La Présidente. - L’ordre du jour appelle le rapport (A6-0089/2007) de M. Adamou, au nom de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire, sur le thème «Enrayer la diminution de la biodiversité à l’horizon 2010 et au-delà» (2006/2233(INI)).
Adamos Adamou (GUE/NGL), rapporteur. - (EL) Madame la Présidente, le rapport sur lequel nous allons voter parle d’enrayer la diminution de la biodiversité à l’horizon 2010. C’est un sujet dont la majorité d’entre nous reconnaît l’actualité et l’importance. C’est aussi la raison pour laquelle si peu d’amendements ont été déposés par mes honorables amis, et c’est également la raison pour laquelle ce rapport a été approuvé à l’unanimité par la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire.
Je voudrais féliciter la Commission pour sa communication, pour son approche conceptuelle, ses objectifs prioritaires pour 2007-2008 et ses mesures de soutien clés. Je dois pourtant faire part, à ce stade, de ma grande inquiétude face à la diminution constante de la biodiversité et au déclin des services écosystémiques qui y est lié.
Je crois que nous reconnaissons tous qu’il est urgent de faire des efforts pour respecter les engagements à enrayer la diminution de la biodiversité dans l’Union européenne à l’horizon 2010.
Le plan d’action est un outil vital, et c’est notre dernière chance de rassembler les acteurs aux niveaux de la Communauté et des États membres sur des actions clés pour respecter les engagements de 2010. Je reconnais cependant que le plan d’action ne suffira pas à conserver la biodiversité et à maintenir les services écosystémiques à long terme.
Je dois également souligner qu’il est particulièrement important que le réseau Natura 2000 soit achevé sur les plans terrestre et maritime et qu’une gestion efficace et un financement adéquat du réseau soient mis en place. Je dois également souligner l’importance d’une mise en application rapide et efficace de la directive-cadre sur l’eau pour obtenir un bon statut écologique des eaux douces.
J’invite instamment les États membres à s’assurer que les projets financés par les Fonds de cohésion et structurels ne nuisent pas à la biodiversité et aux services écosystémiques, mais optimisent les bénéfices pour la biodiversité.
Pour en venir à un autre point, nous devons reconnaître et aborder le fait que les espèces allogènes envahissantes sont une menace majeure pour la biodiversité et que la propagation des espèces allogènes envahissantes est accentuée par la circulation croissante des personnes et des marchandises.
En ce qui concerne le commerce, nul ne peut ignorer l’empreinte écologique du commerce européen sur la biodiversité. J’invite la Commission et les États membres à prendre des mesures immédiates pour adopter des mesures afin d’éviter ou de réduire au minimum les impacts négatifs de ce commerce sur les forêts tropicales. La Commission doit présenter dès que possible une analyse des possibilités de législation pour réduire les importations de bois coupé illégalement.
Le changement climatique est un chapitre très important et un domaine politique séparé de la communication de la Commission. Il est de la plus haute importance de développer une approche écosystémique pour l’adaptation aux changements climatiques, en particulier pour les politiques qui concernent l’utilisation de la terre, de l’eau et de la mer.
Quant au financement, je ne peux cacher ma déception et ma grande inquiétude concernant les contraintes financières pour le soutien aux actions pour la biodiversité résultant des décisions sur le cadre financier. Ce sont les États membres qui doivent saisir toutes les opportunités disponibles dans le cadre de la PAC, la PCP, des Fonds de cohésion et structurels, de LIFE+ et du septième programme-cadre, et allouer les ressources nationales.
Il faut accorder plus d’importance aux besoins financiers dans la révision du budget 2008-2009, lors de laquelle il devrait y avoir une évaluation de la suffisance et de la disponibilité des financements européens pour la biodiversité, en particulier pour Natura 2000.
Je voudrais remercier mes deux honorables amies, Mmes Avril Doyle et Marie Anne Isler Béguin pour leurs amendements, en particulier Mme Béguin pour avoir ajouter l’énergie hydroélectrique, que j’avais oubliée, au paragraphe 67.
Pour finir, Mesdames et Messieurs, j’aimerais attirer votre attention sur les conclusions de l’étude sur la biodiversité demandée au nom de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire: il semblerait que les initiatives visant à enrayer la diminution de la biodiversité soient infructueuses à cause de l’impossibilité de les mettre en œuvre et du manque de volonté politique. Le plan d’action de l’Union européenne pour 2010 est très ambitieux, mais, malheureusement, il ne propose pas de solutions simples au problème de mise en œuvre et au manque de financement et de volonté politique de la part des États membres.
C’est à nous que revient le devoir d’envoyer un message fort et de faire pression sur nos gouvernements pour que les objectifs ambitieux du plan d’action soient atteints.
Joe Borg, membre de la Commission. - (EN) Madame la Présidente, je tiens tout d’abord à m’excuser au nom du commissaire Dimas, qui ne pouvait malheureusement être présent aujourd’hui.
Il y a tout juste un an, la Commission a adopté sa communication intitulée «Enrayer la diminution de la biodiversité à l’horizon 2010 et au-delà». Comme nous fêterons demain la Journée internationale de la biodiversité, le Parlement débat de ce rapport à un moment idéal.
Je suis ravi que le Parlement saisisse cette occasion pour adresser un message clair au monde sur l’importance de protéger la biodiversité de la planète. Le thème de la Journée internationale de la biodiversité de cette année est la «biodiversité et le changement climatique». J’ai dit précédemment et je souhaite souligner aujourd’hui que la diminution de la biodiversité est une aussi grande menace pour la planète que le changement climatique. À l’instar de ce dernier, le déclin de la biodiversité est un problème économique, un problème social et une menace croissante pour la sécurité mondiale. Les deux problèmes sont étroitement liés. Le changement climatique est une force majeure à l’origine de la disparition d’espèces et la perte d’écosystèmes contribue au changement climatique.
La lutte contre le changement climatique est à présent au cœur du projet européen et fait partie des priorités des agendas politiques nationaux. Malheureusement, on ne peut pas en dire autant de la diminution de la biodiversité. La menace est peut-être moins visible, mais si nous prenons le temps d’examiner les faits, la situation est tout à fait préoccupante.
Sous l’effet de l’activité humaine, les taux d’extinction sont déjà 100 à 1 000 fois supérieurs au taux naturel - près de 30 000 espèces par an, soit trois espèces toutes les heures. Si ce processus se poursuit sans entrave, nous aurons effacé des millions d’années d’évolution en l’espace de quelques décennies. Cette réduction spectaculaire des espèces a son importance dans la mesure où elle affaiblit des écosystèmes dont les espèces sont les éléments constitutifs.
L’évaluation des écosystèmes pour le Millénaire effectuée par les Nations unies en 2005 comporte deux grands messages. Le premier, c’est que nous dépendons tous en fin de compte des services écosystémiques comme les matières premières, les médicaments et l’eau salubre pour notre prospérité et notre bien-être. Le second, c’est que les écosystèmes sont fragmentés, dégradés et détruits à un point tel que deux tiers des services que nous recevons des écosystèmes sont en recul. Conjugué aux menaces environnementales comme le changement climatique, à une démographie croissante et à une consommation accrue par habitant, le phénomène a pour effet que les pressions sur les espèces et les écosystèmes s’intensifient.
Si nous ne prenons pas de mesures d’urgence, nous parviendrons bientôt à un stade de changement dangereux et irréversible pour les écosystèmes mondiaux, tout comme nous atteindrons un stade de changement climatique dangereux si nous n’agissons pas. À l’instar du changement climatique, les possibilités de prévenir une évolution dangereuse des écosystèmes s’amincissent rapidement.
La communication sur la biodiversité de l’an dernier constitue la première tentative de l’Union européenne de formuler une réponse cohérente au problème du recul de la biodiversité. Elle doit être considérée comme l’un des documents politiques les plus importants de la Commission Barroso, et l’on compte deux innovations qui revêtent un caractère particulier. La première réside dans le fait que la communication introduit la notion de services écosystémiques dans le débat communautaire. Elle souligne à quel point ces services sont essentiels à notre prospérité et à notre bien-être et établit un lien crucial entre la diminution de la biodiversité et le recul de ces services.
La seconde innovation porte sur le fait que la communication définit un plan d’action très spécifique pour la période 2007-2013. Ce plan d’action est une étape importante dans la mesure où il décrit ce qu’il convient de faire au niveau de la Communauté et des États membres. Ce n’est que grâce à ces mesures complémentaires à ces deux niveaux que nous pourrons accomplir les progrès nécessaires. Le plan d’action explique également ce qu’il convient de faire pour satisfaire aux engagements de l’Union européenne à enrayer la diminution de la biodiversité dans l’UE et à réduire significativement le taux d’extinction dans le monde d’ici 2010. En instaurant un processus d’évaluations régulières à l’aune d’un ensemble d’objectifs bien définis, la Commission et les États membres pourront rendre des comptes sur les résultats de ce processus.
Je suis ravi d’apprendre que le rapport du Parlement se félicite de la communication et de son plan d’action. Je tiens à remercier le rapporteur, M. Adamou, pour ses efforts, ainsi que MM. Berman et Gklavakis de la commission de l’agriculture et du développement rural et de la commission de la pêche pour leurs contributions. Le rapport fait état des réactions tout aussi positives du Conseil, du Comité des régions et du Comité économique et social européen, ainsi que des ONG environnementales. Il existe apparemment un large consensus autour de ce qu’il convient de faire. Le défi consiste à présent à transformer ce soutien politique en actes concrets sur le terrain.
On peut difficilement trouver un débat aussi important pour tout parlement que la survie de la vie sur terre. Je vous exhorte à saisir cette occasion pour adresser un message clair sur la gravité du recul de la biodiversité et la nécessité d’une mise en œuvre complète et vigoureuse, à tous les niveaux, de la communication sur la biodiversité et de son plan d’action.
Thijs Berman (PSE), rapporteur pour avis de la commission de l’agriculture et du développement rural. - (NL) Madame la Présidente, avec cet important rapport de M. Adamou, le Parlement tire la sonnette d’alarme. Le modèle est bien trop connu.
La Commission et le Parlement montrent leur ambition quant à l’environnement; les chefs d’État ou de gouvernement et les ministres suivent en faisant des promesses solennelles et vont même jusqu’à conclure des accords, pour ensuite ne pas débloquer suffisamment de fonds pour les mettre en pratique. Les États membres posent des obstacles là où l’intérêt général de l’Europe réclame des actions. Malgré le consensus de Bruxelles sur les ambitions, elles ne mènent à rien à cause des intérêts à court terme des États membres. Protéger la biodiversité devrait être une priorité dans tous les domaines de la politique.
Du point de vue de la commission de l’agriculture et du développement rural, l’évaluation de la politique agricole en 2008 représentera une nouvelle occasion important d’enrayer la diminution de la biodiversité, bien que cela nécessite un plus grand budget pour le développement rural et un accent plus prononcé sur la protection de la nature et du paysage.
Cela demande également une évaluation critique des mesures dans le cadre de la conditionnalité. Il est après tout merveilleux et logique que les agriculteurs soient payés pour les services qu’ils rendent à l’environnement, dans la mesure où cette initiative prouve son efficacité en termes de biodiversité et de durabilité de l’Europe.
Ioannis Gklavakis (PPE-DE), rapporteur pour avis de la commission de la pêche. - (EL) Madame la Présidente, avant tout, je voudrais faire part de mes plus chaleureux remerciements à M. Adamou pour le travail remarquable qu’il a accompli. Je ne veux cependant pas féliciter les gouvernements nationaux qui ont promis en 2001 de prendre certaines mesures qu’ils n’ont, hélas, pas prises, ce qui a eu pour résultat un déclin croissant de la biodiversité et une diminution des organismes vivants. Comme l’a dit M. Borg, trois espèces disparaissent sur notre planète toutes les heures.
Je vois d’après les statistiques de l’ONU qu’il y a un risque de voir disparaître 54 % des organismes vivant dans les eaux douces de l’Union européenne. Il y a de nombreuses causes à ce déclin, dont les deux plus importantes sont la contamination des eaux et la surpêche. Nous en sommes responsables, tout comme les pêcheurs.
Notre objectif doit être de réduire la contamination des eaux, que ce soit une contamination qui vient de la terre, de l’industrie ou une contamination qui vient de la mer, car nous ne devons pas oublier que, ces 15 dernières années, 55 000 tonnes de pétrole ont été déversées dans la mer Méditerranée, uniquement en raison d’accidents de navigation.
Le deuxième objectif doit être d’augmenter les stocks de poissons. Nous devons comprendre une chose: nous devons pêcher uniquement les quantités de poissons que la mer peut réapprovisionner. Si nous pêchons plus que cette quantité, nous commettons un crime contre l’environnement.
Nous devons également utiliser les bonnes pratiques de la pêche. Nous devons lancer ici un effort mondial pour que les pays tiers adoptent également ces bonnes pratiques de pêche, parce que ceux qui vivent dans le bassin méditerranéen veulent sauver la Méditerranée, mais la Méditerranée baigne les côtes de 27 pays, dont 7 font partie de l’Union européenne, et les pays tiers font bien souvent plus de dégâts.
La surpêche doit être réduite et les bonnes pratiques de pêche doivent être utilisées. Sinon nous commettons un crime contre l’avenir de nos enfants.
John Bowis, au nom du groupe PPE-DE. - (EN) Madame la Présidente, au nom de ma collègue Mme Doyle, notre rapporteur fictif, je tiens à remercier notre collègue, M. Adamou, pour son rapport. C’est un rapport positif qui aborde tous les points appropriés: il évoque le réseau Natura 2000 et les directives Oiseaux et Habitats; il aborde l’application effective de REACH et de la législation sur l’eau et sur les pesticides; il exprime la préoccupation que nous partageons tous concernant les contraintes financières relatives à Natura 2000 et à d’autres actions en faveur de la biodiversité.
Je me félicite également de ce qu’a dit le commissaire Borg dans ce contexte et je reprends en particulier ce qui a été dit sur l’inaction des gouvernements des États membres de l’Union européenne. Notre objectif était 2010 - pas 2010 et au-delà -, mais nous serons loin d’atteindre notre objectif consistant à enrayer la diminution de la biodiversité à cette date, qui n’est plus si lointaine.
Sur le chemin menant à Strasbourg, j’ai lu un article du Times, qui fait à nouveau état de la perte des habitats, de l’usage de pesticides et de l’introduction d’espèces exotiques dont nous avons tant entendu parler. Cet article portait sur les oiseaux - des milliers d’espèces d’oiseaux sont menacées. Dans le monde, 2 033 espèces sont en danger; 86 % des espèces les plus menacées le sont à cause de la disparition ou de la dégradation de leurs habitats, qui s’expliquent par des facteurs comme les barrages, la pêche, la taille des élevages, etc.
Il faut aussi mentionner la problématique des espèces exotiques et Mme Doyle, si elle était présente, parlerait de l’écureuil gris et des dégâts qu’il a occasionnés à l’écureuil roux, une espèce indigène de notre continent, en particulier en Grande-Bretagne, mais à présent aussi en Italie et dans le Nord via la France et l’Espagne. Nous pouvons voir les dégâts causés par la coccinelle asiatique. Nous pouvons voir les crabes chinois. Ils sont là, ils causent des dégâts et ils sont dangereux non seulement pour la santé humaine, mais aussi pour la santé de notre environnement et de nos espèces indigènes naturelles.
Anne Ferreira, au nom du groupe PSE. - Madame la Présidente, chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier M. Adamou pour son rapport et à saluer les mesures et actions qu’il y décline.
Ces mesures sont nombreuses et variées, mais il me semble qu’aujourd’hui, nous gagnerions en clarté et en efficacité en hiérarchisant nos priorités et en ciblant l’urgence de l’urgence, même si cela n’est pas simple. En effet, au fur et à mesure que nous prenons du retard dans l’application de nos décisions, les actions à mettre en œuvre sont, elles, de plus en plus nombreuses et nécessaires. Nous savons en outre qu’en matière d’environnement, tout s’imbrique.
Cela fait quasiment deux décennies que nous avons conscience d’avoir atteint les limites de la biosphère et d’être dans une impasse. Et pourtant, nous ne prenons pas, concrètement, les décisions fortes que nous prônons dans nos textes, malgré des perspectives de plus en plus alarmantes.
La protection de la biodiversité, cela a été dit, doit se faire à tous les niveaux des politiques publiques: transports, agriculture, aménagement du territoire, tourisme, pêche, etc. Nous le savons aussi, et pourtant Cardiff est bien enfoui dans les tiroirs de la Commission. Espérons que, dans le cadre du travail qui sera mené au sein de la commission temporaire sur le changement climatique, le lien de cause à effet qui existe entre ce phénomène et la perte de biodiversité permettra de faire avancer les choses.
Enfin, je voudrais souligner un point particulier du rapport de M. Adamou concernant les OGM. Je soutiens fortement la demande adressée à la Commission d’évaluer leur incidence sur les écosystèmes et les risques potentiels qu’ils font courir à la biodiversité.
N’oublions pas que l’homme fait partie de la biodiversité. Alors, comme vous venez de le dire, Monsieur Borg, et puisque ce soir nous jouons la même partition dans cette enceinte, agissons, agissez, mettons en œuvre notre plan d’action, et que l’Union européenne soit enfin exemplaire!
Chris Davies, au nom du groupe ALDE. - (EN) Madame la Présidente, je tiens tout d’abord à dire quelques mots pour saluer les progrès que nous avons accomplis dans l’Union européenne. Nous avons interdit certains produits, pesticides et pratiques; nous avons assaini nos cours d’eau et nous avons protégé des zones importantes contre tout nouvel aménagement, et les résultats sont là. Par exemple, en Grande-Bretagne, les milans royaux et les rapaces sont plus nombreux sous nos cieux, les loutres reviennent dans nos rivières, mais comme c’est si souvent le cas, nous faisons un pas en avant et trois pas en arrière. La destruction des habitats se poursuit, les espèces exotiques envahissantes font des ravages et, bien trop souvent, notre propre activité fait des victimes.
Parfois, nous sommes totalement fautifs, l’exemple classique étant la manière dont nous dépouillons nos mers - selon le principe loin des yeux, trop souvent loi du cœur -, et nos politiques les concernant, comme le commissaire Borg le sait mieux que quiconque, sont tout simplement non durables et risibles. Parfois, les dégâts sont involontaires. Par exemple, la modification des pratiques agricoles n’a pas pour but d’éradiquer des espèces d’oiseaux, mais c’est pourtant l’une de ses conséquences dans certains cas, et nous attendons avec intérêt de voir si les effets de la réforme de la politique agricole commune produiront des résultats positifs.
Parfois, nous ne savons pas qui est responsable, mais en tant que décideurs politiques, nous évitons cependant d’adopter le principe de précaution. Comment expliquer autrement la mauvaise décision des États membres qui ont voté le rejet des plans de la Commission visant à la reconstitution des stocks d’anguilles, dont le nombre a chuté de manière catastrophique? Des considérations à court terme comme celles-ci font que certaines espèces sont trop souvent proches de l’extinction.
Fixer un objectif pour enrayer la diminution de la biodiversité est simple - surtout quand on a neuf ans pour y parvenir; il n’y a rien de plus simple au monde que de fixer un objectif à long, très long terme. Mais aujourd’hui, la date butoir approche à grands pas et il faudra prendre quelques décisions difficiles si l’on entend réaliser l’objectif fixé. Maintenant qu’ils ont exécuté plus de la moitié de leur mandat, je crois que certains commissaires peuvent commencer à entrevoir la fin de leur mandat. J’espère qu’ils exploiteront à bon escient le temps qu’il leur reste. Les décisions fondées sur des opportunismes politiques à court terme seront vite oubliées. Par contre, les mesures fermes destinées à inverser les tendances négatives et à protéger les espèces seront reconnues par l’histoire.
Marie Anne Isler Béguin, au nom du groupe Verts/ALE. - Madame la Présidente, je voudrais, tout d’abord, également féliciter notre rapporteur pour l’excellence de son travail. Bien sûr, l’intitulé est très ambitieux: comment enrayer la diversité, la disparition des espèces végétales et animales d’ici 2010 et au-delà? On aimerait tant y croire!
Mais nous savons combien, à court terme, il est difficile de mettre en musique les différents instruments européens et multilatéraux, dont nous écrivons la partition tous les jours ici. À l’heure où l’attention des citoyens et des médias est focalisée sur le changement climatique, il est nécessaire de rappeler l’importance de la biodiversité, car, contre le changement climatique, il n’y a pas de meilleure stratégie que de favoriser l’évolution dynamique des écosystèmes: M. le commissaire l’a très bien rappelé il y a quelques instants.
Vous l’aurez compris, la diversité biologique implique une approche dynamique et quand on raisonne la diversité biologique in situ en Europe, on décline la préservation des espèces végétales et animales à partir des territoires dont la gestion et l’aménagement se définissent au plus près des populations locales. Dans cet esprit, la volonté politique et la capacité gouvernementale d’ouvrir le dialogue sont impératives pour développer et soutenir des réseaux d’exception environnementale, comme Natura 2000.
À l’opposé, la gestion ex situ de la diversité biologique évoque plutôt une pratique conservatoire des espèces animales et végétales. Au-delà des collections, poussiéreuses dirais-je, de nos muséums, la conservation ex situ, telle que nous la concevons aujourd’hui, veut, bien sûr, éviter le pire en conservant le matériel génétique dans des centres agronomiques: on le mettrait à l’abri, prétendument. Mais pour ma part, je m’interroge sur le financement des groupes consultatifs pour la recherche agricole internationale et sur son fonctionnement, qui doit intégrer des communautés locales et autochtones.
En conclusion, je voudrais souligner, bien sûr, l’importance, pour nos populations et pour nos territoires, d’une bonne mise en œuvre des réglementations européennes, parce que nous savons que tout se tient et, par exemple, la directive-cadre sur l’eau doit être appliquée. En matière de biodiversité, l’eau est un médium qui assure depuis l’amont la dynamique des écosystèmes. Pour cette raison, il est essentiel de s’assurer de la non-détérioration des eaux douces plutôt que de se référer à une vague notion de bon état écologique.
Justas Vincas Paleckis (PSE). - (LT) Madame la Présidente, je rejoins le rapporteur et tire également la sonnette d’alarme. Pendant les trois décennies précédant l’année 2000, la diversité des espèces animales et végétales dans le monde a diminué de 40 %. À cette époque, l’Union européenne avait décidé d’enrayer la diminution de la diversité biologique à l’horizon 2010. Le temps presse. Si nous ne réussissons pas à arrêter l’extinction des espèces animales et végétales dans le monde, nous devrons lever le drapeau blanc et admettre que l’activité humaine détruit la nature et que notre soif de profit et de plaisir sans limite peut détruire le genre humain lui-même.
Dans de nombreux nouveaux États membres de l’UE, on constate un manque d’information au sujet de la disparition des espèces animales et végétales et à propos de l’importance de ce problème. Malgré la mise en place de projets financés par les Fonds de cohésion et structurels, il y a rarement des réflexions ou des discussions sur la façon d’éviter de nuire à la biodiversité. La Commission européenne devrait étendre le réseau du territoire «Natura 2000» et y inclure les 12 nouveaux États membres. La biodiversité y est généralement plus vaste que dans les anciens États membres de l’UE; il est donc essentiel de la protéger en l’utilisant pour un tourisme «vert».
Les citoyens européens doivent comprendre les avantages à tirer de la diversité biologique et des écosystèmes. Il faut tenir compte du fait que la réduction de la diversité a un effet sur la production de nourriture, de carburant, de matières et de médicaments, sur la régulation de l’eau, de l’air et du climat, sur la conservation de la fertilité des terres agricoles et sur la circulation des denrées alimentaires. Malheureusement, nous vivons en ce moment à crédit et nous dépossédons nos enfants et nos petits-enfants, qui pourraient se trouver dans un monde de plus en plus aride dans lequel ils ne pourront voir les créatures qui ont existé uniquement dans des musées, sur des photos ou dans des films.
La Commission a raison de proposer l’intégration de la diversité biologique et l’attention aux écosystèmes dans les politiques et les programmes de tous les domaines importants, de même que la protection de la diversité biologique des océans et la diminution de la pollution dans le secteur agricole. Il faut beaucoup d’aide financière et d’attention pour cela. Les moyens utilisés pour lutter contre le changement climatique ne doivent pas nuire à la biodiversité. L’UE doit montrer un exemple encore plus clair au monde sur la façon dont la croissance économique peut être combinée avec la protection de l’environnement naturel et la préservation des espèces animales et végétales.
Joe Borg, membre de la Commission. - (EN) Madame la Présidente, je tiens tout d’abord à dire combien j’apprécie la qualité du débat de ce soir. Je suis aussi très encouragé par le rapport et je tiens à commenter plus particulièrement trois points.
Tout d’abord, vous vous êtes félicités de l’approche conceptuelle de la communication, qui met l’accent sur le lien entre la diminution de la biodiversité et le recul des services écosystémiques. Vous reconnaissez l’importance vitale d’écosystèmes sains pour la prospérité et le bien-être. Vous affirmez que le maintien des services écosystémiques doivent devenir un objectif fondamental de toutes les politiques horizontales et sectorielles de l’UE et vous appelez la Commission à examiner et soumettre des mesures pratiques visant à internaliser les coûts de la réduction de la biodiversité.
Nous travaillons déjà à ces questions et je tiens à souligner une nouvelle initiative de la Commission et de la présidence allemande consistant à élaborer une étude économique des coûts de la perte de biodiversité semblable à l’étude Stern sur les aspects économiques du changement climatique. Je crois que cette étude pourrait marquer un tournant. En sensibilisant aux coûts de l’inaction, nous pourrons attirer l’attention du public sur la nécessité d’une action sans précédent pour enrayer la diminution de la biodiversité.
En second lieu, je tiens à mettre en exergue vos avis sur les thèmes de la biodiversité et du changement climatique. Vous soulignez l’importance d’une approche écosystémique de l’adaptation au changement climatique.
Troisièmement, vous reconnaissez que le plan d’action est un outil crucial pour réunir les acteurs concernés au niveau de la Communauté et des États membres et respecter ainsi les engagements à l’horizon 2010. Ce qui compte maintenant, c’est la mesure dans laquelle ce plan d’action sera réellement mis en œuvre.
À propos du point souligné par le rapporteur concernant les espèces exotiques, je tiens à dire que les travaux sont en cours et, si l’on parvient à identifier les vides justifiant de nouvelles législations au niveau communautaire, alors nous examinerons en temps voulu la nécessité de soumettre des propositions. De fait, dans ma sphère de compétences, une proposition de règlement du Conseil sur l’utilisation d’espèces exotiques dans l’aquaculture est prête à être adoptée.
En ce qui concerne les financements, je tiens à dire qu’en 2004, la Commission a proposé que le futur cofinancement communautaire de Natura 2000 soit intégré aux principaux instruments financiers. Par ailleurs, des dispositions ont été prises concernant le financement de la biodiversité de la nature par LIFE+, par les fonds communautaires de coopération au développement international et par le septième programme-cadre de recherche. Je me permets toutefois de souligner que la communication relève que la décision financière du Conseil européen de décembre 2005 influe sur les fonds disponibles dans le cadre de ces instruments. Il affirme clairement que les États membres devront également garantir un financement adéquat via leurs ressources propres.
Concernant l’objectif consistant à enrayer la diminution de la biodiversité dans l’UE d’ici 2010, même si cette date approche rapidement, il est toujours possible de le réaliser, mais il faudra une mise en œuvre accélérée au niveau de la Communauté et des États membres.
En ce qui concerne la pêche, qui est de ma compétence, je suis on ne peut plus d’accord avec M. Gklavakis que nous avons besoin d’une pêche durable, et nous devons travailler dans la même direction à la fois dans les eaux communautaires et dans les océans et mers internationaux. Je tiens à dire à cet égard que les objectifs et actions en faveur de la biodiversité dans le domaine de la politique de la pêche tels qu’ils sont énoncés dans la communication sont pleinement en phase avec la politique commune de la pêche et que la plupart figurent déjà dans notre programme de travail pour les années à venir. Je peux citer un certain nombre d’exemples de la contribution de la politique commune de la pêche à la protection de la biodiversité, par exemple les plans de reconstitution de plusieurs stocks halieutiques, les limitations des captures et de l’effort de pêche, la législation visant à protéger les cétacés contre les prises accessoires et la protection des habitats comme les récifs coralliens pélagiques. En outre, le règlement sur la Méditerranée adopté l’an dernier comporte des dispositions importantes destinées à réduire l’impact de la pêche sur les fonds marins.
D’autres mesures sont en préparation. Je peux vous citer la communication de mars 2007 concernant la réduction graduelle des prises indésirées et l’élimination des rejets dans les pêcheries européennes. Elle prévoit l’adoption d’une interdiction progressive des rejets pêcherie par pêcherie et la fixation de normes applicables aux prises accessoires maximales admissibles.
Les travaux avancent également concernant l’extension du réseau Natura 2000 aux zones marines en concertation avec la DG Environnement ainsi que la lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée.
S’agissant des stocks d’anguilles, j’entends revenir au Conseil en juin et je conviens que, cette fois-ci, il faut adopter le règlement sans l’édulcorer davantage.
La Présidente. - Le débat est clos.
Le vote aura lieu le mardi 22 mai.
Déclarations écrites (article 142)
Gyula Hegyi (PSE), par écrit. - (HU) Personne ne sait exactement combien de formes vivantes existent sur Terre, mais on estime qu’il y a environ 20 à 30 millions dont nous connaissons à peine 1,8 million. Malheureusement, de nombreuses espèces se sont éteintes à cause des ravages de la civilisation avant que nous ayons eu la possibilité de les découvrir. Dans l’histoire humaine, la diminution de la diversité n’a jamais été aussi importante qu’au siècle dernier. Les recherches montrent que, chaque année, 140 000 espèces disparaissent de la surface de la Terre. La responsabilité de ces extinctions incombent à part entière à l’activité humaine: la destruction des forêts et de l’eau, la pollution du sol et de l’air. Selon un récent rapport, entre 20 et 30 % de toutes les espèces végétales et animales pourraient disparaître si l’augmentation de la température mondiale dépasse 2,5°C.
Il est par conséquent essentiel que la Commission européenne propose une stratégie à long terme qui mettra réellement fin à la diminution de la biodiversité. Dans l’intérêt de cet effort, il importe qu’un financement direct provenant de sources communautaires soit octroyé aux programmes Natura 2000 dès que possible puisqu’ils ont été mis en place pour protéger la biodiversité. En Hongrie également, il est crucial que les propriétaires des terres auxquelles la protection de Natura 2000 a été étendue ne soient pas déçus par l’Union européenne.
Véronique Mathieu (PPE-DE), par écrit. - La biodiversité, plus qu’une priorité, est une nécessité et il convient d’agir rapidement afin d’enrayer la diminution de la biodiversité d’ici 2010.
L’Union européenne est la première à se fixer de véritables objectifs dans ce domaine, souhaitons qu’elle donne l’exemple au reste du monde. Le développement durable, la chasse durable, ne sont pas seulement des termes qui ont le vent en poupe, mais ceux sont bien le symbole d’une évolution des pratiques industrielles, de production et du monde cynégétique.
Les chasseurs et les organisations cynégétiques n’ont d’ailleurs pas attendu l’Union européenne, les parlementaires et encore moins ce rapport pour se fixer des obligations en matière de respect des espèces et espaces; notamment grâce aux fondations de protection des habitats et de la faune sauvage qui mènent des actions efficaces depuis déjà plusieurs années.
C’est pourquoi, je tiens à ce que la chasse ne soit pas stigmatisée, mais au contraire soutenue dans ses efforts de bonne gestion environnementale.
Je ne peux, à ce titre, que regretter la formulation de l’article vingt, qui rend la chasse en partie responsable de la dégradation de la biodiversité, ne prenant ainsi pas en compte l’existence d’une chasse durable.