Le Président. – (EN) L'ordre du jour appelle les déclarations du Conseil et de la Commission concernant le rapport annuel de l'Union européenne sur les droits de l’homme.
Manuel Lobo Antunes, Président en exercice du Conseil. − (PT) Monsieur le Président, Madame la Commissaire, Mesdames et Messieurs, c'est pour moi un grand honneur d'être ici avec vous pour assister à ce débat sur le neuvième rapport annuel de l'UE sur les droits de l’homme. Ce rapport, qui couvre la période allant du 1er juillet 2006 au 30 juin 2007, a été officiellement présenté au Parlement européen le 26 novembre à Bruxelles.
Comme dans le cas des éditions précédentes, le neuvième rapport annuel de l'UE sur les droits de l’homme 2007 est un rapport vraiment conjoint, préparé par la Présidence, la Commission européenne et le secrétariat général du Conseil. Ce document a pour but de passer en revue les activités que l'UE a mises en œuvre dans le domaine des droits de l’homme au cours des présidences finlandaise et allemande. Il montre comment les valeurs communes sur lesquelles repose l'UE se traduisent en activités concrètes dans le domaine des droits de l’homme qui sont menées dans le cadre de ses relations bilatérales avec les pays tiers, de forums multilatéraux et en rapport avec une série de questions thématiques. Le deuxième objectif de ce rapport est d'assurer la transparence des activités de l'UE en matière de droits de l’homme et de veiller à la visibilité de ces multiples activités de la plus haute importance.
Je voudrais à présent souligner les aspects généraux les plus marquants de la politique de l'UE menée dans le domaine des droits de l’homme au cours de la période en question. Ces aspects sont les suivants: la mise en œuvre des orientations de l'UE en matière de droits de l’homme – vous n'êtes pas sans savoir que nous avons déjà des orientations concernant la torture, la peine de mort, les défenseurs des droits de l’homme et les enfants en situation de conflit armé; le développement de nouvelles orientations de l'UE plus complètes sur les droits de l'enfant, centrées initialement sur la question de la violence à l'encontre des enfants; la première année de fonctionnement du Conseil des droits de l’homme des Nations unies; la conclusion du processus de construction institutionnelle de ce nouvel organisme et, enfin, l'intégration des droits de l’homme dans tous les aspects des politiques de l'UE, notamment la gestion de crise dans les opérations et missions de la politique européenne de sécurité et de défense.
Bien que la structure de ce rapport reprenne largement le format employé l'an passé, l'édition de cette année s'efforce de mettre davantage l'accent sur l'analyse, cela pour offrir un passage en revue plus complet et approfondi de l'impact et de l'efficacité de l'action de l'UE dans les domaines des droits de l’homme et de la démocratisation. Cet accent porté sur l'analyse a pour origine les suggestions faites par le Parlement européen dans le rapport Coveney publié en avril.
Le rapport annuel présente donc les activités de l'UE en matière de droits de l’homme en adoptant une perspective à la fois thématique et par pays. Cette année, il comporte deux nouvelles sections: l'une consacrée à la politique européenne de voisinage et l'autre à la liberté de religion et de conviction. De la sorte, nous avons voulu souligner l'importance que nous accordons à la lutte contre l'intolérance vis-à-vis des convictions ou de la religion.
Ce rapport comprend des commentaires sur la résolution à ce sujet soutenue par l'Union européenne au cours de la session 2006 de l'Assemblée générale des Nations unies. J'ai le plaisir de vous informer que, cette année, nous avons à nouveau soutenu une résolution sur l'intolérance vis-à-vis de la religion ou des convictions, qui a été adoptée par consensus à la Troisième commission des Nations unies.
À la session du Conseil des droits de l’homme, qui a commencé hier, 10 décembre, à Genève, une autre résolution de l'UE sur l'intolérance religieuse sera présentée. Cette résolution vise en particulier à renouveler le mandat du rapporteur spécial. Nous espérons que cette résolution sera elle aussi adoptée par consensus. Le rapport comprend aussi une section plus complète sur les activités menées par le Parlement européen pour promouvoir et protéger les droits de l’homme et la démocratie, en particulier au travers de résolutions mais aussi par l'intermédiaire d'auditions et de débats organisés par la sous-commission des droits de l’homme, la commission des affaires étrangères et la commission du développement et bénéficiant de la participation de représentants des pays tiers.
La contribution cruciale du Parlement européen à nos efforts conjoints de promotion et de protection des droits de l’homme est indéniable. Le rapport évoque également les mécanismes qui ont été développés au sein de l'UE pour garantir le respect et la protection des droits de l’homme. Il faut mentionner à cet égard la création, le 1er mars de cette année, de l'Agence des droits fondamentaux, qui a remplacé l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes. Le rapport souligne, parmi d'autres activités, les mesures prises pour mettre en œuvre les orientations de l'UE dans le domaine des droits de l’homme.
Je voudrais commencer par évoquer les mesures prises tout au long de l'année pour assurer la mise en œuvre des orientations dans le domaine de la peine de mort. En coopérant avec des pays de toutes les régions, l'UE a imprimé un vif élan à sa campagne contre la peine de mort. Pendant toute la période couverte par le rapport, l'UE a beaucoup agi dans ce domaine, en essayant de convaincre certains pays de changer leur position sur cette question et en s'efforçant de sauver des vies humaines. C'est également dans le cadre de ces orientations que, en 2006, nous avons présenté à l'Assemblée générale des Nations unies une déclaration sur la peine de mort, qui a débouché cette année, le 15 novembre pour être exact, sur l'adoption de la résolution contre la peine de mort.
Nous avons également renforcé notre position contre la torture dans le contexte des orientations, et continué à améliorer la mise en œuvre des orientations relatives aux enfants dans les conflits armés et aux défenseurs des droits de l’homme. Cette année, l'UE a aussi pris l'initiative d'élaborer un ensemble d'orientations sur les droits de l'enfant qui sera très probablement adopté par le Conseil en fin d'année.
Le rapport reste principalement axé sur les activités de l'UE dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité commune, sur le dialogue avec divers pays en matière de droits de l’homme et sur les consultations de la troïka. Il donne des informations sur le développement des politiques et actions relatives à 20 questions thématiques. Il s'agit non seulement des domaines dans lesquels l'UE a adopté des orientations en matière de droits de l’homme mais également d'autres questions thématiques telles que les droits des femmes, les droits des enfants, la lutte contre le racisme et le trafic d'êtres humains.
Le rapport présente une analyse des activités de l'UE dans les pays voisins et donne une vue d'ensemble de ses activités dans les organisations internationales. À cet égard, je voudrais vous rappeler que la période analysée dans ce rapport coïncide avec la première année d'activités du Conseil des droits de l’homme, qui a bénéficié de la participation active de l'Union européenne.
Dans le domaine des droits de l’homme, une autre grande priorité de l'UE a été, comme les années précédentes, l'intégration des droits de l’homme dans tous les aspects des politiques communautaires. Je pense en particulier à la planification et à l'exécution des opérations et des missions de gestion de crise menées dans le cadre de la politique européenne de sécurité et de défense, et à l'affectation à ces missions de conseillers spécialisés dans les droits de l’homme et la dimension de genre. En outre, les mandats des représentants spéciaux de l'Union européenne correspondent désormais à des instructions concrètes dans ce domaine.
Benita Ferrero-Waldner, membre de la Commission. − (EN) Monsieur le Président, je suis aussi heureuse de voir ce rapport de l’UE, un rapport commun du Conseil et de la Commission européenne. Ceux d’entre vous qui étaient présents la première fois que je me suis exprimée ici en tant que commissaire sauront qu’il a toujours été de mon souhait que nous abordions cette question ensemble. Je tiens aussi à remercier les membres du Parlement qui ont contribué à notre rapport. En fin de compte, c’est un document de très bonne qualité qui exprime ce que nous avons à dire et qui montre ce que nous avons accompli dans le domaine des droits humains.
Hier, le monde entier a fêté la Journée internationale des droits de l’homme, qui revêt une importance particulière cette année puisqu’elle marque le début des commémorations du 60e anniversaire de l’adoption de la déclaration universelle des droits de l’homme. Celle-ci constituait la première étape de la mise en place d’un cadre général international pour la protection des droits humains, qui a été suivie par une impressionnante codification de la législation internationale en matière de droits humains au cours des décennies écoulées.
Aujourd’hui, le défi consiste à traduire la mise en œuvre dans les faits, dans le monde entier. Par exemple, les situations déplorables des droits humains en Birmanie/Myanmar, au Soudan/Darfour, en Iran et au Zimbabwe sont des rappels cinglants des défis auxquels nous devons faire face, comme nous l’a expliqué aujourd’hui le lauréat du Prix Sakharov, M. Osman. Il nous a clairement montré la voie.
J’aimerais attirer votre attention sur quatre développements essentiels qui ont particulièrement marqué les activités de l’Union européenne au cours de l’année écoulée. Premièrement, nous avons constaté d’importants changements au sein du système des droits humains des Nations unies. La phase de construction institutionnelle du Conseil des droits de l’homme a été menée plus ou moins à bien et on peut faire preuve d’un optimisme prudent, pour autant que le Conseil s’attaque aux violations des droits humains de manière opportune quels que soient l’endroit et le moment où celles-ci se produisent.
À cet égard, nous sommes heureux de constater que le Conseil des droits de l’homme, à la suite de l’initiative de l’UE, a pris des mesures dans le cadre de violations graves des droits humains en Birmanie/Myanmar ainsi qu’au Soudan/Darfour. De plus, nous sommes aussi heureux de la création du système de l’Examen périodique universel qui, dès l’année prochaine, permettra aussi de procéder à un examen complet de la situation des droits humains dans chacun des États membres de l’ONU.
Malgré la création du Conseil des droits de l’homme, la troisième commission de l’Assemblée générale des Nations unies reste bien entendu un forum tout aussi important pour les questions relatives aux droits humains. L’Union européenne continuera d’utiliser à son plein potentiel cette commission pour proposer des résolutions thématiques et nationales. Lors de la session de cette année, un succès particulier a été engrangé avec l’adoption pour la première fois d’une résolution visant à établir un moratoire sur l’utilisation de la peine de mort. Grâce à l’initiative de l’UE et la mise en place d’une coalition interrégionale, la condamnation historique de la peine capitale marque une étape cruciale vers la mise en place d’un consensus international en vue de son éradication définitive.
Deuxièmement, un des outils les plus importants à notre disposition pour soulever des questions relatives aux droits humains avec des pays tiers est les dialogues sur les droits de l’homme. Ils nous permettent aussi de mentionner des inquiétudes particulières au sujet des droits humains avec des pays partenaires, de faire des recommandations en vue d’améliorations et de discuter des moyens possibles de promouvoir une réforme par le biais de projets de formation ou de coopération. L’année dernière a vu une augmentation considérable du nombre de dialogues sur les droits de l’homme.
Nous menons aujourd’hui des dialogues avec environ 25 pays partenaires. Par exemple, nous avons établi des dialogues sur les droits de l’homme avec la plupart des pays voisins de l’Europe et les premières réunions ont été généralement assez – voire très – constructives.
Le premier tour de dialogues des experts en matière de droits humains, notamment avec l’Union africaine, a ouvert de nouvelles possibilités pour engager le continent africain sur la voie des droits humains. En mai 2007, l’Union européenne a tenu le premier dialogue sur les droits de l’homme avec l’Ouzbékistan et la stratégie de l’UE pour l’Asie centrale prévoit la mise en place de tels dialogues avec l’ensemble des pays d’Asie centrale.
Cela dit, avec l’augmentation du nombre de dialogues, nous devons rester vigilants pour garantir la cohérence et l’efficacité, un point que le Parlement européen a souligné à juste titre dans sa résolution du 6 septembre 2007.
Troisièmement, permettez-moi de vous parler des orientations de l’UE en matière de droits de l’homme. Je suis heureuse – et la présidence du Conseil l’a déjà noté – que 2007 ait vu l’adoption de nouvelles orientations pour la promotion et la protection des droits de l’enfant, conjointement avec une stratégie de mise en œuvre. Notre première priorité sera d’aborder, dans ces orientations, le problème crucial des violences faites aux enfants.
Comme c’est le cas pour toutes les orientations de l’UE, c’est leur mise en œuvre qui compte. L’Union européenne a été particulièrement active dans le cadre des orientations relatives à la peine de mort, la torture et le mauvais traitement, avec un nombre important de démarches générales, mais aussi avec beaucoup de représentations spécifiques pour des cas individuels de peine capitale ou de torture dans une série de pays tiers. Nous soulèverons régulièrement ces questions dans les réunions de dialogue politique avec les pays tiers.
Pour terminer, je dois mentionner l’instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme (IEDDH), en place depuis janvier 2007. L’IEDDH nous permet de fournir un financement direct à des organisations de la société civile dans le monde entier, sans l’intervention des gouvernements. C’est devenu un instrument vital pour le renforcement d’organisations locales dans le monde entier, sans lesquelles la démocratie et les droits humains ne pourraient pas s’épanouir. L’IEDDH met un accent nouveau sur la promotion de la démocratie et nous permet aussi de soutenir les actions dans le cadre des orientations de l’UE en matière de droits de l’homme.
Innovation supplémentaire, des fonds peuvent désormais être mobilisés pour assister des défenseurs des droits humains en danger du fait de leurs activités. Au total, quelque 140 millions d’euros seront disponibles chaque année grâce à cet instrument et les premiers appels à propositions de projet sont aujourd’hui ouverts.
Le temps ne me permet d’aborder ces sujets que de manière superficielle aujourd’hui. Néanmoins, je pense que tout lecteur de ce rapport annuel de qualité et intéressant ne manquera pas d’être frappé à la fois par la véritable portée géographique de nos activités en matière de droits humains et par l’étendue des thématiques abordées.
En plus des points que j’ai mentionnés, je voudrais ajouter que l’Union européenne a été active sur des sujets aussi divers que la promotion de l’adhésion à la Cour pénale internationale (CPI), les droits de la femme et les droits des personnes handicapées.
L’année 2007 a été une année de succès. Néanmoins, nous sommes aussi conscients du fait que les violations des droits humains restent, malheureusement, endémiques sur l’ensemble du globe. À l’occasion du 60e anniversaire de la déclaration universelle des droits de l’homme, nous continuerons, bien entendu, nos efforts afin que les droits contenus dans cette déclaration finissent par devenir une réalité tangible pour nous tous.
PRÉSIDENCE DE M. DOS SANTOS Vice-président
Laima Liucija Andrikienė, au nom du groupe PPE-DE. – (LT) Je voudrais tout d'abord remercier tous ceux qui ont participé à l'élaboration du rapport annuel. Nombreux sont ceux qui attendaient ce rapport avec impatience: le Parlement européen mais aussi des institutions telles que le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, le Conseil de l'Europe ou des ONG qui continuent à travailler pour protéger les droits de l’homme et entretiennent un dialogue crucial dans ce domaine. Je veux parler du dialogue instauré entre le Parlement européen, sa sous-commission des droits de l’homme, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, la société et divers groupes qui la composent.
Je suis d'accord avec les idées exprimées par le pays qui assure la présidence du Conseil de l'UE et par la commissaire Ferrero-Waldner. Néanmoins, je tiens à soulever certains points.
Ce rapport annuel forme un passage en revue détaillé des actions menées par l'UE au niveau mondial dans le domaine des droits de l’homme. Il couvre les activités des États membres de l'UE, de la Commission et du Parlement européen. Il rend compte de la situation que connaissent certaines régions du monde, mais j'ai l'impression qu'il a omis certains sujets qui l'auraient rendu encore plus intéressant.
En premier lieu, le rapport laisse à désirer pour ce qui est de l'évaluation de la politique des droits de l’homme de l'UE. En fin d'année, il serait appréciable de connaître l'avis du Conseil et de la Commission sur les résultats et les effets des actions évoquées. Une telle évaluation serait beaucoup plus utile qu'une simple énumération des actions menées, quelle que puisse être la longueur de cette liste. Une perspective orientée sur les résultats mettrait en évidence toutes les actions entreprises par l'UE dans le domaine de la protection des droits de l’homme et soulignerait leur insignifiance. Il en va de même pour les cas individuels mentionnés dans le rapport: quels sont les résultats effectivement atteints par l'Union européenne? Est-ce possible que nos tactiques et activités n'aient eu aucun résultat, voire se soient soldées par des conséquences négatives?
Par ailleurs, je ne trouve pas non plus d'explication plus claire sur le travail du Parlement européen et les recommandations de résolutions qu'il a adoptées. Le Parlement européen aurait intérêt à apprendre lesquelles de ses recommandations ont été prises en considération par la Commission et le Conseil, lesquelles ont été mises en œuvre et quels en ont été les résultats.
Raimon Obiols i Germà, au nom du groupe PSE. – (ES) Monsieur le Président, je souhaiterais formuler trois remarques rapides sur ce neuvième rapport, suivies d'une brève réflexion relative aux futurs rapports.
Les remarques que je veux faire sont des remarques positives. D'abord, je tiens à dire que, même si ce rapport reproduit la structure des éditions précédentes, il met davantage l'accent sur l'analyse détaillée. Certaines questions sont même examinées selon une perspective double: géographique et thématique. On ne peut qu'en penser du bien.
Deuxièmement, l'autre aspect positif est la plus grande importance accordée par le rapport à l'abolition de la peine de mort, à la torture, aux droits de l'enfant et à la protection des défenseurs des droits de l’homme.
Nous devrions également nous réjouir de la plus grande préoccupation à l'égard de la vulnérabilité particulière des enfants dans les situations d'abus et, par conséquent, concernant la nécessité de renforcer leur protection.
Ma troisième remarque est que ce rapport couvre la première année d'activités du Conseil des droits de l’homme des Nations unies. L'Union a joué un rôle actif dans l'introduction du mécanisme d'examen périodique universel, ce qui pourrait se traduire par la création de synergies extrêmement positives.
Enfin, je souhaite partager une réflexion qui coïncide en partie avec les paroles de Mme Andrikienė. Nous accomplissons des progrès appréciables vers l'établissement, chaque année, d'une évaluation beaucoup plus complète, mais il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour transformer cette analyse exhaustive et délicate en résultats plus tangibles et plus efficaces de l'action de l'Union européenne.
Cela signifie donc que nous devons mettre au point un système conceptuel et analytique qui nous permette d'évaluer nos propres instruments. Notre approche du dialogue avec les pays tiers, la conditionnalité, les termes du discours que nous employons pour nous élever contre certaines situations, la décision d'appliquer ou non des normes doubles en fonction des proportions ou de l'importance stratégique de tel ou tel pays, autant d'éléments dont nous pensons qu'ils méritent un examen approfondi, chose que nous espérons voir dans les prochaines versions de nos rapports annuels.
(Applaudissements)
Sarah Ludford, au nom du groupe ALDE. – (EN) Monsieur le Président, je pense que le Parlement européen a bien entamé la commémoration du 60e anniversaire de la déclaration universelle des droits de l’homme avec la remise du Prix Sakharov pour la liberté de l’esprit à l’impressionnant M. Salih Mahmoud Osman.
Mais il nous a dit que nous ne remplissions pas notre devoir de fournir une protection au peuple du Darfour et que l’UE devait soutenir cet effort avec de la détermination et des ressources, en l’occurrence des troupes. Comment se fait-il qu’une UE qui prêche en faveur des droits humains permette le meurtre de 600 000 personnes et le déplacement de quatre autres millions? L’UE doit renforcer sa capacité à intervenir dans des situations de crise telles que celle-ci. Sans action, nos paroles sur la promotion de valeurs partagées restent lettre morte. Je pense que beaucoup de membres de ma circonscription ainsi que le peuple du Darfour plongé dans la souffrance auraient été étonnés de voir les dirigeants de l’UE siroter un cocktail à Lisbonne le week-end dernier à côté des présidents du Zimbabwe et du Soudan.
Le manquement majeur dans le rapport 2007 du Conseil et de la Commission sur les droits de l’homme concerne l’absence de réponse aux révélations, notamment de la part de cette assemblée, de la complicité de gouvernements de l’UE dans les restitutions extraordinaires. On nous dit que l’UE a été active sur la question de la torture. Comment se peut-il qu’une UE qui se bat pour les droits humains et l’élimination de la torture n’ait apporté aucune véritable responsabilité ni aucune vérité, seulement des démentis insipides et la terne assurance de sa propre implication dans cet acte barbare? La signature de la charte des droits fondamentaux cette semaine – même si elle est la bienvenue, surtout parce qu’elle constitue la première interdiction, dans un instrument international en matière de droits humains, de la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle – sonne bien creux lorsque l’on constate l’hypocrisie qui règne en pratique.
Pour terminer, M. Osman nous a aussi prévenus que la justice et la responsabilité ne pouvaient être compromis par aucun accord politique et que le cycle de l’impunité devait être brisé. Je pense que nous pouvons appliquer cet avertissement à la situation actuelle dans les Balkans. L’Union européenne ne peut pas être la victime du chantage par la Serbie, qui veut que l’Union signe l’accord d’association pour adoucir la perte du Kosovo, à moins que et jusqu’à ce que Ratko Mladić et Radovan Karadžić soient livrés à La Haye. Nous ne pouvons pas négliger l’arrêt du procureur du tribunal de La Haye, Carla Del Ponte, qui déclare que le gouvernement serbe a délibérément refusé de livrer Mladić et Karadžić à la justice. Nous ne pouvons pas récompenser la Serbie pour s’être abstenue d’avoir une réaction violente vis-à-vis du Kosovo.
Konrad Szymański, au nom du groupe UEN. – (PL) Monsieur le Président, la défense des droits de l’homme devrait être une question de conscience et non la dernière mode intellectuelle que l'on s'efforce de suivre. Pour cette raison, je demande à ce que les activités de l'Union européenne dans ce domaine soient imprégnées d'une plus grande sensibilité à l'égard de la liberté de religion. Les convictions des croyants sont de plus en plus souvent attaquées, et ce problème commence à atteindre des proportions dramatiques.
Comme exemples, je peux citer la Chine, le Myanmar, la Corée du Nord, l'Iran, le Soudan, l'Érythrée, le Viêt Nam ainsi que la Russie, l'Arabie saoudite, l'Ouzbékistan et Cuba. Cette liste est-elle assez longue? On est donc en droit de s'étonner que si peu d'attention soit attachée à ce problème, en particulier dans la première partie du rapport. J'accueille favorablement le fait que les questions de genre et les droits des enfants bénéficient maintenant d'une priorité dans notre agenda, mais je déplore le manque d'attention accordée à la liberté de religion. Cette lacune peut être interprétée comme une indication que certains peuples de l'Europe subissent de façon intrinsèque des préjudices dans le domaine de la religion.
L'Union européenne devrait de toute urgence élaborer des orientations sur la liberté de religion. Dans le monde d'aujourd'hui, cette liberté est le droit qui est le plus souvent bafoué en toute impunité.
Hélène Flautre, au nom du groupe Verts/ALE. – (FR) Monsieur le Président, je voudrais saluer l'intérêt du rapport annuel qui nous est présenté. C'est un travail conséquent qui nous livre une vision exhaustive des initiatives qui sont prises sur une année, sous deux Présidences, pour la mise en œuvre de la politique de l'Union en matière de droits de l'homme. Évidemment, ce n'est pas rien: c'est un outil pratique et un document de référence.
Pour autant, je crois que Mme Andrikienė a raison, ce rapport manque de recul, il manque d'analyse et d'esprit critique et, du coup, comme il ne tire pas les conclusions des faits qu'il énonce, il manque de recommandations. Les échecs ou les succès de cette politique ne sont pas suffisamment mis en valeur. Ce sera, je l'espère et j'en suis sure, le travail des parlementaires dans le rapport que le Parlement établira au printemps: ils devront avancer dans cette direction.
Il y a aussi des silences qui gênent dans ce rapport. Le chapitre – Mme Ludford en a parlé – qui est consacré aux droits de l'homme dans le cadre de la lutte contre le terrorisme se conclut heureusement sur la référence aux travaux du Parlement au sujet des vols de la CIA et des restitutions extraordinaires, mais il ne dit rien sur l'inaction du Conseil s'agissant de la poursuite des enquêtes, de l'inculpation des responsables et encore moins de l'indemnisation des victimes qui ont été injustement transférées, enfermées ou torturées.
De même, le chapitre consacré à l'asile et aux migrations est muet sur les violations massives des droits des personnes migrantes; pas de bilan de la mise en œuvre des accords de réadmission en cascade, pas de bilan de la gestion quasi militarisée des frontières, pas de bilan concernant les milliers de personnes qui meurent de vouloir rejoindre nos côtes, alors même que le travail des parlementaires est conséquent, régulier sur ces questions.
On ne comprendra pas non plus, à la lecture de ce rapport, les raisons qui poussent nos États membres à se mettre dans une situation très embarrassante vis-à-vis de nos partenaires et vis-à-vis du droit international en refusant, décidément, de ratifier la convention sur les droits des travailleurs migrants et de leurs familles. Sur ces questions, notre politique interne a des conséquences sur les droits de l'homme à l'extérieur de l'Union.
Je salue l'adoption de la Charte des droits fondamentaux qui nous aidera désormais à jeter un regard plus avisé sur nous mêmes, y compris en Grande-Bretagne et en Pologne. L'analyse des succès pourrait également utilement inspirer nos stratégies futures. Mme Ferrero-Waldner a raison: le rôle déterminant de l'Union dans l'adoption par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies de mécanismes de travail prometteurs et exigeants, comme l'adoption récente de la résolution sur le moratoire sur la peine de mort, doit être analysé. Une Présidence active, un Conseil mobilisé, un Parlement offensif, des organisations civiles tenaces et l'on voit se dessiner une Europe comme acteur mondial efficace: c'est une très bonne nouvelle et c'est très encourageant.
Patrick Louis, au nom du groupe IND/DEM. – (FR) Chers collègues, "un nouvel homme des droits de l'homme est né qui n'a plus que le nom en commun avec son ancêtre de 1789", c'est en ces termes dépités que le philosophe Marcel Gauchet résume la Charte des droits fondamentaux qui vient d'être proclamée ici-même et à laquelle l'article 6 du traité de Lisbonne donne force obligatoire.
À bien des égards, on le sait, les multiples droits qu'elle consacre viennent contredire les droits et libertés protégés par nos constitutions nationales. Or, le droit européen est supérieur au droit national, même constitutionnel. Dès lors, que restera-t-il du principe de laïcité face à l'article 10 de la Charte, qui affirme que la liberté de religion implique la liberté de manifester sa religion en privé et en public? Que restera-t-il du principe d'égalité face aux articles 20 et suivants de la Charte, qui dressent un catalogue de droits victimaires fondés sur l'appartenance à un groupe? Que restera-t-il du principe de liberté, qui est un droit à l'autodétermination, face aux articles 6 à 19, qui le confondent avec des droits de créance, simple pouvoir d'exiger d'autrui une prestation?
On voudrait accélérer la transformation du citoyen acteur de son devenir en vulgaire consommateur, passif prestataire de services, que l'on ne s'y prendrait pas autrement! À ceux de mes collègues qui seraient attachés aux droits et aux libertés séculaires de leur nation, protégés par leur Constitution, je ne dis qu'un mot: réveillez-vous!
Philip Claeys (NI). – (NL) Monsieur le Président, une politique des droits de l’homme irrespectueuse du principe de cohérence est hypocrite et dénuée de toute crédibilité. L'Union européenne a raison de vouloir soutenir les droits de l’homme dans les pays tiers mais, pour être crédible, elle doit aussi respecter tous les droits démocratiques fondamentaux en son sein.
Cela ne correspond pas toujours à ce que nous voulons, surtout dans le cas de la liberté d'expression. Ce droit est l'un des droits les plus fondamentaux, si pas le droit le plus fondamental, mais il est de plus souvent vu comme un problème. En particulier, on taxe toujours de racistes et donc on criminalise les critiques formulées à l'encontre des échecs de la politique d'immigration et d'intégration.
Le rapport dont nous parlons maintenant commet aussi cette erreur. Des gens risquent d'être poursuivis et inculpés, non pas à cause de ce qu'ils ont fait mais en raison de leurs opinions et du fait qu'ils ont exprimé ces opinions. De cette façon, la politique poursuivie n'apporte pas de solutions aux problèmes: la politique elle-même devient une composante du problème.
Ari Vatanen (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, je salue ce rapport, mais je voudrais souligner le fait que nos droits humains sont toujours sélectifs – ils sont politiquement corrects. Même dans cette assemblée, nous n’avons pas pu organiser une exposition photographique des atrocités commises en Tchétchénie, parce que nous avons eu peur que les Russes n’apprécient pas.
Concernant notre dialogue sur les droits de l’homme avec la Chine, il n’a pas fait été mention des 30 à 40 millions de fillettes disparues, démographiquement parlant, en Chine. Où sont ces enfants? Ont-elles été victimes d’avortements, tuées après la naissance ou abandonnées, ou sont-elles sont aux mains de la criminalité organisée? Dès lors, la prochaine fois, notre mission devra consister à aborder ce sujet avec les autorités chinoises.
La situation est-elle meilleure au sein de l’UE? Je ne veux en aucune manière culpabiliser quiconque. Je vous demande simplement de réfléchir au fondement de l’humanité. Pourquoi pointons-nous du doigt – à juste titre – ces pays qui appliquent la peine de mort alors que nous en avons une aussi dans l’UE, avec plus d’un million d’enfants au sein de l’UE qui sont tués avant même d’être nés? Je demande simplement si cela est humain. Pouvons-nous bâtir une société plus saine quand la vie humaine n’a pas une valeur absolue?
Notre première mission est de défendre les personnes sans défense, les plus vulnérables. C’est cela qu’on appelle la véritable solidarité. Ce n’est peut-être pas une pensée politiquement correcte, mais nous devons nous demander où se situent nos valeurs. Sont-elles négociables? Les valeurs des droits humains peuvent-elles dépendre d’une majorité atteinte un jour, qui pourrait devenir la minorité le lendemain? Pour le dire simplement, le premier droit humain est celui de naître. Je suis très heureux d’être né et je suis certain que mes collègues sont heureux d’être nés. En considérant la valeur absolue de la vie humaine, nous pouvons bâtir une société de compassion et d’amour. Nous ne pouvons pas bâtir de lendemains meilleurs sur le sable mouillé par les larmes d’enfants morts avant d’être nés.
Józef Pinior (PSE). – (PL) Monsieur le Président, nous avons sur notre table le rapport de l'UE sur les droits de l’homme. Il s'agit d'un excellent rapport. Je dirais même que c'est l'un des meilleurs documents produits récemment dans l'Union européenne et un exemple positif d'action coordonnée dans le domaine des droits de l’homme entre les principales institutions européennes, en l'occurrence le Conseil et la Commission.
La politique de l'Union européenne en matière de droits de l’homme est la mieux développée de toutes ses politiques. Elle symbolise ce pour quoi l'Union européenne se bat dans la civilisation contemporaine du début du 21e siècle, des valeurs qui transcendent le marché commun. Sur la scène internationale, l'Union européenne parle d'une même voix des questions relatives aux droits de l’homme. Elle n'hésite pas à présenter sa propre position, qui diffère parfois de celle des États-Unis. Dans le monde entier, l'Union se montre de plus en plus efficace et secourable pour les personnes persécutées par des régimes non démocratiques.
Néanmoins, Monsieur le Président, nous nous rendons bien compte que beaucoup reste à faire. Le lauréat du Prix Sakharov de cette année, M. Salih Mahmoud Mohamed Osman, par exemple, a tenu à préciser cela dans le discours qu'il a prononcé aujourd'hui devant le Parlement. Nous devrions décider des actions qui s'imposent pour rendre plus efficace la politique de l'Union européenne en matière de droits de l’homme. À ce sujet, j'ai à l'esprit une étude sur la situation des droits de l’homme en Russie à la suite des élections dans ce pays. Je pense aussi à la situation que connaît la Chine dans la période de préparation aux Jeux olympiques de l'année prochaine. L'Union européenne pourrait faire beaucoup là-bas, en particulier pour les droits de l’homme.
Anneli Jäätteenmäki (ALDE). - (FI) Monsieur le Président, le président en exercice du Conseil a déclaré que les questions de droits de l’homme devaient être prises en compte dans toute politique. C'est vrai, et il devrait en être ainsi dans le domaine des affaires étrangères, mais l'UE devrait aussi considérer la situation sur son propre territoire. Les travailleurs étrangers travaillant dans l'UE sont-ils traités dans le respect des droits de l’homme de chacun? Ce que nous voyons, c'est qu'il y a beaucoup de pauvreté ici. Ce problème ne relève cependant pas de la politique officielle de l'UE. Il est délégué à l'Église et aux organisations caritatives. L'UE doit adopter une position plus déterminée en matière de droits de l’homme; au contraire des paroles, les actes ont un sens réel.
Enfin, je voudrais évoquer la question de la crise humanitaire en Iraq, qui est sur le point d'atteindre des proportions catastrophiques. Quelque 4,5 millions de personnes ont été forcées de quitter leur logis; l'an passé, les Iraquiens représentaient le groupe le plus nombreux de demandeurs d'asile en Europe. L'UE a réagi à cette crise en affectant 4 millions d'euros aux activités du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et à la Croix-Rouge néerlandaise; en outre, elle compte allouer 11 millions d'euros aux services de santé et aux écoles de l'Iraq. On peut toutefois se demander si cette aide venant de la riche Union européenne est suffisante pour ces 4,5 millions de personnes qui traversent une situation si critique sans que la faute ne puisse leur en être attribuée. La crise iraquienne est devenue l'une des pires au monde.
Hanna Foltyn-Kubicka (UEN). – (PL) Monsieur le Président, concernant ce rapport, je salue particulièrement la section qui traite des actions des membres de notre Parlement. La remise du Prix Sakharov à Alexander Milinkievitch ainsi que la condamnation ferme et franche du meurtre d'Anna Politkovskaya ont prouvé que l'Europe n'allait pas rester sans réagir aux violations des droits de l’homme commises de l'autre côté de sa frontière orientale. Il reste cependant beaucoup à faire sur ce plan.
Les dernières élections parlementaires en Russie ont prouvé que les violations des principes fondamentaux et des libertés sont monnaie courante dans ce pays. Les événements qui se sont déroulés en Russie remettent en question les consultations régulières qui ont été menées entre l'Union européenne et la Fédération de Russie dans le domaine des droits de l’homme. Le moment est peut-être venu de redéfinir la nature de ces réunions, de prévoir des sanctions pour le manque de progrès dans la mise en œuvre des engagements pris, et de mettre en place des mécanismes de suivi de cette mise en œuvre. Une chose est sûre: la Russie s'éloigne encore plus de la démocratie.
Nous ne pouvons qu'espérer que l'an prochain nous serons plus en mesure de nous féliciter de ne pas avoir perdu de temps et d'occasions pour faire de ce monde un monde meilleur.
Milan Horáček (Verts/ALE). – (DE) Monsieur le Président, ce rapport contient de bonnes innovations, notamment un chapitre consacré à la politique européenne de voisinage. Il décrit l'aggravation de la situation des droits de l’homme en Russie mais paraît mettre en garde contre toute tentative d'isoler ce pays. Néanmoins, il importe que les prochains dialogues comportent, entre autres, la poursuite de l'examen de sujets tels que la liberté d'expression, la liberté de la presse et la liberté de religion, la législation anti-ONG et anti-extrémistes, la lutte contre le terrorisme et la question tchétchène. Le Conseil et la Commission devraient mettre en place un mécanisme de suivi pour ces questions. De plus, on constate du côté russe un manque total de volonté d'engager le dialogue avec les ONG. Nous devons espérer que le gouvernement russe finira par accepter de participer aux consultations à mener en vue de mettre en place des dialogues sur les droits de l’homme.
Ce rapport montre que l'UE est devenue plus active dans le domaine des droits de l’homme mais, malheureusement, il a manqué l'occasion d'engager une réflexion plus critique sur la situation des droits de l’homme au sein même de l'UE. Une telle réflexion est pourtant nécessaire si nous tenons à poursuivre une politique crédible dans ce domaine.
Roberta Alma Anastase (PPE-DE). - (RO) Mesdames et Messieurs, je tiens à féliciter les institutions européennes pour l'élaboration de ce rapport, qui constitue un véritable indicateur de l'importance accordée par l'Union européenne aux droits de l’homme et à la promotion des valeurs démocratiques dans le monde. Il s'agit d'un rapport détaillé, et j'apprécie l'initiative de l'étendre à d'autres domaines. En même temps, puisque nous parlons d'amélioration, je voudrais souligner trois aspects d'importance majeure qui devraient devenir une priorité de l'action européenne dans l'avenir.
Tout d'abord, je voudrais souligner l'importance que doivent avoir la promotion et le respect des droits humains pour l'Union européenne en qualité de garante de la paix en Europe. L'Europe d'aujourd'hui est une Europe mondialisée et multiethnique. La reconnaissance et le respect mutuel de nos droits et libertés devraient être à la base de la promotion de la tolérance et de la compréhension. C'est pourquoi il est si important de garantir les droits des minorités, en particulier dans les Balkans occidentaux et dans le cadre de la politique de voisinage, et d'intensifier les efforts de l'Union européenne en ce sens.
En même temps, il conviendrait de continuer à promouvoir les droits des Rom et leur intégration dans la Communauté européenne, notamment en créant une agence compétente en la matière.
Il importe d'évoquer une situation tout aussi importante, à savoir la situation des droits de l’homme sur le territoire de l'Union européenne, laquelle aspire au rôle de championne des droits de l’homme. À cet égard, je veux exprimer mon inquiétude devant la récente détérioration de la situation des Roumains en Italie, où des violations massives de leurs droits ont été observées. Je demande donc à la Commission et au Conseil de prendre des mesures fermes afin de restaurer les droits des Roumains et d'empêcher la répétition de situations de ce type à l'avenir.
Enfin, je voudrais attirer l'attention du Conseil et de la Commission sur la nécessité de consolider les mécanismes d'évaluation de l'Union européenne à employer pour les rapports annuels sur les droits de l’homme. Ce n'est qu'en prenant connaissance des résultats concrets que nous serons en mesure de développer ces actions de façon cohérente et efficace. De même, les futurs rapports devraient présenter l'examen et l'évaluation des actions régionales de l'Union européenne, y compris pour le développement de la synergie de la mer Noire.
Richard Howitt (PSE). - (EN) Monsieur le Président, je salue également le rapport annuel du Conseil et de la Commission. Il a certainement progressé en termes de détails supplémentaires, ce que nous avions demandé au cours des années précédentes. Mais, si je puis me permettre, il est toujours un peu long dans les descriptions et un peu court dans les analyses à notre goût.
Je tiens néanmoins à féliciter du fond du cœur la présidence portugaise pour ses nouvelles orientations sur les droits de l’enfant – une avancée majeure.
J’espère que l’année prochaine, les présidences successives garantiront un rôle efficace à l’Agence des droits fondamentaux et amélioreront la législation de l’UE pour fournir une protection efficace contre la discrimination dans tous les domaines, ainsi que maintenir la pression dans les pays des Balkans occidentaux afin de traduire les criminels de guerre en justice.
Je tiens aussi à demander aujourd’hui le soutien spécifique de l’Europe pour l’année prochaine dans le cadre du rapport final du représentant personnel du secrétaire général de l’ONU sur les entreprises et les droits de l’homme. En tant que rapporteur parlementaire sur ce sujet, je suis profondément inquiet du fait qu’à Bangalore cette semaine, les tribunaux indiens tenteront d’exécuter un mandat d’arrêt international contre sept activistes néerlandais qui militent pour la Clean Clothes Campaign, parce qu’ils ont posté sur le web un rapport sur les violations du droit du travail chez le fournisseur indien de la marque G-Star, notamment des heures supplémentaires forcées et des violences physiques et verbales.
Ceci est en contradiction avec les responsabilités du gouvernement indien en vertu de l’article 19 du pacte international relatif aux droits civils et politiques. Je demande au Conseil et à la Commission d’enquêter sur cette affaire et j’appelle tous les gouvernements de l’UE à ne pas coopérer avec ce mandat d’arrêt, qui porte sur une question fondamentale: le droit du travail et la liberté d’expression.
Ewa Tomaszewska (UEN). – (PL) Monsieur le Président, ce rapport contient des informations sur les débats menés avec les dirigeants russes et chinois concernant les droits de l’homme. Malheureusement, ces informations ne sont guère spécifiques. Entre-temps, nous voyons en Russie la poursuite du conflit entre la police et l'armée au sujet d'organes appartenant à des Tchétchènes. Des Tchétchènes sont enlevés de chez eux, et quand tous les organes aptes à une transplantation ont été retirés de leurs corps, ils sont jetés comme des déchets.
En Chine, on prélève des organes à des prisonniers politiques. Le Conseil de l'Europe a émis des déclarations sur cette situation plus tôt dans l'année. Tout ce que notre Parlement a réussi à faire, c'est de faire démonter un panneau illustrant les crimes commis par des Russes contre le peuple tchétchène. Ce panneau a été enlevé un soir parce qu'il était jugé choquant. Je précise que c'était le panneau qui était considéré choquant, pas les actions qu'il illustrait.
Combien de temps encore fermerons-nous les yeux sur le génocide? Je voudrais savoir si le problème que j'ai décrit a été évoqué dans les débats menés avec la Russie et la Chine.
Ana Maria Gomes (PSE). – (PT) Je tiens à féliciter la présidence portugaise pour ce rapport qui présente une description détaillée de l'excellent travail réalisé et, en particulier, à mon avis, du moratoire sur la peine de mort. Néanmoins, il manque à ce document une analyse critique et surtout une autocritique. Je veux parler de l'absence de réponse du Conseil européen aux recommandations formulées par le Parlement et le sénateur Dick Marty sur ce que l'on appelle les vols de la CIA. Malgré qu'il leur ait été présenté des preuves selon lesquelles le territoire de divers États membres a été utilisé par des agents de ces pays pour enlever et torturer des personnes suspectées de terrorisme, à qui on a donc refusé l'accès à la justice, le Conseil européen et la présidence portugaise en particulier n'ont toujours rien fait pour dûment s'enquérir de ce qui s'est passé, pour déterminer les responsabilités ni chercher à empêcher que de tels actes criminels ne se reproduisent.
En dépit du fait que ces actes aient été reconnus et soumis à enquête aux États-Unis, les gouvernements européens continuent à pratiquer la politique de l'autruche, ce qui porte atteinte aux valeurs fondamentales et aux intérêts européens ainsi qu'à la crédibilité de l'Europe du point de vue de la promotion universelle des droits de l’homme.
Genowefa Grabowska (PSE). – (PL) Monsieur le Président, je tiens à dire à quel point je suis contente que mon pays, la Pologne, ait décidé de retirer ses réserves au sujet de la création de la Journée mondiale contre la peine de mort. Cette décision non seulement reflète les sentiments du peuple polonais mais elle permet aussi à l'Union de parler d'une seule voix.
Pour ce qui est du rapport qui se trouve sur notre table, j'accueille favorablement son chapitre 4.5, intitulé «Droits des femmes et égalité entre les sexes». Il est bon que la Commission européenne ait inscrit ces deux sujets dans ses priorités et ses cadres d'action pour 2010. Chaque État membre doit à présent garder ces sujets à l'esprit et les prendre en compte dans toutes ses initiatives politiques et actions de coopération entreprises dans un but de développement.
Nous ferions bien d'examiner la situation sur le terrain concernant ces questions. Pouvons-nous réellement être satisfaits lorsque nous entendons ce qui s'y passe? Je citerai à titre d'exemple le cas de cette Iranienne de 24 ans, Delaram Ali, qui a été condamnée à 32 mois de prison et à dix coups de fouet pour avoir simplement participé à une manifestation contre la persécution des femmes. De plus, en juillet de cette année, les corps de 42 femmes ont été trouvés à Bassorah. Comment réagissons-nous au fait que ces femmes ont été assassinées au seul motif qu'elles avaient omis de se couvrir la tête ou qu'elles portaient du maquillage? Je suppose que nous ne pouvons fermer les yeux sur ces exécutions totalement injustifiées?
Manuel Lobo Antunes, président en exercice du Conseil. − (PT) Monsieur le Président, Madame la Commissaire, Mesdames et Messieurs, je serai très bref. Tout d'abord, concernant le rapport présenté et débattu aujourd'hui ainsi que le ton de ce débat, je tiens à vous remercier de votre soutien. Qui plus est, je veux vous remercier pour votre appréciation du travail réalisé par le Conseil, la Commission et le secrétariat général du Conseil pour préparer ce rapport et son contenu. Les commentaires que nous avons entendus ont été très agréables à nos oreilles car ils louaient le niveau de détail et les mérites de ce rapport ainsi que les efforts accomplis pour l'élaborer. Nous avons aussi entendu des critiques, en particulier à propos du fait que nous aurions pu, ici et là, améliorer l'analyse et approfondir davantage les causes et conséquences. Ce rapport va cependant tout à fait dans cette direction: il est plus analytique – du moins cherche à l'être – que les éditions précédentes. Soyez assurés, Mesdames et Messieurs, que nous continuerons à l'améliorer dans le sens que vous suggérez.
Des commentaires ont également été faits sur la substance du rapport. Un membre a dit que l'Europe avait fait quelque chose, peut-être beaucoup, mais qu'elle a encore un long chemin à parcourir. Je crois que l'Europe forme probablement le plus vaste espace de liberté et de justice pour les droits de l’homme et l'État de droit. Elle a suivi une voie régulière et constante pour défendre de façon de plus en plus vigoureuse les droits de l’homme. Toutefois, il est clair que l'on peut toujours faire plus car nous n'atteindrons jamais la fin en matière de liberté et de droits de l’homme: il y aura toujours quelque chose à défendre, à développer, à protéger ou à sauvegarder. Cela ne doit cependant pas nous empêcher de reconnaître que l'Union européenne a déjà fait beaucoup, tant en son sein qu'à l'extérieur. Un cas récent a été cité: les décisions ou mesures que nous avons adoptées dans le domaine, par exemple, de la protection des droits de l'enfant. Voilà une chose que nous avons effectivement réalisée.
Je voudrais aussi souligner quatre ou cinq initiatives du domaine des droits de l’homme qui démontrent très clairement ce que l'UE essaie de faire pour défendre ces droits de l’homme. Demain, ici même, nous proclamerons solennellement la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Au cours de cette moitié de l'année 2007, l'Union européenne a réussi à faire adopter par les Nations unies une résolution relative à un moratoire sur la peine de mort. Nous avons institué l'Agence européenne des droits fondamentaux, qui se trouve maintenant dans sa phase finale de préparation. Nous avons également créé la Journée européenne contre la peine de mort. Ce sont là des exemples concrets, spécifiques et récents qui montrent le caractère continu, persévérant et solide de notre travail en matière de défense des droits de l’homme. Nous devons accepter qu'il y aura des problèmes et que certaines mesures, actions ou attitudes seront loin d'être parfaites!
Nous devons tout de même reconnaître la grande réussite de certaines de nos initiatives dans ce domaine. Pour ce qui est de l'action extérieure, on a évoqué le sommet UE-Afrique, dont nous débattrons par la suite. Sans doute possible, la question des droits de l’homme et de la bonne gouvernance a eu une certaine importance – en fait une grande importance – dans le dialogue que nous avons mené à Lisbonne au cours de ce sommet. Mesdames et Messieurs, comme tous les citoyens européens, vous savez que, dans notre dialogue bilatéral avec les pays tiers, la défense des droits de l’homme constitue un thème constant et prioritaire. Nous le prouvons en condamnant toute violation des droits de l’homme commise dans les pays tiers et en prenant des mesures en réaction à ces violations, en particulier en adoptant des sanctions conçues spécifiquement pour empêcher que de tels actes se reproduisent. Nous devrions donc reconnaître nos mérites et les efforts que nous avons accomplis. Bien sûr, nous devons aussi rectifier ce qui peut être rectifié mais cela ne doit pas nous empêcher d'avoir, dans ce domaine, une attitude confiante et positive, ni de croire que cette attitude est la bonne car conforme à nos traditions humanistes.
Benita Ferrero-Waldner, membre de la Commission. − (EN) Monsieur le Président, avant de répondre à certaines questions soulevées dans ce débat, je tiens à vous signaler que j’ai apporté un certain nombre de copies pour vous, au cas où vous les voudriez. Elles sont disponibles.
Pour en revenir à la discussion, permettez-moi de commencer par les remarques générales au sujet du rapport. Je suis heureuse que vous soyez si nombreux à le trouver utile et nous prenons aussi note des suggestions et des recommandations dont vous avez fait mention dans ce débat. Sur la question de l’analyse de l’efficacité de notre propre politique, soulevée par certains d’entre vous, je tiens simplement à souligner que dans le chapitre 7, consacré à ce sujet, figurent des évaluations et des analyses, mais il est vrai aussi que nous pouvons faire mieux; nous pouvons en faire plus. Permettez-moi aussi de dire qu’il y a une certaine limite, parce que très souvent, les questions relatives aux droits humains sont aussi en relation avec l’évolution de toute la société, elles ne sont pas donc pas aussi facilement mesurables que d’autres éléments qui sont rapidement mis en œuvre.
Permettez-moi aussi de parler de plusieurs choses en général. Les libertés de culte ont été mentionnées. L’Union européenne est, bien entendu, fortement contre la discrimination à l’encontre de tout groupe religieux et notre dialogue avec les pays tiers devrait renforcer les efforts des gouvernements respectifs en vue de poursuivre et d’appliquer les principes des droits humains, notamment, par exemple, par le biais d’institutions nationales des droits humains.
Concernant les autres questions qui ont été mentionnées ici, par exemple la situation des Roms dans les pays candidats, le rapport annuel explique que nous sommes déterminés à respecter pleinement les droits humains de toutes les personnes, dont celles faisant partie de minorités. Les communautés roms ont entre-temps été identifiées comme une des minorités les plus vulnérables, à la fois au sein de l’Europe et des pays candidats. Je pense que vous devons encore nous pencher sur cette question et y apporter des améliorations.
La question du transport et de la détention en général a également été abordée. Selon nous, les pratiques auxquelles on se réfère en parlant de «restitution» ou de «détention secrète» constituent une violation des droits fondamentaux. Cela a clairement été mentionné. Ici, la Commission a dès le départ apporté un soutien actif et a facilité les enquêtes menées à la fois par le Conseil de l’Europe et le Parlement européen au sujet des restitutions et des détentions secrètes. Je tiens simplement à le mentionner. Des choses ont été faites.
Au sujet du Soudan: nous avons entendu M. Osman ici aujourd’hui. Un des éléments clés de la stratégie commune au sommet a été la question du partenariat en matière de sécurité et de paix. Ici, nous fournissons un soutien substantiel à la prévention des conflits, aux opérations de paix et au renforcement de la capacité de l’Afrique à régler les conflits au niveau régional et national. Le président Barroso et le commissaire Michel ont fait usage de chaque opportunité, notamment le dernier sommet Afrique-UE, pour lever les obstacles encore en place.
J’étais présente aujourd’hui quand M. Osman s’est exprimé et il a expressément dit avoir reçu un soutien important de la part des délégations de la Commission européenne. Il y a donc là un soutien majeur, même s’il est vrai qu’on peut toujours en faire plus.
Concernant la situation des droits humains en Iraq qui a également été mentionnée ici: nous savons que la situation est toujours alarmante, tout particulièrement à la lumière de l’insécurité qui y règne et aussi concernant les femmes, les enfants, les minorités et les personnes déplacées. Ici, je pense que la bonne gouvernance, la démocratie, les droits humains et l’État de droit sont au centre de notre politique, afin de diriger lentement le pays dans la bonne direction. Nous avons souvent fait appel à ces politiques au sujet de l’abolition de la peine de mort. Je dis simplement ceci pour souligner quelques-uns de ces problèmes.
Au sujet de la Russie: nous organisons des consultations UE-Russie deux fois par an et la Russie est également mentionnée à deux reprises dans notre rapport, aux pages 72 et 73. Premièrement, les consultations ont été soulignées et deuxièmement, nous avons fait clairement mention de la situation des droits humains, notamment en Tchétchénie. Donc encore une fois, la Tchétchénie n’a pas été oubliée.
Permettez-moi de terminer avec un mot sur l’Inde. Nous sommes au courant de l’action légale entreprise par Fibres and Fabrics International contre la Clean Clothes Campaign. Ce problème touche particulièrement les directions générales de la Commission en charge des pratiques équitables en matière de travail. Nous avons demandé à la délégation de la Commission à Delhi de nous tenir au courant de l’avancée de la procédure en cours dans les tribunaux indiens et nous devrons examiner la détention qui a été mentionnée.
Il reste encore bien des choses à dire, mais je pense que c’était un vaste débat et je ne veux pas accaparer plus de temps.