Le Président. – L'ordre du jour appelle la question orale à la Commission sur la création de blocs d'espace aérien fonctionnels pour l'établissement du ciel unique européen (COM(2007)0101 final) de Paolo Costa, au nom de la commission des transports et du tourisme (O-0035/2007 - B6-0135/2007).
Gilles Savary (PSE), auteur. – Monsieur le Président, il faut d'abord rendre à César ce qui lui appartient, ou à un autre Italien, c'est-à-dire à Paolo Costa, qui est en réalité le véritable auteur de cette question écrite et qui m'a demandé de bien vouloir me substituer à lui en son absence et devant vous pour la poser.
Il s'agit d'une question orale avec débat à la Commission sur l'état des lieux en matière de création de blocs d'espace aérien fonctionnels pour l'établissement du ciel unique européen, autrement dit, sur les intentions de la Commission eu égard à la mise en œuvre, ou à l'état d'avancement de la mise en œuvre tel que l'on peut le constater aujourd'hui, du paquet de textes qui avait donné lieu à une conciliation en décembre 2003 et que l'on a appelé "le paquet ciel unique".
Un de ces textes prévoyait le réagencement des blocs d'espace fonctionnels, c'est-à-dire des routes des avions de ligne aux différents étages de l'espace aérien, afin d'optimiser la consommation, de réduire les gaz à effet de serre et, si possible, de réduire l'encombrement des aéroports les plus sollicités, sans oublier la possibilité de faire baisser le coût du transport aérien. Le dossier est particulièrement sensible, avec des réticences des États membres qui ont toujours réaffirmé leur souveraineté sur leur espace aérien. C'est en particulier le cas des États membres – et j'en connais un qui m'est cher, celui dont je suis originaire – qui disposent d'une force militaire importante et de blocs d'espace militaire réservés de façon quasi discrétionnaire.
La préoccupation de Paolo Costa est que ce texte – un des quatre sur le ciel unique – sur le réagencement des blocs d'espace n'a, semble-t-il, pas avancé, ainsi que l'on pouvait le craindre, et qu'il a fait l'objet de très grandes résistances de la part des États membres. La question qui est donc posée par Paolo Costa à la Commission est la suivante. Une communication vient d'être produite par la Commission qui avoue clairement que le coût de l'absence de blocs d'espace aérien fonctionnels pour l'établissement du ciel unique européen s'élève environ à 1 milliard d'euros. Paolo Costa pose une première question: la Commission peut-elle se satisfaire d'une telle situation et considère-t-elle que la mise en place du règlement (CE) n° 551/2004, relatif à l'organisation de l'espace aérien, se déroule de manière satisfaisante? Comment la Commission explique-t-elle qu'aucun nouveau bloc d'espace aérien fonctionnel ne soit devenu opérationnel depuis l'entrée en vigueur de ce règlement?
L'article 10 de ce règlement prévoit que l'organisation de l'espace aérien soit étendue à l'espace aérien inférieur et demande à la Commission de prévoir toute autre mesure appropriée "compte tenu des progrès accomplis". Sur cette base, quelles sont les modifications que la Commission juge opportunes d'apporter à la législation actuelle? Enfin, la Commission serait-elle d'accord pour ne pas attendre la fin de 2008 pour proposer une proposition en ce sens?
Dernière question de Paolo Costa – il y a donc plusieurs questions dans une: la Commission convient-elle de l'échec de l'approche ascendante qui a laissé aux États membres le soin de créer entre eux des blocs d'espace aérien fonctionnels et ne pense-t-elle pas qu'il est nécessaire désormais d'adopter une approche plus volontariste de la part de l'Union européenne?
Voilà, mes chers collègues, je crois, sans en avoir trahi l'esprit, la question que pose Paolo Costa à la Commission européenne.
Jacques Barrot, vice-président de la Commission. - Monsieur Savary, je vous remercie et je remercie aussi à travers vous M. Costa, car je trouve que cette question est très bien posée et qu'elle correspond à un vrai problème.
La réforme de mars 2004 visait à organiser le trafic aérien en fonction des besoins opérationnels et non pas en fonction des frontières nationales. C'est le moyen de raccourcir les trajets et d'éviter que les avions tournent dans le ciel inutilement. Je vais répondre aux différentes questions.
La première porte sur le coût de la gestion du trafic aérien et le bilan du ciel unique. M. Costa et vous-même venez de rappeler le chiffre-clé de un milliard d'euros si le ciel unique ne devient pas une réalité, et j'ajouterais que les économies potentielles sont encore plus importantes selon Eurocontrol, puisque trois milliards d'euros pourraient être économisés. Outre la réduction des coûts pour les compagnies aériennes, deux milliards seraient liés à l'amélioration de l'efficacité des services de navigation aérienne.
Il est vrai, Monsieur Savary, que la réalisation du ciel unique européen ne progresse pas suffisamment vite compte tenu de l'importance des objectifs: objectifs de compétitivité, de développement durable, de lutte contre le changement climatique et de sécurité aérienne. Devons-nous, pour autant, rester les bras croisés, à ne rien faire? Non. L'adoption des règlements de base sur le ciel unique a doté pour la première fois la Communauté de véritables pouvoirs dans ce domaine. La réforme de 2004 a été mise en œuvre: séparation entre la réglementation et la prestation des services, certification des prestataires selon les règles européennes, licence de contrôleur aérien et nombreuses mesures techniques adoptées par comitologie. Enfin, lancement du projet industriel CESAR, véritable complément du ciel unique.
Mais il faut accélérer le mouvement. La Commission doit dresser un bilan de ce qui a été fait. Dès décembre 2006, j'ai saisi un groupe d'experts à haut niveau qui vient de me rendre son rapport en juillet sur les réformes qu'il faut absolument mettre en œuvre. La Commission présentera cet automne une communication sur cette base.
La deuxième question porte sur les blocs d'espace fonctionnel. Il est vrai que dans le cadre de la réforme de 2004, le Conseil a choisi une approche bottom-up, c'est-à-dire du bas vers le haut, à travers l'action des administrations nationales pour la constitution de ces blocs. Franchement, cette approche n'est pas pleinement satisfaisante, car elle réduit la capacité de la Commission et des institutions communautaires pour que les blocs deviennent une réalité et que les efforts au niveau local ne s'enlisent pas. Une autre partie du problème est l'accent insuffisant mis sur l'amélioration de l'efficacité économique du service fourni. Nous allons essayer d'introduire, pour le premier semestre 2008, une approche basée sur la performance. Cette approche devrait fixer des objectifs spécifiques de performance pour les prestataires de services et prévoir des incitations, des mécanismes d'intervention en cas de non-réalisation. Je considère que cette approche basée sur la performance permettra d'accélérer la création de blocs fonctionnels car ils seront indispensables pour atteindre des objectifs de performance. Nous travaillons sur l'idée d'un groupe de surveillance de la performance, un performance review body, et d'un coordinateur chargé de développer plus rapidement ces projets. Je crois personnellement qu'un coordinateur, comme nous en avons pour les réseaux transeuropéens, serait très utile pour activer la constitution de ces blocs fonctionnels dont nous avons besoin.
Bien sûr, nous n'attendrons pas 2009 pour accélérer la création et l'efficacité des blocs fonctionnels. Je voudrais vous présenter une initiative mi-2008. Il y a un consensus sur le fait que ces blocs ne peuvent être efficaces que si l'espace aérien supérieur et l'espace aérien inférieur sont considérés comme indivisibles.
Quatrième question, enfin, celle de l'approche bottom-up des États membres qui a, en partie, échoué, il faut bien le reconnaître. Pour autant, devons-nous complètement prendre l'approche inverse? Je n'en suis pas sûr. Je crois qu'il faut essayer de continuer à tirer parti de cette approche bottom-up mais il faut passer à une deuxième étape axée sur la performance, sur les mécanismes, pour développer le ciel unique. Il faut travailler activement avec les États membres pour augmenter l'engagement politique et exercer une pression de haut en bas pour le développement des blocs fonctionnels d'espace aérien.
Voilà pourquoi je pense, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, que cette question était la bienvenue, qu'elle me permet d'indiquer les principales initiatives que nous allons prendre dans le droit fil de ce que vient d'exposer, à mon avis fort justement, M. Savary.
Georg Jarzembowski, au nom du groupe PPE-DE. – (DE) M. le Président, M. le Vice-président de la Commission, nous n'avons aucune objection s'agissant de tout ce que vous avez accompli pour améliorer l'efficacité de l'espace aérien, mais votre réponse était assez claire. Celle-ci indiquait que les États membres n'ont pas rempli leur tâche. Ils n'ont pas respecté leur obligation de 2004 qui leur demandait de créer rapidement des blocs d'espace aérien fonctionnels. D'une part, cela se ressent dans les coûts que vous indiquiez à hauteur de 3 milliards d'euros, et d'autre part, cela entraîne une pollution environnementale.
Nous débattons actuellement de l'introduction de l'échange de quotas d'émissions dans le transport aérien, environ 3 % des émissions du transport aérien. Si nous disposions d'une gestion du transport aérien sensée, rapide et efficace, nous pourrions réduire la consommation de 12 %, ce qui réduirait sensiblement les émissions de CO2. M. le Vice-président, vous êtes un gentleman, mais entrons dans le vif du sujet: les États membres ne remplissent pas leurs obligations. C'est pourquoi – vous en tant que Commission et nous en tant que Parlement – nous devons tous dire aux États membres: punition! Vous devez remonter la pente rapidement après être tombés si bas. Et cela risque encore de ne pas suffire.
Nous devons également les menacer de changer la démarche «de bas en haut», «de bas en bas». Si les États membres ne parviennent pas à progresser sur cette question véritablement essentielle de la sécurité aérienne, de l'efficacité aérienne, de l'impact du transport aérien sur le climat, alors nous prévoyons qu'en 2008, la Commission ne présentera pas seulement un rapport indiquant que les États membres s'améliorent s'agissant de la création de blocs d'espace aérien, mais qu'elle menacera les États membres. Vous pouvez compter sur notre aide. Nous devrons ensuite modifier le système et créer des blocs d'espace aérien au niveau européen. C'est la menace qu'il nous faut pour persuader les États membres de créer rapidement des blocs d'espace aérien fonctionnels efficaces. Je sais combien c'est difficile, mais de belles paroles ne nous mèneront nulle part. Nous devons commencer doucement à agiter le bâton.
Brian Simpson, au nom du groupe PSE. – (EN) Monsieur le Président, cela fait tellement longtemps que je siège dans ce Parlement que je me souviens de la fois où le commissaire de Palacio a proposé pour la première fois le ciel unique européen et le terme «bloc d’espace fonctionnel aérien» qui a été le premier à entrer dans le vocabulaire européen. Eh bien après une naissance douloureuse, des progrès ont été faits en 2004 avec la réglementation qui a adopté ces blocs d’espace aériens, mais je dois dire que depuis, les progrès ont été terriblement lents, en particulier en ce qui concerne l’extension de ces blocs aériens et l’espace aérien inférieur.
Monsieur le Commissaire, j’apprécie le fait que c’est la Commission qui envisageait de travailler avec les États membres, et il fait aucun doute que certains États membres se sont montrés moins disposés à poursuivre cette politique au rythme auquel nous voudrions ou que nous avions envisagé mais c’est certainement le bon moment pour trouver la pédale d’accélérateur et pour que la Commission propose une directive le plus tôt possible.
Depuis 2004, aucun nouveau bloc d’espace aérien n’a été créé et, ainsi que les intervenants précédents l’ont dit, le coût de notre échec dans la non-création d’un Ciel Unique européen est estimé à 1 milliard EUR. De plus, la législation en vigueur doit être mise à jour et le public-voyageurs sont encore quotidiennement confrontés à des retards dans le trafic aérien dus aux attitudes vieillottes des États membres et à ce qui semble être de l’inactivité de la part de la Commission.
La patience a des limites et des mesures sont nécessaires dans les plus brefs délais. Le défaut d’agir n’est pas une option, et c’est la raison pour laquelle mon groupe apportera son soutien à la question orale posée devant le Parlement par Monsieur Costa, au nom de la commission des transports et du tourisme. Monsieur le Commissaire, nous prenons tous de l’âge et nous aimerions bien voir le ciel unique européen de notre vivant.
Seán Ó Neachtain, au nom du groupe UEN. – (GA) M. le Président, j'aimerais demander si la politique de libéralisation du transport aérien peut être considérée comme une aide pour certaines régions et aéroports régionaux. Par exemple, regardez ce qui se passe à l'aéroport de Shannon dans ma circonscription dans l'Ouest de l'Irlande. La décision d'Aer Lingus de suspendre les vols vers Londres a entraîné des conséquences néfastes pour la région, et pas seulement en termes économiques. C'est tout à fait contraire à la politique du gouvernement irlandais. Selon moi, en ce qui concerne les régions d'Europe, cette libéralisation du transport aérien permettra aux régions fortes de progresser, mais affaiblira les moins robustes. Je demande donc à la Commission de se pencher sur le cas de l'aéroport de Shannon, et d'examiner comment cette politique peut se poursuivre aux côtés de la politique de développement régional dans ces régions.
Vladimír Remek au nom du groupe GUE/NGL. – (CS) M. le Président, mesdames et messieurs, l'initiative du «Ciel unique européen» confirme mon expérience en tant que pilote privé que le transport aérien est le parfait exemple d'un domaine qui appelle à une coopération supranationale indépendante des frontières nationales.
C'est pourquoi, concernant la nécessité de garantir au maximum la sécurité du trafic aérien, une efficacité maximum et un minimum de retards dans les vols, nous soutenons la création de blocs fonctionnels et donc du Ciel unique européen. Toutefois, n'oublions pas que si la fragmentation s'avère onéreuse, la défragmentation coûte également de l'argent. Comme il s'agit d'un système complexe, je soutiens la mise en place progressive d'un système unique de gestion des opérations dans un espace aérien commun, dans l'intérêt de la continuité.
En outre, l'unification des cieux européens où 27 systèmes d'exploitation nationaux existent actuellement mettra en danger les emplois des contrôleurs aériens et d'autres spécialistes dans ce domaine. Pour ce que je sais, un dialogue social à long terme plutôt fructueux a été mené en l'espèce et, selon moi, il est nécessaire de réconcilier des procédures qui semblent contradictoires. Nous voulons que nos vols soient plus sûrs et plus efficaces; nous voulons le moins de retards possibles et éliminer au maximum les risques d'événements inhabituels dans le trafic aérien. Des vies humaines sont en jeu: les vies des personnes qui prennent l'avion, mais aussi les vies et les destins de ceux qui gèrent le trafic aérien.
Kathy Sinnott, au nom du groupe IND/DEM. – (EN) Monsieur le Président, la proposition d’accélérer le processus de création d’espaces aériens m’inquiète. Il semble n’y avoir aucune reconnaissance des problèmes que les espaces aériens ont rencontré dans les aéroports régionaux en Europe, même au cours de leur préparation. En créant un ciel unique européen, nous assisterons à l’émergence de deux principales plates-formes de correspondances – Heathrow, de façon certaine, et Frankfort ou Charles de Gaulle – flanquées d’un réseau de sous-plates-formes.
La concurrence entre les aéroports pour être au premier ou au second niveau dans la hiérarchie du ciel ouvert se révèle acharnée dans mon pays. L’aéroport de Shannon – une plateforme de correspondances à part entière – et des aéroports régionaux tels que Cork, sont privés de routes tandis que l’aéroport de Dublin est chroniquement surchargé. Mon gouvernement reste là à ne rien faire car la logique du ciel ouvert consiste à laisser le marché décider, et le marché, et non pas la responsabilité sociale ou le sens commun autour du développement régional et rural, décide, en quelque sorte, que les développements profitent aux personnes mais ne les servent pas.
Plutôt qu’un ciel ouvert encombré, prenons le temps qu’il faut, même à cette heure tardive, de procéder à une évaluation sérieuse sur les effets de la politique. Prenons ensuite les mesures nécessaires afin de garantir que toutes les zones de l’Europe, comme l’ouest et le sud de l’Irlande, ne sont pas amputées d’un avenir viable et économique par un ciel ouvert.
PRESIDENCE DE DIANA WALLIS Vice-présidente
Reinhard Rack (PPE-DE). – (DE) Madame la Présidente, nous partageons tous la même inquiétude s'agissant de la politique européenne des transports. Nous voulons améliorer l'efficacité de tous les moyens de transport, et notamment du transport aérien, sans pour autant accroître la pollution de l'environnement. Si possible, nous souhaitons même améliorer l'équilibre environnemental de l'aviation.
Nous avons de nombreuses idées sur la question en Europe, comme l'échange de quotas d'émissions. Nous espérons atteindre notre objectif, par exemple, en taxant éventuellement le carburant des appareils ou autres. Cette approche n'est peut-être pas mauvaise, mais ce n'est pas comme ça qu'on atteindra notre objectif. Comme pour le transport par route, nous devons rechercher des solutions plus intelligentes. L'idée d'un ciel européen ouvert et d'un ciel européen unique est la bonne approche, même s'il faut encore la mettre en œuvre. Le SESAR représente une étape en ce sens, mais nous devons faire davantage.
Permettez-moi de soulever un dernier point, car nous voterons la question cette semaine. Le ciel n'est pas le seul à souffrir de la congestion, elle frappe également au sol, notamment dans les aéroports. Débarrassons-nous donc des règles bureaucratiques absurdes sur le transport de liquides dans les aéroports. Cela permettra de faire des économies et d'éviter des problèmes supplémentaires.
Ulrich Stockmann (PSE). – (DE) Madame la Présidente, M. le commissaire, nous considérons le ciel unique européen comme le projet le plus important pour l'avenir du transport aérien. La Commission insistait sans cesse sur son importance sous la présidence de votre prédécesseur et je pense aussi que c'est le cas. Nous avons adopté le paquet de règlements 2004. Notre ciel ressemble toujours à un patchwork, avec 58 blocs d'espace aérien nationaux, même si nous savons que nous n'en avons besoin que d'un seul, voire de trois à six pour être généreux.
Nous savons que ce patchwork – les statistiques ont été indiquées précédemment – entraînent des conséquences néfastes pour la sécurité, et bien sûr aussi sur l'économie et les consommateurs. Nous connaissons l'entassement et la congestion dans les différents ciels et, aujourd'hui, nous mettons davantage l'accent sur les émissions. Nous avons réalisé que nous pouvions faire un grand pas en avant.
Dans son rapport d'évaluation, la Commission a montré avec quelle lenteur les États membres évoluaient, même si l'on observe quelques initiatives, et elle a proposé certains moyens pour faire pression. Aujourd'hui, je ne dis pas que cela n'a pas de sens, ni «Je vous l'avais bien dit», mais dès 2003, nous disions déjà que l'approche «de bas en haut» ne fonctionnerait pas, car même à l'époque, nous craignions que les États membres s'embourbent dans des discussions sur les zones de souveraineté au sujet de la prestation de service et que des questions aussi sensibles ne doivent être réglementées par des règles législatives de haut en bas.
À ce moment-là, nous pensions qu’Eurocontrol aurait peut-être pu proposer des règles et avancer une proposition fondée simplement sur la substance, sur la fonctionnalité, sur laquelle les États membres pourraient ensuite se chamailler, au lieu d'attendre qu'ils ne créent eux-mêmes un autre genre de patchwork, dans une démarche de bas en haut. Ce qui compte aujourd'hui, c'est d'envisager sérieusement si nous devons réexaminer le cadre juridique. C'est la seule manière d'exercer une véritable pression et d'apporter les modifications nécessaires.
Mieczysław Edmund Janowski (UEN). – (PL) Madame la Présidente, M. le Commissaire, au printemps 2004, lorsque l'Union européenne a adopté la législation pertinente, on discutait des avantages que l'aviation civile tirerait de la réorganisation des règles du trafic aérien et de la coopération militaire avec le secteur civil en ce sens. Le système européen de l'époque était très fragmenté, ce qui a entraîné des corridors d'espace aérien très étroits.
Par conséquent, nous avons observé une détérioration de la sécurité des vols et quelque 20 % des appareils avaient du retard, cela consommait davantage de carburant, ce qui entraîne un impact écologique néfaste. La situation est-elle meilleure aujourd'hui, M. le Commissaire? Pourquoi les blocs d'espace aérien fonctionnels ne commencent-ils pas à fonctionner? La situation n'a-t-elle pas commencé à s'améliorer? Est-ce juste la faute des États membres? Ou est-il possible que nos lois ne satisfassent pas aux exigences réelles? Il serait bon de répondre rapidement à ces questions et de prendre les mesures qui s'imposent, sans attendre la fin 2008.
La croissance du trafic aérien est phénoménale. Il faut donc des règlements juridiques appropriés, mais des règlements qui ne restent pas de vaines paroles. Il faut aussi une formation du personnel appropriée. Et enfin, comment envisagez-vous la question dans le cadre des voisins de l'UE, M. le Commissaire?
Saïd El Khadraoui (PSE). – (NL) Madame la Présidente, M. le Commissaire, mesdames et messieurs, j'approuve ce que les autres orateurs ont déclaré et j'ajouterais que le ciel unique européen doit être complété d'urgence. Il est clair que l'approche en douceur du règlement 551/2004, destinée à encourager les États membres à exploiter au maximum ces blocs d'espace aérien plus fonctionnels, n'a pas fonctionné. Je comprends aussi que c'est en grande partie parce que des nombreux États membres se retiennent, ils préfèrent ne pas s'impliquer, souligner leur souveraineté, etc., mais nous ne devons pas leur permettre de s'en tirer comme ça. Le transport aérien est un secteur qui doit véritablement être traité au niveau européen, dans l'intérêt de l'industrie, des consommateurs, de la sécurité et de l'environnement. À une époque où le changement climatique est si important pour l'agenda politique, M. le Commissaire, nous ne pouvons permettre que les appareils effectuent des détours inutilement, gaspillant ainsi des quantités de carburant considérables, etc.
Nous appuyons simplement ce dossier, ainsi que d'autres instruments – le SESAR, le système d'échange de quotas d'émissions, etc. Nous ne pouvons continuer de gaspiller des dizaines de millions d'euros à cause d'une mauvaise gestion de notre espace aérien de la part d'un tas de centres de contrôle du trafic aérien inutiles. Il y a vraiment de quoi rogner et élaguer en l'espèce et c'est ce que nous voulons. En outre, nous allons probablement atteindre prochainement les limites de capacité grâce à l'expansion rapide du secteur. Les relations bilatérales existantes destinées à former des blocs d'espace aérien fonctionnels n'ont presque rien donné, alors il faut vraiment retrousser nos manches. Désigner un coordinateur et un organe indépendant d’évaluation des performances serait un pas dans la bonne direction, mais en même temps, M. le commissaire, je crains que cette démarche de bas en haut ne suffise pas; nous l'avons portée aussi loin que possible et nous devons à présent envisager de prendre de nouvelles initiatives législatives.
Silvia-Adriana Ţicău (PSE). – (RO) Madame la Présidente, en 2006, les compagnies low-cost ont ouvert 225 nouvelles routes aériennes en Europe, ce qui signifie 1 800 nouveaux vols par semaine. La fragmentation de l'espace aérien au niveau national, avec des règles et des procédures opérationnelles spécifiques, peut entraîner des effets néfastes sur la sécurité de la capacité de transport, sur l'introduction de nouvelles technologies et sur les coûts.
En passant d'un secteur aérien vers un autre, les pilotes changent de fréquence et contactent le contrôleur aérien suivant. Le contrôle du trafic aérien est devenu un élément essentiel. Il est important que de nouveaux blocs fonctionnels soient mis en œuvre après la consultation de toutes les parties concernées, et que les États membres prennent des mesures efficaces pour réaliser un système de gestion intégré.
En attendant, il faut investir dans des appareils et des infrastructures aéroportuaires plus efficaces. L'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l'UE ajoute de nouveaux blocs fonctionnels à l'espace aérien communautaire, avec un intérêt pour la région de la mer Noire et la coopération dans les Balkans.
Jacques Barrot, vice-président de la Commission. - Monsieur le Président, je comprends et je partage l'impatience du Parlement. Je réponds d'une manière très concise mais très précise: vous aurez, Mesdames et Messieurs les députés, un rapport en octobre 2007 et vous aurez, à la mi-2008, un deuxième paquet législatif. Il n'est donc pas question d'en rester là! Nous allons par conséquent, sur ce point, répondre ensemble, de manière précise, à ce problème.
Deuxième disposition: je vous ai probablement parlé d'un coordinateur, figure politique de haut niveau qui facilitera la mise en œuvre de ces blocs opérationnels entre les États membres. Je dois dire que les résultats obtenus au niveau des réseaux transeuropéens me font penser que cette méthode sera aussi utile pour renforcer notre action dans le domaine qui nous préoccupe.
À la troisième question, je veux répondre par Cesar, parce que Cesar existe, c'est désormais une entreprise commune. Cette entreprise commune réunit tous les acteurs, tous les opérateurs et je pense que l'arrivée de Cesar va bousculer toutes ces mauvaises habitudes qui nous enfermaient dans des espaces aériens délimités par des frontières nationales qui n'ont plus de sens aujourd'hui. Donc, Monsieur le Président, je réponds très positivement à la question posée par M. Costa et développée par M. Savary et j'ai écouté avec attention les demandes du Parlement. Je suis prêt à tout mettre en œuvre pour y répondre.
La Présidente. - Le débat est clos.
Déclaration écrite (article 142)
Zuzana Roithová (PPE-DE), par écrit. – (CS) Les États membres ont approuvé la création de blocs d'espace aérien communs pour contrôler un ciel unique, indépendamment des frontières nationales. Avant cela, deux avions se sont heurtés au-dessus de l'Allemagne et 71 personnes ont trouvé la mort. Les arguments en faveur d'un ciel unique européen s'intensifient: nous comptons 57 points de contrôle pour 28 000 vols quotidiens; les États-Unis en comptent deux. Trois ans plus tard, nous ne sommes pas plus avancés. L'UE n'a pas mis en pratique l'ensemble des règlements de 2004. Ces règlements sont censés intégrer l'espace aérien dans le marché des services internes et jeter les bases d'un système d'exploitation efficace en mettant l'accent sur la sécurité, l'environnement et une capacité de vol accrue. Nous comptons actuellement 65 centres radar où 31 systèmes utilisent 22 réseaux informatiques, et nous prévoyons que le nombre de vols en Europe doublera en l'espace de 10 ans.
Les citoyens savent-ils que leurs gouvernements et leurs parlements ignorent les avantages d'une Europe commune à leur détriment? Pourquoi le processus de création d'un espace européen opérationnel partagé pour les vols civils et militaires dans une Europe unie prend-il tant de temps? Est-ce pour apaiser les intérêts économiques locaux? Est-ce pour protéger la souveraineté nationale au détriment de la sécurité des transports et à des prix élevés? Aujourd'hui, nous voulons savoir comment et quand nous intégrerons la classification de l'espace aérien supérieur et comment nous allons exploiter conjointement l'espace aérien inférieur à l'avenir. Les obstacles à la création de blocs fonctionnels sur le territoire européen peuvent-ils être identifiés ouvertement? Est-il possible de mettre en lumière la volonté politique des États membres de respecter leurs obligations? Nous nous inquiétons également de l'échec de la démarche de bas en haut, car, en trois ans, les États membres n'ont pas développé les blocs fonctionnels indispensables à un contrôle du ciel plus efficace.