Le Président. - Passons au point suivant de l’ordre du jour. Il s’agit des déclarations du Conseil et de la Commission sur la préparation de la réunion informelle des chefs d’État ou de gouvernement à Lahti et également, conformément à la décision de l’Assemblée, sur les relations entre l’Union européenne et la Russie à la suite de l’assassinat d’Anna Politkovskaya.
Paula Lehtomäki, présidente en exercice du Conseil. - (FI) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je souhaite avant tout vous remercier sincèrement de me donner l’occasion de venir ici évoquer le sommet informel des chefs d’États ou de gouvernement de Lahti qui se tiendra le 20 octobre.
Nous avons décidé d’organiser le sommet de Lahti parce que nous voulons donner aux chefs d’État ou de gouvernement des États membres de l’Union européenne la possibilité de tenir un débat ouvert et informel sur deux thèmes importants pour l’avenir de l’Union et pour la réussite économique: l’innovation et les relations énergétiques extérieures.
Nous avons besoin d’une politique ferme et cohérente à l’égard de la création d’un environnement propice à l’innovation et des questions énergétiques. Nous pourrons ainsi améliorer les conditions pour la croissance économique et l’emploi dans l’Union. Si l’Union entreprend des actions tangibles en vue de promouvoir le bien-être et la prospérité, nous pouvons également espérer qu’elle devienne plus acceptable aux yeux de la population. Une politique énergétique commune cohérente renforcerait aussi la crédibilité de l’Union en tant qu’acteur international.
Afin de guider les débats lors du sommet des chefs d’État ou de gouvernement, la Commission est en train de rédiger deux communications. L’une concerne les relations énergétiques extérieures, l’autre, la politique d’innovation. Les communications doivent être rendues publiques demain, le 12 octobre. Elles ne sont pas censées être approuvées lors de la réunion, mais indiquent les questions que nous voulons aborder à Lahti.
Avant le sommet non officiel de Lahti, un sommet social tripartite informel se tiendra également le vendredi matin. La manière dont un marché du travail européen de 200 millions d’employés fonctionnera et s’adaptera au changement est d’une importance cruciale pour l’avenir de l’Europe. C’est la raison pour laquelle les partenaires sociaux ont un rôle vital à jouer dans la réalisation de l’objectif de renforcement de la compétitivité européenne.
Le président russe, M. Poutine, a été invité au dîner qui suivra le sommet des chefs d’État ou de gouvernement. Les échanges avec le président devraient être axés sur le partenariat stratégique entre l’UE et la Russie, y compris la coopération en matière d’énergie.
Les immenses défis que l’Union doit relever dans le domaine de l’énergie - sécurisation de son approvisionnement, changement climatique, hausse continuelle des prix et crises récentes - l’ont incitée à développer une politique énergétique commune pour l’UE.
En ce qui concerne la sécurisation de l’approvisionnement énergétique, la dépendance sans cesse croissante vis-à-vis des importations d’énergie est un enjeu particulier pour l’UE. Si aucune mesure n’est prise, on estime que cette dépendance passera du niveau actuel de 50% à 70% au cours des 20 prochaines années.
Avant que la Finlande ne prenne la présidence, l’évolution d’une politique énergétique commune a été débattue lors de deux réunions du Conseil européen qui se sont tenues au début de l’année. Au cours de la présidence finlandaise, nous nous concentrerons particulièrement sur les relations énergétiques extérieures, et ces échanges de vue prépareront le terrain pour un vaste débat sur l’énergie qui se tiendra au printemps prochain et mènera à l’adoption d’un plan d’action pour la politique énergétique.
Même si les débats de Lahti seront axés sur les relations énergétiques extérieures, notre objectif pour les relations extérieures ne peut évidemment pas être considéré comme une question distincte. Parmi tous les domaines prioritaires mentionnés dans le Livre vert sur la politique énergétique, c’est le contact étroit qui ressort. Les autres domaines incluent le marché unique de l’énergie, la solidarité entre les États membres, la diversification des sources d’énergie, l’efficacité énergétique, les énergies renouvelables et les innovations dans le domaine de l’énergie.
Dans le domaine des relations énergétiques extérieures, les États membres doivent parvenir à une compréhension commune et arrêter un point de vue concernant le type de stratégie à adopter en vue de faire progresser les relations avec les pays extérieurs à l’UE, et le type d’objectifs ouverts communs que l’UE devrait avoir. Cela signifie que les États membres doivent pouvoir s’engager ensemble sur une voie à suivre admise par tous et couvrant aussi les relations bilatérales, et parler d’une seule voix dans ces contextes également. En adhérant à des objectifs communs, l’Union sera aussi mieux préparée à faire face aux changements sur les marchés énergétiques mondiaux.
Lors des débats relatifs à l’énergie de Lahti, nous échangeront des points de vue sur la manière de développer les relations énergétiques extérieures dans un futur immédiat. Les discussions devraient principalement être axées sur trois thèmes. Le premier concerne les principes sur lesquels les relations énergétiques UE-Russie devraient reposer et comment ils devraient être mis en œuvre. Le deuxième concerne les relations plus étroites avec les pays tiers importants sur le plan stratégique. Le troisième concerne une collecte de données plus efficace à la base du processus décisionnel relatif à la politique énergétique commune.
La Russie, dont la part des importations de pétrole et de gaz est de 25%, est le partenaire énergétique de l’UE le plus important sur le plan stratégique. Dans tous les partenariats stratégiques, y compris celui avec la Russie, il est important de trouver quelque chose qui soit dans l’intérêt des deux parties afin de développer le partenariat. L’intérêt commun des relations énergétiques UE-Russie est évident. L’UE est dépendante des importations d’énergie de la Russie et la Russie a besoin de contrats à long terme pour les exportations d’énergie aux prix du marché, ainsi que d’investissements occidentaux dans la production d’énergie de base. Ouvrir le marché des deux côtés sera un facteur clé.
Les débats des chefs d’État ou de gouvernement de l’UE prépareront également le terrain pour les échanges avec le président russe, M. Poutine, plus tard dans la soirée, dont un des thèmes centraux est l’énergie.
L’objectif est de communiquer à la Russie l’objectif de l’UE d’un accord-cadre contraignant dans le domaine de l’énergie qui tiendrait compte des intérêts des deux parties, de la réciprocité et d’un environnement opérationnel impartial. Les discussions feront aussi certainement référence aux enjeux que l’UE et la Russie ont en commun, tels que l’efficacité énergétique, où les deux camps ont tout à gagner.
L’extension des principes énergétiques internes aux régions voisines de l’UE et le développement stratégique des relations avec les pays tiers importants sont des objectifs auxquels nous devons aspirer si nous voulons sécuriser l’approvisionnement énergétique. Quatre-vingt pour cent des ressources mondiales en pétrole se trouvent dans les régions voisines de l’Union. Il existe toute une série d’instruments en vue d’améliorer les relations avec les pays tiers. Parmi eux, les programmes d’action de la politique de voisinage, l’accord sur la coopération énergétique, les accords bilatéraux et ...
(Le président interrompt l’oratrice en raison de problèmes techniques)
La politique énergétique doit être un élément clé de la politique étrangère et de sécurité commune de l’Union. L’Union européenne a besoin d’informations en suffisance afin de pratiquer une politique énergétique plus cohérente. Elle doit en outre pouvoir répondre aux situations problématiques et crises extérieures liées à l’énergie. L’Union devrait mettre en place un système qui contribuerait à renforcer la coopération entre les États membres et les institutions et à accroître la solidarité sur les questions liées à l’énergie.
L’autre thème principal du sommet des chefs d’État ou de gouvernement est l’élaboration d’une politique en matière d’innovation. On doit pouvoir améliorer la manière dont les travaux de recherche réalisés en Europe sont exploités sous la forme de produits et services commerciaux. L’Union doit en outre pouvoir introduire les nouvelles technologies aussi efficacement que dans les pays qui sont nos concurrents. Si nous poursuivons sur la voie actuelle, le fossé entre nous et nos principaux partenaires commerciaux dans le domaine de l’innovation ne fera que s’accroître.
La production, principalement dans les économies en expansion, est en concurrence sans cesse croissante avec l’Europe, non seulement dans l’industrie, mais aussi dans les secteurs des services. La Chine et l’Inde, beaucoup plus que l’UE, forment des personnes possédant un niveau d’instruction élevé au marché du travail. Les marchés des économies en expansion signifient toutefois aussi qu’il existe un potentiel énorme pour les exportations de l’Union. La réussite peut venir simplement de la capacité à créer quelque chose de nouveau - en d’autres termes, de l’innovation.
Dans un marché ouvert, les meilleurs produits sont couronnés de succès. Il est impossible de rester en tête sans investir constamment dans la recherche et le développement de produits. Les États membres de l’Union ont la volonté d’accroître les futurs investissements dans la recherche et le développement en vertu des décisions prises précédemment.
Il est néanmoins vital de veiller à ce que l’Europe puisse faire bon usage des investissements afin que les travaux de recherche mènent à de nouveaux et meilleurs produits et services exploitables commercialement.
Le but du sommet de Lahti est de faire état des problèmes et des enjeux qui demandent une action commune de la part de l’Union. L’objectif est de créer un environnement où les innovations peuvent naître et être adoptées efficacement. Dans sa position sur la stratégie de Lisbonne, le Parlement européen a également souligné l’importance d’une politique en matière d’innovation.
Afin de soutenir une innovation efficace, il faudrait créer une stratégie européenne pour les droits immatériels. Les droits immatériels sont d’une importance majeure pour la réussite et la compétitivité d’une entreprise.
Une question fondamentale, par exemple, est la qualité des brevets, qui est un principe essentiel pour un système de brevets efficace et fiable. La présidence pense que l’Europe doit posséder un système de brevets rentable, mais qui adhère à la notion de qualité, indépendamment du choix d’alternative qui sera à la base du développement de ce système.
Si nous pouvons développer plus avant le système de brevets, les entreprises seront assurées de réaliser des économies considérables sur les coûts des brevets, ce qui ne pourra qu’encourager l’innovation et la recherche en Europe.
Une collaboration renforcée entre les universités et le monde des affaires est une condition préalable à une politique d’innovation efficace. Le but est de créer un nouvel Institut européen des technologies basé sur un réseau. La Commission présentera une proposition à ce sujet la semaine prochaine.
Le projet de partenariat entre la science, les affaires et la formation sera caractérisé par l’excellence. La priorité sera la promotion de l’innovation. La présidence pense que l’Institut européen des technologies permettra à l’Europe d’exploiter les opportunités existantes dans les entreprises et la communauté scientifique de manière plus efficace.
En outre, la coopération entre le secteur public et le secteur privé doit s’intensifier afin de promouvoir la compétitivité. L’Europe a vu la création de ce que l’on appelle les plateformes technologiques, des initiatives de recherche stratégique basées sur les entreprises, qui sont d’excellents exemples de partenariat entre le secteur public et le secteur privé. Les entreprises, et c’est tout à leur honneur, ont indiqué leur volonté d’investir dans leurs plateformes particulières, et un engagement similaire est à présent nécessaire de la part des organes publics finançant la recherche.
Il est très important pour l’innovation d’accélérer la création de normes européennes. Sans une norme européenne commune, de nombreuses innovations pourraient ne pas se réaliser. Que serait, par exemple, devenu le marché européen du téléphone mobile sans la norme GSM?
La création de normes techniques paneuropéennes pour les téléphones mobiles a permis que le leader mondial de ce secteur soit européen. Par ailleurs, si seules des normes nationales avaient été adoptées pour développer les téléphones mobiles, nous n’aurions pas assisté à un tel succès, géographiquement énorme.
L’adoption rapide de normes ouvertes et compatibles est une des clés du succès dans les affaires. Cela aura également des avantages évidents pour le consommateur. Dans le même temps, cela renforcera notre position concurrentielle et sera une réponse au développement technologique rapide, de manière à ce que les solutions de développement technique réalisées en Europe puissent véritablement rivaliser avec le travail de développement réalisé ailleurs dans le monde.
Passons à présent à l’immigration clandestine. C’est un problème qui touche toute l’Union européenne. C’est la raison pour laquelle nous devons trouver des solutions ensemble. La solidarité est la plus visible dans la mise en œuvre efficace de mesures concrètes. Lors du sommet de Lahti, nous discuterons de l’immigration clandestine, qui est devenue un problème spécifique dans la Méditerranée et les régions méridionales de l’Union.
Il est important pour nous que l’Union puisse établir une politique globale efficace en matière de contrôle de l’immigration, une politique qui tienne compte des questions relatives à l’immigration tant clandestine que légale, y compris l’intégration. Nous devons utiliser les instruments existants de manière efficace et réfléchir à de nouveaux moyens d’aider les pays d’origine et de transit dans leurs efforts de prévention de l’immigration clandestine.
Les questions relatives à l’immigration ont été à l’ordre du jour de tous les Conseils «Justice et affaires intérieures». Le sujet sera également évoqué la semaine prochaine au dîner informel des ministres de la coopération au développement. L’objectif est aussi que le travail des Conseils «Justice et affaires intérieures» serve de base à des décisions pour le Conseil européen de décembre qui pourraient aider l’Union européenne à répondre efficacement au problème de l’immigration clandestine.
Lors d’un déjeuner de travail à Lahti, la situation préoccupante du Soudan et du Darfour sera également abordée.
Comme je l’ai dit au début de mon intervention, après le sommet informel des chefs d’États ou de gouvernement de l’UE, les participants dîneront à Lahti en compagnie du président russe, M. Poutine. Cela sera une excellente occasion d’avoir une discussion informelle sur le développement du partenariat stratégique entre l’UE et la Russie. Le spectre de notre association est très étendu et il couvre des éléments qui pourraient servir à développer davantage le partenariat.
Les problèmes de fond internationaux en sont un exemple. L’agenda politique international de cet automne contient des questions pour lesquelles la coopération entre nous est très importante, telles que le Moyen-Orient, l’Iran et le Kosovo.
L’énergie est un élément important dans le partenariat stratégique, et nous espérons entendre l’évaluation de M. Poutine des développements dans le secteur de l’énergie de son pays et du partenariat énergétique entre l’Union et la Russie.
Monsieur le Président, nous avons tous été choqués d’apprendre la nouvelle de la mort de la journaliste et défenseur de la liberté d’expression bien connue, Anna Politkovskaya. Nous demandons qu’une enquête approfondie au sujet de ce crime horrible soit réalisée et que ses responsables soient traduits en justice, chose qui est d’une importance particulière pour l’avancée de la Russie vers un État de droit. La mort de Mme Politkovskaya est non seulement un incident effroyable et une perte pour ses proches, mais c’est aussi un revers pour la liberté d’expression en Russie. Les pourparlers francs et énergiques qui sont en cours entre l’Union européenne et la Russie dans le contexte des événements récents sont en outre un exercice extrêmement utile. Comme je l’ai déjà dit, le partenariat stratégique est un cadre dans lequel toutes les questions importantes seront débattues.
José Manuel Barroso, président de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, le Conseil européen informel de la semaine prochaine arrive à point nommé. Je voudrais remercier la présidence finlandaise, le premier ministre M. Vanhanen et toute son équipe pour leur contribution très importante.
Madame la ministre ayant fait une présentation très complète au nom de la présidence, je me concentrerai sur l’innovation, la politique énergétique et l’immigration. Je ferai également quelques remarques sur les relations entre l’Union européenne et la Russie. Il s’agit de domaines dans lesquels les défis que nous devons relever nécessitent, plus qu’une réponse nationale, une réponse européenne, des défis qui montrent pourquoi, plus que jamais, une Union européenne forte est nécessaire et pourquoi nous avons besoin de l’Union pour équiper les Européens en vue de la mondialisation.
Je salue la décision de la présidence de se concentrer sur l’innovation. La Finlande est un excellent exemple de la manière dont l’innovation peut stimuler la croissance économique. C’est toutefois plus que cela. C’est uniquement en libérant l’imagination des gens que nous pourrons faire face aux problèmes majeurs auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui, tels que le changement climatique, l’exclusion sociale, le changement démographique et le chômage.
Je sais que vous connaissez les chiffres, mais ils valent la peine d’être répétés. Les dépenses de l’Union européenne dans la recherche équivalent à 1,9% de son PIB, contre actuellement 3% aux États-Unis. Il est révélateur que la plupart des récents lauréats du Prix Nobel viennent des États-Unis ou y travaillent. En Europe, environ la moitié de l’ensemble des chercheurs sont employés par des entreprises. Aux États-Unis, ce chiffre est de plus de 80%. La vérité est que l’Europe est à la traîne en termes de recherche et d’innovation. Le statu quo n’est pas une option: nous devons en faire plus dans ce domaine. Il est urgent que nous adoptions une approche stratégique axée sur chaque maillon de la chaîne de l’innovation, de la naissance d’idées et de connaissances nouvelles à leur exploitation et leur commercialisation dans la sphère économique.
La communication que la Commission présentera lors du sommet informel de Lahti expose une telle approche. Elle repère les maillons faibles de la chaîne et propose des solutions. Nous avons besoin de financement, nous avons besoin d’un cadre adéquat en matière de propriété intellectuelle en vue d’apporter les retombées justes et nous devons faire tomber les obstacles à l’innovation secteur par secteur. Nous devons avant tout commencer par un message politique d’engagement fort: l’innovation mérite des encouragements et, pour cela, nous avons besoin d’une approche européenne.
La taille a de l’importance sur cette question. Une des grandes différences entre les États-Unis et nous est que nous ne disposons pas d’institutions paneuropéennes pour l’innovation et la recherche. Les États-Unis souscrivent beaucoup plus à une véritable approche globale. Il y a de grandes institutions soutenant l’innovation à travers tous les États-Unis, pas seulement dans un ou deux États. Jusqu’à présent, nous n’avions rien en Europe. À présent, nous avons le Conseil européen de la recherche et nous proposons la création d’un Institut européen des technologies. Nous proposons un système de réseau afin de conférer à ces institutions une véritable dimension européenne et une véritable mission européenne. C’est la raison pour laquelle nous insistons sur cette approche. En d’autres termes, sur l’importance de l’Institut européen des technologies. Il rapprochera le secteur public et le secteur privé pour la recherche de pointe, deviendra un centre d’excellence internationale, rassemblera les meilleurs cerveaux, mettra à disposition toute une série d’excellents titulaires de doctorats et assurera la promotion des produits des petites et moyennes entreprises innovantes. En résumé, il pourra devenir un symbole de la capacité de l’Europe à collaborer et à innover. Nous avons mis au point les moindres détails de l’IET ces derniers mois et nous présenterons une proposition détaillée la semaine prochaine. Je suis sûr que les chefs d’État ou de gouvernement, ainsi que les députés ici présents, la considéreront dans l’esprit dans lequel elle est conçue: oui, il s’agit de quelque chose de différent, mais quelque chose qui peut donner l’exemple d’une Europe prenant une direction nouvelle et trouvant de nouvelles manières de collaborer.
Un des domaines dans lesquels je pense que, en tant que dirigeants européens, nous pouvons confier une mission à un Institut européen des technologies est celui de l’énergie et du changement climatique. Lorsque nous avons un problème à résoudre pour lequel nous avons besoin d’aide, nous devrions demander aux meilleurs scientifiques, aux meilleurs cerveaux de notre continent. L’énergie est un des défis les plus importants que nous ayons à relever aujourd’hui.
Permettez-moi à présent de me tourner vers la question de l’énergie et de m’exprimer sans fioritures: nous devons créer une politique énergétique véritablement européenne, pas 25 politiques énergétiques. Il est absurde au XXIe siècle de se fonder sur 25 ou 27 politiques énergétiques. Nous avons besoin d’une politique énergétique véritablement européenne. Les problèmes auxquels nous sommes confrontés - prix de l’énergie élevés, changement climatique, dépendance croissante vis-à-vis des hydrocarbures importés - sont des problèmes mondiaux et européens. Ils nécessitent des solutions européennes. Les solutions nationales ne suffiront pas. L’année dernière, à Hampton Court, les dirigeants de l’Union européenne se sont mis d’accord pour développer une approche commune. Dans notre livre vert de mars 2006, la Commission a défini des objectifs clairs pour une politique énergétique européenne, une durabilité à long terme, la sécurité de l’approvisionnement énergétique et la compétitivité économique. Les États membres ont approuvé notre approche et la réaction des parties concernées par notre livre vert a été très largement positive. La prochaine étape est un examen stratégique dans le domaine de l’énergie, que la Commission proposera au tout début de l’année prochaine. Je me réjouis de lire le rapport du Parlement à ce sujet.
Il est évident que nous avons besoin de cohérence entre les aspects intérieurs et extérieurs de la politique énergétique. Nous avons clairement besoin d’un marché intérieur de l’énergie efficace. Avoir 25 ou 27 mini-marchés de l’énergie différents n’est pas la réponse aux défis énergétiques européens. Nous devons néanmoins lier la politique intérieure et la politique extérieure. Notre document pour Lahti considèrera les trois défis extérieurs: la Russie, sur laquelle je reviendrai, le développement de nos relations énergétiques avec nos voisins, et la création d’un réseau en vue de faire face aux chocs énergétiques extérieurs. Il est essentiel de bâtir une coopération dans le domaine de l’énergie avec des pays d’approvisionnement et de transit stratégiquement importants. C’est déjà le cas grâce à des initiatives telles que le nouveau traité pour la Communauté de l’énergie et le mémorandum d’accord de coopération dans le domaine de l’énergie avec l’Ukraine. Nous devons progressivement étendre les principes du marché intérieur de l’énergie à notre voisinage. Nous devons également relier les différents domaines de spécialisation qui existent à travers l’Europe afin de créer un réseau plus efficace pour faire face aux chocs énergétiques extérieurs. Bien sûr, à moyen terme, la meilleure manière de faire face à ces chocs énergétiques est la diversité: la diversité de sources d’énergie, de pays d’origine et de pays de transit. Aussi, nous devons accorder une place importante à l’énergie dans nos relations avec nos partenaires du monde entier.
Enfin, l’efficacité énergétique est un autre élément crucial de cette stratégie. Je peux vous annoncer aujourd’hui que la semaine prochaine, le commissaire Piebalgs - le commissaire en charge de l’énergie - et moi-même proposerons un plan d’action ambitieux en vue de tenir notre engagement d’économiser 20% d’utilisation d’énergie primaire à l’horizon 2020.
Naturellement, avec 25% du pétrole et du gaz consommés dans l’Union européenne provenant de Russie, la coopération dans le domaine de l’énergie avec la Russie est cruciale. La présidente en exercice du Conseil vient juste d’expliquer pourquoi cela est important. Nous devons avoir un partenariat renforcé avec la Russie dans le domaine de l’énergie. Ce partenariat doit être basé sur la réciprocité, la transparence, la non-discrimination et l’ouverture à la concurrence, y compris des conditions équitables pour l’investissement en amont et en aval. C’est le seul moyen d’obtenir une plateforme stable et sûre pour notre relation dans le domaine de l’énergie. La réunion avec le président Poutine sera une chance de faire passer un message clair et, je l’espère, cohérent, de la part des dirigeants de l’Union européenne.
Nous voyons trois objectifs à long terme dans nos relations avec la Russie: nous voulons voir une démocratie fonctionnelle et une économie de marché dans laquelle la Russie tient les engagements internationaux qu’elle a pris; nous voulons voir une relation UE-Russie étendue et stratégique, basée sur l’interdépendance - la Russie a besoin de l’Union européenne et l’Union européenne a besoin de la Russie - et nous voulons renforcer notre coopération avec la Russie sur les problèmes de fonds internationaux. Lorsque nous parlons de multilatéralisme efficace, c’est ce que nous voulons dire. L’objectif que nous nous sommes fixé est un accord de portée large pour faire suite à l’actuel partenariat et accord de coopération. Il y a des bénéfices mutuels à réaliser dans des domaines tels que l’investissement et l’ouverture de marché, ainsi que dans ceux de l’énergie et de l’efficacité énergétique. Nous avons tous deux tant à gagner d’un véritable partenariat.
Je saisis également cette opportunité pour exprimer mes plus profondes condoléances à la famille de Mme Politkovskaya, qui a été si brutalement assassinée la semaine dernière. Je veux rendre hommage à son insatiable quête de vérité. Elle était un fervent défenseur de la liberté d’expression en Russie.
(Applaudissements)
J’espère sincèrement que les auteurs de ce crime monstrueux seront trouvés et traduit en justice.
Un autre point que nous allons aborder est celui de l’immigration. L’arrivée massive d’immigrants clandestins aux frontières des États membres du sud de l’Union européenne est un problème européen qui nécessite une solution européenne. En novembre 2006, la Commission a présenté une communication comprenant une série de propositions techniques en vue de permettre à l’Union européenne de faire face à ce problème. Sur cette base, le Conseil européen a adopté une approche globale des migrations décrivant en détail comment réagir dans ses politiques intérieures et extérieures. En moins d’un an, nous avons assisté au lancement de nombreuses actions pratiques: des opérations conjointes en Méditerranée et dans l’Atlantique coordonnées par l’agence des frontières, Frontex, une coopération renforcée des services répressifs des États membres, une meilleure coordination du travail des bureaux de liaison dans le domaine de l’immigration en Afrique, et un dialogue tant bilatéral que multilatéral avec les principaux pays africains d’origine et de transit. Pour la première fois, les États membres collaborent dans le cadre d’opérations conjointes visant à protéger les frontières extérieures de l’Union européenne coordonnées par Frontex. Soyons cependant honnêtes: ce n’est pas suffisant. Beaucoup plus d’actions sont nécessaires afin de lutter efficacement contre les flux d’immigrants clandestins.
Afin de renforcer la capacité de réaction de l’Union européenne, il est de la plus haute importance que tous les États membres de l’Union collaborent dans un esprit de solidarité, en particulier en vue d’aider les États membres qui se trouvent, dirons-nous, en première ligne. Dans la perspective du Conseil européen informel de Lahti le 20 octobre, j’ai écrit personnellement aux chefs d’État ou de gouvernement en soulignant la nécessité d’une telle solidarité. L’idéal serait bien sûr d’avoir déjà mis en place les instruments communautaires, mais nous ne les avons pas encore. L’idéal serait bien sûr d’avoir une politique d’immigration européenne. Il est absurde d’avoir 25 ou 27 politiques d’immigration sur un territoire dans lequel la population peut se déplacer librement, car les décisions prises par un pays ont un effet direct sur les autres pays. Mais jusqu’à ce que nous ayons une véritable méthode communautaire en vue de faire face à ces problèmes, nous espérons au moins des États membres qu’ils coopèrent les uns avec les autres.
(Applaudissements)
Je pense que c’est également un exemple pratique de solidarité européenne.
Nous devons également travailler de manière plus intensive avec les pays d’origine et de transit. La mise en œuvre du plan d’action adopté à Rabat en juillet est une priorité clé. La Commission travaillera dur pour veiller à sa mise en œuvre efficace en étroite collaboration avec les pays concernés. Soyons également honnête à cet égard. La sécurité ne suffit pas. La solution à ce problème n’interviendra qu’avec notre soutien au développement durable en Afrique. Je pense d’ailleurs que nous devons nous engager dans un dialogue de haut niveau avec les pays africains. N’est-il pas étrange que l’Union européenne entretienne un dialogue avec l’Asie et l’Amérique latine au niveau des chefs d’État ou de gouvernement, mais pas avec l’Afrique? N’est-il pas à présent temps pour l’Europe de s’engager à établir un dialogue de haut niveau avec l’Afrique? Je pense qu’il est de notre droit et de notre devoir de le faire. C’est le message que j’ai reçu récemment de nos homologues de la Commission de l’Union africaine à Addis-Abeba. C’est la raison pour laquelle nous prenons également activement part - via notre coopération avec nos partenaires africains - à l’examen collectif de cette question.
Sur le plan européen, nous avons également besoin d’un processus décisionnel au niveau de l’Union européenne. Lorsqu’il y a des problèmes urgents et sérieux, l’Union européenne doit être capable de réagir de manière appropriée. Cela signifie recourir à la clause passerelle de l’article 67 du Traité. Nous ne pouvons pas nous priver des moyens d’entreprendre une action efficace.
Pour conclure, le Conseil européen informel de Lahti offre une bonne occasion de faire le bilan des actuelles actions de l’Union européenne dans les domaines que j’ai abordés et dans plusieurs autres domaines également. Nous nous attendons à ce que les chefs d’État ou de gouvernement renouvellent leur engagement d’apporter des solutions aux problèmes réels et urgents des citoyens de l’Union européenne et d’offrir une Europe de résultats afin que nous puissions bénéficier de davantage de confiance pour résoudre certains des problèmes très importants de notre Union.
Permettez-moi de vous faire part d’une dernière pensée. Il y a une semaine, j’étais au Darfour. Parmi les conditions terribles dans lesquelles la population vit, j’ai vu quelque chose que j’ai décidé de confier à mes amis de retour à Bruxelles: dans les ONG et autres organisations humanitaires, il y a tant de jeunes Européens, si loin de leurs foyers, mettant chaque jour leur vie en danger pour aider les Africains. C’est le genre d’Europe dont, selon moi, nous devrions être fiers, une Europe prête à apporter solidarité et aide, montrant beaucoup de courage. C’est le genre d’Europe que, je pense, nous voulons tous: une Europe ouverte, tournée vers l’extérieur, généreuse. C’est l’Europe pour laquelle nous devrions nous battre.
(Applaudissements)
Françoise Grossetête, au nom du groupe PPE-DE. - Monsieur le Président, Madame la Présidente du Conseil, Monsieur le Président de la Commission, nous sommes bouleversés et révoltés par l’assassinat d’Anna Politkovskaïa et nous nous posons de nombreuses questions sur les raisons qui ont poussé à ce crime. Il est indispensable que les autorités russes puissent faire au plus vite toute la lumière sur ce drame et nous attendons du Conseil un message de fermeté face à ce nouveau coup porté à une profession qui, chaque année, paie un lourd tribut à son exercice. Qu’il me soit permis de rendre hommage, à travers Anna Politkovskaïa, à tous les journalistes qui, dans le monde entier, risquent leur vie pour défendre la liberté d’expression, à laquelle nous sommes tant attachés.
Le Conseil informel de Lahti du 20 octobre prochain sera une fois de plus l’occasion de soulever des questions récurrentes, comme celles de la compétitivité, de l’innovation, de l’immigration et de la politique énergétique. Je crains que compétitivité et innovation ne subissent le même sort que le développement durable: tout le monde en parle, tout le monde y adhère, mais quand il s’agit de faire du concret, les bons principes s’envolent. Les exemples sont nombreux. Je pourrais citer celui de Galileo dont on a tant vanté l’utilité, mais quand il a fallu en prévoir le budget, tout à coup ce n’était plus une priorité.
Concernant les infrastructures de transport et les liaisons ferroviaires, on en prône la réalisation au nom de la compétitivité, mais on les sacrifie sur l’autel budgétaire. Que dire des ambitions affichées en matière de recherche quand on voit le soutien réel apporté à l’innovation! Je ne songe pas uniquement à l’aide financière, mais également à l’application des législations qui encouragent l’investissement en Europe et qui ouvrent à nos PME le chemin de l’exportation en dehors des territoires européens. J’attends donc beaucoup de l’engagement du Conseil en faveur de l’Institut européen de technologie, auquel je sais notre président de la Commission, M. Barroso, très attaché, comme notre Parlement d’ailleurs. En effet, ce ne sont plus des engagements forts que nous attendons du Conseil mais des réalisations.
La compétitivité c’est aussi le résultat des réglementations que nous adoptons, lesquelles doivent être des chances et non des contraintes. J’attends de la Commission européenne qu’elle parte de ces principes pour présenter son programme législatif 2007 et que le Conseil suive cette tendance. J’attends du Parlement qu’il ose dire non à des propositions qui ne font que brasser de grandes idées sans réalisations concrètes. Les politiques aussi ont le devoir d’être compétitifs, et donc efficaces.
La compétitivité c’est encore la recherche de l’équilibre commercial à l’échelle mondiale. Les mesures contre le dumping vont certes dans ce sens, mais ne pourrions-nous pas avoir d’autres décisions politiques fortes, notamment exiger des normes de qualité équivalentes pour tous les produits importés au sein de l’Union européenne?
Enfin, sur la question énergétique, j’espère que les discussions avec le président Poutine permettront à l’Europe de mettre en place toutes les structures nécessaires pour garantir son indépendance énergétique. Il faut qu’elle puisse aussi se doter de sources d’énergie renouvelable pour assurer son indépendance énergétique au côté de l’énergie nucléaire.
PRÉSIDENCE DE MME ROTH-BEHRENDT Vice-présidente
Martin Schulz, au nom du groupe PSE. - (DE) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, je vous suis reconnaissant, Madame la Présidente en exercice du Conseil, ainsi qu’à vous, Monsieur le Président de la Commission, pour votre description très complète des sujets dont vous comptez discuter lors du sommet informel. Comme il arrive si souvent lorsqu’un sommet est prévu, nous plaçons en celui-ci de grandes espérances. Mme Lehtomäki et M. Barroso nous ont dit de merveilleuses choses concernant l’innovation, l’immigration, la politique énergétique, le partenariat avec la Russie, ainsi que le Darfour. Tout l’éventail de nos préoccupations a été déployé devant nous en quelque quarante minutes et, à présent, je trouve difficile de réagir à tout cela avec la brièveté nécessaire.
Si nous entendons, après le sommet, un résumé de quarante minutes de ce qui s’y est passé, qui soit tout aussi rempli des réalisations et des décisions obtenues, je serai un homme heureux. Cependant, j’éprouve dans un coin de ma tête la crainte que nous fassions la même expérience que d’habitude, car nous sommes doués pour décrire nos problèmes, mais nous trouvons un peu plus difficile de les résoudre. Le président de la Commission a raison de dire que les investissements dans l’innovation sont indispensables, non seulement ici, mais dans tous les États membres, et particulièrement dans la recherche sur des technologies à haute efficacité énergétique et dans le développement de celles-ci.
Une des décisions à long terme cruciales que nous devrons prendre au cours des prochaines années concerne la question de savoir si une plus grande efficacité énergétique nous permettrait de faire face à la croissance exponentielle de la demande d’énergie dans le monde. Il vaut la peine de remarquer qu’une efficacité énergétique accrue implique aussi que nous abandonnions l’économie fondée sur l’extravagance, par des moyens comme des évolutions technologiques et des investissements dans la recherche qui contribuent au développement de produits réduisant la consommation d’énergie au lieu de l’accroître. L’Europe est le continent qui doit montrer la voie à suivre et le bon exemple dans ce domaine, c’est pourquoi vous avez raison de dire que notre politique d’innovation doit accorder la priorité à l’innovation en matière énergétique.
Je voudrais dire ensuite que le président de la Commission et la présidente en exercice du Conseil ont raison de souligner que l’immigration est un problème crucial. Cependant, la façon dont on traite ce problème actuellement ne fait rien pour le résoudre, et je suis très reconnaissant à M. Barroso de l’avoir décrit de façon si imagée. Je ne veux pas redire ce que d’autres viennent de souligner, à savoir que le développement durable dans ce que nous appelons le tiers-monde traite les causes du problème de l’immigration, mais les frontières externes dans le sud et l’est de l’Europe sont des frontières que nous partageons tous; ceux qui parviennent à entrer sur notre territoire sont libres de se déplacer dans tout l’espace Schengen. Les États membres ne peuvent donc pas dire qu’ils vont résoudre eux-mêmes ces problèmes ou qu’ils se limiteront à les aborder au niveau intergouvernemental, mais qu’ils ne permettront aucun transfert de compétences à Bruxelles. Le gouvernement de mon propre pays, que vous avez rencontré aujourd’hui, M. Barroso, n’est pas le moins visé par ces paroles. L’Allemagne doit elle aussi comprendre que ce genre de choses est tout simplement inacceptable; c’est là une leçon qui doit être tirée même par le ministre allemand de l’intérieur.
Permettez-moi d’ajouter ma pierre à ce qui a été dit à propos de notre politique concernant la Russie. La stratégie que nous sommes en train d’adopter, avec la Russie, constituera la base d’un accord de coopération renouvelable avec ce pays. Il est clair que des débats comme celui d’aujourd’hui, en rapport avec l’affaire Anna Politkovskaïa, seront toujours des affaires sensibles. M. Saryusz-Wolski, par exemple, qui m’écoute si attentivement, fait partie de ceux qui se mettent dans tous leurs états dès qu’il s’agit de la Russie. C’est donc notamment à lui que j’adresse ce que j’ai à dire. N’y a-t-il pas actuellement en Russie beaucoup de choses qui ne nous plaisent pas? C’est sûr, nous voulons, comme vous l’avez dit, qu’une démocratie fonctionnelle et une économie de marché prévalent en Russie, mais il y a une chose dont nous ne devons pas douter. En dehors de la question de savoir si nous renforçons ou étendons la démocratie russe, la Russie, même telle qu’elle est constituée aujourd’hui, est un partenaire stratégique indispensable pour l’Union européenne.
Permettez-moi donc d’affirmer que nous devons en effet parler de l’état de la démocratie en Russie, mais que nous ne pouvons pas nous adresser à ce pays à la manière condescendante d’un donneur de leçons. Il doit être clair pour nous tous que la Russie sera sans aucun doute un partenaire nécessaire dans la politique énergétique, et par-dessus tout dans la résolution de conflits dans le monde entier - que ce soit en Iran, au Moyen-Orient ou ailleurs -, qu’elle s’efforcera de coopérer sur un pied d’égalité avec nous, avec les mêmes droits, et que nous devons concéder un statut égal à la Russie comme à tous nos autres partenaires. Donc, je considère le dialogue sur la démocratie comme indispensable, mais il doit se baser sur une évaluation réaliste de la situation.
J’apprécie beaucoup ce qu’a dit le président de la Commission sur le Darfour. Cette situation montre - et ce n’est pas la première fois - à quel point il est vital que l’Union européenne, en jouant son rôle de pacificatrice, rassemble les gens par-delà les frontières religieuses, ethniques et nationales et, au moyen de cette intégration, encourage la paix. Voilà quelque chose à exporter; si vous permettez au reste du monde de l’avoir, c’est digne d’approbation.
Graham Watson, au nom du groupe ALDE. - (EN) Monsieur le Président, Madame la Présidente en exercice du Conseil, les démocrates et les libéraux vous adressent leurs bons vœux pour Lahti. Une présidence lors de la seconde moitié de l’année n’est jamais facile, et les pourparlers informels avec 25 chefs de gouvernement autour d’une table sont difficiles à imaginer. Je parie que vous ne pouvez même pas les faire entrer tous dans un seul sauna!
À votre ordre du jour figureront des questions importantes aussi diverses que l’énergie, l’innovation et les migrations; cependant, comme vous dites, le point essentiel sera de divertir le président de la Fédération de Russie. Nous croyons que les États membres doivent faire bloc derrière le drapeau de l’Union pour condamner les atteintes à la liberté et à la propriété privée dans ce pays où, une fois de plus, une flamme de pensée indépendante vient d’être éteinte. Il est évident que M. Poutine a étudié la maxime de Machiavel: «tels princes ont fait de grandes choses qui de leur parole ont tenu peu compte, et qui ont su par ruse manœuvrer la cervelle des gens; et à la fin ils ont dominé ceux qui se sont fondés sur la loyauté». Si le président Poutine concède que le meurtre d’Anna Politkovskaïa jette une ombre sur son pays, il omet d’ajouter que 40 autres journalistes y ont été assassinés au cours des dernières années.
(Applaudissements)
Les démocrates et les libéraux rendent hommage à Anna Politkovskaïa. Entre autres critiques sur l’état de la liberté et de la démocratie en Russie, elle a écrit, dans un livre intitulé La Russie selon Poutine: «C’est indéniable, la stabilité est revenue en Russie. Une stabilité monstrueuse, telle que personne ne demande plus justice devant des tribunaux serviles et partiaux; telle que seul un fou oserait encore réclamer la protection des forces de l’ordre gangrenées par la corruption. La loi du talion remplace désormais le droit dans les esprits et dans les actes. Le président lui-même», continue-t-elle, «a montré l’exemple en démantelant notre principale compagnie pétrolière, IOUKOS, après avoir mis en prison son directeur, Mikhaïl Khodorkovski. Poutine considérait que Khodorkovski lui avait fait un affront personnel, c’est pourquoi il s’est vengé».
Madame la Présidente en exercice du Conseil, la Russie a besoin de l’Union européenne autant que l’Union européenne a besoin de la Russie. Ils ont besoin de notre marché pour le pétrole et le gaz. Nous sommes leur plus gros client. Alors, laissez nos chefs d’État ou de gouvernement parler à M. Poutine de pétrole et de gaz, mais ne leur faites pas mâcher leurs mots à propos de son régime de plus en plus dictatorial. Faites-les aussi se préparer à une vie sans dépendance vis-à-vis de la Russie par une réflexion commune sur l’énergie et l’environnement. En cette semaine au cours de laquelle Al Gore a fait la promotion de son film sur la «vérité qui dérange» qu’est le changement climatique, notre politique énergétique doit en tous cas refléter la nécessité urgente de changer de direction.
Lahti est la suite de Hampton Court il y a un an, où les dirigeants avaient approuvé des plans pour créer un marché européen de l’énergie, accroître la compétitivité et les niveaux d’enseignement et faire face à la pression croissante des migrations. Ces 12 derniers mois, l’urgence de l’action dans tous ces domaines s’est accrue. La Commission a justement identifié les besoins, mais les États membres continuent à refuser les moyens. La Commission propose un véritable marché intérieur de l’énergie, avec le découplage des réseaux comme nous l’avons fait pour les télécommunications, la création d’un observatoire pour contrôler les stocks, le développement d’un bouquet énergétique plus durable et la réalisation d’économies d’énergie. Nous saluons ces propositions, mais il faut que le Conseil s’y attelle. M. Barroso veut un institut européen de technologie. Allez-y, si vous pouvez réunir l’argent! Les migrations sont présentées, d’une part, au moyen de données montrant que nous devons encourager les migrations de main-d’œuvre et de compétences et, d’autre part, au moyen de gros titres dans les médias attisant des craintes populistes vis-à-vis de travailleurs invités non désirés s’emparant des emplois et des allocations.
Pour réussir, le Conseil doit agir efficacement et, pour cela, il a besoin des dispositions de la «clause passerelle» de l’article 43. J’espère que la présidence finlandaise continuera à faire pression en ce sens. Nous soutenons la présidence finlandaise et son approche modeste et pragmatique des affaires européennes. Cependant, Madame la Présidente en exercice du Conseil, nous craignons que vous ne soyez déjà éclipsée par la future présidence allemande. Des questions sont reportées, des dirigeants étrangers courtisent Mme Merkel. Le ministère des affaires étrangères allemand s’empare de la barre. N’attendons pas trop de l’Allemagne, ni trop peu de la présidence finlandaise. Celle-ci doit montrer que, comme le dit la chanson des Monty Python, «la Finlande a tout»!
Daniel Cohn-Bendit, au nom du groupe des Verts/ALE. - (DE) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, Anna Politkovskaïa est venue dans ce Parlement à deux reprises, à l’invitation de notre groupe, pour nous parler de la situation en Tchétchénie et de l’état de la liberté d’expression en Russie.
Je pense réellement qu’il est grand temps de citer des noms. Quelqu’un a dit que les coupables devaient être condamnés. Eh bien, vous dînerez ce soir avec l’un d’entre eux, avec le président Poutine lui-même. Arrêtons de nous mentir constamment à nous-mêmes. La Russie est à présent soumise à un système engagé dans la réduction au jour le jour de la liberté d’opinion; des journaux sont achetés puis disparaissent de la scène, et leurs propriétaires sont jetés en prison. Cela a lieu sans cesse.
(Applaudissements)
M. Schulz a raison; nous avons effectivement besoin de la Russie, mais nous devons être conscients du fait que la Russie avec laquelle nous devons traiter est une Russie qui n’hésite pas à faire disparaître des gens de la circulation, et je peux prédire comment cette histoire tournera, parce qu’elle a déjà été écrite dans un livre qui sortira prochainement, intitulé La journée de l’opritchnik et que je vous engage vivement à lire. L’auteur y décrit, du point de vue d’un officier des services de sécurité, les choses qui se passent en Russie aujourd’hui, et nous les lirons: nous lirons comment un petit malfrat, un petit trafiquant de drogue quelconque se fera prendre, sera condamné à «vie», emmené dans une prison de l’autre côté de l’Oural, et qu’alors ils diront: «Regardez, nous en avons attrapé un!». Cependant, ceux sur l’ordre desquels le crime a été commis, ceux qui ont fourni l’argent - comme nous l’avons vu avec les quarante autres journalistes et les journaux - ne feront l’objet d’aucune question, parce que personne ne s’y intéressera, car - comme nous l’avons vu hier soir à la télévision allemande lors de sa rencontre avec la chancelière Merkel - nous avons besoin de Vladimir Poutine. Et pourquoi avons-nous besoin de Vladimir Poutine? Parce que nous - je veux dire par là l’Allemagne, avec sa grande coalition de rouges et de verts qui a conclu un traité impossible avec la Russie et évité l’européanisation de la politique énergétique - avons établi un lien avec la Russie. Même dans ces conditions, il est nécessaire de donner des noms, et peut-être pourrons-nous alors arriver à quelque chose.
Oui, bien sûr, il faut des négociations avec la Russie, mais je suis fermement convaincu qu’il est temps - à nouveau - que nous adoptions l’attitude nécessaire; oui, bien sûr, nous pouvons rire lorsque Schalke 04 est acheté par Gazprom, lorsque Chelsea est acheté par Roman Abramovitch; nous pouvons trouver tout cela amusant, tout comme nous jugeons fantastique que M. Poutine soit avec nous partout et vienne regarder les matchs de la ligue fédérale tous les samedis; le seul problème est que le prix que nous payons est celui que le peuple russe a payé, tout comme le peuple tchétchène, à savoir le prix que vous payez pour cohabiter, sans plus, avec un des systèmes les plus dangereusement oppressifs qui soient, lui sourire gentiment et, sinon, détourner le regard. Je trouve simplement honteux que nous détournions le regard. Nous disons à quel point nous sommes horrifiés, puis nous revenons sur Terre et disons: «Oh, Vladimir, pensez-vous que vous avez un problème? Pourquoi faites-vous cela? Mais c’est bien que vous payiez vos factures plus rapidement». Alors tout va bien. Telle est notre attitude.
Tout ce que je peux dire, en résumé, c’est que nous ne résoudrons les questions énergétiques, la question de l’immigration et tous les autres problèmes que si - et c’est en cela que M. Watson a raison -, à un certain moment, nous parlons franchement des problèmes et disons honnêtement ce que nous ferons ou ne ferons pas. Je pense que nous devons négocier avec Poutine, mais cela ne signifie pas que nous devions dîner avec lui comme avec un copain.
Esko Seppänen, au nom du groupe GUE/NGL. - (FI) Madame la Présidente, Madame la Ministre Lehtomäki, le gouvernement finlandais voulait tenir un sommet européen en Finlande, probablement dans l’objectif de transmettre les bonnes nouvelles sur l’excellente compétitivité finlandaise aux autres. Le temps a passé et a amené d’autres questions à l’ordre du jour et, à la grande joie de la Finlande, le président russe participera au dîner organisé pour les chefs d’État ou de gouvernement. La question de l’enquête sur le meurtre de la journaliste Anna Politkovskaïa devrait y être évoquée pour vérifier que l’État de droit en Russie fonctionne véritablement.
(Applaudissements)
Au nom du néolibéralisme, les forces de la droite européenne veulent briser et écraser de bons systèmes éducatifs et le bon système de sécurité sociale. J’invite le gouvernement finlandais à dire à ces néolibéraux européens que les services publics sont le secret de l’excellente compétitivité finlandaise. Veuillez leur dire aussi que la forte libéralisation des marchés de l’électricité dans les pays nordiques a fait augmenter le prix de l’électricité, et que c’est l’État, pas le marché, qui doit assumer la responsabilité de la sécurité énergétique. Ne revenez pas sans cesse sur les objectifs de Lisbonne. L’UE ne sera pas l’économie de la connaissance la plus compétitive du monde en 2010. Une économie bâtie sur des rêves rappelle celle de M. Krouchtchev, qui, il y a 50 ans, avait promis devant les Nations unies que l’Union soviétique dépasserait le niveau de vie des États-Unis d’Amérique en 10 ans.
Notre groupe n’arrive pas à comprendre l’initiative prise par le gouvernement finlandais de ratifier la défunte Constitution de l’UE. Je voudrais dire à mon gouvernement: vous êtes opposés à des forces contraires, comme vous l’étiez lorsque vous avez insisté pour que l’UE décide d’un code pénal commun à la majorité qualifiée. Ainsi, vous effaceriez la mémoire historique des nations. Je transmets mes salutations à la Première ministre, Mme Lehtomäki. Gardez la tête haute pour le restant du mandant présidentiel. Vous pourriez même essayer de penser parfois par vous-même, au lieu de toujours, en quelque sorte, chauffer la salle pour la prochaine présidence, qui est bien plus importante que la Finlande. À M. Barroso, je voudrais dire que dans certains cas, il n’y a pas de base juridique adéquate pour mettre en œuvre ses idées très ambitieuses, bien qu’il y ait certainement de la place dans le monde pour des idées ambitieuses.
Brian Crowley, au nom du groupe UEN. - (EN) Madame la Présidente, je voudrais me joindre à mes collègues pour remercier la présidente en exercice du Conseil et le président Barroso pour leurs présentations d’aujourd’hui. Je traiterai d’abord les questions faciles, puis je passerai aux points plus difficiles qui attendent le sommet.
Nous avons le droit de dire aux Russes que nous exigeons des normes de leur part en ce qui concerne la liberté d’expression, la liberté de responsabilité et la liberté et la sécurité de la vie humaine lorsque des gens remettent en question et défient l’autorité. Comme M. Watson l’a dit a raison, 40 journalistes ont été tués en Russie au cours des deux dernières années et demie. Il est intéressant de constater que personne n’a été arrêté en rapport avec ces 40 morts, ni condamné. Si nous nous attendons à ce que des actions soient soudainement entreprises à cause de la récente et horrible mort par balles d’Anna Politkovskaïa, je pense que nous sommes comme des autruches, la tête dans le sable. Ce n’est que lorsque qu’un réel engagement et un véritable dialogue auront lieu avec la Russie que nous pourrons garantir une relation d’égalité entre l’UE et ce pays, malgré notre dépendance énergétique vis-à-vis de lui, malgré sa dépendance vis-à-vis de nous pour les marchés, et malgré l’interaction qui existe en termes géopolitiques entre lui et l’Europe orientale.
Je pense qu’il nous faut maintenant vraiment faire preuve de courage en fixant des normes et orientations claires sur ce que nous attendons de nos partenaires en ce qui concerne leurs relations. Il ne s’agit pas seulement de la mort de la journaliste, aussi affreuse qu’elle soit, il ne s’agit pas seulement de la Tchétchénie: il s’agit aussi de la façon dont la Russie a traité la Géorgie récemment et de ce qu’elle a fait. Tandis que les autorités russes condamnent d’une part les combattants de la résistance tchétchènes, ils soutiennent d’autre part les «combattants de la résistance» dans certaines parties de la Géorgie. Elles ont soumis l’économie de la Géorgie à une tension intense, non seulement en termes économiques, mais aussi en termes humains, en déportant des centaines de milliers de Géorgiens de Russie vers leur pays d’origine, en leur refusant l’accès à l’éducation et à des entreprises qu’ils possèdent et contrôlent légitimement en Russie. Tout cela au nom d’un «éclaircissement».
Le prochain point que je voudrais développer concerne l’institut européen de la technologie, de la recherche et du développement, et ce qui est nécessaire à cette fin. Je suis un fervent partisan du plan du président Barroso en ce qui concerne la nécessité pour l’Europe de prendre la direction des opérations et de faire un bond en avant, du XXe siècle au XXIIe, en matière de recherche et de développement, ainsi que d’investissements dans la technologie.
Mais d’abord, avant que cela puisse avoir lieu, nous devons nous assurer que les droits de propriété intellectuelle et les droits de brevet soient protégés pour permettre à l’innovation d’exister, pour permettre que des investissements soient réalisés. Il est facile de construire la structure d’un bâtiment pour héberger un institut de technologie. Il est plus difficile de mettre en place le cadre législatif qui l’autorise.
Enfin, Madame la Présidente - si je peux bénéficier de la même latitude que les autres présidents de groupes -, lorsque nous parlons d’énergie, de politique énergétique commune et de besoins énergétiques, une des plus grandes opportunités que nous nous refusons est l’énergie renouvelable que nous pouvons créer et faire croître sur notre terre. Lorsque les agriculteurs souffrent à cause des mauvais accords passés par Peter Mandelson dans les négociations de l’OMC, ou que l’agriculture est menacée, nous devons investir dans les énergies renouvelables.
Jens-Peter Bonde, au nom du groupe IND/DEM. - (DA) Madame la Présidente, l’ami danois d’Anna Politkovskaïa ne peut pas obtenir de visa pour la Russie, et j’ai demandé à M. Solana d’évoquer ce problème en temps opportun.
Je me tourne à présent vers la présidence finlandaise. J’aime la Finlande. Je m’assieds sur des sièges et mets des fleurs dans des vases dessinés par Alvar Aalto, j’utilise un téléphone Nokia. Je respecte les politiciens finlandais depuis ma jeunesse et j’ai coopéré avec votre ministre des affaires étrangères au sein de l’EEE et avec votre Premier ministre au sein de la Convention. Aujourd’hui, je dois vous demander, avec un certain désarroi: qu’est-il arrivé à la Finlande? Comment, au nom du ciel, les politiciens finlandais peuvent-ils se persuader de ratifier une Constitution qui a été rejetée en France et aux Pays-Bas et qui donc n’existe plus? Est-il vrai que ce sont les membres du groupe parlementaire du parti du centre qui doivent voter contre leur propre conviction? La grande majorité des électeurs finlandais sont opposés à la constitution, mais vous la faites passer en force sans référendum. Honte à vous! Au lieu de vous soumettre à M. Vanhanen et d’adopter une nouvelle politique de finlandisation par laquelle la Finlande se change en un dix-septième État allemand, vous devriez recommencer depuis le début avec une nouvelle convention directement élue, des référendums dans tous les pays et un document en faveur duquel l’électorat pourrait voter avec joie.
La Finlande détient actuellement 7,8 % des voix nécessaires pour obtenir une minorité de blocage au Conseil de ministres, donc les autres pays sont obligés de l’écouter. C’est précisément pourquoi nous avons une culture précieuse de consensus au Conseil de ministres. La Constitution introduirait le vote à la double majorité, ce qui ferait que nous voterions sur la base des chiffres de population. Cela aurait pour conséquence que la proportion finlandaise d’une minorité de blocage tomberait de 7,8 % à 3,3 %, donc qu’il ne serait plus nécessaire d’écouter la Finlande et les autres petits pays de l’UE. La part des voix de l’Allemagne augmenterait parallèlement de 32 % à 51 %. L’Allemagne et la Turquie pourraient donc déterminer la vitesse à laquelle l’UE élargie se développerait. Une double majorité détruirait la culture européenne de consensus, et la suppression des commissaires nationaux rendrait difficile le bon fonctionnement quotidien de l’UE. Nokia s’en sortirait certainement, mais les nombreuses petites et moyennes entreprises et autorités locales ressentiraient l’absence d’un contact par le biais du cabinet finlandais s’il n’y avait plus de commissaire de ce pays à la table. En outre, le système de rotation ne se poursuivrait, bien sûr, à vrai dire, que jusqu’à ce que la France soit remplacée par Malte. Gardez un commissaire par État membre et la culture de consensus au Conseil de ministres au lieu d’adopter le projet rejeté de traité constitutionnel.
Koenraad Dillen (NI). - (NL) Madame la Présidente, comme il a déjà été dit, les chefs d’État ou de gouvernement européens s’attaqueront aussi, lors de leur rencontre à Lahti le 20 octobre, au sujet de l’immigration. Cependant, la question est de savoir quelles conclusions ils tireront. Il y a deux semaines, une nouvelle tragédie s’est déroulée près des côtes européennes, frappant des demandeurs d’asile malchanceux. Une fois encore, les personnes à blâmer sont les trafiquants sans scrupules prêts à exiger d’énormes sommes d’argent afin d’amener des gens en Europe à la recherche de leur chance. Une fois de plus, le naufrage d’un navire de clandestins au large de Lampedusa a débouché sur des pertes; la majeure partie des passagers et des membres d’équipage n’ont pu être sauvés que juste à temps. Pour empêcher de telles tragédies de se produire à nouveau, que ce soit au large de Lampedusa, au large des îles Canaries ou ailleurs le long de nos frontières extérieures, l’Europe doit émettre des signaux clairs, car des temps désespérés appellent des mesures extrêmes. Nous devons nous attaquer avec force à ceux qui pratiquent la traite des êtres humains. Les peines ne peuvent être assez dures. Ceci devrait aller de pair avec une politique d’asile stricte, qui montre au reste du monde que l’Europe est sérieuse quant il s’agit de protéger ses frontières. C’est pourquoi je voudrais profiter de la possibilité qui m’est offerte de féliciter les Suisses du choix raisonnable qu’ils ont fait, dans tous leurs cantons, de durcir les conditions légales d’immigration et d’asile, parce que, paradoxalement, en la matière, une politique ferme, humaine et juste est la meilleure chose qui soit.
Je voudrais donc exprimer l’espoir que les chefs d’État ou de gouvernement européens, lors du sommet informel de Lahti, méditent l’exemple suisse, parce que l’Europe doit apprendre à écouter ses habitants en matière de grandes questions sociales. Nous avons vu, par exemple, l’arrogance avec laquelle l’eurocratie veut persévérer avec une Constitution qui a été rejetée par la majeure partie des citoyens, comme en France et aux Pays-Bas. Lorsque le peuple a la parole, son opinion est souvent totalement incompatible avec les décisions prises au-dessus de lui par une élite peu familiarisée avec le monde réel. C’est sans aucun doute aussi le cas pour la question pressante qu’est l’immigration.
Tunne Kelam (PPE-DE). - (EN) Madame la Présidente, je pense que la meilleure façon d’honorer le travail d’Anna Politkovskaïa est de lire son livre La Russie selon Poutine, comme l’a indiqué M. Watson.
Nous devons être conscients que l’intimidation, le harcèlement et le meurtre systématiques de journalistes indépendants, ainsi que l’absence de tout résultat d’enquête, ont créé un climat d’impunité dans lequel les tueurs semblent ne pas craindre la loi. Cette tendance est gravement nuisible à la réputation de la Russie en tant qu’État présidant le Conseil de l’Europe. Elle fait aussi peser un doute sur nos valeurs communes. C’est pourquoi je voudrais demander à la présidence du Conseil de l’UE de soulever cette question au prochain sommet de Lahti.
Le groupe PPE-DE demande aussi à la Commission et aux États membres de l’UE d’adopter une attitude de principe en rappelant avec force que la restauration de la liberté de la presse et du respect des journalistes indépendants est une des principales conditions préalables à un renouvellement de l’accord de partenariat et de coopération l’an prochain. Ce n’est que si l’UE envoie un signal clair affirmant qu’elle n’accorde pas moins de valeur à la vie de cette femme courageuse qu’au pétrole et au gaz que les choses commenceront à changer en Russie.
(Applaudissements)
La seule façon de véritablement honorer l’engagement passionné d’Anna Politkovskaïa envers la vérité, la justice et la dignité humaine est d’entreprendre un effort commun pour transformer en réalité son rêve d’une Russie démocratique dans laquelle les citoyens ne devront pas payer de leur vie le fait d’avoir dit la vérité.
Hannes Swoboda (PSE). - (DE) Madame la Présidente, Madame la Présidente en exercice du Conseil, Monsieur le Président de la Commission, il n’y a aucun doute à ce sujet: nous sommes dans une position très délicate en ce qui concerne nos relations avec la Russie. Le meurtre de Mme Politkowskaya est peut-être le fait le plus récent, mais il n’est pas le seul, car les événements de ce type ne sont pas particulièrement rares. Ce sont des choses qui nous embarrassent, mais la Russie devrait être encore plus embarrassée - beaucoup plus, en fait.
Je voudrais dire quelques mots concernant trois domaines problématiques par rapport auxquels nos relations avec la Russie sont semées d’embûches. Pour commencer, ainsi qu’il a déjà été dit, il y a les droits de l’homme et la liberté d’opinion. Nous trouvons particulièrement regrettable que la Russie ne prenne pas conscience que les violations de la liberté d’opinion et des droits de l’homme sur son territoire lui font du tort. Ces violations pourraient également nous nuire en interférant avec nos relations avec la Russie, mais c’est la Russie qui est la plus touchée, dans le sens où elle ne parvient pas à se développer de manière positive et démocratique.
Deuxièmement, il y a la politique de voisinage et, même si nous ne parlons pas aujourd’hui de l’Ossétie du Sud et de la Transnistrie, il est néanmoins également vrai que l’Union européenne trouve la politique russe vis-à-vis de ses voisins tout à fait inacceptable.
Il est inacceptable que la Russie puisse décider de l’avenir des citoyens d’Ossétie du Sud ou de Transnistrie. C’est aux citoyens de ces régions de décider de leur sort, autant de décisions qu’ils doivent pouvoir prendre librement et non sous la contrainte ou en réponse à une pression militaire - peut-être même exercée par la Russie. Nous devons dès lors aborder ce problème en toute franchise avec la Russie.
Enfin, il y a le problème de l’énergie et, tout en étant d’accord avec tous ceux qui se sont exprimés en faveur d’une politique énergétique commune - comme l’a fait le président de la Commission de manière assez claire et indéniable -, je me demande combien de ceux qui applaudissent aujourd’hui l’auraient fait si nous avions déclaré, il y a un an, que nous avions besoin d’une politique énergétique commune. Applaudiront-ils aussi lorsqu’il leur sera demandé de revoir leurs préférences personnelles pour les adapter en fonction d’une seule? Le fait est que, si nous réclamons une politique énergétique commune, rien n’a par contre encore été dit quant à la forme qu’elle doit prendre et, lorsque nous commencerons à agir pour améliorer l’efficacité énergétique, développer des formes alternatives d’énergie et prendre les mesures appropriées en matière de transport et de logement, nombreux sont ceux qui se lèveront et diront: «non, ce n’est pas ce que nous avions en tête».
J’en reviens à la Russie. Le problème aujourd’hui est que les relations entre l’UE et la Russie en matière de politique énergétique sont déséquilibrées, que la Russie - sous l’impulsion de Poutine - fait malheureusement de plus en plus de la politique énergétique une question de pouvoir politique au lieu de faire comme nous et de la traiter comme un facteur économique. Si nous voulons faire des affaires avec la Russie, il est impératif de poser comme condition que l’UE et la Russie négocient d’égal à égal.
La Russie ne doit pas perdre de vue que les réserves d’énergie - et plus particulièrement celles de gaz - s’épuisent; elles ne seront pas épuisées aujourd’hui, mais sans doute d’ici huit ou dix ans, ou peut-être douze. La question se pose donc de savoir ce que la Russie fera alors. Il est également dans l’intérêt de la Russie de prendre conscience du fait qu’elle a besoin de notre technologie, de notre savoir-faire et de notre argent et doit dès lors s’efforcer d’établir une relation d’égalité en matière de politique énergétique. Si, sur les questions énergétiques, nous négocions d’égal à égal, nous pourrons également parvenir à des solutions justes. À défaut de le faire, l’Union européenne ne sera pas la seule à subir les conséquences, la Russie aussi. La Russie doit donc déterminer où réside son véritable intérêt à long terme. Elle a beaucoup à apprendre d’un dialogue avec nous, avec l’Union européenne.
Hélène Flautre (Verts/ALE). - Madame la Présidente, Anna Politkovskaïa sait pourquoi elle est morte. La postface de son dernier livre s’intitule: «Ai-je peur?». Pourquoi écrivait-elle? Elle écrivait parce qu’elle pensait que les mots peuvent sauver des vies. Elle se savait menacée, elle avait été séquestrée, elle avait été victime d’une tentative d’empoisonnement, elle était régulièrement menacée de mort. Elle a été exécutée parce qu’elle disait la vérité, tout simplement.
Dans son livre «Tchétchénie, le déshonneur russe», elle écrit: «Poutine et son peuple ont donné leur bénédiction à ce qu’aucun pays ne peut approuver, à savoir une corruption fondée sur le sang de milliers de victimes, une armée rongée par l’anarchie militaire, un esprit chauvin au sein de l’appareil gouvernemental qui se fait passer pour du patriotisme, une rhétorique effrénée de l’État fort, un racisme antitchétchène officiel, populaire, avec des métastases qui s’étendent à d’autres peuples de la Russie. Aujourd’hui, la Russie de Poutine produit chaque jour de nouveaux amateurs de pogromes, les agressions contre les Caucasiens sont devenues une routine». Vous savez quand elle a écrit ce texte? Elle l’a écrit en 2003 et que voit-on aujourd’hui? On voit les rafles, les arrestations arbitraires, on voit les persécutions contre les Géorgiens et contre les ONG de défense des droits de l’homme, qui viennent d’ailleurs de déposer une plainte.
Que répond M. Poutine? M. Poutine déclare que les mesures prises contre les Géorgiens sont appropriées et que les agents de l’État agissent de façon conforme à la loi russe. Elle n’a eu de cesse, Mme Politkovskaïa, de dénoncer les violations des droits de l’homme. J’espère que les Vingt-cinq auront le courage de dire à M. Poutine ce que cette femme seule a eu le courage de dire et qu’ils ne se paieront pas de mots quant à l’enquête...
(La Présidente retire la parole à l’orateur)
Mirosław Mariusz Piotrowski (IND/DEM). - (PL) Madame la Présidente, la présidence finlandaise a annoncé la mise en œuvre d’un partenariat énergétique entre l’Union européenne et la Russie. Je voudrais lui demander comment elle compte y parvenir. Jusqu’à présent, il a davantage été question de la «finlandisation» des relations entre l’UE et la Russie que d’un partenariat.
La politique de l’UE vis-à-vis de la Russie repose essentiellement sur des concessions et est en outre ambiguë en terme de positions, souvent aux dépens des nouveaux États membres baltes et de la Pologne. J’en veux pour exemple typique l’accord germano-russe visant à créer un gazoduc nord européen au fond de la mer Baltique. La Russie utilise habilement sa position monopoliste sur le marché énergétique européen. Sur la base du principe «diviser pour mieux régner», elle conclut des accords avec des États plus forts en court-circuitant les plus faibles, une situation que l’UE accepte sans broncher. Jusqu’à présent, nous ne sommes même pas parvenus à faire ratifier par la Russie la Charte européenne de l’énergie, un document européen fondamental portant sur le marché énergétique.
Le sommet informel de Lahti entre les chefs d’État ou de gouvernement, auquel devrait participer le président russe, devrait amener un changement par rapport à la situation actuelle. Dans ce dossier plus que dans tout autre, l’UE doit s’exprimer d’une seule voix, en adoptant une attitude de négociation ferme.
Eija-Riitta Korhola (PPE-DE). - (FI) Madame la Présidente, ma ville natale, Lahti, pourrait être le théâtre d’un événement important à l’occasion du sommet européen. Le thème est particulièrement de circonstance pour Lahti, une région qui, depuis longtemps, jouit d’une grande réputation en tant que centre d’excellence en matière de technologies environnementales - car il est vain de parler d’énergie sans aborder l’efficacité énergétique. La manière la plus efficace d’accroître rapidement l’autosuffisance en matière d’énergie est d’améliorer l’efficacité énergétique et la conservation de l’énergie. Lorsque nous abordons la question de l’énergie avec la Russie, il est également important d’insister sur le fait qu’il n’est pas judicieux, d’un point de vue politique, d’accroître davantage notre dépendance vis-à-vis de la Russie en matière d’énergie.
À la lumière du changement climatique, nous avons bien besoin de toutes les ressources que nous pouvons rassembler. L’énergie à faible émission doit recevoir le crédit qui lui est dû. Il est grand temps que nous arrêtions de penser que l’énergie renouvelable et l’énergie nucléaire sans émission sont, d’une certaine manière, deux choses opposées. C’est une illusion, quelque chose qui est davantage dans les esprits qu’elle ne l’est véritablement à l’heure d’adopter des attitudes pratiques en matière d’énergie.
J’ai demandé au ministre finlandais du commerce et de l’industrie d’inclure le réexamen des conditions d’adhésion de la Bulgarie à l’ordre du jour du sommet de Lahti. Je veux parler de la décision injuste et inutile de fermer quatre des six réacteurs nucléaires de Kozloduy. Si nous examinons les critères derrière la décision d’aujourd’hui, force est de constater que la condition imposée à la Bulgarie à Helsinki il y a sept ans est aujourd’hui caduque. Elle est en outre déraisonnable face aux objectifs de la politique énergétique européenne. Des progrès ont été faits et le groupe de travail du Conseil a lui-même déclaré que les centrales remplissaient les conditions de sécurité. Mais même ainsi, elles doivent être fermées d’ici la fin de l’année.
Si la Finlande ne s’attaque pas au problème maintenant, nous risquons d’assister à une pénurie d’énergie non seulement en Bulgarie, mais également dans ses pays voisins, dont les besoins en électricité ont été assurés par la Bulgarie ces cinq dernières années. La déclaration de la Commission selon laquelle ces réacteurs pourraient être améliorés en termes économiques s’est avérée erronée. Kozloduy produit en effet de l’électricité à moins de deux cents par kilowatt-heure. La fermeture de ces réacteurs pourrait être partiellement compensée en recourant à des centrales brûlant du lignite, qui est la plus sale de toutes les sources d’énergie. Autrement dit, l’argent de l’UE est utilisé pour passer d’une technologie plus propre à une plus sale. C’est de la pure folie.
En demandant le réexamen du dossier, je ne dis pas que nous devons revenir sur l’accord, mais bien l’examiner à la lumière des informations actuelles, de manière à avoir une certaine flexibilité au niveau de la date de fermeture. Pourquoi la Bulgarie augmenterait-elle ses émissions de gaz à effet de serre alors qu’elle dispose d’une alternative qui s’est avérée sûre?
Reino Paasilinna (PSE). - (FI) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, l’orateur qui a parlé ici de finlandisation pense sans doute à lui-même. La route pourrait être longue, pour lui, pour atteindre le niveau de la Finlande en termes de démocratie et d’économie, car nous sommes à l’avant-plan de la scène européenne.
(Applaudissements)
Cela a exigé beaucoup de travail. Venez, suivez-nous! Les thèmes du sommet de Lahti, qui sont également deux priorités de la Finlande, sont l’investissement et l’innovation. Le niveau des investissements de l’Union dans la recherche et le développement est totalement inadéquat. Seuls deux pays ont atteint les objectifs de Barcelone: la Finlande et la Suède. L’étroitesse d’esprit des dirigeants européens me fait honte. L’Europe traverse une crise constitutionnelle tout en étant dans le même temps impuissante d’un point de vue spirituel. Nous ne sommes tout simplement pas à la hauteur dans de nombreux domaines parce que nos investissements en recherche sont à la traîne par rapport à ceux de nos concurrents et l’Est aura tôt fait de nous rattraper.
À partir de cette arène scientifique fragmentée, nous devons de toute urgence créer un domaine européen de recherche à la fois efficace, direct et de haut niveau, un résultat qui ne sera possible que par le biais de la coopération et de la collaboration. Nous risquons de devenir une région sur le déclin si nous ne mettons pas rapidement des innovations en pratique. Le projet de création d’un Institut européen de technologie manque quant à lui d’argent et d’une direction. En tant que rapporteur, mon opinion est la suivante: si nous faisons en sorte de concrétiser l’innovation et le transfert d’innovation, notre niveau de vie s’améliorera.
Nous considérons la Russie comme un partenaire stratégique et nous renouvellerons l’accord de partenariat et de coopération. Le meurtre choquant de la journaliste Anna Politkovskaya ne cadre pas très bien avec l’idée de la Russie que nous espérons voir devenir un meilleur partenaire de l’Union. Elle se battait contre la corruption et la violence. Même le gouvernement russe le reconnaît. Alors, pourquoi Mme Politkovskaya n’a-t-elle pas bénéficié d’une protection? Tout le monde était au courant des menaces de mort. Cette importante question doit être soulevée à Lahti.
La dépendance de l’Europe en termes d’importations d’énergie ne cesse de croître à une vitesse phénoménale. Dans la mesure où notre problème est de garantir la sécurité de l’approvisionnement et où la Russie a des difficultés à trouver de bons clients - autrement dit, un problème pour conclure des accords à long terme qui permettent au pays d’investir dans l’infrastructure énergétique -, je propose une solution qui nous permette de passer un marché et de résoudre ces deux problèmes en même temps. De cette façon, les marchés européens et russes obéiront aux mêmes règles; autrement dit, un accord énergétique sera ratifié dans le cadre du même paquet. Nous pourrons ainsi garantir une certaine sécurité énergétique pour les deux parties et, évidemment, surtout pour nous-mêmes.
Satu Hassi (Verts/ALE). - (FI) Mesdames et Messieurs, les ressources énergétiques de la Russie et notre désir de protéger les approvisionnements en pétrole et en gaz ne doivent pas occulter la détérioration de la démocratie et des droits civils en Russie. La société civile de ce pays est dans un état désastreux. Personne ne devrait plus en douter après l’assassinat d’Anna Politkovskaya.
Les violations des droits de l’homme et les violences, voire les assassinats, ne visent pas seulement l’opposition politique, mais également les nationalités minoritaires, qui se comptent par dizaines en Russie. Le peuple des Maris en est une et le Parlement européen a également tourné son attention sur les atrocités dont il a été victime.
Les conflits liés à la nationalité ont également un rapport avec l’assassinat d’Anna Politkovskaya. Cette dernière a en effet été assassinée pour avoir dit la vérité sur la situation en Tchétchénie.
Le lendemain même de cet assassinat, des milliers de Finlandais se sont réunis devant l’ambassade russe pour une manifestation aux chandelles sans précédent. J’espère que le gouvernement finlandais, en tant que pays assurant la présidence du Conseil de ministres de l’UE, exprimera clairement à la Russie toute son horreur et l’inquiétude qui nous habite. Les droits de l’homme doivent être au cœur des relations avec la Russie.
Nils Lundgren (IND/DEM), par écrit. - (SV) Madame la Présidente, le sommet de Lahti, la semaine prochaine, abordera la question d’une politique énergétique commune. C’est là un nouvel exemple de la détermination avec laquelle l’establishment politique, pour des raisons purement liées au pouvoir politique, exploite divers problèmes sociaux pour promouvoir les opinions de l’UE. En réalité, il n’y a pas vraiment de raison de mener une politique énergétique au niveau européen.
Nous sommes à un stade de l’histoire où il commence à apparaître clairement que les émissions de gaz à effet de serre résultant de la combustion de carbone et d’hydrocarbures par l’homme provoquent un changement climatique. Nous devons remédier à cette situation. Personne en position de pouvoir dans l’UE n’est toutefois en mesure de décider quels types d’énergie choisir pour garantir un approvisionnement durable en énergie dans le futur. Qui plus est, les exigences des différents pays varient considérablement. Plusieurs pays ont tout intérêt à trouver des méthodes de séparation et de stockage du dioxyde de carbone émanant de la combustion de charbon et de pétrole. Certains pays sont prêts à devenir dépendants de la Russie pour ce qui concerne le gaz, tandis que d’autres préfèrent mettre tous leurs espoirs dans l’énergie nucléaire, hydraulique, éolienne et houlomotrice, la biomasse ou encore l’énergie géothermique. Il existe divers moyens pour chacun de réduire sa consommation d’énergie. À cette fin, les pays doivent être libres d’expérimenter et de tester différentes voies. Ce n’est qu’au travers d’une telle concurrence institutionnelle entre les pays que des progrès pourront être faits. L’idée d’une UE indiquant quelle quantité des différents types d’énergie doit être utilisée est une notion absurde et dangereuse pour l’avenir de l’Europe.
Struan Stevenson (PPE-DE). - (EN) Madame la Présidente, je suis très heureux que le président en exercice du Conseil ait confirmé que les discussions de Lahti seraient centrées sur l’ensemble de la question de l’énergie. À l’instar du dernier orateur, M. Lundgren, j’espère que le changement climatique occupera également une place centrale dans ces discussions.
La protection des citoyens et de leur environnement doit être au centre de la politique énergétique. Le changement climatique et ses possibles répercussions, la pollution de l’air dans les villes, la détérioration de l’environnement urbain et toutes les autres nuisances dues à la pollution dont nous avons conscience ont des conséquences majeures sur le quotidien de nos citoyens, en termes économiques, sociaux et de santé.
Nous savons que la température de la planète a augmenté de 0,6 oC en un siècle. Nous savons aussi que d’ici 2020, notre environnement se sera encore réchauffé de 0,8 oC. Le réchauffement mondial engendrera des conditions climatiques extraordinaires, comme des tempêtes, plus de pluies et des inondations. D’après les experts, le niveau de l’eau pourrait augmenter jusqu’à un mètre. Si cela se produit, des pays comme le Bengladesh et - plus près de chez nous - les Pays-Bas seront confrontés à une véritable catastrophe. C’est à ce point-là. L’hiver dernier, nous avons été témoins d’une crise en Ukraine - qui traversera une autre crise ce soir lors du match de football contre l’Écosse - et nous avons vu la première interruption de nos approvisionnements en gaz depuis 40 ans.
Nous importons 22 % de notre gaz depuis la Russie, une position dangereuse pour l’UE car, à la suite de la crise de l’année dernière, nous avons découvert que certains États membres plus récents ne disposaient de réserves énergétiques que pour 24 heures. Ainsi que l’a déclaré M. Barroso sur le thème de l’immigration, nous ne pouvons pas continuer avec 25 - bientôt 27 - politiques énergétiques disparates et totalement séparées dans le domaine de l’énergie. Nous devons les centraliser pour avoir une politique énergétique cohérente gérée depuis le centre.
(Applaudissements)
Martine Roure (PSE). - Madame la Présidente, Madame la Présidente en exercice du Conseil, Monsieur le Président de la Commission, les derniers sommets de Tampere et de Luxembourg ont de nouveau montré les limites de la politique européenne d’immigration et les limites de la solidarité des gouvernements européens. Nous souhaitons par conséquent que vous puissiez, à Lahti, vous attaquer enfin aux causes profondes de l’immigration.
Si nous voulons moins d’arrivées à nos frontières du Sud, la réponse n’est pas et ne sera jamais l’intensification des patrouilles et l’accélération des vols de retour. J’ai rencontré ces candidats à l’immigration, tout l’espoir de leur famille, de leur village repose sur eux et ils préféreraient, pour certains, mourir plutôt que d’échouer. Combattre l’immigration illégale, ce n’est donc pas condamner ces victimes en les renvoyant vers un destin qu’elles essaient de fuir; combattre l’immigration illégale, c’est s’attaquer à ceux qui organisent les trafics, qui trompent les gens en leur faisant miroiter un avenir meilleur en Europe et c’est s’attaquer à ceux qui les exploitent en Europe.
Ne devrions-nous pas par ailleurs assouplir la politique européenne des visas? C’est ainsi que nous lutterons contre la clandestinité. S’il est vrai que nous avons besoin de main-d’œuvre, nous voulons des personnes avec des droits, nous ne voulons pas des esclaves. Il faut admettre d’ailleurs que les régularisations peuvent être nécessaires pour lutter contre les exploiteurs. La traite des êtres humains ne peut être combattue efficacement que si nous n’entretenons pas le travail au noir et l’exploitation des migrants dans nos propres pays.
Nous devons aussi admettre que nous avons longtemps payé l’Afrique, nous devons admettre que nos politiques de codéveloppement n’ont pas été justes, nous devons enfin permettre le développement massif des pays pauvres. Jusqu’à aujourd’hui, l’Europe s’est contentée de déclarations de bonnes intentions. Nous devons investir massivement dans ces pays et également aider à la création de services publics accessibles pour tous et à l’installation d’entreprises qui rémunéreront justement leurs employés, ce qui n’est pas toujours le cas actuellement, il faut le dire. Les travailleurs sont souvent exploités par des entreprises européennes dans leur propre pays et cela, je le répète, il ne faut pas avoir peur de le dire.
Enfin, nos États membres doivent prendre conscience du fait qu’il faut travailler ensemble et que nous ne pourrons rien faire de sérieux chacun dans notre coin. Dépassons nos égoïsmes nationaux qui nous mènent droit dans le mur.
Nigel Farage (IND/DEM). - (EN) Madame la Présidente, c’est reparti pour un tour: un autre sommet des chefs d’État ou de gouvernement, une autre discussion sur la compétitivité - ou, pour être plus exact, sur l’absence de compétitivité - et une autre perte de temps totale! Nous nous sommes déjà retrouvés dans cette situation auparavant. Vous rappelez-vous l’agenda de Lisbonne en mars 2000? J’étais assis ici et j’ai entendu la merveilleuse déclaration selon laquelle l’UE deviendrait l’économie de la connaissance la plus compétitive et dynamique au monde d’ici 2010. Elle ne se porte pas très bien, n’est-ce pas, M. Barroso? Je ne pense pas que vous allez remplir ces objectifs au cours des trois années et demie à venir!
Et puis nous l’avons entendu l’été dernier, lorsque M. Blair est venu ici. Il s’est levé et nous a dit que nous devions faire face au défi de la mondialisation et que nous n’y parviendrions que si l’Europe devenait compétitive et si nous commencions à investir de l’argent dans la recherche et le développement. Et bien sûr, une fois de plus, rien ne s’est passé. Si vous voulez vraiment améliorer la compétitivité, vous feriez mieux de lire ce week-end les 91 000 pages de la législation de proximité qui constituent l’acquis communautaire et de décider d’en jeter une bonne partie. Si vous voulez réellement rendre l’Europe compétitive et avancer dans le monde moderne, c’est ce que vous devez faire.
Cela m’amuse de savoir que le Danemark sera l’étude économique pour le week-end, ce que je peux comprendre, puisqu’il a le taux d’emploi le plus élevé de l’Union européenne. Je me demande si c’est parce qu’il a gardé sa propre devise - il peut ainsi gérer sa propre politique fiscale et monétaire. En fait, les chiffres du chômage en dehors de la zone euro sont deux fois moins élevés qu’à l’intérieur de cette zone. La véritable conclusion à tirer ce week-end est que nous devrions faire beaucoup moins au niveau européen car tout ce que touche l’UE se transforme en catastrophe.
Bogdan Klich (PPE-DE). - (PL) Madame la Présidente, la réunion entre nos dirigeants et le président Poutine sera l’occasion de soulever la question de la protection des approvisionnements en énergie et d’exprimer notre extrême inquiétude - j’insiste sur le mot extrême - face à la situation de la démocratie et du respect des droits de l’homme en Russie.
Trop souvent, nos hommes politiques ont fait l’autruche et ont accepté des explications sans queue ni tête de la Russie, jusqu’à ce que, finalement, la conscience du journalisme russe, Anna Politkovskaya, soit brutalement assassinée par des balles tirées en pleine tête, comme Galina Starovoytova avant elle. Ces deux victimes marquent respectivement le début et la fin du processus de repli démocratique en Russie. La mort de Mme Starovoytova en 1998 a marqué le début de l’abandon des normes démocratiques dans ce pays, parce qu’elle était une figure de proue symbolique, la dirigeante des démocrates de St-Pétersbourg. L’assassinat de Mme Politkovskaya porte un coup à ce qui reste de la liberté de la presse en Russie. Qui que soit le commanditaire de ce meurtre, il savait que la victime était une personne au caractère inflexible, un symbole de la liberté et du journalisme indépendant.
Je ne connaissais pas Anna Politkovskaya personnellement. J’ai par contre eu le plaisir de travailler avec Galina Starovoytova, dont j’ai toujours admiré le courage. C’est la raison pour laquelle, face à leur sacrifice et avant que nous ne ressentions les effets du repli démocratique de la Russie sur nos propres têtes, je demande que le respect des droits de l’homme et des libertés civiles en Russie soit considéré comme une condition à la poursuite du dialogue politique avec ce pays.
Edite Estrela (PSE). - (PT) Monsieur le Président, l’agenda de Lahti comporte un certain nombre de points très importants, comme la politique énergétique, l’immigration illégale, la compétitivité et l’innovation. Il est toutefois inévitable que la question de la liberté de la presse soit également soulevée. La démocratie, la liberté et les droits de l’homme sont autant de points essentiels lors d’un sommet de cette importance, auquel devrait participer le président Poutine, à un moment où l’assassinat de la journaliste russe Anna Politkovskaya est encore bien présent dans nos esprits.
Le Conseil européen doit exiger du président Poutine qu’il traîne les auteurs de ce crime odieux devant la justice. En ces temps où l’Europe est confrontée aux conséquences du changement climatique et à la hausse des prix du pétrole, l’efficacité énergétique doit de toute urgence être intensifiée. En outre, la dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles doit être réduite afin d’améliorer l’économie, l’environnement et la qualité de vie des citoyens européens.
L’Union européenne doit diversifier ses sources et ses fournisseurs d’énergie et donner la priorité à l’énergie renouvelable de manière à respecter ses engagements en vertu du protocole de Kyoto. L’idée de lier l’innovation à la compétitivité apparaît comme tout à fait logique pour la présidence finlandaise et mon propre pays, le Portugal. Exploiter l’innovation pour accroître la compétitivité est l’une des approches de la stratégie de Lisbonne mise en avant par la présidence portugaise en 2000.
Huit exemples de meilleure pratique, sélectionnés par les autorités européennes, ont été présentés il y a quelques jours, à l’occasion de la première réunion des coordinateurs nationaux de l’agenda de Lisbonne. Le Portugal mérite des éloges pour le projet de création d’une entreprise en une heure.
PRÉSIDENCE DE M. OUZKÝ Vice-président
Gunnar Hökmark (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, le meurtre d’Anna Politkovskaya est une tragédie à trois niveaux. C’est une tragédie personnelle - pour sa famille -, mais également pour la société russe, car elle est le signe d’une évolution émergente dans ce vaste pays, et pour la démocratie, car ce meurtre a une dimension démocratique importante en Russie. C’est un pas en arrière qui affaiblit la démocratie dans ce pays.
Il a été dit un peu plus tôt dans ce Parlement que nous devions nous montrer réalistes à propos de la démocratie en Russie. J’ignore ce que voulait réellement dire par là l’orateur, mais nous devons en effet faire preuve de réalisme en ce qui concerne la démocratie en Russie: si nous ne nous élevons pas en faveur de la démocratie en Russie, nous abandonnerons à leur sort des personnes comme Anna Politkovskaya et des milliers d’autres. Si nous ne défendons pas la démocratie et l’État de droit en Russie, nous ne parviendrons pas à renforcer les forces en Russie qui peuvent aider le pays à devenir un pays et un partenaire meilleur. Ne pas soutenir la démocratie ne contribuera pas à faire de la Russie un meilleur partenaire dans le domaine de la politique énergétique et dans d’autres.
(Applaudissements)
Le fait de ne pas exiger la démocratie et l’État de droit ne fait pas de la Russie une société meilleure. La Russie ne pourra être un partenaire crédible dans le domaine de l’énergie que si la démocratie est plus forte et l’État de droit stabilisé. Voilà ce que nous voulons dire par se montrer réalistes à propos de la démocratie en Russie et ce que nous devons affirmer dès aujourd’hui.
Monsieur Barroso, certaines compétences de l’Union européenne - à savoir, le marché intérieur pour la politique énergétique, les réseaux transeuropéens, les règles de concurrence et la politique commerciale - sont autant d’instruments à utiliser face à la Russie, mais également d’autres parties du monde. Elles constituent la base idéale pour asseoir la future politique énergétique de l’Union européenne. Utilisons-les et avançons pas à pas.
Józef Pinior (PSE). - (PL) Monsieur le Président, l’Union européenne doit s’attaquer aux défis politiques, économiques et culturels des temps récents. Pour commencer, l’heure est venue d’élaborer une politique énergétique européenne commune comprenant des mesures de l’envergure de la politique européenne relative à l’industrie lourde mise en œuvre après la Seconde guerre mondiale. Deuxièmement, l’Union européenne doit apporter une réponse unique aux problèmes de l’immigration clandestine massive de citoyens provenant des quatre coins du monde, qui a des répercussions considérables sur certains pays. Enfin, nous devons faire une réelle percée au niveau du développement de la recherche scientifique, de nouvelles technologies, de la compétitivité et de l’innovation économique au sein des États membres. L’Europe a aujourd’hui besoin de courage, d’une vision et d’une stratégie tournée vers l’avenir. Nous devons approfondir l’intégration et parvenir à une véritable politique commune et unifiée dans ces trois domaines.
Je voudrais exprimer ma satisfaction par rapport à l’invitation du président Poutine au sommet de Lahti et aux efforts accomplis pour créer un partenariat stratégique avec la Russie. Dans le même temps, notre accord avec la Russie ne doit pas nous amener à tolérer des violations des droits de l’homme et de la liberté de la presse. La Russie n’est pas seulement un pays qui possède une immense richesse minérale, c’est également la terre d’origine de citoyens comme la journaliste assassinée Anna Politkovskaya, une journaliste dont le courage et l’honnêteté sont un symbole de la Russie civique et dont les activités doivent devenir un symbole et une source d’inspiration pour l’ensemble de l’Europe.
Othmar Karas (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je trouve, d’un côté, que le débat de ce jour est une expérience qui fait réfléchir, mais, d’un autre côté, il me rafraîchit et me revigore. De nombreux orateurs ont mis en avant des analyses factuelles, ont défini les objectifs appropriés et ont dit des vérités sans complaisance. Mais que va-t-il se passer ensuite? Quelles mesures allons-nous prendre à présent? On n’instaure pas la confiance avec des analyses, mais par des actions.
Je voudrais que le président du Conseil emporte trois messages avec lui au sommet. Premièrement, s’il nous a écoutés, il nous aura entendus lui demander de ne pas traiter ses négociations avec Vladimir Poutine comme des «affaires courantes», de ne pas réduire le sommet à une simple réunion sur la politique énergétique, mais d’y aborder tous les points soulevés aujourd’hui. Deuxièmement, nous l’invitons à nous présenter un calendrier précisant la date à laquelle nous pouvons nous attendre à disposer du marché intérieur européen de l’énergie dont a parlé le président Barroso et, troisièmement, nous voulons qu’il nous indique la date à laquelle l’Union européenne deviendra une zone de recherche.
En matière d’énergie, le partenariat avec la Russie n’est qu’un pan de la politique énergétique dont a besoin l’Europe. Notre priorité doit être de jouir d’une plus grande indépendance en matière d’énergie. Nous voulons avant tout donner la priorité à la recherche sur la réduction de la consommation d’énergie et à la création de sources d’énergie renouvelable. Telle est notre principale contribution à une plus grande innovation. Nous vous invitons à faire en sorte qu’il soit plus facile pour les petites et moyennes entreprises de participer à l’innovation et à permettre à leurs représentants de prendre part au dialogue tripartite.
N’oubliez pas que cette année a débuté par la réduction des approvisionnements en gaz à destination de l’Ukraine, ni que le dernier événement marquant en Russie a été l’assassinat d’une journaliste critique, qui a attiré une beaucoup plus grande attention de la part des citoyens que les nombreux meurtres similaires qui l’ont précédé.
Malcolm Harbour (PPE-DE). - (EN) Je voudrais cibler mes remarques sur l’un des principaux thèmes du sommet: l’innovation. Je constate que ce sujet n’a pas été abordé par beaucoup d’orateurs aujourd’hui. Je voudrais simplement encourager le président en exercice du Conseil et le président Barroso à veiller à ce que ce point reste au cœur des discussions. Ainsi que vous l’avez souligné, Monsieur Barroso, il n’y a pas d’endroit plus approprié que la Finlande pour une telle discussion.
Je me réjouis de voir que, dans vos discours respectifs, vous avez tous deux parlé de l’importante concurrence en provenance de la Chine, de l’Inde et des autres économies asiatiques. Nous devons commencer à regarder dehors et à développer les véritables forces de notre technologie. Un des points que je voudrais tout particulièrement vous demander de promouvoir lors de votre sommet - un point qui engage les dirigeants européens - est la dynamisation et l’utilisation du pouvoir des autorités publiques. Celles-ci dépensent des milliards de deniers publics pour le développement de nouveaux services, mais je ne pense pas que beaucoup réfléchissent à la manière d’utiliser cet argent pour promouvoir l’innovation et mettre en avant les nouveaux produits et services que l’industrie et les sociétés européennes sont prêtes à fournir.
Prenons le cas de Nokia, puisque le sommet se tiendra dans le pays natal de cette société, la Finlande. Les réseaux sans fil, l’innovation sans fil, les services sans fil: ce sont des choses de ce type que nous devrions développer au profit de la santé et de l’éducation, pour augmenter la qualité des services publics ou encore pour améliorer l’expérience des citoyens dans leurs interactions avec nous. Je voudrais vous voir inscrire ce point sur votre agenda avec les dirigeants européens, car si nous arrivons à un tel résultat, nous ferons de grands pas en avant. Nous savons que d’autres pays le font, en particulier les États-Unis.
En conclusion, je constate, Monsieur Barroso, que vous avez inscrit l’Institut européen de technologie à l’agenda. J’espère que vous nous convaincrez de l’utilité de cet investissement. Pour ma part, je ne suis pas encore convaincu car je pense que de nombreuses universités font déjà ce que vous voulez qu’elles fassent - beaucoup d’argent.
Mettons l’innovation au cœur de ce que nous faisons lors du sommet et j’espère que vous lui accorderez l’importance qu’elle mérite.
Jerzy Buzek (PPE-DE). - (PL) Monsieur le Président, je suis tout à fait d’accord avec les déclarations de mes collègues du groupe du parti populaire européen (démocrates-chrétiens) et des démocrates européens sur l’état de la démocratie en Russie, et je ne souhaite pas répéter leurs arguments, que je soutiens de tout cœur. Je voudrais soulever deux questions supplémentaires et féliciter la présidence finlandaise pour avoir préparé deux dossiers pour le sommet informel de Lahti, à savoir l’énergie et l’innovation. Dans le domaine de l’énergie, nous avons besoin d’une politique commune, tant au sein de l’Union européenne, pour établir un marché commun de l’énergie, qu’en dehors, dans le cadre notamment de négociations européennes communes avec les partenaires qui nous approvisionnent en pétrole et en gaz. C’est extrêmement important. Nous devons éviter de nous retrouver à nouveau dans une situation où les négociations d’un État membre concernant, par exemple, les approvisionnements en gaz ou pétrole en provenance de Russie placent d’autres États membres dans une position extrêmement délicate.
Il est très important que nous abordions notre politique énergétique commune de cette façon, car nous ferons alors un pas important vers la création d’une politique étrangère commune. Il y a toutefois un autre aspect de notre politique extérieure en matière d’énergie à prendre en compte: les oléoducs ukrainiens sont actuellement en mauvais état et constituent le dernier itinéraire indépendant de Gazprom pour les approvisionnements énergétiques en provenance de l’Est. Il est important que nous investissions dans ces oléoducs et que nous fassions tous les efforts possibles pour obtenir les fonds nécessaires pour un tel investissement.
Concernant l’innovation, je voudrais juste soulever trois points. Tout d’abord, nous avons besoin d’une politique économique responsable dans le cadre de laquelle l’industrie adopte l’innovation, ce que nous n’avons pas sur notre continent. Cela implique d’avoir une stratégie économique. Le deuxième point concerne la question d’un brevet européen: nous devons avoir notre propre brevet. Troisièmement, je pense que nous avons besoin d’un Institut européen de technologie au service de l’innovation. Personnellement, je soutiens l’idée de M. Barroso et je pense que nous avons aujourd’hui l’occasion de régler ce problème.
Andreas Schwab (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Président de la Commission, Madame Lehtomäki, je me réjouis au plus haut point de la communication sur l’innovation que la Commission doit publier la semaine prochaine. Il s’agit de l’une des premières tentatives sérieuses pour élaborer une stratégie européenne destinée à positionner l’Europe dans le contexte de la mondialisation, et je pense donc qu’elle constituera le point le plus important de l’ordre du jour du sommet informel de Lahti.
L’innovation est particulièrement l’apanage des petites et moyennes entreprises, et la communication tient compte de cette circonstance. Ainsi que la ministre l’a affirmé, l’innovation exige des normes européennes, et nombreux sont les domaines dans lesquels il reste beaucoup de pain sur la planche à cet égard. Nous devons dans cette perspective, ainsi que vous l’avez vous-même déclaré, Monsieur le Président de la Commission, consacrer davantage de ressources à la recherche et à l’investissement. Au même titre que je salue le bon exemple de la Finlande, je dois par ailleurs souligner que ma région d’origine, le Bade-Wurtemberg, dépense chaque année 3,6 % de son produit intérieur brut pour la recherche et le développement, et qu’elle devance ainsi sensiblement les États-Unis ou le Japon.
Nous devons également témoigner d’une plus grande confiance dans nos propres capacités, un message qui figure d’ailleurs au cœur de cette communication. Nous devons davantage clarifier ce que nous souhaitons être en mesure de réaliser, ensemble, en Europe lorsque nos structures auront été remaniées, même dans une société mondialisée. Nous disposons d’un formidable marché intérieur qui - bien que nous devions continuer de l’élargir - nous procure néanmoins une protection. Nous devons témoigner d’une confiance renforcée dans nos relations avec la Russie et la Chine, mais nous devons également savoir à quels niveaux, au sein de l’Union européenne, nous devons entreprendre des réformes pour sauvegarder notre compétitivité, et la stratégie pour l’innovation offre une excellente base à cette fin.
Il a également été remarqué qu’une approche plus novatrice s’impose dans l’attribution des marchés publics, et quelques exemples ont été donnés pour illustrer cette demande. Ces mesures sont d’ores et déjà appliquées dans ma région. Je suis persuadé qu’il existe de magnifiques opportunités permettant d’installer l’Europe dans une meilleure position pour affronter la mondialisation, et je pense en outre que le sommet informel de Lahti doit contribuer à l’élaboration - peut-être au cours de l’année prochaine - d’une stratégie sur la mondialisation pour l’Union européenne, grâce à laquelle nous pourrons convaincre les citoyens que cette Europe qui est la nôtre a une chance dans une société mondialisée.
Vytautas Landsbergis (PPE-DE). - (LT) Monsieur le Président, nous devons être clairs, ici à Bruxelles, lorsque nous parlons de Lahti. Le début de la séance d’hier a montré à quel point nous sommes désunis, polarisés et aisément manipulables. Le Parlement européen est apparu incapable de réagir immédiatement, sous la forme d’un document conjoint, à un crime terrible commis à Moscou afin de ne pas perturber le président russe dans sa tournée en Europe. Il s’agit purement et simplement d’un signe supplémentaire que l’Union européenne n’a pas de politique européenne propre par rapport à la Russie et que nous n’appliquons en Europe qu’une politique prorusse à cet égard. La flatterie des dirigeants rend un mauvais service à la Russie si quiconque souhaite encore croire que la Russie pourrait devenir un pays européen, plutôt que l’Europe ne devienne une annexe politique à la Russie antidémocratique.
Nous ne discutons que de la stratégie unie de l’Europe pour l’énergie, mais nous nous refusons à admettre que la Russie ne permettra jamais qu’elle se concrétise dès lors qu’elle a déjà installé son cheval de Troie au beau milieu de l’Europe. Les partisans de M. Schroeder et les autres acteurs atteints de cécité politique n’auront de cesse de démanteler une Europe unie.
Malheureusement, une seule chose nous est permise au sein de cette Assemblée: parler librement de la reddition morale délibérée d’influents Européens. Le président russe est quant à lui parfaitement libre lorsqu’il proclame que les valeurs européennes sont inappropriées pour sa Russie et pour son régime. Aux yeux des politiques russes, l’Europe peut tout simplement reléguer aux oubliettes sa charte pour l’énergie, de même que la charte des droits de l’homme, dès lors que l’Europe signe de toute manière automatiquement tout ce que lui dicte la Russie. Le constat a été exprimé à Sochi et à de multiples autres occasions. Tel est le réel partenariat et l’espace commun. Tel est l’espace commun où les journalistes sont assassinés et nous n’osons pas demander si cet espace commun peut nous accueillir. Nous nous mettons pourtant en colère contre la Corée du Nord et l’Iran, au lieu de reconnaître à l’évidence que les deux boutons, à Téhéran et à Pyongyang, sont actionnés par le même acteur logé dans une position sensiblement intermédiaire.
Nous devrions au moins nous efforcer de comprendre qu’Anna Politkovskaïa, la dernière journaliste courageuse, a été abattue non seulement par la Russie de Poutine, mais également par l’Europe conformiste.
(Applaudissements)
Bogusław Sonik (PPE-DE). - (PL) Monsieur le Président, il est consternant que le chemin de la liberté civile et du respect des droits humains fondamentaux soit toujours parsemé de meurtres d’innocents.
Nous discutons aujourd’hui de l’assassinat de Mme Politkovskaïa, la femme qui, dans une résolution inébranlable, a révélé au grand jour les crimes commis par les Russes contre le peuple tchétchène. Rappelons-nous cependant que d’autres avant elle ont perdu la vie dans le combat contre un dictateur, tels que le journaliste ukrainien M. Gongadze ou le journaliste libanais M. Kassir. Dans ces affaires, l’État a-t-il tout fait pour protéger les personnes qui ont mis en lumière le lien entre les pouvoirs publics et les criminels? Ou la haine pour leur attitude intransigeante et leurs écrits a-t-elle conduit à fermer les yeux, à se laver les mains à la Pilate, à l’indifférence de l’État pour leur sort et les menaces de mort qui pesaient sur elles?
La Russie a de tout temps été le berceau de grandes personnalités, qui se sont opposées au courant de la dictature et qui ont risqué leur vie pour dévoiler les crimes et les injustices de leurs gouvernements. Il nous suffit de penser à des noms tels que Kravchenko, Bukovsky, Sakharov ou encore Soljenitsyne. En tant que citoyens du monde libre, devons-nous à chaque fois abandonner ces personnes à leur sort? Non, nous n’avons pas suffisamment soutenu Mme Politkovskaïa de son vivant. Soutenons-la après sa mort.
Je suis d’avis que l’enquête sur ce crime doit être menée sous une surveillance internationale, ainsi que cela a été décidé pour le meurtre du premier ministre libanais Rafik Hariri. Je ne peux imaginer que l’Union européenne signe un accord de coopération avec Moscou sans qu’une enquête ne soit diligentée sur ce crime et sans que les personnes qui l’ont commandité et perpétré ne soient traduites en justice. L’Union européenne doit accorder la priorité soit aux engagements à l’égard de la liberté et des droits civils et humains, soit aux intérêts économiques et énergétiques.
Monsieur le Président, l’heure de vérité a sonné. Nous devons être inflexibles. Nous le devons à cette journaliste assassinée.
Simon Busuttil (PPE-DE). - (MT) Monsieur le Président, j’espère que le sommet de la semaine prochaine se penchera sur la lettre adressée à la présidence finlandaise par pas moins de huit chefs de gouvernement, dans laquelle il est question de l’immigration clandestine. Bien que l’été soit terminé et que l’on puisse à présent escompter un ralentissement de l’afflux, il est de notoriété publique que nous avons traversé une crise et que cette crise continue de sévir. Si nous restons passifs, nous serons confrontés l’année prochaine à des problèmes plus aigus encore. Je dois dire que nous avons assisté au cours de ces derniers jours aux premières démarches concrètes fondées sur nos efforts pour persuader les pays européens de s’attaquer de concert au problème de l’immigration clandestine. Premièrement, les patrouilles dans la Méditerranée ont débuté la semaine dernière. Je constate que M. Frattini est présent, et je souhaiterais reconnaître son rôle. J’espère que ces patrouilles méditerranéennes incarnent clairement le message que la Méditerranée n’est pas une mer libre, ouverte à tous, où les associations du crime organisé peuvent sans entrave convoyer les immigrants en Europe. Deuxièmement, nous avons procédé à un vote à la commission des budgets, par lequel nous avons augmenté sensiblement, à près de 35 millions d’euros, le budget de l’Agence Frontex de sorte qu’elle puisse renforcer ses opérations à nos frontières extérieures. J’espère que le Conseil acceptera de nous aider, au lieu d’amputer le budget de Frontex ainsi qu’il a déjà essayé de le faire. Comment le Conseil peut-il prétendre qu’il livre une bataille sérieuse contre l’immigration clandestine s’il autorise en même temps les gouvernements européens à adopter un comportement mesquin et à tenter de réduire le budget dans ce domaine au lieu de l’accroître? Troisièmement, il semble qu’un accord sera conclu cette semaine sur les quatre fonds européens relatifs à l’immigration, qui entameront leurs activités en janvier prochain. Je me félicite de l’adoption de mesures telles que la clause d’urgence, qui permet à l’Union européenne d’apporter une aide financière immédiate dans des situations d’urgence. Il reste beaucoup à faire pour que les citoyens ressentent que l’Europe prend bel et bien en considération leurs préoccupations sur l’immigration clandestine. Le Parlement s’est maintenant exprimé, à l’instar de la Commission. Nous attendons désormais que le Conseil apporte sa contribution. Merci.
Alexander Stubb (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, ayant entendu les applaudissements du club de supporters de football de M. Landsbergis, j’espère que le fan club de l’équipe nationale finlandaise dans l’État européen du Kazakhstan est tout aussi puissant. Le match a en effet commencé depuis 25 minutes et le score affiche encore 0-0, et nous aurions donc besoin d’un coup de main!
En premier lieu, je soutiens la présidence finlandaise et son programme pour Lahti. En ce qui concerne l’énergie extérieure, vous savez ce que vous avez à faire: vous devez remercier M. Poutine pour le fait que le sujet est effectivement inscrit à l’ordre du jour, car l’année dernière, sensiblement à la même période, il faisait quelque peu pression sur les oléoducs ukrainiens et il s’agit en fait de la raison pour laquelle nous abordons ce dossier à Lahti. Dites-lui donc un grand merci lorsqu’il se présentera au sommet.
En deuxième lieu, s’agissant de l’innovation, il n’est pas question de placement de produit, mais force est de constater que nous dépensons quelque 4 milliards d’euros par an pour l’innovation et pour la recherche et le développement. Cette somme est inférieure au budget annuel qu’affecte Nokia à la recherche et au développement. J’espère que cette comparaison suscitera une réflexion parmi les dirigeants du Conseil européen.
Mon troisième point a trait aux relations entre l’UE et la Russie. Il est amusant d’écouter le débat dans cette Assemblée, excepté bien entendu à propos de l’affaire de meurtre. Il me semble parfois que nous sommes beaucoup plus prompts à critiquer les États-Unis que la Russie et, dans les circonstances récentes, nous devrions peut-être traiter la Russie comme une superpuissance à l’instar des États-Unis.
Je tiens à prêter un soutien extrêmement fort au président de la Commission sur l’IET. Je crains que de nombreux malentendus n’entourent le concept. Il s’agit d’un réseau qui, à mes yeux, fonctionnerait très bien. Tout le monde s’accorde sur le problème, mais la question est à présent de savoir comment nous pouvons trouver une solution. Je pense que nous avons besoin de partenariats entre les secteurs public et privé, sur le modèle notamment du MIT aux États-Unis. En ce sens, j’espère que cette initiative que vous avez lancée sera couronnée de succès.
Enfin, le problème des Conseils européens informels tient à ce qu’il en ressort généralement très peu d’éléments concrets. Madame la Présidente en exercice, si vous quittez le sommet avec trois acquis, je pense qu’il aura constitué une réussite. Premièrement, un feu vert pour l’IET; deuxièmement, une législation sur les brevets ou à tout le moins une promesse de légiférer; et troisièmement une politique commune sur l’énergie. Si vous ne pouvez engranger ces résultats, je crois que les futurs Conseils européens informels seront aussi déserts que l’est cette Assemblée aujourd’hui.
Paula Lehtomäki, présidente en exercice du Conseil. - (EN) Monsieur le Président, je souhaiterais remercier le Parlement européen pour la précieuse contribution qu’il a apportée à travers les discussions de ce jour. Je peux certifier que je transmettrai le message au Premier ministre pour qu’il en tienne compte dans les préparatifs du sommet de Lahti.
À l’évidence, il est exact que l’innovation et la compétitivité attirent depuis longtemps l’attention européenne, mais nous avons aujourd’hui pour ambition de transformer les discours en action, ou à tout le moins d’ouvrir la porte à des progrès. L’action est ce qu’il nous faut réellement à l’heure actuelle.
Dans le cadre du partenariat stratégique que nous entretenons avec la Russie, toutes les questions peuvent être abordées et elles le seront. Je suis persuadée que les sujets extrêmement importants que vous avez soulevés au cours des débats seront également traités à l’occasion de nos réunions. Je me réjouis à l’idée que vous pourrez poursuivre la discussion sur les conclusions du sommet de Lahti avec le Premier ministre finlandais d’ici à la fin du mois, le 25 octobre, à Strasbourg. Je vous remercie sincèrement et j’escompte bien obtenir quelques résultats concrets au sommet de Lahti.
José Manuel Barroso, président de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, je me permets tout d’abord de saluer le large soutien qui a été exprimé pour le programme sur l’innovation, pour un Institut européen de technologie, pour une politique énergétique commune et pour une politique européenne de l’immigration. Laissez-moi toutefois souligner que nous devons diffuser le message en dehors de cette Assemblée puisque, ainsi que certains l’ont remarqué, il subsiste quelques malentendus.
Je souhaiterais mentionner simplement l’IET. Il est intéressant de noter que chacun admet que nous n’en faisons pas assez en Europe en termes d’innovation et qu’il n’existe pas suffisamment de liens entre les universités et les centres de recherche et le monde de l’économie, les entreprises et les projets concrets. Mais dès qu’une idée est émise pour transformer la situation, la résistance est immédiate. C’est prodigieux! Tout le monde clame alors: «Mais nous avons d’excellentes universités!» - naturellement nous avons d’excellentes universités! Mais si nous avons d’excellentes universités, pourquoi restons-nous à l’arrière-plan des Américains et d’autres acteurs? Il y a un problème. Nous ne pouvons opter pour le statu quo. Nous ne pouvons nous endormir dans la routine.
Je sais que nous avons d’excellentes universités. Les universités ont été créées en Europe. Elles sont une invention européenne, mais nous ne mettons pas pleinement à profit les avantages ou le potentiel de notre dimension européenne. Soyons honnêtes: certaines de nos universités sont encore extrêmement corporatistes, extrêmement fermées. Il nous faut une dimension européenne. Même les plus grands États membres n’ont pas la dimension requise pour promouvoir la culture mondiale qui nous est aujourd’hui indispensable afin d’affronter les enjeux du XXIe siècle. L’idée repose par conséquent sur un réseau. Elle n’implique aucune institution bureaucratique démesurée; elle s’appuie sur un réseau, en misant sur les principes de l’excellence, sur ce que font toutes les excellentes universités et tous les excellents centres de recherche, mais dans l’optique d’associer les entreprises à la recherche de façon à ce que nous puissions encourager l’innovation.
À la Commission, j’ai rencontré les dirigeants des entreprises européennes les plus importantes, qui sont à la pointe de la recherche dans le monde. J’ai recueilli un franc soutien pour cette idée et je pourrais nommer certaines de ces entreprises. Deux de ces dirigeants de l’économie européenne sont originaires des États-Unis, et ils m’ont confié lors de notre entretien que leur principal choc lorsqu’ils sont arrivés en Europe a été de découvrir que, à la différence des États-Unis où il existe des institutions américaines pour l’Amérique tout entière, nous ne sommes pas dotés en Europe d’une telle architecture. Nous accomplissons seulement nos premiers pas aujourd’hui avec le Conseil européen de la recherche. Ainsi, nous possédons de fantastiques institutions de promotion de la recherche en Allemagne, au Royaume-Uni, en France et en Suède. Nous possédons de fantastiques atouts, mais une dimension européenne nous fait défaut. Une mission européenne nous fait défaut pour leur procurer les outils concrets qu’elles requièrent afin de rivaliser avec l’élite. C’est pourquoi je considère que cette idée est formidable. J’espère qu’elle sera soutenue non seulement sur un plan général, mais également lorsque nous présenterons des propositions concrètes. J’espère en conséquence bénéficier de votre soutien la semaine prochaine lorsque nous soumettrons une proposition concrète sur l’IET, et j’espère bénéficier de votre soutien en janvier lorsque nous soumettrons un projet sur l’énergie empreint d’une réelle ambition.
Ma dernière remarque porte sur la cohérence. Le meilleur moyen de négocier avec la Russie est d’adopter une position cohérente et unitaire. Si nous souhaitons être crédibles dans nos discussions avec la Russie ou avec d’autres partenaires, nous devons leur montrer que nous sommes nous-mêmes en mesure d’appliquer une politique cohérente. Nous ne pouvons mener une discussion sérieuse avec eux sur l’énergie si nous cumulons 25 politiques énergétiques différentes. La chose ne serait pas crédible, soyons réalistes.
La première mesure à prendre, si nous souhaitons donner une image crédible au monde extérieur, consiste à balayer devant notre propre porte et à définir une approche conjointe réelle sur l’énergie. La même remarque s’applique bien entendu à d’autres domaines. J’approuve toutefois fortement que la lutte contre le changement climatique constitue une facette essentielle de notre politique énergétique et nous devons rappeler que l’Union européenne est un pilier incontournable sur ce terrain. Nous occupons même la tête du classement mondial. Je peux vous assurer que, lorsque nous évoquons cette question avec nos amis américains, avec nos partenaires russes, avec les Chinois ou avec les Indiens, nous plaçons systématiquement la problématique au premier plan de nos négociations. Il est important de faire ce que nous pouvons, mais également d’impliquer les autres dans ces efforts. Tous ces sujets - de l’innovation à l’immigration en passant par l’énergie et la lutte contre le changement climatique - font toutefois apparaître un plaidoyer puissant pour l’Europe. À l’ère de la mondialisation, même les plus grands États membres n’ont pas les moyens de relever ces défis. Si vous aspirez à une Europe puissante, nous progressons donc dans la bonne direction. Une Europe puissante n’est pas bureaucratique, mais elle a une approche commune à l’égard de ces matières.
Nous devons également nous exprimer d’une seule voix sur le thème des droits de l’homme, et j’espère que tel sera le message qui sortira de Lahti: les dirigeants européens sont certes issus de milieux politiques et idéologiques différents, de situations nationales différentes, mais ils sont prêts à construire ensemble une Europe puissante et ils sont prêts à parler d’une seule voix au monde extérieur. Voilà l’espoir que je nourris pour Lahti.
Le Président. - Le débat est clos.
Déclarations écrites (article 142)
Pedro Guerreiro (GUE/NGL). - (PT) En marge de questions internationales importantes, le prochain Conseil européen doit étudier ce que l’on appelle la «politique de l’innovation», la proposition de «politique énergétique commune» et «l’immigration clandestine», autant de sujets sur lesquels des documents de travail n’ont pas encore été déposés. Nous y reviendrons en temps utile.
Apparemment, deux débats ont été oubliés de l’ordre du jour: l’un sur nos «capacités d’absorption» «fonctionnelles» ou «liées à l’assimilation», autrement dit l’élargissement à la Croatie et à la Turquie, et l’autre sur la réforme institutionnelle (la composition de la Commission et du Parlement et le mécanisme décisionnel du Conseil). Ce débat doit établir les règles du jeu, qui sont toujours choisies par les grandes puissances européennes dans leurs propres intérêts.
Un autre débat absent de l’ordre du jour porte sur les tentatives destinées à imposer (à nouveau) la prétendue «Constitution européenne», qui a déjà été rejetée. Jusqu’à présent, et malgré de nombreuses tentatives en ce sens, le désaccord persiste sur les procédés susceptibles d’être mis en œuvre pour ressusciter cette fameuse «Constitution européenne», sous une forme déguisée ou autrement. Ses partisans réfléchissent, ils préparent le terrain et ils constituent des groupes d’étude dans l’attente des élections françaises et de la présidence allemande, qui est supposée présenter le (pseudo) «chemin pour l’avenir».
Plus ils tergiversent, moins les travailleurs et les citoyens ont conscience de l’importance réelle et des objectifs fondamentaux de l’UE.