Le Président. - L’ordre du jour appelle la question orale de MM. Joseph Daul et Janusz Wojciechowski, au nom de la commission de l’agriculture et du développement rural, à la Commission, sur la situation du secteur des fruits à baies et des cerises destinés à la transformation (O-0085/2006 - B6-0435/2006).
Czesław Adam Siekierski (PPE-DE), auteur. - (PL) Monsieur le Président, chacun peut constater l’importance croissante du marché des fruits et légumes. Cette évolution est due en partie à l’accroissement de la consommation et à l’intérêt qu’ont les producteurs à cultiver de tels produits pour améliorer leurs revenus. Au cours des négociations d’adhésion, malgré les bons exemples de solutions appliquées aux marchés de la tomate, de la pêche ou du citron, il y a eu un manque de volonté de la part de l’UE de résoudre positivement le problème du marché des fruits à baies. L’année 2004 a été difficile pour les producteurs de fruits à baies en Pologne. J’ai envoyé ma première lettre à ce sujet à l’ancien commissaire à l’agriculture, M. Fischler, en juillet 2004. Parallèlement, la Commission européenne a commencé à travailler à la simplification du marché commun des fruits et légumes dans l’UE, ce qui a fait l’objet d’un rapport en août 2004. En mars 2005, le Parlement européen a adopté une position à ce sujet.
Suite aux nombreux discours et interventions des députés européens polonais auprès de la commission de l’agriculture, nous avons réussi à convaincre notre président, Joseph Daul, à faire entendre sa voix à ce sujet. Suite à son intervention, des visites d’expertise ont été effectuées en Pologne en avril et juillet 2005 par des représentants de la Commission européenne qui ont examiné la question du marché polonais des fruits à baies et de la cerise et rédigé un rapport. En 2005, les cultivateurs polonais de fruits à baies ont enregistré des revenus négatifs pour leurs produits sur ce marché. En 2006, la commission de l’agriculture du Parlement européen a inscrit à son programme une session en Pologne, pour permettre à ses membres de constater eux-mêmes les difficultés dont leurs collègues polonais leur avaient parlé. La commissaire, qui n’est pas présente ici aujourd’hui, était probablement déjà bien informée du problème. À propos, je serais curieux de savoir si quelqu’un, à la Commission, a compté combien d’interventions les députés ont faites à ce sujet.
Pendant la visite en Pologne, la Commission européenne a présenté pour la première fois un rapport sur la situation dans le secteur des fruits à baies et des cerises destinés à la transformation. Ce rapport est incomplet, car il ne tient pas compte du manque d’intégration horizontale, c’est-à-dire de relations entre le producteur et l’entreprise de transformation. De plus, il ne mentionne pas le fait que les producteurs sont absents de la structure du capital social de cette industrie, ni que les capitaux étrangers ont la prépondérance. Pas plus qu’il ne présente de scénarios du développement probable de la situation sur le marché des fruits à baies à l’avenir. Il y est déclaré que tous les problèmes de ce marché polonais particulier doivent se résoudre d’eux-mêmes. Comme les deux années précédentes, 2006 s’est avérée à nouveau extrêmement difficile pour les producteurs de fruits à baies et a été une année de crise. La commission de l’agriculture a donc demandé qu’une action dans ce domaine soit diligentée et intensifiée, d’où le débat d’aujourd’hui et la résolution que cette Assemblée adoptera par son vote de demain. La version finale étant maintenant au point, passons-la en revue.
Les députés appellent la Commission européenne, premièrement, à prendre des mesures pour améliorer la compétitivité des fruits à baies dans l’UE. Deuxièmement, elle devrait agir immédiatement pour limiter les importations excessives de fruits à baies en provenance de pays tiers à des prix écrasé. Comme vous le savez, la commission anti-dumping a décidé hier d’imposer immédiatement des taxes sur les fraises surgelées exportées par des entreprises chinoises. La taxe supplémentaire sera de 0 %, 12,6 % ou 32,4 % suivant le cas. Troisièmement, un mécanisme de soutien pour groupes de producteurs devrait être introduit, afin d’encourager les producteurs à se regrouper, par exemple en doublant le taux des aides pour les groupes formés, puis reconnus. Quatrièmement, d’autres instruments devraient être introduits, comme une clause spéciale de sauvegarde, des mécanismes de prix d’entrée ou l’inclusion des fruits à baies sur la liste des produits sensibles. Une cinquième recommandation prévoit la mise en place d’un système de soutien de la transformation des fruits à baies, tels les fraises ou les framboises, analogue à celui actuellement appliqué pour les tomates, les pêches ou les agrumes, pour stabiliser le marché.
En ce qui concerne le point final, je sais que la commissaire Fischer-Boel, qui n’est pas présente aujourd’hui, était plutôt sceptique à ce sujet; c’est pourquoi il serait peut-être opportun d’envisager l’introduction d’un système régional de paiements pour la culture de fruits à baies pour la transformation. Cela s’ajouterait aux subventions actuelles du système SAPS. Une solution analogue est proposée pour réformer le marché de la banane, où les règles d’attribution des subventions à la production calculées en tonnes ont été remplacées par des subventions calculées par zone de culture. Pour augmenter la compétitivité du secteur, ces paiements doivent être liés à une obligation d’affiliation à des groupes ou organisations de producteurs et à une obligation de vendre la production dans un cadre contractuel. La résolution contient également diverses autres mesures et propositions intéressantes.
Les producteurs de fruits à baies ont perdu trois ans et, au train où vont les choses en matière de réforme du marché, il est probable qu’ils en perdront encore deux autres. Ce n’est qu’en avril 2007 que les propositions législatives de solutions pour les secteurs des fruits et légumes doivent être présentées.
Neelie Kroes, membre de la Commission. - (EN) Merci pour votre question. Si je ne me trompe, elle comporte six points, que je vais aborder un par un.
Point un: hier, les services de la Commission ont présenté aux États membres, à la commission anti-dumping, un projet de règlement visant à imposer une taxe supplémentaire provisoire sur les importations de fraises surgelées en provenance de Chine. La procédure écrite d’adoption par la Commission est en cours.
En ce qui concerne le second point, la question du faible niveau d’organisation dans les nouveaux États membres sera examinée dans le cadre des préparations pour la proposition de réforme de l’organisation commune du marché des fruits et légumes.
Pour le point trois, la Commission a récemment proposé de simplifier les règles sur les aides d’État de manière à faciliter le soulagement de la crise. En particulier, il est proposé que, sous réserve de certaines conditions, l’aide versée en cas de mauvaises conditions climatiques ne soit pas soumise à l’autorisation préalable de la Commission.
Le point quatre concerne la gestion de la crise. La question de la gestion de la crise sera étudiée dans le cadre des propositions de la Commission pour la réforme du marché des fruits et légumes.
En ce qui concerne le point cinq, la Commission n’est pas favorable à des incitations financières pour la destruction des plantations. Toutefois, les État membres ont la possibilité de mettre en œuvre des programmes nationaux, à condition qu’ils soient conformes aux règles sur les aides d’État.
Enfin, pour le point six, la promotion est effectivement un aspect important. Des fonds communautaires existent pour le lancement de programmes de promotion de la consommation des fruits à baies, et permettez-moi de vous rappeler que la plupart des aspects mentionnés ci-dessus sont en cours d’examen dans le cadre du processus de préparation pour les propositions de réforme de l’organisation commune de marché que la Commission présentera prochainement.
Csaba Sándor Tabajdi, au nom du groupe PSE. - (HU) Le plan d’action préparé par la Commission européenne représente une bonne base et la décision contre le dumping des fraises chinoises est positive, mais ce n’est pas une solution durable. La seule solution rassurante à long terme serait, pour ces types de produits - cerises, cerises acides, fruits à baies, champignons et céréales - qu’ils soient inclus parmi les produits destinés à la transformation et, par suite, parmi les produits bénéficiant de subventions de transformation dans le cadre de la réforme du secteur des fruits et légumes.
Cela serait très important, surtout pour les nouveaux États membres, particulièrement cette année puisque les producteurs des nouveaux États membres ne reçoivent que 35 % des paiements directs. Si les produits de ce secteur ne sont pas inclus parmi ceux destinés à la transformation, il n’y aura pas d’aide significative pour les nouveaux États membres. Je me bats depuis plus d’un an et demi pour cela et j’ai bien l’intention de continuer.
Janusz Wojciechowski, au nom du groupe UEN. - (PL) Monsieur le Président, nous discutons de fruits à chair tendre, mais ce sont de dures batailles que nous menons à leur sujet depuis le début de cette législature. Je suis très heureux que la situation difficile des producteurs de fruits à baies et de cerises ait gagné la compréhension de cette Assemblée. En tant que député polonais, je voudrais remercier tous mes collègues pour cela. Je vous remercie pour votre approche compatissante de la question, qui affecte principalement les producteurs de mon pays. Je vous remercie pour votre solidarité, notamment notre collègue de la commission de l’agriculture qui s’est rendu personnellement en Pologne pour rencontrer les producteurs et se rendre compte de leur situation sur le terrain.
Le projet de résolution prévoit des actions qui satisferont nos producteurs et contribueront à stabiliser le marché des fruits à baies et des cerises, ce qui est très important pour l’avenir de ce secteur important. La protection contre les importations excessives, l’inclusion des fruits à baies et des cerises dans la liste des articles sensibles, une aide accrue aux groupes de producteurs et une compensation pour les fruits restés invendus pendant la crise: toutes ces solutions sont vraiment indispensables.
Je pense que les déclarations contenues dans cette résolution n’en resteront pas au stade du papier et que la Commission européenne présentera rapidement un projet de législation spécifique. En tant que co-auteur du projet résolution, je vous demande de voter favorablement.
Zdzisław Zbigniew Podkański (UEN). - (PL) Monsieur le Président, le débat d’aujourd’hui sur la situation du secteur des fruits à baies et des cerises destinés à la transformation est l’aboutissement de plus de deux ans de discussions sur cette question cruciale pour les producteurs et les entreprises de transformation de l’Union. La protection insuffisante du marché intérieur, le dumping, les catastrophes naturelles, la faiblesse des prix et l’avidité et la déloyauté de nombreux acheteurs se traduisent par d’énormes pertes pour les producteurs de fruits, notamment dans les nouveaux États membres comme la Pologne, qui fournit les deux tiers de la production communautaire de ce secteur.
Ce sont les producteurs de la plus pauvre des régions d’Europe, la Lubelszczyźna - qui fournit un sixième de la production totale -, qui ont été le plus durement touchés par la situation difficile du marché des fruits à baies. Dans le cadre de mes activités parlementaires, j’ai fréquemment soulevé cette question sous diverses formes. C’est pourquoi je suis heureux que notre débat d’aujourd’hui se termine par une résolution concrète qui nous permettra de corriger les erreurs de négociation que nous avons faites à Copenhague et d’établir une base pour la décision que des milliers de producteurs attendent.
Je remercie donc tous mes collègues pour leur coopération et je compte fermement sur leur soutien lors du vote sur la résolution.
Zbigniew Krzysztof Kuźmiuk, (UEN) - (PL) Monsieur le Président, nous débattons de la situation du secteur des fruits à baies alors qu’au bout de près de deux années d’efforts de la part de nombreux députés, la Commission européenne a décidé d’imposer des taxes anti-dumping sur les fraises surgelées importées de Chine. C’est une décision qui s’est fait attendre longtemps et dont on espère qu’elle limitera la menace des exportations croissantes de fraises surgelées importées de Chine à des prix écrasés. Je voudrais exprimer l’espoir que la Commission européenne mettra aussi prochainement en application certaines des autres propositions incluses dans le projet de résolution préparé par M. Daul et M. Wojciechowski, comme les clauses de protection, les prix d’entrée, les compensations pour les pertes dues aux mauvaises conditions climatiques ou en cas de crise sur le marché, et un mécanisme de soutien substantiel pour les groupes et organisations de producteurs.
Neelie Kroes, membre de la Commission. - (EN) Je vous remercie pour vos contributions à ce débat. J’informerai ma collègue, la commissaire Fischer Boel, des préoccupations que vous avez exprimées.
Tous ces aspects sont en cours de discussion approfondie dans le cadre de la préparation de la très prochaine réforme du marché des fruits et légumes. Je ferai mon possible pour répondre à certaines des questions que vous avez posées.
La question de M. Tabajdi est centrée sur l’idée que la Commission devrait introduire un mécanisme de soutien pour les organisations de producteurs qui vendent des fruits à baies à l’industrie de la transformation. Il a fait une remarque concernant le soutien des organisations de producteurs qui vendent des fruits à baies à l’industrie de la transformation à un moment où les régimes existants sont en cours de révision dans le contexte de la réforme du secteur. La Commission estime que l’introduction d’un tel mécanisme de soutien serait inadéquate d’un point de vue technique. Il serait également inopportun et en contradiction avec les principes qui sous-tendent la réforme de la PAC.
«La Commission devrait prendre et appliquer des mesures de restriction des importations excessives de fruits à baies, en particulier celles faites à des prix écrasés.» Il est vrai que certaines des difficultés que connaît le secteur des fraises destinées à la transformation sont dues aux importations à bas prix de fraises surgelées en provenance de pays tiers. La Commission a présenté hier aux États membres et à la commission antidumping et antisubventions une proposition visant à imposer des mesures provisoires antidumping sur les importations de fraises surgelées de Chine. La procédure d’adoption par la Commission est en cours. Dans les autres sous-secteurs, les importations de pays tiers jouent un rôle, soit marginal - par exemple pour le cassis et les cerises aigres - soit elles ont diminué au cours des dernières années, comme c’est le cas pour les framboises, par exemple. Dans le cas des framboises surgelées, la Pologne a augmenté sa part de marché ces dernières années aux dépens des importations de pays tiers.
M. Siekierski, vous posiez la question des mécanismes de soutien pour les groupements de producteurs: ils existent dans l’organisation commune du marché des fruits et légumes et dans législation sur le développement rural. Dans son rapport sur la situation dans le secteur des fruits à baies et des cerises, la Commission a indiqué que, dans le cadre de la réforme de l’organisation commune du marché des fruits et légumes, la Commission peut proposer un soutien spécifique supplémentaire pour les États membres à faibles niveaux d’organisation, et cela est en cours d’examen dans le contexte de la préparation de la réforme.
M. Siekierski, M. Wojciechowski et d’autres députés veulent que les fruits à baies soient inscrits sur la liste des marchandises sensibles et qu’ils soient protégés par la clause de sauvegarde spéciale et le système des prix d’entrée. La clause de sauvegarde spéciale a été introduite par l’Uruguay Round pour les produits tarifés. Dans le cas des fruits et légumes, cela concernait les produits relevant du système des prix de référence. Il n’est plus possible d’allonger la liste des produits couverts par la clause de sauvegarde spéciale. De même, le système des prix d’entrée s’applique aux produits qui étaient couverts précédemment par le système des prix de référence. Il n’y a pas de possibilité d’inclure les fruits à baies dans le système des prix d’entrée.
Le Président. - Merci, Madame la Commissaire, pour vos informations. Les cerises étant mes fruits préférés, je vais pouvoir dormir tranquille. J’espère qu’il en est de même pour les autres députés.
J’ai reçu une proposition de résolution (B6-0525/2006(1)), déposée sur la base de l’article 108, paragraphe 5, du règlement.