Le Président. - L’ordre du jour appelle la déclaration de la Commission sur le sida.
Vladimír Špidla, membre de la Commission. - (CS) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, ces dernières années, des progrès considérables ont été réalisés, de manière générale, dans la lutte contre l’épidémie de VIH/sida, dont un meilleur accès à un traitement efficace et à des programmes de prévention. Le nombre de personnes infectées par le VIH ou mourant du sida continue néanmoins à augmenter. D’ici la fin de l’année 2006, près de 40 millions de personnes seront infectées par le VIH, soit 2,6 millions de plus qu’à la fin de l’année2004. On estime qu’en 2006, 4,3 millions de personnes, adultes et enfants confondus, ont été contaminées par le VIH, soit 400 000 de plus qu’il y a deux ans.
L’Afrique subsaharienne reste en première ligne de cette épidémie. Plus de 63 % de tous les adultes contaminés par le VIH vivent à présent dans des pays d’Afrique subsaharienne, et 33 % en Afrique du Sud. La plus forte augmentation de ces deux dernières années a été observée en Asie de l’Est, en Europe de l’Est et en Asie centrale, où le nombre de personnes infectées par le VIH a crû de 21%. L’augmentation continue du nombre de nouveaux cas dans la plupart des États membres de l’UE ainsi que les résultats d’enquêtes Eurobaromètre de 2005 montrent que la population de l’UE et de ses voisins doit d’urgence être sensibilisée à l’épidémie et que les programmes de prévention dans ce domaine doivent être renforcés. La stratégie mise en place par la Commission en 2005 était centrée autour de la priorité de renforcement de la prévention, du traitement et des soins dans certaines régions.
Malgré ces chiffres alarmants, certains pays d’Afrique et des Caraïbes, ainsi que certaines régions d’Asie du Sud ont connu une diminution de l’incidence du sida. Il est possible d’inverser la tendance. Il y a dans le monde plus de femmes contaminées par le VIH que jamais. En 2006, le nombre de femmes infectées a atteint 17,7 millions, soit un million de plus qu’au cours des deux dernières années. La situation dans les pays d’Afrique subsaharienne est encore pire. Les femmes représentent 60% des adultes de plus de 15 ans infectés par le VIH. Outre les facteurs biologiques et le fait que les femmes et les filles sont beaucoup plus susceptibles d’être contaminées par le VIH, des facteurs économiques et sociaux dus à l’inégalité entre hommes et femmes et à la négligence de leurs droits jouent également un rôle. L’égalité des droits entre hommes et femmes est un enjeu social clé et une condition préalable essentielle à un développement équitable et à une prévention accrue du VIH. Pour que les filles et les femmes du monde puissent accéder à la santé sexuelle et génésique, les services de santé des pays en développement doivent être renforcés de manière mettre en place un programme global comprenant conseil volontaire, examens médicaux et soins et soutien.
L’accès aux médicaments et aux soins de santé s’est considérablement amélioré ces dernières années, même si la plupart des pays partaient d’une base très faible. Grâce à la mise à disposition accrue d’antirétroviraux, quelque 2 millions de vies ont été sauvées en près de quatre ans et, même dans les pays d’Afrique subsaharienne, quelque 8 000 personnes ont reçu un traitement. Néanmoins, malgré cette avancée encourageante, la situation donne matière à inquiétude et la communauté internationale doit y accorder davantage d’attention.
La Commission est en train de mettre en place, en faveur des pays partenaires d’Afrique et d’ailleurs, une assistance intensive qui vise à lutter contre l’épidémie en intégrant la prévention, le traitement et les soins. Le VIH/sida ne peut pas être considéré comme un problème isolé, car il fait ressortir tous les problèmes majeurs rencontrés par les pays en développement, à savoir un accès limité aux services sociaux de base, l’inégalité entre hommes et femmes, la répartition inégale des ressources, une administration publique inefficace et un faible niveau de développement économique et technologique. Le VIH/sida est étroitement lié au paludisme et à la tuberculose, qui sont également des maladies infectieuses liées à la pauvreté. On ne pourra lutter efficacement contre le VIH/sida que si les pays partenaires le combattent dans le contexte d’efforts visant à réduire la pauvreté.
Le principe de base du cadre politique européen adopté en 2004 et du programme d’action européen pour lutter contre le VIH/sida, le paludisme et la tuberculose adopté l’année suivante est une approche intégrée du VIH. Le programme d’action européen doit être mis en œuvre et coordonné par la Commission, tant au niveau national qu’au niveau mondial. Ce sont en effet les pays partenaires qui sont les mieux placés pour décider de la meilleure manière de répartir les ressources de manière efficace, équitable et transparente entre les différentes initiatives.
Au fil des ans, la Commission a constamment augmenté ses ressources pour la lutte contre le VIH/sida dans tous les pays en développement, en particulier en Afrique, où elle apporte, via une aide budgétaire, une assistance aux pays partenaires dans leurs efforts visant à s’attaquer aux facteurs structurels à la base de l’épidémie de VIH, tels que les réformes des soins de santé et la crise dans le domaine des ressources humaines dans le secteur de la santé. Entre autres initiatives, la Commission a également investi une somme d’argent considérable, 552 millions d’euros sur cinq ans, dans la lutte contre le VIH/sida dans les pays en développement, dans le cadre du Fonds mondial de lutte contre le VIH/sida, le paludisme et la tuberculose. En 2006, le rôle de la Commission au sein du Fonds mondial a été totalement confirmé par l’élection d’un membre de la Commission européenne au poste de vice-président du Fonds.
La Commission a traditionnellement pris la tête des efforts visant à améliorer l’accès aux antirétroviraux dans les pays en développement et à garantir la disponibilité du traitement et l’accès à la prévention universels pour ceux qui en ont besoin, à l’horizon 2010. Elle a également joué un rôle central dans la réduction du coût des produits pharmaceutiques. Dans certains cas, cette réduction a atteint 98%, et ce grâce à l’introduction d’un mécanisme de variation des prix qui permet aux pays en développement de payer des médicaments brevetés moins cher tout en protégeant les fabricants contre la réimportation de ces produits sur des marchés ouverts où des bénéfices peuvent être réalisés.
Dans le cadre de l’OMC également, la Commission aide les pays les plus pauvres, dont la capacité de production est limitée, à exercer leurs droits d’importer des médicaments génériques bon marché produits avec des licences obligatoires. La Commission a également renforcé son investissement dans la recherche et le développement de vaccins et autres moyens préventifs, tels que les microbicides, en vue d’élargir la gamme existante de mécanismes de prévention du VIH. La Commission poursuivra ces efforts afin que toutes les personnes qui en ont besoin puissent bénéficier pleinement de la prévention et d’un traitement à l’horizon 2010.
Comme les orateurs précédents l’ont dit, la Commission a, avec l’aide des États membres, entrepris de lutter contre la pandémie de VIH/sida au moyen d’une série de mesures axées sur la prévention, le traitement, le soutien et les soins. Nous sommes tout à fait conscients que l’objectif ultime d’une génération sans sida ne pourra pas être atteint sans un engagement politique ferme, des dirigeants bien informés et davantage de ressources au niveau mondial, national et local.
Nous nous trouvons face à un défi énorme: progresser encore dans la lutte contre le VIH/sida et faire en sorte que toutes les personnes qui en ont besoin puissent bénéficier de la prévention et d’un traitement à l’horizon 2010. Nous avons de toute urgence besoin d’une stratégie plus équilibrée en vue de renforcer la prévention et le traitement et de garantir l’accès à un traitement abordable, en particulier en ce qui concerne les médicaments brevetés de deuxième génération. Nous devons par conséquent mobiliser la volonté politique européenne autour de cette cause. Nous devons collaborer plus étroitement avec l’industrie pharmaceutique, en nous concentrant sur la mise au point de nouvelles méthodes de prévention, en particulier les microbicides, qui permettront de mieux prévenir le VIH/sida chez les femmes et de faire en sorte que les nouveaux médicaments soient plus abordables. Nous devons encourager l’industrie pharmaceutique à entreprendre des recherches et à mettre au point des vaccins et d’autres produits en vue de lutter contre le VIH/sida. Enfin, nous devons veiller à ce que les pays partenaires reçoivent un financement à long terme fiable en vue de les aider à lutter contre l’épidémie de VIH/sida.
Dans cette perspective, la Commission continuera à travailler, à plus grande échelle, à l’aide des instruments financiers au niveau national et mondial, y compris le Fonds mondial de lutte contre le VIH/sida, le paludisme et la tuberculose. Nous avons cependant besoin d’un soutien et d’une collaboration forts de la part de toutes les institutions de l’UE, dont le Parlement, celui-ci étant responsable de l’allocation annuelle des ressources financières. Dans la lutte contre le VIH/sida, nous avons la possibilité d’obtenir de meilleurs résultats, mais cela nécessite une volonté politique. La Commission croit fermement que les objectifs ultimes, à savoir une génération sans sida et un traitement et des soins pour tous ceux qui en ont besoin, peuvent être atteints. Je me réjouis de collaborer avec le Parlement en vue d’atteindre ces objectifs.
(Applaudissements)
John Bowis, au nom du groupe PPE-DE. - (EN) Alors que la Journée mondiale de lutte contre le sida approche, nous commémorons, nous nous souvenons de nos amis et nous décidons d’en faire plus. Nous commémorons cette année 25 ans de sida. Nous nous souvenons des 25 millions de nos concitoyens qui sont morts du sida et nous pensons aux 40 millions d’entre eux qui vivent avec. Un grand nombre d’entre eux vivent en Europe et beaucoup également dans nos pays voisins de l’Est, tels que la Russie, Kaliningrad et l’Asie centrale, mais deux tiers d’entre eux vivent en Afrique subsaharienne.
Nous avons, au Nord, promis notre aide. Nous avons affecté de l’argent à cette cause et l’avons par la suite bien trop souvent perdu. La science progresse, mais nous ne sommes pas encore sauvés. Seuls 5% des enfants séropositifs reçoivent une aide médicale. Moins de 10% des 15 millions d’orphelins du sida reçoivent une aide financière. Chaque année, nous prenons une résolution. Une résolution, c’est deux choses: une formule et des bonnes intentions, ou bien la ferme intention d’atteindre ces objectifs.
Nous devons investir dans la recherche et les essais en vue de mettre au point des vaccins contre le sida. Nous devons investir dans la prestation de services et dans la formation relative aux médicaments et aux thérapies, dans les mères et les enfants, dans des campagnes de prévention, dans les professionnels de la santé et des soins et dans les équipes d’aide des ONG. Nous devons abattre tous les obstacles en vue d’atteindre l’objectif des Nations unies d’accès universel aux services, au traitement et aux soins à l’horizon 2010, comme le commissaire l’a dit. 2010 n’est pas loin, mais nous sommes loin d’avoir atteint cet objectif.
(Applaudissements)
Glenys Kinnock, au nom du groupe PSE. - (EN) Monsieur le Président, les fonds que nous mettons à disposition pour la prévention du VIH/sida sont encore inférieurs de quelque 12 milliards de dollars à l’objectif. C’est pourquoi, comme l’a dit le commissaire, il est urgent de débloquer davantage de fonds publics et privés en vue de combler ce manque.
Il n’existe pas de panacée pour éradique le VIH, mais la formation et le financement dans le domaine de la recherche d’un vaccin et des microbicides, que le commissaire a mentionnés, doivent être renforcés. Le développement d’un microbicide vaginal doit être notre priorité immédiate, et l’on prévoit qu’il pourrait être mis au point et utilisé d’ici cinq ans. C’est le seul moyen pour les femmes de contrôler réellement leur santé sexuelle. C’est une méthode qui ne requiert pas le consentement du partenaire.
En outre, les traitements contre le sida dans le monde en développement ne seront et ne pourront pas être durables tant que ces pays ne recevront pas des versions plus récentes des médicaments génériques, qui sont de plus en plus nécessaires à mesure que les cas de VIH/sida résistant aux médicaments deviennent plus fréquents. Cela signifie que nous devons être plus audacieux dans la manière dont nous affrontons le problème des brevets derrière lesquels les entreprises pharmaceutiques continuent à se cacher, rendant le prix du traitement impossible à payer dans de nombreux pays en développement et dans le type de systèmes de santé que mon collègue, M. Bowis, a mentionné.
Georgs Andrejevs, au nom du groupe ALDE. - (LV) Monsieur le Président, Monsieur Špidla, je suis heureux que la Commission ait consacré la première section de cette communication à la nécessité d’impliquer la société civile dans tous les aspects de la lutte contre cette épidémie. Cela va dans le sens des dispositions des déclarations de Dublin et de Vilnius. Les informations et les services adaptés offerts par des centres d’aide facilement accessibles, gérés par des organisations non gouvernementales, aux groupes à risque d’une société touchée par le VIH peuvent ralentir la propagation du sida de manière significative dans un pays. En tant que rapporteur, je suis préoccupé par le fait que, dans plusieurs nouveaux États membres, l’existence durable de tels centres d’aide soit actuellement directement menacée en raison d’un manque de ressources financières. Il s’avère que, avant l’adhésion à l’Union européenne, ces centres recevaient une aide financière multilatérale de différents Fonds et organisations existants, dont certains non européens, qui à présent, à la suite de l’adhésion de ces pays à l’Union européenne, considèrent que leur mission caritative est terminée. Malgré l’engagement du ministre de la santé, exprimé dans la déclaration de Vilnius, à utiliser les instruments financiers nationaux ainsi que les fonds de l’UE, dont les Fonds structurels, dans la lutte contre le sida, en pratique, dans plusieurs États membres, ce n’est pas le cas. En ce qui concerne les Fonds structurels, les dirigeants des organisations de la société civile mettent en avant l’impossibilité d’obtenir un cofinancement. Je pense que tant les États membres que la Commission européenne doivent résoudre ce problème de toute urgence. Je vous remercie.
Marie-Hélène Aubert, au nom du groupe Verts/ALE. - Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, vous avez rappelé, à juste titre, que malheureusement, en dépit des progrès, encore minimes, réalisés en matière d’accès aux traitements, la maladie ne recule pas, au contraire: dans nos pays notamment, l’épidémie a plutôt repris. Alors, nous nous réjouissons, à ce sujet, du consensus qui se dessine parmi cette Assemblée concernant la nécessité de revoir absolument l’accord TRIPS concernant l’accès aux médicaments puisque les aménagements qui ont été prévus dans le cadre du cycle de Doha, malheureusement, ne permettent pas, aujourd’hui, un réel accès à des médicaments peu coûteux.
Cela dit, le problème du sida n’est pas seulement un problème de financement et d’accès aux médicaments. On peut même dire que l’accent, le projecteur mis sur l’accès aux médicaments a, sans doute, fait passer au second plan la nécessité de promouvoir encore et encore la prévention - prévention qui aujourd’hui diminue également dans nos pays et partout ailleurs. Donc, il faut absolument reprendre ces campagnes de prévention et d’information en faisant appel aux personnels compétents, notamment grâce aux médias, ainsi qu’aux réseaux sociaux et médicaux qui permettent de sensibiliser les populations.
Deuxièmement, pour changer vraiment la situation, il nous faut aussi - vous l’avez rappelé, et c’est sans doute le plus difficile - changer les pratiques culturelles en matière de sexualité, et notamment protéger les femmes et permettre aux femmes de se protéger. Les femmes, aujourd’hui, constituent 50 % des malades, ce qui n’était pas le cas au début de l’épidémie, et elles sont touchées de façon extrêmement brutale et violente par des pratiques et des sévices qui ont lieu en temps de guerre dans les zones de conflits, mais pas seulement: viols, prostitution, trafics de femmes, esclavage sexuel des femmes, autant de fléaux qui contribuent à favoriser l’expansion de l’épidémie. Aussi, la façon dont l’Union européenne promeut les droits des femmes, l’égalité des femmes, constitue également un moyen très efficace de lutter contre l’épidémie et de mettre l’accent sur la transmission de la mère à l’enfant, mode de transmission dont on parle peu à l’heure actuelle.
Il existe des solutions innovantes et je citerai l’exemple du Malawi, où, en se basant sur la décentralisation, de manière à aller au plus près des populations, en faisant aussi jouer un rôle actif aux malades eux-mêmes - ceux qui sont stabilisés -, on aboutit à des résultats extrêmement positifs, même dans des pays pourtant extrêmement démunis. Donc, nous devons aller encore beaucoup plus loin sur tous ces plans.
Vittorio Agnoletto, au nom du groupe GUE/NGL. - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, le discours du commissaire ressemble franchement à un discours rhétorique: il est plein de belles déclarations, auxquelles ne correspond pas un rôle aussi positif de la part de la Commission européenne. Comme le démontrent les dernières données d’ONUSIDA, le nombre de cas de VIH continue à augmenter et, dans certains pays, on assiste même à une recrudescence du virus. Face à tout cela, les médicaments brevetés continuent à être inabordables et les accords TRIPS créent un obstacle insurmontable à l’accès aux médicaments, condamnant près de trois millions de personnes à mort chaque année.
Ce sont les multinationales pharmaceutiques qui tirent profit de cette situation: elles ont enregistré une augmentation de 24% de leurs bénéfices en 2005. Ces multinationales sont protégées par l’administration américaine, qui n’a jamais cessé d’utiliser son poids politique et commercial pour influencer les négociations sur les brevets pharmaceutiques. Au niveau multilatéral, le programme de l’administration Bush a pour objectif de rendre inapplicables les clauses de sauvegarde prévues par les accords TRIPS, clauses qui, en cas de crise sanitaire, permettraient aux pays membres d’ignorer les droits de propriété intellectuelle et d’avoir accès aux médicaments salvateurs.
Cependant, si les États-Unis peuvent, à juste titre, être accusés d’attaquer l’un des droits de l’homme les plus fondamentaux, le droit aux soins de santé, l’Europe ne peut certainement pas considérer qu’elle n’a rien à se reprocher. L’inertie dont la Commission et les États membres font preuve lorsqu’il s’agit de se doter d’un règlement communautaire réellement capable de mettre en œuvre la déclaration de Doha doit être condamnée sans appel. Monsieur le Commissaire, vous avez dit que quelques milliers d’Africains recevaient un traitement, mais, en Afrique, 30 millions de personnes sont séropositives, dont 6,5 millions ont besoin d’un traitement. Demain, c’est la Journée mondiale de lutte contre le sida: la société civile mondiale demande une fois pour toutes que les hommes politiques assument leurs responsabilités, qui concernent non seulement l’accès aux médicaments, mais aussi les fonds alloués aux programmes de prévention et de recherche. La création d’un marché international des médicaments génériques, accompagnée d’un nouveau système de recherche médicale orienté vers les véritables besoins de la population, reste la question cruciale.
C’est la raison pour laquelle nous pensons, au sein du groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique, qu’il est vital que la résolution sur laquelle cette Assemblée va voter engage la Commission et le Conseil à: 1) reconnaître l’échec de la décision du 30 août 2003; 2) proposer, dans le cadre de l’OMC, d’amender les accords TRIPS et les nouvelles procédures d’octroi de licences obligatoires, qui doivent être en mesure de répondre rapidement aux urgences sanitaires dues à l’épidémie de VIH; 3) allouer 1 milliard d’euros au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, ce qui a déjà été demandé par le Parlement le 2 décembre 2004 et qui a été ignoré par la Commission et le Conseil; 4) consacrer davantage de ressources à la recherche de médicaments visant à traiter les maladies touchant spécifiquement le Sud et à obliger le secteur privé, qui a toujours bénéficié de la recherche publique, à réserver une partie acceptable de ses recherches à ces maladies négligées. Nous avons perdu trop de temps et d’énergie à faire de fausses promesses, il est à présent temps d’agir!
Luca Romagnoli (NI). - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, nous avons entendu beaucoup de belles paroles et de belles déclarations de la part de la Commission, et pas mal de démagogie de la part de différents députés. Nous sommes confrontés ici à des actions qui ne sont pas exposées dans le document de la Commission, mais qui sont néanmoins nécessaires.
Le fait est que nous devons prendre une position décisive dans la lutte contre le développement de l’usage de drogues, ce qui signifie tolérance zéro, aide et réinsertion pour ceux qui sont en fait malades et doivent être traités comme tels. Nous ne devrions pas faire l’éloge de la promiscuité sexuelle, que les médias de masse et les leaders d’opinion considèrent et décrivent aujourd’hui comme la voie à suivre. Nous avons besoin d’une politique éducative, mais qui décourage également les comportements à haut risque, et d’une politique d’information sur la paternalité pour les personnes atteintes. Nous devons aussi commencer à lutter sérieusement contre la prostitution, ce que nous sommes loin de faire au sein de notre Europe, et nous devons sans aucun doute également en faire plus en termes de suivi, de dépistage et, bien sûr, de traitement et de prévention des maladies infectieuses, comme prévu par le présent document.
Nous ne sommes toutefois pas sur la bonne voie, Monsieur le Président, lorsque j’entends encore mes collègues et lorsque je lis des discours prêchant la «liberté», liberté qui, pour la société, est synonyme d’inertie et, pour la civilisation, dans ce cas, est synonyme de régression.
Zbigniew Zaleski (PPE-DE). - (PL) Comme le paludisme et d’autres maladies, la situation actuelle concernant le sida présente toute une série de défis dans le domaine de l’éducation, de la prévention, de la recherche, des soins et des traitements.
Premièrement, une éducation sexuelle adéquate est nécessaire, en particulier dans les pays pauvres. Le problème, c’est la promiscuité qui fait son apparition en raison de circonstances économiques et sociales, comme je l’ai appris, par exemple, dans les plantations de canne à sucre en République dominicaine. Les conditions économiques doivent être améliorées et les valeurs et les règles sociales modifiées. Cela permettrait de mettre en place des conditions favorables à des changements positifs dans les comportements sexuels et de mettre fin aux procédures moralement controversées sur les fœtus humains.
Deuxièmement, la recherche scientifique est peut-être coûteuse et représente peut-être souvent un risque financier, mais elle doit avoir lieu: nous devons trouver des vaccins et un traitement contre les virus. C’est pourquoi nous devons soutenir les groupes de recherche internationaux.
Troisièmement, la société doit prendre soin des personnes touchées par le virus et, en particulier, des orphelins du sida dont la situation malheureuse est le résultat du comportement sexuel d’autres personnes.
Quatrièmement, seul un infime pourcentage des 40 millions de personnes contaminées par le VIH ont actuellement accès à des médicaments et à une aide médicale. C’est ici que nous disposons du plus de possibilités d’action. Les médicaments pourraient être mis à la disposition de beaucoup plus de porteurs du virus si des politiques adaptées étaient mises en place.
Margrietus van den Berg (PSE). - (NL) Monsieur le Président, le Fonds mondial est déjà le Fonds le plus important dans la lutte mondiale contre les maladies en question, et je suis fier que l’UE y contribue à concurrence de 65%. Le président de la Commission, M. Barroso, a milité en faveur du Fonds mondial et s’est engagé envers celui-ci, ce qui est très louable. L’Europe a une responsabilité envers le reste du monde, et ce Fonds donne un contenu à cette responsabilité.
Permettez-moi cependant de vous faire part d’un gros scandale. L’année prochaine, il semble que M. Barroso sera dans l’impossibilité de tenir sa promesse au Fonds mondial. Il semble que l’argent du Fonds européen de développement qui était prévu pour le Fonds mondial en 2007 ait déjà été dépensé à autre chose. La Commission veut combler ce trou en prélevant des fonds du budget général du développement, ce qui signifie prélever des fonds du budget consacré à l’éducation, à l’égalité des sexes, à la lutte contre la pauvreté et contre la faim et à la lutte contre le travail des enfants.
Monsieur le Président, cela n’est sans aucun doute pas justifiable aux yeux des personnes qui comptent sur notre aide et sur les engagements que nous avons pris. Comment la Commission peut-elle nous demander de choisir entre la lutte contre des maladies mortelles et toutes les autres choses que nous défendons, pour lesquelles nous avons prévu des crédits dans le budget, d’une part, et les contributions en vue d’atteindre les objectifs du Millénaire, de l’autre?
En ce qui concerne les questions de vie et de mort, nous ne devrions pas avoir à faire des choix. Si vous parvenez à réserver 1 milliard du Fonds européen de développement pour l’infrastructure et 3 milliards de ce même Fonds pour la bonne gouvernance pour les quelques années à venir, alors vous devriez pouvoir, en raclant les fonds de tiroir, réunir 100 millions par an pour le Fonds mondial pour la santé.
Le président de la Commission, M. Barroso, devrait débloquer ces 100 millions non pas au détriment de l’éducation, du travail des enfants ou des soins aux femmes, mais bien à partir du Fonds européen au développement. Nous devrions peut-être allouer un peu moins d’argent à l’infrastructure et à ces autres articles. Si vos priorités sont bonnes, vous êtes sur la bonne voie; sinon, vous n’avez pas fait de bonnes prévisions et, par conséquent, vous avez causé pas mal de tort. Je voudrais demander à la Commission de reconsidérer ce point de près.
Fiona Hall (ALDE). - (EN) La disponibilité de la thérapie antirétrovirale ne constitue pas seulement un espoir pour les malades du sida eux-mêmes, elle transforme également l’attitude de toute la population face au sida. Le fait de savoir qu’un traitement efficace est disponible est un facteur clé encourageant les gens à faire le test de dépistage du VIH. Plus les gens connaissent leur statut VIH, plus il est facile de limiter la propagation de la maladie.
C’est pourquoi il est particulièrement inquiétant que le prix des nouveaux et meilleurs médicaments de deuxième génération contre le sida reste prohibitif. La diminution du prix de certains médicaments contre le sida de première génération utilisés depuis longtemps est une bonne nouvelle, mais les chiffres de l’Afrique du Sud et du Malawi indiquent que jusqu’à un patient sur six devra passer à de nouvelles combinaisons de médicaments dans les trois à cinq ans.
Qu’est-ce que la Commission peut faire afin de persuader les entreprises pharmaceutiques d’enregistrer leurs médicaments les plus récents dans les pays en développement et de mettre ces tout nouveaux médicaments à disposition à des prix abordables? Sans cela, nous nous retrouverons bientôt à la case départ. Les médicaments qui fonctionnent encore seront inabordables et les donateurs, l’UE comprise, feront en fait des dons à l’industrie pharmaceutique.
Raül Romeva i Rueda (Verts/ALE). - (ES) Monsieur le Président, nous sommes encore loin d’avoir remporté la lutte contre le VIH-sida. Tout ce dont nous avons besoin, pourtant, c’est de volonté politique.
Les chiffres sont clairs: l’immense majorité des nouveaux cas apparaissent dans les pays en développement, ce qui signifie que le VIH est un des principaux facteurs ralentissant le développement de milliers de villages et de communautés.
Nous parlons donc d’une urgence mondiale, du point de vue tant sanitaire qu’économique et social. Nous connaissons le problème et nous savons comment le prévenir et le traiter. Pour ce faire, nous avons toutefois besoin de ressources, de responsabilité politique, de responsabilité de la part des secteurs économiques et de responsabilité sociale et culturelle.
Par exemple, entre autres mesures, nous devons garantir l’accès universel aux médicaments vitaux, une chose encore impossible en raison de la cupidité de certains secteurs économiques, en particulier le secteur pharmaceutique, qui n’a aucun scrupule à cet égard. Il partage par conséquent la responsabilité d’un assassinat de masse à l’échelle mondiale.
En outre, certains arguments de secteurs ultra-conservateurs à l’encontre de la santé sexuelle et génésique sont en partie responsables de cette situation. Par exemple, au vu des informations dont nous disposons, s’opposer à une éducation sexuelle adéquate pour chacun, en particulier les plus jeunes, de nos jours est, quel que soit l’angle de vue, un affront à la vie et à la dignité, et c’est très franchement immoral.
Cette année encore, nous devons donc appeler à l’action, à l’engagement et, surtout, nous devons exiger que les promesses soient tenues.
Zita Gurmai (PSE). - (HU) Monsieur le Président, nous connaissons tous l’importance de la lutte contre le sida, et nous devrions également être conscients de notre responsabilité à cet égard. C’est à cela que j’attribue le fait que mon avis, présenté la semaine dernière, a reçu tant de propositions d’amendement.
L’année dernière, on a enregistré près de 40 millions de personnes vivant avec le sida, et la maladie a vraiment atteint tous les coins du monde. Cette propagation est due à plusieurs raisons. Le manque d’information en est la première, mais d’autres facteurs importants sont l’usage de drogues et le manque de préparation de la part des systèmes de soins de santé de certains pays. Dans mon pays, le dépistage a été introduit il y a 20 ans et c’est grâce à cela que la situation n’est pas trop mauvaise, bien que des problèmes soient néanmoins présents. Le virus se transmet à 90% par contact sexuel et à 10% par usage de drogues.
Deux autres expériences: les infections sexuellement transmissibles non traitées augmentent de manière exponentielle le risque de sida. Les personnes atteintes du VIH et du sida trouvent qu’il est de plus en plus difficile de bénéficier de soins médicaux convenables, quand cela est même possible. L’importance de la prévention ne peut être suffisamment soulignée, et cela englobe l’information. Elle est particulièrement importante pour les groupes sociaux très vulnérables et pour les élèves de l’enseignement secondaire. Nous devons agir. Nous devons aider les pays extérieurs à l’Union également, en particulier les régions voisines. Le nombre de personnes diagnostiquées séropositives est en augmentation constante dans certains pays voisins. Une action réciproque est dans notre intérêt à tous. Une approche intégrée est nécessaire, comme le commissaire l’a également déclaré, et nous devons agir. Nous devons tous être partenaires dans cet effort.
Pierre Schapira (PSE). - Monsieur le Président, mes chers collègues, cette résolution va dans le bon sens. Je voudrais ajouter que la lutte contre le sida est aussi une question de gouvernance qui doit être traitée au niveau local.
Je vous rappelle qu’en 2007, c’est-à-dire aujourd’hui, 50 % de la population mondiale vit dans les villes. Dans de nombreuses villes africaines, la prévention et les soins nécessitent l’implication des autorités locales afin de les rendre plus adaptés aux besoins locaux et de lever les tabous sociaux, qui sont souvent très forts. Nous devons coopérer directement avec les villes pour les aider à gérer leurs services de santé et pour leur apporter des financements accrus.
J’aurais souhaité que notre résolution propose davantage de solutions concrètes, sur le terrain. Nous aurions pu demander à la Commission de favoriser l’offre de traitements combinés, médicaments réunissant trois types de remèdes en une seule et même gélule, ce qui simplifie grandement le traitement des patients vivant dans des zones où les hôpitaux, les médecins et les laboratoires sont peu nombreux. Nous devons privilégier leur utilisation car, mes chers collègues, nous avons un devoir impérieux: atteindre les objectifs du Millénaire.
Vladimír Špidla, membre de la Commission. - (CS) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je voudrais vous remercier pour ce débat qui a mis en lumière ce grave problème mondial de plusieurs points de vue. Je pense pouvoir dire qu’aucune objection n’a été soulevée dans ce débat qui compromettrait la grande valeur stratégique de ce document, ni concernant les idées de la déclaration ni concernant la définition des domaines d’action et des objectifs à atteindre.
Je voudrais souligner l’idée fondamentale que la seule manière de s’attaquer à la pandémie de VIH/sida est le type d’approche coordonnée et globale qui est actuellement déployée dans la lutte contre la pauvreté, en d’autres termes, des mécanismes préventifs qui englobent des normes culturelles, l’éducation, le bon sens, le dépistage et les soins aux malades, y compris un traitement approprié. Il n’est pas exagéré de dire que les résultats actuels ne peuvent être considérés comme une réussite. Nous ne pouvons pas non plus les considérer comme des paroles creuses, puisque les progrès qui ont été réalisés ne sont pas insignifiants. En ce qui concerne le Fonds, une somme significative a été réunie pour le financement. L’UE offre également des ressources considérables pour financer une série de projets dans tous les pays et nous avons connu certains succès. Les accords TRIPS ont été mentionnés. À compter de cette année, des médicaments pourront être produits à meilleur marché. J’ai mentionné le fait qu’à certains moments, les prix avaient chuté de 98%. C’est effectivement une avancée digne d’être mentionnée, mais cela ne peut en aucun cas être appelé une réussite. Il ne fait aucun doute que nous devions redoubler d’effort.
Je voudrais à présent me tourner vers deux questions spécifiques qui, je pense, nécessitent une réponse particulière. Quelqu’un a dit - même si je ne suis pas sûr d’avoir bien compris - que, dans les nouveaux États membres, il n’existait pas de centres compétents pour surveiller cette épidémie. Cette observation est fausse: ces centres sont présents partout. Si nous comparons leur qualité, bien sûr, nous pourrons constater que certains sont meilleurs que d’autres. Le traité européen n’offre pas beaucoup de possibilités de contrôle direct, mais l’idée que ces centres n’existent pas n’a aucun fondement dans la réalité.
Un autre problème qui a été abordé est le financement du Fonds contre le sida. La Commission a réagi au fait que les États membres n’apporteraient aucune contribution en 2007 en restructurant les ressources. Je pense que l’on peut débattre de la question de savoir si cette restructuration a été effectuée de la meilleure manière possible et si des approches différentes pourraient être considérées, mais je pense également que l’idée de restructurer était, en substance, une bonne idée, parce que le sida est un problème aux proportions énormes.
Malgré cela, je pense que si les États membres s’étaient engagés à apporter certaines contributions, qui ne représenteraient pas des sommes considérables par rapport à leur PIB, ils auraient permis à cet engagement de se réaliser. La somme totale est très significative, mais par rapport au PIB, c’est une somme qui peut être débloquée dans le contexte de budgets nationaux. Il ne tient qu’à nous de canaliser nos efforts pour renverser cette situation inacceptable, car un échec serait injustifiable et indéfendable. Je voudrais également souligner l’importance de l’égalité des chances, qui contribuera sans aucun doute de manière significative à surmonter ce phénomène et à améliorer la situation.
Mesdames et Messieurs, c’est une bizarrerie de la nature humaine que de mettre certaines choses à l’arrière-plan et d’autres à l’avant-plan. Prenez la grippe aviaire, par exemple, et l’attention qui y est accordée. Je ne veux en aucun cas minimiser cette tragédie, mais le VIH/sida est évidemment un problème bien plus important et, pourtant, nous le lui accordons malheureusement pas le même degré d’attention.
Mesdames et Messieurs, je voudrais vous remercier pour ce débat qui, je pense, nous a permis de progresser encore sur ce chemin. Nous devons bien sûr être conscients du fait que, peu importe à quel point nous canalisons nos efforts pour résoudre ce problème, il s’agit d’un problème mondial, et nos chances de progresser sont par conséquent limitées. Toutefois, comme le débat l’a clairement démontré, nous devons faire tout notre possible pour utiliser ces chances.
Le Président. - Pour conclure ce débat, j’ai reçu six propositions de résolution.(1)