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Procédure : 2006/2226(INI)
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A6-0393/2006

Débats :

PV 13/12/2006 - 4
CRE 13/12/2006 - 4

Votes :

PV 13/12/2006 - 8.18
Explications de votes

Textes adoptés :

P6_TA(2006)0569

Compte rendu in extenso des débats
Mercredi 13 décembre 2006 - Strasbourg Edition JO

4. Stratégie d’élargissement et principaux défis 2006 - 2007 - Les aspects institutionnels de la capacité de l’Union européenne à intégrer de nouveaux États membres (débat)
Procès-verbal
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  Le Président. - L’ordre du jour appelle en discussion commune les rapports suivants:

- A6-0436/2006, de M. Brok, au nom de la commission des affaires étrangères, sur la communication de la Commission sur la stratégie d’élargissement et les principaux défis 2006-2007 [2006/2252(INI)];

- A6-0393/2006, de M. Stubb, au nom de la commission des affaires constitutionnelles, sur les aspects institutionnels de la capacité de l’Union européenne à intégrer de nouveaux États membres [2006/2226(INI)].

Outre leur importance intrinsèque, ces questions revêtent un caractère essentiel à la veille du Conseil européen et figureront parmi les thèmes majeurs qui seront débattus lors de la réunion des chefs d’État ou de gouvernement. C’est avec plaisir que je communiquerai au Conseil les résolutions que le Parlement adoptera à ce sujet au cours de cette séance.

 
  
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  Elmar Brok (PPE-DE), rapporteur. - (DE) Monsieur le Président, Madame la Présidente du Conseil, Monsieur le Commissaire, au printemps dernier cette Assemblée a invité la Commission à rédiger un rapport sur la capacité de l’Union à intégrer de nouveaux États membres. Ce rapport a été publié le 8 novembre, mais sous une forme insuffisante, de notre point de vue.

À ce jour, l’élargissement constitue l’une des plus belles réussites de l’Union européenne. En effet, d’autres pays peuvent désormais bénéficier de notre espace de paix et de stabilité, ainsi que de notre croissance économique, ce qui contribue à la réunification du continent européen. Nous savons également que, dans les pays candidats notamment, la perspective d’une adhésion à l’UE constitue l’une des pièces maîtresses du processus de réforme de l’État. Il convient de ne jamais perdre de vue ces deux aspects positifs.

Toutefois, nous devons avoir pleinement conscience, après un élargissement qui porte le nombre d’États membres de l’UE à vingt-sept, potentiellement vingt-huit avec l’entrée prochaine de la Croatie, de la nécessité de se pencher sur l’avenir du projet européen. Voulons-nous que l’Union européenne soit un projet politique au véritable sens du terme, avec la capacité d’agir, la capacité de jouer un rôle sur l’échiquier international pour tout ce qui touche à la politique étrangère et à la sécurité, la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée, ce qui nécessite une capacité d’intervention immédiate ou préférons-nous qu’elle se laisse porter par la vague et devienne un simple projet économique? Il convient d’apporter des réponses claires à cette question.

Que cela soit bien clair pour chacun d’entre nous, la structure institutionnelle actuelle de l’Union européenne est une voie sans issue. Le traité établissant une Constitution pour l’Europe avait été conçu en prévision du dernier élargissement; celui-ci doit donc être finalisé et consolidé, en sorte que nous puissions nous occuper sérieusement d’autres projets ambitieux, sans saccager en même temps notre projet actuel. C’est la raison pour laquelle le traité constitutionnel impose, dans une certaine mesure, des conditions. M. Stubb a de plus amples détails à vous donner à cet égard.

Ce n’est pas tout. Nous devons également nous pencher sur d’autres questions et leur apporter des réponses sans équivoque. En ce qui concerne notamment la direction dans laquelle nous nous engageons, s’agissant, par exemple, de la prochaine clause de révision et des perspectives financières pour 2008/2009, ceci afin de nous permettre de nous représenter le type de conséquences que peut avoir sur le projet européen une forme quelconque d’élargissement. Quoi qu’il en soit, on observe de nombreux domaines - politique agricole, politique structurelle, etc. - dans lesquels les choses ne peuvent pas continuer à être traitées comme elles le sont aujourd’hui. Quelles seront les conséquences pour certains États membres? Dans quelle mesure ceux-ci recevront-ils moins d’argent? Et combien les autres devront-ils débourser en plus? Autant de questions auxquelles il convient de répondre, si nous voulons poursuivre notre projet sérieusement.

Il va de soi que nous devons absolument tenir les différents engagements que nous avons pris, par exemple les promesses que nous avons faites aux États des Balkans occidentaux à Thessalonique. Personne au sein de cette Assemblée ne réclame l’interruption des négociations en cours. Nous savons bien que tout est question de temps. Et c’est parce que la Croatie attend à notre porte que les chefs d’État ou de gouvernement doivent poursuivre dans la voie tracée. Néanmoins, nous devons montrer clairement que l’adhésion pleine et entière ne constitue pas, pour tous les stades et tous les cas, qu’elle s’inscrive dans l’immédiat ou à plus long terme, le seul moyen dont nous disposons pour donner à la perspective européenne la crédibilité nécessaire. Tout ceci soulève des questions à propos de la politique de développement et de voisinage ou concernant les regroupements multilatéraux d’États désireux de rejoindre l’Union européenne, leur raisonnement étant que leur peuple doivent obtenir quelque chose tout de suite, et pas seulement dans quinze ans, lorsque aboutiront enfin des négociations qui au stade actuel n’ont même pas encore commencé. Nous devons faire preuve de beaucoup plus d’imagination. Je pense, par exemple, à l’exemple ukrainien, où énormément de temps a été perdu, malheureusement à notre désavantage. Proposer une perspective européenne à ces pays présente un intérêt pour nous aussi bien que pour eux. Ce qui doit nous pousser à agir. Une chose en tous cas doit être claire: si nous procédons à l’élargissement de l’Union européenne sans, parallèlement, progresser sur le plan interne, un noyau finira par se former, les pays de l’Union européenne se divisant en membres de première et membres de seconde classe. Ce qui donne sous forme de slogan: «Verfassung oder Verhofstadt», une Constitution ou Verhofstadt! Nous avons là en effet une conséquence possible. Les pays qui sont de fervents partisans de l’élargissement sont précisément ceux qui veulent entraver ou arrêter net le processus d’intégration de l’Union européenne. Je m’interroge donc sur la crédibilité de ces pays.

S’agissant de la Turquie, nous avons, en collaboration avec d’autres collègues, proposé une formule destinée à parer aux derniers développements. J’espère que celle-ci fonctionnera. Il est regrettable que la Turquie n’ait pas rempli ses obligations juridiques et que la procédure ait encore pris du retard, même s’il faut reconnaître que la rupture des négociations n’aurait pas été la solution appropriée. Pour autant, cela ne signifie pas que la Turquie ne devra pas s’acquitter de ses obligations dans le long terme.

(Applaudissements)

 
  
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  Alexander Stubb (PPE-DE), rapporteur. - (EN) Monsieur le Président, je voudrais soulever cinq points concernant notre rapport sur la capacité d’intégration. Je commencerai par remercier tous mes collègues qui ont participé à ce rapport, et en particulier le Secrétariat, qui a fait un excellent travail.

Mon premier point concerne la terminologie que nous utilisons aujourd’hui. À l’origine, le terme que nous avons utilisé était «capacité d’absorption». Au moment de choisir qui d’entre nous allait faire ce rapport, j’ai parlé à M. Absorption lui-même - mon grand ami M. Brok. Nous sommes arrivés à la conclusion que, peut-être, le terme absorption n’était pas le plus approprié. Je pense que M. Carl Bildt l’a parfaitement exprimé en disant: qui veut être absorbé par l’Union européenne? La France veut-elle être absorbée par l’Union européenne? Bien sûr, la réponse est non. Nous avons donc cherché un terme plus dynamique, plus positif et avons décidé que la «capacité d’intégration» était ce que nous examinions réellement.

Je dirais, en guise de second commentaire, qu’il s’agit d’un sujet potentiellement sensible, car il y a plusieurs intérêts en jeu. Mon collègue et ami, M. Brok, a fait référence à certains d’entre eux. En d’autres termes, il existe des personnes qui sont contre l’élargissement, mais qui sont favorables à la Constitution. Vous avez ceux qui sont contre la Constitution, mais qui sont pour l’élargissement. Vous avez ensuite ceux qui, comme moi, sont pour la Constitution et pour l’élargissement et, enfin, ceux qui, à l’instar de M. Farage et des autres, s’opposent aux deux.

Ce que nous nous sommes efforcés de faire, c’est de nous frayer un chemin parmi ces quatre points de vue divergents, et je pense que nous y sommes assez bien arrivés dans ce rapport. La notion de capacité d’intégration n’a rien de nouveau. Elle a toujours existé. Il y a toujours un débat avant chaque élargissement sur la taille que doit avoir l’Union européenne. Avant 1973, l’Union est devenue une union douanière. Avant 1986, l’Acte unique européen a été proclamé. Avant l’adhésion de la Finlande, de l’Autriche et de la Suède, il y a eu le traité de Maastricht. Avant le big-bang de 2004, il y a eu Amsterdam et Nice. Ce que nous voulons, c’est avoir une Constitution avant le prochain élargissement.

Troisièmement, comment définissons-nous la capacité d’intégration? Je pense que la conclusion de ce rapport est que l’on peut donner une vague notion de ce que cela signifie réellement et que l’on pourrait dire que ce n’est pas une condition pour l’élargissement, mais c’est un critère pour nous, les États membres actuels. Nous devons mettre de l’ordre chez nous avant de pouvoir nous élargir. La difficulté est qu’on ne peut pas donner de définition stricte à la capacité d’intégration parce qu’elle est liée à deux choses. La première: le moment de l’adhésion. La deuxième: le nombre de nouveaux États adhérents. En d’autres termes, l’élargissement de 1973 était radicalement différent de l’élargissement de 2004. Sur la définition encore, la capacité d’intégration se rapporte à trois choses: les institutions, le budget et les politiques.

Mon quatrième point concerne le débat public, et je voudrais ici pointer du doigt le Conseil européen, qui dit que nous devons lier l’élargissement à l’opinion publique. Nous répondons que, bien sûr, il faut le faire, mais ne me dites pas que vous n’avez pas l’occasion de le faire. Les négociations sur l’élargissement sont ouvertes à l’unanimité. Chaque chapitre est ouvert à l’unanimité. Chaque chapitre est fermé à l’unanimité. Le paquet entier est approuvé à l’unanimité et, en plus de cela, chaque État membre est censé ratifier l’adhésion. Si dans cette période de deux à dix ans vous n’êtes pas capables d’expliquer les avantages de l’élargissement au grand public, je pense que vous échouez lamentablement dans votre travail, alors s’il vous plaît, faites votre travail et ensuite venez discuter de l’opinion publique. Nous devons penser à l’élargissement de façon plus stratégique.

Mon dernier point concerne la Constitution. Ce rapport souligne un certain nombre de sujets que nous devons absolument clarifier avant le prochain élargissement: le vote à la majorité qualifiée, la personnalité juridique, le ministre des affaires étrangères, la politique de sécurité commune, etc. Nous devons absolument nous occuper de ces sujets avant de pouvoir nous élargir. Le message de ce rapport est le suivant: mettons de l’ordre chez nous avant 2009, et ensuite commençons l’élargissement.

Je conclurai ainsi. L’élargissement est probablement la meilleure politique que l’Union européenne ait jamais eue. Il a apporté paix, prospérité, sécurité et stabilité. Quand nous parlons de l’élargissement ne nous donnons pas de mauvaises excuses parce que nous savons que nous ne sommes jamais vraiment prêts pour l’élargissement.

(Applaudissements)

 
  
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  Paula Lehtomäki, présidente en exercice du Conseil. - (FI) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, il a été décidé lors du Conseil européen de juin de poursuivre et d’approfondir au cours de la présidence finlandaise le débat sur l’élargissement et la stratégie que l’Union adoptera pour faire aboutir ce processus. Le Conseil européen qui se tiendra cette semaine examinera sous toutes leurs coutures les futurs élargissements, notamment la capacité de l’Union européenne à absorber de nouveaux États membres, et les moyens de revoir encore à la hausse la qualité du processus d’élargissement à la lumière de l’expérience acquise à ce jour.

Le Conseil européen axera son débat global autour de l’élargissement sur la stratégie communiquée par la Commission le 8 novembre. Fait également partie de cette stratégie d’élargissement un rapport spécial sur la capacité de l’Union à intégrer de nouveaux membres. La présidence aspire à ce que les discussions du Conseil européen donnent du corps à la position commune relative à l’avenir du processus d’élargissement. Lundi dernier, le Conseil «Affaires générales et relations extérieures» a examiné les conclusions du Conseil européen sur l’élargissement. Il s’est engagé à lancer un débat constructif et complet sur le sujet.

L’élargissement est une composante du processus d’intégration européen. Lorsque la présidence finlandaise a présenté son programme de travail à la commission des affaires étrangères en juillet dernier, ses membres ont fait remarquer que l’élargissement avait incontestablement favorisé la croissance et le bien-être au sein de l’Union. Aussi bien l’Union, États membres compris, que l’Europe dans son ensemble en ont retiré des avantages. Les États candidats se sont empressés d’entreprendre les réformes nécessaires, dans l’espoir de rejoindre le club européen. Sans l’élargissement, l’Union n’aurait pas le poids qu’elle a aujourd’hui sur l’échiquier politique international. Grâce au développement du marché intérieur, l’économie de l’Union est plus apte à relever les défis de la concurrence internationale.

Le cinquième élargissement historique de l’Union prendra fin lorsque la Bulgarie et la Roumanie, dont les candidats aux postes de commissaire ont passé le test hier, rejoindront l’Union européenne le 1er janvier. Ce cinquième cycle peut d’ores et déjà être qualifié de réussite. En effet, grâce à l’élargissement, notre espace de paix, de stabilité, de démocratie, d’État de droit et de prospérité englobe pratiquement tous les pays du continent européen. Il nous appartient de faire en sorte aujourd’hui que cette réussite ne s’arrête pas en si bon chemin.

L’Union doit poursuivre son élargissement, qu’elle doit voir comme un processus ouvert et objectif, en ne posant ni nouvelles restrictions ni nouvelles conditions. À cette fin, il convient d’accorder une plus grande attention à la manière de façonner ce processus, de manière à ce qu’il avance réellement dans la pratique. Quoi de plus normal que d’essayer d’améliorer la qualité de l’élargissement et de mieux y préparer l’Union?

Il est de notoriété publique - et on a également pu s’en rendre compte en entendant les discours des rapporteurs - que la capacité d’intégration ou encore la capacité de l’Union à accepter de nouveaux membres, n’est pas un critère d’adhésion, et ne devrait jamais le devenir. Néanmoins, la capacité d’intégration constitue un facteur important à prendre en considération, si l’on veut garantir la réussite de l’élargissement. La préservation de la capacité d’intégration de l’Union est dans l’intérêt aussi bien de l’Union que des pays candidats. Si, en revanche l’Union européenne devait imposer des conditions auxquelles un pays candidat se verrait dans l’impossibilité de satisfaire, nous risquerions de décourager les pays désireux d’adhérer à l’Union européenne d’entreprendre les réformes nécessaires pour y parvenir.

On ne pourra pas parler de sauvegarde de la capacité d’intégration de l’Union, si les pays adhérents ne sont pas disposés à accepter et à mettre en œuvre les obligations qui vont de pair avec l’adhésion à l’Union européenne. De même, il est primordial que l’Union puisse fonctionner efficacement et grandir, en acceptant de nouveaux membres chaque fois que ceux-ci sont prêts, et en fonction de l’état d’avancement des négociations. Ces deux observations revêtent également un caractère essentiel, si nous voulons que les citoyens européens se rallient au processus d’élargissement.

La capacité d’intégration de l’Union doit faire l’objet d’un examen au cours du processus d’élargissement. Nous devons veiller à garantir le bon fonctionnement de l’UE sur les plans politique, économique et institutionnel à mesure qu’elle s’ouvre à d’autres pays. De même, il convient d’évaluer avec précision les conséquences des prochains élargissements sur les institutions, les politiques et le budget de l’Union.

Il est crucial que l’Union tienne les engagements pris à l’égard de la Croatie, de la Turquie et des pays des Balkans occidentaux dans le cadre des négociations d’adhésion. En ce qui concerne la Turquie, je tiens à préciser que la présidence a fait tout ce qui était en son pouvoir pour éviter le gel des pourparlers. Nous sommes très satisfaits de la solution proposée lors du Conseil de lundi dernier, qui nous servira de base pour la poursuite de nos travaux.

Il incombe aux pays candidats et pays candidats potentiels de mener les réformes qui s’imposent, dont les progrès conditionnent l’avancement du processus d’adhésion. Cet avancement dépend à son tour de la réunion de toutes les conditions requises.

On a pu sentir récemment un ras-le-bol généralisé à l’égard de l’élargissement. À cet égard, informer les citoyens à temps et objectivement peut contribuer à dissiper les doutes qui se sont installés. En réalité, l’Union bénéficie de l’arrivée des nouveaux États membres et a besoin d’eux.

Pour terminer, Monsieur le Président, je tiens à remercier le Parlement européen, au nom de la présidence finlandaise, pour sa participation active au débat sur la poursuite du processus d’élargissement. Les deux rapports que nous avons sous les yeux aujourd’hui représentent une contribution inestimable au débat. Bien entendu, la présidence tiendra dûment compte des documents sur la stratégie d’élargissement et la capacité d’intégration qui seront traités aujourd’hui, ainsi que des avis exprimés par le Parlement européen en général. Nous sommes convaincus que le Parlement nous épaulera dans la tâche qui nous incombe à tous.

(Applaudissements)

 
  
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  Olli Rehn, Commission. - (FI) Monsieur le Président, Madame la Ministre, Mesdames et Messieurs, je tiens à profiter de l’occasion qui m’est offerte de remercier la présidence de l’excellente et étroite coopération dont elle nous a gratifiés au cours de son mandat, et je souhaiterais plus particulièrement la féliciter d’avoir, lundi dernier, pris la décision de donner son feu vert à la poursuite des pourparlers d’adhésion avec la Turquie. Cette décision constitue un signal fort à l’attention de la Turquie, lui montrant que le non-respect des obligations qui lui sont imposées sera lourd de conséquences, tout en permettant d’éviter le choc frontal entre cette dernière et l’Union européenne.

Cette décision montre que l’Union européenne est capable de trancher des questions délicates, telles que la question turque, avec fermeté et solidarité, sans en faire tout un drame. Je ne doute pas une seconde que cette Assemblée appréciera, et je sais que ce sera au moins le cas pour les 26 membres du Conseil européen qui se réuniront jeudi et vendredi et qui étaient réticents à l’idée d’un autre sommet sur la Turquie en fin d’année.

(EN) Monsieur le Président, je voudrais féliciter les rapporteurs, MM. Brok et Stubb (qui n’est pas entêté, mais très flexible intellectuellement, quelle que soit la façon de prononcer son nom!). Je voudrais également féliciter la commission et tous les membres pour leur travail intense sur cet important sujet.

La Commission partage nombre des points soulevés dans ces rapports. Nous sommes en particulier satisfaits de votre préférence pour le concept de «capacité d’intégration», comme l’ont expliqué MM. Brok et Stubb. Nous nous réjouissons du soutien du Parlement pour la stratégie d’élargissement de la Commission et ses principes, ainsi que du soutien pour nos efforts en vue d’améliorer la communication et la transparence.

Je suis d’accord avec le Parlement sur le fait que la capacité d’intégration concerne avant tout les institutions européennes, le budget et les politiques. Mais, avant de m’étendre sur ce point, laissez-moi souligner à quel point il est important de garder notre propre intérêt stratégique à l’esprit lorsque nous parlons de notre capacité d’intégration.

Dans le débat actuel sur l’Europe en général, nous ne débattons pas souvent des mêmes sujets. Certains soulignent uniquement la signification stratégique de l’élargissement pour la paix et la démocratie. D’autres se concentrent seulement sur les problèmes internes qui réduisent notre capacité à intégrer de nouveaux États membres. Si ces deux discours ne se rejoignent pas, le danger est d’accroître la confusion parmi nos propres concitoyens et de porter atteinte à notre crédibilité dans les pays candidats.

Nous devons par conséquent mettre en place un nouveau consensus sur l’élargissement en combinant ces deux discours. Nous devons perpétuer la mission stratégique de l’élargissement, tout en maintenant le pouvoir souple de transformation démocratique et économique de l’UE, et nous devons dans le même temps garantir notre capacité de fonctionnement, tout en intégrant petit à petit de nouveaux États membres.

C’est pourquoi la Commission améliorera encore la qualité de son processus d’adhésion. Nous ferons des évaluations d’impact et évaluerons les implications budgétaires sur les politiques clés, en particulier sur les politiques agricoles et de cohésion.

En outre, nous devons appliquer une conditionnalité rigoureuse. L’expérience montre que mieux les nouveaux États membres sont préparés, plus l’Union européenne fonctionne correctement après l’élargissement. Les sujets difficiles, comme la réforme judiciaire et la lutte contre la corruption, doivent être réglés dès le début des négociations.

Cependant, en améliorant la qualité du processus d’adhésion, nous ne devons pas créer quelque chose de trop compliqué. Cela ne ferait que créer des obstacles artificiels dans un processus qui est déjà suffisamment compliqué. Je pense que nous sommes tous en faveur d’une simplification, et pas d’une complication. Nous devons donc avoir des règles claires, des procédures claires, qui sont comprises tant par nos concitoyens que par les pays concernés - les pays candidats.

Certains se demandent si l’élargissement ne se fait pas aux dépens d’un approfondissement. Ma réponse est non: l’UE a réussi à s’approfondir et à s’élargir en parallèle auparavant, et nous pouvons encore y arriver.

Par conséquent, il faudrait parvenir à un nouvel accord institutionnel avant que le prochain nouvel État membre soit prêt à rejoindre notre Union. Le Conseil s’est mis d’accord sur un calendrier pour continuer la réforme institutionnelle, à commencer par une déclaration politique qui sera adoptée à Berlin en mars prochain. Les étapes nécessaires pour arriver à un nouvel accord institutionnel devraient être franchies d’ici la fin 2008.

Nous avons besoin d’un nouvel accord institutionnel pour rendre notre prise de décision plus efficace. Nous en avons besoin pour renforcer la légitimité de l’Union, et nous en avons besoin pour renforcer le rôle de l’Europe dans le monde. Enfin, nous en avons besoin aujourd’hui, ou au plus tard demain, pour l’UE actuelle et ses citoyens - pas seulement à cause d’un hypothétique prochain élargissement. Nous devons garder la cadence de l’intégration et renforcer et développer davantage l’Union européenne.

Je suis convaincu que vous partagez ces objectifs d’une Union réformée et plus forte et, je suis impatient de travailler avec vous pour atteindre ces objectifs.

(Applaudissements)

 
  
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  Íñigo Méndez de Vigo, au nom du groupe PPE-DE. - (ES) Monsieur le Président, je tiens tout d’abord à féliciter les deux rapporteurs. Il est heureux qu’ils soient tous deux issus de mon groupe politique, Monsieur le Président, et qu’ils aient agi ensemble de manière complémentaire. Ils ne sont pas au courant de ce qui va suivre, mais je vais vous révéler un secret ce matin: au sein de mon groupe politique, Monsieur Swoboda, le surnom donné au duo formé par M. Brok et M. Stubb est «les jumeaux». J’espère que d’autres jumeaux plus célèbres à travers l’Europe nous pardonneront de nous être approprié ce terme.

Il est toutefois incontestable qu’ils ont fait ce que ces autres jumeaux devraient songer à faire, eux aussi. Ils ont agi ensemble pour le bien de l’Europe. Au lieu d’absorber les amendements d’autres groupes politiques, ils les ont intégrés. Aussi, je pense que le Parlement votera aujourd’hui en faveur de ces deux rapports sur la stratégie d’élargissement et la capacité d’intégration de l’Union.

Monsieur le Président, ces deux rapports contiennent divers engagements positifs. Le premier d’entre eux - comme M. Stubb l’a expliqué avec verve - concerne l’élargissement. Nous sommes d’avis que l’élargissement représente une aubaine tant pour l’Union européenne que pour les États qui y adhèrent. Ceci ne fait aucun doute. Quiconque n’en est pas convaincu n’a qu’à se reporter au paragraphe 19 de la résolution.

Cependant, il est évident que la réussite de l’élargissement sera au rendez-vous, si et seulement si l’Union européenne est prête à accepter l’entrée de nouveaux pays. Or, on ne peut pas dire que ce soit le cas à l’heure actuelle. Personne ne reçoit quelqu’un chez lui, si la maison n’est pas prête. Remettre la maison en ordre, tel est le deuxième engagement qui figure dans le rapport de M. Stubb: il s’agit de l’engagement en faveur d’un traité établissant une Constitution pour l’Europe.

Il n’y a pas si longtemps, deux députés européens sur trois étaient favorables au rapport Corbett-Méndez de Vigo, ce que M. Stubb rappelle dans son rapport. Nous continuons de penser que le contenu du traité constitutionnel doit être appliqué, si nous voulons que notre maison soit prête à recevoir d’autres invités.

Selon moi, il est primordial d’insister là-dessus maintenant, dès lors que la présidence allemande va soumettre des propositions avec une date en vue, celle de 2009. En outre, je pense que les paragraphes 9 et 10 du rapport Stubb mettent en évidence les éléments sur lesquels doit porter toute réforme future, tout en rejetant un point sur lequel le Parlement européen est lui aussi revenu en plusieurs occasions: nous ne voulons pas de cherry picking (en anglais dans le texte), j’entends par là l’entrée en vigueur partielle de certains aspects. Nous aspirons à l’équilibre incarné par le texte du traité établissant une Constitution pour l’Europe.

Enfin, Monsieur le Président, les deux rapports contiennent un message politique clair. Comme vous assisterez au Conseil européen, je vous demanderai de le relayer: il n’y aura pas d’autre élargissement sans Constitution européenne. Vous m’entendez? Aucun. Le Parlement européen doit émettre un avis favorable, lorsqu’il est question d’approuver tout nouvel élargissement. Il entend bien user de cette prérogative, car le document concerné proclame solennellement ce droit.

Monsieur le Président, mon groupe soutiendra les deux rapports et, en ce qui concerne le rapport de M. Stubb, votera en faveur des amendements 6, 7 et 8.

 
  
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  Hannes Swoboda, au nom du groupe PSE. - (DE) Monsieur le Président, même si je souhaite commencer par remercier M. Brok et M. Stubb pour leurs rapports, je dois néanmoins ajouter que, à voir mes deux collègues et M. Méndez de Vigo ensemble, j’en viens à la conclusion qu’il ne s’agit assurément pas de jumeaux monozygotes, mais que malgré tout le résultat est excellent. Quoi qu’il en soit, le résultat est remarquable. À cela s’ajoute que, avec tout le respect que je vous dois, Monsieur le Commissaire, l’aboutissement des deux rapports est selon moi supérieur aux résultats du rapport de la Commission, en ce sens que les nôtres exposent le sujet plus clairement et de manière moins ambiguë. Je pense donc que la Commission devrait en tirer des leçons.

Parmi les députés européens, il s’en trouve qui voient la solution dans une Europe de taille restreinte et avancent que moins l’Union européenne sera grande plus elle gagnera en efficacité et en homogénéité. D’autres prétendent exactement le contraire, affirmant qu’une Union de grande taille nous permettra de parler d’une seule voix. Or, comment pouvons-nous parler au nom de tous si nous sommes dans l’impossibilité d’adopter une position commune? D’où la nécessité de fixer des conditions. L’Europe repose sur la qualité et non sur la quantité, et je suis tout à fait d’accord avec M. Méndez de Vigo, lorsqu’il affirme que la Constitution européenne, entre autres éléments, revêt un caractère essentiel à cet égard.

Il ne doit pas nécessairement s’agir de la Constitution dans sa version actuelle, ce qui ne sera probablement pas le cas, mais les points clés de la Constitution doivent être concrétisés, si nous voulons que l’Europe gagne en efficacité. Il est incontestable que la deuxième condition préalable porte sur l’établissement d’une base financière correcte. Reconnaissons notre incapacité à donner à nos concitoyens, pour l’instant en tous cas, ce à quoi ils aspirent réellement et qu’ils rêvent de posséder. Et qu’ils sont tout à fait en droit d’attendre de l’Europe. Ainsi, comment une Union européenne élargie est-elle supposée fonctionner, si nous n’avons pas su auparavant créer le cadre financier qu’il lui faut?

Nous devons dire à nos gouvernements qu’ils ne peuvent pas faire sans arrêt de belles promesses d’élargissement et revenir chaque fois sur les questions d’assise financière, pour prétendre que nous n’en avons pas les moyens. C’est inadmissible et il faut que cette Assemblée le fasse clairement comprendre.

Un mot encore, s’agissant de la Constitution. L’élément crucial est, bien entendu, la réforme des institutions, par quoi on entend non de simples retouches, mais bien une réorganisation de fond en comble. Cette affirmation peut être transposée au domaine financier, en particulier aux modèles financiers qui impliquent un changement radical de la base financière de l’Union européenne.

Dès lors, venons-en à la capacité d’intégration. Je veux être clair et déclarer, au nom de mon groupe, que la capacité d’intégration n’est pas une entrave, mais bien au contraire une condition préalable à tout élargissement. Une condition nécessaire d’ailleurs, et pas un simple produit dérivé de nos réflexions, lorsque nous modifions par exemple tel ou tel détail dans un traité d’adhésion. Ceci ne sera plus acceptable à l’avenir.

À côté de cela, il est clair qu’il convient de poursuivre le dialogue sur l’Europe du Sud-Est et les Balkans, en ne se limitant pas à la Croatie, une question dont j’ai l’honneur d’être le rapporteur. Même après que la Croatie aura rejoint nos rangs, il ne sera pas possible de tracer une nouvelle frontière. Les progrès devront plutôt être réalisés pas à pas. Quant à la Turquie - point qui sera détaillé par M. Wiersma - elle a certes des obligations à remplir, mais il nous reste pour notre part à accomplir la tâche politique de l’intégration de Chypre.

Nous devons enfin proposer aux pays qui ressortissent à la politique de voisinage de l’Union européenne, en particulier les pays riverains de la mer Noire, une vision réaliste, ce qui passe par l’établissement d’une plate-forme intermédiaire sur laquelle les membres de la commission des affaires étrangères se sont penchés, M. Wiersma et moi-même ayant soumis l’idée d’une communauté UE/mer Noire, de manière à rapprocher ces pays de l’Union européenne dans ce qui serait une sorte d’antichambre d’une éventuelle adhésion, sans obligation aucune, si les conditions nécessaires sont réunies.

Nous ne pourrons accorder ce que nos voisins désirent que si nous en faisons de même pour nos concitoyens européens, ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle. Il nous reste donc à créer les conditions indispensables à une réussite sur ce plan, après quoi, seulement, il redeviendra possible d’envisager une grande Europe élargie et d’en faire une réalité.

(Applaudissements)

 
  
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  Le Président. - MM. Stubb et Brok ne sont évidemment pas des jumeaux au véritable sens du terme, Monsieur Swoboda. M. Méndez de Vigo l’a dit de manière affectueuse, en entendant par là qu’ils agissaient de concert, comme deux autres personnages eux aussi bien connus, Stan Laurel et Oliver Hardy, qui n’étaient pas non plus jumeaux, mais étaient inséparables.

(Rires)

Voilà comment nous devrions interpréter leur collaboration. Les propos que je viens de tenir ne devraient pas être pris pour autre chose qu’un profond respect pour nos rapporteurs aujourd’hui.

 
  
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  Annemie Neyts-Uyttebroeck, au nom du groupe ALDE. - (NL) Monsieur le Président, Madame la Présidente du Conseil, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, bien que les plaisanteries sur les jumeaux aient perdu en saveur ces derniers temps, je voudrais juste ajouter que, fort heureusement, vous ne vous êtes pas encore transformés en jumeaux diaboliques, ce qui aurait été bien entendu très regrettable.

Depuis mai/juin 2005, de multiples flèches ont été décochées en direction du processus d’élargissement dans son ensemble. Il s’agirait ainsi de la motivation principale des Français et des Néerlandais à voter non. C’est dans cette ambiance morose que le concept de capacité d’absorption a soudainement fait son apparition. Il s’agit d’une expression affreuse, qui sert de prétexte à de nombreuses personnes pour freiner le processus d’élargissement et même le remettre en question, voire revenir sur les promesses faites à cet égard.

Mon groupe s’est toujours opposé à cette tactique et accorde énormément d’importance à ce que l’on reconnaisse, d’une part, que l’élargissement a été, à ce jour, une réussite en tous points et, d’autre part, à ce que toutes les promesses faites à la Croatie et aux pays des Balkans occidentaux, même si certains d’entre eux n’ont vu le jour qu’il y a peu, ainsi qu’à la Turquie, soient bien honorées.

À cet égard, je voudrais féliciter plus particulièrement le commissaire Rehn et ses collègues de la Commission, ainsi que le Conseil, pour les décisions qu’ils ont prises concernant la Turquie, lesquelles sont, selon moi, extrêmement équilibrées. Ces décisions, tout en veillant à ne fermer aucune porte, annoncent clairement la couleur, et nous y adhérons totalement.

Enfin, mon groupe est fermement convaincu - M. Duff reviendra plus au long sur ce point dans un instant - que l’Union et ses institutions doivent remettre de l’ordre chez elles avant le début du prochain cycle d’élargissement. C’est la responsabilité des États membres, de la Commission, du Parlement européen, du Conseil, notamment du Conseil européen. Ce n’est pas la responsabilité des pays candidats.

Les deux rapports reflètent cette nouvelle manière, plus positive, d’appréhender l’élargissement, tout en insistant très clairement sur la nécessité de réformer les institutions avant tout, raison pour laquelle ils auront le soutien de mon groupe.

 
  
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  Joost Lagendijk, au nom du groupe des Verts/ALE. - (NL) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je ne répéterai pas une énième fois que l’élargissement s’est avéré, à ce jour, une belle réussite, étant donné que nombre de mes collègues, la Commission et le Conseil l’ont fait avant moi, et même s’il semble un peu banal de le rappeler devant cette Assemblée, ce n’est pas du luxe de le rappeler aux citoyens européens, à l’heure où ceux-ci sont de plus en plus nombreux à remettre en cause l’utilité et la nécessité de l’élargissement.

Ceci étant dit, il demeure néanmoins nécessaire, et possible selon moi, de tirer les leçons de notre façon de procéder à ce jour. Comme le commissaire l’a déjà mentionné, ces enseignements figurent dans son rapport, ainsi que dans les rapports du Parlement. Je vous prie instamment d’axer votre évaluation de chaque pays sur ses propres mérites et d’éviter de refaire les erreurs du passé, en mettant la Roumanie et la Bulgarie dans le même sac. Je vous demanderai instamment de ne pas non plus fixer de date trop tôt, car cela se retournerait contre nous et contre le processus. Ne reportez pas le traitement des questions épineuses à la dernière minute et accordez plus d’attention à l’exécution qu’à la promesse. Au cours des discussions qui ont porté l’année dernière sur les enseignements à tirer, le débat sur la «capacité d’absorption», devenue aujourd’hui «capacité d’intégration», a soudainement fait son apparition. Ceci à l’initiative de certains partisans de la poursuite de l’élargissement - dont je fais partie - par crainte de devoir prendre part au débat, étant donné que de nombreux adversaires de la poursuite de l’élargissement se sont servis de ce concept de «capacité d’intégration» comme argument pour s’opposer à tout élargissement futur.

Je n’irai pas par quatre chemins: la capacité d’intégration ne constitue pas un argument en faveur de l’élargissement ou, d’ailleurs, contre ce dernier. Par contre, il s’agit de clarifier de quoi il est question.

Permettez-moi de m’attarder sur deux points. En ce qui concerne les réformes institutionnelles, je répéterai, alors que je suis un fervent partisan de la poursuite de l’élargissement en direction des pays des Balkans occidentaux et de la Turquie, que je suis également persuadé que cet élargissement ne pourra se réaliser sur la base des Traités actuels. D’où la nécessité de réformer nos institutions de fond en comble. Je pense que ce Parlement ne devrait pas tergiverser sur la façon précise d’y parvenir. Nous devons le faire, un point c’est tout!

Quant aux autres éléments de cette discussion sur la capacité d’intégration, le soutien de l’opinion publique revêt un caractère primordial. Ce soutien ne nous sera accordé que si nous parvenons, aidés en cela par nos collègues élus nationaux des États membres, à faire passer le message approprié, rendant justice au passé et osant mettre l’accent sur les intérêts à long terme de l’Union européenne. Cette démarche nécessite également du leadership et du courage politique, et suppose qu’on se détourne de tous les sondages d’opinion sur l’élargissement, dont les indicateurs pourraient accuser une légère tendance à la baisse. Tous ces éléments, le courage, le leadership politique et les intérêts à long terme, se retrouvent imbriqués dans le débat sur la Turquie.

Je tiens donc beaucoup à ce que cette Assemblée ne surfe pas sur la vague de populisme qu’ont décidé de chevaucher certains, ainsi qu’on peut l’observer dans certains débats sur la Turquie qui ont lieu en Europe. J’ai également pu me rendre compte dans mon pays que ceux qui étaient en faveur de l’adhésion il y a deux ans s’opposent aujourd’hui à ce que la Turquie rejoigne l’Union, conformément à la tendance observée dans les sondages d’opinion. Nous ne devons pas nous laisser entraîner dans cette spirale, notamment dans le présent rapport. En ce qui concerne Chypre - j’aborderai ce point avec M. Brok -, la Turquie doit tenir sa promesse, ce qui vaut également pour l’Union européenne. Aussi suis-je enchanté par l’engagement des ministres des affaires étrangères, qui se sont dits prêts à parler de l’isolement de la République turque de Chypre du Nord au printemps prochain. L’avenir de l’Union européenne ne peut reposer sur l’instabilité et la peur, ce qui est encore plus vrai pour l’élargissement.

 
  
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  Erik Meijer, au nom du groupe GUE/NGL. - (NL) Monsieur le Président, au début des années 1990, l’élargissement a été hissé au premier rang des objectifs de l’Union européenne. L’Europe, autrefois divisée en trois blocs économiques, a dû presser sa réunification au sein de l’Union européenne. Par la suite, le projet prévoyant un premier élargissement limité, incluant l’Estonie, la République tchèque et Chypre, mais pas la Lettonie, la Slovaquie et Malte, a été soudainement abandonné au profit d’un élargissement d’une ampleur sans précédent. La Roumanie et la Bulgarie passèrent ainsi dans l’arrière-garde, même si elles rejoindront les rangs de l’Union dans trois semaines.

Suite à la promesse que tous les pays des Balkans qui n’ont pas encore adhéré à l’Union seront eux aussi les bienvenus, au démarrage difficile des négociations avec la Croatie et la Turquie, et après l’enthousiasme de courte durée autour d’une adhésion accélérée de l’Ukraine, de la Moldavie et du Belarus, le soufflé est retombé. Les négociations avec un autre pays candidat, la Macédoine, n’ont d’ailleurs pas encore démarré.

Il apparaît aujourd’hui clairement que les nouveaux ne sont plus vraiment les bienvenus. En l’absence de Constitution, les détenteurs du pouvoir craignent l’enrayage de la mécanique européenne et aussi de devoir saupoudrer de plus en plus les fonds. Le grand public assiste aux migrations de la main-d’œuvre, de plus en plus de personnes quittent leur pays pour aller faire ailleurs les besognes dont personne ne veut et se charger des travaux dangereux, tout en étant mal payés et mal logés.

L’adoption de la directive sur les services suscite dans les anciens États membres la peur de devoir rivaliser, au niveau de la législation sociale et des conventions collectives de travail, avec les nouveaux ou futurs États membres, moins sévères en la matière. En raison tant de la politique néo-libérale menée par l’Union européenne que de la lenteur des progrès au niveau du processus de démocratisation et des droits de l’homme en Turquie, la poursuite de l’élargissement est de plus en plus impopulaire au sein des populations des États membres actuels.

Ces deux lacunes nous ont contraints à baisser le rythme et à adopter des mesures de transition à court terme, avec le risque de voir les États aujourd’hui rejetés devenir entre-temps de plus en plus dépendants de l’Union européenne, ce qui pourrait les empêcher de faire leurs propres choix et les entraver dans leur propre développement.

Mon groupe est favorable, notamment pendant les périodes de transition, au respect de l’égalité des pays candidats potentiels et à l’octroi de ressources financières, afin de leur permettre de combler leur retard et de rendre leur future adhésion plus facile. Nous devons aux nombreux habitants de nos États membres originaires d’ex-Yougoslavie et de Turquie de prendre au sérieux la volonté d’adhésion de ces pays.

 
  
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  Konrad Szymański, au nom du groupe UEN. - (PL) Monsieur le Président, en lisant les deux rapports, je n’ai eu qu’une seule surprise agréable. Les perspectives d’élargissement de l’Union européenne, autrefois peintes en noir, présentent aujourd’hui un style en demi-teintes. Cet éclaircissement de l’image doit être salué.

Le tableau a pris aujourd’hui une teinte encore plus claire, suite à l’intervention du rapporteur, bien que le tableau qui est brossé soit encore loin de la réalité.

Malgré l’impression qui se dégage des deux rapports, l’Union européenne ne doit pas son influence accrue sur la scène internationale aux réformes de ses institutions, mais bien au fait qu’elle représente davantage de citoyens et d’entreprises, que son territoire s’est étendu et qu’elle est dotée d’une plus grande capacité militaire et économique. C’est grâce aux élargissements des années 1980, 1990 et plus récemment 2004 que l’Union européenne a gagné en poids et influence, accédant ainsi au statut d’acteur de premier plan sur l’échiquier international. Ce changement n’est pas dû à un coup de baguette magique qui aurait eu pour nom «réforme des Traités».

Je constate une plus grande propension à évoquer la résolution de mars 2006 sur la même question. Néanmoins, conditionner l’élargissement au traité établissant une Constitution pour l’Europe est tout simplement anachronique. Certes, nous pouvons exiger des changements institutionnels, mais mettre le Traité, tel qu’il se présente à l’heure actuelle, sur le tapis n’est qu’un prétexte pour suspendre le processus d’élargissement, sans raison valable. Faire nôtre la philosophie qui s’incarne dans le slogan «le traité constitutionnel sinon rien» n’est ni bon ni sage. On nous ressert le même prétexte dans les débats intellectuels sur la capacité d’absorption, également appelée capacité d’intégration.

L’intégration européenne n’est pas un phénomène physique ou chimique. Aucune loi naturelle objective n’est ici à l’œuvre. L’intégration constitue tout simplement une question de volonté politique, de notre ressort et du ressort de nos homologues à l’échelon national. Si nous pensons vraiment que les élargissements peuvent nous ouvrir la voie vers le succès, reste à savoir pourquoi nous voudrions ajouter trente clauses fondées sur une philosophie qui n’est pas loin de ressembler à l’euroscepticisme borné et lâche. Pouvons-nous réellement prétendre que la qualité de l’intégration pâtit de l’élargissement? Serait-il possible que la qualité de l’intégration se détériore également en raison des mauvaises politiques de l’Union elle-même? Se peut-il que cette qualité souffre d’un programme surchargé, sous lequel croule l’Union européenne, ou encore d’attentes excessivement diverses et démesurées?

Si nous réfutons les critiques que je viens de formuler, nous nous retrouvons face à une vérité on ne peut plus banale: les pays candidats doivent satisfaire aux critères d’adhésion. Je m’interroge sur la nécessité de rédiger deux rapports entiers si leur unique but est de nous rappeler ce principe évident et établi de longue date.

Aussi, je refuse de donner ma voix à ces projets, dans la mesure où ils ne semblent être rien d’autre qu’une liste de prétextes destinés à justifier, sans aucune raison valable, la suspension du processus d’intégration.

 
  
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  Bastiaan Belder, au nom du groupe IND/DEM. - (NL) Monsieur le Président, le rapport Stubb est décevant à plus d’un titre. Premièrement, il n’apporte aucun élément concret qui nous permettrait de sortir de l’impasse institutionnelle dans laquelle l’Union européenne se trouve actuellement fourvoyée. Seules la confirmation du soutien à la Constitution européenne et une synthèse de cette dernière au paragraphe 9 semblent, en cas d’adoption de ce rapport, refléter la toute dernière position de notre Assemblée.

Je trouve le manque de vision s’agissant du processus d’élargissement tout aussi choquant, ce qui m’amène au deuxième reproche que j’ai à formuler. Alors que le paragraphe 11 souligne la nécessité d’entreprendre des actions ayant pour but de faire mieux accepter le principe de l’élargissement par l’opinion publique, rien ne sera malheureusement fait pour s’attaquer aux causes sous-jacentes de son impopularité grandissante. Ainsi, le présent rapport perpétue-t-il le tabou de la finalité de l’Union. C’est précisément l’absence totale de leadership politique dans la question de la définition des frontières de l’Union européenne qui est à l’origine du mécontentement et de l’incertitude entourant le processus d’élargissement.

Font en outre défaut dans ce rapport sur les aspects institutionnels de la capacité de l’Union européenne à intégrer de nouveaux États membres les recommandations concrètes visant à ancrer le processus d’élargissement dans le Traité. Je proposerai d’inclure les différentes étapes du processus d’adhésion dans un Traité, de façon à établir des critères uniformes pour les pays désireux de rejoindre l’UE, quel que soit le stade du processus auquel ils se trouvent. Cette manière de procéder permettra d’améliorer la transparence du processus d’élargissement et donnera au Parlement les moyens d’assumer réellement sa tâche de contrôle parlementaire à toutes les étapes clés du processus d’adhésion.

 
  
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  Philip Claeys (NI). - (NL) Monsieur le Président, comme nous sommes en train d’examiner la stratégie d’élargissement, je pense que le moment est bien choisi pour nous pencher sur la manière dont les négociations avec les pays candidats problématiques, tels que la Turquie, sont conduites. La Turquie s’est vue imposer une date butoir, à laquelle il faudra qu’elle ait rempli ses obligations en matière d’union douanière. Or, le gouvernement turc refuse de jouer le jeu, tandis que supposée sanction de l’Union européenne se limite à laisser les chapitres difficiles de côté pour l’instant et à retirer sa date limite, sans qu’aucune autre ne soit prévue.

La Commission et le Conseil ont déclaré à maintes reprises qu’ils voulaient éviter une collision frontale avec la Turquie et que les Turcs avaient enfin compris que ce n’était pas à eux, mais bien à nous, d’édicter les règles. En fait, le gouvernement belge a inventé une nouvelle doctrine pour ce genre de situation, en vertu de laquelle, s’agissant de la Turquie, nous - je cite - «sommes impliqués dans un élargissement géopolitique requérant une autre tactique». En d’autres termes, libre à un pays candidat non européen, tel que la Turquie, de prendre les critères de Copenhague à la légère. L’Union européenne est démunie, quand il s’agit de répondre à la tactique de la Turquie, qui s’apparente à des marchandages de bazar.

Il y a un instant, le commissaire Rehn a évoqué la crédibilité de l’Union européenne vis-à-vis des pays candidats. Ce faisant, il a négligé un détail, à savoir la crédibilité dont jouit l’UE au sein de l’opinion publique européenne. On a toujours fait croire aux citoyens que les négociations seraient suspendues, s’il apparaissait que manifestement la Turquie n’atteindra jamais le niveau requis. Or, c’est tout à fait le contraire qu’on fait aujourd’hui. Il ne faut pas chercher plus loin la raison des problèmes de crédibilité de l’Union.

 
  
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  Panayiotis Demetriou (PPE-DE). - (EL) Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, les deux rapporteurs ont présenté deux rapports exceptionnels aujourd’hui. Je les félicite, car ils ont exposé les choses de manière succincte, complète et consistante.

Une question circule en permanence sur l’Union européenne: Quo vadis Europa? Elle peut être divisée en plusieurs autres questions: quel est le type d’Union européenne que nous souhaitons? Quelle taille doit-elle avoir? L’Union fonctionne-t-elle de manière efficace aujourd’hui?

Ces questions sont angoissantes et nous devons leur apporter des réponses. Or, les réponses se trouvent dans la vision que nous souhaitons soutenir. Quelle est notre vision? Notre vision est commune. Nous voulons une Union européenne démocratique, prospère et humaine. Nous voulons qu’elle joue un rôle de réglementation sur la scène mondiale. C’est pourquoi l’élargissement est un objectif intéressé. Il fait partie de cette vision. Par conséquent, nous ne pouvons mettre la charrue avant les bœufs, l’un et l’autre doivent avancer ensemble. Dans cette perspective, Monsieur Rehn a raison de dire que l’élargissement et l’approfondissement sont deux choses différentes. J’ajouterais qu’elles sont les deux facettes d’un même problème.

Toutefois, nous ne pouvons envisager l’élargissement aux dépens de la qualité et penser aux avantages de l’expansion (l’objectif de l’Europe n’est pas expansionniste) sans tenir compte des conditions dans lesquelles nous vivons. L’Union européenne n’a pas à s’adapter à l’élargissement. Il appartient en revanche à chacun des pays qui souhaitent la rejoindre de s’adapter. Au sujet de la Croatie et de la Turquie, la volonté d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne est assurément une bonne chose. Toutefois, nous avons bloqué la Croatie lorsqu’elle a enfreint les conditions que nous lui avions fixées. Je ne veux pas dire que nous devions en arriver là.

Pour conclure, je dirai que nous devons poursuivre le projet de Constitution, sans quoi l’élargissement n’aura aucun sens historique.

 
  
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  Jan Marinus Wiersma (PSE). - (NL) Monsieur le Président, j’aimerais moi aussi féliciter MM. Brok et Stubb, les deux rapporteurs, pour leur excellent travail. Le cinquième élargissement de l’Union européenne est sans aucun doute le projet le plus ambitieux que l’UE ait jamais eu à faire adopter. Bien entendu, ce projet sert également de point de référence pour la discussion d’aujourd’hui. De plus, il nous oblige à réfléchir au fonctionnement interne de l’UE, avant de lancer un nouvel élargissement. C’est pourquoi le thème de la capacité d’intégration est encore une fois à l’ordre du jour aujourd’hui.

J’aimerais faire une observation au sujet des critiques qui reviennent souvent dans le cadre de notre discussion sur l’élargissement, critiques dont j’aimerais me distancier, car elles renferment un certain nombre d’idées que je désapprouve. Tout d’abord, l’idée que cet élargissement était une erreur; ensuite, celle que l’Union européenne est pleine; enfin, l’idée que des réformes internes spécifiques sont nécessaires en prévision de l’élargissement. Ces idées sont fausses. L’élargissement représente une valeur interne intrinsèque qui concorde avec l’ambition d’améliorer le fonctionnement de l’UE. Je le répète, et je continuerai à le dire: l’élargissement de 2004 est un succès et celui de l’an prochain, qui associera à l’Europe la Bulgarie et la Roumanie, en sera un également.

L’UE est, et restera, un club ouvert. Elle a pris des engagements auprès d’un certain nombre de pays, nous devrons les honorer. Quoi qu’il en soit, l’Union européenne doit être réformée, si elle veut pouvoir continuer à fonctionner, et parce que les citoyens attendent d’elle davantage que ce qu’ils en reçoivent actuellement. Ainsi en revenons-nous une nouvelle fois au débat sur la capacité d’intégration et la stratégie d’élargissement sur le plan des affaires. Les rapports Brok et Stubb montrent, à mon avis, que le Parlement a réussi à présenter ses attentes de manière professionnelle, et que la Commission a opté pour cette même approche, même si, comme l’a indiqué M. Swoboda, la Commission a laissé un certain nombre de questions importantes en suspens, prétextant qu’elle y «reviendrait en temps voulu».

En matière de capacité d’intégration, il nous importe en priorité que l’Union européenne fasse son travail. Les institutions actuelles et le traité de Nice sont inadaptés pour servir de base à l’adhésion de nouveaux États membres. Il nous incombe de mener les réformes institutionnelles nécessaires pour permettre à de nouveaux pays de rejoindre l’Union. Le fait que les pays candidats soient quant à eux responsables des préparations minutieuses de l’adhésion n’a rien de nouveau. Ces conditions sont inscrites dans les critères de Copenhague depuis 1993.

L’importance de certains éléments, s’agissant de la capacité d’intégration de l’UE, va de soi. Nous avons besoin d’institutions, pour que l’UE fonctionne de manière démocratique et efficace, et nous avons aussi besoin d’un budget à la mesure de ses ambitions. Toutefois, j’aimerais parler de ce que l’on nomme la «capacité à agir», qui revêt à mon avis une importance primordiale. Il importe que l’Union européenne, la Commission et les États membres prennent des initiatives qui correspondent aux souhaits et aux attentes de la population européenne. Celles-ci doivent, elles aussi, être au cœur de la communication autour de l’Union européenne.

L’Union européenne doit montrer de quoi elle est capable et elle doit également le faire comprendre, car c’est là notre unique chance de réussir à créer et à conserver une structure de soutien à la coopération européenne, dont fait partie l’élargissement. Celui-ci ne doit pas être perçu comme un domaine séparé à traiter isolément. L’élargissement doit également faire partie de ce que la Commission appelle son «projet pour les citoyens». Seul un débat public qui serait lancé sur le thème d’une Europe plus efficace pourrait amener les citoyens à être favorable aux futurs élargissements.

Je souhaite terminer par une remarque concernant la Turquie, un sujet déjà abordé par M. Swoboda. Notre groupe soutient la position du commissaire Rehn. Il a, selon nous, présenté une proposition sensée, qui nous demande de réagir au fait que la Turquie n’ait pas mis en œuvre le protocole d’Ankara. Toutefois, nous pensons, tout comme lui, qu’il ne faut pas lui fermer entièrement la porte. La voie de la communication doit rester libre et nous soutenons la suspension partielle ou le report des négociations auquel vous avez vous-même fait référence. Nous continuerons de marteler d’une part que la Turquie doit respecter ses obligations légales envers l’Union européenne et d’autre part que la discussion ne doit pas être totalement interrompue.

Pour conclure, nous espérons que la Commission et le Conseil prendront dès l’an prochain des initiatives afin de s’occuper de l’isolement, essentiellement économique, de la partie nord de Chypre.

 
  
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  Andrew Duff (ALDE). - (EN) Monsieur le président, je me réjouis évidemment de la suppression du terme «capacité d’absorption», qui fait penser à un essuie de cuisine, ainsi que du terme «partenariat privilégié», qui est un concept légèrement condescendant et qui, franchement, ne donne pas beaucoup de privilèges.

Mais nous devons maintenant essayer de développer la politique de voisinage rapidement et avec créativité afin de créer aux frontières orientales une situation stable pour les États qui ne peuvent pas adhérer à l’Union et pour ceux qui décident de ne pas y adhérer. Comme nous approchons le moment de la renégociation du Traité, il serait bon d’inclure dans la partie III un chapitre décrivant la politique d’élargissement, transcrivant les critères de Copenhague et décrivant bien plus clairement qu’aujourd’hui le processus et le seuil d’adhésion. Il faudrait ajouter, en renégociant la partie III, une réflexion sur la création d’une nouvelle classe de membre associé. Une amélioration de ce type pourrait contribuer à rassurer l’opinion publique sur la qualité de notre processus d’adhésion et sur le rythme d’expansion de la société post-nationale de l’Europe. Elle serait également très utile pour les pays tiers lorsqu’ils réfléchissent à leur future relation avec l’Union.

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. VIDAL-QUADRAS
Vice-Président

 
  
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  Johannes Voggenhuber (Verts/ALE). - (DE) Monsieur le Président, bien que je tienne à féliciter les deux rapporteurs, j’essaye depuis quelques temps de me débarrasser de l’idée qu’il s’agit de frères jumeaux. Je ne sais si M. Méndez de Vigo a pensé ou non à la mère de cette paire, mais leur mise au monde a certainement duré plusieurs années. Nous félicitons les deux rapporteurs, malgré leur appartenance au groupe du parti populaire européen (démocrates chrétiens) et démocrates européens plutôt que grâce à elle, car en cette période de crise pour l’UE, ils ont jeté quelque lumière sur un sujet d’une grande importance.

Que signifie le fait de considérer l’approfondissement et l’élargissement comme une seule tâche indivisible? C’est un des sujets auquel les deux rapporteurs ont consacré une description complète et critique, non dépourvue de critiques formulées à l’encontre de la Commission, du Conseil et du Parlement lui-même. Mais leurs rapports se ressemblent également dans leur manière d’éviter très scrupuleusement d’aborder les problèmes sous-jacents graves et tabous. Ils présentent la nécessité pour l’Europe d’être unie, sans demander ce que l’Europe dans son ensemble est en réalité et où se placent ses frontières. Lorsque nous parlons d’unification et d’approfondissement, quel est donc le but ultime de ce processus d’unification? Nous savons bien que l’unification de l’Europe ne concerne pas seulement son marché et sa monnaie. Quel est donc son objectif politique? En janvier, M. Duff et moi-même avons présenté un rapport au Parlement, dans lequel ces questions étaient posées, pourtant, personne n’y a encore répondu à ce jour. C’est une des raisons pour lesquelles nous sommes incapables de traiter correctement de nombreux problèmes et de nombreuses peurs de la population. Nous devons briser ces tabous.

Je suis très reconnaissant des critiques franches qu’on trouve dans le rapport Brok, s’agissant de la superficialité avec laquelle les conséquences financières des divers élargissements sont décrites et de la façon tout aussi superficielle dont les problèmes institutionnels sont traités. Dès le début de cette crise constitutionnelle, la Commission a failli à sa tâche, en ne traitant pas correctement les questions institutionnelles. Cette critique peut s’étendre à son traitement superficiel des questions de sécurité interne, de justice, de liberté de la presse et de droits fondamentaux. Il est important de le dire. Personnellement, je regrette que Chypre occupe désormais le devant de la scène dans le cadre des discussions sur la Turquie, car elle n’est pas réellement au cœur du conflit, qui concerne davantage les questions de démocratie et de droits fondamentaux, des thèmes finalement relégués à l’arrière-plan. À l’avenir, la Commission devra s’atteler à ces tâches avec beaucoup plus de profondeur et d’application.

Comment se fait-il qu’en Pologne, un pays qui a signé le Traité, un débat sur la peine de mort puisse avoir lieu, à l’instigation du gouvernement? Comment se peut-il que quelques mois seulement après la signature d’un traité similaire, le président de la République tchèque émette des doutes sur les droits sociaux et sur l’économie sociale de marché? Je pense que les prochaines négociations d’adhésion doivent prévoir beaucoup plus de discussions que par le passé avec les candidats sur la question des objectifs de l’unification politique européenne.

 
  
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  Jaromír Kohlíček (GUE/NGL). - (CS) Je souhaite pousser un cran plus loin le questionnement de M. Voggenhuber. Comment se fait-il que les pratiques très déloyales que nous avons constatées tout récemment s’observent aujourd’hui dans certaines parties du traité d’adhésion, dès lors que celui-ci est confronté à la réalité des situations? Prenons par exemple la demande de la Commission aux États membre d’évaluer ce que l’on nomme leur capacité d’intégration, un sujet très en vogue. Les négociations sur l’élargissement de l’espace Schengen et sur les quotas de sucre sont scandaleuses et ne représentent que deux petites parties émergées de l’iceberg, qui révèlent les faiblesses de l’UE. Je reconnais avec lui qu’il existe ici aussi une chance de surmonter ces faiblesses. Une fois de plus, bien entendu, cela dépendra de notre volonté d’élaborer des solutions qui conviendront à toutes les parties, plutôt que d’adopter l’approche d’un «à prendre ou à laisser» acerbe et belliqueux auquel des pays comme la République tchèque ont dû s’habituer lors de leurs propres négociations d’adhésion.

Pour les prochains élargissements, il est non seulement important de partager des valeurs communes mais également de reconnaître que les demandes des pays qui ont été traditionnellement des acteurs plus petits en Europe doivent être prises au sérieux. Le principe de solidarité, par exemple, qui a été sérieusement ébranlé par les réductions du budget communautaire de 1,24 % du PIB à environ 1,05 % du PIB pour la période budgétaire actuelle, doit être renforcé. Par ailleurs, il convient de souligner que le traité constitutionnel ne peut pas servir de base aux développements futurs de l’UE. Il n’est ni une constitution, ni un traité; cela doit être dit clairement. J’aimerais également demander des négociations visant à établir un consensus sur les questions relatives à l’avenir de l’UE, avec comme délais … (le député a été interrompu).

Monsieur le Président, je souhaiterais simplement faire une remarque. Dans le contexte des relations de «l’après-élargissement», mentionnées dans la déclaration avec la Russie, j’attends avec grande impatience qu’une solution soit apportée aux problèmes des droits de l’homme et de la démocratisation, notamment dans les États baltes de l’UE.

 
  
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  Ryszard Czarnecki (UEN). - (PL) Monsieur le Président, les deux rapports dont nous discutons sont censés fonctionner comme des panneaux indicateurs pour l’Union européenne. Pourtant, au XXIe siècle, nous avons besoin de plus que de simples panneaux. Il nous faut également des feux de signalisation. Dans ce cas précis, pour parler métaphoriquement, nous avons besoin de deux plutôt que de trois couleurs. Il nous faut des feux verts et des feux oranges, mais pas de feux rouges. Autrement dit, aucun pays ne devrait être automatiquement exclu de l’adhésion à l’Union européenne. Brandir un feu rouge à n’importe quel pays en route vers la Communauté européenne serait inapproprié, mais la circulation européenne sombrerait dans le chaos si le seul feu visible sur la route était le vert.

J’aimerais maintenant vous rappeler le débat que nous avons eu il y a deux ans au sujet de l’adhésion de la Turquie. Lors de ce débat, les dirigeants des Verts, le parti auquel appartient M. Voggenhuber, avaient évoqué 2014 comme date d’adhésion éventuelle de la Turquie à l’Union européenne. Aujourd’hui, nous réalisons qu’il s’agissait là d’un cas de surréalisme politique. Nous devons admettre que, au-delà des adhésions rapides de la Croatie et de la Macédoine, les pays européens comme le Monténégro, la Serbie, la Bosnie et Herzégovine et l’Albanie devraient être autorisés à rejoindre l’Union européenne avant la Turquie.

Nous devons déclarer explicitement, et je dis cela le jour de la réunion régulière entre les députés du parlement monténégrin et les représentants du Parlement européen, que plus l’Union sera grande, plus elle sera puissante. L’Union européenne a pris une importance considérable en s’élargissant, sans qu’elle ait eu besoin pour cela d’une constitution. Je souhaite mettre en garde MM. Brok et Stubb. Ne nous servons pas des élargissements à venir comme de prétextes pour introduire des changements institutionnels.

 
  
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  Georgios Karatzaferis (IND/DEM). - (EL) Monsieur le Président, il serait bon que le commissaire Rehn, commissaire chargé de l’élargissement, définisse pour nous les frontières de l’Europe. Qu’est-ce que l’Europe? Où s’arrête-t-elle? À Istanbul, à Diyarbakir ou à Bagdad? Nous ne savons pas où se trouvent les frontières de l’Europe. En Israël, des signatures sont collectées pour l’adhésion. Pourquoi pas demain la Palestine et le Maroc? Mais que sera donc cette Europe? Clarifions nos objectifs. Voulons-nous une Europe unie ou une Eurasie unie? Ceci étant, nous réalisons tous ce qu’il est en train de se produire aujourd’hui. Aujourd’hui, la Turquie n’entre pas dans l’Europe. C’est l’Europe qui entre dans la Turquie. Voilà pourquoi c’est la Turquie qui fixe les conditions.

Nous devons également donner des éclaircissements sur l’exclusion de la partie nord de Chypre: celle-ci n’est pas le fait de l’Europe ou de Chypre. Elle est le fait d’une armée d’occupation. Si l’armée d’occupation s’en allait, il n’y aurait plus de problème. Mais nous détournons le regard, nous fermons les yeux. Une armée d’occupation sévit dans l’un des 25 pays d’Europe et nous prétendons n’en rien savoir. Cette situation engendre une arrogance toujours plus grande de la part de la Turquie. Si nous voulions être justes, nous exigerions que l’armée d’occupation s’en aille et que la Turquie reconnaisse 25 pays, et non 24. Si elle n’avait pas reconnu la France ou le Royaume-Uni, l’accepterait-on? Bien sûr que non. Pourquoi gardons-nous le silence? Parce que Chypre est un pays minuscule? L’Europe commet là une très lourde erreur historique.

 
  
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  James Hugh Allister (NI). - (EN) Monsieur le Président, il me semble clair que les partisans de la Constitution rejetée voient l’élargissement comme un moyen de garantir la mise en œuvre de certaines parties de cette Constitution. D’où la présence dans le rapport Stubb d’un nouvel assaut, mal argumenté mais exigé avec véhémence, sur les vetos nationaux, l’exigence d’un ministre des affaires étrangères, la demande d’octroyer plus de pouvoirs à la Commission, qui n’est pas élue, et à l’expansionniste Cour de justice et l’augmentation des compétences de l’UE.

L’élargissement en lui-même n’a aucunement besoin de cela, mais les fanatiques europhiles comme nos deux rapporteurs, dépourvus d’arguments valables pour mettre à mal l’opposition populaire à la Constitution, ont inventé ce faux argument selon lequel l’élargissement exige une Constitution. J’affirme que ni cette UE, ni une UE gonflée en englobant stupidement la Turquie, n’a besoin d’une Constitution.

Dans quelle belle pagaille Laurel Brok et Hardy Stubb nous mettraient! Et tout cela sans réfléchir à qui paierait la facture. Comme dans le passé, il semble qu’on s’attende à ce que des pays comme le Royaume-Uni continuent gaiement à financer cette folie. L’UE coûtant déjà 4 milliards de livres sterling nets par an à mon pays, je dois vous dire que nous ne pouvons tout simplement plus nous permettre de faire la charité.

 
  
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  Jacques Toubon (PPE-DE). - Monsieur le Président, les institutions européennes s’attèlent, enfin, à l’essentiel. Qu’est-ce que l’Union européenne? Que veut-elle? Qui peut y participer? J’espère que notre Parlement européen, grâce aux résolutions Stubb et Brok, va contribuer clairement à sortir des faux-semblants et mettre un terme à la fuite en avant en ce qui concerne la stratégie d’élargissement.

La capacité d’intégration est très bien définie par les trois éléments qui figurent dans le paragraphe 8 du rapport d’Elmar Brok. Pour nous, la priorité doit être donnée aux projets politiques et pas seulement aux institutions. Nous refusons que l’élargissement entraîne le démantèlement des politiques communes. La capacité d’intégration, comme l’a défini justement Alexander Stubb, ne constitue pas un critère d’adhésion, c’est vrai, mais une condition pour passer à l’adhésion.

Dans l’immédiat, nous estimons, comme Alexander Stubb, qu’un nouvel élargissement ne peut avoir lieu sans nouveaux mécanismes de décision, sans nouvelles ressources, sans nouvelle représentation de l’Union. Voilà la conclusion que nous tirons de la confrontation dramatique, actuellement, entre l’adhésion à l’Union des douze nouveaux membres, qui est une réussite, et le traité de Nice, quant à lui totalement insuffisant. Raisonnons avec cette même lucidité dans le cas de la Turquie.

Le Conseil des affaires générales a pris acte des conséquences de la situation de Chypre qui, naturellement, est intenable, mais ne s’agit-il pas uniquement d’une nouvelle mystification diplomatique? La suspension risque d’être inopérante et sans effet sur l’attitude de la Turquie. Notre position doit être réaffirmée, l’Union n’a pas vocation à intégrer la Turquie, mais doit mettre en place un partenariat privilégié avec ce pays essentiel à l’Europe.

Arrêtons de faire semblant, il est question de l’intérêt et de la Turquie et de l’Union européenne. L’élargissement n’est pas une fin en soi, c’est un moyen de construire le projet politique de l’Europe.

 
  
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  Carlos Carnero González (PSE). - (ES) Monsieur le Président, je souhaite féliciter M. Stubb pour son travail en tant que rapporteur pour le groupe socialiste du Parlement européen.

Il a effectué un travail sérieux, qui répond aux deux conditions essentielles pour ce type de rapport: tout d’abord, il apporte une réponse appropriée à un problème fondamental, ensuite, et c’est crucial, il réunit la grande majorité du Parlement. Ce rapport suivra probablement le chemin d’autres rapports, comme le rapport Corbett-Méndez de Vigo, qui ont remporté en leur temps un soutien presque unanime du Parlement européen, ce qui leur a donné du poids. J’en suis particulièrement convaincu après le succès du second forum interparlementaire sur l’avenir de l’Europe, qui s’est tenu ici la semaine dernière, et parce que nous examinons actuellement le rapport Stubb, que nous approuverons avant la réunion du Conseil européen dans quelques jours.

Il est vrai qu’il faut parler de capacité d’intégration plutôt que de capacité d’absorption. Nous devons répondre aux préoccupations légitimes des citoyens, en recourant à une approche double qui combine approfondissement et élargissement. Nous disons oui à l’élargissement, qui est un succès et qui doit être l’instrument de construction de ce que l’on appelait auparavant avec justesse la «maison commune européenne».

M. Méndez de Vigo, nous ne souhaitons pas avoir des invités dans cette maison mais des peuples et des pays auxquels cette maison appartiendra, ce qui signifie bien plus. Non seulement ces peuples ont le droit d’être là, mais ils ont aussi celui de s’y sentir chez eux et de participer aux décisions sur l’acquis et sur la gestion collective. La capacité d’intégration ne peut donc pas être un critère supplémentaire, qui viendrait s’ajouter aux critères de Copenhague, mais plutôt une condition que nous nous appliquons à nous-mêmes au sein de l’Union, afin de garantir le succès de l’élargissement. La capacité d’intégration implique clairement de disposer des capacités politique, institutionnelle et financière, avant que tout autre élargissement puisse avoir lieu. Le rapport exprime cela et nous le répétons tous. Nice ne sert à rien. C’est une évidence. Lorsqu’il s’agit de politiques et d’unanimité, autrement dit de paralysie, nous voyons bien que nous payons très cher l’absence de constitution.

Voilà pourquoi, dans ce rapport, nous sommes fidèles à la Constitution européenne et à son contenu fondamental, comme l’a indiqué M.Swoboda. En lui-même, le contenant n’a que peu d’importance, mais les principales avancées de cette Constitution sont, elles, très importantes, parce qu’elles impliquent l’approfondissement et l’élargissement en temps réel. Le paragraphe 9 du rapport Stubb doit donc être conservé dans son intégralité.

Nous pensons que la Constitution européenne se concrétisera au moyen d’un accord approprié, sans qu’elle soit raccourcie ou démembrée entièrement. Naturellement, cet accord doit être prêt en 2008 au plus tard, pour que les citoyens le connaissent lorsqu’ils voteront en 2009. Faute de quoi nous nous ridiculiserions et nous nous moquerions également d’eux.

Bien entendu, la politique européenne de voisinage doit également être renforcée; l’élargissement doit s’accompagner d’une politique européenne de voisinage dirigée notamment vers la région euro-méditerranéenne, une région cruciale. À cet égard, le rôle du Parlement européen sera essentiel avant et après chaque processus.

M. Stubb, vous recevrez un soutien solide et résolu du groupe socialiste.

 
  
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  Alexander Lambsdorff (ALDE). - (DE) Monsieur le Président, il ressort clairement du débat autour de ces deux rapports qu’il existe au sein de ce Parlement un consensus réjouissant sur la nécessité de mener une réforme institutionnelle avant de pouvoir accepter de nouveaux candidats. Nous savons tous que l’Union européenne se porte mal. Il est donc logique qu’en matière de politique d’élargissement, le Parlement se concentre sur la capacité de l’UE à intégrer de nouveaux membres, ce qui, contrairement à ce que certains membres prétendent parfois, n’a rien d’un nouveau critère mais constitue un élément important négligé par le passé. Les élargissements antérieurs ont été des succès, mais en 2004, l’UE s’est élargie sans approfondissement préalable ou simultané, mettant ainsi en péril l’idée d’une union toujours plus profonde. Raviver cette idée doit être, pour les députés européens que nous sommes, le principe qui guidera toutes nos actions. Il nous faudra pour cela des institutions efficaces, une volonté politique, et, surtout, le soutien de la population, que nous obtiendrons si nous sommes crédibles. Cette crédibilité dépend de notre volonté à emprunter de nouvelles voies et à examiner d’autres options qui devraient nous permettre de coopérer avec les futurs pays candidats et les rapprocher de nous. Contrairement à ce qu’affirme M. Brok, il n’est pas nécessaire de choisir entre la constitution et M. Verhofstadt; notre vision devrait inclure les deux. Je souhaiterais également ajouter que ce débat devrait avoir lieu à Bruxelles plutôt qu’à Strasbourg.

 
  
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  Angelika Beer (Verts/ALE). - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je voudrais tout d’abord dire quelques mots concernant le rapport de la Commission sur la stratégie d’élargissement, qui est à juste titre divisé en trois parties. Un des éléments centraux de la stratégie de la Commission est la stratégie de communication réclamée.

Lorsque les politiques que nous sommes se mêlent, à juste titre, à ce type de débat nous devons mettre en pratique pour nous-mêmes cette stratégie de communication plutôt que de voir dans les rapports des mystères qui ne s’y trouvent même pas. Permettez-moi aussi de dire clairement - et je me réfère ici au rapport de M. Brok - qu’il est également injuste d’exploiter les sensibilités nationales et les sentiments partisans pour s’opposer à la stratégie d’élargissement ou à la Constitution. Oui, bien sûr, certaines parties du rapport sont très ambivalentes. Qui a pris cependant la peine de lire ce rapport au stade de projet sait que celui-ci a pris sa forme actuelle après de nombreux amendements introduits par les libéraux, les verts et les sociaux-démocrates.

Ce que l’on observe chez certains éléments conservateurs mais aussi socialistes, à savoir la propension à faire des candidats les payeurs du prix de l’adhésion, me semble une attitude irresponsable. Comme la politique d’élargissement a été jusqu’à présent une politique de paix et comme nous voulons qu’elle le reste, je demande à l’Assemblée de voter les amendements 12 et 14.

 
  
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  Mary Lou McDonald (GUE/NGL). - (EN) Monsieur le Président, je suis ravie de ce débat et je voudrais exposer quelques points.

M. Stubb a identifié différentes classes de personnes et de politique sur le sujet de l’élargissement et de la Constitution. Je suis très favorable à l’élargissement parce que je pense que, jusqu’à maintenant, il a été un succès et qu’il continuera à l’être. Mais je suis également contre la Constitution.

Le concept de capacité d’intégration pourrait être utilisé pour vendre ou dépeindre la Constitution comme une simple façon de modifier les institutions afin de permettre l’élargissement en pratique. Ce serait non seulement une mauvaise interprétation de ce texte, mais cela représenterait aussi un réel échec de notre part dans ce que nous ne cessons de débattre: la communication avec les citoyens de l’UE. Pour communiquer, nous devons écouter, et nous devons tenir ce débat absolument fondamental sur la direction de l’Union. Si nos concitoyens estiment que les services publics et les droits des travailleurs sont en danger, il n’y a aucune bonne manière de communiquer cela, nous devons donc être réceptifs.

Pour conclure, au sujet de la Turquie, je soutiens son adhésion, mais le problème de Chypre doit être résolu. Il s’agit d’une occupation illégale permanente.

 
  
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  Jan Tadeusz Masiel (UEN). - (PL) Monsieur le Président, tandis que nous continuons de parler d’élargissement, au lieu de trouver de nouvelles solutions, le monde continue de changer. Je conviens que l’élargissement est une des politiques les plus importantes de l’Union européenne, qui garantit la paix et la sécurité dans ces régions. Il est vrai aussi que les élargissements précédents ont été des réussites. Cependant, un jour ou l’autre cette réussite pourrait se transformer en échec. En physique, seul l’univers peut s’étendre à l’infini. Tous les autres systèmes finissent par éclater à force de s’étendre. Plutôt que de parler d’élargissement d’une manière rigide, dépassée et redondante, nous devrions mettre au point des outils d’action à proposer à nos voisins, des outils comme la coopération, les politiques de voisinage et les accords d’association.

En outre, il conviendrait d’ajouter un critère culturel à la liste de critères que les pays candidats doivent remplir, laquelle fut établie en 1993 à Copenhague. Que nos concitoyens décident eux-mêmes par référendum s’ils souhaitent que la Turquie devienne un État membre de l’Union européenne ou s’il faut qu’elle soit simplement un pays associé! Si nous voulons nous étendre encore plus, alors il faut certainement élargir l’adhésion à des pays qui sont et ont toujours été européens, comme la Serbie, l’Ukraine ou le Belarus.

 
  
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  Gerard Batten (IND/DEM). - (EN) Monsieur le Président, l’Union européenne a, semble-t-il un besoin sans bornes d’absorber davantage de pays. Les États-nations démocratiques se voient retirer toujours plus de pouvoir pour le concentrer dans une Union européenne centralisée et non démocratique. Comme le dit M. Stubb, il veut voir une entité unique avec une structure unifiée et une personnalité juridique, en d’autres termes, des «États-Unis d’Europe».

M. Stubb ne sera pas surpris de savoir que le parti pour l’indépendance du Royaume-Uni n’est pas d’accord avec cela, mais j’ai trouvé quelque chose dans son rapport sur lequel nous pouvons être d’accord. Lorsqu’il évoque une Constitution révisée, il réclame l’adoption d’une clause permettant aux États membres de se retirer de l’Union européenne. Un jour, la Grande-Bretagne quittera l’Union européenne, Constitution ou pas, clause de retrait ou pas, mais M. Stubb a au moins la décence de reconnaître que les pays devraient avoir le droit de se séparer du nouvel empire européen.

 
  
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  György Schöpflin (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, parfois il est bon de poser des questions simples, voire simplistes: pourquoi élargir l’Union européenne au fond? La réponse est simple: pour élargir la zone de démocratie et de stabilité que l’Europe a créée.

Cependant, la question est plus complexe qu’il n’y paraît à première vue. La démocratie n’est pas immuable, elle nécessite des améliorations constantes dans le but de donner le pouvoir aux citoyens. C’est la raison fondamentale du renforcement de l’intégration. C’est dans ce contexte que l’élargissement soulève un problème particulier qui doit être réglé. L’Union européenne insiste pour que les futurs États membres arrivent avec des systèmes démocratiques en parfait état de marche - comme il se doit -, mais cette exigence ne tient pas compte des changements que l’élargissement entraîne dans son sillage au sein même de l’UE.

Le problème est le suivant: l’entrée de nouveaux États membres concerne non seulement les États, mais également les nouveaux citoyens qui s’ajoutent par le biais de l’adhésion. Par conséquent, l’élargissement de l’Union européenne implique l’élargissement de la démographie européenne, l’augmentation des citoyens de l’Europe. Leur voix est rarement entendue dans le débat de l’élargissement, pourtant, ignorer les citoyens risque d’exacerber le déficit démocratique.

Une UE assaillie par un déficit démocratique ne peut pas efficacement étendre la zone de démocratie aux futurs États membres. Au contraire, le déficit démocratique pourrait même s’exporter. Cela serait complètement contre-productif. L’élargissement doit prendre en considération les souhaits des citoyens européens en ce qui concerne leur propre élargissement et ne doit pas prendre leur voix pour acquise. Faute de quoi, cela nuirait à l’objectif d’expansion de la zone de démocratie et de stabilité de l’Europe.

 
  
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  Jo Leinen (PSE). - (DE) Monsieur le Président, je voudrais signaler au membre de l’UKIP que le traité constitutionnel accorde à tout État le droit de faire sécession de l’Union européenne, aucun pays n’y a toutefois recouru jusqu’ici, ni n’y recourra à l’avenir, pas même le Royaume-Uni, compte tenu du fait qu’il est bien plus avantageux de rester au sein de l’Union européenne que de la quitter. Je ne suis pas inquiet à cet égard. Ce genre de propagande de la part de députés qui viennent faire leur discours et puis s’en vont de la salle n’a rien de nouveau. Il ne vaut même pas la peine qu’on en parle.

Nous sommes tous d’accord sur la nécessité d’un approfondissement de l’Union européenne, qu’on nous promet depuis Maastricht, alors que l’Union comptait douze États membres au lieu des vingt-sept actuels. Il est grand plus que temps que l’approfondissement en question advienne. Ceci vaut également pour tout élargissement futur. Un amendement laisse penser que la Croatie et l’Europe du sud-est pourraient être exclues de cet impératif. Au contraire il faut approfondir l’Union européenne avant toute nouvelle adhésion.

Il faut aussi dire clairement que c’est l’Union européenne elle-même qui doit être blâmée pour ces problèmes plutôt que les candidats. Cela a déjà été dit ici. Notre tâche consiste à informer et éclairer les populations sur les buts et les avantages de l’élargissement, dans nos propres pays également. Tous les anciens États membres tirent un avantage énorme de l’arrivée de nouveaux États, car ils exportent bien plus vers ces pays qu’ils n’en importent. Il y a là une stratégie dans laquelle tout le monde est gagnant! Malheureusement elle ne fait pas l’objet d’une communication appropriée en direction du public. Nous devons nous rattraper sur ce plan-là!

Je voudrais évoquer un autre problème qui a trait à la procédure de ratification des nouvelles adhésions. Si les pays commencent à annoncer, chacun de leur côté, des référendums portant sur l’adhésion d’un nouvel État membre, cela nous compliquera la vie. Voilà une des autres questions que nous devrons examiner.

Dans l’ensemble, mes félicitations aux jumeaux pour avoir indiqué la voie à suivre, dans laquelle notre Assemblée devrait d’après moi s’engager.

 
  
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  István Szent-Iványi (ALDE). - (HU) Dans le débat d’aujourd’hui, presque tout le monde est d’accord pour dire que l’élargissement est une réussite. Si tel est bien le cas, alors nous devons maintenir inébranlablement le cap des obligations que nous avons acceptées, parce que l’Europe a un besoin crucial de réussite. La réforme de la procédure décisionnelle et le débat concernant la capacité d’intégration ne doivent pas ralentir le processus d’élargissement et ne doivent pas servir de prétextes pour freiner l’élargissement.

La candidature de la Croatie doit être évaluée en fonction de ses propres mérites. Les négociations avec la Turquie doivent se poursuivre, mais la Turquie doit, elle aussi, faire preuve de bonne foi et remplir les conditions imposées. En ce qui concerne la Macédoine, nous devons clairement définir les conditions de l’ouverture des négociations. S’agissant des pays potentiellement candidats, il doit être fixé des conditions précises à leur adhésion, même à moyen terme, pour autant qu’ils soient prêts à remplir ces conditions. L’Union européenne doit également garantir plus de ressources, plus de fonds et des conditions plus claires et plus accessibles en ce qui concerne les fonds de pré-adhésion, sans quoi notre volonté de poursuivre l’élargissement ne sera pas crédible.

 
  
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  Cem Özdemir (Verts/ALE). - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, l’élargissement de l’Union européenne est l’un des instruments de politique étrangère et des moyens de prévention des conflits les plus efficaces de toute l’histoire de l’Union européenne. D’autres défis et d’autres occasions nous attendent cependant.

Après l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie, c’est celle de la Croatie qui nous attend et, plus tard, celle non seulement de la Turquie, mais aussi des Balkans occidentaux, qui ne doivent pas être oubliés! Aussi difficile que la tâche puisse s’avérer, l’élargissement et l’approfondissement de l’Union européenne doivent aller de pair. Ceci nécessitera une réforme du cadre institutionnel. Notre problème ne concerne pas tant l’opinion publique ou les pays candidats que les élites européennes. C’est pourquoi je demande instamment à M. Brok de prendre pour modèle ce grand Européen qu’est Helmut Kohl, qui a eu le courage d’expliquer à son opinion publique l’importance d’une Union européenne élargie et approfondie.

L’heure est venue de prendre de nouvelles initiatives pour résoudre le conflit de Chypre et mettre fin à l’isolement des Turcs du Nord de l’île. Je me réjouis de la promesse de la partie grecque de l’île, mais une nouvelle initiative sous l’égide des Nations unies s’impose également, qui devrait permettre au conflit de se résoudre définitivement et à l’Union européenne de poursuivre les négociations avec la Turquie dans une totale indépendance par rapport à la question chypriote.

 
  
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  Sylvia-Yvonne Kaufmann (GUE/NGL). - (DE) Monsieur le Président, il est impossible de prédire quels pays nous serons en mesure d’accueillir dans l’Union européenne ou à quel moment, en revanche trois faits apparaissent avec un relief particulier. Premièrement, après la Roumanie et la Bulgarie, il y aura d’autres adhésions à l’Union européenne; deuxièmement, tous les États européens qui partagent nos valeurs et respectent les critères de Copenhague ont le droit de demander à devenir membre de l’Union européenne; troisièmement, le traité de Nice ne convient pas comme base de travail pour de futurs élargissements. Il résulte de ceci qu’il est plus que grand temps de lancer un train de réformes en profondeur de l’Union européenne à vingt-sept.

Cette appréciation de la situation valait déjà il y a six ans, au moment de l’adoption de la déclaration de Laeken, elle est aujourd’hui on ne peut plus pertinente. Je pense que l’approfondissement de l’Union européenne avant tout autre élargissement est une exigence indispensable et aussi que le traité constitutionnel est la clé de la future viabilité de l’Union européenne. Il n’est pas acceptable d’imposer des exigences unilatérales aux pays candidats à l’adhésion, et qu’ils soient ainsi les seuls à devoir consentir des efforts. J’espère donc qu’il sera possible, l’année prochaine, de trouver une sortie à la crise constitutionnelle qui sera une solution acceptable pour les vingt-sept États membres, mais le fait est que la mêlée politique complexe rendra la chose extrêmement difficile.

L’essentiel en termes de capacité d’intégration sera de ne pas se contenter d’une réforme minimaliste, voire purement institutionnelle, de l’Union européenne. Il ne peut y avoir en 2009 de recul par rapport au traité constitutionnel. Il est aussi absolument vital que nous réussissions à combler le fossé entre l’Union européenne et ses citoyens; le message qui doit passer haut et fort - et pas seulement en direction des populations française et néerlandaise - est que nous sommes prêts à tirer la leçon du «non» exprimé dans ces deux pays. Ce qui signifie que nous sommes prêts à envisager à l’avenir d’autres manières de faire de la politique européenne. Ce qui signifie surtout, à mon avis, de mettre la création d’une Europe sociale au cœur de la politique européenne.

 
  
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  Mario Borghezio (UEN). - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, ce débat doit montrer clairement à la Commission qu’elle doit subordonner son vaste programme d’élargissement à la nécessité d’une stratégie d’ensemble s’agissant du rôle politique de l’Union européenne aujourd’hui et à l’avenir.

Cela suppose aussi - peut-être essentiellement - de prendre une décision géopolitique sur ce que doivent être les frontières de l’Union européenne. Cela apparaît particulièrement vrai et impératif par rapport à la question très sensible de la Turquie, pour laquelle un partenariat privilégié commence enfin à se dessiner comme une solution.

Je suis d’accord avec ces rapports sur un point, à savoir que la communication de la Commission concernant la stratégie d’élargissement ne s’est pas suffisamment attachée à un aspect fondamental, à savoir le risque, si un nouvel élargissement de l’Union européenne n’impliquait pas une intégration politique, économique, financière et aussi culturelle appropriée, d’aboutir alors à l’affaiblissement, voire à la faillite de l’Union européenne en tant que projet politique.

C’est un fait que la Commission avance ce programme d’élargissement avec une légèreté déconcertante, sans même indiquer quel pourrait être son impact financier, alors qu’il est absolument essentiel d’en être tout à fait conscient avant toute nouvelle adhésion.

Nous sommes bien conscients du travail acharné qui nous attend à la suite de l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie. L’heure est peut-être venue de dire clairement aux pays candidats que différentes perspectives s’offrent à eux, comme nous l’avons indiqué dans le cas de la Turquie. N’oublions pas qu’il a été extrêmement difficile d’aboutir à un compromis à propos des perspectives financières actuelles, qui devront d’ailleurs être rapidement révisées.

Ces arguments nous font réaliser que la position des gouvernements - comme le gouvernement de M. Prodi - qui insistent à tout moment sur l’élargissement aux pays des Balkans, sans tenir nul compte des difficultés réelles, dénote une légèreté irresponsable.

En outre, il n’est plus possible de tolérer l’excessive clémence vis-à-vis de questions aussi graves que celles de la corruption et de la criminalité, clémence qui a caractérisé certaines procédures d’adhésion par le passé, si nous voulons que l’intégration de l’Europe reste conforme aux règles et aux valeurs dans lesquelles nos concitoyens et nos peuples croient.

 
  
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  Paul Marie Coûteaux (IND/DEM). - Monsieur le Président, nous aussi, nous voterons contre ce rapport, parce qu’il a voulu prendre ses distances avec la sage Europe des origines, c’est-à-dire une Europe des Six, six États coopérant afin d’établir l’équilibre atlantique.

Les idéologues de la supranationalité ont surdimensionné leur projet en élargissant à tout-va, sans même savoir où étaient leurs frontières. Or, à force de pulvériser les frontières intérieures et de ne même plus savoir ce qu’est une frontière, ces europiomanes ne savent plus où s’arrêter. De ce fait, leur projet n’est pas véritablement politique car, je le répète, on ne fait pas de politique sans concept de frontière.

Aujourd’hui, ces europiomanes découvrent qu’il y a toujours quelqu’un derrière le mur, qu’il faut toujours élargir davantage, faute de pouvoir dire non à quiconque. Les voici privés de toute constitution - qu’ils ne se fassent pas illusions! -, définitivement privés de toute constitution. Ils sont confrontés à un vide immense, contraints soit de reculer, c’est-à-dire d’inventer une Europe pragmatique à deux ou trois vitesses, ce qui serait le plus raisonnable, soit de se lancer dans une vertigineuse fuite en avant.

Les voici engagés avec la Turquie, les voici confrontés à de nouveaux pays candidats à l’adhésion dans le Caucase, par exemple: après tout, la Géorgie fait bien partie du Conseil de l’Europe… Pourquoi pas les pays du Maghreb, ou le Liban, dont l’histoire est tellement liée à celle de nos nations?

Eh bien, allons-y! Puisque cette pauvre Europe n’a déjà plus d’ossature, élargissons-la sans cesse et n’ayons garde d’oublier ce faisant des États curieusement laissés de côté, la Serbie, la Russie,… peut-être parce que ces pays renâclent à accepter l’hégémonie américaine? Cela dit tout, Monsieur le Président, de la faillite, oui, de la faillite de la prétendue Union européenne.

 
  
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  Reinhard Rack (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, à plusieurs reprises, au fil des ans, notre Assemblée, d’abord prudemment, ensuite - comme aujourd’hui - très clairement, a envoyé le double message qu’il ne peut y avoir de nouvel élargissement sans une Constitution qui fonctionne. En procédant à l’élargissement sans si et sans mais, dans un empressement toujours plus grand, nous ne rendons service à personne. Au contraire, en divisant les États membres en deux catégories, grâce à des dérogations, et en nous aliénant les peuples d’Europe, nous mettons en danger ce qui a déjà été engrangé.

Bien que l’élargissement soit une des réelles réussites de l’Union européenne, de nombreuses personnes ont de plus en plus tendance à considérer qu’il s’agit d’une menace. Pour remédier à cela, nous devons forger l’opinion au sens le plus noble du terme. Ce n’est pas vraiment tâche facile, car une Constitution ce n’est pas très excitant du point de vue politique, chose tout à fait compréhensible, puisqu’il s’agit essentiellement de mieux faire fonctionner les institutions et de faire prendre les décisions par une majorité sur la place publique, plutôt que par la grande diplomatie à huis clos. Il s’agit d’un modèle financier qui s’attache à créer un équilibre rationnel entre les tâches à accomplir et l’argent dont on dispose. Et il s ’agit également dans une large mesure des nouvelles tâches de l’Europe, même si aujourd’hui de très nombreux citoyens reprochent à l’Europe de les régenter et de les brider. Même quand il fait chaud, la question énergétique revêt une dimension européenne et c’est une question que nous devons affronter ensemble.

Si vous le permettez, je voudrais conclure par quelques mots sur la Croatie, candidat particulièrement important pour mon pays. Notre demande concernant la Constitution ne signifie pas que nous voulons barrer la route à l’adhésion de la Croatie, bien au contraire! Il est parfaitement imaginable que ce pays nous rejoigne en 2009 ou 2010, à condition que la présidence allemande parvienne à insuffler un nouvel élan à la procédure de ratification de la Constitution et à relancer la question de la Constitution. Nous souhaitons plein succès dans ce domaine à la présidence allemande qui se met en place.

 
  
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  Richard Corbett (PSE). - (EN) Monsieur le Président, M. Stubb a déclaré que l’élargissement a été la politique européenne qui a le plus réussi, répandant la stabilité, la paix et la prospérité sur tout notre continent.

Cette logique est toujours d’application. Bien sûr, cela signifie que l’Union européenne doit s’adapter, en particulier en termes de réforme institutionnelle. Cependant, cela signifie-t-il que nous devons bloquer tout élargissement jusqu’à ce que toutes les réformes institutionnelles soient achevées? Si c’était le cas, le dernier élargissement n’aurait jamais eu lieu, parce que le traité de Nice était clairement insuffisant. Peut-être même que l’élargissement de 1973 aurait pu ne pas avoir lieu.

Le fait est que l’élargissement est l’un des facteurs qui fait avancer la réforme. Certains États membres qui rechignent à accepter une réforme institutionnelle acceptent souvent sa nécessité comme conséquence de l’élargissement. C’est pourquoi ceux qui soutiennent la réforme devraient soutenir l’élargissement. Cependant M. Méndez de Vigo a déclaré qu’il n’y aurait pas d’autre élargissement sans traité constitutionnel. En effet, le point 9 du rapport de M. Stubb explique que «tout élargissement exige…» - et ensuite il y a une longue liste de choses qui se retrouvent toutes dans le traité constitutionnel. Nous avons un peu de difficulté avec cette position absolue.

M. Brok a dit que ceux qui poussent le plus pour un élargissement sont souvent ceux qui s’opposent à l’approfondissement. Pourtant, si vous voulez forcer les deux, vous devez faire pression pour les deux. Le danger existe réellement de voir, d’un côté, des gens dire qu’ils ne veulent pas de l’élargissement jusqu’à ce qu’on ait une réforme institutionnelle et, de l’autre, d’autres personnes dire que nous n’avons pas besoin de réformes institutionnelles avant de procéder à un élargissement. Si vous voulez faire avancer ces deux idées, vous devez les soutenir toutes les deux, car ce sont ces deux idées qui nous mèneront vers une Union européenne élargie et réformée.

C’est la raison pour laquelle notre groupe a proposé un amendement au point 9 pour s’assurer qu’on ne verra pas comme condition préalable que chaque partie d’un programme institutionnel doit être acceptée avant tout élargissement futur. Nous pensons que les deux processus - élargissement et réforme - iront de pair; ils se pousseront l’un l’autre et ils pourraient peut-être finir par être promulgués le même jour - un nouveau traité et un traité d’adhésion peut-être réunis en un seul traité.

 
  
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  Ignasi Guardans Cambó (ALDE). - (ES) Monsieur le Président, l’élargissement ne doit pas être une fin en soi. C’est un moyen d’étendre un projet et nous ne pouvons permettre à ce projet d’être affaibli en raison de l’élargissement.

En fin de compte, ce débat sape réellement notre capacité à parler de ce que l’Europe veut être, de ce qu’elle veut faire. Le paragraphe 8 du rapport Brok est très clair à cet égard. Malheureusement, nous pourrions être en train et nous sommes de fait en train de nous précipiter d’une manière qui nous empêche de parler de nos propres problèmes et difficultés sous prétexte d’élargissement.

Certaines réformes institutionnelles ne peuvent attendre, élargissement ou pas. Des mesures politiques et financières peuvent être mises en œuvre maintenant sans aucune réforme. Il existe de sérieux problèmes de légitimité et d’actions honteuses de la part de la Commission européenne, comme celle qui consiste à approuver secrètement des règles dans le domaine de la sécurité, imposées aux aéroports sans aucun contrôle démocratique et sans en informer les citoyens. Un grand nombre d’actions portent préjudice à la légitimité démocratique de nos institutions.

Il faut trouver une solution à tout cela. Nous devons clairement ouvrir le débat sur l’élargissement et les deux fronts doivent être ouverts en parallèle. Mais l’élargissement ne doit pas servir de prétexte au refus d’affronter les problèmes sérieux auxquels l’Union européenne est confrontée aujourd’hui, avec ou sans la Turquie, avec ou sans l’élargissement.

 
  
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  Milan Horáček (Verts/ALE). - (DE) Monsieur le Président, je voudrais remercier MM. Brok et Stubb pour leurs rapports et souligner les problèmes soulevés par l’éventuelle adhésion de la Croatie, un pays qui a accompli des progrès considérables ces dernières années et qui peut donc relever le défi politique et économique des critères de Copenhague. Comme sa capacité d’intégration ne sera pas mise à l’épreuve, l’Union européenne doit définir une stratégie claire et résolue pour permettre l’intégration rapide de la Croatie. Nous ne pouvons pas faire de ce pays l’otage des problèmes intérieurs de l’Union européenne et nous devons faire preuve d’une attitude souple s’agissant de son adhésion. Si celle-ci se fait, elle aura une signification relativement limitée pour l’Union européenne, mais sera par contre très importante pour la Croatie et son avenir démocratique.

 
  
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  Kyriacos Triantaphyllides (GUE/NGL). - (EL) Monsieur le Président, je voudrais faire quelques commentaires concernant un des deux rapports dont nous débattons aujourd’hui, le rapport Stubb.

Il s’agit d’un rapport qui cherche à encourager les efforts en vue d’accroître l’aptitude de l’Union à fonctionner au niveau des procédures de prise de décision, et à institutionnaliser celles-ci de manière telle que les décisions soient prises par son noyau directeur, sans aucun droit de veto pour les plus petits États, autrefois plus indépendants.

De toute évidence, le rapporteur n’a pas entendu l’opinion publique, qui a rejeté par deux fois le traité constitutionnel. Il n’y a pas d’autre façon d’expliquer le fait qu’il déterre un texte mort et adopte ses dispositions antidémocratiques. Le contenu des changements apportés approfondit le déficit démocratique plutôt que de le réduire ou de l’éliminer. Ils visent à promouvoir le traité constitutionnel et son contenu antipopulaire d’ici à 2009. Au lieu d’étendre les droits des citoyens et d’améliorer leur information, ils comprennent clairement l’aptitude au fonctionnement et la procédure de prise de décision de l’Union européenne comme un droit presque exclusif des cercles forts de l’Union européenne. Il est triste de voir que le citoyen est tenu à l’écart une fois de plus.

 
  
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  Andrzej Tomasz Zapałowski (UEN). - (PL) Monsieur le Président, quand nous débattons de la stratégie d’élargissement de l’Union européenne, nous devrions considérer notre vision d’une Europe commune. Jusqu’ici, les tentatives politiques impitoyables d’imposer la Constitution ont reflété un désir de créer une organisation politique supranationale dans laquelle les plus grands pays disposent de la majorité de décision. La question de l’élargissement de l’Union européenne est généralement abordée sous cet angle. Les questions économiques sont mises de côté. L’Union européenne est prête à accueillir autant de pays qu’il est possible, à condition que les plus grands pays européens puissent les dominer. C’est pourquoi du point de vue du potentiel démographique, la perspective de l’adhésion de la Turquie et de l’Ukraine dans les quelques années à venir n’est pas acceptable aux yeux des décideurs.

Je voudrais souligner que l’Union européenne ne pourra survivre que si les questions économiques prévalent sur les considérations politiques et sur l’ambition de créer un nouvel empire romain du vingt et unième siècle dirigé par trois ou quatre pays.

 
  
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  Jacek Protasiewicz (PPE-DE). - (PL) Monsieur le Président, je voudrais remercier MM. Brok et Stubb, qui sont membres de mon groupe politique, pour l’effort qu’ils ont consenti dans leurs rapports. Ces deux textes traduisent une approche approfondie et compétente d’un des défis les plus importants auxquels l’Union européenne ait été confrontée, à savoir son élargissement ultérieur. En tant que ressortissant d’un pays qui a adhéré à la Communauté européenne il y a deux ans et demi, je suis en mesure d’apprécier les avantages de l’adhésion, tant pour l’économie polonaise que pour la vie de millions de Polonais.

Je suis également convaincu que le tout récent élargissement n’a pas profité seulement aux nouveaux membres. Toute l’Union en a profité, à la fois en termes économiques et en termes de sécurité et de stabilité. Cela vaut aussi pour les précédents élargissements de la Communauté européenne. Tant les nouveaux membres que les États déjà membres en ont profité.

L’Union européenne est l’exemple d’une entreprise réussie, parce qu’elle ne s’est jamais limitée à un cercle fermé de membres fondateurs, mais s’est montrée au contraire capable de croître intelligemment, pour devenir un acteur de plus en plus influent sur une scène de plus en plus globale.

Il ne fait pas de doute pour moi qu’il y aura d’autres élargissements de l’Union européenne. Les États des Balkans et les voisins orientaux de l’Union voudront un jour faire partie de l’Union européenne, ce qui profitera aussi à notre Communauté.

Il ne fait pas de doute que des réformes institutionnelles seront nécessaires avant le prochain élargissement. Néanmoins, je crains que faire dépendre ce processus entièrement de l’adoption de tous les points du traité constitutionnel, alors que celui-ci a été rejeté par référendum en France et aux Pays-Bas, puisse nourrir le sentiment peu souhaitable que l’Union ne désire pas de nouveaux membres. Ce serait un message très négatif adressé aux sociétés des pays qui souhaitent rejoindre notre Communauté.

Nous ne devons pas, et je crois que nous ne voulions pas, nous limiter au cercle des membres actuels, qui se compose déjà de vingt-sept pays. Notre volonté d’accepter de nouveaux membres ne doit pas être l’otage de nos disputes internes concernant la forme des institutions européennes.

 
  
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  Csaba Sándor Tabajdi (PSE). - Monsieur le Président, la politique européenne de voisinage et la présence de minorités hongroises font que la Hongrie est le pays le plus intéressé par le futur élargissement de l’Union: Croatie, Serbie, autres pays des Balkans occidentaux. Il n’empêche que, à l’heure actuelle, la tâche numéro un, c’est l’approfondissement, la mise en œuvre de réformes profondes, économiques, institutionnelles, sans toutefois fermer la porte à l’élargissement. Il est regrettable que, dans l’optique de l’histoire de la Communauté européenne, cet élargissement n’ait pas été précédé par un approfondissement économique et institutionnel: on ne peut pas créer une Europe élargie avec relativement moins de ressources et sans traité constitutionnel!

L’élargissement de 2004 a eu un résultat positif, bénéfique, pour les anciens et pour les nouveaux pays membres. C’est une situation gagnant-gagnant. Les dix nouveaux pays membres se sont intégrés sans problèmes, sans turbulences économiques, sans dumping social, sans flux migratoire. Après l’élargissement, l’Union européenne a été capable d’adopter la directive sur les services, REACH, les perspectives financières et elle va élargir le système Schengen. Mais, chers collègues, ce qu’il faut, c’est une campagne européenne parce que, dans les pays occidentaux, on ne connaît pas les frais réels de l’élargissement et les nouveaux pays membres sont devenus les boucs émissaires des problèmes internes des pays occidentaux.

 
  
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  Marios Matsakis (ALDE). - (EN) Monsieur le Président, valeurs européennes et principes de justice, de démocratie, de liberté de parole et de respect des droits de l’homme: ce sont là de beaux mots, souvent prononcés à l’excès lors de cérémonies sans importance et d’expressions futiles d’hypocrisie, mais rarement dits sérieusement ou mis en œuvre. La décadence de l’esprit européen, associée au concours de subordination à l’administration américaine, règne en maître dans une Union européenne qui est menacée par une désintégration venant de l’intérieur à cause de l’étroitesse d’esprit des commissaires à l’élargissement et des coups bas des dirigeants britanniques à jamais soumis aux souhaits de leurs maîtres transatlantiques.

C’est la triste situation d’une Commission et d’un Conseil qui noient peu à peu l’UE dans la désillusion en permettant à un État asiatique contrôlé militairement, au lieu de remplir ses obligations, de dicter ses conditions pour nous honorer de son adhésion à l’UE.

Chers collègues, ne vous trompez pas. Avec une adhésion comme celle de la Turquie, ce n’est pas l’UE qui va s’élargir, mais la Turquie. Donc, Monsieur Rehn, toutes mes félicitations pour vos efforts déterminés à réaliser avec succès l’adhésion de l’UE à un grand empire ottoman turc ravivé, et bonne chance à nos concitoyens qui regardent consternés et impuissants!

 
  
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  Giorgos Dimitrakopoulos (PPE-DE). - (EL) Monsieur le Président, je félicite MM. Brok et Stubb pour leur travail exceptionnel. Je voudrais faire les commentaires suivants:

Poursuivre la politique d’élargissement, c’est important et il faut s’étendre de manière coordonnée aux autres pays des Balkans occidentaux, surtout en vue des développements imminents dans la question du Kosovo. Les perspectives européennes et la politique d’élargissement sont des politiques de paix et de coopération que nous nous efforçons tous de concrétiser.

S’agissant de la Turquie, une décision a été prise l’autre jour, qui va dans la bonne direction. Cependant, Monsieur le commissaire, je vous demande de réexaminer l’idée du calendrier, cela compléterait et améliorerait la décision prise et vous aiderait également à défendre la crédibilité de l’Union européenne.

En matière de politique de voisinage, la communication de la Commission est inadéquate. Elle constitue pourtant une politique importante, qu’il faut développer. Par conséquent, nous attendons une nouvelle communication, améliorée et plus intégrée.

Enfin, une Europe élargie sera plus démocratique, plus efficace, plus transparente et plus sensible du point de vue social, si elle acquiert enfin sa Constitution. Les procédures redémarrent, la bonne approche consiste à procéder pas à pas sur les questions et les problèmes qui constituent cette approche, mais cette approche pas à pas a aussi une date de péremption.

 
  
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  Inger Segelström (PSE). - (SV) Monsieur le Président, je voudrais remercier MM. Brok et Stubb pour ce débat sur le processus d’élargissement et pour leurs rapports. Je commencerai par un commentaire sur les opinions exprimées par M. Brok au considérant F, pour lequel l’élargissement ne devrait pas mettre en cause la nature politique de ce projet. Je viens de Suède, un pays qui a clairement dit dans chaque étude qu’un processus d’élargissement continu constitue une des questions les plus importantes auxquelles l’Union européenne est confrontée. Je crains que nous ne parlions pas clairement aujourd’hui d’un élargissement continu et de l’adhésion future de la Turquie. De nombreux députés européens sont opposés à l’adhésion de la Turquie, ainsi que l’indique clairement la demande du groupe du parti populaire européen (démocrates-chrétiens) et des démocrates européens pour que le vote portant sur les négociations d’adhésion avec la Turquie ait lieu à bulletin secret. Beaucoup, dont moi-même, ne comprennent pas que les politiques aient peur de défendre leurs opinions devant leurs électeurs, les citoyens européens.

Ces dernières années, à de nombreuses occasions, je me suis demandée s’il existait une volonté de poursuivre l’élargissement, même si nous réglons les questions centrales qui figurent en tête de notre liste de priorités. Nous avons besoin d’une nouvelle Constitution, abstraction faite de l’adhésion de nouveaux États membres, pour garantir, entre autres choses, un processus moderne de prise de décision. Nous devons réformer la politique agricole, pour garantir les nouveaux emplois du futur et une Europe durable. Nous avons besoin d’un budget plus important pour le financement futur. Je me demande ce que M. Brok veut dire lorsqu’il affirme au paragraphe 11 que l’Union ne peut fonctionner correctement que si tous ses États membres partagent des valeurs communes découlant d’une identité européenne. Dois-je interpréter cela comme une porte fermée à la Turquie?

Mon groupe, le groupe socialiste au Parlement européen, a déposé un amendement, le 29, que nous demandons à tous de soutenir. Nous sommes tout à fait d’accord sur le principe que la Turquie doit respecter les exigences que nous avions posées dès le début en ce qui concerne Chypre, les Kurdes et les droits de l’homme, ainsi d’ailleurs que les exigences qui s’appliquent à tout le monde. Toutefois, il faut que nous parlions clairement et que nous gardions ces différents programmes séparés.

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. PIERRE MOSCOVICI
Vice-président

 
  
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  Hannu Takkula (ALDE). - (FI) Monsieur le Président, je voudrais tout d’abord remercier le tandem Brok et Stubb pour ses rapports. Nous savons qu’ils sont tous deux très compétents et doués, mais je ne suis pas forcément d’accord avec la direction qu’ils souhaitent donner à l’Union européenne.

Il est vrai que les réformes sont nécessaires et il est vrai que l’élargissement s’est avéré à maints égards une manière excellente et efficace de faire avancer l’Union européenne. Toutefois, sur certains points, nous devons nous rappeler aussi les limites de l’élargissement. La politique de l’Union européenne ne peut consister à nous étendre sans cesse et à créer de nouvelles agences chaque fois que l’on rencontre des problèmes. Nous devons également pouvoir discuter de manière plus approfondie des futurs contours de l’Union européenne, de quelle sorte d’Union nous avons besoin et en quoi son travail doit réellement consister.

J’espère ainsi que la question des limites sera également prise en considération dans ce débat sur l’élargissement. Nous posons souvent des questions concernant les limites de la croissance dans nos discours programmes, mais maintenant que nous parlons de l’élargissement de l’Union européenne nous oublions qu’il y a aussi des limites à cet aspect de la croissance.

 
  
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  Bogdan Klich (PPE-DE). - (PL) Monsieur le Président, le plan qui vise à étendre l’Union européenne perd aujourd’hui les faveurs du public. Le récent élargissement était logique, car il représentait le dépassement définitif de la division artificielle de l’Europe à la suite de la Conférence de Yalta. La question qui se pose à présent est de savoir quel est l’intérêt des autres élargissements. Cette question remet en cause le but du grand projet qu’est l’Union européenne. Qu’est-ce que l’Europe commune et que devrait-elle être? S’agit-il seulement d’une communauté politique conçue pour garantir la stabilité des gouvernements démocratiques de ses membres, le respect des droits de l’homme et des libertés civiles, l’acceptation de l’État de droit et, in fine, la prospérité, grâce à une économie de marché efficace? Ou bien s’agit-il d’une communauté de valeurs, aux racines communes et à l’héritage culturel commun? Dans ce cas, quelles sont ces racines et quelle est la nature de cet héritage?

Les historiens de la culture soulignent le fait que l’identité européenne contemporaine est le produit de nombreuses traditions historiques. En chacun de nous, comme en chacune des nations européennes, il reste quelque chose de la tradition philosophique grecque et de la république romaine. Nous sommes les héritiers de l’humanisme de la Renaissance et du rationalisme des Lumières. Que nous l’admettions ou pas, nous avons aussi un héritage chrétien. Ne nous faisons pas d’illusions. Même si certains d’entre nous ne sont pas disposés à accepter cette tradition aujourd’hui, elle fait toujours partie de l’identité européenne contemporaine. Elle est présente, ne serait-ce que dans le principe fondamental de la dignité humaine, qui est la base de tout un paquet de lois fondamentales.

Comme le rapport de M. Brok affirme que «l’Union ne peut fonctionner correctement que si tous ses États membres partagent des valeurs communes découlant d’une identité européenne», il doit avoir à l’esprit une identité qui inclut notre héritage chrétien. Nous ne devons pas oublier de faire référence à cet héritage au moment de rédiger notre Constitution.

 
  
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  Józef Pinior (PSE). - (PL) Monsieur le Président, aujourd’hui, au moment où je prononce ces mots, nous commémorons le vingt-cinquième anniversaire de la loi martiale en Pologne, de la tentative de détruire le syndicat Solidarité et le mouvement de la société polonaise vers la liberté et la démocratie. Vingt-cinq ans plus tard, je parle dans un monde tout autre, devant le Parlement européen, dans une Europe qui repose sur les principes de la démocratie, de la paix, de l’État de droit et de la justice.

Cette référence personnelle à l’histoire montre clairement le bien que l’Union européenne représente pour tous les Européens. Aujourd’hui, nous faisons face au défi qui consiste à équilibrer l’élargissement futur avec la capacité d’absorption de l’Union européenne. D’une part, l’Union européenne ne peut tourner le dos aux pays qui visent à la rejoindre, elle ne peut s’isoler dans sa tour d’ivoire de richesse et de civilisation occidentale. D’autre part, elle ne peut permettre que les fondations sociales et juridiques de la Communauté se diluent ou disparaissent complètement.

L’Union européenne doit remplir ses obligations envers les pays qui aspirent à la rejoindre et prêter une attention particulière à la performance de ces pays en ce qui concerne la mise en œuvre de l’État de droit, l’indépendance de la justice et le respect des droits fondamentaux. Les institutions de l’Union européenne doivent donner une définition plus précise à une politique de voisinage plus forte. Dans cet esprit, nous devons créer une communauté entre l’Union européenne et la Mer Noire.

Les relations entre l’Union européenne et la Russie restent une question fondamentale et concernent à la fois le commerce et l’énergie, ainsi que, au premier chef, les questions des droits de l’homme, de l’État de droit et de la démocratie.

 
  
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  Henrik Lax (ALDE). - (SV) Monsieur le Président, la période de réflexion a clairement montré que le défi majeur consiste à présent à convaincre le peuple d’Europe qu’il peut participer à la prise de décision et influencer l’avenir de l’Union européenne. Il est important que la population européenne soit mise en position d’oser faire confiance à ses capacités d’influence et puisse ainsi apporter son soutien quand, à l’avenir, l’Union européenne voudra accueillir de nouveaux États membres, potentiellement nombreux.

Chaque Européen doit pouvoir avoir le sentiment qu’il est représenté au Parlement européen. Cela va sans dire pour beaucoup de personnes, mais pas pour tout le monde. En raison des systèmes électoraux nationaux et des règles en matière de répartition des sièges au Parlement européen, un vaste groupe d’Européens sera exclu du Parlement avec la poursuite du processus d’élargissement. Je veux parler des minorités linguistiques régionales et nationales qui comptent aujourd’hui environ cinquante millions de personnes, ce qui représente 10 % de la population de l’Union européenne. Lors de la dernière élection, nous avons perdu quatre minorités. Il est déplorable que des groupes si considérables soient systématiquement exclus de la prise de décision au sein de l’Union européenne. Si tel est le cas, il ne faut pas s’attendre à ce que ceux-ci soutiennent automatiquement la structure européenne à l’avenir. Il faut que nous prenions cette question au sérieux lors de la révision du traité de base de l’Union européenne. L’Union européenne ne doit pas fabriquer de citoyens de deuxième classe.

 
  
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  Camiel Eurlings (PPE-DE). - (NL) Monsieur le Président, je voudrais complimenter moi aussi très chaleureusement les deux rapporteurs, MM. Brok et Stubb, pour leur excellent travail. Comme beaucoup l’ont dit avant moi, l’élargissement est une des plus grandes réussites de l’Europe. À ceux qui croient qu’il s’agit d’une évidence, il suffit de rappeler l’intervention de M. Milinkievitch, hier devant notre Assemblée, lui qui a été emprisonné à plusieurs reprises. La dernière fois qu’il s’est présenté à nous, son fils était en prison, comme des centaines de personnes, simplement parce ce qu’il se bat pour la liberté. Les choses auraient pu être très différentes pour l’Europe orientale. Les réformes démocratiques de tous ces pays qui nous ont rejoints dans un très court laps de temps constituent un fait remarquable dont l’Europe devrait s’enorgueillir.

Toutefois, pour conserver le soutien en faveur de cet élargissement efficace, nous devons parvenir à un sain équilibre dans quelques domaines. On peut faire la comparaison avec une maison. Si nous voulons ajouter des chambres à coucher au premier et au deuxième étages, il faudra renforcer les fondations, et c’est pour cela qu’il est très important que le Parlement se prononce très clairement en faveur de l’introduction d’un nouveau traité avant la prochaine vague d’élargissement. Cela s’adresse plus à nous qu’aux nouveaux pays membres. Plutôt que de pratiquer l’auto-satisfaction, nous devrions faire maintenant ce qui doit être fait.

On a dit beaucoup de choses sur la capacité d’intégration. Il faut se réjouir effectivement de l’introduction de ce concept, même si celui-ci doit être à présent approfondi au niveau institutionnel, financier et au niveau du traité. Toutefois, comme la capacité d’intégration implique aussi le soutien du public, nous devons expliquer à celui-ci que l’élargissement est une bonne chose, nous pouvons adresser certaines demandes aux États qui sont candidats à l’adhésion et nous devons essayer de conserver le soutien de l’opinion publique européenne en faveur de ce processus, en entreprenant des réformes convaincantes.

Enfin, en ce qui concerne la Turquie, il fallait une pénalité claire, parce que les conditions doivent être respectées. En même temps, le Conseil a envoyé un nouveau signal clair, des moments d’évaluation ont été prévus, les règles pour la Turquie ont été intensifiées dans une certaine mesure; en même temps, on nous presse de prévoir des arrangements pour le bien des Chypriotes du Nord. Je voudrais répéter énergiquement que nous appuyons les réformateurs en Turquie. Nous espérons que des progrès auront lieu l’année prochaine en ce qui concerne Chypre et, surtout, que nous pourrons une fois de plus concentrer notre attention sur les réformes nécessaires en Turquie. J’insiste auprès des réformateurs pour qu’ils fassent à présent des progrès dans les domaines de la liberté d’expression et de culte, afin que le rapporteur puisse se montrer plus positif l’année prochaine que l’année passée.

 
  
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  Stavros Lambrinidis (PSE). - (EL) Monsieur le Président, je voudrais faire quatre remarques.

Premièrement, dire que l’élargissement et l’approfondissement sont antinomiques c’est créer un mythe - parce que c’est un mythe. En fait, depuis le début des années 1980, c’est cet élargissement qui nous a imposé un approfondissement: les Fonds structurels, l’Union économique et monétaire et une plus grande coopération pour lutter contre la criminalité organisée, l’immigration et pour la paix dans le monde. Nous devons donc poursuivre sur la même voie..

La deuxième remarque concerne naturellement les Balkans occidentaux. Je me réjouis que le processus de leur intégration ne soit pas contesté. Il n’a d’ailleurs pas lieu de l’être.

Troisièmement, la saga de la «capacité d’absorption» ou de la «capacité d’intégration», par laquelle nous entendons la capacité d’accueillir de nouveaux pays. C’est l’obligation de l’Europe. Son obligation. Tout comme les critères de Copenhague sont une obligation pour les autres pays. Nous ne sommes pas comme des journalistes ou des statisticiens qui relèvent l’existence ou non de cette capacité. Nous devons la créer, précisément afin de permettre un nouvel élargissement.

La quatrième remarque porte sur la Turquie. Quel dommage d’être le témoin du marchandage de ces derniers jours. Alors que la Commission parle de la nécessité d’une «conditionnalité stricte», à savoir des conditions préalables claires, dans le cas de la Turquie elle envoie un message contradictoire. Elle n’exerce pas directement de pression sur ce pays pour qu’il applique son obligation concernant le protocole, elle ne fait pas pression sur lui pour qu’il reconnaisse un des 25 États membres, Chypre. Elle marchande pour savoir si un, deux ou trois ports seront ouverts, ignorant complètement la racine du problème, à savoir une occupation militaire qui enfreint toutes les valeurs européennes dont nous pensons par ailleurs qu’elles devraient être renforcées dans le but de l’élargissement.

J’insiste intensément pour que la Commission fasse porter ses effort sur l’essentiel, avec un calendrier et des exigences concernant la Turquie, pour le bien de la Turquie elle-même et des démocrates de ce pays.

 
  
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  Arūnas Degutis (ALDE). - (LT) Les expansions, les plus récentes et celles qui les ont précédées, ont renforcé l’Union, favorisé sa croissance économique et accru son importance dans le monde. C’est pourquoi nous devons maintenir notre engagement à étendre encore l’Union européenne, car il s’agit d’une occasion historique et d’une responsabilité de créer une Europe unifiée et florissante.

Néanmoins, l’expansion doit avoir lieu en même temps que l’approfondissement de l’Union européenne, avec la nécessaire adaptation de ses institutions qui lui permettra de continuer à fonctionner avec ses nouveaux membres. À partir de cette année, les structures de l’Union européenne s’appliquent aux 27 États membres. Pour que l’Europe puisse s’étendre et fonctionner efficacement, nous devons accomplir quelques tâches urgentes:

1. Nous devons renforcer le soutien du public en faveur de l’expansion. Pour cela nous devons expliquer dans le détail les avantages de l’expansion européenne, ses bénéfices, ses bienfaits économiques et ses responsabilités historiques;

2. Nous devons réviser le plan financier, y compris le système financier, pour l’adapter aux nouvelles exigences d’une Union étendue;

3. Nous devons entreprendre les nécessaires améliorations et modifications institutionnelles.

Ainsi, le plus important est que les pays qui se partageront la présidence de l’Union européenne jusqu’en 2008 prennent l’initiative de faire du consensus constitutionnel une réalité.

Enfin, je voudrais dire en ce qui concerne l’avenir qu’il est essentiel de revitaliser la politique de voisinage de l’Europe, qui permettra aux pays qui y prennent part non seulement de mettre en œuvre les réformes plus rapidement et de resserrer les liens avec l’Union européenne, mais, s’ils le souhaitent, d’aspirer en fin de compte à devenir membre.

 
  
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  Zsolt László Becsey (PPE-DE). - (HU) Au nom de mon collègue Schmitt, président de la délégation à la commission parlementaire mixte UE-Croatie, et en mon nom propre, je félicite MM. Brock et Stubb pour leur excellent et réaliste rapport.

Nous sommes contents, nous les Hongrois, que ces rapports renforcent le principe de Copenhague, en vertu duquel chaque État qui souhaite adhérer doit avancer dans les négociations selon ses propres mérites. Dès lors, dans le cas de la Croatie, actuellement engagée dans des négociations, nous pouvons déclarer avec confiance que nous l’accueillerons lors de la prochaine vague d’élargissement, sur la base des critères de Copenhague. En fait, l’arrivée de la Croatie est essentielle pour l’achèvement de la cinquième vague d’élargissement de l’Union européenne, celle de la région de l’Europe centrale. La Croatie est liée à cette vague à travers la Slovénie, l’Autriche et la Hongrie, par son niveau de développement, par sa culture juridique et institutionnelle et par son héritage millénaire.

À un autre niveau, la Croatie peut servir de bon exemple pour les États qui souhaitent se joindre à l’élargissement de l’Union européenne dans les Balkans occidentaux. Heureusement, l’admission de la Croatie, étant donné sa taille et son développement, ne présente pas de problèmes en ce qui concerne le marché intérieur ou le budget. Pour ce qui est des conditions institutionnelles de l’adhésion, elles peuvent être remplies en amendant le traité de Nice, ce qui, en l’absence d’une Constitution, devra être réglé finalement pour les besoins de l’adhésion.

En même temps, le principe des mérites spécifiques et de l’élargissement ultérieur doit vraiment être examiné plus sérieusement, désormais, dans les Balkans occidentaux et à l’intérieur de l’Union. Tel est le cas en ce qui concerne la Serbie, voisine de la Croatie, qui nourrit de grands espoirs et où la province septentrionale de Vojvodine pourrait servir de passerelle, compte tenu précisément de ses racines occidentales. Elle pourrait continuer à jouer ce rôle de passerelle, si la Serbie s’efforçait de préserver la région plutôt que de continuer à supprimer la culture traditionnelle de populations européennes indigènes. Si cette pratique devait se poursuivre, alors plutôt qu’une Union européenne reposant sur nos propres valeurs culturelles, nous aurions une Union byzantine.

 
  
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  Marie-Line Reynaud (PSE). - Monsieur le Président, je tiens tout d’abord à remercier M. Stubb pour son travail sur ce sujet très délicat. Son rapport a le mérite d’aborder la problématique de la capacité d’intégration sous différents angles. Je me réjouis ainsi que le texte ne se limite pas à évoquer les aspects institutionnels de cette question, mais mette également l’accent sur d’autres réformes majeures, sans lesquelles l’Union ne pourrait pas accueillir de nouveaux membres. Je pense en particulier à la révision du système de financement de l’Union.

Je suis également reconnaissante au rapporteur d’avoir réussi à garantir la neutralité de ce rapport vis-à-vis des pays candidats et à éviter l’écueil qui aurait consisté à exprimer, à cette occasion, une position sur l’entrée de tel ou tel État.

Enfin, ce rapport insiste, à juste titre, sur le rôle accru qui devrait être accordé au Parlement, non seulement dans le cadre des processus d’adhésion, mais également, dans le cadre de futures réformes institutionnelles.

J’aurais toutefois une critique à formuler: il me semble, en effet, que le rapporteur, voulant peut-être trop bien faire, a quelque peu détourné le rapport de son objet initial en en faisant davantage un rapport sur l’ensemble des réformes nécessaires au sein de l’Union européenne que sur la question, plus spécifique, de la capacité d’intégration. Il aurait été préférable, à mon sens, plutôt que d’énumérer une longue liste de réformes institutionnelles, de se concentrer sur les seules réformes qui constituent de réels préalables à tout nouvel élargissement.

 
  
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  Olle Schmidt (ALDE). - (SV) Monsieur le Président, Monsieur le commissaire, le processus d’élargissement de l’Union européenne a été une grande réussite, puisque le nombre des États membres est passé de six à vingt-sept. Nous avons vu une nouvelle Europe prendre forme. Commencer à douter maintenant et parler de «fatigue» en ce qui concerne la poursuite de l’élargissement reviendrait à accomplir un pas dans la mauvaise direction. Évidemment, il faut respecter les critères qui se rapportent à la démocratie, aux droits de l’homme et à un État de droit qui fonctionne correctement. Nous avons vu également le bouleversement de la vieille Europe centrale et orientale. Il est exact que l’Union européenne a besoin de nouvelles formes de prise de décision, mais elle ne doit pas imposer de nouvelles conditions pour ces pays qui essaient de la rejoindre. Monsieur le commissaire, je trouve que les forces au sein de l’Union européenne qui tentent de faire obstacle à une future adhésion de la Turquie sont plutôt inquiétantes. Notre vision de l’avenir doit être celle d’une Europe complète, laquelle doit inclure la Turquie.

 
  
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  Bernd Posselt (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, contrairement à un des orateurs précédents, je considère l’élargissement comme un instrument non pas de politique extérieure mais plutôt de politique intérieure; c’est pour cette raison que le processus qui consiste à élargir l’Union européenne ne doit pas faire éclater les limites de l’Europe avec l’adhésion d’un grand pays comme la Turquie, qui n’est que partiellement ou pas du tout européen. Si cela devait se produire, l’Union européenne deviendrait une structure eurasiatique, comme le Conseil de l’Europe, avec un marché intérieur en plus; perspective qui ne peut séduire celui qui aspire à une Europe vraiment efficace, apte à remplacer nos États nations dans l’exercice des fonctions essentielles, le genre d’Europe que souhaitent les fédéralistes convaincus, dont je fais avec d’autres partie.

Par ailleurs, nous ne pouvons bloquer l’entrée à des pays qui sont très clairement européens. Je récuse donc les tentatives qui visent à interpréter le rapport Brok - même si certains points prêtent certainement à interprétation - de manière à faire apparaître l’adoption du traité constitutionnel comme une exigence indispensable pour l’adhésion d’un pays d’Europe centrale comme la Croatie. Dans leurs récentes résolution, le parti populaire européen, la CDU et la CSU ont déclaré explicitement que la Croatie constitue une exception en termes de processus d’élargissement en raison de sa taille, de sa position en Europe centrale et de sa préparation, et qu’elle aurait dû en fait arriver en même temps que la Hongrie et la Slovénie. Ce pays pourrait être décrit comme un vestige - de facto plutôt que de jure - du processus d’élargissement que nous sommes en train de réaliser. C’est pour cette raison que je résisterai à toutes les tentatives d’interprétation qui feraient de la Croatie - ainsi que M. Horáček l’a fort bien dit - l’otage du processus constitutionnel. Oui, bien sûr, nous devons faire progresser le processus constitutionnel dans l’actuelle décennie; oui, bien sûr, nous avons besoin du traité constitutionnel pour pouvoir faire d’autres pas de géant lors de la prochaine décennie, en accueillant dans l’Union européenne des États comme ceux de l’Europe du sud-est entre la Croatie et la Grèce, dont la nature européenne ne fait pas de doute, en premier lieu la Macédoine, qui possède déjà le statut de pays candidat. Des pays comme ceux-là ont droit au statut d’État membre à part entière et nous défendrons ce droit.

(Le Président retire la parole à l’orateur)

 
  
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  Helmut Kuhne (PSE). - (DE) Monsieur le Président, je voudrais dire quelques mots concernant la communication. Je m’oppose moi aussi à l’idée de l’élargissement comme instrument de politique étrangère, mais pour d’autres raisons que M. Posselt. Je pense en effet que nous avons des problèmes. Vous pouvez constater par vous-même que des brigades entières de stratèges mondiaux bien-pensants, chargés d’instruments de politique étrangère, se précipitent à travers l’Europe et au-delà en proclamant: «Vous craignez une guerre civile? Rejoignez l’Europe!» Et vous comprenez clairement pourquoi de si nombreux ressortissants de l’Union européenne disent: «Non merci, je ne suis pas un instrument. Je ne suis pas là pour résoudre les problèmes de politique étrangère. Ce n’est pas pour cela que je me considère citoyen de l’Union européenne; si c’est cela l’Union européenne, je préfère ne rien avoir à faire avec elle».

La deuxième chose que je voudrais dire au sujet de la communication, c’est qu’elle pose la question de la relation réelle entre l’affirmation constante que nous devons remplir les obligations que nous avons contractées et notre volonté d’adopter une conduite rigoureuse envers les pays candidats à la fois au cours des négociations et dans leur préparation, afin d’amener ces pays à prendre des engagements et à s’y tenir, alors que, dans ce débat - et je félicite M. Posselt - on ouvre toutes les portes possibles dans l’espoir que le candidat favori de l’un ou de l’autre parti adhère à l’Union européenne avant l’adoption de la Constitution. L’homme et la femme de la rue sont bien conscients du message qui est adressé, il n’y a donc pas de raison de parler de fatigue de l’élargissement en utilisant un ton accusatoire.

Ceux qui pensent que les seuls problèmes ont trait aux faits feraient mieux d’étudier sérieusement ces problèmes de communication.

 
  
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  Alojz Peterle (PPE-DE). - (SL) Je me réjouis de ces deux rapports qui sont l’expression claire de la volonté politique du Parlement européen, qui renforce la crédibilité de l’Union européenne. Je les vois comme une expression de notre responsabilité vis-à-vis de l’avenir de l’Union européenne et aussi comme une expression de notre responsabilité commune envers le progrès mondial.

Je ne ferai pas de commentaires spécifiques sur les deux rapports, mais je voudrais reproduire leur philosophie. Il m’apparaît un peu paradoxal de parler, d’une part, de crise dans l’Union européenne tout en étant littéralement confronté, d’autre part, en cette période de Noël, au fait qu’un grand nombre de pays, en Europe et même au-delà, souhaitent rejoindre la famille européenne. Nous ne pouvons pas répondre qu’il n’y a pas assez de chaises autour de la table européenne ou que nous éprouvons des problèmes à rédiger un règlement d’ordre intérieur.

Je suis particulièrement heureux de constater que le rapport de M. Brok précise clairement que d’étroites relations multilatérales ne signifient pas une alternative à une adhésion à part entière. En outre, je soutiens la position claire vis-à-vis des pays d’Europe du sud-est. Je voudrais qu’ils soient tous inclus nommément dans le prochain rapport, car aucun d’entre eux ne mérite de figurer sur une liste de pays laissés pour compte (je pense que c’est important pour nous).

Il conviendrait également d’appliquer le principe suivant à la Croatie et à tous les pays qui suivent les pas de la Croatie dans le processus dit de Thessalonique: dès qu’un pays candidat est prêt, l’Union européenne doit l’être aussi. L’ambition européenne doit être récompensée.

 
  
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  Genowefa Grabowska (PSE). - (PL) Monsieur le Président, je féliciterai tout d’abord les deux rapporteurs. Maintenant, pour passer au vif du sujet, je voudrais attirer votre attention sur la question suivante. L’Union européenne a montré qu’elle était un projet très attirant et, pendant de nombreuses années, elle a attiré vers elle de nouveaux pays. Aussi, je pense que le débat d’aujourd’hui sur la question de savoir si l’Union européenne doit encore s’étendre est un débat académique, puisque le traité de Maastricht y fournit la réponse. L’article 49 du Traité prévoit clairement que tout pays européen qui respecte les critères politiques et économiques peut adhérer à l’Union européenne. Ces critères ont été rédigés à Copenhague en 1993 et nous ne devons pas les rendre plus stricts aujourd’hui.

Le débat d’aujourd’hui a pour but de répondre à la question fondamentale de savoir si nous pouvons modifier les critères en vue d’élargissements ultérieurs en fonction des besoins et des attentes actuelles. Je ne pense pas que nous le puissions. Je pense que nous sommes tenus de respecter notre parole, les accords et le vieux principe romain «pacta servanda sunt». Voilà pourquoi la capacité dite d’absorption ne peut servir tout à coup de critère pour bloquer l’accès de l’Union européenne à des pays qui ont rempli les critères de Copenhague.

Tous les élargissements successifs ont renforcé l’Union et ont favorisé sa croissance. Ces élargissements ont toutefois dû être planifiés avec soin. Je pense que seule une Constitution européenne permettra de garantir la bonne planification des élargissements à venir.

 
  
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  Tunne Kelam (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, je suis d’accord avec Mme Lehtomäki sur le fait que l’élargissement doit continuer à être un processus ouvert, car, malgré de nombreux avertissements et craintes, tous les élargissements précédents se sont avérés être un grand succès pour l’UE dans son ensemble. Cela a été, et continuera d’être, un processus bénéfique pour toutes les parties impliquées.

M. Stubb a bien fait de nous rappeler que chaque nouvel élargissement a forcé l’UE, de manière très positive, à approfondir sa capacité de réaction interne par de nouvelles réformes. Le message aujourd’hui est que la base de Nice n’est plus suffisante pour un nouveau cycle d’élargissement. Il n’y a pas d’autre solution que l’adoption du traité constitutionnel et sa mise en pratique.

Cependant, la capacité d’intégration ne doit pas être considérée comme un critère supplémentaire pour les nouveaux candidats. Elle doit être vue comme un engagement interne à faire un maximum d’efforts pour atteindre la nouvelle qualité nécessaire de notre cohésion. L’UE ne doit pas envoyer le mauvais signal que nos portes seront fermées aux nouveaux candidats. Chaque nation européenne a le droit de rejoindre l’UE et le droit d’être traitée non pas comme un invité, mais comme un membre potentiel et bienvenu de cette famille sans cesse croissante. Nous devons donc montrer une transparence maximum aux nations intéressées, y compris au pays de M. Milinkevitch.

Enfin, l’élargissement ne concerne pas seulement les budgets et les institutions. Il existe un important courant sous-jacent d’opinions, de craintes et de préjugés populaires. C’est la psychologie populaire dans laquelle le traité constitutionnel est tombé. Nous devons donc répondre ouvertement à ces besoins et à ces craintes en stimulant un débat franc et amical entre les vieux et les nouveaux États membres sur nos expériences culturelles différentes et historiques. Je sais par expérience que ces craintes et ces préjugés sont en fait très semblables, et que la plupart d’entre eux s’avèrent être non fondés. Il existe une grande réserve de soutien populaire au traité constitutionnel.

 
  
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  Ioannis Kasoulides (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, en fin de compte, il n’y a pas eu de collisions de trains! Le gouvernement de Chypre s’est mis d’accord avec ses partenaires sur un «ralentissement» du train turc. Ne soyons pas dupes. Nous ne sommes de toute façon pas supposés ouvrir la plupart des chapitres en suspens étant donné qu’il faudra plusieurs années pour rassembler les points de référence et clore un chapitre est une formalité - cela ne veut rien dire une fois que tout le reste du travail a été accompli.

Quant aux révisions, elles ont de toute façon lieu chaque année. Chypre a souvent été considérée à tort comme la cause de la collision des trains. Maintenant, elle est hors du chemin. L’Union européenne est libre de voir la réalité en face. La Turquie a ignoré et continue de déclarer qu’elle ignorera ses obligations envers son accord sur l’union douanière, une obligation qui existait bien avant le problème du soi-disant isolement des Chypriotes turcs.

Les véritables questions sont désormais devant nous: la liberté d’expression, la liberté des minorités religieuses, la situation des droits de l’homme au sud de la Turquie, le traitement des femmes, les problèmes de corruption, l’intervention des militaires dans les affaires gouvernementales et judiciaires. Il y a à peine deux jours, le général Buyukanit a reproché au gouvernement Erdogan de ne pas avoir eu sa permission pour ce qui s’est finalement avéré être une ouverture conditionnelle d’un port aux bateaux chypriotes.

Certains disent que nous ne devrions pas voir la Turquie comme elle est aujourd’hui. Pensez à ce que sera la Turquie dans 15 ans! La Turquie nous a donné une certaine idée de sa volonté de devenir une vraie démocratie européenne. Elle sait comment s’en tirer!

 
  
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  Ioannis Varvitsiotis (PPE-DE). - (EL) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je partage tout à fait les inquiétudes des nombreux citoyens européens qui souhaitent que les problèmes institutionnels soient réglés avant tout nouvel élargissement.

Cela n’a pas de sens pour nous de vouloir fonctionner de manière satisfaisante à 27 membres avec des règles qui s’appliquaient quand l’Union comptait 9, 10 ou 15 États. Malheureusement, le traité constitutionnel, qui contenait de nombreux éléments positifs, a été rejeté par deux nations. La question a été gelée depuis. Je me réjouis que la Chancelière Merckel ait exprimé son intention de faire des propositions concernant la procédure et le calendrier prévu pour résoudre le problème.

Cependant, je pense qu’à ce stade nous devons viser à régler un nombre limité de questions, importantes pour le bon fonctionnement de l’Union. Ainsi en va-t-il de la création de la fonction de ministre des affaires étrangères et de président de l’Union, de la réduction du nombre de commissaires, de l’accroissement des responsabilités du Parlement européen. On pourrait aussi évoquer une réduction maximale du principe d’unanimité dans la prise de décision au Conseil, la personnalité juridique de l’Union européenne, l’abolition du système de trois piliers et le renforcement de la coopération renforcée entre les États membres et chaque fois que cela apparaît nécessaire au fonctionnement efficace.

Je me demande toutefois combien d’États membres, anciens et nouveaux, parviendront à dépasser leurs chicaneries internes et se fixeront pour objectif souverain le fonctionnement régulier et efficace de l’Europe des 27 États membres. En tout cas, pour conclure, je pense que si nous ne rendons pas l’Europe opérationnelle, cela ne sert à rien de débattre d’un nouvel élargissement.

 
  
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  Tadeusz Zwiefka (PPE-DE). - (PL) Monsieur le Président, tous ceux qui ont la chance d’être citoyen de l’Union européenne commettraient un péché mortel, s’ils se proposaient de dénier cette occasion à ceux qui veulent la saisir. Il est ridicule de vouloir limiter l’élargissement. C’est comme imposer des limites à la liberté ou à la démocratie.

La discussion d’aujourd’hui a montré que nous abordons la capacité et les effets de l’élargissement en grande partie sous l’angle de la situation intérieure de l’Union européenne. Nous parlons de la nécessité de réformes d’une grande portée, à juste titre puisque nous ne pouvons nous permettre d’être faibles, si nous voulons réussir. Les réformes sont nécessaires, mais elles doivent suivre un diagnostic de la situation et un programme dûment réfléchi s’agissant des améliorations à apporter.

Je pense qu’il serait bon de restructurer à l’interne le travail de la Commission européenne. Si nous disposons aujourd’hui de vingt-sept commissaires qui décident du champ d’application de leurs portefeuilles, alors il serait peut-être sensé de désigner deux ou trois commissaires chargés d’analyser la situation dans l’Union européenne et de préparer le programme de réforme, afin de pouvoir procéder à un nouvel élargissement.

Néanmoins, nous ne pouvons pas considérer cette capacité uniquement à travers une perspective interne. Nous devons rappeler ce que les ressortissants des pays qui aspirent à nous rejoindre pensent de l’Union européenne et de l’éventuelle adhésion à l’Union européenne. Mon expérience personnelle de travail au sein de délégations avec des pays du Caucase du sud, ainsi qu’avec la Moldavie et l’Ukraine, m’a appris que l’homme de la rue dans ces pays ne pense pas que son pays obtiendra l’adhésion immédiatement, mais il veut être sûr que la porte n’a pas été claquée. Il est prêt à attendre vingt ou même trente ans pour pouvoir nous rejoindre. Il s’agit d’une porte que nous ne pouvons pas lui fermer.

La politique de l’Union européenne en matière d’information devrait avoir pour but d’expliquer clairement ce qu’est l’Union européenne, quels sont ses objectifs et ce que cela signifie d’être membre de l’Union européenne. Nous ne devons pas perdre cela de vue.

 
  
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  Charles Tannock (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, les vagues successives et sans heurts de l’élargissement de l’UE sont une formidable réussite de l’UE. La cinquième vague, qui a élargi l’UE à 25 États membres il y a deux ans, a en fait été un véritable succès, malgré les avertissements qui prédisaient une paralysie de l’Union sans une constitution et qui prévoyaient que des pays comme le mien seraient victimes de flux d’immigration ingérables, y compris de la population rom.

Malheureusement, le rapport Brok cherche encore à faire le lien entre de futurs élargissements et la nécessité absolue d’adopter une Constitution européenne, alors que les conservateurs britanniques, que je représente, soutiennent que ce n’est pas le cas et que ce dont nous avons réellement besoin, ce sont des ajustements du Traité, par l’intermédiaire d’un traité de Nice modifié, afin de traduire la nouvelle répartition des votes au Conseil, le nombre de députés et de commissaires européens, après l’adhésion prévue de la Croatie dans quelques années, qui devrait se faire relativement sans douleur.

Je pense personnellement que nous devons également désormais nous pencher sérieusement sur cette lourde Commission. Je pense cependant que nous ne devrions pas faire une rotation des commissaires de façon absolument égale entre tous les États membres, mais que l’on doit trouver une formule mathématique qui préserverait, au moins par une présence semi-permanente, les commissaires des grands États membres - mais je sais que cela est sujet à controverse.

Les nouveaux États membres sont, en général, plutôt atlantistes: ils croient en des marchés plus libres et des taux compétitifs de faible taxation, une approche que j’accueille favorablement. Je pense que l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie le 1er janvier 2007 sera également une grande réussite.

En tant que rapporteur, je pense que la politique européenne de voisinage doit être divisée en une dimension EuroMed méridionale par l’intermédiaire du processus de Barcelone et un nouveau concept oriental de communauté UE-mer Noire de libre marché amélioré et d’octroi de visas facilité pour renforcer davantage nos liens avec des pays européens comme l’Ukraine, la Moldova et les trois républiques caucasiennes. J’invite les États membres à informer la Moldova et l’Ukraine qu’elles ont le droit, sur le long terme, comme, selon moi, tous les pays des Balkans occidentaux, de devenir des candidats potentiels pour l’adhésion à l’UE.

 
  
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  Andreas Mölzer (NI). - (DE) Monsieur le Président, comme nous le savons, la vision d’une Europe unie et en paix est née sur les ruines de la Deuxième guerre mondiale et n’a cessé d’évoluer depuis. De la même manière qu’une expansion tête baissée d’un conglomérat peut soumettre son personnel à une contrainte intolérable, l’Union européenne et ses peuples se trouvent en désaccord et je ne pense pas qu’il sera possible de recoudre la déchirure grâce à des campagnes de relations publiques. Ce qui compte le plus, c’est de résoudre les problèmes existants, comme l’emploi, la mondialisation, le terrorisme, la criminalité et les réfugiés. Je crois aussi que les inquiétudes concernant la capacité d’intégration de l’Union européenne ne sont rien de plus qu’un nouveau sédatif chargé de faire diversion dans le cadre des fantaisies d’élargissement en cours.

Jusqu’à présent, nous avons insisté uniquement sur le respect des critères de Copenhague par les candidats, alors qu’on négligeait par ailleurs la question de savoir si l’Union européenne était elle-même en mesure de remplir les objectifs de cohésion et d’intégration. Pour combattre le sentiment d’avoir affaire à quelque chose d’incompréhensible et d’illimité, nous devons non seulement nous imposer des limites géographiques, mais savoir aussi clairement quel degré de différences sociales et culturelles l’Union européenne peut intégrer. Mon avis est que nous avons déjà dépassé nettement notre capacité d’accueil, en raison de la politique d’immigration débridée de ces dernières années.

 
  
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  Paula Lehtomäki, présidente en exercice du Conseil. - (FI) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, tout d’abord je voudrais remercier tout le monde pour ce débat varié, d’une grande portée et constructif. Bien qu’il semble y avoir certains points de désaccord, il est possible de discerner une très forte cohérence du Parlement. Il est très clair que, pour que l’élargissement réussisse, nous devons garantir que l’Union se développe au niveau interne et qu’elle reste capable de fonctionner dans toutes les situations. Il s’agit d’un élément essentiel de la capacité d’intégration et, comme cela a été dit dans ce débat, l’Union européenne doit faire son devoir. En ce qui concerne les processus d’élargissement et les négociations en cours, nous devrions rappeler que le devoir n’a pas été fait non plus en ce qui concerne les derniers processus.

Lundi, le Conseil est parvenu à un consensus politique concernant l’objectif de développement économique dans le Nord de Chypre, ceci dès que possible et même plus tôt que ça, étant donné les décisions prises en avril 2004. L’autre aspect de l’élargissement et l’autre partie responsable, ce sont bien sûr les pays candidats et ceux qui sont intéressés par l’adhésion à l’Union européenne. Ceux-ci doivent respecter les critères d’adhésion de l’Union. Il faut juger avec beaucoup d’objectivité et, le cas échéant, de critique aussi, dans quelle mesure ils y parviennent. Nous faisons confiance, bien sûr, à la Commission, qui a beaucoup de mérite, à sa volonté et à sa capacité d’effectuer cette évaluation. Il s’agit certainement d’une bonne façon de procéder pour accroître les perspectives d’adhésion sur base des progrès réalisés, sans que des dates convenues à l’avance ne définissent le moment de la finalisation de l’adhésion.

On a beaucoup parlé du traité constitutionnel et de son avenir au cours de ce débat. Nous pensons tous que la Constitution contient de nombreux éléments susceptibles d’améliorer la capacité d’intégration de l’Union. Nous devons néanmoins garder à l’esprit que le traité constitutionnel ou réforme de l’Union, n’est pas indispensable à l’élargissement; il est cependant nécessaire pour améliorer la situation actuelle de l’Union et sa capacité à fonctionner.

Il importe également de rappeler que nous ne pouvons pas faire reposer la capacité de fonctionnement de l’Union uniquement sur le traité constitutionnel. Après tout, les Traités ne sont que des outils de mise en œuvre des politiques de l’Union européenne. Sans la volonté politique et sans l’engagement vis-à-vis du projet européen commun, même les meilleurs traités ne permettront pas d’obtenir les résultats désirés. En d’autres termes, nous avons surtout besoin d’un engagement sur un processus commun et de la volonté de l’accepter. Si la volonté est au rendez-vous, alors la réforme des Traités est certainement possible.

La politique de voisinage est dans une certaine mesure liée à l’élargissement de l’Union, mais il s’agit aussi en soi d’un aspect important de notre politique, qui ne peut donc être vu comme un substitut à l’élargissement. Il est évident que les pays intéressés par l’adhésion à l’Union européenne n’accepteront pas une simple politique de voisinage pour compenser ou remplacer la perspective de l’adhésion à l’Union européenne.

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, nous débattrons du Conseil européen de cette semaine et de son programme plus tard cet après-midi et je suis sûre qu’à cette occasion nous reviendrons sur les sujets que nous avons déjà abordés ce matin.

 
  
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  Olli Rehn, membre de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, je vous remercie pour ce débat très riche et responsable si important pour l’avenir de l’Europe. C’est un débat très encourageant. Vous vous souviendrez peut-être que dans mon introduction, j’ai dit qu’en Europe, nous avons deux discours qui, bien souvent, ne se rejoignent pas: l’un soulignant l’importance stratégique de l’élargissement et l’autre ne se concentrant que sur notre capacité d’intégration.

Ce débat est encourageant parce que, si vous avez été capables de construire une position commune en partant de ces premiers projets jumeaux - qui ne sont pas vraiment des jumeaux identiques en termes de stratégie d’élargissement -, alors le Conseil européen devrait sans aucun doute être capable d’arriver à un consensus renouvelé sur l’élargissement qui respecte tant la valeur stratégique de l’élargissement que notre capacité d’intégrer de nouveaux membres.

Nous avons entendu des commentaires concernant la politique européenne de voisinage. Le rapport de la Commission du 8 novembre souligne en effet que tous les pays européens ne sont pas engagés dans le processus d’élargissement. En fait, l’Union européenne a noué différentes relations avec d’autres pays européens. Nous avons une structure complète d’accords bilatéraux avec la Suisse; nous avons l’Espace économique européen, qui est un accord d’intégration économique de grande portée; et nous avons la politique européenne de voisinage.

En ce qui concerne la politique européenne de voisinage, la Commission considère que notre récente communication sur le renforcement de la politique européenne de voisinage répond en grande partie aux attentes du Parlement. La PEV est distincte et parallèle au processus d’élargissement européen. Dans le même temps, la politique européenne de voisinage ne préjuge pas du développement futur des relations de ces pays avec Union européenne, conformément aux dispositions de notre Traité.

Il a été suggéré que le critère culturel soit ajouté aux critères de Copenhague. Je peux vous dire que la Commission n’est pas en faveur de cette proposition.

Je conclurai en faisant référence à certaines réflexions du sociologue et philosophe Ulrich Beck parues ans l’édition du Monde d’hier. Il a interprété la récente visite du pape en Turquie. Nous avons là un sociologue respecté interprétant les actes d’un dirigeant spirituel respecté.

Mesdames et Messieurs, ce sont de sages paroles qui méritent que l’on y réfléchisse pendant la période de Noël et l’année prochaine.

(Applaudissements)

 
  
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  Le Président. - Merci, Monsieur le Commissaire, pour cette conclusion en français. Pour le reste, chacun jugera du contenu du propos que je trouve pour ma part intéressant.

Le débat est clos.

Le vote aura lieu aujourd’hui, à midi.

(La séance, suspendue à 11h55 dans l’attente de l’Heure des votes, est reprise à 12h05)

Déclaration écrite (article 142)

 
  
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  Gábor Harangozó (PSE). - (EN) Suite à la réaffirmation de l’engagement pris s’agissant de la mise en œuvre complète du programme de Thessalonique et de l’intention d’honorer les engagements qui ont été contractés envers les pays candidats et les candidats potentiels en ce qui concerne les élargissements futurs, il nous faut encore garantir que l’Union sera capable de fonctionner.

En intégrant de nouveaux États membres, l’Union doit faire face aux défis politiques, financiers et institutionnels que cela implique. Le traité de Nice ne fournit pas une base appropriée à de nouveaux élargissements, alors que la Constitution offre des solutions à la plupart des réformes nécessaires et constitue une expression tangible de la relation d’approfondissement/élargissement. C’est pourquoi il est nécessaire de régler la question constitutionnelle avant les élections européennes de 2009. Les réformes sont nécessaires avant tout nouvel élargissement. Le processus d’élargissement est un processus qui répand la démocratie et la richesse sur le continent européen et au-delà. Nous avons donc une responsabilité envers notre voisinage et en particulier envers les pays candidats et potentiellement candidats. Enfin, tout en traitant la question de la «capacité d’absorption» de l’Union, nous partageons le point de vue du rapporteur qui préfère le concept positif de «capacité d’intégration».

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. BORRELL FONTELLES
Président

 
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