Le Président. - L’ordre du jour appelle les suites de la déclaration de Berlin.
Permettez-moi quelques mots à ce propos. Le 17 janvier, la présidente du Conseil européen - que je suis très heureux d’accueillir parmi nous aujourd’hui - a présenté son programme à cette Assemblée.
Le 13 février, vous étiez présente, Madame la Chancelière fédérale, lorsque j’ai exposé mon programme. Aujourd’hui, vous nous présentez votre compte rendu sur la déclaration de Berlin du 25 mars, et je peux ainsi vous dire ma joie de vous retrouver pour la troisième fois déjà au sein de cette Assemblée - alors que votre présidence n’en est pas encore à la moitié de son mandat. Permettez-moi, au nom de tous les membres de cette Assemblée, de vous adresser mes plus sincères et mes plus chaleureux remerciements à cet égard.
(Applaudissements)
Les présidents de groupe vont à présent exprimer leur avis circonstancié sur la déclaration de Berlin et, bien que je ne souhaite naturellement pas les devancer, je voudrais toutefois dire une chose: lors de la préparation de la déclaration, Madame la Chancelière, vous et votre équipe vous êtes tenus à l’entière disposition du président de ce Parlement et de ses représentants désignés afin de prendre en considération nos idées autant que vous le permettait la présidence de 27 gouvernements.
J’ai moi-même respecté à la lettre la résolution de la Conférence des présidents - résolution dont je me suis efforcé de donner des interprétations détaillées - et j’ai constamment tenu informés et consulté les membres compétents de la commission des affaires constitutionnelles ainsi que le Bureau et la Conférence des présidents.
Nous passons à présent au débat et je tiens à souhaiter chaleureusement la bienvenue non seulement à la présidente du Conseil européen, Mme Merkel, mais également à M. Barroso, le président de la Commission.
(Applaudissements)
Angela Merkel, présidente en exercice du Conseil. - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Président de la Commission, Mesdames et Messieurs les députés au Parlement européen, Mesdames et Messieurs, je suis heureuse de pouvoir vous rendre à nouveau visite, cette fois-ci à Bruxelles. Nous sommes à peu près à la moitié de la présidence allemande et je ne pense pas me tromper en disant que, ce week-end, nous avons franchi une étape importante dans l’accomplissement de deux tâches majeures qui nous incombent à tous au cours de ces six mois.
La première de ces tâches concerne la politique énergétique et climatique, dont vous a déjà parlé le ministre des affaires étrangères allemand, M. Steinmeier. Je souhaiterais seulement indiquer une fois de plus à ce stade que, sur cette question cruciale, le Conseil est parvenu à formuler des conclusions importantes sur la base des propositions de la Commission, démontrant ainsi que l’Union européenne était capable d’agir dans ce domaine. Cela est vital, car nous savons bien évidemment que l’Europe ne pourra prendre la tête dans ce domaine que si elle parvient à se fixer des objectifs ambitieux. Nous sommes naturellement conscients que la réalisation concrète de ces objectifs nécessitera des efforts supplémentaires, mais quoi de plus naturel finalement dans les affaires politiques courantes: on accomplit un premier pas, à la suite de quoi, s’il se révèle fructueux, d’autres actions sont mises en œuvre. Cependant, l’esprit dans lequel nous avons décidé ensemble d’améliorer de 20% l’efficacité énergétique d’ici 2020 et d’atteindre l’objectif contraignant d’une augmentation de la part des énergies renouvelables atteignant 20% de la consommation totale devrait nous permettre de présenter tous deux un front uni dans les négociations internationales futures et de répartir ces pourcentages en objectifs individuels attribués aux États membres - et il s’agit là de notre prochaine tâche. Je profiterai donc de l’occasion qui m’est ici offerte de solliciter le soutien de votre Parlement. Nous avons déjà bénéficié d’un appui considérable sur ce point et, avec vos encouragements, je suis certaine que le Conseil sera en mesure de formuler les conclusions souhaitées.
(Applaudissements et protestations)
Venons-en à présent au deuxième pas essentiel accompli le week-end dernier. D’une part, la déclaration de Berlin a illustré le succès de l’Union européenne et, d’autre part, elle a mis l’accent sur les tâches importantes qu’il nous reste à mener à bien.
Je voudrais avant tout remercier très chaleureusement le président de votre Parlement, M. Poettering, et tous les présidents des groupes parlementaires, car l’adoption de la déclaration de Berlin par le Parlement, la Commission et les membres du Conseil relève de l’exploit. Je pense que la déclaration de Berlin en tant qu’entreprise commune possède une valeur intrinsèque, car elle démontre que toutes les personnes concernées par l’Europe se sont engagées à œuvrer ensemble à l’avenir de celle-ci. Nous constatons, à sa lecture, qu’elle accorde une place importante à la définition de nos valeurs communes. La déclaration énonce également en termes très ambitieux que nous partageons un idéal de société européenne et que nous travaillerons main dans la main à sa concrétisation. Cet idéal est ancré dans des valeurs que nous chérissons - les valeurs de liberté, de solidarité et de justice. Chaque jour, on nous demande, encore et encore, ce que nous comptons faire pour promouvoir ces valeurs. C’est pourquoi je suis vraiment très touchée par l’introduction de cette séance parlementaire aujourd’hui, au cours de laquelle cette Assemblée et ses membres ont exprimé en termes forts la situation rencontrée au Zimbabwe. Dans le discours que j’ai prononcé dimanche à Berlin, j’ai souligné qu’il importe de ne pas nous laisser aller à l’indifférence face au malheur qui frappe la population du Darfour.
(Applaudissements)
Nous ne pouvons pas tout bonnement détourner le regard. Nous devons faire quelque chose, et, tandis que la présidence du Conseil fera tout ce qui est en son pouvoir pour faire accepter au Conseil de sécurité des Nations unies des résolutions plus fermes afin de faire progresser les choses sur le long terme, nous devons - si cela s’avère impossible au niveau du Conseil de sécurité - envisager l’adoption éventuelle de sanctions par l’Union européenne, car nous devons agir, nous devons faire quelque chose.
(Applaudissements)
J’ai également indiqué clairement dimanche passé que le 25 mars était, comme nous en avions bien conscience, la fête de l’indépendance du Belarus et que tous, je pense, nous souhaitions assurer à nos amis du Belarus qu’eux aussi étaient en droit de profiter des avantages liés à la concrétisation des idéaux européens et que nous les soutiendrions de tout cœur dans cette voie.
(Applaudissements)
Je voudrais également saisir l’occasion qui m’est donnée cet après-midi en cette Assemblée de signaler que l’Union européenne informera très clairement l’Iran que l’arrestation et la détention de quinze marins britanniques est totalement inacceptable. Sur ce point également, nos amis britanniques peuvent compter sur notre solidarité absolue.
(Applaudissements)
Ceci démontre également que notre unité fait notre force. Bien des choses ne sont possibles que si nous les accomplissons ensemble. Cela signifie par ailleurs que, pour que les États membres de l’Union européenne se sentent davantage mutuellement responsables dans les moments difficiles, nous devons travailler de concert dans le plus grand nombre possible de domaines. L’intégration, le soutien en temps de crise et la solidarité ne sont possibles que si chaque pays est relativement disposé à veiller aux intérêts des autres États. Ce principe devrait sous-tendre toutes les décisions politiques délicates qui nous attendent.
Dans la déclaration de Berlin, nos regards sont tournés vers l’avenir et nous mentionnons notre volonté d’accomplir deux choses. Premièrement, nous voulons définir une «nouvelle base commune» pour l’Union européenne d’ici 2009 et, bien que je sois consciente qu’une vaste majorité au sein de ce Parlement soutient cette initiative - et je vous remercie pour votre appui -, je souhaiterais souligner une fois de plus que l’organisation d’une élection au Parlement européen en 2009 pour laquelle nous ne pourrions signaler aux citoyens que nous sommes en mesure d’élargir l’Union européenne, leur révéler le nombre de membres que comptera la prochaine Commission, leur garantir que la responsabilité de la politique énergétique incombe à l’Europe et qu’en matière de sécurité intérieure et de politique juridique, nous travaillons ensemble sur la base de décisions à la majorité, en fonction des circonstances,…
(Applaudissements)
… pareille élection aurait pour seule conséquence de creuser encore davantage le fossé qui sépare les institutions des citoyens européens. C’est pourquoi il est capital que nous démontrions tous notre capacité à trouver des solutions communes. Les Allemands ont reçu pour mission de présenter une feuille de route à ce sujet. Je voudrais préciser dès à présent que nous ne résoudrons pas le problème, mais que cette feuille de route doit indiquer la direction à prendre. Nous consacrerons toute notre énergie à ce projet, mais je voudrais également demander à ce Parlement de continuer à nous soutenir tout au long du processus, car je peux vous garantir que nous aurons besoin de toute l’aide que nous pourrons recevoir.
(Applaudissements)
Maintenant que nous avons défini les futures tâches de l’Union européenne dans la déclaration de Berlin, il y a un certain nombre de choses qui doivent être accomplies d’ici au Conseil de juin. Je souhaiterais faire quelques remarques à ce sujet, mais je tiens avant tout à vous dire ma joie face aux succès d’ores et déjà engrangés, et ce grâce à l’attitude de tous les États membres, qui se sont montrés particulièrement disposés à faire des concessions. Il est bon - tout particulièrement dans l’intérêt des citoyens - que ce Parlement puisse à présent débattre des tarifs de l’itinérance, que les transferts de capitaux entre pays européens soient simplifiés, que, grâce à votre aide, des fonds aient pu être débloqués pour l’agriculture et que nous ayons avancé dans l’accord dit «Open skies» destiné à améliorer le trafic aérien entre l’Europe et l’Amérique. C’est sur ce type d’avancées concrètes que nous sommes jugés et c’est la raison pour laquelle je suis si heureuse que nous ayons pu progresser dans ces domaines. J’espère que nous réaliserons d’autres progrès concrets avant la fin de notre présidence.
Nous devons à présent préparer trois sommets importants. Le premier aura lieu le 30 avril: il s’agit du sommet UE - États-Unis, dans le cadre duquel nous voulons approfondir le partenariat économique transatlantique. Les progrès réalisés en termes de trafic aérien sont de bon augure à cet égard, mais nous sommes naturellement bien conscients de la possibilité qui existe d’établir une collaboration bien plus étroite entre l’Europe et les États-Unis. Je voudrais adresser mes remerciements les plus sincères à la Commission, ainsi qu’aux députés de votre Assemblée qui travaillent dans ce sens. La question du partenariat économique transatlantique a été relancée et nous sommes absolument convaincus que nous pourrons rétrospectivement considérer ce sommet qui se tiendra fin avril comme un sommet au cours duquel nous aurons progressé de manière réellement concrète.
Deuxièmement, nul besoin de dire que la question de l’énergie et du changement climatique figurera à l’ordre du jour de ce sommet. Comme nous le savons, l’Union européenne a des idées très ambitieuses à ce sujet et nous militerons pour qu’elles soient soutenues et mondialement acceptées. Je suis on ne peut plus certaine que les économies émergentes et les pays en développement ne se joindront à nous que si les pays industrialisés fixent ensemble des objectifs ambitieux; c’est la raison pour laquelle nous ferons campagne pour que ces objectifs soient soutenus. J’ai volontairement choisi l’expression «faire campagne» parce que, comme vous le savez tous, il s’agit là d’un travail de titan. À ce stade, nous ne pouvons pas vous faire trop de promesses.
Nous profiterons également du sommet UE - États-Unis pour préparer partiellement le sommet du G8 prévu en juin dans la ville allemande de Heiligendamm - bien que ce thème n’ait aucun lien avec le sommet UE - États-Unis. Nous - j’entends par là la présidence allemande du G8 - avons organisé les choses de telle sorte que, début mai, se tiendra une réunion des «sherpas», c’est-à-dire réunissant non seulement les États membres, mais également les cinq pays «d’influence» que sont la Chine, l’Inde, le Brésil, le Mexique et l’Afrique du Sud, au cours de laquelle seront abordés les aspects technologiques du changement climatique, tout particulièrement dans l’optique d’un partage des nouvelles technologies et des innovations, et à la suite de laquelle seront menés des travaux préparatoires plus spécifiques sur le changement climatique et l’énergie en vue du sommet du G8.
En mai également se tiendra un sommet entre l’Union européenne et la Russie. Outre le partenariat transatlantique, le partenariat stratégique avec la Russie revêt un intérêt absolument crucial pour nous. J’espère que nous parviendrons à surmonter les obstacles qui continuent d’empêcher la Commission de négocier avec la Russie - et je remercie la Commission pour les efforts exceptionnels qu’elle déploie et la ténacité incroyable dont elle fait preuve pour atteindre ce but -, car il est bien évidemment essentiel d’engager des négociations sur un nouvel accord de partenariat, en particulier sur les questions de la sécurité et du partenariat énergétiques, questions qui expliquent l’extrême importance du sommet UE-Russie - prévu dans la ville russe de Samara.
Un autre sommet aura lieu ensuite, impliquant cette fois-ci l’Union européenne et le Japon, au cours duquel sera traitée en priorité la question de l’amélioration de notre coopération économique. En effet, les citoyens européens nous jugeront en grande partie, nous tous qui représentons l’Europe, en fonction de notre aptitude à protéger pour les prochaines décennies ce qui fait la force de l’Europe - une communauté de valeurs, une communauté de personnes jouissant de la protection de leur dignité individuelle, une communauté source de prospérité et de cohésion sociale.
Dans le discours que j’ai prononcé à Berlin, j’ai déclaré que nous avions la responsabilité de présenter l’Europe, ainsi que nos idéaux, au monde entier et de gagner les autres à notre cause. Nous n’y parviendrons pas si nous attendons passivement la suite des événements, si nous nous isolons ou si nous nous concentrons exclusivement sur nos problèmes. Nous devons impérativement promouvoir activement l’adhésion à nos propres valeurs et idées. L’Europe ne peut atteindre ce but que si elle est capable d’agir, si elle ne se préoccupe pas constamment d’elle-même et si elle ne se met pas des bâtons dans les roues. Il est par conséquent essentiel de rendre aussi rapidement que possible à l’Union européenne sa capacité d’action, afin que l’Europe puisse permettre à ses citoyens d’envisager un avenir sûr et libre - chose qu’ils sont en droit d’espérer. C’est cet objectif qui nous unit. Je vous remercie de votre attention.
(Applaudissements prolongés)
Le Président. - Merci beaucoup pour votre compte rendu, Madame la Chancelière fédérale, Madame la Présidente du Conseil européen. Ces applaudissements sont la preuve que le Parlement européen est particulièrement sensible à votre engagement sincère en faveur de l’Europe.
José Manuel Barroso, président de la Commission. - (EN) Monsieur le Président, permettez-moi en premier lieu d’exprimer ma satisfaction vis-à-vis des déclarations liminaires du Parlement européen sur le Zimbabwe et le Darfour et de dire que je les soutiens pleinement. Les violations des droits de l’homme perpétrées dans ces régions sont inacceptables. Au nom de la Commission, je les condamne fermement et invite les autorités des pays concernés à respecter les droits humains de leurs citoyens.
(Applaudissements)
Le week-end dernier, l’Europe du passé et l’Europe du futur se sont rencontrées à Berlin. Comme l’indique la déclaration, nous avons célébré cinquante ans de réussites en Europe: la paix, la liberté et la solidarité ainsi que la prospérité au-delà des rêves du plus optimiste des pères fondateurs de l’Europe. Par une merveilleuse coïncidence historique, nous avons célébré notre unité à Berlin, la ville qui a symbolisé une Europe divisée et constitue aujourd’hui l’un des emblèmes de cette nouvelle Europe élargie et unie de 27 membres et de près de 500 millions de citoyens. La cérémonie organisée à Berlin a été très édifiante pour l’Europe. C’est au nom de bon nombre des personnes présentes à cette occasion que j’affirme avoir senti régner un esprit européen sur notre assemblée.
La déclaration de Berlin s’est avérée digne de l’occasion; elle a scellé l’engagement renouvelé des institutions européennes et des États membres en faveur des valeurs européennes et des objectifs européens pour le XXIe siècle. J’ai beaucoup apprécié que la déclaration, une proposition avancée par la Commission en mai 2006, ait occupé la place centrale qui lui revenait lors de ces célébrations.
Je tiens à féliciter Mme Merkel et la présidence allemande pour leur contribution capitale à ce succès européen remarquable. Madame la Chancelière, j’imagine que votre engagement personnel, votre histoire personnelle et votre perception de l’importance que revêt la liberté pour votre pays et pour l’Europe ont joué un rôle décisif dans l’instauration de ce climat parmi toute l’assemblée des responsables politiques réunis à Berlin.
(Applaudissements)
J’ai également éprouvé beaucoup de fierté lors de la signature de la déclaration par les trois institutions européennes. La présence du Parlement européen est un indicateur de la maturité démocratique de notre Union, qui mérite d’être souligné. Je me dois également de rendre hommage au rôle particulièrement précieux qu’a joué le président Poettering au nom du Parlement dans le cadre des préparatifs à la déclaration de Berlin.
Je souhaiterais aujourd’hui attirer l’attention de ce Parlement sur deux points. Je commencerai par le succès que représente la stratégie à deux volets. Considérés ensemble, les deux Conseils européens de mars représentaient cette double stratégie en action. Le Conseil de printemps a entériné l’engagement à produire des résultats dans le domaine de l’énergie et de la lutte contre le changement climatique. La déclaration de Berlin a mis en évidence l’engagement à dégager un accord institutionnel avant les élections européennes de 2009. Cela démontre qu’il n’y a pas lieu de voir de conflit entre une approche pragmatique et une vision politique. Au contraire, cet engagement en faveur d’une stratégie à deux volets est juste. D’une part, il produira des résultats et redonnera l’élan politique nécessaire au règlement du problème institutionnel. D’autre part, pour obtenir des résultats encore meilleurs, nous avons véritablement besoin d’institutions plus efficaces, plus démocratiques et plus cohérentes. Une Europe de résultats est le fruit d’une vision politique fondée sur une approche pragmatique constructive et visant à répondre aux inquiétudes de nos concitoyens et à proposer des solutions européennes aux problèmes européens.
Nous avons en outre besoin d’un accord par traité, étant donné les grands défis mondiaux qui attendent l’Europe dans les années à venir. C’est dans l’unité, et uniquement dans l’unité, que l’Union européenne pourra relever plus efficacement les défis de la mondialisation. Il est évident que même les plus grands États membres ne peuvent résoudre seuls les problèmes du changement climatique, de la sécurité énergétique ou des migrations massives, pas plus qu’ils ne peuvent faire face seuls au caractère compétitif accru de cette économie mondialisée. Nous devons nous battre ensemble dans un authentique esprit de solidarité. Selon moi, c’est là le message qui nous est parvenu de Berlin et ce message se traduit à présent sous la forme d’un engagement identique en vue de la résolution de la question institutionnelle avant les élections de 2009.
(Applaudissements)
Ce n’est pas l’unique raison pour laquelle la Commission encourage vivement un règlement institutionnel à la fois rapide et ambitieux. L’échec du processus de ratification du Traité constitutionnel laisse indéniablement planer un doute constant sur l’Union européenne. Même l’obtention de résultats notables tels que ceux du Conseil de printemps ne parvient pas à effacer ce doute, ce négativisme, ce pessimisme, ce scepticisme. Nous sommes toujours confrontés à cette question, que posent les plus sceptiques et qui mérite une réponse: «Comment nous convaincrez-vous de votre véritable détermination à relever ces défis mondiaux alors que vous n’êtes même pas capables de régler des problèmes concernant vos propres règles et les institutions dans lesquelles vous travaillez?» Comment voulez-vous garantir la crédibilité des institutions et des dirigeants européens alors que ces institutions et ces dirigeants ne sont pas capables de se mettre d’accord sur ces points?
Je pense donc que nous devons progresser dans ces domaines. L’absence d’accord institutionnel entraînera des divisions qui risquent de mettre en péril nos valeurs communes. Nous devrions tirer les leçons de l’histoire européenne, qui nous apprend que les grandes victoires remportées en faveur de la paix, de la démocratie, de la liberté et de la solidarité ne sont jamais acquises. Nul ne devrait les considérer comme tel. Nous devons réaliser des progrès constants en matière de politique et de valeurs. Si nous voulons préserver et protéger ces valeurs communes - celles que nous avons citées dans notre déclaration, c’est-à-dire la dignité inviolable de la personne, la liberté, la justice et la solidarité, toutes ces valeurs qui font de nous non seulement un marché, mais encore une communauté politique et une union -, nous devons réformer les institutions de notre communauté de droit.
La préservation de nos valeurs communes est une tâche qui ne laisse aucun répit. Je l’appelle l’«aventure européenne sans fin». Nous n’obtiendrons une meilleure Europe que si nous disposons de meilleures institutions produisant de meilleurs résultats. Je pense qu’il existe une volonté politique; nous devons à présent progresser dans ce domaine également.
Lors du sommet informel qui s’est tenu dans la foulée de notre célébration, j’ai demandé aux États membres d’entretenir dans les prochains mois l’élan qui avait été acquis précédemment. J’ai sollicité la collaboration active des gouvernements nationaux. Tous les États membres ont signé le Traité, qui n’a pu être ratifié à cause du résultat négatif de deux référendums. Cependant, l’engagement qui a été pris contraint tous les États membres à travailler de manière constructive à la recherche d’une solution commune. En tant que président de la Commission européenne, il est de mon devoir d’encourager les gouvernements nationaux à consentir un effort particulier dans les mois à venir et à soutenir les efforts intenses déployés par la présidence allemande afin de trouver une solution.
(Applaudissements)
Rappelez-vous le message que j’ai transmis aux chefs d’État ou de gouvernement européens et à Berlin. Dans l’intérêt de l’avenir de l’Union européenne, nous devons comprendre que, lorsque nous parlons d’Europe, il n’est pas uniquement question des institutions européennes, de la Commission européenne ou du Parlement réuni à Bruxelles ou à Strasbourg. J’ai souligné, lors de la cérémonie - à laquelle certains d’entre vous ont assisté -, que l’Union européenne n’est pas une puissance étrangère envahissant nos pays, mais qu’elle représente notre projet commun. L’Europe, ce n’est pas «eux»; c’est «nous». J’ai mis en garde les chefs d’État ou de gouvernement contre la tentation, pourtant malhonnête, à laquelle pourraient succomber les politiques nationaux de s’attribuer tous les mérites et de rejeter toute la faute sur Bruxelles. Résistons à cette tentation.
(Applaudissements)
C’est l’éthique de la responsabilité européenne que nous devons tous partager.
Berlin a laissé dans son sillage un engagement politique visant à sortir de l’impasse institutionnelle. La Commission collaborera pleinement avec la présidence allemande, qui travaillera conjointement avec les autres États membres à l’élaboration d’une feuille de route claire et détaillée et, si possible, à la définition d’un mandat précis d’ici juin. N’oublions pas, ainsi que je l’ai mentionné lors de la cérémonie organisée le week-end dernier, que ce genre de test historique ne se présente qu’une seule fois par génération de responsables politiques.
Je conclurai avec l’appel que j’ai lancé à Berlin. Puisons de la fierté dans notre passé et envisageons l’avenir avec confiance. Tous ensemble - la Commission européenne, le Parlement européen, les États membres et les citoyens européens -, assurons le passage de l’héritage fabuleux que nous ont transmis nos pères fondateurs, le passage de ces valeurs exceptionnelles, dans le XXIe siècle.
(Applaudissements)
Le Président. - Merci beaucoup pour votre allocution, Monsieur le Président de la Commission. Je tiens également à vous remercier pour votre coopération constructive concernant la déclaration de Berlin - en définitive, c’est à vous que nous devons l’idée d’une déclaration signée conjointement par les trois institutions. Encore une fois, merci beaucoup, Monsieur Barroso.
Joseph Daul, au nom du groupe PPE-DE. - Monsieur le Président, Madame la Présidente du Conseil, Monsieur le Président de la Commission, chers collègues, nous venons de commémorer les cinquante ans du traité de Rome. Cinquante ans, ce sont deux générations. C’est bien peu au regard de l’histoire, mais c’est déjà un âge avancé aux yeux des jeunes.
On a beaucoup dit, ces derniers jours, que pour les nouvelles générations, les bienfaits de l’intégration européenne les plus fréquemment cités - paix, stabilité, relative prospérité, modèle social - ne sont plus parlants car ils sont leur lot quotidien. À cela, je répondrai deux choses. D’abord que les jeunes doivent avoir conscience de leur chance que de telles réalités soient devenues des évidences. Ensuite qu’il faut relativiser cette vision des choses car l’instabilité du monde actuel - les attentats du 11 septembre à New York, du 11 mars à Madrid, ou encore du 7 juin à Londres, pour ne citer que ces tragédies - montre à chacun de nous, tous âges confondus, que vivre en paix, en sécurité, et avec certains moyens n’est pas le lot de tous sur cette terre, même dans nos propres pays. J’ai aussi une pensée très émue pour nos quinze soldats britanniques qui sont prisonniers.
La paix et la sécurité, cela se travaille chaque jour. Le débat que nous tiendrons demain matin avec M. Solana en sera une nouvelle illustration.
Si à quelques jours de mon soixantième anniversaire, je tentais de me mettre dans la peau d’un jeune Européen, voici peut-être les quelques avantages que je verrais à l’aventure européenne. L’apprentissage facilité de langues étrangères, la possibilité de participer à des échanges scolaires, des stages, des tournois sportifs, des événements culturels, en traversant des frontières virtuelles et en utilisant une monnaie commune, ce n’est pas rien. Vivre dans un village ou une ville jumelée avec une autre, bénéficier de programmes parrainés par l’Union européenne, tirer avantage de façon directe ou indirecte de la croissance économique générée par l’union de nos pays, ce n’est pas négligeable. Être ressortissant d’États qui offrent un front plus uni face à nos partenaires et concurrents dans le monde, d’États qui sont les premiers donateurs d’aide humanitaire, qui veillent au déroulement démocratique des élections dans le monde, ou encore qui envoient des forces de paix dans un grand nombre de zones de conflits, tout cela n’est pas neutre.
Je veux citer ici la mission civile de gestion de crise qu’entreprendra l’Union européenne au Kosovo après la mise en place du futur statut de la province indépendantiste de Serbie. Il s’agira là d’une opération sans précédent pour nos pays.
Oui, chers collègues, tout cela est positif, satisfaisant et honorant, pour les jeunes aussi, et je dirais surtout. Certes, l’Europe n’est pas une panacée et ne résout pas tous nos problèmes, loin de là, et d’ailleurs personne ne l’a jamais prétendu. Mais l’Union peut, mieux que nos États séparément, contribuer à résoudre les difficultés, à affronter les nouveaux défis, à réorienter les priorités.
Que nous le voulions ou non, la mondialisation est la réalité dans laquelle nous sommes plongés. On en dénonce très souvent les aspects négatifs, parfois à raison, parfois à tort. Mais la mondialisation comporte aussi des avantages indubitables: facilité de communication, démultiplication de l’information, ouverture aux autres cultures, pour n’en citer que quelques-uns.
Dans cette mondialisation, l’Europe a un rôle à jouer, des valeurs à défendre, un modèle de société à promouvoir. L’Europe n’est pas condamnée à se taire, à tout accepter sans rien dire ou à passer sous un rouleau compresseur. Si nous le voulons, nous pouvons influer sur le cours de l’histoire, comme nous l’avons fait les cinquante dernières années.
Madame la Présidente du Conseil, je ne laisserai pas passer cette occasion de vous féliciter et surtout de vous remercier, tout d’abord parce qu’en vous rendant au Parlement européen à trois reprises en trois mois, vous témoignez de la considération que vous portez au travail des députés européens. Vous établissez ainsi un modèle que vos successeurs, j’en suis sûr, sauront honorer. Ensuite, parce qu’en organisant, avec le succès que l’on sait, une grande fête européenne à Berlin le 25 mars, à l’occasion des cinquante ans du traité, vous avez prouvé que l’Europe, ce n’est pas seulement des discours et des lois, ce peut être aussi l’émotion, la joie et la convivialité. Et enfin, parce que la déclaration de Berlin, adoptée par les institutions européennes, est un texte lisible et fort, un texte qui remet l’Europe en selle et qui nous dote d’une nouvelle perspective avec la proposition de trouver une solution à la question institutionnelle d’ici aux prochaines élections de 2009.
Madame la Présidente, votre action publique déterminée, combinée à votre modestie personnelle et à votre sens du contact humain, fait honneur à l’Europe et la fait avancer. Vous avez organisé, sous votre Présidence, deux conseils européens. Chacun d’entre eux a été un succès et tous s’accordent à le reconnaître. L’Europe a montré la voie sur la question déterminante de l’énergie et du climat, l’Europe a décidé de se doter des outils institutionnels pour affronter les grands défis et faire entendre sa voix, c’est ainsi que l’Europe doit fonctionner et agir, c’est ainsi que nos concitoyens, et en particulier les jeunes générations, s’approprieront ce projet, qui est plus moderne que jamais.
(Applaudissements)
Martin Schulz, au nom du groupe PSE. - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, bien que le terme «historique» ait perdu de son poids en raison de l’usage immodéré qui en a été fait, nous ne devrions pas hésiter à l’utiliser lorsque nous rencontrons des situations réellement historiques, telles que celle qui se présente à nous aujourd’hui. Quant à tous ceux qui critiquent la déclaration de Berlin, je voudrais juste leur poser cette question: que se passerait-il, selon vous, si cette déclaration n’existait pas?
Ainsi, je tiens à vous féliciter, Madame la Présidente en exercice du Conseil, pour le travail extraordinaire que vous avez accompli. Vous avez longtemps refusé de dévoiler vos cartes - d’un point de vue tactique, vous avez agi intelligemment - et, lors de la déclaration de Berlin, vous avez fait ce qu’il convenait de faire à ce stade. Vous avez abattu la bonne carte et l’Europe a gagné. Cependant, la phase historique commence maintenant, car la question qui se pose aujourd’hui est la suivante: quelle est la suite des événements?
Il ne fait absolument aucun doute - et je trouve cela regrettable à titre personnel - que le Traité constitutionnel n’entrera pas en vigueur sous sa forme actuelle. C’est une chose que nous devons accepter. Cette Constitution n’existera pas. Ce qui ne signifie pas qu’il n’y aura pas de Constitution, même si le Traité ne porte pas le nom de «Constitution». Nous, Allemands, vivons depuis soixante ans avec une Constitution appelée «Loi fondamentale», qui fait une Constitution exceptionnelle.
Nous sommes arrivés à un point où nous devons répondre à la question de savoir ce qu’il adviendra de notre continent à l’avenir. C’est là une question cruciale. Certains veulent une autre Europe, rejettent la révision des Traités, convaincus que, de toute façon, Nice était de trop et qu’en dépit de ce Traité, l’Europe s’élargit - quoi qu’il arrive et quel que soit le prix à payer. Au nom de mon groupe, et, me semble-t-il, au nom de l’écrasante majorité de cette Assemblée, je dirais à ces personnes: «Au contraire, l’intégration européenne n’est pas terminée. Elle doit se poursuivre et nous voulons qu’elle se poursuive.»
(Applaudissements)
Nous voulons que ce processus se poursuive parce que c’est nécessaire, et nous devons faire comprendre à tous les partisans de l’élargissement de l’Union européenne qu’il n’y aura pas d’élargissement sans une réforme de l’Union ni sans une révision des Traités. Je voudrais dire à MM. Kaczyński et Klaus qu’ils causeront beaucoup de tort à la Croatie s’ils s’opposent à la réforme de l’Union européenne.
(Applaudissements)
Je leur demande instamment de ne pas faire payer aux autres le prix de leurs politiques.
En quoi notre présente action est-elle historique? Je voudrais que les défenseurs de l’intégration européenne soient aussi enthousiastes que vous, Madame la Présidente en exercice du Conseil. Je voudrais qu’ils fassent autant de bruit que les opposants à ce processus. Un peu plus d’entrain au combat serait aujourd’hui bien utile, car, si l’Europe se sent grande, en réalité, elle est petite.
Les vingt-sept États membres comptent un total de 500 millions d’habitants, soit 8% de la population mondiale, et ce pourcentage tend à diminuer. Pour ce qui est de la Chine et de l’Inde, voilà à présent de grands pays. De leur côté, les États-Unis sont devenus une super-puissance grâce à leur pouvoir économique et militaire. Si le processus d’intégration européenne échoue, entraînant l’apparition d’une Europe à plusieurs vitesses, si l’Europe - qui est déjà suffisamment petite - s’affaiblit en se morcelant en ses diverses composantes, elle ne réussira pas. C’est la raison pour laquelle nous avons besoin de chacun des vingt-sept États membres ainsi que de l’intégration en Europe, parce que c’est là qu’est notre avenir.
(Applaudissements)
Si l’Europe échoue, ce sera la mort, non seulement d’un Traité constitutionnel, mais également d’un idéal. Et de quel idéal parlons-nous? Ne soyons pas avares de mots pour décrire ce que recèle notre passé, les obstacles qu’ont permis de surmonter cinquante ans d’intégration: la haine et l’intolérance, la course au statut de grande puissance et la marginalisation des minorités, l’intolérance religieuse et la persécution des personnes aux convictions politiques différentes.
L’intégration territoriale nous a permis de mettre un frein aux ambitions des pays qui rêvaient d’accéder au statut de grande puissance. Grâce aux progrès économiques alliés à la sécurité sociale, l’exclusion sociale fait aujourd’hui partie du passé, tandis que le concept d’intégration a mis un terme à l’intolérance ethnique, religieuse et culturelle. Malgré cela, les traits que j’ai évoqués sont toujours présents: la haine, l’exclusion, l’oppression et même les tentatives de domination ont refait surface dans notre Union, et ce dans toute l’Europe, pas seulement en Europe orientale.
Ces phénomènes reviendraient en force dans notre Union si le processus d’intégration échouait. C’est pourquoi nous lançons un appel aux armes à ceux qui - emmenés par notre présidente du Conseil, Mme Merkel - encouragent la poursuite du processus et l’approfondissement de l’Union, à ceux qui défendent les valeurs de l’Europe, les valeurs qui ont fait notre force et nous ont valu de devenir un modèle pour l’extérieur. En effet, nous ne pouvons accepter que la Commission dise aux pays avec lesquels elle négocie: «Si vous voulez entrer dans l’UE, vous devrez passer par un processus de transformation, un processus qui rendra caduc tout ce qui vous régissait jusqu’à présent, tandis que nous qui vous imposons cette exigence, nous ne sommes pas capables de mener ce type de réforme.» Comment pourrions-nous être crédibles dans un tel cas?
(Vifs applaudissements)
Nous vivons actuellement un moment historique. Soyez assurée, Madame la Présidente en exercice du Conseil - je dois avouer qu’en tant que social-démocrate allemand, il m’est difficile de m’exprimer de la sorte -, qu’en Allemagne, les socialistes vous soutiendront tout au long de cette voie.
(Applaudissements)
Le Président. - Merci beaucoup, Monsieur Schulz. Le président n’a pas été tout à fait correct. Je vous prie, à l’avenir, de ne plus prendre constamment exemple sur la durée d’un discours - mais plutôt sur la qualité. L’objectivité du président ne lui permet pas d’aller plus loin.
Graham Watson, au nom du groupe ALDE. - (EN) Madame la Chancelière, je vous félicite pour votre travail - le texte et le consensus.
Votre célébration du succès de l’Union était à la fois opportune et appropriée. C’est en grande partie à l’Union européenne que nous devons la sécurité, la prospérité et les perspectives dont jouissent nos concitoyens.
Alors que nous étions assis dans l’enceinte du musée de l’histoire allemande situé à Berlin dimanche matin, deux choses m’ont frappé, tout d’abord l’idée que vous avez eue d’engager l’Orchestre de la Jeunesse européenne pour l’occasion - il est absolument extraordinaire et mérite un meilleur soutien financier - et ensuite, le fait que, sur les 31 personnes réunies - chefs d’État ou de gouvernement, présidents des institutions, etc. -, vous étiez la seule femme. Cela m’a fait penser à une strophe du poète Robert Burns, qui a écrit ceci:
«Tandis que le regard de l’Europe se porte sur des choses prodigieuses,
Le destin des empires et la chute des rois;
Alors que les charlatans de l’État doivent tirer leur propre plan,
Et que même les enfants récitent en zézayant les droits de l’homme;
Au milieu de tout ce vaste brouhaha, permettez-moi de dire,
Que les droits de la femme méritent quelque attention.»
Madame la Chancelière, vous nous montrez l’exemple: nous avons besoin de davantage de femmes aux plus hauts postes politiques.
(Applaudissements)
En effet, dans les circonstances actuelles, il se peut que seule une femme eût été en mesure de garantir la conclusion d’un accord.
Je ne peux toutefois pas vous féliciter pour la méthode employée: un texte rédigé dans les catacombes de la Chancellerie fédérale et signé par les présidents des trois principales institutions ne devrait pas avoir l’audace de s’ouvrir sur ces mots: «nous, citoyennes et citoyens de l’Union européenne», car ce sont les citoyennes et citoyens de l’Union européenne que l’on doit s’attacher à réimpliquer dans le processus de construction de l’Europe. Le président Barroso a déclaré à juste titre que les institutions devaient respecter la diversité; il n’en demeure pas moins que les États membres doivent favoriser l’unité. Seul un petit nombre de capitales européennes ont organisé de grandes festivités telles que celles auxquelles nous avons eu droit à Berlin. Tant que tous vos collègues du Conseil européen ne se décideront pas à promouvoir activement et sans relâche l’Europe, il n’existera aucun fondement solide.
Et il est inutile que le parti populaire européen, votre parti, Madame la Chancelière, s’attribue tous les mérites de la construction de cette Union. Les auteurs de cette déclaration vaniteuse du PPE rendent hommage comme il se doit à Monnet, De Gasperi et Kohl, mais le moins que l’on puisse dire est qu’ils ont la mémoire sélective. Thatcher, Chirac et Berlusconi ont également dirigé le PPE, mais vous semblez avoir passé sous silence leur contribution. L’Union n’est pas le projet d’un seul parti politique. Elle appartient à chacun d’entre nous.
(Applaudissements)
Nous espérons, Madame la Chancelière, que la déclaration de Berlin annonce un nouveau départ. Nous attendons avec impatience la Conférence intergouvernementale que vous avez prévue afin de poser les pierres institutionnelles qui serviront à bâtir le futur de l’Union. Dans la nouvelle Europe, l’Europe imaginée par Berlin, l’Union aide ses citoyens à saisir les opportunités offertes par la mondialisation et se montre solidaire à leur égard en vue de relever les nouveaux défis mondiaux, la démocratie a le dessus et nos valeurs ont le dernier mot.
(Applaudissements)
Cristiana Muscardini, au nom du groupe UEN. - (IT) Monsieur le Président, Madame la Présidente en exercice du Conseil, Mesdames et Messieurs, le sommet de Berlin a été un grand moment d’émotion, en particulier pour ceux qui, comme moi, siègent à ce Parlement depuis 1989, année qui a marqué la renaissance de l’Europe. La déclaration reconnaît l’Europe en tant qu’Union d’États et non en tant que nouveau super-État, et la reconnaissance de l’identité des peuples de l’Union et de leurs différences au sein d’une association fondée sur des objectifs communs est la force qui nous permet de continuer à promouvoir l’union politique qu’il nous reste à mettre en œuvre.
Nous regrettons qu’il n’ait pas été possible de reconnaître pleinement nos racines: c’est précisément parce que nous croyons fermement dans la laïcité de nos institutions que nous sommes pareillement convaincus que la reconnaissance incomplète de nos racines engendre un appauvrissement de la politique. Dans notre société complexe, multiculturelle et multiethnique prônant diverses visions du concept de démocratie générateur de paix, qui est étroitement lié à la reconnaissance universelle du respect de la dignité humaine, il est nécessaire d’établir un dialogue interculturel, et la reconnaissance de l’Autre passe par la reconnaissance de soi, qu’il s’agisse du quotidien des personnes en tant qu’individus ou de celui des États.
Nous réaffirmons vigoureusement le danger lié à toute sorte de théocratie et, dans la même mesure, à une laïcisation extrême, qui sape lentement les valeurs fondamentales de la société aux yeux des citoyens et en politique. Nous sommes inquiets de la confusion trop souvent constatée entre le concept essentiel de laïcité des institutions et l’acceptation d’un relativisme culturel et politique qui débouche sur une laïcisation extrême.
Nous ne voulons pas d’une Europe se réduisant à un marché, ni de ces prétendues cultures qui incitent les citoyens à se réfugier dans une vie virtuelle remplaçant la vie réelle par peur ou par impuissance. Nous voulons une Europe politique capable d’insuffler le désir de démocratie dans les régions du monde où des millions de femmes et d’hommes souffrent encore d’un manque de liberté et de légalité.
L’Europe a un besoin urgent d’institutions flexibles et clairement définies, car c’est aujourd’hui que le terrorisme frappe à nos portes, et c’est également aujourd’hui que nous devons être en mesure de définir et de mener rapidement à bien nos missions - ainsi que nous l’avons souligné dans la Convention européenne - tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Europe, dans des domaines allant de l’approvisionnement énergétique à l’approvisionnement en eau, du changement climatique à la réaffirmation de la dignité humaine.
La date butoir fixée à 2009 nous paraît trop lointaine, mais à l’impossible nul n’est tenu, même si nous sommes tellement persuadés de l’implication sérieuse et sincère de la présidence allemande et de la grande capacité de médiation et de persuasion de la chancelière Merkel que nous espérons plus ou moins qu’il sera possible de réduire ce délai.
Monica Frassoni, au nom du groupe des Verts/ALE. - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, permettez-moi avant tout de signaler à MM. Watson et Daul, ainsi qu’aux autres, qu’il existe un moyen on ne peut plus simple d’augmenter la participation des femmes: il s’agit de la coprésidence. Nous avons opté pour cette solution avec succès au sein du groupe des Verts/ALE. Cette méthode fonctionne très bien, et nous vous la recommandons vivement.
Madame la Chancelière, la déclaration de Berlin est une grande source d’encouragement pour nous. La solennité, la rhétorique et les formalités conviennent à certaines occasions, et c’est assurément le cas pour le cinquantième anniversaire de la création de la Communauté européenne, tout particulièrement parce que, pour arriver là où nous en sommes aujourd’hui, de nombreuses personnes ont perdu la vie et que la lutte a été très dure et très longue.
Nous reconnaissons également le rôle que vous avez joué et nous vous en sommes reconnaissants - encore que, selon moi, cela fasse en quelque sorte partie de vos attributions - et nous constatons avec plaisir que dans ce cas-ci, contrairement aux fois précédentes - citons l’énergie, les voitures, etc. -, la présidence allemande a fait preuve d’un sens européen parfaitement à la hauteur de la situation.
Je pense que le message est passé et que l’opinion publique a compris que le cinquantenaire constituait un événement marquant positif et que nous devions poursuivre nos efforts. Bien entendu, la population européenne n’a pas prêté grande attention au texte de la déclaration ni à la quantité de travail qu’a nécessité la rédaction de ces deux petites pages, qui ne contiennent en réalité aucun élément particulièrement extraordinaire ou original. À mes yeux, c’est au contraire ce qui n’apparaît pas dans la déclaration qui démontre l’existence d’une profonde division entre les gouvernements - et j’insiste bien, entre les gouvernements - en ce qui concerne le futur de l’Europe, une division qui ne présage rien de bon pour le travail qui vous attend, Madame la Chancelière, dans les prochains mois.
Nous savons parfaitement que le rêve d’une Union européenne n’est pas encore réalisé, que nous ne pouvons pas encore intervenir en tant qu’Union européenne au Darfour à cause des divisions qui règnent en notre sein, que, malheureusement, la politique énergétique implique fondamentalement pour de nombreux gouvernements de s’incliner devant Poutine, que nous sommes incapables de définir une politique originale en matière de relations avec les États-Unis et que, pour toutes ces raisons, nous avons besoin d’une Union européenne forte, dotée d’une Constitution.
Madame la Chancelière, si notre objectif pour le reste de la présidence est de sortir de l’impasse actuelle, nous ne devons absolument pas nous bercer d’illusions: la méthode purement intergouvernementale ne fonctionnera pas, pas plus que celle de la déclaration de Berlin, puisque nous ne parviendrons pas, comme lors de la nuit au cours de laquelle s’est tenue la Conférence intergouvernementale de Nice, à dégager un accord susceptible, comme vous l’avez dit, de sauver la substance de la Constitution.
Par conséquent, nous vous supplions de faire preuve de courage et de mettre à l’épreuve la démocratie en autorisant l’ouverture de la Conférence intergouvernementale et en permettant au Parlement européen d’y participer par le biais de la procédure de codécision et par un système de «navette», d’information et de débat. Les citoyens européens veulent plus d’Europe, et non moins d’Europe, mais leurs gouvernements ne reflètent pas toujours cette volonté. Abandonnez donc l’idée que seule une Conférence intergouvernementale peut nous permettre d’obtenir des résultats, parce que cette méthode ne fonctionnera pas et que nous ne sauverons pas la substance de la Constitution. Nous rentrerons seulement bredouilles.
Gabriele Zimmer, au nom du groupe GUE/NGL. - (DE) Monsieur le Président, Madame la Chancelière, Mesdames et Messieurs, lorsque nous évoquons le rêve européen de nos jours, nous citons généralement l’Américain Jeremy Rifkin. Quoi qu’il en soit, les chefs d’État ou de gouvernement et leurs «sherpas» n’ont pas rêvé - et encore moins fait un rêve collectif.
La déclaration de Berlin n’est ni la description d’un rêve, ni le reflet de la réalité; elle représente au contraire un nouveau déni de la réalité, empêchant les chefs d’État ou de gouvernement d’identifier clairement la crise que traverse l’UE et, par conséquent, de proposer des pistes de résolution de cette crise. Il en résulte un accroissement continu du risque de désintégration et de renationalisation. Il n’y a pas de rejet d’une zone de libre-échange néolibérale aux conséquences sociales et environnementales désastreuses ou d’un renforcement de la militarisation de l’UE.
La déclaration ne fait pas la moindre référence à la situation dans laquelle vivent des millions de citoyens européens touchés par la pauvreté, par le chômage de longue durée, par la précarité et par l’exclusion sociale. Ces personnes ne sont pas mentionnées. Le message de la déclaration s’adresse uniquement aux gouvernements eux-mêmes et non aux citoyens des États membres. On ne peut donc pas dire qu’il contribue à créer un sentiment d’identité européenne. Certains commentateurs ont affirmé que cela créait un précédent dans le processus constitutionnel, point que certains ont déjà mentionné aujourd’hui sur le principe. Cela signifie que la future Constitution ou le futur Traité fondamental sera le produit d’opérations diplomatiques menées à huis clos, sans aucune implication de la société civile. Il s’agira alors seulement de faire pression sur les chefs d’État ou de gouvernement - et certains de mes collègues députés allemands menacent de quitter le Parlement si ces responsables refusent de céder à ces pressions. Voilà un argument qui me paraît à n’en pas douter extrêmement démocratique - je le pense vraiment.
Si les gouvernements de l’UE étaient vraiment prêts à tenir leurs promesses en ce qui concerne la création d’une nouvelle base commune viable pour l’Union d’ici aux élections de 2009, les mesures suivantes seraient nécessaires. Tous les passages encourageant la libéralisation économique, la privatisation et la militarisation devraient être supprimés du projet tout entier de Constitution européenne. Le débat sur l’Union européenne attendu par la plupart de ses résidents devrait être mis en place. La troisième partie de l’actuel projet de Constitution devrait être supprimée dans son intégralité. Les objectifs et exigences politiques détaillés devraient être remplacés par des règles claires sur les pouvoirs et les responsabilités de chacun et par des procédures autorisant la poursuite de différentes politiques. L’article 41, paragraphe 3, de la première partie devrait être remplacé par une interdiction claire des guerres d’agression et un engagement à respecter le droit international, tandis que l’Agence européenne de défense, déjà fonctionnelle en prévision du Traité constitutionnel de l’UE, devrait être fermée.
Jens-Peter Bonde, au nom du groupe IND/DEM. - (DA) Monsieur le Président, Madame la Chancelière, les festivités publiques dans les rues de Berlin étaient merveilleuses, mais leur mot d’ordre était un euronationalisme pompeux factice. Mme Merkel a prononcé un bon discours. Notre Président, M. Pöttering, a signé un document au nom de mes collègues et de moi-même, sans que nous ayons pu en voir l’énoncé ni eu notre mot à dire à ce sujet. Rien de tout cela ne doit se reproduire. Le Parlement européen ne devrait pas participer à la préparation de documents qui sont adoptés avant que les députés puissent les lire.
La dernière clause est la plus importante, avec son engagement à adopter une nouvelle Constitution qui puisse entrer en vigueur avant les prochaines élections européennes de juin 2009. L’Allemagne veut rafistoler la Constitution. On souhaite la rebaptiser et peut-être supprimer quelques références textuelles au drapeau et à l’hymne, sans toucher toutefois au drapeau ou à l’hymne eux-mêmes. La partie II serait supprimée, en vue d’adopter les droits fondamentaux communs dans une référence de deux lignes. Une poignée d’amendements seraient apportés à la partie III afin que la Constitution puisse être présentée comme un innocent petit Traité rectificatif, mais elle resterait dans l’essence identique à celle qui a été rejetée par les électeurs français et néerlandais.
Toutes les forces démocratiques devraient donc à présent s’unir pour exiger l’organisation d’un référendum dans tous les pays sur le prochain Traité, pourquoi pas le même jour? Ainsi, nos dirigeants seraient obligés de rédiger un document susceptible d’être approuvé par les électeurs, et le prochain Traité conférerait, contrairement à la Constitution actuelle, une plus grande influence à ces derniers. Le passage du vote à l’unanimité au vote à la majorité qualifiée dans 59 domaines - autrement dit, du vote à l’unanimité, où les électeurs de chaque pays ont le dernier mot, à la majorité qualifiée, entre responsables, ministres et groupes de pression à huis clos à Bruxelles - est au cœur de la question. Tel est l’ordre du jour: trop de Machiavel et pas assez de Montesquieu. Je vous remercie, Monsieur le Président, même si, en l’occurrence, il n’y a aucune raison de dire merci.
Bruno Gollnisch, au nom du groupe ITS. - Monsieur le Président, il y a cinquante ans, le traité de Rome était conclu entre des pays de niveaux de protection sociale comparables, riches de cultures diverses mais aussi d’une civilisation commune. Ce traité avait pour principe la préférence communautaire, garantissant à nos producteurs, et notamment aux paysans, des prix supérieurs aux cours mondiaux.
Ce traité a été totalement dévoyé. La préférence communautaire a cédé la place à l’invasion de productions non européennes. La désindustrialisation coûte à l’Europe des centaines de millions d’emplois. L’agriculture et les services sont en sursis. En ouvrant inconsidérément ses frontières, l’Union a créé du chômage, de la précarité, de la pauvreté. La déclaration de Berlin ne mentionne même pas ces difficultés. Elle est un monument d’autosatisfaction cynique, totalement coupé des réalités et des peuples. Elle ne donne à cette Europe aucun contenu, ni charnel, ni spirituel. Comme l’a remarqué le pape Benoît XVI, elle réussit même à taire les racines chrétiennes de l’Europe. Fallait-il pour cela l’accord d’un Président du Parlement démocrate-chrétien et d’une Présidente du Conseil démocrate-chrétienne?
Cette Union n’est pas davantage démocratique. L’institution internationale dérive en super État, un État rejeté par les opinions publiques, qui le chassent par la porte et que vous voulez faire rentrer par la fenêtre. Rien de tout cela n’est conforme au véritable génie de l’Europe. Nous ne cautionnerons pas ces dérives.
Jim Allister (NI). - (EN) Monsieur le Président, si vous la débarrassez de tout le verbiage d’autosatisfaction, cette déclaration de Berlin a en réalité très peu de substance dans de nombreux domaines. Poursuivant l’idée maîtresse du traité de Rome - la réalisation d’une union toujours plus étroite -, que la déclaration est supposée commémorer, de nombreux euro-enthousiastes considéraient ladite déclaration comme un jalon essentiel à la relance de la Constitution rejetée. Lorsqu’elle a été prononcée, après tous ces mystères, elle n’a même pas pu mentionner la Constitution et s’est limitée, au lieu de cela, à colporter les fadaises habituelles sur le moteur de la paix de l’Europe qu’est l’Union. Selon moi, c’est l’OTAN, et non l’Union, qui peut s’attribuer le mérite de la défense, du retour et de la promotion de la liberté et de la démocratie en Europe.
Le problème n’est pas l’idée de la coopération européenne, mais l’objectif final et les moyens utilisés. Les eurosceptiques sont convaincus des bienfaits d’une coopération mutuelle volontaire entre États-nations souverains. Nous sommes contre l’orchestration de cette coopération par une Union centralisée et avide, en vue d’imposer une intégration politique non désirée aux citoyens de ces États-nations. Le point faible de cette déclaration, c’est qu’elle se raccroche à cet objectif.
Le Président. - Monsieur Allister, nous vous félicitons, en qualité de représentant de votre pays, pour le gouvernement d’Irlande du Nord.
Hartmut Nassauer (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Madame la Présidente en exercice du Conseil, votre présidence fait quelque chose pour nous, Européens: elle nous donne du courage. En effet, pour la première fois depuis longtemps, nous avons l’impression que l’Europe pourrait vraiment sortir de l’impasse dans laquelle nous a conduit la non-ratification du Traité. Nous ne devrons pas travailler à une nouvelle Constitution, mais la manière dont l’Union européenne est constituée doit être adaptée aux nouvelles circonstances. Cela ne fait aucun doute. Cela demandera du courage et de l’autorité, qualités que vous avez déjà démontrées, et vous bénéficierez de notre soutien permanent au cours de ce processus.
Les chefs d’État ou de gouvernement ne seront toutefois pas les seuls que vous devrez convaincre, même si cela sera déjà assez difficile. Vous devrez également raviver l’enthousiasme des Européens à l’égard de l’Union, car cette dernière risque de perdre la confiance de ses citoyens, s’il n’est pas déjà trop tard. Il convient de se demander si l’intégration que loue M. Schulz est la bonne solution. Je dois dire que si je suis d’accord avec cette approche de base et que je pense que l’intégration est au cœur de l’avenir de l’Europe, une plus grande intégration ne nous gagnera pas le soutien de l’Européen moyen. Je vous demande donc, Madame la Chancelière, de vous faire la porte-parole de ceux qui, tout en étant des Européens convaincus et des partisans de l’approche intégrationniste, ne sont pas du tout satisfaits de la manière dont cette Union est perçue.
À l’origine de l’inquiétude, de la distance dont vous avez parlé, se trouve l’approche excessivement réglementaire de la législation, les citoyens percevant les décisions adoptées ici comme un harcèlement de la part de Bruxelles. Monsieur le Président de la Commission, si vous voulez un exemple dans votre domaine de responsabilité, je vous recommande d’étudier, un soir, avant d’aller vous coucher, la directive sur la protection des sols; je peux vous garantir que vous en aurez des cauchemars. Si nous avons raison de fêter les triomphes historiques de l’Union européenne, le mécontentement à l’égard de cette dernière montre clairement que l’Europe, en termes généraux, n’a pas besoin de plus d’intégration, mais de frontières - tant intérieures qu’entre elle et le monde extérieur. L’intégration est en effet une bonne chose, mais elle est devenue déséquilibrée, car nous en avons parfois trop chez nous et trop peu à l’étranger - où le grand public veut davantage de politique étrangère et de sécurité commune. Si vous avez des doutes, il vous suffit de vous demander si un appel en faveur de la libération des courageux soldats britanniques n’est pas plus efficace lorsqu’il est lancé par toute l’Union, et non pas par un seul État membre.
L’Union européenne doit être libérée de la cuirasse dont l’a recouverte l’approche intégrationniste, et c’est là que votre réflexion sur la discontinuité fait mouche, avec l’idée qu’un projet de loi qui n’a pas été adopté à la fin d’une période législative devrait être caduc. Cela apportera davantage de clarté, quant aux responsabilités de tout un chacun, et cela inspirera confiance. Madame la Chancelière, tout ce que je vous souhaite, c’est de réussir à regagner la confiance des citoyens européens, et vous avez une occasion de le faire.
Le Président. - Monsieur Nassauer, nous devons tous consentir un énorme effort conjoint, et c’est ce que nous allons faire.
Edite Estrela (PSE). - (PT) Madame la Présidente en exercice du Conseil, en tant que socialiste et que femme, je voudrais également vous féliciter pour votre présidence. J’ai le sentiment qu’elle a déjà fait la différence et qu’il faut davantage de femmes dans des postes à responsabilité.
Au cours de ses cinquante ans d’existence, la Communauté européenne a exaucé le rêve de Jean Monnet: consolider le projet de paix, de liberté et de progrès, et étendre ses frontières. Elle compte à présent 27 États membres, alors qu’il y a 50 ans - voire moins, en ce qui concerne mon pays, le Portugal -, certains de ces pays vivaient sous le joug d’un dictateur. Davantage de paix, de démocratie et de richesse, la libre circulation des travailleurs et des marchandises et une monnaie unique qu’ont adoptée 13 pays jusqu’à présent, c’est là un héritage inestimable.
L’Europe a changé au cours de ces 50 ans, et le monde n’est plus ce qu’il était non plus, à l’instar des besoins des Européens. La mondialisation, le changement climatique, les problèmes énergétiques, le vieillissement de la population, la migration et le terrorisme sont des problèmes auxquels il faut trouver de nouvelles solutions. Nous avons l’obligation de trouver des réponses aux problèmes actuels et de répondre aux attentes des citoyens. Ce sera la meilleure manière de promouvoir la stabilité sociale et de contribuer à l’équilibre du monde.
La paix et la stabilité intérieures ne pèseront pas lourd si nous ne trouvons pas de solution à la guerre en Irak, à la crise au Moyen-Orient et aux graves problèmes que connaissent nos voisins en Afrique du Nord.
La déclaration de Berlin relance à juste titre le débat sur le Traité constitutionnel et engage les 27 États membres à asseoir l’Union sur des bases communes rénovées avant les élections de 2009. Il faut parvenir rapidement à un consensus. On ne peut nier qu’il y ait des obstacles, mais les États membres ont une bonne occasion ici de montrer au monde et aux citoyens que ce qui nous unit est plus important que ce qui nous sépare. Ce n’est qu’ainsi que nous gagnerons la confiance des citoyens.
Silvana Koch-Mehrin (ALDE). - (DE) Madame la Présidente en exercice du Conseil, je voudrais surtout vous féliciter pour deux phrases de la déclaration de Berlin. La première est celle qui dit que «Notre chance pour nous, (…), c’est d’être unis». Ce sont des propos merveilleux, que je considère comme allant à l’encontre directement de ceux qui critiquent et doutent, qui ne font que grommeler que l’Union est une chose à laquelle ils sont obligés de participer. C’est précisément de cela qu’il s’agit, de «notre chance d’être unis». Je pense également que cette phrase d’une simplicité séduisante a touché une corde sensible chez tous les citoyens.
Je voudrais également vous féliciter, car vous avez réussi à intégrer dans la déclaration de Berlin un engagement obligeant à asseoir l’Union européenne sur des bases rénovées pour 2009. C’est tellement catégorique qu’aucun autre chef de gouvernement ne pourrait revenir dessus sans perdre réellement la face.
S’il est bon en effet que cette déclaration commune ait été prononcée, je dois dire que je trouve son contenu assez vague, car elle ne nous apprend rien sur la forme que l’avenir de l’Europe est supposé prendre, ou - et c’est plus important - sur la manière dont monsieur et madame tout-le-monde sont censés y participer. Nous attendons donc avec impatience la deuxième partie de votre présidence, ainsi que les propositions sur la manière dont il convient de réaliser ces objectifs. Nous vous souhaitons du fond du cœur de réussir. Si vous avez un jour besoin d’aide pour impliquer les citoyens, vous pouvez sans conteste compter sur nous.
Konrad Szymański (UEN). - (PL) Madame la Chancelière, Monsieur le Président, les deux plus grandes réalisations de l’intégration ont été le marché commun et l’élargissement. Le marché commun a apporté la prospérité aux Européens, tandis que l’élargissement a donné à l’Union européenne une position solide en termes de relations internationales. Toutefois, la déclaration de Berlin, au lieu d’exposer ces réalisations, semblent les cacher derrière de vagues formules sur l’ouverture et la coopération. Minimiser à ce point le rôle des États membres est une grave erreur. La déclaration a été écrite uniquement au nom des citoyens. Si nous voulons renforcer l’intégration, nous devons accorder une plus grande importance aux États membres, qui sont des partisans de l’intégration, et non ses ennemis.
Monsieur Schulz, s’il vous plaît, lorsque vous parlez d’élargissement, ne vous cachez pas derrière le Traité constitutionnel, derrière le président Kaczyński ou le président Klaus. Mettre un terme à l’élargissement est purement et simplement l’expression de notre peur de l’avenir, et de la vôtre.
Ce document est également offensant en ce qu’il ne mentionne pas la chrétienté. C’est un exemple du préjugé qui rend impossible une Europe de valeurs communes.
Johannes Voggenhuber (Verts/ALE). - (DE) Monsieur le Président, Madame la Présidente en exercice du Conseil, je suis aujourd’hui assez peu sûr de moi car, bien que je siège dans cette Assemblée depuis douze ans, je n’ai jamais auparavant chanté les louanges de présidences du Conseil, ce que votre travail m’oblige à faire. Les derniers grands Européens à avoir pris la parole dans cette Assemblée - Mitterrand et Junker, après sa présidence - ont eu tendance, dans leur européanisme, à utiliser la mélancolie et le désespoir. J’éprouve le plus grand respect pour la manière dont vous avez accepté le défi de l’Europe, en dépit des incroyables attentes qu’avaient placées les citoyens dans votre présidence et qui auraient pu vous faire ployer dès le départ. Ce qu’il manque à la déclaration de Berlin, ce sont 26 signatures, celles des 26 autres chefs d’État ou de gouvernement jointes à une déclaration anniversaire, une déclaration qui regorge de lapalissades - mais la vôtre y est. Vous êtes la première à sortir du mécanisme où les membres du Conseil se gênent, se menacent, se font des crocs-en-jambe et se tendent des pièges les uns aux autres, et à prendre un engagement, et vous méritez tout le respect pour cela.
En plus des références aux réalisations de l’Union, j’aurais voulu en entendre davantage sur le fait que nous n’avons pas répondu aux attentes des citoyens et sur la crise de confiance au sein de l’Union. Je vous félicite et souhaite exprimer le respect que vous m’inspirez, pour avoir sorti le projet constitutionnel du frigo; cela a montré vos qualités de leader, c’était un exercice de patinage artistique périlleux.
Je voudrais vous demander d’étudier deux points supplémentaires. Tout d’abord, si l’objectif que vous avez fixé est le seul pour lequel l’Europe peut se battre maintenant, la question se pose de savoir si la méthode utilisée est la bonne, si la crise constitutionnelle ne pourrait pas être surmontée par quelque chose de plus, par une Europe plus forte et plus persuasive, avec peut-être telle ou telle fonction supplémentaire, ou dont le caractère démocratique soit plus convaincant. Votre objectif peut-il être atteint grâce à une méthode qui remonte à l’époque des coursiers à cheval allant d’une chancellerie d’État à l’autre, apportant toujours le même message - les revendications et souhaits sempiternels des gouvernements nationaux?
Il y a ensuite la Charte des droits fondamentaux, et ici, je vous implore, Madame la Présidente en exercice du Conseil, de ne pas la séparer du Traité constitutionnel. Si vous le faites, vous diviserez le grand mouvement en faveur de la Constitution, et bon nombre de ceux qui ont lutté pour la Constitution, dont je suis, jugeront cela inacceptable, car les droits fondamentaux sont au cœur de ce projet européen.
Le Président. - Merci beaucoup, Monsieur Voggenhuber, notamment pour votre collaboration avec le Président du Parlement, qui a permis aux choses de prendre une si bonne tournure.
Roberto Musacchio (GUE/NGL). - (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Mme Merkel est sincèrement déterminée à relancer l’Europe. Je ne suis toutefois pas d’accord avec la méthode et les moyens utilisés pour y parvenir. On tente de faire abstraction de la crise sociale, politique et démocratique et de l’importance du référendum français, en se concentrant uniquement sur la méthode intergouvernementale, qui a déjà empêché des parlements - dont le mien - d’être au courant de la déclaration de Berlin, et sur la continuité avec le vieux Traité libéraliste, en espérant sans doute en créer une version minimaliste.
On ne résout pas les problèmes en utilisant la méthode même qui en est la cause. Au contraire, nous devons changer de texte et de contexte et nous concentrer sur la démocratie et les droits, en écoutant une fois encore les peuples et les parlements, à commencer par le Parlement européen, afin de reformuler une Constitution fondée sur le droit à la citoyenneté, à la paix, au travail et à l’environnement, et de la soumettre ensuite à un référendum européen où les citoyens auront le dernier mot.
Vladimír Železný (IND/DEM). - (CS) Monsieur le Président, nous n’avons appris que récemment que ni le gouvernement ni le président de la République tchèque n’avaient été informés du contenu de la déclaration de Berlin.
L’objectif de cette dissimulation était peut-être de faire passer en douce, à la fin de la déclaration, une phrase obligeant les États membres à adopter une mini-Constitution, qui ne sera pas appelée «Constitution» afin d’éviter de permettre aux citoyens de se prononcer sur la question dans le cadre d’un référendum. La phrase devait être présentée au dernier moment, sans consulter les États membres. Cette attitude qui manque de dignité ne sied pas à la présidence démocratique de l’Union, mais ressemble davantage au type de manipulation politique auquel avait recours - nous nous en souvenons tous que trop bien - la partie orientale de ce qui est aujourd’hui l’Allemagne, en d’autres termes, l’ancienne République démocratique allemande. En fin de compte, il n’en reste qu’une phrase qui ne dit rien, recommandant d’asseoir l’Union sur des bases rénovées, une phrase dont l’interprétation nous prendra deux ans de débats.
En République tchèque, nous avons une interprétation claire: «Renvoyons l’Europe à ses valeurs fondamentales originales, qui n’ont pas encore été réalisées. Supprimons le déficit démocratique et garantissons la libre circulation des travailleurs et des services. Réformons la politique agricole, qui discrimine les nouveaux États membres. Enfin, laissons de côté toute tentative de produire des volumes interminables de règlements et laissons les choses suivre leur cours naturel.» Merci, Monsieur le Président.
Timothy Kirkhope (PPE-DE). - (DE) Monsieur le Président, Madame la Chancelière, Monsieur Barroso, je remercie la chancelière et le président pour les propos qu’ils ont tenus.
(EN) Je commencerai par reconnaître l’importance historique du 50e anniversaire de la signature du traité de Rome.
Quel que soit notre avis sur le type d’Europe que nous voudrions avoir, je pense que nous devrions tous saluer certaines des importantes réalisations qu’a obtenues l’Europe au cours des cinq dernières décennies. Nous avons contribué au développement de relations amicales entre des États membres qui, hier encore, en termes historiques, étaient ennemis. L’Europe offre un forum où des gouvernements démocratiquement élus peuvent prendre des décisions fondées sur le dialogue. Nous avons vu le développement d’un marché unique en Europe, qui a offert de nouvelles opportunités économiques à nos concitoyens, et l’élargissement de 2004 a apaisé les divisions restantes. Je pense que nous pouvons tous saluer ces réalisations, et d’autres.
Toutefois, nous devons à présent nous tourner vers l’avenir de l’Europe. Nombreux sont ceux, en particulier dans mon pays, qui considèrent aujourd’hui l’Union européenne comme une bureaucratie lointaine. Ils nous considèrent encore comme un organe excessivement réglementé qui empiète sur de trop nombreux domaines qui devraient rester la chasse gardée des États-nations. Les citoyens veulent une coopération en Europe, mais ils ne comprennent pas pourquoi les politiques de ce Parlement passent autant de temps sur des questions constitutionnelles et institutionnelles. Les citoyens se demandent ce que nous allons faire pour lutter contre le changement climatique mondial, pour lutter contre le fléau de la pauvreté mondiale et pour rendre notre continent plus compétitif face à la mondialisation. Ils veulent que nous soyons à la hauteur sur le fond, sans nous appesantir trop sur les procédés.
Sans doute est-il nécessaire d’améliorer les travaux institutionnels de l’Union par des changements au Traité, mais cela n’implique pas forcément une nouvelle Constitution complexe.
Au XXIe siècle, nous avons besoin de davantage de flexibilité et d’une décentralisation, afin de permettre à nos économies d’être gagnantes sur les marchés internationaux. Nous n’avons pas besoin d’un surcroît de réglementation, que du contraire. Nous n’avons pas forcément besoin de davantage de vote à la majorité pour lutter contre le changement climatique ou la pauvreté mondiale. Nous avons besoin d’une coopération intergouvernementale plus efficace.
Les Constitutions et institutions ne génèrent pas la prospérité en soi, elles ne rendent pas nos économies plus compétitives, elles ne réduisent pas les émissions de CO2 et elles ne nourrissent pas les gens affamés des pays en développement. Je demande instamment à tous les gouvernements et à la présidence de continuer à travailler - ils ont pris un bon départ - pour être à la hauteur sur le fond de la politique.
Le Président. - Merci, et bonne continuation pour votre cours d’allemand.
Bernard Poignant (PSE). - Monsieur le Président, Madame la Présidente, la déclaration m’a fait penser à quelques Européens. Schuman, car vous avez utilisé sa méthode: une déclaration faite dans le plus grand secret. Comme quoi, c’est parfois fécond. Et puis j’ai pensé à lui parce que, bien que de père français, il est né allemand à cause de la guerre. Sa mère était luxembourgeoise. La langue française n’était que sa troisième langue, avant de devenir Président du Conseil. J’ai pensé aussi à De Gasperi. Il est né autrichien. Il fut député autrichien, du temps de l’Empire austro-hongrois, avant de devenir député italien.
Ces deux hommes, ce sont des hommes de la frontière. L’Europe est faite par les hommes de la frontière, car la frontière c’est la cicatrice de l’histoire et nous sommes là pour ne jamais la rouvrir.
Puis j’ai pensé à vous trois. À vous, Monsieur le Président, le stylo de la paix, car vous êtes de ma génération, vous êtes de l’Europe pacifiée, après l’Europe embrasée, avec votre blessure personnelle. Et vous, Madame la Chancelière, vous êtes, pour moi Français, la Chancelière qui vient d’au-delà du mur. Un cheminement de touriste, aujourd’hui, une barrière d’autrefois. Et vous, Monsieur Barroso, vous êtes le Président de la liberté retrouvée, à 18 ans, un peu gauchiste sur les bords, mais vous avez changé.
En vous regardant tous les trois - j’aime bien cette déclaration, et puis c’est un anniversaire - je me suis dit: ils ont quand même un défaut, ils ne sont pas socialistes. Mais je me suis rappelé ce que disait Guy Mollet, Président du Conseil socialiste en 1956: n’attendez pas que l’Europe soit socialiste pour la faire!
Là, c’est sacrément bien fait!
Le Président. - Merci beaucoup, Monsieur Poignant, en particulier pour vos remarques personnelles.
Andrew Duff (ALDE). - (EN) Monsieur le Président, Madame la Chancelière, auriez-vous l’amabilité de confirmer que la présidence plaide à présent fermement en faveur de l’amélioration, et non de l’appauvrissement, du Traité constitutionnel afin d’en garantir une ratification rapide? Choisirez-vous avec fermeté une «super-Constitution» plutôt qu’un petit, un mini, voire un minuscule Traité? N’accepterez-vous pas une CIG dans le seul but de dégager les États membres de promesses d’encourager les référendums?
Souvenez-vous des défis non relevés de Laeken. On ne devrait pas laisser la CIG démanteler le paquet complet convenu entre les institutions et les États membres. Elle devrait plutôt se concentrer sur la réforme des politiques communes afin que ces dernières répondent davantage aux préoccupations actuelles et aux défis futurs.
Quant à tous ceux qui vous demandent d’ouvrir les parties I et II, dites-leur d’être patients. Adoptons d’abord le Traité et essayons les choses dans la pratique avant de toucher à nouveau à l’équilibre de pouvoir atteint. Le premier amendement historique aura certainement lieu un jour, mais il ne faut pas s’y essayer maintenant.
Le Président. - Monsieur Duff, je voudrais vous remercier pour la contribution que vous avez apportée à notre processus d’information et de consultation au Parlement.
Mario Borghezio (UEN). - (IT) Monsieur le Président, Madame la Chancelière, Mesdames et Messieurs, à Berlin, les dirigeants européens ont quelque peu manqué de courage pour souligner les choix que nous imposent la mondialisation, l’immigration et le risque de perdre notre identité. Pas un mot n’a été prononcé sur les frontières géopolitiques de l’Europe qui, grâce à l’élargissement vers la Turquie, risquent d’atteindre l’Iran, l’Irak et même la Syrie.
Seul le Pape Benoît XVI, qui se dégage dans cette situation comme le chef spirituel d’une Europe qui, sans lui, n’aurait ni idées ni idéaux, nous a montré la marche à suivre: comment peut-on ne pas comprendre qu’il est inconcevable de construire une Europe commune en ignorant l’identité morale et culturelle du peuple européen? Les dirigeants européens font la sourde oreille à ces avertissements. Il est clair que l’Europe des banquiers et des groupes de pression ne peut pas nous sauver de ces dangers, de la crise du modèle social européen et de la menace d’invasion islamique.
Pour ceux qui, comme moi, sont partisans de l’autonomie régionale, il est difficile d’accepter un projet de Constitution qui soutienne une Europe bureaucratique et centraliste, caractérisée, notamment, comme nous l’avons vu aujourd’hui, par de sérieux scandales et une transparence médiocre, loin du rêve des grands penseurs digne d’une Europe des régions et des peuples.
Toutefois, Madame la Chancelière, je voudrais vous remercier et reconnaître que vous avez fait preuve de sensibilité, en tant que dirigeante motivée par des pietas chrétiennes, dans l’attention que vous avez prêtée, sur ma suggestion, au problème encore non résolu de la reconnaissance des droits des soldats italiens prisonniers. Je vous remercie en leur nom et au nom des 50 000 familles qui attendent que l’on reconnaisse leur sacrifice et leur mémoire.
Rebecca Harms (Verts/ALE). - (DE) Monsieur le Président, Madame la Présidente en exercice du Conseil, je vous remercie beaucoup. M. Voggenhuber vous a déjà offert un bouquet de fleurs au nom de mon groupe, au sein duquel personne, à mon avis, ne doute que vous le méritiez, même si nous nous demandons déjà ce qui va se passer ensuite; c’est ce que je voudrais dire à nouveau, en prenant la parole à la fin du débat. En effet nous ne pensons pas que l’esprit de cette déclaration de Berlin soit compatible avec l’idée que ce qui reste de la Constitution ne devrait en fin de compte servir qu’à permette aux technocrates et bureaucrates de Bruxelles de faire leur travail plus en douceur.
Nous considérons en effet ce projet constitutionnel comme une cause et comme un projet qui vise à rendre l’Europe dans son ensemble plus démocratique, et c’est pourquoi nous pensons que le catalogue de droits fondamentaux, qui a déjà été mentionné, doit simplement en faire partie. Nous ne pensons pas que la question de savoir comment cet objectif doit être atteint et comment les citoyens doivent y être associés soit banale; nous estimons avoir appris quelque chose des référendums français et néerlandais et nous pensons qu’il importe que tous les citoyens soient consultés équitablement en Europe. Consulter tel citoyen et non tel autre entraînera deux poids deux mesures. Nous ne devons pas tolérer cela et, comme nous sommes convaincus qu’il serait utile d’apporter des précisions sur cette question, c’est précisément ce que nous voudrions avoir.
Pedro Guerreiro (GUE/NGL). - (PT) La présidence allemande cherche à faire accepter son programme pour l’Union, qu’elle façonne en fonction de ses ambitions croissantes.
Prononcée en grande pompe, la déclaration de Berlin n’est qu’un pas en avant dans cette stratégie, dont l’un des objectifs est de ranimer l’essence - déjà rejetée - de la Constitution européenne. En réalité, malgré les efforts des autorités constituées en vue de prêter une certaine grandeur à l’événement, le principal sentiment concernait son caractère artificiel et la totale indifférence des citoyens à l’annonce du cinquantième anniversaire du traité de Rome.
C’est un signe des temps, qui illustre à quel point l’Union est en désaccord avec les intérêts et aspirations des citoyens d’Europe et du monde. Les forces dominantes de l’intégration capitaliste européenne sont pleinement conscientes de cette contradiction croissante. Le contenu de la déclaration de Berlin n’est dès lors, selon nous, qu’un exercice visant à exploiter les inquiétudes justifiées des citoyens européens. La déclaration n’a rien à voir avec les objectifs réels et les politiques spécifiques de l’Union ni avec la dure réalité qui en découle.
Antonio Tajani (PPE-DE). - (IT) Monsieur le Président, Madame la Chancelière, Mesdames et Messieurs, le sommet de Berlin a certainement été un pas en avant pour l’Europe, marquant le début d’une nouvelle phase après une période marquée par des difficultés et un certain échec.
Les célébrations du 50e anniversaire des Traités ont marqué la reprise d’une initiative européenne, coordonnée par le Conseil, la Commission et le Parlement, de bâtir l’avenir de l’Europe. Toutefois, si nous voulons parler d’avenir, nous devons viser à instaurer, avant 2009, une loi fondamentale réglementant les compétences et le rôle d’une Union qui n’est pas seulement un marché mais peut également être un acteur de la politique internationale, se présentant avec des réponses concrètes, en particulier aux demandes des citoyens.
C’est la raison pour laquelle, Madame la Chancelière, je salue l’initiative d’ouvrir un grand débat sur trois questions fondamentales: le changement climatique, la sécurité énergétique et la question de l’Afrique et de ses tragédies trop souvent ignorées par l’Occident. L’Europe dans laquelle nous croyons, toutefois, et dans laquelle nos pères fondateurs croyaient, n’est pas uniquement politique et économique. Je me soucie de la disparition de dizaines d’églises en Allemagne; je m’inquiète du faible taux de natalité en Italie; je suis épouvanté par les arrêts rendus par des juges, qui acquittent des hommes qui ont brutalement battu leur femme au nom de la religion; je suis alarmé par la propagation des drogues chez les jeunes en Europe. Ce n’est pas l’Europe à laquelle nous nous identifions et dans laquelle nous sommes engagés.
Ce serait donc une erreur que de sous-estimer ou, pire encore, d’oublier les valeurs mises en exergue dans la déclaration de Berlin: démocratie, paix, liberté, justice et, surtout, l’importance de la dignité humaine et de la personne. Comment donc pouvons-nous ne pas nous faire l’écho des propos de Jacques Delors, qui nous rappelle de ne pas oublier nos racines chrétiennes. Dans une entrevue qu’il a accordée aujourd’hui, il nous dit que la mémoire est notre avenir.
Stephen Hughes (PSE). - (EN) Monsieur le Président, en se tournant vers le développement futur de l’Europe, la déclaration de Berlin souligne fort justement l’importance de la solidarité et de la cohésion sociale dans un modèle européen alliant réussite économique et responsabilité sociale. Elle me rappelle une autre déclaration baptisée «Pour une nouvelle Europe sociale», adoptée par neuf gouvernements européens peu après le sommet de printemps cette année. Cette déclaration vise à rééquilibrer le dosage des politiques en faveur de l’action dans le domaine social et de l’emploi.
En réponse à cela, les conclusions du sommet de printemps ont intégré une référence claire au travail décent, à la participation et aux droits des travailleurs, à l’égalité des chances, à la protection de la santé et de la sécurité sur le lieu de travail et à la nécessité d’une organisation du travail propice à la vie familiale. L’importance de la cohésion sociale a également été soulignée et l’accent a été mis sur la nécessité de lutter contre la pauvreté, en particulier celle des enfants. L’importance de la dimension sociale a donc été mise en avant dans les termes les plus clairs qui soient.
Les conclusions ont également rappelé les dispositions sociales du Traité, en particulier son attachement à l’amélioration de l’emploi et des conditions de vie et de travail. Cela fait partie de l’article 136 du Traité, qui a été commémoré dimanche, et cela sert de préambule aux bases juridiques très claires dont dispose la Commission pour faire des propositions visant à améliorer l’emploi et les conditions de vie et de travail.
Je pense que la déclaration de Berlin et le sommet de printemps rappellent à point nommé à la Commission qu’elle doit relancer un agenda social substantiel car, au vu du programme de travail actuel de la Commission, elle semble avoir oublié qu’elle a des bases juridiques lui permettant d’agir tout court.
Nous voulons que la Commission réponde de toute urgence. Elle pourrait commencer par dissiper le rideau de fumée qui entoure actuellement la question de la flexicurité. Il est temps que nous ayons de nouvelles propositions législatives pour nous attaquer aux formes d’exploitation que constitue le travail atypique. Faisons en sorte que la flexicurité ait un sens positif pour les millions de travailleurs qui la considèrent actuellement comme un masque pour l’exploitation.
Enfin, j’espère que la présidence allemande maintiendra la position centrale de l’Europe sociale en vue du sommet de juin, et au-delà. La déclaration de Berlin conservera ainsi une certaine crédibilité.
Bronisław Geremek (ALDE). - (PL) Madame la Chancelière, tout d’abord, je voudrais vous remercier pour avoir réussi à sortir l’Europe de sa mélancolie et de son pessimisme. Le 25 mars, les Européens ne se sont pas contentés de chanter l’Ode à la joie, ils ont réellement ressenti cette joie.
La déclaration de Berlin dépend de la manière dont elle sera mise en œuvre. Sa place dans l’histoire de l’Union européenne dépend de ce qui se passera ensuite. Elle confirme toutefois une chose importante, à savoir, que l’Europe s’est en effet unifiée, et elle rend dûment hommage aux responsables de cette unification.
Toutefois, nous devrions peut-être également ajouter que l’Europe, en ce qui concerne l’Est et l’Ouest, ne s’unifie que maintenant. Deux passés différents et deux sensibilités différentes doivent s’unir. Nous avons également besoin que l’Europe soit forte et intégrée.
L’unification de l’Europe est notre défi. Et l’avis frappant exprimé dans la déclaration de Berlin - que l’Europe doit redécouvrir ses fondements - est un autre défi. Si l’Europe doit redéfinir ses bases, sans un Traité lui conférant une dimension politique et lui permettant de rendre effectives ses décisions, l’Europe ne pourra pas avancer. Il me semble également que l’assertion selon laquelle nous sommes unis devrait signifier que nous sommes unis afin que l’Europe puisse aller de l’avant.
Angela Merkel, présidente en exercice du Conseil. - (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je voudrais très brièvement résumer ce débat, dont je suis très reconnaissante.
Il est apparu clairement aujourd’hui - et je suis sûre que cela reflète l’avis de l’ensemble des groupes de cette Assemblée - que la volonté et l’état d’esprit communs de la grande majorité de votre Parlement est que cette Europe qui est la nôtre doit aller de l’avant. Il faut par ailleurs y ajouter une dose d’optimisme, du genre de celle dont a parlé le président du groupe socialiste, M. Schulz, que je voudrais également féliciter aujourd’hui - en supposant que je puisse le faire, en tant que présidente en exercice du Conseil -, car la situation est en effet historique et très grave, je suis entièrement d’accord avec tous ceux qui l’ont affirmé aujourd’hui.
Il y a encore des sceptiques qui hésitent et qui doutent de la nécessité d’un calendrier et de la nécessité de présenter aux citoyens des bases rénovées en 2009, ce que nous disons vouloir faire dans la déclaration de Berlin. Nous devrions leur dire que la présidence allemande, le Parlement et la Commission sont bien conscients de l’enjeu, à savoir, de ce que nous avons un jour appelé l’«Europe des projets», en d’autres termes, qu’il faut prendre des mesures très précises, du genre de celles qui sont réellement manifestes aux yeux des citoyens.
Cela ne concerne pas seulement le fait que nous en décidions maintenant, le règlement des questions institutionnelles ou la procédure de vote, il s’agit également, dans le même temps, de montrer aux citoyens que nous faisons quelque chose, quelque chose qui a une grande importance pour la vie de tous. Plus nous réalisons de choses pendant ces six mois, au cours desquels nous avons évidemment d’autres questions importantes à aborder, plus il sera facile de progresser dans ces autres domaines. En tout cas, nos efforts au cours des trois prochains mois seront orientés vers ces éléments, et je voudrais remercier de tout cœur le Parlement de prêter attention à ces questions pratiques. Hier, par exemple, vous avez réussi à débloquer des ressources pour la protection de l’environnement, ce qui a permis de lancer des projets. Nous avons également des choses à dire en matière agricole. C’est dans des domaines tels que ceux-là que les citoyens se demandent ce que l’Europe réalise à présent, et y parvenir maintenant est donc une bonne chose.
Quelqu’un a également demandé dans cette Assemblée comment la déclaration de Berlin avait vu le jour. Je pense que c’est Winston Churchill qui a déclaré, à propos des traités de Rome, que «Jamais rien d’aussi important que les traités de Rome n’a été adopté à huit clos comme ici, sans que personne ne se rende compte de rien.» Nous n’avons aucune chance de répéter ce type de performance à une époque comme la nôtre, où les médias sont partout, mais je pense que nous devons, en particulier au cours des mois à venir, trouver un équilibre entre la participation et tout ce qui entoure la réalisation des choses, et la place publique n’est pas toujours le meilleur endroit pour ce faire. Non, le Président n’a pas été obligé de tenir des consultations secrètes avec moi sur la déclaration de Berlin, mais les groupes du Parlement y ont bien entendu participé, d’une manière ou d’une autre, et c’est de cette manière que nous avons tenté de refléter vos propositions, tout comme nous l’avons fait avec la Commission et les 27 États membres.
Tout le monde sait cependant que la démocratie implique qu’il est impossible de refléter l’avis de tous dans le résultat final; parfois, cela peut être réalisé en parallèle, et ces choses ne peuvent pas être toutes notifiées en même temps, mais je pense cependant qu’il faudrait mettre le public au courant de l’enjeu maintenant, et c’est la raison pour laquelle j’ai une demande à soumettre au Parlement. Monsieur le Président, je voudrais vraiment faire une suggestion à votre Assemblée, car le Conseil n’est pas l’institution la mieux placée pour bien célébrer la participation publique. Étant donné que le Parlement est doté de commissions, il serait peut-être possible d’organiser - en mai peut-être - une audition de la société civile, à laquelle le Conseil enverrait également un représentant, où nous pourrions examiner ce qui se dit au sein de la société civile quant aux attentes que le public nourrit à l’égard de ce processus d’élaboration de bases communes rénovées. Cela nous permettrait, par le biais d’un débat avant la prochaine réunion du Conseil, de faire participer, à un certain niveau, le public européen à nos délibérations.
(Applaudissements)
Je pense dès lors qu’au cours des trois mois à venir, nous allons nous voir souvent. Nous avons passé du bon temps ensemble au cours des trois premiers mois, il n’y a pas de raison pour qu’il en aille autrement au cours des trois suivants. Je vous remercie beaucoup.
(Applaudissements)
Le Président. - Merci, Madame la Chancelière. Le plus important est qu’il est apparu clairement que nous croyons à nouveau dans l’Europe et que nous nous faisons mutuellement confiance, et cette confiance entre cette Assemblée et vous-même en qualité de représentante du Conseil européen a pris une ampleur incroyable au cours des dernières semaines. Je parle au nom de nombreux députés de cette Assemblée et, en particulier en mon nom personnel, lorsque je dis que travailler avec vous nous a apporté beaucoup de joie, et que nous attendons avec impatience de collaborer avec vous et avec la Commission. Nous vous souhaitons de continuer sur la voie de la réussite et nous sommes là pour vous épauler.
Mirosław Mariusz Piotrowski (UEN). - (PL) La déclaration de Berlin tant attendue a pris les peuples européens un peu au dépourvu, moins par son contenu, que la presse a qualifié de «chef-d’œuvre d’ambigüité», que par l’absence de débat public. Le fait que la déclaration a été signée par trois personne seulement, représentant les institutions européennes, et non par les représentants des 27 États membres en dit long.
En effet, la déclaration n’engage personne à rien, et elle n’aplanit pas les divergences d’opinion concernant le rôle et le fonctionnement de l’Union. Il n’y a aucun accord sur une politique étrangère commune, ni de projet de politique européenne de défense.
L’opposition décisive dans certains pays à une référence aux racines chrétiennes de l’Europe empêche toute définition des valeurs européennes communes. À l’avenir, et en dépit de tous les problèmes non résolus, nous ne devrions pas nous écarter de la voie du dialogue et de la consultation pour faire du chantage aux pays qui émettent différentes réserves.
József Szájer (PPE-DE). - (HU) L’Union européenne est arrivée à un âge mûr, et il semble qu’elle ait également acquis la sagesse correspondante, étant donné qu’elle a réussi à adopter un document concis qui se concentre sur les valeurs, les principes et les tâches qui l’attendent, et qui est dans le même temps compréhensible pour l’Européen moyen. L’Union a donc prouvé qu’elle peut parler d’une seule voix et qu’elle est prête à prendre des mesures en se basant sur des valeurs.
Cette déclaration commémore le 50e anniversaire du traité de Rome, mais je voudrais rappeler qu’il s’agit également du 50e anniversaire de la révolution hongroise de 1956, qui est tout aussi présente dans les racines, les origines et les traditions de l’Union européenne moderne. Sans l’exemple de 1956 et des révolutionnaires hongrois, l’Union européenne n’aurait pas pu se développer comme elle l’a fait, pour devenir ce que nous pouvons maintenant appeler notre Europe commune.
Je suis convaincu que nous avons besoin d’une Union européenne forte, confiante dans ses valeurs et son identité, refusant d’abandonner ses principes et incapable de tout subterfuge. Nous voudrions voir une Union qui renforce la coopération de ses États membres, qui encourage la collaboration interne et qui va vers une solidarité accrue et une plus grande intégration politique.
Pourquoi avons-nous intérêt à avoir une Europe forte? Parce qu’ainsi, chaque État individuel peut également devenir beaucoup plus fort. Pour être fort, il importe bien sûr également que nous puissions reconnaître clairement notre passé et notre identité.
J’ai fêté le 50e anniversaire à Rome lors d’une conférence organisée par une organisation de la société civile, et je voudrais vous transmettre l’un des messages de cette conférence, à savoir, que nous devons en effet reconnaître notre identité, et reconnaître et affirmer les racines de l’Europe, ses racines chrétiennes. Toute personne qui regarde l’Europe de l’extérieur voit ce que nous avons tous en commun. Pourquoi n’arrivons-nous pas à le voir nous-mêmes? Pourquoi avons-nous peur de le reconnaître?
Le Président. - Merci beaucoup, Monsieur Szájer, en particulier pour votre coopération dans le cadre de la coordination interne, où vous avez joué un rôle.
Lidia Joanna Geringer de Oedenberg (PSE). - (PL) La déclaration de Berlin a été signée à un moment très important pour l’Union européenne. La signature des traités de Rome il y a cinquante ans a été la première étape de la mise en œuvre d’une idée ambitieuse. La présence de 27 États à Berlin reflétait l’impact de cette idée. Si l’Union a été fondée sur les ruines de l’Europe d’après-guerre, la déclaration fondatrice n’a été signée que par 6 États.
Aujourd’hui, un demi-siècle plus tard, c’est une joie de voir l’Europe vivre en paix. Elle compte près d’un demi-milliard d’habitants, couvre une grande partie du continent et a une force plus grande que jamais sur la scène internationale. Les résultats de l’intégration sont impressionnants: un marché unique, une monnaie commune dans 13 États et la libre circulation des personnes, des marchandises et des capitaux. L’Union européenne a pris l’engagement de protéger l’environnement et de travailler à un développement durable. Elle est un protagoniste actif et prestigieux sur la scène internationale, apportant stabilité et prospérité aux pays voisins.
La déclaration de Berlin est un symbole important pour l’Europe. Toutefois, il manque encore quelque chose, en dépit du sentiment de réalisation évident. Peut-être aurions-nous pu souhaiter que l’Union européenne ait une Constitution pour le 50e anniversaire de la signature des traités de Rome. Nous sommes encore confrontés à plusieurs problèmes: la concurrence économique mondiale, les nouveaux défis dans le domaine de la politique sociale, de la protection de l’environnement, de l’énergie et de la sécurité. Les citoyens européens veulent une Union plus forte et plus efficace, agissant sur la base de règles transparentes. Nous devons supprimer les obstacles que les citoyens rencontrent, en particulier dans les nouveaux États membres, par rapport à la libre circulation des personnes et des services. Nous devons achever l’élargissement de l’espace Schengen et de la zone euro. Nous devons mettre en œuvre une politique énergétique commune. L’Europe a besoin d’une croissance économique, de nouveaux emplois et d’une meilleure sécurité sociale.
Dans ce contexte, le point de la déclaration qui affirme que les bases institutionnelles de l’Europe doivent faire l’objet d’un accord avant 2009 revêt une grande importance. Il devrait motiver tous les États membres à réaliser les réformes institutionnelles qui s’imposent. La chancelière Merkel doit être saluée pour son importante contribution à notre réussite commune. L’Union européenne a aujourd’hui le visage d’une femme. L’Union est une femme.
Íñigo Méndez de Vigo (PPE-DE). - (ES) Monsieur le Président, on a parlé ici de l’importance d’une politique européenne sur le changement climatique. Est-ce possible avec les Traités actuels? Non.
On a également parlé de l’intégration sociale des immigrants. Est-ce possible avec les Traités actuels? Non.
Que dire d’un marché commun de l’énergie? Il n’y a pas de base juridique dans les Traités actuels. Je le dis parce que mettre en opposition ce que certains ont appelé les «véritables politiques qui préoccupent les citoyens» et les instruments et techniques, comme si ces derniers n’étaient pas importants, revient simplement à ignorer la manière dont fonctionne l’Union européenne.
Sans procédures, sans bases juridiques, l’Union européenne ne peut agir, et sans davantage de démocratie, elle agira sans légitimité. C’est la raison pour laquelle il importe également que nous parvenions à un accord sur le Traité constitutionnel.
Après la réussite de la présidence allemande lors de la manifestation de Berlin, je pense que c’est à cela que nous devrions travailler maintenant.
J’espère que le Conseil européen de juin fera le nécessaire à ce sujet. Cela ne requiert pas l’unanimité, et je pense qu’il est très important de fixer le mandat. Lorsque nous déterminerons le mandat de la Conférence intergouvernementale - et c’est un professeur d’université qui vous parle -, nous devons tenir compte de ceux qui ont réussi l’examen, parfois avec distinction, et nous devons aider ceux qui ont échoué et ceux qui ne se sont pas présentés, mais nous ne devons pas seulement tenir compte de ceux qui ont échoué et de ceux qui ne se sont pas présentés.
Par conséquent, les pays qui, comme le mien, ont ratifié la Constitution ont tenu leur engagement, et nous devons être pris en considération lors de l’établissement du mandat.
Il a été dit fort justement que ce Parlement, à travers vous, Monsieur le Président, a apporté une contribution décisive à la déclaration de Berlin. Je crois que nous voulons tous la même chose dans la Conférence intergouvernementale: nous voulons tous aider le Conseil européen, parce que la Commission fait partie de la Conférence intergouvernementale, parce que les parlements nationaux vont ratifier le résultat de cette conférence. Nous souhaitons toutefois apporter une contribution décisive pour garantir que la Conférence intergouvernementale soit une réussite au moins aussi grande que la déclaration de Berlin.
Le Président. - Merci beaucoup, Monsieur Méndez de Vigo. Je voudrais également vous remercier pour votre excellente collaboration dans le cadre des travaux préparatoires, dont vous étiez le coordinateur pour le groupe du Parti populaire européen (démocrates-chrétiens) et des démocrates européens.
Ioannis Varvitsiotis (PPE-DE). - (EL) Monsieur le Président, la cérémonie de Berlin est terminée et elle a été fantasmagorique quant aux réalisations très importantes des 50 dernières années. Toutefois, les feux de la cérémonie sont maintenant éteints et nous nous trouvons face à des citoyens européens dominés par des sentiments d’indifférence, d’amertume et, plus important, d’anxiété. Les citoyens européens sont convaincus que l’Europe ne peut pas progresser aisément dans l’état actuel des choses.
Il est réconfortant que la chancelière allemande ait compris que la mise en place des conditions préalables pour rendre les mécanismes des institutions de l’Union européenne opérationnels est la principale priorité, car il est évident que l’Union européenne des 27 ne peut pas avancer avec les mêmes structures et la même organisation que lorsqu’elle ne comptait que 15 membres. L’effort est extrêmement difficile. Le fait que la déclaration de Berlin signée par les 27 dirigeants ne fasse aucune référence à la Constitution européenne, qui est notre principale préoccupation, en dit long. La création d’un poste de président de l’Union et de ministre des affaires étrangères, la réduction du nombre de commissaires, la nouvelle pondération des voix, l’augmentation des responsabilités du Parlement, l’abolition des trois piliers, le renforcement de l’institution de coopération renforcée entre les États membres et l’acquisition d’une personnalité juridique pour l’Union européenne sont quelques-uns des accords atteints dans la Constitution européenne qui n’a pas été approuvée. Je pense que nous devrions les intégrer dans un nouveau «traité de Nice II» et les mettre en pratique avant les élections de 2009.
Oublions les plans grandioses et revenons sur terre. Je pense que cette Europe peut avancer avec cette solution réaliste.
PRÉSIDENCE DE MME MORGANTINI Vice-présidente
Margie Sudre (PPE-DE). - Madame la Présidente, Madame la Présidente en exercice du Conseil, Monsieur le Président de la Commission, mes chers collègues, la déclaration de Berlin s’adresse aux peuples de l’Union européenne pour qu’ils prennent la mesure de l’extraordinaire succès que constitue notre œuvre commune. Elle rappelle nos valeurs européennes et doit être le ciment d’un nouvel élan d’imagination, au-delà des solidarités qui ont permis de faire converger un certain nombre de politiques communes pendant un demi-siècle.
Il nous faut être réalistes, ne pas nous cacher les difficultés actuelles et convaincre les Européens que la construction d’une Europe intégrée et forte dans le monde est non seulement indispensable, mais constitue une chance pour chacun de nos vingt-sept pays et pour l’ensemble des 500 millions de citoyens de l’Union. Pour les convaincre, il nous faut à la fois apporter des résultats concrets, des preuves tangibles de la plus-value de l’Union, mais aussi adopter une attitude plus optimiste, ce qu’a fait Mme le Chancelier.
Les Européens sont divisés sur les principales orientations de la politique européenne. Certains estiment que l’Europe prend une direction trop libérale et subit la mondialisation sans protéger ses populations. D’autres, au contraire, estiment qu’elle ne va pas assez loin dans le protectionnisme. La vérité, comme toujours, se situe entre ces deux extrêmes.
Notre continent est l’un des rares pôles de stabilité dans un monde de plus en plus imprévisible. Nos histoires sont riches d’enseignements et nos cultures riches de diversité. Elles sont des références pour nombre de peuples. Notre économie est globalement saine, ouverte sur le monde. Nous œuvrons sans relâche en faveur d’une plus grande solidarité envers les régions du monde les plus défavorisées et les plus déstabilisées.
Je tiens à saluer ici la Présidente du Conseil, ses efforts ainsi que ses résultats. Ils démontrent le souci qu’elle a de faire progresser l’Europe, de trouver une porte de sortie à la situation de blocage que nous connaissons depuis quelques mois et je voudrais l’en remercier chaleureusement.
Bogusław Sonik (PPE-DE). - (PL) Madame la Présidente, Monsieur le Président de la Commission, nous autres, les citoyens d’Europe qui venons de l’autre côté du «rideau de fer», nous accordons la plus grande valeur à la liberté, y compris le libre-échange, et à ce qui constituait autrefois notre produit national ou, en d’autres termes, notre spécialité régionale, à savoir la solidarité. Nous connaissons également le prix à payer pour défendre ces valeurs. Pendant des décennies, nous avons rêvé de réintégrer la patrie européenne des nations libres. Nous avons grandi en écoutant des programmes radio interdits, diffusés depuis Munich, sous le fier nom de «Radio Europe libre».
Maintenant, nous sommes toujours fidèles à cette Europe, libre et unie. En tant que membres de l’Union européenne, nous avons pleinement le droit de contribuer à façonner son avenir. Il ne suffit plus de prononcer les mots «Europe, Europe»; nous devons également poser la question suivante: «L’Europe, oui, mais quel genre d’Europe?» Le projet Europe doit jouir de la pleine confiance de tous ses membres. Il ne peut y avoir de sujets tabous dans le débat européen.
Le Traité constitutionnel, que les Français et les Néerlandais ont rejeté, est ouvert à l’analyse de chaque pays, qui a le droit de mettre en question les aspects qu’il considère comme étant controversés.
Toutefois, il ne faudrait pas que M. Schulz, le chef du groupe socialiste au Parlement européen, profite de la moindre occasion pour marginaliser les États membres qui osent émettre un autre point de vue que le sien à propos de la future forme institutionnelle de l’Union européenne ou un point de vue qui s’écarte de la justesse politique que la gauche tente d’imposer. Le débat sur le Traité proposé par la présidence allemande doit se caractériser par l’ouverture et par une volonté de parvenir à un compromis, même sur des questions aussi difficiles que la recherche d’une nouvelle méthode équitable de vote au Conseil.
J’ai aussi remarqué que la déclaration de Berlin ne contenait aucune référence à nos racines chrétiennes.
Enfin, je voudrais citer l’homme politique belge Paul-Henri Spaak, dont nous occupons aujourd’hui le bâtiment, et qui a déclaré en 1957:
Je l’ai dit un jour à Strasbourg, lorsque les temps présents seront révolus, que nous aurons tous disparu depuis de longues années et que l’on voudra raconter l’aventure humaine que nous avons vécue, on ne pourra pas, quelles que soient nos convictions religieuses ou philosophiques, dire autre chose que ceci: les gens de ce temps-là, de ce siècle-là ont vécu ensemble l’immense aventure de la civilisation chrétienne.
Elmar Brok (PPE-DE). - (DE) Madame la Présidente, Monsieur le Président en exercice du Conseil, Monsieur le Président de la Commission, Madame la Chancelière fédérale, je suis très honoré de pouvoir intervenir sous votre présidence. Je voudrais faire quelques remarques. Premièrement, comme la déclaration de Berlin l’a précisé clairement, l’Europe a pu, grâce à l’intégration, parvenir à un niveau de paix, de liberté et de prospérité jamais égalé jusqu’ici dans son histoire et probablement unique dans l’histoire de l’humanité.
Deuxièmement, il est également apparu clairement que nous nous trouvons face à des défis, tels que le terrorisme, la mondialisation, la politique étrangère et de sécurité et la sécurité énergétique, que, dans de nombreuses années, les États-nations ne pourront plus contrôler eux-mêmes. Cet ensemble de défis montre bien que l’Union européenne s’est avérée être une réussite chaque fois que nous avons eu recours à la méthode communautaire, que nous avons travaillé avec une législation commune et que nous avons appliqué la méthode Monnet. C’est pour cette raison, je crois, qu’il convient de mener le processus constitutionnel sur cette même base, car nous sommes affaiblis dans tous les domaines où les gouvernements collaborent.
Cela signifie également - si nous devons à présent entamer la phase suivante, qui fait suite à la déclaration de Berlin, et qu’il faut reprendre le processus constitutionnel - qu’il est essentiel d’adhérer aux principes de la méthode communautaire. Le Traité constitutionnel contient déjà une bonne partie de ce dont nous avons besoin si nous devons relever les défis qui nous attendent.
Bien que la Constitution ne résolve en soi aucun problème, elle nous fournit un cadre pour la légitimité et la capacité de prendre des décisions, lequel nous permet de résoudre les problèmes. C’est pourquoi j’espère que les vingt-sept États membres ont bien compris - et je soutiens la Commission en disant cela - qu’ils doivent avoir de très bonnes raisons pour ne pas suivre ce processus. Nous devons donc nous assurer que l’Union européenne, en tant que Communauté de vingt-sept pays, relève ce défi et ne se désintègre pas en petits blocs, qui verraient le jour si elle ne réussissait pas, dans son ensemble, à le relever.
La Présidente. - Avant de donner la parole au président Barroso, je voudrais présenter mes excuses pour l’absence dans cet hémicycle non pas de députés, car ils sont réputés pour cela, mais, surtout pour un sujet tel que celui que nous débattons, de bon nombre de ceux qui ont participé au débat. Je suis toutefois certaine qu’elles liront votre discours et qu’elles le suivront peut-être à l’écran.
José Manuel Barroso, président de la Commission. - (PT) Madame la Présidente, honorables députés, je pense que ce débat était intéressant. J’avais préparé une ou deux réponses à quelques questions précises, mais étant donné que les députés qui les ont posées sont absents, je pourrais y répondre à une autre occasion.
Je voudrais cependant émettre un commentaire général sur la question fondamentale dont nous discutons ici, à savoir la substance et la procédure. Nous avons besoin de ces deux aspects. Nous devons résoudre les problèmes majeurs que nous connaissons en Europe et les problèmes de la mondialisation, mais nous avons aussi besoin des meilleures procédures et institutions. Je ne suis pas d’accord avec les personnes qui cherchent à axer le débat sur l’un de ces aspects. Si nous voulons résoudre les problèmes et que nous voulons relever les principaux défis, nous avons besoin d’institutions plus efficaces, plus démocratiques et plus cohérentes.
Nous devons également résoudre la question constitutionnelle. Que nous qualifiions ou non le Traité de «constitutionnel», nous devons trouver une solution à cette question; c’est ce que je vous demande aujourd’hui, honorables députés, y compris à ceux qui n’ont pas le même enthousiasme que d’autres pour le concept constitutionnel. Je sais que vous partagez le désir de résoudre les problèmes de manière pragmatique. J’espère que vous apporterez votre contribution et que vous aiderez tous les gouvernements de l’UE à trouver une solution concernant tant les procédures que les institutions, car si nous voulons des résultats, nous avons besoin de ces institutions.
Quant à la manière d’associer la société civile et les citoyens au débat sur la question institutionnelle, je voudrais également préciser que la Commission a été active. Avant l’adoption de la déclaration de Berlin, j’ai personnellement rencontré la vice-présidente de la Commission Mme Wallström et les chefs de file du Parlement, ainsi que des représentants de la société civile. Je me félicite de la proposition que la chancelière Merkel a présentée aujourd’hui afin que le Parlement organise une audition de la société civile en mai. La Commission désire soutenir cette initiative si le Parlement mène à bien la proposition.
Nous sommes disposés, en collaboration avec le Parlement, à lancer le débat sur ces questions, tout en garantissant une marge de négociation entre les gouvernements. C’est pourquoi je souhaite soutenir la proposition de la chancelière Merkel.
Concernant l’esprit de solidarité, je voudrais dire, m’adressant en particulier à certains députés qui viennent de formations politiques un peu plus prudentes à l’égard de l’intégration, qu’il ne faut pas oublier que la solidarité joue dans les deux sens. N’oubliez pas que votre pays va probablement avoir besoin un jour, concrètement, de la solidarité des autres pays. Nous devons donc tous faire preuve d’esprit de solidarité, comprendre que c’est seulement dans cet esprit que nous pourrons trouver une solution aux questions institutionnelles, mais surtout aux défis majeurs auxquels l’Europe fait face.
La Présidente. - Je vous remercie, Monsieur le Commissaire.
Le débat est clos.
Déclaration écrite (article 142)
Jean-Pierre Audy (PPE-DE), par écrit. - En qualité de représentant français des citoyens de l’Union au Parlement européen, mes premiers mots seront pour marquer toute ma reconnaissance et mon admiration au président de la République française, mon ami Jacques Chirac, dont la participation à Berlin, ce 25 mars 2007, était son dernier sommet européen en qualité de chef d’État et qui a toujours agi avec lucidité, compétence et humanisme pour une France puissante et indépendante au sein d’une Europe forte et unie.
Si je suis déçu par le fait que les députés européens, qui représentent les peuples et les citoyens européens, n’aient pas été associés à la déclaration de Berlin, je salue la confirmation de la volonté d’aller de l’avant dans la construction européenne, la proclamation de nos valeurs et la fixation de l’échéance politique des élections européennes de 2009 pour la résolution du dossier institutionnel. J’adresse à Angela Merkel, présidente en exercice de l’Union, chancelière d’Allemagne, à mon ami Hans-Gert Pöttering, Président du Parlement européen et à José-Manuel Barroso, Président de la Commission européenne, mes félicitations pour le travail accompli.