différents fronts: le Parlement, la Commission, le secrétariat du Conseil et les États membres ont tous leurs inquiétudes. Toutefois, nous pensons que les possibilités offertes à l’Union et à ses institutions permettront, in fine, de surmonter ces inquiétudes. Nous devons tirer profit de ces possibilités pour faire évoluer la politique étrangère européenne et la rendre plus efficace et plus forte.

 
  
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  Le Président. - Madame la Commissaire, nous avons commencé le débat sans vous. Peut-être pourriez-vous, lorsque vous répondrez à la fin du débat, expliquer la raison pour laquelle vous êtes arrivée en retard. Dans la mesure où vous êtes responsable des relations avec le Parlement européen, cette explication s’avère utile.

 
  
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  Íñigo Méndez de Vigo, au nom du groupe PPE-DE. - (ES) Monsieur le Président, nous avons été obligés de subir M. Belder et de l’entendre nous dire ce qu’il pense, ou plutôt ce qu’il ne pense pas, du Service extérieur. C’est ainsi que ce Parlement pratique un certain masochisme que nous devons endurer et vous-même, Monsieur le Président, êtes largement responsable de ce fait. Ceci dit, toutefois, je pense qu’il s’agit d’une question cruciale et par conséquent, je me réjouis que la commission des affaires constitutionnelles ait pris cette initiative.

Quand nous avons discuté cette question à la Convention, elle a suscité d’énormes controverses et mon ami et collègue Elmar Brok a été de ceux qui ont travaillé le plus énergiquement pour faire aller les choses dans ce sens. Si vous me demandiez laquelle des innovations de la Constitution européenne est la plus significative, je répondrais sans hésitation que c’est le ministre des affaires étrangères.

Je pense que si l’idée d’un ministre des affaires étrangères portant une double casquette, c’est-à-dire nommé par le Conseil européen mais vice-président de la Commission européenne, l’a finalement emporté, c’est parce que, pour les intergouvernementalistes, c’est un moyen de mettre la main sur l’argent et le personnel de la Commission et, pour les plus communautaristes, c’est un moyen d’avoir leur mot à dire dans la politique étrangère de l’Union.

Par conséquent, la manière dont nous allons structurer le Service extérieur, cet outil fondamental du ministre, est très importante. Or, Madame la Vice-présidente, vous vous êtes montrée extrêmement réservée. Ce que je veux dire par-là, c’est que vous ne nous avez rien dit dans le document préparé par vos services; vous nous avez dit que vous négociez et que qui vivra verra. Je voudrais vous dire que pour mon groupe, le groupe du parti populaire européen (démocrates-chrétiens) et des démocrates européens, il s’agit d’une question très importante et que, étant donné que la politique étrangère est du ressort des gouvernements plutôt que des peuples, des princes plutôt que des peuples, comme le dit le vieil adage, nous, les députés de ce Parlement, nous voulons avoir un contrôle sur la politique étrangère de l’Union. La localisation du service extérieur est donc une question cruciale.

En conséquence, nous examinerons de très près la localisation de ce service et mon groupe, mes amis et collègues ne manqueront pas de vous dire très clairement dans leurs interventions où nous voulons qu’il soit basé.

 
  
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  Margrietus van den Berg, au nom du groupe PSE. - (NL) Monsieur le Président, j’aborde le sujet sous l’angle de la coopération au développement. Nous considérons que la création du Service européen d’action extérieure, qui découle de la Constitution européenne, revêt une importance considérable. Nous estimons que l’instauration de ce service représente une avancée importante vers une Europe parlant d’une seule voix et jouant un rôle plus efficace et plus cohérent dans le monde.

Je veux souligner l’importance de la politique de coopération au développement: c’est l’une des principales pierres angulaires sur lesquelles est basée la politique de relations extérieures de l’UE. Dans ce domaine, l’on relève deux concepts centraux: l’indépendance et la coordination.

En ce qui concerne l’indépendance, la coopération au développement est un domaine indépendant de la très vaste gamme des relations extérieures. La nouvelle Constitution européenne renforcera cette position, car la coopération au développement et l’aide humanitaire seront des objectifs indépendants s’appuyant sur leur propre base juridique. Puisque ces domaines politiques sont traités au niveau communautaire, la Commission et le Parlement ont un rôle majeur à y jouer. Il est vital que cette responsabilité continue à incomber à ces deux institutions.

Cependant, la coordination entre les différentes composantes de la politique extérieure doit, parallèlement, être améliorée. Nous sommes favorables à l’incorporation de ce service dans les attributions de la Commission, à la condition que le Conseil détermine comment les compétences intergouvernementales seront étoffées. La coordination entre les différentes composantes est nécessaire à la cohérence de la politique, qui est l’une des exigences explicitement prévues par la Constitution. En fait, cette exigence était déjà prévue par le traité de Maastricht. Une politique cohérente doit garantir que la réalisation des principaux objectifs de la politique de développement (les objectifs du millénaire en matière de développement) ne sera pas bloquée par un autre secteur de la politique extérieure, comme la politique commerciale ou la politique de défense. Nous devrions également éviter la duplication, qui représente un gaspillage de temps et d’argent. En conséquence, nous devrions unir nos forces, sur le terrain également.

Enfin, je voudrais ajouter que le financement de ce service ne devrait pas se faire aux dépens des budgets de politique extérieure existants ou de la réalisation des objectifs du millénaire.

Le Service européen d’action extérieure est un nouveau concept important qui s’inscrit dans la politique extérieure européenne et que nous devons façonner avec précaution, en respectant les dispositions de la Constitution et les droits du Parlement européen. Il est de la plus haute importance que le modèle communautaire soit respecté dans ce domaine et que la Commission puisse maintenir son rôle d’exécutrice de la politique.

 
  
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  Andrew Duff, au nom du groupe ALDE. - (EN) Monsieur le Président, la mise en place du service d’action extérieure est extrêmement importante, mais il est aussi très délicat d’y parvenir avec succès. Parvenons-y, et nous aurons accompli l’intégration fonctionnelle sur le terrain dans les pays tiers, une intégration plus efficace, ce qui non seulement propagera les intérêts de l’Union plus efficacement à travers le monde, mais se répercutera également aux niveaux de l’analyse et de la planification à Bruxelles.

Le ministre des affaires étrangères a besoin d’un service de premier ordre qui puisse lui apporter les ressources et les renseignements nécessaires et lui permettre de recruter et de former un service diplomatique véritablement européen.

Je salue la déclaration prudente de la commissaire, mais il est clair que le Conseil est encore loin d’un accord sur la question, surtout au vu des divergences entre les intérêts des petits États membres et des grands. Par ailleurs, plusieurs problèmes majeurs doivent encore être résolus.

La Commission doit sans conteste tenter d’obtenir la confiance des ministres des affaires étrangères des États membres, mais doit aussi préserver ses prérogatives spécifiques et son expérience acquise au fil des décennies dans l’ensemble de l’échiquier politique, notamment dans les domaines du développement, de l’environnement et, bien entendu, du commerce.

Le Parlement appréhende visiblement la possibilité que le président de la Commission soit réduit au rôle de ministre de l’intérieur de l’Union, en laissant l’ensemble de la politique étrangère entre les mains du ministre des affaires étrangères/vice-président. Cette démarche émasculerait la Commission et rendrait un mauvais service à toutes les parties concernées.

 
  
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  Irena Belohorská (NI). - (SK) Monsieur le Président, Madame la Commissaire, Mesdames et Messieurs, la question de mon collègue, M. Leinen, est posée alors que les États membres se préparent à ratifier le traité constitutionnel. Je me réjouis que mon pays, la Slovaquie, ait aujourd’hui ratifié ce traité constitutionnel, et ce d’autant plus que j’ai participé à son élaboration.

Conformément à ce traité constitutionnel, le Parlement européen devrait se préparer à jouer un rôle nouveau et renforcé. Jusqu’à présent, le Parlement européen n’avait qu’une influence minime dans le domaine de la politique étrangère, cette influence étant principalement exercée au travers de pouvoirs décisionnels ayant trait au budget. Nous devons comprendre que le Parlement européen est la seule institution européenne directement élue par les citoyens. Par conséquent, nous devrions éliminer le déficit démocratique et veiller à ce que le Parlement européen soit directement impliqué dans le processus décisionnel en matière de politique étrangère. Le Parlement européen ne devrait pas être simplement consulté. La détermination de la position de l’Union européenne en matière de politique étrangère ne doit pas être abandonnée aux compétences exclusives des diplomates. La Commission et le Conseil devraient coopérer comme il se doit avec la commission des affaires étrangères et les autres commissions.

 
  
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  Elmar Brok (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, Madame la Commissaire, Mesdames et Messieurs, en termes administratifs, le Service européen d’action extérieure est une vaste entreprise, et c’est probablement la plus importante question structurelle qui découle de la Constitution, du moins en ce qui concerne la forme des futures activités exécutives de l’Union européenne.

Je pense qu’il est indispensable que nous fassions de cette entreprise un succès, car cela déterminera de manière décisive la manière dont l’Europe pourra agir sur la scène mondiale. Je pense aussi que ce serait une erreur d’aborder cette question de manière défensive, en disant que le ministre des affaires étrangères fera ce que le Conseil fait aujourd’hui, pour improviser ensuite quelque chose ensemble et laisser le développement et le commerce aux mains de la Commission, comme avant.

La tâche du ministre des affaires étrangères, indépendamment de la question des responsabilités respectives, consiste à définir la teneur de l’action extérieure dans son ensemble, d’où une tendance naturelle à ce que tout tombe dans ses attributions. Il s’ensuit qu’une approche défensive de la part de la Commission ne ferait pas avancer les choses. Il faut au contraire qu’elle adopte une démarche proactive; plutôt que de permettre que les décisions soient prises ailleurs et que tous les domaines, à quelques exceptions près, soient exclus de sa compétence, la Commission doit faire pression pour que chaque décision soit prise en son sein. Ce sera la question clé.

M. Dehaene, qui s’exprimera brièvement, était responsable du groupe de travail chargé de cette question à la Convention. Il sait donc ce que voulait la Convention; et ce qu’elle voulait, c’était le développement de la méthode communautaire.

Madame la Commissaire, je vous suis très reconnaissant d’avoir déclaré que vous partagez le désir du Parlement de faire avancer la méthode communautaire. Cela signifie-t-il que nous aurons un Service européen d’action extérieure unique dépendant de la Commission en termes d’organisation, d’administration et de budget? C’est une question claire et simple, et pourtant aucune réponse ne lui a été donnée. Par conséquent, nous vous demandons d’y répondre, peut-être lors d’un réexamen du dossier.

Nous sommes prêts à soutenir la Commission, et ce sont les députés européens qui ont obtenu la règle selon laquelle cela ne peut se faire qu’avec le consentement de la Commission et l’accord de la Convention et de la conférence intergouvernementale. J’espère que la Commission aura le courage de saisir cette opportunité et d’en venir elle-même à cette décision. Aucune décision ne peut être prise si elle y est opposée et j’espère, par conséquent, que vous irez plus loin que la méthode communautaire générale en adoptant la position contenue dans la déclaration présentée par M. Leinen, selon laquelle le Service d’action extérieure sera, en termes d’organisation, d’administration et de budget, rattaché à la Commission, tout en mettant fidèlement en œuvre, naturellement, les décisions du Conseil sur les sujets pour lesquels le Conseil est compétent.

Je pense que la dynamique du développement administratif signifie que ceci est le seul moyen d’avancer qui serve votre intérêt et le nôtre. Peut-être pourriez-vous même simplifier vos réponses, et il se pourrait alors que je les comprenne.

 
  
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  Panagiotis Beglitis (PSE). - (EL) Monsieur le Président, nous convenons tous que le traité constitutionnel introduit d’importantes innovations institutionnelles dans le domaine des relations extérieures, à savoir la création du poste de ministre des affaires étrangères et l’établissement du Service européen d’action extérieure. Il ne serait pas exagéré de dire qu’avec ces nouvelles institutions, l’embryon institutionnel du futur ministère européen commun des affaires étrangères est en cours de création dans l’Union européenne.

Je fais partie de ceux qui pensent que le traité constitutionnel pourrait avancer plus hardiment dans le sens d’un approfondissement de ces politiques, en étendant la majorité qualifiée et en renforçant encore les compétences du Parlement européen dans le domaine de la politique étrangère commune. Mais de toute manière, étant donné les circonstances et compte tenu des corrélations, le compromis que nous avons obtenu est positif et contraignant, c’est pourquoi je recommande de voter en faveur du traité constitutionnel.

En ce qui concerne les nouvelles institutions du Service européen d’action extérieure, nous devons commencer dès maintenant à les rendre opérationnelles, de manière à ce que nous soyons prêts dès que - je l’espère - le traité constitutionnel entrera en vigueur en novembre. Nous avons trop peu de temps, si vous pensez que d’importantes questions institutionnelles et organisationnelles doivent être résolues. C’est pourquoi l’initiative prise par Jo Leinen était la bonne et elle est arrivée au bon moment.

Toutefois, je dois attirer votre attention sur le fait que les meilleures solutions possibles doivent être trouvées pour renforcer l’efficacité, la cohérence, la cohésion et la visibilité de l’action extérieure.

L’une des questions fondamentales est le renforcement du rôle consultatif et de contrôle ainsi qu’une plus forte implication du Parlement européen, dès maintenant pour la phase préparatoire et lorsque le Service européen sera opérationnel. C’est pourquoi je propose que nous demandions au président de la Commission et à M. Solana de présenter un rapport d’étape conjoint au Parlement européen, avant de le présenter au Conseil européen de juin, et de s’engager à consulter le Parlement à toutes les étapes ultérieures.

 
  
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  Mirosław Mariusz Piotrowski (IND/DEM). - (PL) J’ai de très nombreux doutes et réserves quant à la création d’un Service européen d’action extérieure, et je voudrais attirer l’attention de l’Assemblée sur trois d’entre eux, que je considère comme cruciaux.

Le premier concerne la question de savoir si la législation communautaire fournit une base juridique au Service européen d’action extérieure. Certes, les articles pertinents du traité sur l’Union européenne ont été cités, ainsi que d’autres textes de loi, mais le principal point de référence pour l’établissement de ce service est le projet de traité établissant une Constitution pour l’Europe. Il ressort de ce projet de traité que l’établissement d’un service diplomatique est une simple conséquence de la conduite d’une politique étrangère et de sécurité commune et de la nomination d’un ministre des affaires étrangères, comme l’ont déjà mentionné les orateurs précédents. Il faut souligner, toutefois, que le projet de traité constitutionnel n’a pas encore été adopté et qu’en outre, il y a de bonnes raisons de penser qu’il sera rejeté par les citoyens des États membres. La question est donc de savoir si nous ne devrions pas admettre que toute discussion au sujet d’un Service européen d’action extérieure serait extrêmement prématurée à ce stade. Je signale également que ceci illustre une fois de plus de l’attitude arrogante de l’UE à l’égard des citoyens des États souverains d’Europe. Puisque les institutions de l’UE semblent croire qu’elles ont le droit d’agir prématurément, je voudrais demander si la Commission a un plan B, au cas où le traité constitutionnel serait rejeté.

Deuxièmement, en signant le projet de traité constitutionnel en novembre 2004, les gouvernements des États membres ont pris un engagement, et cet engagement a des conséquences discutables. Les États membres se sont engagés à s’abstenir d’entreprendre toute action susceptible d’empêcher l’entrée en vigueur de la Constitution. Cette promesse signifie-t-elle automatiquement que les États membres doivent se lancer dans une propagande éhontée en faveur de l’adoption de ce traité? Ceci n’exclut-il pas la fourniture d’informations fiables et objectives sur le contenu de la Constitution et les effets que celle-ci peut avoir sur la vie des nations européennes?

Enfin, ma troisième préoccupation concerne la structure prévue pour le Service européen d’action extérieure, car celle-ci pourrait impliquer la création d’une nouvelle armée de fonctionnaires disposant de pouvoirs mal définis, voire uniquement partiels. Nous ne pouvons même pas être certains que cette structure n’impliquera pas que les mêmes sujets seront traités par les directions générales, le Service d’action extérieure et les autres agences de la Commission. En fin de compte, ceci aboutira à une expansion de la bureaucratie de l’UE, alors que celle-ci manque déjà de transparence et fait tout simplement peser une charge excessive sur les contribuables des États membres.

À combien se chiffrera l’impact financier de l’établissement du Service européen d’action extérieure? Comment ces coûts seront-ils partagés, et qui en supportera la part la plus importante? En outre, je voudrais savoir combien de fonctionnaires travaillent actuellement pour les services de la Commission responsables de la politique extérieure de l’UE, et combien de fonctionnaires devraient travailler dans le futur Service d’action extérieure?

 
  
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  James Hugh Allister (NI). - (EN) Monsieur le Président, dans le cadre de mon intervention dans ce débat, je voudrais inviter la commissaire à s’attarder sur deux points. L’un d’eux fait suite aux propos de l’orateur précédent.

Puisque le service d’action extérieure ne pourra obtenir un statut juridique et une légitimité que si la Constitution est approuvée, il est incontestable que la Commission et le Conseil, en travaillant à la mise en place de la structure et du personnel du SAE, présagent ouvertement l’issue du processus de ratification. À cet égard, la Commission pourrait-elle nous indiquer le montant qu’elle budgétise dans le cadre des démarches qu’elle effectue par présomption et de manière préventive? Combien cette entreprise, basée sur des suppositions, nous a coûté jusqu’à ce jour et combien devrait-elle nous coûter au cours des 18 prochains mois?

Deuxièmement, la Commission pourrait-elle expliquer bien clairement, au profit des citoyens, comment elle conçoit la conduite des affaires étrangères des États membres une fois que le SAE sera en place? Plus concrètement, est-il juste d’en conclure que les affaires étrangères des pays ne pourront alors être menées qu’en conformité avec la politique étrangère commune, en étant subordonnées au SAE?

 
  
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  Alexander Stubb (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, je voudrais vous féliciter pour votre comportement relativement enthousiaste, même si je me doute que vous préféreriez en ce moment aller manger des asperges avec le reste de cette Assemblée.

J’ai trois remarques générales à faire. Tout d’abord, je pense qu’il s’agit probablement de la question institutionnelle la plus importante à laquelle nous serons confrontés au cours des quatre ou cinq prochaines années. Elle porte véritablement sur le pouvoir exécutif, sur celui qui dirige la politique étrangère - la Commission ou le Conseil. Je suis extrêmement ravi que les États membres aient fait avancer cette question. Je suis ravi qu’ils aient fourni cinq fiches au groupe Antici et que le Coreper les ait abordées lors de ses réunions, et je suis également ravi que la Commission ait tenu des confessionnaux avec les États membres. Mais avant tout, je suis ravi que, au sein du Parlement européen, nous ayons amené le débat au grand jour.

La deuxième remarque que je voulais faire est que je pense qu’un service de relations extérieures pour nous tous n’apportera que des avantages. À de nombreux égards, tout le monde sort gagnant de cette question. Il s’agit de nous offrir de meilleurs services consulaires, de meilleures informations et, en général, une meilleure politique étrangère et de sécurité commune, car, comme nous le savons tous, sans fonction publique au niveau européen, il ne peut fonctionner.

La troisième remarque que je voulais faire - et je réitère les propos de MM. Méndez de Vigo et Brok - est qu’il existe deux questions clés sur lesquelles nous nous penchons de ce côté-ci. La première est que, même si le système est sui generis, il est très important que deux domaines restent entre les mains de la Commission: le budget et l’administration générale.

Pour conclure, je voudrais dire à la Commission que j’espère qu’ils feront preuve de fermeté jusqu’à la fin, car nous devons éviter que des domaines tels que le commerce et le développement soient transférés vers l’instance intergouvernementale et le Conseil. Il ne faut jamais sous-estimer la capacité du secrétariat du Conseil à couper l’herbe sous le pied de la Commission - ils le feront s’ils en ont la possibilité.

(Applaudissements)

 
  
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  Jean-Luc Dehaene (PPE-DE). - (NL) Monsieur le Président, Madame la Commissaire, tout d’abord, comme M. Brok l’a déjà mentionné, je voudrais témoigner, en qualité de président du groupe de travail sur les relations extérieures de la Convention, dont la principale préoccupation était d’éviter l’adoption éventuelle d’une double politique extérieure, l’une relevant du Conseil et de la Commission. Sur une note positive, le groupe de travail voulait parvenir à une cohérence et à une continuité accrues de la politique, et aussi permettre le déploiement de toutes les ressources de l’UE au profit des actions de politique extérieure commune.

Bien qu’une majorité des membres de la Convention aient estimé que cet objectif pourrait être mieux atteint via la méthode communautaire, nous avons été assez avisés pour nous rendre compte que cela n’est pas faisable pour le moment. C’est pourquoi ce compromis a été recherché entre les partisans d’un statu quo amélioré et les partisans de la communautarisation.

Le ministre des affaires étrangères présiderait le conseil de ministres, en fixerait l’ordre du jour et, en tant que porte-parole, garantirait la cohérence et la continuité de la politique. En sa qualité de vice-président de la Commission, il créerait également un lien avec la politique communautaire. En outre, avec l’approbation de la Commission, il pourrait utiliser des fonds communautaires pour soutenir sa politique. La position du groupe de travail était que, dans l’idéal, il devrait consulter la Commission avant de prendre des initiatives et obtenir de celle-ci qu’elle les soutienne dès le départ.

Nous avions même proposé que, dans le cas d’une initiative commune du ministre des affaires étrangères et de la Commission, le Conseil déciderait à la majorité. La plupart des participants ont estimé que cette proposition allait trop loin, mais je voudrais néanmoins affirmer que le succès du ministre des affaires étrangères et l’influence qu’il pourra exercer dépendront largement de la manière dont il s’accordera avec la Commission et dont il travaillera avec elle.

Dès le départ, le groupe de travail s’est rendu compte que le soutien logistique du ministre des affaires étrangères était un aspect crucial. Nous avons toujours milité pour une transformation des délégations en une représentation extérieure unifiée sous la forme d’ambassades de l’UE. À Bruxelles, le ministre devrait aussi avoir un service stratégique à sa disposition, comprenant à la fois des fonctionnaires de la Commission et du Conseil, pour le moment, et des diplomates nommés par les États membres.

Bien que ce service doive travailler à la fois pour le Conseil de ministres et pour la Commission, le groupe de travail a estimé qu’en termes de dynamique, il vaudrait mieux le placer dans le giron de la Commission, même s’il doit servir loyalement le ministre des affaires étrangères et le Conseil des ministres.

Il me semble que le fait de créer une nouvelle administration autonome est à des années-lumière de ce que nous souhaitions. Nous voulions abolir les piliers; or, un super-pilier est en voie d’être créé sous la forme de ce nouveau service. De même, il semble que la décommunautarisation des services de la Commission soit aussi un pas dans la mauvaise direction. La Commission doit défendre sa position au maximum et trouver une place au sein de ses services pour cette administration des affaires extérieures. La Commission ne doit pas oublier qu’elle doit être d’accord et, par conséquent, qu’elle a le dernier mot. Dans le rapport Brok, nous, les députés de cette Assemblée, nous nous déclarerons clairement en faveur de ces solutions et nous soutenons chaleureusement la Commission, mais il revient à la Commission de piloter les négociations.

 
  
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  Charles Tannock (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, mon parti national et moi-même émettons de sérieuses réserves concernant toute la question d’une diplomatie communautaire commune. Je ne peux nier que la grande influence que la Commission exerce à présent de par ses politiques d’aide et son monopole dans le commerce extérieur a également d’importantes répercussions sur la politique et l’économie internationales. En outre, étant donné le développement concomitant de la PESC et de la PECSD, bien qu’il s’agisse soi-disant de domaines intergouvernementaux, l’image de l’Union, en tant qu’acteur de la scène internationale, s’en retrouve améliorée.

Toutefois, étant issu d’un grand pays, le Royaume-Uni, dont la politique étrangère est orgueilleuse et indépendante, je m’oppose aux propositions présentées dans le projet de Constitution de l’UE, qui définit pour la première fois la personnalité juridique de l’UE et créé le poste de ministre des affaires étrangères, sous la direction d’un président du Conseil élu pour cinq ans. Toutes ces dispositions ont pour objectif d’instaurer une politique étrangère et de sécurité commune plus coercitive et contraignante, qui menace l’indépendance du Royaume-Uni dans le domaine des affaires étrangères. Manifestement, dans l’UE à 25, il existe désormais bien plus de petits pays comme celui de M. Stubb, la Finlande, qui font face à la perspective de siéger à la présidence de l’UE pour six mois si la Constitution n’est pas adoptée. Pour eux, les économies d’échelle susceptibles de découler d’un service diplomatique communautaire sont attrayantes, notamment dans la mesure où leurs effectifs seront mis au service des délégations communautaires. La création d’ambassades communautaires de plein droit entraînera également des économies, dans le cas improbable de l’adoption de la Constitution. Ces ambassades pourront remplacer partiellement les missions bilatérales des petits pays si nécessaire.

Néanmoins, je suis favorable à une meilleure formation, plus approfondie, à la diplomatie du personnel de RELEX envoyé à l’étranger au sein des délégations de la Commission. Je suis favorable à un contrôle plus formel de la part du Parlement européen sous la forme d’auditions des chefs de mission des délégations, au sein de la commission des affaires étrangères, lesquels seraient nommés par ce Parlement. De même, les eurodéputés devraient bénéficier d’une assistance plus officialisée lorsqu’ils sont en mission - une démarche que nous accomplissons en règle générale, il faut l’avouer.

Toutefois, je suis très inquiet face à l’idée de conférer à l’UE davantage d’attributions dignes d’un État, ce que le SAE implique s’il réduit davantage encore la capacité de mon pays à conduire sa politique étrangère et de sécurité en toute indépendance lorsqu’il y va de l’intérêt national.

 
  
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  Maria da Assunção Esteves (PPE-DE). - (PT) L’aspect le plus complexe, le plus controversé et le plus fascinant du défi de la constitutionnalisation de l’Europe est peut-être celui de l’action extérieure. C’est par le biais de l’action extérieure que l’Europe diffuse dans le monde un nouveau style de gouvernance, caractérisé par le partage actif des valeurs démocratiques et le respect des droits de l’homme.

En conséquence, le Service d’action extérieure n’implique pas seulement rationalisation administrative et financière et désir d’organisation. Il prouve que la politique étrangère de l’UE est aujourd’hui un projet de vie partagé, un modèle de consensus sur les perspectives de l’humanité que l’Europe façonne pour elle-même et pour ses relations avec le monde.

Il s’ensuit que les institutions européennes doivent travailler ensemble transversalement pour que les décisions de politique extérieure s’inscrivent dans la démocratie. La Constitution émergente montre que les décisions de politique étrangère commune sont désormais prises sur la base de critères qui ne sont pas exclusivement intergouvernementaux, mais plutôt transversaux aux institutions européennes qui élaborent les décisions politiques. En conséquence, l’action de la Commission établit automatiquement une connexion avec le Parlement.

Si nous voulons une Europe cohérente, avec une vision stratégique clairement définie sur la base du multilatéralisme et sur un nouveau système de droit international, nous devons veiller à ce que les institutions interagissent en synergie les unes avec les autres et à ce qu’il y ait un consensus interne permanent. C’est la voie que doit suivre le nouveau Service européen d’action extérieure. Dès lors, les questions suivantes se posent concernant ce service: comment se présente son organigramme? Comment son énorme multidisciplinarité sera-t-elle gérée? Comment sa hiérarchie sera-t-elle structurée? Comment prévenir les tensions qui surgiront entre le Conseil et la Commission, sans compter la tendance qu’ont les relations entre les deux institutions à verser dans le féodalisme? Enfin, comment la chaîne des responsabilités sera-t-elle établie, y compris la chaîne des responsabilités démocratiques?

 
  
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  Margot Wallström, vice-présidente de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, je remercie le peu d’entre nous qui sont généralement présents lors de la séance nocturne du Parlement européen. Le respect de l’horaire du Parlement européen relève parfois du défi. Je croyais que la séance commençait à 22 heures. C’est pourquoi je suis arrivée ici il y a 10 minutes, sans me presser, en même temps que M. Leinen, et je vous remercie de m’avoir accueilli dans ce débat.

J’ai écouté avec grand intérêt les députés ce soir au cours de ce débat, car le service européen d’action extérieure est un sujet qui déchaîne les passions. Il touche à des questions institutionnelles et constitutionnelles d’une importance fondamentale. La création d’un poste de ministre européen des affaires étrangères, qui sera en même temps vice-président de la Commission, est une innovation cruciale dans l’architecture institutionnelle de cette Union européenne. Elle rapproche les deux piliers dans le domaine des affaires étrangères: la méthode communautaire et la méthode intergouvernementale. Ce ministre à double casquette sera chargé de différents types de missions. C’est pourquoi la création de ce service est si importante et représente un défi aussi difficile.

Je commenterai brièvement plusieurs questions soulevées. En réponse à M. van den Berg, permettez-moi de dire que la politique de développement est et restera un élément clé des politiques de l’Union européenne et un avantage important pour l’Europe dans le monde et dans le contexte de la Constitution. La politique de développement n’est pas subordonnée à d’autres politiques. Elle conserve son statut spécifique dans le cadre de la méthode communautaire, mais toutes les politiques doivent faire l’objet d’une meilleure intégration dans une politique étrangère cohérente, ce qui permettra d’améliorer, et non d’affaiblir, l’efficacité de la politique de développement de l’Union.

Je peux assurer à M. Duff que la Commission ne sera pas émasculée par la Constitution s’agissant des compétences communautaires. Le ministre et ses services seront tenus d’observer les procédures de la Commission et les principes de la collégialité, sous la conduite du président de la Commission.

Je suis tout à fait d’accord avec M. Brok quand il affirme que nous ne devons pas être sur la défensive. Pour la Commission, les nouvelles dispositions prévues dans la Constitution présentent plus de possibilités que de risques. Il importe également de souligner que rien ne peut se décider contre la Commission dans ce domaine.

À M. Allister et d’autres, je répondrai que nous ne présageons pas la ratification de la Constitution. Nous ne faisons que préparer la décision, qui ne pourra être prise qu’après sa ratification et son entrée en vigueur, et après l’avis du Parlement.

Concernant les incidences sur le budget et le personnel, aucun projet, aucune estimation ni aucun calcul n’ont été réalisés, car nous n’en sommes pas encore à ce stade de planification. Le Parlement, en tant qu’autorité budgétaire, prendra plus tard la décision s’agissant de l’ensemble de ces chiffres.

Je pense qu’il s’agit des principales questions soulevées, et je peux vous assurer que les opinions du Parlement seront prises en considération dans l’évolution de ce dossier dans les mois à venir. La résolution que la commission des affaires constitutionnelles a adoptée mardi - qui, je crois comprendre, sera abordée en séance plénière dans deux semaines - est une contribution qui doit tout particulièrement être prise en considération, non seulement par la Commission, mais aussi par les États membres et le Conseil.

Les travaux techniques devraient se poursuivre au cours du deuxième semestre de cette année, de manière à ce que les décisions de principe puissent être prises au cours de l’année prochaine, lorsque la ratification de la Constitution sera achevée. Le Parlement sera formellement consulté en temps utile pour la proposition lié au ministre. Le débat de ce soir sera donc suivi d’autres discussions, au cours desquelles le Parlement pourra développer son avis à la lumière de l’évolution du dossier, dont cette Assemblée sera tenue informée.

Je conclurai en réitérant que la Commission est consciente de la préoccupation de députés face à la nécessité de sauvegarder et de renforcer la méthode communautaire et au rôle de la Commission et du Parlement dans ce processus. Je sais que c’est un point duquel M. Brok se soucie. Nous partageons avec vous l’objectif consistant à créer de nouvelles structures susceptibles de véritablement contribuer à améliorer l’efficacité et la cohérence des politiques et des actions de l’Union dans le monde et à accroître leur influence.

 
  
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  Le Président. - Nous vérifierons les informations que l’on vous a transmises, Madame la Commissaire. Dans mon règlement, une femme séduisante a toujours le droit d’arriver en retard.

À l’exception d’un député qui s’est exprimé avant votre arrivée, Madame la Commissaire, tous les orateurs de ce débat sont encore présents, ce qui est inhabituel.

 
  
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  Elmar Brok (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, je voudrais remercier la commissaire Wallström d’avoir déclaré que rien ne peut être décidé contre la Commission. C’est ce qui est prévu dans le projet de Constitution. Je lui suis reconnaissant d’avoir réaffirmé clairement ce point.

Ce qui est en jeu, ce n’est pas la question de savoir s’il sera tenu compte des positions du Parlement, mais le fait que nous avons demandé quelle est la position de négociation de la Commission, autrement dit si elle fait valoir ou non que ce service doit lui être rattaché. Nous aimerions beaucoup savoir ce que vous en pensez.

La question ne porte pas davantage sur l’implication du Parlement; au contraire, nous sommes ici pour aider la Commission à éviter la situation où elle serait un mécanisme de marché intérieur et le ministre des affaires étrangères une puissance de plein droit, et pour établir, au contraire, que c’est la Commission qui, au point de vue administratif, représente l’Union européenne dans le monde.

Monsieur le Président, peut-être pourriez-vous me transmettre le document qui nous fournirait une base juridique prouvant que le Parlement doit donner un petit coup de pouce à la Commission pour la faire aller dans la bonne direction.

 
  
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  Margot Wallström, vice-présidente de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, je tiens juste à dire qu’il importe de comprendre que nous ne sommes pas encore à l’étape de la négociation. Nous en sommes encore au stade préparatoire, au cours duquel nous analysons tous les détails techniques. Il serait fâcheux de nous enfermer dans une procédure de négociations maintenant. Il reste encore trop de travaux techniques et préparatoires à effectuer auparavant. Comme je l’ai dit précédemment, nous garderons le Parlement informé de l’évolution de la situation.

 
  
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  Le Président. - Le débat est clos.

Le vote aura lieu à Bruxelles le jeudi 26 mai.

 

21. Evaluation du Cycle de Doha suite à l’accord de l’OMC du 1er août 2004
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  Le Président. - L’ordre du jour appelle le rapport (A6-0095/2005) de M. Moreno Sánchez, au nom de la commission du commerce international, sur l’évaluation du cycle de Doha à la suite de l’accord de l’OMC du 1er août 2004 (2004/2138(INI)).

 
  
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  Javier Moreno Sánchez (PSE), rapporteur. - (ES) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Monsieur le Commissaire, je voudrais commencer par remercier toux ceux qui ont contribué à enrichir ce rapport, mis aux voix demain, pour leur coopération. Ce rapport crée un équilibre entre, d’une part, le soutien inconditionnel du Parlement à la défense des intérêts de l’Union dans les négociations en cours et, de l’autre, son ambition à garantir que ce cycle de développement soit couronné de succès, ce qui signifierait l’intégration totale et la participation des pays en développement à l’économie mondiale.

Par ce rapport, cette Assemblée entend envoyer un message politique décisif de soutien au progrès des négociations, dans lesquelles la Commission joue un rôle essentiel en réitérant notre engagement envers l’OMC et son système multilatéral qui, je n’en doute pas, constitue le meilleur mécanisme de promotion d’un commerce équitable et de démonstration de la solidarité, d’une manière qui profite à tout le monde. Ce message tombe à point nommé, parce que l’agenda de Doha se trouve à un carrefour et ne peut faire demi-tour.

Après l’échec de la Conférence ministérielle de Cancún, l’accord du 1er août 2004 revêt une importance politique incontestable en ce qu’il a mis les négociations sur la bonne voie et reconnaît la nécessité d’intégrer totalement les pays en développement dans l’économie mondiale. Ce n’est toutefois qu’un feuille de route. Le succès des négociations dépend de la volonté politique de toutes les parties de parvenir à un accord fondamental à Hong Kong.

Nous devons y aller avec une proposition ambitieuse et équilibrée dans les différents domaines couverts par l’Accord: développement, agriculture, produits industriels (NAMA), services et facilitation des échanges, sans oublier la nécessité de mettre le développement au cœur des pourparlers, même si l’agriculture en est indubitablement le moteur. Dans la poursuite de cet objectif, des engagements concrets et spécifiques doivent être pris, avec des dates et des échéances, par le biais d’un processus de négociation transparent, efficace et global, auquel tous les États membres de l’OMC participent pleinement.

Dans le domaine du développement, nous devons veiller à ce que les négociations traitent des problèmes liés à la pauvreté, à la malnutrition et à la faim dans le monde dans l’optique de les réduire de moitié d’ici 2015, comme décidé dans la déclaration du Millénaire, grâce à une relation plus étroite entre l’OMC et les autres organisations internationales.

Il serait également utile que la Commission formule des propositions en vue d’établir des mécanismes d’intégration commerciale pour les pays en développement, afin de compenser les pertes possibles découlant de la libéralisation des échanges.

Le progrès dans les domaines de l’assistance technique et de la création de capacités ainsi que la stimulation du commerce Sud-Sud revêtent une importance particulière en termes de garantie de l’intégration des pays en développement dans l’économie mondiale et de promotion de leurs capacités d’exportation.

Dans l’agriculture, les membres de l’OMC doivent travailler de manière équilibrée en relation avec les trois piliers - subventions à l’exportation, aide interne et accès aux marchés - afin de parvenir à des modalités de négociation détaillées pour Hong Kong et à un désarmement parallèle chez tous les membres de l’OMC.

Pour ce qui est de l’accès aux marchés pour les produits non agricoles, le NAMA, la voie doit être ouverte à la flexibilité et à l’application de la non-réciprocité pour les pays en développement, en vertu du principe de traitement spécial et différencié.

S’agissant des services, des offres de qualité révisées devraient être présentées dans le courant du mois et, en ce qui concerne les services liés aux besoins fondamentaux des citoyens, je ne crois pas que les pays en développement devraient être obligés de les libéraliser.

Mesdames et Messieurs, Monsieur le Commissaire, le succès du cycle, la légitimité et la crédibilité de l’OMC dépendent indubitablement de ce que la société civile perçoit ou non les bienfaits apportés par les échanges internationaux.

Dans un processus où, depuis Seattle, l’intérêt social est grand, il semble essentiel d’insister sur le rôle que les parlements démocratiques doivent jouer en tant qu’expression de l’opinion des citoyens au sein de forums internationaux comme l’OMC et, dans le cas de ce Parlement, en tant qu’entité chargée du contrôle démocratique de la politique commerciale de l’Union et que futur colégislateur en la matière, une fois que la Constitution européenne entrera en vigueur. Si vous me permettez une digression vers un sujet brûlant d’actualité, c’est là un argument de plus à ajouter à la longue liste des avancées représentées par cette Constitution et qui justifie un vote européen favorable, tant en France que dans d’autres pays.

Mesdames et Messieurs, Monsieur le Commissaire, comme l’a dit le poète espagnol Antonio Machado, «Marcheur, il n’y a pas de chemin, le chemin se construit en marchant». Nous sommes à mi-chemin entre Genève et Hong Kong; entre la nostalgie de ce que nous avons laissé derrière nous et l’envie d’arriver à destination. Nous devons aller à Hong Kong avec une proposition ambitieuse et équilibrée dans laquelle la société civile et tous les États membres de l’OMC peuvent se retrouver et qui donnera les résultats dont ils seront satisfaits.

 
  
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  Peter Mandelson, membre de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, je voudrais, pour commencer, féliciter M. Moreno Sánchez pour son excellent rapport, qui fait grandement honneur à son auteur ainsi qu’à l’ensemble de cette Assemblée. Je me félicite de la tenue de ce débat, car je tiens le Parlement pour le partenaire incontournable de la Commission dans l’exercice de nos politiques commerciales, en particulier concernant le cycle de Doha, qui demeure notre priorité absolue.

M. Moreno Sánchez a souligné la nécessité de progresser sur toutes les questions relevant de ce vaste programme en mettant clairement l’accent - ce que je soutiens vivement - sur les objectifs liés à la réduction de la pauvreté et au développement durable. Ceux-ci étaient au cœur de la charte fondatrice de ce cycle, et ils restent aussi importants aujourd’hui que lorsqu’ils ont été formulés.

Depuis mon entrée en fonction, je me suis efforcé de faire avancer l’ADD et de le maintenir sur la bonne voie. Je souhaite que Doha mette le commerce au service du développement. C’est là ce en quoi je crois et que je défends, et ce qui se trouve au cœur des politiques que je mène.

Toutefois, l’Europe ne pourra y parvenir seule. Comme je l’ai dit à Genève mon tout premier jour en tant que commissaire du commerce, l’UE ne peut être le seul banquier de l’OMC. L’été dernier, l’Europe a eu le courage de mettre sur la table des négociations ses subventions agricoles à l’exportation. C’est maintenant aux autres de dévoiler leur jeu. Concrètement, ce cycle doit déboucher sur un meilleur accès au marché et sur des débouchés commerciaux accrus pour tous, non pas seulement pour les pays en développement - je souhaite et m’attends certes à ce qu’ils soient les principaux gagnants de ce cycle -, mais aussi pour notre propre industrie et nos prestataires de services en Europe. Cela nous permettra de capitaliser sur les forces de l’Europe dans l’économie de la connaissance, pour la prospérité et le bénéfice de tous.

L’accès aux marchés des produits industriels - AMNA - et les services sont des questions essentielles dans ce cycle. Faute de progrès sur ces questions, le cycle ne pourra pas être conclu. Pour y parvenir, je veux m’assurer que les PED les plus avancés s’engagent plus activement sur les questions non agricoles. Jusqu’ici, ils se sont abondamment exprimés concernant l’agriculture, ainsi qu’ils y ont parfaitement droit et comme je m’y attendais. Mais ils ont fait preuve de peu de volonté de s’atteler à la nécessité d’un geste réel de leur part sur les AMNA et les services, alors même qu’une analyse objective suggère que ce serait dans leur propre intérêt économique. Il faut que cela change. Nous devons tous montrer une volonté de nous adapter, de changer et de faire droit aux intérêts d’autrui. C’est pourquoi nous avons bougé sur l’agriculture.

Il faut à présent que les autres pays industrialisés majeurs suivent notre exemple et soient plus proactifs concernant les services et œuvrent à leurs propres réformes agricoles afin de répondre à ce que l’Europe a mis sur la table.

La semaine passée, plusieurs réunions informelles OMC des ministres du commerce ont eu lieu à Paris. J’ai exprimé ma profonde inquiétude eu égard au rythme lent des négociations actuelles. J’ai invité tous les membres à cesser de jouer en cachant leurs cartes et à enfin les poser sur la table. Cela vaut pour chacun d’entre nous, je ne suis pas en train de montrer les autres du doigt. Nous devons tous faire cela, pas simplement l’Europe.

J’ai également expliqué notre idée de ce qui constituerait un cycle ambitieux. Cela nécessite des progrès parallèles dans les trois piliers des négociations agricoles - pas simplement les subventions à l’exportation -, y compris les tarifs et les quotas qui limitent l’accès aux marchés. Tous les pays industrialisés - et non pas seulement l’Europe - doivent consentir des efforts évidents pour réformer leurs politiques agricoles, et tous les pays en mesure de le faire, y compris les PED avancés, doivent procéder à une réduction substantielle et réelle - pas seulement sur le papier - des tarifs industriels, tout en respectant toujours la situation spéciale des plus vulnérables. Il y a lieu de soumettre des offres sur les services qui comportent de nouvelles opportunités commerciales réelles et le règlement de l’OMC doit être renforcé substantiellement, que ce soit en matière de facilitation des échanges, de normes antidumping ou de données géographiques.

J’ai également réitéré mon plaidoyer en faveur d’efforts supplémentaires en vue de répondre aux préoccupations spécifiques des pays en développement, en particulier - mais pas exclusivement - les pays pauvres et vulnérables, au moyen d’un traitement spécial et différencié dans le cycle et en amenant les régions plus riches du monde à augmenter considérablement l’aide au commerce. Vous identifiez à fort juste titre la construction de capacités - le soutien essentiel qu’il nous faut apporter - comme instrument important pour permettre aux échanges de prendre place en vue de faciliter cet ajustement, de telle sorte que les pays en développement, en particulier les plus faibles, peuvent réellement prendre part aux opportunités commerciales que nous promouvons dans le cadre de ce cycle.

Nous avons progressé à Paris. Nous avons conclu un accord sur la question vitale mais hautement technique de la conversion de certains droits de douane - X euros par boisseau de tel produit, X euros par kilo de tel autre - dans leur équivalent ad valorem. Si la question fondamentale de savoir de combien et sur quelle base ces équivalents tarifaires seront réduits doit encore être débattue - cela viendra plus tard -, nous avons désormais une base sur laquelle avancer concernant l’agriculture et, partant, concernant tous les autres aspects de l’ADD. Sur ce point, je voudrais souligner et saluer le travail de Mme Fischer Boel. L’agriculture est un sujet difficile et je respecte la façon dont elle s’en acquitte.

Nous pouvons aussi nous attendre à des progrès concernant les tarifs industriels dans les mois à venir. De nombreux membres réitèrent aussi leur intention de présenter de meilleures offres sur les services d’ici à la fin du mois. Nous prévoyons une accélération des débats entre les acteurs essentiels d’ici à la miniconférence ministérielle qui aura lieu en Chine les 12 et 13 juillet. Avant les vacances d’été, nous devrions voir une première approximation de ce qu’un éventuel paquet de Hong Kong pourrait comporter. S’il y a la moindre chance de parvenir à un résultat ambitieux à Hong Kong à la fin de l’année, et donc d’un cycle ambitieux, cette première approximation, que nous verrons, je l’espère, en juillet, devrait au strict minimum établir tout d’abord, point par point, des domaines de convergence croissante entre les membres de l’OMC. Elle devrait également éclaircir la question de notre degré commun d’ambition sur les aspects centraux de l’accès aux marchés - l’agriculture, les AMNA et les services - et, enfin, elle devrait identifier les problèmes fondamentaux sur lesquels il sera nécessaire de conclure un accord pour assurer la réussite de Hong Kong et pouvoir ensuite achever le cycle.

Je suis heureux que ces idées soient contenues dans le résumé de la présidence de la miniconférence ministérielle. Vous pouvez être assurés que c’est dans cet esprit éminemment ambitieux que la Commission continuera de travailler en vue de Hong Kong.

La Commission souscrit de tout cœur avec une grande partie du rapport, mais je voudrais juste souligner deux points précis. Concernant la mention spéciale de la flexibilité pour les pays en développement contenue au paragraphe 6 du rapport, la Commission souscrit à l’esprit de l’argument avancé. Nous sommes disposés à accorder une flexibilité aux PED au moyen d’un traitement spécial et différencié, tant aux pays les moins avancés qu’à d’autres pays faibles et vulnérables. Mais nous ne pourrons le faire que si nous tenons compte du niveau de développement, ce qui implique de faire la distinction point par point entre les PED. Nous ne saurions accepter une approche «taille unique».

Le deuxième point concerne la suggestion, au paragraphe 9, d’une «boîte développement» dans les négociations sur l’agriculture. La Commission peut admettre que le cadre puisse et doive protéger les intérêts communautaires, mais il est excessivement optimiste de dire que «… l’UE pourra faire face à ces réductions avec aisance» en ce qui concerne les aides internes, sources de distorsion dans les échanges commerciaux. Sur l’accès aux marchés, le rapport suppose que le traitement très positif accordé aux produits sensibles permettra à l’UE de protéger ses organisations de marché. C’est certainement ce qu’espère l’UE, mais des concessions difficiles sur certains produits devront toujours êtres accordées, même dans les circonstances les plus favorables.

Permettez-moi de terminer ici. Je vais écouter ce qu’ont à dire les députés de cette Assemblée et je leur répondrai à la fin, quand et si on permet de le faire. Une fois de plus, mes remerciements à M. Moreno Sánchez pour son rapport et à cette Assemblée pour l’occasion de débattre de ce sujet très important.

 
  
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  Maria Martens (PPE-DE), rapporteur pour avis de la commission du développement. - (NL) Les négociations du cycle de développement de Doha visent à donner une impulsion à l’économie des pays en développement et à leur accorder une vraie place dans l’économie mondiale. Elles sont orientées vers une distribution plus juste dans le monde.

Pour lutter contre la pauvreté dans le monde, nous avons convenus de ce que nous avons appelé les objectifs de développement du Millénaire. Pour les pays en développement, des conditions commerciales correctes peuvent apporter une contribution significative, et c’est ce que nous devons chercher à Hong Kong. Je voudrais aborder un certain nombre de points, parmi lesquels quelques-uns ont déjà été mentionnés par le commissaire.

Dans notre politique commerciale, nous devrions être capables de procéder à une meilleure distinction entre les différents pays en développement. Les écarts sont trop grands pour permettre un cadre uniforme. Il y a des économies fortes et des économies faibles; des grandes économies et des petites économies. Il y a des pays dont le potentiel de production et de croissance est élevé et d’autres où il est plus réduit. Nous devons être capables de personnaliser davantage notre politique. C’est pourquoi le traitement spécial et différencié des pays en développement doit être une des priorités de l’agenda de Hong Kong.

On a beaucoup parlé des conséquences que les accords de Hong Kong auront sur les concessions octroyées aux pays en développement, que ces derniers craignent de voir érodées. Je demanderais au commissaire de dire après les négociations à cette Assemblée si elles l’ont été ou non.

Ensuite, il semble que les pays en développement soient toujours fort peu à même de tirer un véritable bénéfice des occasions qui leur sont offertes, et je voudrais souligner l’importance de la création de capacités et de l’assistance technique. Nous devons travailler dur sur ces aspects afin de renforcer les capacités d’exportation et de commerce de ces pays. Il est également important, quand un pays dépend des exportations d’un ou de deux produits, d’essayer de l’encourager à se diversifier.

Je voudrais en venir maintenant aux subventions à l’exportation, que le commissaire a déjà évoquées, et dont les effets contraires sur les marchés locaux sont connus. Nous devons d’urgence œuvrer à un calendrier pour la suppression progressive des subventions à l’exportation. Il est dommage qu’aucune échéance n’ait été stipulée dans le texte.

Enfin, l’Union européenne doit accomplir une tâche importante à Hong Kong. Nous savons tous comment les négociations ont tourné à Cancún. Cela ne doit pas se reproduire. Je terminerai par remercier le rapporteur pour son excellent rapport et pour sa bonne coopération.

 
  
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  Joseph Daul (PPE-DE), rapporteur pour avis de la commission de l’agriculture et du développement rural. - Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, mes chers collègues, le débat d’aujourd’hui revêt une importance particulière, car nous sommes dans une phase d’accélération des négociations à Genève. Vous avez dit que, la semaine dernière, à Paris, la réunion ministérielle avait progressé. Pour ma part, Monsieur le Commissaire, je voudrais vous faire quatre observations.

En premier lieu, je suis très inquiet de l’attitude adoptée par de nombreux pays, qui ne s’engagent pas réellement dans cette négociation. J’en veux pour preuve l’absence totale de réelles avancées dans les dossiers autres qu’agricoles. Les discussions sur l’accès au marché des produits industriels et des services sont au point mort, de même que celles concernant les règles. Nous ne pouvons accepter une négociation aussi déséquilibrée dans laquelle l’agriculture paierait pour tous les autres secteurs, alors que l’Union européenne a déjà consenti d’énormes efforts dans ledit secteur.

Deuxième point: la réussite du cycle de négociations nécessite une véritable prise de responsabilité des pays émergents, comme le Brésil, l’Inde et la Chine, dans les négociations. Ces pays doivent eux aussi ouvrir leurs marchés aux autres pays en développement, car le véritable moteur du développement résidera, au cours des années à venir, dans la croissance des échanges entre les pays du Sud.

Troisièmement: la récente décision de l’organe d’appel concernant le sucre est là pour nous rappeler que la bonne foi n’existe pas dans les négociations. Il est donc fondamental d’apprécier chaque point de la négociation au regard du droit de l’OMC afin d’éviter que, dans quelques années, le compromis que nous aurons accepté se voie anéanti par une décision des juges de l’OMC et pénalise probablement aussi, Monsieur le Commissaire, les pays pauvres. Nous devons rediscuter de cette question.

Quatrièmement enfin, et c’est le point le plus important, sur lequel je voudrais insister auprès de vous, Monsieur le Commissaire: les négociateurs qui prennent des décisions aujourd’hui portent de lourdes responsabilités face à l’avenir de millions de femmes et d’hommes. Il est facile de conclure une négociation, mais je constate que les problèmes ne se feront peut-être jour que dans un avenir plus lointain, alors que vous ne serez plus aux commandes. Je vous fais confiance. Mais, surtout aussi, ne laissez pas à vos successeurs le soin de régler les difficultés. Avant de signer et de dire oui, réfléchissons-y dès lors ensemble à deux fois pour transmettre un dossier propre à vos successeurs.

 
  
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  Georgios Papastamkos, au nom du groupe PPE-DE. - (EL) Monsieur le Président, le défi de la Conférence de Hong Kong définit les limites de la crédibilité, de l’acceptation opérationnelle et du dynamisme de l’OMC.

À mes yeux, cinq raisons structurelles viennent entraver les négociations du cycle de Doha.

Premièrement, l’incapacité des principaux partenaires commerciaux à accepter de céder une partie de leur indépendance financière et politique intérieure.

Deuxièmement, la difficulté de prendre des décisions à cause de la forte augmentation du nombre de membres de l’OMC, accompagnée par une hétérogénéité accrue.

Troisièmement, le manque d’équilibre dans la libéralisation des échanges entre les systèmes commerciaux avancés. Comparativement, c’est l’Union qui a fait les plus grandes concessions, ce qui a pour conséquence que le marché européen est le plus ouvert au monde.

Quatrièmement, la non-disposition d’autres acteurs internationaux à assumer un rôle majeur dans les négociations.

Cinquièmement, l’attitude défensive des pays en développement face aux nouveaux sujets de négociation.

L’extension et le renforcement du cadre législatif multilatéral de l’OMC, qui constitue la stratégie de l’UE, sont limités par le principe de spécialisation des organisations internationales. Ce principe fixe également les limites du futur développement de l’OMC dans l’organisation mondiale de la politique sociale et des questions environnementales.

Par conséquent, ce qu’il faut établir selon moi, c’est une nouvelle architecture «coupole» mondiale regroupant les piliers suivants:

- l’OMC, qui promeut de façon satisfaisante la répartition efficace des ressources;

- une organisation économique internationale chargée de la stabilité économique internationale;

- une organisation internationale de développement chargée de la redistribution des ressources à l’échelon mondial et de l’aide au développement des pays pauvres;

- une organisation environnementale internationale chargée de la protection et de l’amélioration de l’environnement mondial et des ressources naturelles.

Les conditions de l’économie mondialisée dictent la nouvelle réglementation générale du système économique mondial sur la base de l’économie sociale et écologique de marché, une réglementation qui favorisera la distribution des ressources, la stabilité, la solidarité internationale et la protection de l’environnement et des consommateurs.

 
  
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  Erika Mann, au nom du groupe PSE. - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, je voudrais juste aborder quelques points qui doivent être pris en considération lors de l’examen de ce rapport, qui est après tout le premier que présente la commission du commerce international cette année. Au second semestre, nous en présenterons un autre pour suivre, observer et commenter les délibérations et négociations de la Commission.

En ce qui concerne la commission et mon groupe, la question consiste à savoir ce qui peut être fait, premièrement, pour assurer que nous sommes vraiment utiles dans la recherche d’un résultat positif à Hong Kong - même s’il n’y aura pas de conclusions finales, un tel résultat serait réjouissant -, de sorte que les négociations puissent se poursuivre sur de bonnes bases; deuxièmement, pour garantir que la grande revendication que nous avançons dans le titre «cycle de développement» est justifiée par la réalité; troisièmement, pour assurer que les intérêts de l’Union européenne sont défendus.

Il s’agit évidemment d’une entreprise particulièrement compliquée quand on se rappelle que les résultats de Cancún n’ont pas vraiment été excellents, que nous avons connu un départ difficile et que les négociations sont pour l’instant plutôt chaotiques. Il y a aussi le problème des économies émergentes, qui luttent pour se voir conférer un rôle majeur et global dans le monde. C’est très visible dans le cas de la Chine - sur laquelle nous aurons un débat demain -, mais aussi du Brésil et, bien sûr, de l’Inde. Tout cela vient s’ajouter à une situation déjà très difficile et complexe.

Un autre aspect mérite notre attention. Je vous demanderais, Monsieur le Commissaire, de revenir sur la manière dont cette Assemblée, la commission du commerce international et vous-même allez être en relation au cours de cette année. Si le nouveau Traité était déjà en vigueur, le Parlement aurait beaucoup plus de pouvoir, avec toute une machinerie de consultation plus directe. Nos mécanismes sont très bons et ont fait leurs preuves, mais ils sont quelque peu informels de nature.

De même, le public souhaite nous voir plus directement impliqués, avec plus de pouvoirs et plus de droits, dans un processus englobant des négociations sur l’agriculture et les services. Ce sont des domaines particulièrement sensibles, sur lesquels la discussion peut être âpre et pour lesquels il n’y a pas de réponses toutes faites ni de positions claires, que ce soit au sein de notre groupe, de cette Assemblée ou du grand public.

Comment pouvons-nous alors garantir l’organisation, dans le courant de l’année, du processus essentiel qui regroupe la Commission, la commission du commerce international et le Parlement de telle sorte que le résultat soit une coopération fructueuse dépassant le stade de ce qui a déjà été décidé et couvrant les domaines cruciaux que je viens de citer?

Si vous voulez vraiment modifier le cours des négociations ou changer vos plans - et je puis vous assurer, Monsieur le Commissaire, que vous devrez composer avec ces questions -, comment garantir que la coopération sera assez étroite pour que nous puissions nous décharger de la responsabilité que nous confère l’opinion publique?

 
  
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  Johan Van Hecke, au nom du groupe ALDE. - (NL) Monsieur le Président, je voudrais tout d’abord féliciter le rapporteur pour ce rapport qui, je pense, offre un excellent aperçu de l’état actuel des négociations après l’accord-cadre de Genève et à la veille de la Conférence de Hong Kong. À n’en pas douter, le succès du cycle de développement de Doha est crucial pour la poursuite de la libéralisation du commerce mondial. En effet, après l’échec de Cancún, la crédibilité du système commercial multilatéral est remise en question. Si Hong Kong se doit d’être un succès pour la croissance économique, ce sera également un sérieux test pour la légitimité de l’OMC. Je partage l’avis du commissaire Mandelson quand il dit que le cycle de Doha doit être considéré avant tout comme traitant du développement. Le commerce et le développement doivent aller de concert, et une plus grande implication des pays en développement dans le cadre d’échanges mondiaux équitables est une composante essentielle de la lutte contre la faim et la pauvreté dans le monde.

Il est encourageant de voir que la semaine dernière, un compromis a été trouvé sur les droits à l’importation de produits agricoles, qui a fait s’évanouir le spectre d’un échec du cycle de Doha. La traduction des droits linéaires à l’importation en droits de douanes communs basés sur le pourcentage et liés à la valeur des produits est une avancée prudente et néanmoins importante dans la direction d’un accord global sur le commerce des produits agricoles.

Mon groupe reste toutefois convaincu que toutes les subventions à l’exportation dans l’agriculture doivent être abolies parce qu’il est inacceptable que la politique agricole communautaire actuelle coûte environ cent euros de plus à la famille européenne moyenne et empêche les pays en développement de se libérer du piège de la pauvreté. La Banque mondiale a récemment calculé que le succès de ce cycle commercial peut entraîner une hausse du revenu mondial de l’ordre de 385 milliards d’euros par an. Si l’Afrique peut faire passer sa part du commerce mondial de 2 à 3%, son revenu annuel augmentera de 70 milliards de dollars. C’est bien plus que ce qu’elle reçoit actuellement au titre de l’aide au développement. Rien que pour cela, nous ne pouvons nous permettre un nouvel échec.

 
  
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  Caroline Lucas, au nom du groupe des Verts/ALE. - (EN) Monsieur le Président, je sais gré à M. Moreno Sánchez pour son travail sur ce dossier, mais je pense qu’il ne sera pas surpris de savoir que, malheureusement, notre groupe ne peut soutenir son rapport tel qu’en l’état. Il contient certes de bons éléments en ce qu’il souligne les objectifs du développement durable et de la réduction de la pauvreté, mais ceux-ci sont, regrettablement, amoindris par l’orientation globale du texte, qui offre un soutien sans réserve au libre-échange dérégulé en tant qu’instrument principal pour atteindre ces objectifs.

L’hypothèse semble toujours être qu’un commerce accru entraîne automatiquement un surcroît de croissance, laquelle implique automatiquement une plus grande réduction de la pauvreté, et pourtant la réalité sur le terrain est fort différente et, comme l’explique le récent rapport du PNUD sur les pays les moins avancés, un niveau plus élevé d’intégration des pays les plus pauvres dans le système commercial international n’a généralement pas débouché sur une réduction de la pauvreté parmi les populations les plus démunies.

Une autre hypothèse qui sous-tend le rapport est que, si seulement les détracteurs de l’OMC comprenaient mieux l’institution, nous en tomberions mystérieusement amoureux ou, comme le dit le rapport «l’OMC doit fournir des informations et des explications adéquates à la société civile […] afin d’éviter que le processus de globalisation et le rôle joué par l’OMC soient amplement mal interprétés et mal représentés». Très franchement, c’est là une ineptie inutile et condescendante. Des pans de plus en plus larges de la société civile savent exactement ce que représente l’OMC, ils savent très bien à quel point le processus de mondialisation économique peut être préjudiciable. Ce dont nous avons besoin, ce n’est pas d’un exercice superficiel de relations publiques, mais d’une réforme fondamentale et approfondie des institutions et des règles du commerce mondial de telle sorte que la durabilité et l’équité mondiales soient réellement inscrites en leur cœur.

Venons-en à certains détails à présent. Notre groupe a reproposé son amendement initial sur les prix des produits de base. La chute des prix des produits de base est l’une des principales raisons pour lesquelles les pays pauvres ne tirent pas plus profit du commerce mondial. Pas moins de 43 PED sont tributaires d’un seul produit de base pour plus de 20% de leurs recettes d’exportation. Si les prix des 10 principaux produits agricoles de base exportés par les PED avaient augmenté parallèlement à l’inflation depuis 1980, ces exportateurs auraient reçu quelque 112 milliards de dollars de plus en 2002 que ce qu’ils ont effectivement reçu, soit le double de l’aide officielle au développement. Franchement, je trouve extraordinaire que la commission du commerce international, qui se pique de dire que le commerce devrait soutenir l’éradication de la pauvreté, ait pu rejeter un amendement qui visait des propositions d’action concernant la stabilisation des prix des produits de base. J’espère que la plénière nous soutiendra sur ce point demain.

Nous avons aussi présenté un amendement sur le mandat de la Commission. Il est difficile d’imaginer quelle justification la Commission peut réellement avoir pour travailler dans le cadre d’un mandat qui date de six ans et qui, partant, ne reflète aucun des changements importants survenus depuis qu’il a été fixé. Peut-être M. Mandelson pourrait-il nous dire quelle est cette justification parce que d’un point de vue institutionnel, nous ne pouvons prétendre, après que deux des dernières conférences ministérielles ont fini sur un échec, que les affaires vont simplement leur train. Nous ne pouvons ignorer la réticence de nombreux pays du Sud à accepter que de nouvelles compétences soient sans cesse attribuées à l’OMC.

Maintenant qu’une nouvelle Commission est en fonction et étant donné que la nouvelle conférence ministérielle approche, nous devons adresser à la communauté internationale un signe pour lui faire comprendre que l’Europe reflète ces changements et est capable de tirer les leçons des erreurs commises tant à Seattle qu’à Cancún.

 
  
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  Vittorio Emanuele Agnoletto, au nom du groupe GUE/NGL. - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je suis vraiment étonné d’entendre dire en cette Assemblée que l’OMC est le vecteur de l’amélioration et de la promotion d’un commerce équitable et global. Comment une telle idée peut-elle être lancée?

Il suffit de regarder les résultats tangibles des cycles de négociations passés et en cours. Comment peut-on parler de réciprocité entre un géant et un nain, entre David et Goliath? Comment peut-on espérer que les pays en développement soient les vainqueurs de ce cycle si nous ne changeons pas nos politiques?

Pourquoi ne discute-t-on pas du pour et du contre des résultats? Pourquoi n’y a-t-il aucune mention de la manière dont les subventions octroyées à 25 000 planteurs de coton aux États-Unis ont réduit des millions d’individus à la misère en Afrique centrale? Pourquoi n’y a-t-il aucune mention de la manière dont les ADPIC (aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce) ont privé et privent toujours 30 millions d’individus - la grande majorité en Afrique - de traitements contre le sida, ni de la manière dont l’application des ADPIC en Inde a réduit de moitié le nombre de malades du sida vivant dans les pays en développement et ayant accès aux médicaments pouvant prolonger leur espérance de vie?

Pourquoi n’est-il pas fait mention du désastre causé par les subventions à l’agriculture intensive payées par l’Europe et les États-Unis? Lors de la Conférence ministérielle de Cancún, cette catastrophe a uni le Brésil, l’Inde et les pays du Sud contre l’Europe et les États-Unis.

De plus, quels sont les préparatifs auxquels nous procédons pour la prochaine Conférence ministérielle de l’OMC qui aura lieu à Hong Kong? L’impression est que nous réussirons à libéraliser les services sociaux et de santé, au nom d’un libéralisme économique qui finira par baser ces services sur leur coût - et par les laisser au contrôle de grandes multinationales - dans les pays du Sud, refusant l’accès à une large proportion de la population.

Pourquoi ne parle-t-on pas des accords de partenariat économique? Nous en avons discuté et en avons vécu l’issue tragique lors de l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE de Bamako. Par l’appel à la libéralisation totale des échanges avec les pays du Sud - en particulier l’Afrique - et de l’abolition des droits à l’importation dans ces pays, ces accords ont contribué à la destruction de l’économie de ces pays, les empêchant de choisir en toute autonomie leur stratégie pour un développement différent.

En revanche, je pense que nous devrions lutter pour une réduction du rôle de l’Organisation mondiale du commerce. Nous devons nous battre pour assurer qu’une large gamme de produits sera du ressort d’autres agences, comme celles des Nations unies par exemple, à commencer par les produits agricoles et pharmaceutiques. Pour toutes ces raisons, notre groupe exprime un avis entièrement négatif sur le rapport présenté à cette Assemblée.

 
  
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  Seán Ó Neachtain, au nom du groupe UEN. - (EN) Monsieur le Président, malgré l’échec de la conférence de Cancún en septembre 2003, les négociations commerciales multilatérales au sein de l’OMC sont toujours définies par le programme de Doha. L’accord conclu en août 2004 au sein du Conseil général de l’OMC est parvenu à relancer ces négociations, ce dont je me félicite.

Permettez-moi d’emblée de dire que moi aussi, je salue le rapport et félicite son auteur pour son travail. Je suis particulièrement ravi que la proposition au nom de la commission du commerce international constitue une amélioration considérable par rapport au document initial, notamment en ce qui concerne la manière d’intégrer les PED au système commercial mondial et l’importance à accorder à la libéralisation de certains services non fondamentaux et, point important, aux solutions proposées pour réduire la protection agricole.

Les amendements de compromis adoptés en commission améliorent, à mes yeux, ce texte. Ce rapport offre une analyse équitable tenant dûment compte des attentes et intérêts européens dans le cadre de ce qui ne peut manquer d’être un cycle de négociations difficile.

Dans le contexte des pourparlers OMC, je m’inquiète pour l’agriculture et, en particulier, pour l’avenir des petites exploitations familiales dans mon pays, lesquelles, il convient de le dire, constituent l’épine dorsale de la société irlandaise. Il est hors de question que l’on change le modèle agricole européen ou l’accord de Luxembourg sur la réforme de la PAC. En ce qui concerne les agriculteurs européens, ils ont accepté une réforme que j’estime taillée dans le roc et qui reste valable jusqu’en 2013. Ils ont accepté une réforme entreprise pour aligner la PAC sur l’OMC. Ils ont accepté un programme qui implique un bouleversement considérable du secteur. Nos agriculteurs ont besoin de stabilité politique afin de planifier l’avenir de leurs affaires et la subsistance de leur famille. Il est hors de question que l’on revienne sur aucun de ces engagements. Je dois dire, Monsieur le Commissaire, que sur ce point, ce que vous avez dit à l’instant m’encourage et je pense que vous défendrez vigoureusement nos intérêts.

Enfin, je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que l’OMC est le meilleur forum où les droits de tous les États - riches et pauvres, développés et en développement - peuvent être protégés. Je pense aussi que le multilatéralisme est la voie à suivre et je suis heureux que la Commission ait défendu cet avis. J’attends avec impatience la conférence de Hong Kong en décembre prochain.

 
  
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  Daniel Caspary (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, il est absolument vital d’avancer dans ce cycle de négociations sur la réforme et la libéralisation. Les calculs de la Banque mondiale auxquels M. Van Hecke vient de faire référence indiquent qu’une conclusion fructueuse du cycle de Doha pourrait augmenter le revenu mondial de près de 500 milliards d’euros par an; dès lors, le succès de Doha signifie la guerre contre la pauvreté, et une aide au développement à grande échelle et efficace. Il signifie donc une chance de prospérité et de justice sociale pour tous dans le monde. C’est une chance que nous devons saisir pour le bien des citoyens d’Europe et du monde entier.

Je vais revenir sur la question de la participation publique, que Mmes Mann et Lucas ont soulevée. Nous avons encore tous en mémoire les images de la «bataille de Seattle». De plus en plus de gens voient tout ce qui est résumé sous le titre «mondialisation» comme un danger plutôt que comme une chance; en Europe, des générations entières achèvent leurs études sans avoir appris ce que sous-tend l’économie sociale de marché et le commerce mondial, ce qui les laisse exposées à la désinformation et à la merci de campagnes trompeuses. Nos médias ne parlent presque exclusivement que de la délocalisation de la production, plutôt que de la création d’emplois nouveaux ou de l’augmentation de la prospérité, deux avancées que nous devons au commerce mondial. Cela préoccupe de plus en plus de citoyens et des groupes radicaux tels qu’Attac utilisent les fonds que leur octroie la Communauté pour œuvrer contre les intérêts de la Communauté en désinformant et en effrayant les gens.

Je demanderai donc à la Commission - par votre intermédiaire, Monsieur Mandelson - de mettre au point un programme par lequel, parallèlement aux négociations, une campagne peut être menée pour rallier l’opinion publique à la cause d’un commerce mondial libre et équitable, pour convaincre les citoyens d’Europe et du monde entier des bienfaits du commerce mondial et pour les emmener avec nous dans cette voie juste et nécessaire.

(Applaudissements)

 
  
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  Kader Arif (PSE). - Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, chers collègues, dès son lancement, l’OMC a été sous le feu des critiques. Aujourd’hui, profitant du dixième anniversaire de cette organisation, nous pourrions faire un bilan et nous poser la question suivante: avons-nous besoin de l’OMC?

Dans le contexte d’une mondialisation sans cesse croissante, force nous est, indéniablement, de reconnaître que nous avons besoin d’une organisation multilatérale. Mais à cette autre question: «avons-nous besoin de cette organisation avec son actuel mode de fonctionnement?», je répondrai de manière beaucoup plus réservée. En effet, aujourd’hui, le monde n’arrive toujours pas à partager ses richesses de manière équilibrée. Le commerce a un grand rôle à jouer pour établir cet équilibre, mais ses règles actuelles sont jusqu’à présent restées largement sourdes aux demandes et aux besoins d’une grande partie de la planète. Face à ce constat, il m’arrive parfois naïvement d’espérer que la conférence de Hong Kong, qui se tiendra à la fin de l’année, permettra d’infléchir cet état de fait et, surtout, de répondre enfin aux espoirs suscités par le lancement du programme de Doha pour le développement.

Le mois dernier, du 10 au 16 avril, partout dans le monde, des centaines d’ONG et d’associations ont fait entendre leur voix en faveur d’un commerce plus juste. Je partage leur avis quand elles nous disent qu’un commerce basé sur le seul et simpliste principe du laisser-faire et du laisser-aller n’aboutira pas à un meilleur partage des richesses, bien au contraire.

Réorienter le commerce international pour lui donner une vraie dimension de justice sociale et économique doit être notre priorité. Si nous souhaitons vraiment aider les pays pauvres à tirer bénéfice de la mondialisation, il nous faut repenser dans leur ensemble les règles du commerce mondial dans un sens plus équitable, en associant commerce et développement durable dans notre réflexion. Pour moi, les membres de l’OMC devraient donc inscrire ces principes parmi leurs objectifs, mais surtout tirer les conséquences des pratiques et des règles édictées pour être ensuite en mesure d’adapter les politiques menées dans un sens plus juste et plus équitable.

J’appelle également de mes vœux une OMC transparente, une organisation crédible et légitime, dont les décisions pourraient être portées par ses membres et la société civile. En tant que député européen élu par les citoyens européens, je ne peux que constater, et surtout regretter, l’actuel manque d’information dont je suis victime pour pouvoir exercer convenablement mon rôle de contrôle démocratique. Encore plus déplorable: nous, députés européens, n’avons pas voix au chapitre concernant le mandat de négociation de la Commission. Il en va pourtant de notre avenir.

Alors que je m’inquiète des conséquences et des répercussions de la directive sur les services pour nos services publics européens, je m’indigne facilement devant les incidences d’une libéralisation des services sur le plan mondial qui pourrait menacer des services, souvent publics, liés aux besoins fondamentaux des citoyens, dans les pays qui en ont le plus besoin. S’il est communément admis par nous que les services liés à la santé, à l’éducation, aux secteurs culturel et audiovisuel fassent l’objet d’une exception dans la négociation, il ne faut pas pour autant oublier ceux qui ont trait à des besoins fondamentaux comme l’eau et l’énergie, dans la mesure où nous ne pouvons exiger des pays en développement une libéralisation de ces services qui conduirait à leur démantèlement.

Je tiens à rappeler que nous nous sommes engagés, à New York, en 2000, en faveur de huit objectifs du Millénaire pour le développement. Ces objectifs pour le développement ne peuvent être déconnectés du programme de Doha pour le développement et des négociations en cours. Nous ne pouvons faire un jour des promesses que l’on s’empressera d’oublier le lendemain. Le cas des Philippines est un exemple parmi tant d’autres des effets néfastes de la libéralisation des services de distribution d’eau. En effet, à la suite de la libéralisation de ce service en 1997, le prix de l’eau a non seulement augmenté de 600%, mais la qualité même de l’eau a aussi tellement chuté qu’elle provoque aujourd’hui des maladies.

Je crains fort que nous n’arrivions jamais, d’ici à 2015, à réduire de moitié le pourcentage de la population qui n’a pas accès de façon durable à l’eau. Et quand il n’y a pas accès à l’eau, il n’y a pas de vie.

 
  
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  Friedrich-Wilhelm Graefe zu Baringdorf (Verts/ALE). - (DE) Monsieur le Président, nous avons déjà entendu ce soir pas mal de choses sur le commerce équitable et sur les échanges organisés dans un esprit de solidarité. Le rapporteur veut qu’il profite à tout le monde et M. Caspary a calculé pour nous que 500 milliards d’euros rendraient tout un chacun riche et content. Même le commissaire Mandelson me donne l’impression de croire que l’abandon de la production agricole par nos pays provoquerait une explosion de la prospérité des pays en développement.

Je ne partage pas leur idéalisme. Le commerce ne nourrit pas et n’enrichit pas les pauvres, et ceux qui y gagnent sont essentiellement les groupes d’intérêts qui revendiquent un commerce libéralisé par désir d’en profiter, à l’exclusion des autres. À M. Caspary, qui parle si jovialement de «commerce libre et équitable», je dirai que le commerce libre et le commerce équitable peuvent très bien être contradictoires. Nous devons examiner de plus près si c’est le cas, et c’est ce que je voudrais faire.

Le commissaire Mandelson a parlé de la nécessité de nous défaire de l’accès limité au marché, en particulier pour les denrées alimentaires. Je lui rappellerai que l’Union européenne est le plus gros importateur mondial de denrées alimentaires, et la question ne concerne donc pas l’accès au marché, mais les conditions auxquelles les produits accèdent à notre marché. Si l’Union européenne accorde le libre accès à son marché aux pays les moins avancés, ce libre accès ne les enrichira pas automatiquement; au contraire, il faut envisager les conditions applicables au libre accès au marché. Si ces pays parviennent à vendre leurs produits à notre niveau de prix, alors ils pourront développer leur économie nationale, mais si les multinationales achètent dans ces pays à un prix inférieur au seuil de pauvreté, cela entraînera leur ruine et fera déferler ces produits sur notre marché à des prix détruisant notre agriculture.

Le commissaire a évoqué la nécessité d’un mouvement proactif dans le sens de la prestation de services, mais nous n’allons pas commencer à couper les cheveux en quatre; au contraire, nous devons faire quelque chose de productif. Dans le secteur agricole, nous avons besoin de services par le biais de la production. L’entretien du paysage culturel rend un grand service à la société européenne, un service pour lequel les fermiers doivent être payés selon les modalités en vigueur ici.

Sur le marché mondial, les professeurs, les banquiers et même les commissaires valent moins que les produits agricoles, et c’est pourquoi nous devons parler des modalités, ce qui signifie les ajuster et les rendre équitables. Ce n’est pas simple. Il est facile de définir le mot «libre» en termes quantitatifs, mais le faire en termes qualitatifs requiert quelques efforts.

Même si l’abolition des subventions à l’exportation dans un de nos principaux secteurs d’importation était la bonne chose à faire, ce serait une pure folie d’abandonner notre production propre et de laisser le monde venir à nous. Il nous faut une forme spéciale de protection extérieure, avec une reproduction ailleurs des conditions auxquelles la production dans nos pays et nos agriculteurs sont soumis ici, et nous devons fixer les conditions, les prix et les niveaux de sorte que ces pays puissent développer leur économie au lieu d’être obligés de vivre sous le seuil de pauvreté, et que nos producteurs puissent survivre.

Monsieur Mandelson, j’espère que nous pourrons approfondir très bientôt ces questions avec vous au sein de la commission de l’agriculture et du développement rural.

 
  
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  Helmuth Markov (GUE/NGL). - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, la Commission s’est montrée incapable de faire ce qu’elle avait été mandatée de faire en 1999 et ce, non seulement à Seattle, mais aussi à Cancún. Je pense que c’est ce qui devait arriver; cela aurait dû entraîner la Commission à se voir conférer un mandat modifié, qui portait non sur plus de déréglementation et sur l’ouverture des marchés, mais sur l’organisation d’un véritable commerce équitable entre les pays du monde, dont le développement varie grandement.

Le commerce équitable implique l’introduction d’un système dans lequel tous les acteurs peuvent voir qu’ils ont une véritable chance de se développer et sont à même de saisir cette chance. Pour certains pays, cela peut signifier protéger leur marché jusqu’à ce que l’économie régionale soit devenue suffisamment forte pour résister à la concurrence étrangère. Dans d’autres régions, cela peut signifier ouvrir un marché afin d’offrir aux autres prestataires des possibilités d’exportation. Au lieu d’exercer une pression encore plus forte pour arriver à l’ouverture des marchés, cela imposerait de la réduire, ce qui est devenu une question permanente. Des accords tels que l’AGCS ou le NAMA peuvent délester les pays en développement d’une chance de développer leurs propres secteurs industriel et des services et, en même temps, de mettre au point des normes environnementales et sociales élevées.

C’est toutefois le débat actuel sur les importations de produits textiles qui nous montre le revers de la médaille, à savoir ce que l’ouverture des marchés implique pour les pays industrialisés. Quand on parle de l’agenda du développement de Doha, l’expression elle-même indique que le développement doit figurer à l’agenda, et pas seulement l’ouverture des marchés. Des questions telles que les soins de santé préventifs, l’éducation, la protection sociale et les méthodes de production respectueuses de l’environnement en sont indissociables.

C’est plus important pour nous que les questions de Singapour, même si celles-ci semblent s’être réduites de quatre à deux. Ce qui importe pour nous, c’est d’instaurer des systèmes commerciaux permettant de maintenir stables les prix du café, du cacao, des produits textiles, des bananes, du coton, du sucre et de bien d’autres produits. Je crois que la bonne approche n’est pas celle d’une concurrence accrue, mais celle d’une coopération approfondie.

Les subventions à l’exportation pour les grandes entreprises agroalimentaires doivent être supprimées. Aucune tentative ne doit être menée en vue de déréglementer les services publics, en particulier l’approvisionnement en eau. Outre l’OMC, les institutions compétentes des Nations unies - la CNUCED ou l’OIT par exemple - doivent peser plus lourd dès qu’il est question de développement. L’Union européenne doit apporter une réponse différente de celle qu’elle a donnée jusqu’ici aux appels des pays en développement pour réclamer l’application du Mode 4.

Demander aux pays en développement qu’ils ouvrent leur marché aux biens, services et capitaux au moment même où l’Union européenne refuse l’accès des travailleurs moins qualifiés à son marché de l’emploi, dans lequel règne prétendument la liberté de mouvement, n’a rien à voir avec l’égalité des droits. Si vous voulez le commerce mondial, vous devez d’abord assurer un développement équilibré, sinon ce que le commerce promouvra n’est pas le progrès, mais les disparités croissantes entre les pauvres et les riches.

Ce que je tiens vraiment à dire à M. Caspary, c’est que ceux qui considèrent Attac comme un groupe radical n’ont pas compris que c’est de la coexistence de visions différentes que la démocratie tire son essence!

 
  
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  Paul Rübig (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, nous devrions également nous demander comment Hong Kong et le cycle de Doha peuvent nous aider à atteindre les objectifs de Lisbonne. Notre préoccupation première va à la croissance et à l’emploi, et nous savons que les syndicats, les associations de retraités et les enfants demandent tous plus d’argent. La croissance est essentielle à notre société et je préfère ne pas penser au débat que nous vivrions en cette Assemblée si nous disions vouloir arriver à l’opposé de Lisbonne. C’est parce que nous sommes d’accord sur l’importance des objectifs de Lisbonne qu’il est important que le cycle de l’OMC soit bien préparé. S’il faut une meilleure organisation au sein de l’OMC, nous devons aussi veiller à débarquer à Hong Kong avec un bon compromis minimal en main, ce que nous n’avons pas fait la dernière fois à Cancún. Si nos experts à Genève ne s’arrangent pas pour trouver un compromis minimal, nous risquerons de nouveau de ne pas atteindre de résultats crédibles.

Il est primordial d’œuvrer à la prospérité pour l’agenda pour le développement; la prospérité ne peut être partagée qu’une fois. Si vous la voulez à long terme, vous devez y travailler vous-même. C’est là que les petites et moyennes entreprises doivent avoir accès aux marchés. Des prêts sont nécessaires pour le lancement de sociétés, pour la formation et pour l’infrastructure. Nous devons penser à la manière d’accroître la prospérité dans ces pays lors de ce cycle: non en redistribuant les richesses, mais en aidant les gens à s’aider eux-mêmes par le biais des structures traditionnelles des entreprises familiales auxquelles ces pays sont habitués. Nous devons permettre à ces pays, les plus pauvres du monde, d’accéder non seulement aux marchés locaux et régionaux, mais aussi aux marchés mondiaux; pour cela, nous avons besoin de la dimension parlementaire. Ce dont nous avons besoin, Monsieur le Commissaire, ce n’est pas de plus de pouvoir, mais simplement de la concurrence des meilleures idées. En cette Assemblée, nous voulons vous aider à franchir cet écueil et nouer avec vous un dialogue de sorte à pouvoir réaliser ensemble ce qu’il y a de mieux pour l’Europe.

 
  
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  Katerina Batzeli (PSE). - (EL) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, nous nous réjouissons tous de l’issue positive de l’accord d’août 2004, qui était dans une grande mesure le résultat d’initiatives de la Communauté. Nous espérons que le résultat final perpétuera cet effort de la Communauté.

L’agriculture s’est avérée être le chapitre le plus important des négociations, bien que nous ayons insisté depuis le début sur la nécessité d’accorder une attention équilibrée à tous les aspects du cycle, avec des résultats équitables pour tous les secteurs et tous les partenaires.

Quoi qu’il en soit, l’accord final ne doit pas entrer en conflit avec le moindre aspect de la récente réforme de la politique agricole commune et doit sauvegarder des engagements équivalents pour tous les partenaires commerciaux.

La question de l’accès au marché des produits agricoles et, ce qui est plus important, les aspects techniques de la méthode de calcul des équivalents ad valorem, se sont révélés être l’enjeu central des négociations. Les engagements techniques doivent permettre de garantir la durabilité des produits communautaires.

La protection des indications agricoles et l’incorporation des aspects non commerciaux doivent non seulement être un objectif, mais aussi constituer une condition essentielle de l’accord final. Ces éléments déterminent également le rôle multiopérationnel de l’agriculture européenne.

Le coton a été érigé en question majeure pour la promotion des négociations avec les pays moins avancés. Nous espérons que d’autres engagements seront pris pour ce produit, qui concerneront d’autres partenaires commerciaux. Le rapport de M. Moreno Sánchez est parvenu à préserver l’équilibre au niveau de ses propositions pour les négociations de l’OMC.

Monsieur le Commissaire, je vous suggère de suivre le «principe poétique» du rapporteur. Celui-ci soutient que l’accord intérimaire constitue un pas de plus sur un chemin qui n’est pas tracé d’avance, c’est en marchant qu’il se construit. Cependant, les objectifs sont tout tracés et la marge de dérogation ne peut être illimitée.

 
  
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  Antolín Sánchez Presedo (PSE). - (ES) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Monsieur le Commissaire, je voudrais féliciter M. Moreno Sánchez pour son excellent rapport, qui fait preuve de vision et de capacité d’identifier des objectifs communs dans un dossier aussi large et complexe que les négociations de Doha.

L’objectif de ce cycle, qui est appelé «cycle de développement» depuis son début en 2001, consiste à renforcer les principes de base du cadre commercial multilatéral, en répondant de manière adéquate aux problèmes des pays en développement.

Le succès des négociations doit leur permettre de faire du commerce un élément essentiel de leur politique nationale pour le développement et, à cette fin, nous devons faire preuve d’une flexibilité suffisante pour affronter la situation précaire des pays les moins avancés, pour reconnaître le nouveau rôle des pays émergents et pour aborder l’impact particulier des processus de libéralisation sur les pays vulnérables.

Conscient de ces problèmes, le rapporteur soulève avec raison la nécessité d’apporter une assistance technique spécifique et de créer des capacités dans les pays en développement; la possibilité d’introduire un chapitre sur le développement dans les négociations sur l’agriculture pour les pays les moins avancés; la promotion du commerce Sud-Sud et la nécessité pour les pays émergents de continuer à ouvrir leur marché aux pays les moins développés; et la reconnaissance que le principe de traitement spécial et différencié doit être l’ossature du processus, ce qui impliquerait la non-réciprocité dans les échanges commerciaux et doit pouvoir être adapté aux caractéristiques de chaque pays en développement.

Son application doit permettre au Fonds monétaire international et à d’autres organisations d’établir un mécanisme d’intégration du commerce destiné à compenser les pertes que ces pays peuvent endurer à cause de la libéralisation des échanges.

En tant que rapporteur pour le rapport sur le système de préférences généralisées, je suis très content de l’appui du rapporteur à ma proposition en vertu de laquelle il faut accorder de l’attention à l’érosion des préférences tarifaires qui peut résulter du cycle, répétant la demande adressée à la Commission pour qu’elle présente un rapport spécial examinant son impact et proposant les mesures à adopter.

Le rapport Moreno Sánchez apporte une grande contribution à la levée des réserves et à l’avancement dans un cycle répondant aux aspirations de progrès de tous ses membres.

 
  
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  Saïd El Khadraoui (PSE). - (NL) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, je voudrais tout d’abord remercier le rapporteur pour son travail précieux et pour son excellent rapport, et identifier trois points que je considère importants.

Premièrement, la transparence, que d’autres collègues ont déjà mentionnée. Il est clair que le sujet des négociations et - à supposer que les négociations soient menées à bonne fin - les véritables décisions prises auront un impact considérable sur un grand nombre d’individus. C’est pourquoi il est primordial qu’un parlement démocratiquement élu tel que le nôtre soit tenu en permanence informé dans les détails des négociations et y soit impliqué. La Constitution nous conférera plus d’importance à cet égard, mais je vous invite, Monsieur le Commissaire, à en faire plus, dans les mois et années à venir, que ce que vous êtes obligé de faire afin d’impliquer cette Assemblée et, par extension, la société civile dans cette affaire.

Deuxièmement, le commerce mondial doit également être équitable. Il doit profiter à tout le monde, mais en particulier aux pays en développement. Un des principaux objectifs doit être d’éradiquer la pauvreté grâce à une politique commerciale renouvelée et personnalisée. Pour ce faire, nous devons tout d’abord veiller à ce que ces pays bénéficient du soutien technique nécessaire pendant les négociations afin de développer leur capacité de négociation, et à travailler à la création de capacités. En outre, le résultat des négociations doit être ce que je qualifierais de «respectueux des pays en développement». Cela demandera un certain courage politique et des concessions de notre part. Je prendrai comme exemple la suppression graduelle des subventions à l’exportation, pour laquelle un calendrier clair doit être selon moi établi.

Troisièmement et enfin, la libéralisation des services commerciaux, qui est importante et crée de grandes possibilités, mais que nous devons clairement définir. Après tout, il y a des services qui devraient idéalement ne pas être gérés par le libre marché, à savoir les services d’intérêt général. Ceux-ci doivent rester en dehors des négociations et ne concernent à mes yeux pas seulement l’éducation et les soins de santé, mais aussi, par exemple, l’eau, source de toute vie, comme quelqu’un l’a dit auparavant. Malheureusement, on observe pour l’instant, dans certains pays en développement, des cas où la privatisation de l’approvisionnement en eau a eu des effets pernicieux. J’espère donc, Monsieur le Commissaire, que vous partagez cette opinion.

 
  
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  Peter Mandelson, membre de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, je voudrais d’emblée me rallier aux sentiments exprimés par le dernier orateur. Je comprends parfaitement ce qu’il veut dire au sujet de l’eau et d’autres services publics fondamentaux. Rien de ce qui sera réalisé au cours de ce cycle, et certainement aucun élément des politiques menées par la Commission, ne transgressera ni ne compromettra ces intérêts et conditions de vie. Je puis vous l’assurer.

Si je puis revenir sur ce qu’a dit M. Rübig tout à l’heure quand il a parlé de la nécessité de voir le cycle se conclure sur un compromis minimal solide, il a raison. On dirait qu’il s’attend à un cycle se concluant sans ambition. Ce n’est pas ce qu’il a voulu dire. S’entendre sur un compromis minimal solide est ce qu’il y a de plus difficile. Devant vous ce soir, occupé à répondre dans le cadre de ce débat, je trouve que cette conclusion paraît fort éloignée. Mais elle se rapproche. Je dis cela pour deux raisons. Premièrement, l’autorité et le mandat de négociation des États-Unis ne continueront pas indéfiniment à insuffler vie à ce cycle. C’est là un point qu’il nous faut tenir présent à l’esprit. Deuxièmement, il existe ce qu’on pourrait appeler la lassitude des négociations. Je commence à en voir les premiers signes se manifester, une impatience, une volonté d’en venir à bout afin de passer à autre chose. Je pense que cette impatience est salutaire. J’espère qu’elle l’est, et j’espère que la lassitude des négociations que nous commençons à voir encouragera les gens à dévoiler un peu plus leur jeu, à se projeter dans la dernière manche de ce cycle, à voir, quand toutes les pièces s’emboîtent, que nous aurons un cycle se clôturant réellement sur une victoire pour tous, notamment, et surtout, pour ceux des membres de l’OMC qui ont le plus besoin d’une conclusion heureuse et ambitieuse à ce cycle.

Eu égard à certaines des contributions que l’on a entendues, par exemple celle de Mme Lucas et de M. Graefe zu Baringdorf, je respecte entièrement votre raisonnement dans les remarques que vous faites, mais je vous désapprouve totalement lorsque vous rejetez les prémisses et principes fondamentaux du système commercial international. J’espère que vous me pardonnerez de rappeler les avantages considérables que les pays riches et prospères en ont tirés. Maintenant que nous avons si bien profité, que les pays développés sont si prospères et que l’Europe se porte si bien après des décennies de libre-échange, votre approche me semble être simplement de vouloir retirer l’échelle pour empêcher le reste du monde de rattraper son retard. Et je le désapprouve. Je pense que c’est une approche plutôt contre-productive. Bien sûr, le commerce n’est pas une espèce de baguette magique. Bien sûr, le commerce n’est pas la réponse aux besoins et exigences de tous les pays pauvres et vulnérables en matière de développement. Mais il nous faut également reconnaître qu’aucun pays ne s’est rendu prospère ni enrichi en se coupant du reste du monde. C’est là l’essence de votre manifeste.

Je conviens qu’à lui seul, l’accès aux marchés n’est pas suffisant. Il faut aider les pays pauvres à produire des produits à la valeur ajoutée sans cesse croissante, pour leur permettre de s’intégrer profitablement aux échanges mondiaux. Se contenter d’ouvrir ses marchés n’est pas une fin en soi. Donner à quelqu’un la possibilité de produire et d’approvisionner ces marchés, tel est l’élément essentiel et qui se trouvait au cœur des remarques de Mme Martens au début de ce débat. Je suis tout à fait d’accord avec elle lorsqu’elle identifie l’érosion des préférences comme étant un vrai problème pour de nombreux PED tributaires d’un seul produit de base. Il est très difficile, et c’est un défi immense pour nous en Europe, que d’apporter une aide et une assistance efficaces à des pays qui dépendent fortement d’un seul produit.

Quand on parle de la réforme du secteur sucrier, abordée plus tôt au cours du débat, nous savons que nous avons non seulement la responsabilité de gérer et instaurer cette réforme dans l’intérêt des personnes que nous représentons, ou des personnes que vous représentez au sein de ce Parlement et dont je traduis aussi les intérêts, mais nous devons aussi nous assurer de porter assistance, aux fins de l’ajustement et de la restructuration, aux PED pauvres et moins prospères pour lesquels le sucre est absolument essentiel non seulement à leur économie mais au tissu même de leur société. Ces produits de base sont vitaux pour certains pays, et nous savons les obligations et responsabilités qui nous incombent à l’égard de ces pays.

L’agriculture est sans conteste le thème le plus complexe et difficile de ce cycle de négociation. Je conviens avec M. Daul que nous ne pouvons axer entièrement ce cycle sur l’agriculture. Je pense avoir été clair sur ce point dans mes remarques d’ouverture, et j’accepte volontiers son avis selon lequel l’agriculture ne doit pas payer la facture pour tous les autres secteurs. Je veux m’assurer que nous considérions le long terme dans ce cycle - oui, même quand j’aurai cessé d’être commissaire. Je n’ai pas hâte d’en être là, mais un jour, d’autres prendront la relève et vous avez parfaitement raison. Les mesures que nous prenons aujourd’hui et les négociations que nous menons dans ce cycle doivent assurer un avenir durable à l’agriculture européenne. Nous ne devons pas compromettre et menacer cela, et rien de ce que la Commission ou moi-même ferons au cours de ce cycle ne créera un tel risque. Cela signifie également que les ajustements doivent être mis en œuvre et les réformes et les changements saisis à bras-le-corps. C’est impératif. Je suis sûr d’une chose: on ne peut pas abandonner l’agriculture au marché libéralisé. C’est impossible en ce qui concerne la sécurité de l’approvisionnement alimentaire, mais aussi l’importance et le poids que vous accordez au soutien des communautés rurales, qui sont un élément et une composante essentiels de notre mode de vie, de la civilisation européenne.

Quand nous parlons d’agriculture et des intérêts des personnes vivant en communauté rurale et de leurs intérêts dans ce cycle, pour moi cela met constamment en lumière l’importance d’expliquer, de justifier - je pense que vous avez parlé de «publicité» - ce que nous faisons dans ce cycle. C’est littéralement ce qu’il nous faut faire: de la publicité. Nous devons faire connaître les immenses avantages potentiels et le prix que nous décrocherons en concluant ce cycle avec succès et ambition. Nous devons faire connaître la logique qui étaie nos négociations; elles sont complexes, elles sont difficiles à comprendre pour le citoyen moyen - Dieu sait que je les trouve moi-même parfois difficile à comprendre, et je suis le commissaire du commerce. Il ne faut pas croire ou supposer que ce que nous faisons au cours de ce cycle, nous pouvons nous contenter d’en débattre et décider à huis clos pour le transmettre ensuite à une population reconnaissante comme s’il n’en fallait pas davantage pour impliquer la société civile.

Si je dis cela, ce n’est pas seulement parce que j’ai une conscience aiguë des sensibilités, des craintes et des peurs que ces négociations suscitent - le commerce est en effet un thème éminemment politique -, mais parce que cela souligne aussi le rôle important des parlementaires: les membres de ce Parlement, mais pas seulement, les membres de tous les parlements nationaux sont également concernés. Et ce pour deux raison: premièrement, par leurs travaux et le droit de regard exercé par les députés, les parlements font pression sur les gens comme moi et nous incitent à expliquer et justifier ce que nous faisons. Je pense que c’est très important. Mais, deuxièmement, ce que vous faites, c’est représenter la société civile de manière représentative et authentique, une manière que les organisations non gouvernementales n’appliquent pas toujours très scrupuleusement. Avec ce droit de regard et cette représentativité, ce que vous faites, c’est conférer à ce processus une légitimité. Une légitimité qu’autrement, il n’aurait pas s’il était mené simplement en secret, sans aucune transparence, sans avoir aucun compte à rendre sur ce que nous faisons et disons au cours de ces négociations. Aussi, je suis d’accord avec les députés qui ont souligné la nécessité que le Parlement et les députés jouent un rôle. Il est vrai que, si nous avions une constitution, le rôle et l’accès des députés de cette Assemblée à ce processus seraient formalisés. Néanmoins, sans la Constitution jusqu’ici, nous avons quand même une très bonne relation, nous sommes parvenus à réaliser, sur l’éventail de ce que nous poursuivons informellement, ce que j’espère et prévois que nous saurons concrétiser formellement aussi.

S’agissant de questions telles que les services - l’eau et d’autres services publics -, qui suscitent des craintes particulières au sein de la population, il est bon que celle-ci, que les citoyens, voient dans leur forum démocratique, dans ce Parlement, leurs craintes et leurs préoccupations exprimées et représentées comme il convient. C’est pourquoi je sais gré, ce soir, à ceux qui ont abordé la question des services, et ce d’une manière aussi constructive. J’espère que cela répondra aux arguments de ceux qui, à fort juste titre, ont souligné le rôle de la société civile à cet égard. Cela concerne aussi, et je l’accepte pleinement, le rôle et les prestations futurs de l’OMC elle-même, ainsi que M. Papastamkos l’a évoqué dans son intervention.

À ceux qui critiquent plus sévèrement l’OMC, je répondrais ceci: je n’ai pas connaissance d’une institution internationale, je n’ai pas connaissance d’une meilleure forme de gouvernance mondiale existant dans le monde aujourd’hui, qui égale l’OMC au point de vue démocratique - oui, chaque membre de l’OMC, grand ou petit, puissant ou faible, a le même droit de vote, qui est d’une seule voix. Et elle prend des décisions, elle prend des mesures à l’encontre des plus puissants de ce monde. C’est la seule institution internationale, le seul organe de gouvernance mondiale que je connaisse, qui puisse défier et compromettre la souveraineté des États-Unis impunément. C’est la seule organisation que je connaisse, capable de faire appliquer ses décisions, d’arbitrer les différends entre pays, aussi puissants et forts que ceux-ci puissent être au sein de la communauté internationale. Je pense qu’il y a lieu de s’en réjouir et d’y applaudir et que c’est une chose sur laquelle, à mes yeux, nous devrions capitaliser au lieu de la condamner.

Je regrette de n’avoir pas répondu à toutes les questions qui ont été posées. Mais je souhaite souligner ceci en conclusion: il est réellement nécessaire que nous placions le développement au cœur de ce cycle; il est absolument essentiel à Doha et à ses valeurs fondatrices. Je suis entièrement d’accord avec ceux qui affirment, comme certains l’ont fait dans leur intervention ce soir, que la capacité commerciale est capitale. Cela implique de lever les barrières dans les ports, afin de faciliter les échanges. C’est pourquoi cette partie de nos négociations est, à mes yeux, si importante. Il s’agit de l’aptitude à mettre des marchandises sur le marché et à satisfaire aux normes, raison pour laquelle l’aide au commerce est si importante. Oui, nos normes sanitaires et phytosanitaires, ces normes qui préservent la santé et la sécurité des citoyens et des consommateurs européens, sont très importantes et nous devons les défendre. Nos concitoyens - ceux que vous représentez - voudraient que nous le fassions. Mais de même, nous devons comprendre que pour beaucoup, dans les pays en développement, ces normes ressemblent à des barrières. Ces normes élevées de protection sanitaire et des consommateurs semblent des mesures protectionnistes, vues de l’extérieur. Ce n’est pas le cas, mais elles placent sur nous une lourde obligation, non seulement de préserver l’intégrité de nos normes, mais aussi d’aider et d’assister activement les pays pauvres afin de leur permettre de satisfaire à ces normes et à ces critères, au lieu de s’y dérober et, dans la foulée, d’amener avec eux leurs produits et ce qu’ils ont à offrir sur nos marchés.

Permettez-moi de conclure sur ceci. Je conviens que la politique agricole commune pose un problème à certains égards. Elle est une nécessité importante, une source de vie et de revenu et elle est capitale pour soutenir nos communautés rurales à de très nombreux égards. Mais quels sont les problèmes que nous pose la politique agricole commune? La PAC n’est pas du tout responsable des problèmes liés à la pauvreté dans le monde aujourd’hui. L’Europe offre les marchés les plus ouverts du monde. La tendance de certains à faire de la politique agricole commune une espèce de Mal incarné, en ce qui concerne les PED, est mal avisée et déplacée. Bien sûr, elle a besoin d’une réforme, et si vous me permettez juste de parler des exploitations familiales à M. Ó Neachtain, moi aussi je veux protéger les petits agriculteurs, mais rappelons-nous, dans le contexte de nos discussions sur l’avenir de la politique agricole commune - et je pense avoir raison en disant cela -, que 75% des paiements PAC vont à des agriculteurs aux revenus supérieurs à la moyenne. Alors, quand nous parlons de protéger les petits agriculteurs et les revenus et moyens de subsistance de certains des moins bien lotis que vous représentez au sein de ce Parlement, rappelons-nous qu’eux aussi ont besoin d’une réforme de la politique agricole commune. Oui, préservons le modèle agricole européen, mais ne conservons pas la PAC en gelée ad vitam aeternam. Elle peut et devrait fonctionner mieux qu’elle ne le fait actuellement pour les personnes qui en ont le plus besoin.

En conclusion, si nous pouvons conclure un accord général à Doha, à Hong Kong et au-delà, ce sera un résultat inespéré pour le monde. Cela nous permettra d’achever un cycle qui s’est étendu sur non pas une ni deux, mais trois Commissions. C’est là un prix énorme, un prix fantastique à portée de notre main. C’est pourquoi, à mes yeux, aussi ardu et épineux que soit ce cycle, nous ne devons surtout pas abandonner, et nous n’abandonnerons pas. Il y a fort à faire pour les plus démunis et les plus méritants de notre monde, ainsi que pour d’innombrables millions de nos propres concitoyens. Les enjeux sont importants, la mise considérable, et c’est sur cette base que nous allons poursuivre vers une conclusion heureuse.

(Applaudissements)

 
  
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  Friedrich-Wilhelm Graefe zu Baringdorf (Verts/ALE). - (DE) Monsieur le Président, je voudrais faire une brève déclaration. Le commissaire Mandelson me comprend mal quand il suppose que je ne veux pas lutter contre la pauvreté dans le monde. Mon groupe et moi nous préoccupons toutefois de savoir comment permettre aux individus vivant dans la pauvreté d’avoir une part de notre prospérité. Nous avons également des idées claires sur la façon de le faire. J’espère que le commissaire Mandelson se joindra à nous pour approfondir le débat et pourra donc mieux interpréter notre pensée.

 
  
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  Le Président. - Le débat est clos.

Le vote aura lieu demain.

 

22. Ordre du jour de la prochaine séance: cf. procès-verbal

23. Levée de la séance
  

(La séance est levée à 00h10)

 
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