La Présidente. - L’ordre du jour appelle le débat sur six propositions de résolution sur la Birmanie(1).
Marios Matsakis (ALDE), auteur. - (EN) Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, la Birmanie est un thème récurrent de nos débats sur les violations des droits de l’homme. Si nous avions un Prix du régime ayant le pire des palmarès en matière de droits de l’homme, la Birmanie serait certainement un concurrent très sérieux. Soit dit en passant, la Birmanie bat aussi des records dans une autre infamie: les drogues. D’après le rapport 2006 de l’International Narcotics Central Strategy, la Birmanie est le deuxième producteur mondial d’opium illégal, fournissant plus de 90 % de l’héroïne du Sud-Est asiatique. J’ignore comment les violations des droits de l’homme peuvent bien être liées à la production de stupéfiants en Birmanie, mais je sais que toutes deux devraient être traitées avec fermeté, rapidité et efficacité.
Malheureusement, il semble que la position de l’UE - comme celle de la communauté internationale - contre le régime birman n’ait pas été suffisamment intransigeante pour avoir le moindre effet positif. Le fait que le Conseil ait récemment autorisé le ministre birman des affaires étrangères à assister à la réunion du sommet Asie-Europe, quelques jours seulement après la prolongation, par la junte militaire birmane, de l’affligeante assignation à résidence de Mme Aung San Suu Kyi, en est un bon exemple. Le Conseil a le devoir de donner une explication de son action. Un autre exemple est le fait qu’un embargo sur les armes à destination de la Birmanie est largement inefficace, puisque des pays comme la Chine et l’Inde n’y adhèrent pas. Il est certain qu’il faut faire pression sur ces pays pour qu’ils se joignent à l’embargo sur les armes contre la Birmanie.
Pour conclure, permettez-moi de répéter notre appel à la cessation immédiate de l’assignation à résidence de Mme Aung San Suu Kyi. Cette femme remarquable a énormément contribué à la paix et à la démocratie, non seulement en Birmanie, mais dans le monde entier, et elle a reçu le Prix Nobel de la paix et notre Prix Sakharov. Il est vraiment infâme et honteux qu’elle ait passé plus de 11 des 17 dernières années en détention dans son propre pays. Les appels internationaux et de l’UE en faveur de sa libération n’ont eu aucun effet. Notre patience est à bout. Nous recommandons maintenant la prise de mesures plus drastiques, comme le renforcement des sanctions et l’allongement de la liste de ceux qu’elles visent.
Zdzisław Zbigniew Podkański (UEN), auteur. - (PL) Madame la Présidente, l’Union européenne a adopté une attitude ferme contre les abus perpétrés par le régime militaire en place en Birmanie. L’Europe demande instamment que la Birmanie améliore son bilan en matière de droits de l’homme et se rallie à la démocratie.
Les autorités birmanes continuent à emprisonner et à persécuter des militants œuvrant pour la démocratie. Il existe selon moi deux solutions pour améliorer la situation dans ce pays. La première implique que la Chine et l’Inde arrêtent de lui fournir des armes et d’autres équipements stratégiques. La seconde requiert que les entreprises étrangères investissant en Birmanie respectent les droits de l’homme. Il importe également de développer des programmes de soutien à la société civile birmane, notamment aux organisations d’aide aux femmes et aux minorités ethniques.
Je représente le groupe Union pour l’Europe des Nations. Nous soutenons toutes les initiatives visant à la protection des droits de l’homme et au respect des principes de l’État de droit et des libertés démocratiques, y compris la liberté d’association et la liberté d’expression. Nous ne cesserons de le faire. Nous voudrions attirer l’attention sur la situation financière de la population birmane. Plus de 15 millions de Birmans vivent sous le seuil de pauvreté, soit environ 30 % de la population. Une assistance immédiate est requise pour protéger la vie et la santé de ces personnes.
Marc Tarabella (PSE), auteur. - Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, chers collègues, je me suis souvent exprimé dans cet hémicycle sur la situation en Birmanie et les mots répression, junte militaire au pouvoir, droits de l’homme bafoués émaillaient déjà mon discours.
La résolution que nous allons voter aujourd’hui est un appel à la Birmanie afin qu’elle mette un terme à certains agissements. Avec mes collègues, je déplore, notamment et principalement, l’assignation à résidence, depuis le 30 mai 2003, d’Aung San Suu Kyi, l’opposante birmane qui a fêté ses 62 ans ce mardi et qui a passé onze des dernières dix-sept années en détention, principalement assignée à résidence. Elle n’a pu quitter sa demeure qu’une seule fois, pour des raisons de santé impliquant des soins urgents, et n’a que peu de contacts avec l’extérieur. Aung San Suu Kyi est l’emblème de l’opposition birmane à la dictature militaire; elle a d’ailleurs reçu le prix Nobel en 1991. Il est absolument inadmissible qu’elle soit assignée à résidence. C’est pourquoi nous réclamons sa libération immédiate et inconditionnelle.
La Birmanie doit absolument cesser de persécuter et de mettre derrière les barreaux les activistes pro-démocrates et elle doit relâcher ceux qui sont déjà en prison. Je pense en particulier à U Win Tin, un journaliste qui aujourd’hui, à 77 ans, est emprisonné depuis bientôt 20 ans pour avoir écrit aux Nations unies une lettre dénonçant les mauvaises conditions de détention dont étaient victimes les prisonniers politiques.
En tant que vice-président de la délégation ANASE au sein de ce Parlement, je mesure le rôle croissant que peut jouer cette organisation dans la région. Puisse-t-elle avoir dans un avenir proche une influence positive sur le gouvernement birman!
Charles Tannock (PPE-DE), auteur. - (EN) Madame la Présidente, la Birmanie affiche le pire palmarès mondial en matière de non-respect des droits de l’homme et d’absence de démocratie, de trafic d’êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle, de service domestique et autre type de travail forcé. Cette situation est encore aggravée par la calamiteuse gestion économique de la junte militaire au pouvoir. La Birmanie reste également le deuxième plus gros producteur d’opium illégal.
Malgré les élections multipartites de 1990, qui ont été remportées par le NLD, la junte militaire répressive continue à refuser de transmettre le pouvoir. Le leader du NLD et lauréat du Prix Nobel de la paix, Mme Aung San Suu Kyi, dont c’était le 62e anniversaire mardi, a été maintenue en détention pendant plus de 11 des 18 dernières années. En février 2006, la junte a prolongé sa détention d’une année supplémentaire. Ses partisans, ainsi que ceux qui militent pour la démocratie et les droits de l’homme, sont continuellement harcelés ou incarcérés dans ce pays où le pouvoir judiciaire n’est pas indépendant et où les forces de police appliquent la loi avec brutalité.
Suite au récent - et scandaleux - refus du Conseil de sécurité des Nations Unies d’appliquer des sanctions contre la Birmanie, le Conseil des Nations Unies pour les droits de l’homme s’est concentré presque entièrement et exclusivement sur un seul pays - Israël - en ignorant la Birmanie. Avec les pays voisins de l’ANASE, ainsi qu’avec l’Inde et la Chine, l’UE doit maintenant exercer davantage de pressions pour obtenir la libération de Mme Aung San Suu Kyi.
Raül Romeva i Rueda (Verts/ALE), auteur. - (ES) Madame la Présidente, comme d’autres députés l’ont souligné avant moi, et comme ne cessent de le répéter les rapports du représentant spécial des Nations unies pour la question des droits de l’homme en Birmanie, M. Paulo Sergio Pinheiro, et les rapports de la représentante spéciale du Secrétaire général des Nations unies pour les défenseurs des droits de l’homme, Hina Jilani, la situation en Birmanie reste préoccupante et se détériore de jour en jour.
Je voudrais d’abord évoquer les nombreux appels que nous avons lancés à diverses occasions au sein de ce Parlement et que nous devons réitérer aujourd’hui. La décision de prolonger d’un an la détention d’Aung San Suu Kyi est tout à fait inacceptable, et nous devons exiger de la part du régime birman qu’elle soit libérée dans les meilleurs délais. Il importe également que nous demandions au régime birman de libérer tous les prisonniers politiques et de garantir la liberté d’expression et la liberté de manifestation, qui sont actuellement violées dans ce pays.
Néanmoins, j’estime qu’il importe également de rappeler notre responsabilité en tant que pays occidentaux à l’égard de ce pays, en termes d’investissement, et j’aborde ce sujet en raison de deux aspects décisifs au moins.
Premièrement, n’oublions pas que la Birmanie possède l’une des réserves de gaz naturel les plus importantes, pour ne pas dire la plus importante, de l’Asie du Sud-Est. Cela constitue bien sûr un atout pour le moins attrayant. Il est par conséquent essentiel que nous puissions garantir, avant l’arrivée d’investisseurs étrangers, la réalisation d’au moins une étude d’impact de ces investissements sur les droits de l’homme. C’est un aspect que nous oublions trop souvent.
Deuxièmement, il importe également de signaler que les sanctions actuellement imposées par les États-Unis et les restrictions de l’Union européenne ne s’avèrent guère efficaces. La nette hausse des investissements d’autres pays asiatiques dans ce pays nous oblige à adopter une approche régionale du problème afin de garantir que nos actions, et celles de nos alliés, soient plus efficaces.
James Nicholson, au nom du groupe PPE-DE. - (EN) Madame la Présidente, je réitère la condamnation du régime birman, qui est exprimée si clairement et efficacement dans la résolution.
Peu d’êtres humains seraient capables de résister au calvaire que Mme Aung San Suu Kyi subit depuis 17 ans. De manière désintéressée, elle a résisté à l’emprisonnement sans fin et à la séparation permanente d’avec les êtres qui lui sont chers, en faisant pourtant preuve d’un courage et d’une constance imperturbables au service de sa cause, et hommage doit lui être rendu pour cela. Elle est incontestablement un leader de notre temps, supportant la suppression de ses libertés civiles, reflet de l’oppression de ses compatriotes. Les violations des droits de l’homme en Birmanie vont jusqu’aux persécutions religieuses, au travail forcé et à la détention arbitraire et sont des faits de violence politique que les Nations unies ont condamnés récemment à juste titre.
Les signataires de la présente résolution dénoncent avec vigueur le soutien économique apporté au régime par le biais des investissements d’autres pays d’Extrême-Orient dans le commerce des armes et l’industrie énergétique, qui ne font que mettre en lumière cette impitoyable dictature. Toutes les démocraties devraient reconsidérer sérieusement leurs financements en faveur d’un pays dont les dépenses de santé comptent parmi les plus faibles du monde.
Lidia Joanna Geringer de Oedenberg, au nom du groupe PSE. - (PL) Madame la Présidente, six mois ont passé depuis la dernière résolution du Parlement européen qui envoyait un avertissement concernant la gravité de la situation intérieure en Birmanie. Les autorités militaires au pouvoir dans ce pays n’ont pourtant accompli aucun progrès vers la démocratie.
La situation économique de la Birmanie est une source importante de préoccupations. Trente pour cent de la population y vivent sous le seuil de pauvreté et les droits de l’homme y sont ouvertement violés. En outre, le travail forcé et l’enrôlement d’enfants soldats y sont monnaie courante. Des militants de l’opposition sont persécutés et emprisonnés pour de longues périodes, à l’image de Aung San Suu Kyi, lauréate du prix Nobel de la paix et du prix Sakharov, qui est détenue depuis 17 ans.
Dans ce contexte, tous les groupes politiques de Birmanie devraient être exhortés à prendre part à la convention nationale convoquée pour rédiger une nouvelle Constitution. Les représentants de la Ligue nationale pour la démocratie devraient également y participer. L’appartenance de la Birmanie à l’ANASE est particulièrement importante pour l’avenir du pays, alors que les membres de l’ANASE sont invités à redoubler d’efforts sur la voie de la démocratie.
La Chine et l’Inde devraient exercer des pressions politiques et économiques sur le régime birman en refusant de soutenir l’armée de Birmanie. De son côté, la communauté internationale devrait appliquer des sanctions économiques et geler les actifs des membres du gouvernement de Birmanie et de leurs associés. Ce n’est qu’en prenant des mesures décisives de cette nature que nous pouvons espérer contraindre le régime birman à introduire des changements démocratiques.
Urszula Krupa, au nom du groupe IND/DEM. - (PL) Madame la Présidente, la situation politique et sociale en Birmanie est à nouveau au cœur du débat d’aujourd’hui sur les violations des droits de l’homme. Depuis 1962, la Birmanie est dirigée de main de fer par des forces militaires.
Depuis plus de 40 ans, les droits de l’homme sont violés dans ce pays asiatique, et des milliers de personnes ont été persécutées et punies pour leurs activités dans l’opposition. Nombre d’entre elles sont en prison. Le travail forcé est monnaie courante et des enfants sont enrôlés dans l’armée. La plupart des citoyens birmans n’ont pas accès aux soins médicaux. Beaucoup meurent de la tuberculose, du paludisme, du HIV ou du sida, et près de la moitié des enfants ne sont pas scolarisés. Les bureaux de la Croix Rouge ont été fermés et les plus démunis sont privés de protection et d’aide humanitaire. La junte ignore les actions du Conseil des droits de l’homme des Nations unies et du BIT. Elle ne répond pas non plus aux résolutions du Parlement européen et aux documents émis par le Conseil de la Communauté européenne.
Le 15 mai 2007, l’assignation à résidence d’Aung San Suu Kyi a été prolongée d’un an. Cette lauréate du prix Nobel et militante de l’opposition a passé 11 des 17 dernières années en prison ou assignée à domicile. Nous demandons sa libération et celle d’autres prisonniers politiques. Nous exigeons également que la Ligue nationale pour la démocratie soit autorisée à reprendre ses activités, ainsi que le rétablissement de l’aide humanitaire afin d’empêcher l’extinction de la nation birmane et des minorités ethniques.
L’inefficacité des mesures prises par les organismes internationaux est l’une des raisons de la survie de ce régime et d’autres régimes de nature totalitaire. En dépit des promesses affirmant le contraire, les sanctions imposées n’ont pas d’impact sur les structures économiques des régimes et les embargos touchent des citoyens ordinaires qui sont déjà persécutés et vivent dans une pauvreté extrême. Les résolutions du Parlement européen et toutes les autres initiatives resteront superficielles et inefficaces tant que ces problèmes ne seront pas résolus.
László Kovács, membre de la Commission. - (EN) Madame la Présidente, la Commission reste préoccupée par la situation en Birmanie. Le plus gros souci concerne les profondes failles sociales et ethniques qui divisent le pays et sont à l’origine de l’insécurité, de la pauvreté généralisée et du blocage du développement économique et social. Dans un tel climat d’insécurité, et avec les conflits armés permanents dans certaines zones frontalières, il est évident qu’il reste peu de place pour le respect des droits de l’homme.
Les autorités birmanes sont confrontées à plusieurs défis: l’établissement de l’unité nationale et la stabilité politique et, surtout, l’élévation du niveau de développement de leur pays, qui reste l’un des plus pauvres du monde. Pour la communauté internationale, favoriser la transition de la Birmanie vers une société plus ouverte et plus développée - et dirigée par un gouvernement légitime et civil - devrait rester l’objectif majeur.
La gouvernance erratique de la junte militaire se poursuit, tant en termes économiques que politiques. Les militaires continuent à recourir à la pratique du travail forcé, tandis que la société continue à subir la répression, l’incertitude et les difficultés opérationnelles. Ceux que l’on a appelés les «étudiants de 88» - les leaders du soulèvement de 1988 - continuent à exploiter autant qu’ils le peuvent l’espace minimal restant de société civile, tandis que la Ligue nationale pour la démocratie est marginalisée et que la détention injustifiable de Mme Aung San Suu Kyi se poursuit.
La transition est difficilement imaginable, avec plus d’un millier de détenus politiques, parmi lesquels Mme Aung San Suu Kyi, considérée comme l’icône de la paix et de la réconciliation. Une telle transition est également inconcevable sans un véritable dialogue avec les divers groupes ethniques, y compris ceux qui persistent dans la lutte armée.
La Commission soutient le travail du professeur Paolo Sergio Pinheiro, le rapporteur spécial des Nations unies sur les droits de l’homme en Birmanie. Dans sa dernière déclaration, il a indiqué que «des violations graves des droits de l’homme sont permises, non seulement dans l’impunité, mais autorisées par la loi». La Commission salue également la nomination par le secrétaire général des Nations unies du professeur Ibrahim Gambari comme envoyé spécial en Birmanie et espère que le gouvernement acceptera également de coopérer pleinement avec lui, de manière à permettre la continuation des bons offices du secrétaire général des Nations unies.
En ce qui concerne la prochaine session de la Convention nationale, nous appelons le gouvernement à écouter les voix des groupes ethniques et des acteurs politiques de l’opposition. Nous constatons des progrès dans les conditions de travail de l’agence locale de l’Organisation internationale du travail, ce qui permettra d’améliorer, nous l’espérons, la situation des victimes des pratiques de travail forcé ayant déposé plainte. Mais nous déplorons la détérioration des conditions de travail du comité international de la Croix-Rouge (CICR) et nous appelons le gouvernement à autoriser le CICR à reprendre sa mission humanitaire.
La plupart des observateurs s’accordent généralement pour dire qu’il faudrait en faire davantage pour la situation politique et socio-économique. Dans sa position commune, l’Union européenne a mandaté la Commission pour engager le gouvernement à ouvrir le dialogue sur ses responsabilités en matière de réalisation des objectifs de développement du millénaire. En conséquence, l’UE a cherché à élaborer des politiques efficaces susceptibles d’aider la population birmane et de favoriser son retour au sein de la communauté internationale. Le fonds pour les trois maladies, soutenu par l’UE et ses partenaires, est un exemple de cette politique.
Notre approche est axée sur les besoins les plus élémentaires et les plus urgents de la population en matière de sécurité, et nous reconnaissons clairement les limites qui freinent tous les acteurs extérieurs. Toutefois, retenir l’aide et contribuer à augmenter l’isolement revient tout simplement à faire payer le prix de la situation à la population, c’est-à-dire au peuple de Birmanie qui souffre déjà tant. Nous ne pensons vraiment pas que des sanctions supplémentaires puissent soulager la souffrance de la population. De plus, une telle approche ne nous aiderait pas à influencer les chefs militaires.
La Commission est pleinement engagée à renforcer ses programmes en Birmanie, en termes quantitatifs et qualitatifs, en vue de contribuer efficacement au développement et à la réconciliation.