Le Président. - L’ordre du jour appelle en discussion commune les rapports suivants:
- A6-0282/2005, de Mme Harms, au nom de la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie, sur la proposition de règlement du Conseil relative à la mise en œuvre du protocole n° 9 annexé à l’Acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de l’Estonie, de Chypre, de la Lettonie, de la Lituanie, de la Hongrie, de Malte, de la Pologne, de la Slovénie et de la Slovaquie, concernant la centrale nucléaire de Bohunice V1 en Slovaquie (COM(2004)0642 - C6-0205/2004 - 2004/0221(CNS));
- A6-0279/2005, de Mme Harms, au nom de la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie, sur l’utilisation des ressources financières destinées au démantèlement des centrales nucléaires de puissance (2005/2027(INI)).
Andris Piebalgs, membre de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, permettez-moi tout d’abord de remercier chaleureusement Mme Harms pour les excellents rapports qu’elle a préparés sur les deux points à l’ordre du jour de ce soir. Je voudrais également exprimer ma satisfaction quant à la qualité des débats qui se sont tenus au sein de la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie. Enfin, je voudrais replacer les propositions de la Commission et, dans un certaine mesure, la discussion d’aujourd’hui, dans un contexte plus large.
Nous sommes probablement au début d’une longue période de prix du pétrole et du gaz élevés sur le marché international, avec une demande qui augmente en flèche à l’échelle mondiale. Eu égard à cette nouvelle situation, nous devons réagir avec détermination et ambition. Nous avons déjà discuté avec vous le plan en cinq points dans le cadre de débats antérieurs. Pour l’UE, l’option immédiate est d’agir sur le front de la demande, car c’est là que nous avons la plus grande marge de manœuvre dans l’Union.
En ce qui concerne l’approvisionnement en énergie, je tiens à souligner que le choix de cet approvisionnement relève de la compétence nationale. Chaque État membre doit décider quel éventail de sources d’énergie il préfère, en demeurant bien entendu dans les limites du cadre fixé par l’Union européenne, comme par exemple le respect de ses engagements à réduire les émissions de CO2 ou la promotion des énergies renouvelables.
Actuellement, l’énergie nucléaire représente un tiers de la production d’électricité dans l’Union européenne. Le rôle de l’énergie nucléaire est étroitement lié à une stratégie rigoureuse concernant la sécurisation des matières nucléaires et la non-prolifération, la protection contre les radiations, la sécurité nucléaire, la gestion efficace des déchets nucléaires et le démantèlement en bonne et due forme des installations nucléaires. Les discussions de ce soir ne porteront pas sur les centrales nucléaires, mais sur le démantèlement des installations, soit parce qu’elles sont arrivées en fin de vie, soit parce qu’il s’agit de centrales électriques des nouveaux États membres, qui n’ont pas pu être modernisées à un coût abordable.
Le financement du démantèlement est une question complexe et l’on a constaté qu’il existe des approches différentes selon les États membres. La Commission a publié son rapport sur le démantèlement; un point examiné aujourd’hui à la demande du Parlement européen. Dans ce rapport, elle reconnaît la nécessité accrue de transparence et d’harmonisation au niveau de la gestion des ressources financières nécessaires. Dès lors, la Commission a l’intention d’adopter des recommandations sur les programmes de financement affectés au démantèlement.
La coopération instaurée dans le courant de l’année 2005 avec les États membres, ainsi que les débats fructueux entamés avec le Parlement européen sur les questions relatives à ces programmes de démantèlement, permettront d’accomplir des progrès considérables dans cet important domaine.
En ce qui concerne la question plus spécifique du démantèlement de Bohunice, c’est le protocole d’adhésion qui constitue le cadre de la fermeture anticipée de Bohunice. L’assistance qui sera fournie pour assurer cette fermeture anticipée des deux réacteurs de la centrale nucléaire de Bohunice témoigne de la solidarité de la Communauté avec la République slovaque; elle met également en évidence que la Commission et les États membres sont conscients des défis majeurs que représente cette fermeture anticipée.
Il incombe à la Commission de contrôler le respect des engagements relatifs à cette fermeture et d’y apporter son soutien par les mécanismes disponibles. Nous l’avons déjà fait pour les crédits annuels de 2004 et 2005, et je ne prévois aucune difficulté pour la contribution de 2006.
Le protocole associé au traité d’adhésion reconnaît que le démantèlement devra se poursuivre pendant plusieurs années et que cet effort représentera pour la Slovaquie une charge financière considérable. C’est pourquoi les décisions qui seront prises quant à la poursuite de l’assistance de l’UE après 2006 prendront en considération cette situation.
Dans ce contexte, et afin de présenter ses propositions pour les prochaines perspectives financières, la Commission a préparé la proposition de règlement qui est maintenant soumise à votre appréciation. Nous avons estimé qu’il était nécessaire de poursuivre cette assistance, car la Commission reconnaît que le démantèlement est un processus. Le niveau des aides indiquées dans notre proposition est calculé sur la base de la poursuite des aides déjà convenues dans le protocole n° 9 au moment des négociations d’adhésion. Le montant de 237 millions d’euros s’inscrit dans les perspectives financières actuellement en négociation. Dès lors, la Commission réserve sa position sur tout amendement relatif à ce financement, qui s’inscrit dans les perspectives financières.
J’espère que ces quelques mots à propos des deux rapports en discussion auront servi à planter le décor et à expliquer dans quel esprit et avec quels objectifs les propositions de la Commission ont été élaborées et adoptées.
Rebecca Harms (Verts/ALE), rapporteur. - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, les rapports que je présente ce soir concernent le financement du démantèlement des centrales nucléaires de puissance en général et dans un cas particulier. Je regrette profondément que nous parlions de ce sujet si tard parce que la question est si grave et si pointue que j’aurais préféré que nous en débattions en pleine journée, quand notre attention est intacte, comme pour le programme REACH dont nous avons discuté cet après-midi.
En début d’année, la Commission a présenté sa première communication sur les préparatifs du financement du démantèlement et de l’élimination des déchets dans les États membres où fonctionnent des centrales nucléaires de puissance.
Cette communication est incomplète, c’est le moins qu’on puisse dire. Cependant, pour une fois, ce n’est pas la Commission qui est à blâmer pour ces omissions, mais les gouvernements des États membres, qui ont été jusqu’ici fort réticents à dire la vérité sur les dettes héritées et futures de l’industrie nucléaire.
La communication de la Commission prouve à mes yeux combien le principe du «pollueur-payeur» a été peu appliqué à l’industrie nucléaire européenne jusqu’ici. En Europe, les fonds suffisants pour financer le démantèlement des centrales nucléaires de puissance et le stockage des déchets nucléaires constituent malheureusement l’exception et non la règle. En n’adoptant pas des dispositions pour l’élimination des déchets, les États membres d’Europe de l’Est ont bien plus en commun avec ceux d’Europe occidentale que nombre d’entre nous veulent bien l’admettre. En France, le pays le plus nucléarisé de l’Union européenne, la Cour des comptes estime que les contribuables devront un jour payer les dettes d’EDF, c’est-à-dire les dettes de l’industrie nucléaire. Au Royaume-Uni, le gouvernement, c’est-à-dire les contribuables, s’est attaqué au financement du fonds de démantèlement: 1,5 milliard d’euros selon les estimations de la Commission. Et ce n’est pas nécessairement la dernière fois que l’industrie nucléaire britannique devra être sauvée par les deniers publics. Le prix du démantèlement d’une centrale nucléaire de puissance est estimé entre 200 millions et un milliard d’euros. Vous pouvez donc imaginer ce qui va peut-être encore se passer.
Soyons clairs sur la dimension financière de toute cette question: aujourd’hui, il y a en Europe 149 centrales nucléaires de puissance opérationnelles, et la Commission part de l’hypothèse qu’au cours des vingt prochaines années, 50 ou 60 de ces réacteurs devront être mis hors service à cause de leur âge ou de leur état technique. Dans la majorité des cas, les dispositions pour le démantèlement et l’élimination, pour autant qu’elles aient été adoptées, ont jusqu’ici été insuffisantes.
Il est toutefois essentiel de connaître le moment et la manière d’entamer le démantèlement d’une centrale nucléaire de puissance une fois qu’elle a été fermée et de gérer l’élimination des déchets pour éviter l’impact des radiations sur l’environnement, sur les riverains et sur les travailleurs chargé du démantèlement. Je pense que la décision relative au moment et à la manière du démantèlement - et je crois que c’est également l’opinion de ceux qui croient en une politique environnementale responsable - ne doit être guidée que par les seules considérations de sécurité, et la sécurité ne doit jamais passer après les intérêts financiers de l’industrie nucléaire.
Toute cette affaire commence à coûter très cher, et cette importante somme d’argent - qui n’est tout simplement pas disponible pour l’instant - n’est pas nécessaire seulement à un moment donné; elle pourrait l’être pendant des siècles et des siècles. Au vu du nombre de sociétés qui font faillite et de l’appétit croissant des sociétés européennes pour les fonds de couverture internationaux, je ne puis qu’inviter la Commission à mettre la pression sur les États membres pour qu’ils encouragent enfin leurs industries nucléaires à faire face à leurs engagements. C’est pourquoi je crois que de vrais fonds doivent être créés.
En Allemagne, par exemple, on peut maintenant dire que l’industrie nucléaire a dégagé 30 milliards d’euros. Cependant, il est difficile de dire où tout cet argent se trouve pour le moment, parce que ces 30 milliards - montant équivalent au PNB additionné de tous les pays baltes - ont été gaspillés dans un accès de fièvre acheteuse ici en Europe et ailleurs. Les dirigeants aiment acheter des compagnies de fourniture d’énergie, et même des sociétés d’eau ou de télécommunications, en fait, des sociétés de tous les secteurs impliquant des réseaux de distribution. Quand je le dis, on me répète à chaque fois qu’il faut faire travailler l’argent. Mais même en Allemagne, personne ne peut garantir aujourd’hui que les milliards dont nous aurons besoin en 2030, 2040 ou 2050 seront effectivement disponibles alors. Je pense que nous devons œuvrer à la disponibilité garantie des fonds pour l’élimination des déchets et qu’il faudrait interdire d’utiliser les provisions collectées auprès des consommateurs d’électricité pour couvrir les dettes futures d’une manière qui fausse les marchés et la concurrence.
L’objectif de mon texte de compromis, que je présente aujourd’hui à cette Assemblée en même temps que mon rapport d’initiative et qui sera mis aux voix demain, consiste à encourager la Commission à agir sur les carences liées aux dispositions relatives à l’élimination des déchets. Je reste convaincue qu’il est bon que les États membres conservent la responsabilité des déchets nucléaires. Je suis toutefois tout autant convaincue qu’ici en Europe, il nous manque des critères uniformes solides pour la constitution de fonds par les sociétés. Je pense que le principe du «pollueur-payeur» doit être respecté. Les provisions financières pour le démantèlement et l’élimination des déchets doivent également être guidées par les normes de sécurité les plus élevées. Les fonds de démantèlement au niveau des sociétés, gardés séparés du budget opérationnel général et faisant l’objet d’un audit externe, renforceraient la sécurité nucléaire et nous permettraient d’éviter que l’industrie nucléaire fasse de nouveau main basse sur l’argent public.
Il est dommage que, bien que la commission ait pu trouver un accord sur la direction globale que devraient prendre les dispositions sur le démantèlement, nous n’ayons pas pu nous entendre sur les détails et décider d’un ensemble de critères à recommander à la Commission quand celle-ci adoptera, comme je l’espère, mes propositions générales. Si c’est toujours ce que l’Assemblée veut faire, je lui demande de soutenir l’amendement introduit par mon groupe, de sorte que nous puissions arriver à ce que je viens de proposer.
Concrètement toutefois, nous ne discutons pas seulement de dispositions en général, mais de la question spécifique du démantèlement de la centrale nucléaire de puissance de Bohunice. Il a été décidé de la fermer en raison de problèmes de sécurité qui ne peuvent être résolus par des mesures de reconditionnement. La Slovaquie a déjà reçu 240 millions d’euros pour la fermeture de Bohunice dans le cadre du programme communautaire PHARE. Cet argent est destiné à renforcer la sécurité dans la région de Bohunice et à apporter une compensation financière pour sa fermeture anticipée. Après ce versement initial, la Commission propose maintenant de payer 237 millions de plus pour les mesures d’accompagnement de la fermeture et la capacité de remplacement. Sur la base de mes connaissances du coût des mesures de fermeture et de démantèlement, cette proposition me semble correcte.
Je souhaite toutefois repousser expressément la hausse proposée du financement à 400 millions d’euros, que des députés à gauche et à droite de cet hémicycle ont réclamée. Les promesses en l’air ne nous aideront ni à gagner l’acceptation de la politique européenne, ni à garantir la sécurité à Bohunice. Je m’attellerai à assurer que le financement que la Commission juge approprié sera bel et bien versé. J’œuvrerai également à cette fin dans le contexte des discussions sur les perspectives financières et dans les débats budgétaires pour les périodes à venir, mais je veillerai en même temps à ce que l’argent que nous dégagerions - et cela dépend toujours des perspectives financières - soit effectivement utilisé au profit de la sécurité des citoyens en Slovaquie et ailleurs dans l’Union. Je m’élèverai contre les sociétés qui, comme Slovenské Elektrárne ou ENEL en Italie, utilisent cet argent pour construire de nouvelles centrales nucléaires de puissance.
En tant que rapporteur et opposante à l’énergie nucléaire, j’aurais voulu vous recommander de soutenir l’amendement 18 du groupe du parti populaire européen (démocrates chrétiens) et des démocrates européens qui soutenait la proposition de la Commission relative au niveau de financement, mais, comme cet amendement a malheureusement été retiré, je vous demanderai - si vous voulez être honnêtes et réalistes vis-à-vis de la Slovaquie - de voter demain contre l’amendement 12 et de veiller à ce que la proposition raisonnable du commissaire Piebalgs soit acceptée.
Ján Hudacký, au nom du groupe PPE-DE. - (SK) Tout le monde sait que, sous la pression politique exercée par l’Union européenne lors des négociations d’adhésion, la Slovaquie a accepté la fermeture anticipée de sa centrale nucléaire de puissance de Jaslovske Bohunice, et ce bien qu’après la remise en état de tous ses systèmes de sécurité, l’installation réponde aujourd’hui à toutes les normes de sécurité. Ce fait a été confirmé par l’Agence internationale de l’énergie atomique. La remise en état a coûté à elle seule quelque 250 millions d’euros. D’un autre côté, l’Union européenne s’est engagée à assumer une partie de ces coûts. Pour la période 2007-2013, la Commission a proposé une contribution financière de 237 millions d’euros, mais c’est bien peu par rapport au coût total calculé dans les dernières études présentées par le gouvernement slovaque.
La Commission a basé son calcul des coûts de démantèlement et l’ampleur consécutive de sa contribution sur des méthodes dépassées et douteuses, en ne tenant compte que du processus de démantèlement lui-même. D’après les dernières études, les coûts directs totaux s’élèvent à 1,3 milliard et les coûts indirects à 1,8 milliard d’euros, tandis que les pertes liées à la cessation de la production d’énergie représentent 1,5 milliard d’euros, en partant d’une durée de vie de l’installation allant jusqu’en 2015.
Le coût général, en ce compris les pertes de production, est donc de 4,6 milliards d’euros. Tenant compte de ces faits, la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie a proposé dans son rapport révisé d’augmenter la contribution financière de l’UE pour 2007-2013 à 400 millions d’euros. Cette proposition constitue un compromis positif pour le gouvernement slovaque, qui avait demandé une aide financière d’environ 700 millions d’euros. Je suis parfaitement conscient de la complexité de la situation entourant l’incapacité de l’UE à s’accorder sur un budget pour la période 2007-2013. La pression exercée par la plupart des États membres dans le sens de coupes dans le budget est forte et souvent légitime. En même temps, la Slovaquie ne peut mettre en danger la sécurité de sa population et a besoin de ressources financières suffisantes pour procéder en toute sécurité au démantèlement le plus vite possible.
À une époque de crise croissante dans le secteur de l’énergie, couplée à une hausse de la consommation d’électricité, la décision d’accélérer la fermeture anticipée d’une installation nucléaire sûre manquait peut-être de vision. Elle entraînera pour la Slovaquie une perte de 19 % de sa capacité de production et la fera plus que probablement dépendre des importations d’électricité dans un avenir proche. D’aucuns en Europe considèrent toutefois cela comme un résultat satisfaisant. Tout le monde doit payer pour ses erreurs, mais, cette fois nous devrons tous payer. J’espère qu’à l’avenir, nous tirerons les leçons de ces erreurs absurdes.
Edit Herczog, au nom du groupe PSE. - (HU) Monsieur le Président, je me réjouis du rapport de Mme Harms, mais je voudrais aussi vous rappeler que le débat d’aujourd’hui ne consiste pas à se dire partisan ou opposant du nucléaire; il doit principalement traiter de sécurité. Cela inclut, d’une part, la sécurité nucléaire et, de l’autre, la sécurité énergétique.
Nous sommes tous conscients des coûts très élevés induits par le démantèlement de centrales nucléaires de puissance de manière sûre et professionnelle. Je suis convaincue que toutes les institutions européennes, la Commission, le Parlement et chaque membre de cette Assemblée conviendront que nous ne pouvons pas nous montrer chiches lorsqu’il s’agit de sécurité nucléaire. À côté du principe du «pollueur-payeur», nous devons faire de la place pour l’expression «la sécurité a un prix».
Je voudrais souligner que l’Union européenne doit apprécier l’altruisme de la Slovaquie dans cette affaire. Elle a dû accepter de fermer deux unités de la centrale nucléaire de puissance de Bohunice quand cette exigence a été ajoutée en tant que condition sine qua non lors des dernières phases du processus d’adhésion. Nous savions alors que cela induirait une perte de capacité de production, un manque que la Slovaquie devrait combler par de nouveaux investissements et des importations.
Chez nous, un proverbe dit que celui qui paie le violoniste choisit le morceau de musique. En ce sens, je trouve que la demande adressée par la Slovaquie aux institutions européennes en vue de lui permettre de démanteler la centrale en toute sécurité est tout à fait raisonnable.
À mes yeux, au moins trois éléments des principes et politiques communautaires justifieraient à l’envi le financement du démantèlement par des fonds européens. Premièrement, le principe de cohésion sociale, économique et territoriale entre les États membres. La Slovaquie a pris un engagement majeur pour le bien de l’Union européenne, et elle le respecte, mais elle ne peut aller au-delà de ses limites, de son propre niveau de développement économique.
Deuxièmement, la sécurité de l’approvisionnement en énergie, qui est un droit des consommateurs particuliers et industriels de Slovaquie comme de tous les autres États membres de l’Union européenne. N’oublions pas que nous avons adopté il n’y a pas si longtemps une résolution appelant à un objectif de 20 % d’énergies renouvelables dans la consommation énergétique totale de l’UE d’ici 2020; la situation aujourd’hui n’est donc pas la même que par le passé.
Troisièmement, la lutte contre la dépendance énergétique. La fermeture anticipée de capacités de génération d’énergie viables ne peut être utile que si les centrales démantelées sont remplacées par des installations plus efficaces et économiquement saines. En raison de tout cela, je vous invite à soutenir l’amendement 16, qui poursuit cet objectif.
Fiona Hall, au nom du groupe ALDE. - (EN) Monsieur le Président, en ce qui concerne les réacteurs 1 et 2 de la centrale nucléaire de Bohunice V1, les rapporteurs du gouvernement slovaque ont estimé que le coût total du démantèlement des deux réacteurs devrait s’élever à 750 millions d’euros. Comparée à cela, la dotation de 237 millions d’euros pour la période 2007-2013 proposée par la Commission peut sembler modeste, mais deux arguments de taille plaident en faveur du maintien du chiffre de 237 millions d’euros avancé par la Commission.
Primo, même si le réacteur 1 devrait être fermé en 2006, le démantèlement structural ne commencera pas avant la fermeture du réacteur 2 en 2008. Dès lors, 237 millions d’euros représentent une somme d’argent substantielle pour les cinq premières années d’une période de démantèlement supposée durer 30 ans.
Secundo, accroître ce montant reviendrait à tourner en dérision le budget déjà voté par le Parlement. Nous savons que, politiquement, nous entrons dans une période très délicate en matière de perspectives financières et cela ne sert à rien si le Parlement vote une chose à un moment et autre chose à un autre moment. Nous devons respecter le vote relatif au budget. Par ailleurs, nous ne devons pas essayer de forcer la main de quiconque en ce qui concerne les budgets au-delà de 2013.
Le débat sur des ressources financières supplémentaires pour Bohunice devrait se tenir dans le cadre de la prochaine série de discussions budgétaires et à la lumière des efforts qui auront été consentis pour le démantèlement à cette date. Toutefois, il est compréhensible que les autorités slovaques désirent savoir où elles en sont avec les ressources pour ces perspectives financières 2006-2013; dès lors, la somme totale de 237 millions d’euros doit être adoptée pour cette période sans examen supplémentaire, même si le montant des crédits affectés annuellement peut varier.
En ce qui concerne la problématique du démantèlement au sens large, le défi majeur est d’assurer, d’une part, la disponibilité de ressources suffisantes pour démanteler les centrales nucléaires en toute sécurité et, d’autre part, que le financement du démantèlement ne devienne pas une aide de l’État déguisée. Le paragraphe 5 du rapport est important à cet égard. C’est l’industrie nucléaire - et non les gouvernements - qui doit pourvoir aux besoins du démantèlement et assurer que l’intégralité des coûts figure d’emblée dans le bilan. Trop souvent par le passé, l’industrie nucléaire s’est trompée dans ses calculs, pour venir ensuite quémander une assistance financière. Ce qui est inacceptable, car l’incapacité de l’industrie nucléaire de couvrir les coûts du démantèlement fausse la concurrence. Si les coûts finaux ne sont pas calculés correctement, l’électricité produite par le nucléaire semble être beaucoup moins coûteuse qu’elle ne l’est en réalité. J’espère que la Commission pourra garantir que ces pratiques contraires au droit de la concurrence ne pourront plus avoir cours à l’avenir.
Esko Seppänen, au nom du groupe GUE/NGL. - (FI) Monsieur le Président, la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie a décidé de rédiger un rapport d’initiative sur l’utilisation des ressources financières destinées au démantèlement des centrales nucléaires de puissance. La raison en était que la gestion de ces fonds est incluse dans un paquet relatif à la sécurité nucléaire au sujet duquel le Parlement a émis un avis auquel le Conseil n’a pas pu se rallier.
Nous attendons que la Commission présente une nouvelle proposition de directive en la matière. Celle-ci devrait assurer que les centrales nucléaires seront démantelées de manière sûre et qu’il y aura suffisamment de fonds pour isoler les réacteurs de l’environnement pendant des milliers d’années.
La gestion des fonds de démantèlement doit en principe être du ressort des instances nationales. Nous pouvons toutefois accepter la définition de règles communes parce que la fermeture progressive des centrales nucléaires de puissance a un impact sur la sécurité des travailleurs et sur la santé des citoyens au-delà des frontières. Un problème potentiel franchira toujours les frontières nationales.
Malheureusement, nous ne pouvons guère avoir l’assurance que tous les États membres mettront des fonds de côté afin d’assurer qu’il y aura suffisamment d’argent pour les générations à venir. J’en veux pour preuve le démantèlement de la centrale de puissance de Bohunice, sans parler de celui d’Ingalina. Un financement communautaire est nécessaire pour ces installations. Si les ressources financières destinées au démantèlement ne sont pas collectées entièrement par le biais du prix de l’électricité, il y aura une distorsion de la concurrence sur les marchés de l’électricité. À cet égard, les fonds affecteront également le marché unique. L’électricité produite dans les centrales nucléaires de puissance ne devrait pas être bon marché pour la simple raison que c’est aux générations futures qu’il reviendra de payer pour le démantèlement de ces centrales.
Le rapporteur, Rebecca Harms, a accompli un travail soigné dans le message qu’elle envoie à la Commission sous la forme de ses rapports, l’invitant à la rédaction d’une nouvelle proposition de directive.
Nils Lundgren, au nom du groupe IND/DEM. - (SV) Monsieur le Président, l’utilisation et l’abandon progressif de l’énergie nucléaire sont des activités qui peuvent avoir des conséquences transfrontières en Europe. Contrairement aux autres activités, elles doivent donc être contrôlées au niveau communautaire. L’énergie nucléaire est toutefois une industrie de transformation comme les autres. Le développement technique mène souvent à la prolongation de la longévité des réacteurs. Même les cuves des réacteurs pourront être changées à l’avenir. Nous ne savons donc pas avec certitude quand un réacteur devra être arrêté. La production des réacteurs suédois, dont l’âge moyen est aujourd’hui de 25 ans, est actuellement considérablement augmentée. Ils devraient donc fonctionner pendant de nombreuses années encore.
Évidemment, le démantèlement a un coût et des fonds doivent être dégagés pour le couvrir. Mon pays, la Suède, où environ la moitié de l’électricité est générée par des réacteurs nucléaires, a pris soin d’assurer le financement correspondant dès le début. Je pense que nous pouvons supposer que tous les pays démocratiques en ont fait de même. Les instructions bureaucratiques détaillées pour le contrôle de ce processus sont superflues. L’idée que des technocrates de Bruxelles pourraient être nécessaires pour chaperonner des experts expérimentés en énergie nucléaire dans les États membres semble presque absurde. Les gouvernements et autorités des États membres sont soumis à un contrôle démocratique et ne peuvent pas exposer leurs citoyens au moindre risque.
Il est toutefois manifeste que les États membres qui ont autrefois souffert de la dictature de régimes communistes sont dans une situation tout autre. Leurs réacteurs ont été construits dans une culture de la sécurité différente, dans laquelle on prenait plus de risques et on ne dégageait pas assez de fonds pour le démantèlement. Ce serait un geste de solidarité de la part des États membres plus riches de contribuer financièrement à ce processus. Dans quelle mesure, me direz-vous? La Liste de juin estime que, puisque les perspectives financières n’ont pas été adoptées, le financement du démantèlement de la centrale de Bohunice V1 en Slovaquie devrait s’élever, pour commencer, au montant proposé par la Commission, à savoir 237 millions d’euros pour la période 2007-2013. Nous ne devons donc pas nous engager dès aujourd’hui à dégager des fonds sur le budget de la Communauté pour la période suivante.
Umberto Pirilli, au nom du groupe UEN. - (IT) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, le débat d’aujourd’hui revêt une importance stratégique dans le cadre des politiques de l’Union européenne. Le problème porté à notre attention est celui de la centrale nucléaire de puissance de Bohunice en Slovaquie et du problème concomitant de l’utilisation des ressources financières destinées au démantèlement des centrales nucléaires de puissance.
Le premier problème est lié à la mise en œuvre du protocole n° 9 annexé à l’Acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de l’Estonie, de Chypre, de la Lettonie, de la Lituanie, de la Hongrie, de Malte, de la Pologne, de la Slovénie et de la Slovaquie. L’article 3 de ce protocole envisage une aide financière ultérieure pour le démantèlement des réacteurs 1 et 2 de la centrale de Bohunice. Nous pensons qu’il faut dégager le montant le plus élevé possible pour assurer la sécurité des réacteurs 1 et 2 de Bohunice pendant leur démantèlement.
Cependant, le problème que je voudrais soulever est celui de la sécurité de notre continent dans son ensemble, ainsi que celui de la question connexe de la conciliation de cette sécurité et de politiques d’approvisionnement en énergie adaptées et appliquées avec vigueur. Ces politiques devraient garantir un niveau de compétitivité financière du système européen correspondant aux défis de l’innovation et du développement.
On compte aujourd’hui en Europe 155 centrales de puissance, dont au moins un tiers devront être démantelées dans les années qui viennent. Le démantèlement de 50 ou 60 réacteurs induira des dépenses que l’on peut réalistement estimer à quelque 50 milliards d’euros. Étant donné que la plupart de ces réacteurs se trouvent dans les nouveaux États membres et sont de ce fait moins sains structurellement et financièrement, le premier problème que la Commission doit affronter consiste à mettre en place un plan systématique d’aide au démantèlement en faveur de ces pays.
Le deuxième problème concerne la nécessité de procéder à une analyse approfondie de la rentabilité des centrales nucléaires, en confrontant ces indicateurs aux coûts d’installation et de démantèlement et en tenant évidemment compte de la durée de vie moyenne des réacteurs existants. Sur la base des résultats d’une telle étude, il sera possible et correct de prendre des décisions sûres et durables dans une direction ou l’autre.
Le dernier problème - qui n’est pas moins grave - relève de ce qui se passe ailleurs qu’en Europe. Dans le monde, il y a aujourd’hui 440 réacteurs en fonctionnement, tandis que 25 autres sont en construction. Après Tchernobyl, l’opinion publique mondiale a été frappée par l’état de délabrement et le risque sérieux pour l’humanité tout entière posé par nombre de réacteurs, dont beaucoup se trouvent dans l’ex-Union soviétique.
Cela étant, n’est-il pas du devoir du Parlement de recommander à la Commission d’entamer des négociations avec les États-Unis, la Russie et tous les pays concernés afin d’établir une politique de nettoyage de la planète entière afin de la rendre plus sûre?
Sergej Kozlík (NI). - (SK) Dans le cadre des négociations d’adhésion, les institutions de l’Union européenne ont obligé la République slovaque à accepter la fermeture anticipée de deux unités de la centrale nucléaire de puissance de Jaslovské Bohunice, et ce bien que l’Agence internationale de l’énergie atomique ait confirmé que la centrale remplissait les critères pour un fonctionnement sûr à long terme.
La fermeture anticipée forcée - et motivée politiquement - de ces installations nucléaires aggravera les problèmes énergétiques de la Slovaquie et de l’Union européenne dans son ensemble. La République slovaque ne pourra pas dégager les moyens nécessaires pour financer le démantèlement sûr de la centrale, même avec l’aide actuellement apportée par l’Union européenne. En guise de comparaison, sachez que l’Union estime que les coûts de démantèlement de la centrale nucléaire de puissance d’Ignalina en Lituanie seront trois fois plus importants que pour la centrale slovaque.
Je vous demanderai donc, honorables collègues, d’appuyer au moins la solution minimale, c’est-à-dire l’augmentation de l’aide au démantèlement des réacteurs de Bohunice de 237 à 400 millions d’euros, telle que proposée par la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie.
Romana Jordan Cizelj (PPE-DE). - (SL) Au nom du groupe du parti populaire européen (démocrates chrétiens) et des démocrates européens, je voudrais aborder la question des ressources financières destinées au démantèlement des centrales nucléaires.
Notre groupe politique est d’avis que ces moyens doivent être assurés par le biais du principe du «pollueur-payeur». Nous demandons également que ces ressources soient adaptées et mises à la disposition au moment envisagé dans les programmes de démantèlement des États membres. La disponibilité des fonds doit être assurée avant la fin de la durée de fonctionnement prévue d’une centrale nucléaire déterminée. Les ressources doivent être utilisées à la fin désignée, gérées de manière transparente et employées conformément à la législation communautaire en matière de compétitivité.
Notre groupe juge inacceptable que des retards dans le démantèlement se produisent à cause de l’absence de moyens financiers. Nous pouvons toutefois admettre des délais planifiés couvrant des périodes au cours desquelles la désintégration des particules nucléaires réduit la radioactivité des matériaux et, partant, l’exposition des travailleurs aux radiations.
En raison de notre responsabilité envers les générations à venir, nous devons trouver au niveau européen un mécanisme ad hoc de contrôle et de gestion de ces fonds. Nous sommes bien conscients de la nécessité de trouver un juste équilibre entre les compétences des États membres et de l’Union européenne, dans le respect du traité Euratom.
Le document à l’examen a été conçu pour assurer une concurrence égale entre les centrales nucléaires de puissance et les autres centrales. Puisque nous discutons séparément des centrales nucléaires, nous devons veiller à ne pas leur imposer une charge que les autres centrales ne devront pas assumer.
Monsieur Piebalgs, ce que je tiens à dire, c’est que nous devons contrôler nos pratiques au niveau communautaire et assurer le respect des engagements pris et des normes internationales adoptées par les États membres et les pays candidats, à savoir la Bulgarie et la Roumanie. En même temps, nous devons suivre de près les développements dans les pays qui viennent d’entamer les négociations d’adhésion. Je vise ici la Croatie, qui détient 50 % de la centrale nucléaire de puissance de Krško (située en Slovénie) et qui a pris des engagements similaires à ceux des autres pays nucléarisés.
Reino Paasilinna (PSE). - (FI) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, le même problème se pose avec la fermeture de la centrale nucléaire de puissance de Bohunice qu’avec celle d’Ingalina. D’après l’Agence internationale de l’énergie atomique, toutes deux sont actuellement dans un état qui leur permettrait de continuer à fonctionner. L’Europe traverse une crise énergétique notamment parce que le prix du pétrole fluctue arbitrairement sur les marchés internationaux. La consommation augmente et nous devrons en même temps agir pour prévenir le phénomène de l’effet de serre.
Les petits nouveaux États membres, qui ne possèdent pas suffisamment de formes d’énergie alternatives, devront néanmoins fermer leurs centrales de puissance sous la pression exercée par les anciens États membres au moment où ils ont rejoint l’UE. Cette pression était en partie due à une crainte et à des suspicions à l’égard de la technologie soviétique, et en partie à l’envie de tirer un avantage économique. Il est juste et bon que la Slovaquie et les autres nouveaux États membres dans une position similaire bénéficient d’une aide financière adéquate couvrant les coûts de fermeture. Nous proposons 400 millions d’euros. Cependant, ce sont probablement des sociétés des grands anciens États membres qui se chargeront du démantèlement. Néanmoins, le problème subsistera: notre consommation d’énergie augmentera et nous n’aurons pas assez de temps pour résoudre la situation avec les sources renouvelables. En Suède, l’énergie utilisée pour le refroidissement, par exemple, a fortement augmenté au cours des dix dernières années. Pour le refroidissement! La Chine absorbe toute la hausse de production de pétrole. Il nous faut une nouvelle politique énergétique.
Šarūnas Birutis (ALDE). - (LT) Il y a plusieurs années, sous une pression très forte, des pays candidats comme la Slovaquie, la Lituanie et maintenant la Bulgarie ont été inconditionnellement obligés de démanteler leurs centrales nucléaires de puissance avant l’échéance prévue. Ces engagements sont difficiles à affronter économiquement et à expliquer logiquement. Nous devons reconnaître que des décisions politiques non fondées ont été prises.
La plupart des spécialistes admettent que la fermeture prématurée des centrales nucléaires de puissance constitue un coup dur pour les économies des régions et une charge s’élevant à des milliards et pesant sur les contribuables de l’Union européenne.
Il est de la plus haute importance d’aider à assurer la sécurité de l’approvisionnement en énergie dans ces régions, parce que le démantèlement forcé des centrales nucléaires de puissance menace d’entraîner une dépendance non seulement économique, mais aussi politique vis-à-vis d’autres fournisseurs. Dans ce contexte, je voudrais insister en particulier sur une condition essentielle au démantèlement, à savoir le développement d’un système énergétique commun à l’UE et la disponibilité des sources d’énergie.
Dans ce cas, les opérations de démantèlement des centrales nucléaires de puissance doivent faire l’objet d’un financement suffisant et en temps utile, et les installations ne peuvent être fermées aux dépens les uns des autres. Le changement de situation impose la solution la plus prudente, à savoir la poursuite du fonctionnement des centrales de puissance.
Nous devons affronter la situation en faisant preuve de sens de la réalité.
Vladimír Remek (GUE/NGL). - (CS) Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, le problème auquel nous faisons face en relation avec la centrale nucléaire de puissance de Bohunice est qu’un nouvel État membre s’est engagé à fermer ce qui s’avère être une source d’énergie vitale pour le pays. Cette centrale n’est nullement en fin de vie. De plus, d’importants montants ont été dépensés pour la moderniser et l’Agence internationale de l’énergie atomique a confirmé qu’elle répondait aux normes applicables aux centrales nucléaires similaires du même âge. Il est de notoriété publique que la Slovaquie s’est engagée à fermer Bohunice sous la considérable pression internationale, mais le gouvernement de l’époque avait pour principe guide l’objectif d’adhésion à l’UE. Le gouvernement actuel entend respecter cette promesse, même si cela doit porter préjudice à l’économie nationale et signifier que le pays devra importer de l’énergie à un moment où les prix n’arrêtent pas de monter.
Je pense que nous devons nous rallier à la conclusion de la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie et voter en faveur de l’augmentation proposée du financement communautaire pour l’accompagnement du démantèlement sûr de la centrale de puissance de Bohunice, afin de garantir que l’économie slovaque reste compétitive. Les citoyens slovaques ne doivent pas avoir l’impression d’avoir perdu quelque chose en rejoignant l’Union européenne et de se conformer à des exigences strictes que bon nombre estiment injustifiées.
Kathy Sinnott (IND/DEM). - (EN) Monsieur le Président, permettez-moi de résumer la situation. Deux centrales nucléaires devenues obsolètes et dangereuses doivent être démantelées. Le coût de la mise à l’arrêt de ces centrales s’élève à pratiquement 2 milliards d’euros. Pour entretenir les centrales fermées, il faudra engager une équipe d’experts pendant plusieurs décennies, voire un siècle. Cela doit être fait et on nous dit que l’UE doit le faire. Les erreurs du passé coûtent cher. Le seul aspect positif de cette situation désastreuse, c’est qu’elle sert de leçon pour l’avenir. L’aborderons-nous comme telle? Allons-nous tirer la leçon des conséquences de nos amourettes avec l’énergie nucléaire?
Dans les pays qui décident de privatiser leurs centrales ou d’en changer l’exploitant, on joue un jeu dangereux consistant à se renvoyer la balle de la responsabilité du paiement des coûts de démantèlement. Nous savons qu’une centrale nucléaire ne peut durer indéfiniment, mais est-ce que nous en tenons compte avant de les construire? Les coûts de démantèlement devraient être pris en considération dès le tout début; quelqu’un devrait alors s’engager et assumer la responsabilité de la charge financière et organisationnelle du nettoyage des déchets nucléaires subsistants.
Il y a vingt-huit ans, Des O’Malley, alors ministre de l’industrie et du commerce, nous disait que l’Irlande ne pourrait survivre sans énergie nucléaire. On nous disait que nous nous retrouverions dans le noir, sans éclairage, que nous devrions abandonner nos trayeuses et recommencer à traire manuellement, que l’électricité serait rationnée. Or, comme les Irlandais pensaient à l’avenir, ils ont refusé. Ils avaient réfléchi aux problèmes auxquels nous sommes maintenant confrontés avec le démantèlement des deux centrales en question, et de beaucoup d’autres monstres nucléaires vieillissants.
L’absence d’énergie nucléaire n’a pas conduit l’Irlande à la faillite. Nous ne disposons toujours pas de cette énergie et avons l’économie la plus forte de l’UE. L’économie de l’Irlande s’est solidement développée en dépit de l’absence d’énergie nucléaire. Je voudrais rendre hommage aux militants antinucléaires irlandais.
Je voudrais également saisir l’occasion pour demander aux décideurs de réfléchir aux leçons que nous enseignent la Lituanie, la Slovaquie et l’Irlande avant de se lancer dans la création d’une nouvelle génération de centrales nucléaires. Il existe de meilleurs moyens, plus sûrs et moins onéreux, pour continuer à faire tourner les machines et à nous éclairer.
Paul Rübig (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, je voudrais tout d’abord remercier le rapporteur pour son analyse étendue et approfondie. Nous avons toujours pensé que la sécurité des centrales nucléaires de puissance était un enjeu européen qui nous concerne tous, parce que les dysfonctionnements ou autres problèmes touchent les citoyens partout en Europe.
Le démantèlement et le stockage final relèvent clairement de la législation sur la concurrence. Nous devons veiller à ce que les fonds soient alloués conformément à la législation communautaire en matière de concurrence, et je crois qu’il doit y avoir des dispositions légales visant à prévenir les distorsions de la concurrence. Par là, je n’entends pas uniquement la distorsion de la concurrence entre les États membres, mais aussi et surtout entre les producteurs, et pas seulement pour le nucléaire, mais pour toutes les sources d’énergie également. C’est pourquoi les députés du centre, nous croyons qu’un contrôle par les pairs, c’est-à-dire des vérifications mutuelles et une mise en œuvre transparente, est nécessaire et que nous devons accorder une attention particulière à ce qu’à l’avenir, des fonds soient disponibles pour chaque source d’énergie, pour le démantèlement, le stockage final et la sécurité des consommateurs.
L’Union européenne, la Cour des comptes et les autres institutions doivent créer un cadre juridique clair. Il s’agit de présenter la situation le plus clairement possible et d’appliquer des modèles réduisant les coûts supportés par les consommateurs tout en optimalisant la sécurité, le stockage final et le démantèlement.
Hannes Swoboda (PSE). - (DE) Monsieur le Président, je serais beaucoup plus heureux dans une Europe sans centrales nucléaires de puissance et affranchie des risques qui y sont associés. Cependant, étant donné qu’il s’agit d’une décision prise au niveau national, comme le commissaire l’a dit à raison, nous devons accorder une attention particulière à la sécurité. Des règles et normes européennes doivent être appliquées dans ce domaine.
Le problème, c’est que, dans ce cas, nous parlons d’une centrale construite avant l’adhésion à l’Union européenne, dont une des conséquences est qu’elle doit maintenant être fermée. Nous parlons d’une centrale située dans un pays pas vraiment riche, dans un pays qui rencontre des problèmes économiques. Nous devons en tenir compte. C’est pourquoi les députés autrichiens du groupe socialiste au Parlement européen demandent une contribution plus importante de la Communauté aux coûts de fermeture de cette centrale. Le groupe du PSE votera donc en faveur de cette contribution plus importante. Je n’entrevois pas de grande contradiction avec les perspectives financières, parce qu’il ne sera pas difficile de trouver ce financement à long terme.
Permettez-moi d’appeler une fois de plus cette Assemblée à soutenir la Slovaquie dans cette affaire et à lui tendre une main vraiment salutaire, de sorte que nous puissions, dans l’intérêt de la sécurité européenne, fermer cette centrale le plus vite possible.
Marios Matsakis (ALDE). - (EN) Monsieur le Président, nous semblons tous être d’accord sur la nécessité de démanteler les centrales nucléaires pour des motifs de sécurité et de protection de l’environnement, mais la véritable question est de savoir qui devrait payer, et si ce coût ne devrait pas être pris en considération lorsqu’on planifiera la création de nouvelles centrales nucléaires à l’avenir.
Nous avons entendu que dans l’UE, quelque 60 centrales nucléaires devront être démantelées dans les 20 prochaines années, à un coût moyen de 500 millions d’euros pièce. Ce qui signifie qu’une somme ahurissante de 30 milliards d’euros sera nécessaire pendant ces 20 prochaines années! Soit 30 fois le budget annuel de mon pays, Chypre, et un coût équivalent à la construction de centaines d’hôpitaux, d’écoles et d’autres institutions d’intérêt public. Mon pays n’a rien eu à voir avec les matières nucléaires, mis à part le stockage scandaleux de bombes atomiques par la Grande-Bretagne dans les bases coloniales britanniques sur place.
Ne serait-il pas plus équitable que les pays qui ont bénéficié de la production d’énergie nucléaire contribuent eux-mêmes de façon beaucoup plus significative au démantèlement de leurs centrales nucléaires? Et pourquoi les responsables de la construction de ces centrales - par exemple le gouvernement russe ainsi que diverses entreprises multinationales - ne seraient-ils pas invités à contribuer conformément au principe du «pollueur payeur»? En outre, ne serait-il pas plus équitable que cette contribution vienne des pays de l’UE qui bénéficient de la production d’énergie nucléaire? Je suis fermement convaincu que les États membres qui n’utilisent pas d’énergie nucléaire ne devraient pas payer pour le démantèlement des centrales nucléaires dans d’autres États membres.
Erik Meijer (GUE/NGL). - (NL) Monsieur le Président, plus d’un tiers des 150 centrales nucléaires de puissance européennes devront être démantelées dans les vingt prochaines années. Qui en paiera la note, les contribuables ou les pollueurs? L’absence de fonds ne doit pas signifier que les installations obsolètes doivent rester en service plus longtemps. Les déchets représentent plus que les matériaux radioactifs restant après le démantèlement. Avec les coûts des anciens matériaux fissiles, du transport et des déchets miniers, les coûts externes sont probablement nettement plus élevés que l’estimation d’un milliard d’euros par centrale nucléaire de puissance.
Mme Harms a raison de suggérer que les compagnies d’électricité contribuent, sur base annuelle, à un fonds couvrant tous les coûts de démantèlement, de traitement et de stockage des déchets radioactifs. Si on y intègre ces coûts, le prix de l’énergie nucléaire ne sera plus maintenu artificiellement bas par le biais des subventions, et sa faible rentabilité deviendra évidente. Actuellement, l’association floue entre les utilisations civiles et militaires mène encore à une distorsion patente de la concurrence et à des subventions à l’exportation déguisées. Nous sommes d’accord avec la proposition d’établissement d’une liste des critères de démantèlement liée aux fonds de réserve que les compagnies d’électricité alimenteraient suffisamment pour financer le traitement des déchets et le démantèlement.
Peter Baco (NI). - (SK) Mesdames et Messieurs, je vous demanderai respectueusement de soutenir les propositions amendées de la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie concernant la fermeture anticipée de la centrale nucléaire de puissance de Jaslovske Bohunice V1 en Slovaquie.
Dans ses propositions, la commission note que la Slovaquie assume scrupuleusement ses responsabilités dans ce domaine. Elle reconnaît également la perte financière substantielle que la Slovaquie subira à cause de la fermeture anticipée de l’installation. Cette perte est due essentiellement au fait que la fermeture anticipée de la centrale fera que les ressources financières destinées au démantèlement final ne seront pas majorées. De plus, les 250 millions d’euros que la République slovaque a récemment investis dans la remise en état de l’installation afin d’assurer la sécurité opérationnelle à long terme auront été perdus.
La contribution communautaire proposée de 400 millions d’euros pour couvrir le coût de la fermeture anticipée constitue donc une condition indispensable au respect des engagements pris à la fois par l’Union européenne et par la République slovaque.
Zita Pleštinská (PPE-DE). - (SK) La question du financement de la fermeture anticipée de la centrale nucléaire de puissance de Bohunice est une priorité non seulement pour le secteur nucléaire, mais aussi pour toute la politique énergétique de la République slovaque.
La Slovaquie est prête à respecter l’engagement pris dans le protocole n° 9 annexé à l’Acte relatif à l’adhésion à l’UE, et ce bien qu’elle ait investi 250 millions d’euros dans la modernisation et l’amélioration de la sécurité du site de Bohunice. Ajoutons à cela que, comme plusieurs autres États membres, la Slovaquie ne possède pas de ressources naturelles importantes et que le démantèlement de deux unités de cette centrale affaiblira grandement son autosuffisance en matière d’énergie.
L’opinion publique slovaque est opposée au démantèlement de la centrale de Bohunice. Les citoyens sont bien conscients des conséquences de la crise de l’énergie et des augmentations du prix de l’électricité qui y sont liées. En conséquence, tout refus, par l’Union européenne, d’allouer de plus grandes ressources financières ferait le lit des opposants au démantèlement.
Soutenue par l’étude qui a servi de base aux discussions avec la Commission, la Slovaquie a demandé 702 millions d’euros, contre les 237 millions proposés par la Commission. La commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie du Parlement européen a adopté un compromis de 400 millions d’euros. Je voudrais saisir cette occasion pour vous demander de faire preuve de solidarité envers mon pays et de soutenir la proposition de la commission de l’industrie.
Miloš Koterec (PSE). - (SK) Pendant le processus d’adhésion à l’UE, la République slovaque a fait tout son possible pour assurer la poursuite du fonctionnement de ses centrales nucléaires de puissance de type VVER, tout en amélioration leur niveau de sécurité afin de répondre aux normes européennes et de protéger les citoyens de Slovaquie et de tous les pays de l’Union, en particulier des pays voisins.
Pendant le processus d’adhésion, nous avons investi quelque 250 millions d’euros dans deux unités de la centrale nucléaire de puissance de Bohunice, ce qui constitue un montant important pour un pays dont le PIB dépasse à peine 50 % de la moyenne de l’UE, et, d’après l’Agence internationale de l’énergie atomique, nous avons donc assuré le fonctionnement sûr de l’installation jusqu’en 2015.
Un non-averti pourrait demander: «Si c’est le cas, pourquoi avez-vous besoin d’argent pour la démanteler au cours de la période budgétaire 2007-2013?» L’expert répondrait: «Parce que la Slovaquie a pris, lors des négociations d’adhésion, sous ce que nous appellerons la pression des circonstances, l’engagement de démanteler les deux unités en question respectivement en 2006 et en 2008.» Il ne faut pas de grandes compétences en mathématiques pour comprendre que des dizaines de millions d’euros auront donc été gaspillées.
Cependant, nous avons reçu l’assurance que l’Union nous aiderait pour le démantèlement. Si les coûts directs et indirects totaux du démantèlement s’élevaient à plusieurs millions d’euros, la somme de 237 millions proposée par la Commission serait bien maigre. Évidemment, comme Mme Harms le suggère dans son second rapport, la Slovaquie soutient la création de fonds spéciaux pour le démantèlement des installations nucléaires et est disposée à couvrir une part importante des coûts totaux du démantèlement. Néanmoins, il faut également tenir compte du niveau de développement économique. Si, d’après les estimations des experts, l’aide nécessaire pour respecter l’échéance s’élève à 702 millions d’euros, le compromis de 400 millions proposé par la commission de l’industrie semble acceptable, et de nombreux arguments montrent que ce montant ne devrait pas poser de problème même pour la version finale du budget.
Je pense que les deux rapports dont nous venons de discuter ont un dénominateur commun: la sécurité des installations nucléaires. Si l’objectif commun au sein de l’UE consiste à suivre un calendrier spécifique pour cette question, il doit aussi être d’assurer le financement nécessaire. Si ces deux buts ne peuvent être conciliés, l’Union devra, selon moi, assumer tôt ou tard les conséquences de ces incohérences.
Andris Piebalgs, membre de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, je commencerai par remercier le rapporteur pour son analyse très correcte et approfondie des défis liés au démantèlement.
Concernant la question de Bohunice, tout d’abord, la décision de mise à l’arrêt des réacteurs était motivée par des raisons de sécurité. Dans l’Union européenne, c’est la WENRA - l’Association des autorités de réglementation nucléaire de l’Europe de l’Ouest - qui détermine les critères de sécurité dans les différents États membres. Elle a constaté que ces types de réacteurs n’étaient pas modernisables, non pas parce qu’ils viennent de l’ex-Union soviétique, mais en raison de leurs caractéristiques techniques. C’est pour cela que la mise à l’arrêt de ces réacteurs a été exigée lors des négociations. Une information connue de longue date, de sorte que les négociations ont pris toutes les conséquences possibles en considération. La décision n’a pas été prise à la dernière minute: dans bien des cas, y compris celui de la Slovaquie, les gouvernements s’étaient engagés de longue date à arrêter certains réacteurs, par exemple ceux de Bohunice. C’est pourquoi je rejette l’argument selon lequel il y aurait eu des pressions politiques: la décision a été motivée par les analyses des responsables de la sécurité nucléaire dans l’Union européenne. C’est un fait.
Les négociations ont été menées en conséquence, et toutes les implications possibles ont été prises en considération, non seulement le démantèlement, mais d’autres aspects également. C’est aussi pour cette raison que nous avons des protocoles différents pour la Lituanie et la Slovaquie.
Je suis conscient du fait que le démantèlement représente une entreprise gigantesque, mais je peux clairement expliquer ce qui a motivé la proposition de la Commission: elle s’est basée sur les résultats des négociations d’adhésion. Toute autre problématique devrait se baser sur d’autres considérations, mais, à ce stade, il est impossible de passer à d’autres considérations.
Mes services communiquent intensivement avec les autorités slovaques pour aborder ce défi. Néanmoins, il s’agit sans équivoque d’un engagement approuvé par les citoyens de l’Union européenne et les citoyens slovaques lors des négociations d’adhésion; un engagement qui doit être respecté, non seulement du côté de l’UE, mais aussi du côté slovaque. Il s’agit donc d’un défi que nous devons relever ensemble.
En même temps, il y a la grande question de savoir si les ressources financières pour le démantèlement devraient être utilisées à un moment où tous les réacteurs ont été opérationnels et le sont toujours: sans inclure les fonds destinés au démantèlement, le prix revient moins cher. Mais alors qui payera en fin de compte? Les contribuables? D’autres citoyens? C’est vraiment un défi global.
Le débat d’aujourd’hui, à cette heure tardive, est tout à fait pertinent. La Commission a déjà tenté d’élaborer des propositions législatives sur les ressources financières destinées au démantèlement, car elles sont essentielles pour la compétitivité au sein de l’Union européenne et pour clarifier qui devra les payer. Je suis entièrement d’accord que le pollueur devrait payer. Cet aspect devrait être inclus dans le prix.
La Commission va préparer une recommandation et insister sur une utilisation suffisante et transparente des fonds destinés au démantèlement, qui devraient être disponibles en temps voulu. Voilà la vérité élémentaire que nous devrions affronter lorsque nous discutons de l’énergie nucléaire. Quant aux questions de concurrence, elles ne seront certainement pas exclues du débat, car il est capital de savoir quels programmes de soutien nous allons fournir pour d’autres filières de notre approvisionnement en énergie. C’est une question très pertinente.
Je vous remercie vivement pour le débat de ce soir. Je suis heureux qu’il ait été aussi détaillé. Il faudra le poursuivre lorsque nous discuterons des problèmes d’énergie.