Le Président. – L’ordre du jour appelle la discussion commune sur:
– le rapport de Caroline Lucas, au nom de la commission du commerce international, sur l’accord international de 2006 sur les bois tropicaux (11964/2007 –C6-0326/2007 – 2006/0263(CNS)) (A6-0313/2008), et
– la question orale à la Commission sur l’accord international sur les bois tropicaux de 2006 de Helmuth Markov, au nom de la commission du commerce international (O-0074/2008 – B6-0458/2008).
Caroline Lucas, rapporteure. - (EN) Monsieur le Président, permettez-moi de commencer par remercier tous mes collègues de la commission du commerce international et de la commission des affaires juridiques pour l’excellente coopération dont ils ont fait preuve dans le cadre de mon rapport sur l’accord international de 2006 sur les bois tropicaux (AIBT). Le vaste consensus politique que nous avons atteint est très rassurant, vu l’extrême importance que revêt la question des forêts, du bois et du commerce.
Vous avez peut-être constaté qu’une année s’est presque écoulée entre le renvoi de cet accord au Parlement et le débat de ce soir. Cela ne signifie certainement pas que la commission du commerce international sous-estime l’importance de la question; mais plutôt que nous pensons que l’accord requiert l’avis conforme et non pas une simple consultation du Parlement, en particulier parce que nous avons quelques positions fortes et spécifiques sur l’accord qui devraient, selon nous, être prises en considération.
Le président de la commission du commerce international, M. Markov, expliquera plus en détail les efforts procéduraux que nous avons déployés afin de renforcer le rôle du Parlement dans ce dossier, et il évoquera aussi, j’en suis sûre, la réponse décevante que nous avons reçue du Conseil en termes de retard et de refus final.
J’ai déclaré que le Parlement avait des positions fortes et spécifiques sur l’accord. Ce dernier représente incontestablement une amélioration par rapport à l’ancien AIBT d’il y a 20 ans qui, même s’il avait été présenté comme un accord promouvant le commerce et la durabilité, parle en réalité beaucoup de commerce et très peu de durabilité. Peut-être cela explique-t-il pourquoi l’un des principaux signataires de l’accord, l’Indonésie, a irrévocablement perdu environ trois quarts de ses forêts et pourquoi la moitié de toutes les activités d’abattage dans des régions telles que l’Amazonie, le bassin du Congo et l’Asie du Sud-Est, sont encore illégales.
Ainsi, si le nouvel accord constitue une amélioration par rapport au précédent, raison pour laquelle nous proposons de soutenir sa ratification par la Communauté, cela devrait toutefois s’entendre comme un appui réservé à un accord non satisfaisant. L’AIBT de 2006 est bien en-deçà des besoins pour faire face au problème de la destruction des forêts tropicales. Par exemple, l’article qui définit les objectifs de l’accord commence par se référer à l’objectif de promouvoir l’expansion et le commerce international avant de parler brièvement de durabilité. De même, la structure de vote de l’organisation qui sous-tend l’accord accorde des voix supplémentaires aux pays producteurs exportant davantage de bois et aux pays consommateurs important davantage. En d’autres termes, en dépit de tous les discours autour de la durabilité, le système est encore conçu pour donner une plus grande influence à ceux qui font le plus de commerce.
Notre rapport demande donc à la Commission de commencer déjà à préparer le prochain cycle de négociations de l’AIBT pour garantir que l’accord suivant constituera une nette amélioration. L’avis conforme du Parlement sur tout accord futur dépendra d’un changement radical dans les objectifs qui y président vers la protection et la gestion durable des forêts tropicales, avec des échanges commerciaux de bois tropicaux qui n’ont lieu que dans la mesure où ils sont conformes à cet objectif. Cela signifie que la Commission devrait proposer des mécanismes financiers adéquats pour les pays qui sont disposés à limiter leurs exportations de bois et à réorganiser le système de vote de l’OIBT.
Nous présentons cependant une autre demande à la Commission, qui concerne la proposition législative tant attendue relative aux mesures complémentaires de lutte contre l’abattage illégal. Cette proposition doit nous être présentée sans plus tarder. Elle était en préparation au début de l’année et aurait dû être votée par la Commission en mai mais elle a été reportée à maintes reprises à cause, selon nous, de pressions exercées par l’industrie et cela en dépit des nombreuses expressions du large soutien politique du Parlement à cette proposition. Selon les dernières informations dont nous disposons, la proposition devrait être votée par le collège des commissaires le 15 octobre - nous saurions gré à la Commission de nous le confirmer -, et je voudrais insister auprès de nos commissaires afin qu’ils prennent leurs responsabilités très au sérieux, car la question de la déforestation est de la plus haute importance et elle préoccupe l’ensemble du Parlement. J’attends avec impatience une réponse très forte et optimiste de la Commission aujourd’hui.
Helmuth Markov, auteur. - (DE) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, je suis heureux que nous ayons l’occasion aujourd’hui de débattre l’accord international sur les bois tropicaux.
La protection et la gestion durable des forêts tropicales acquièrent une importance croissante vu la nécessité de lutter contre le changement climatique, de préserver la biodiversité et de protéger les droits des populations indigènes. En conséquence, la commission du commerce international soutient en majorité l’idée d’un accord international. Cependant, comme notre rapporteure, Mme Lucas, l’a déjà dit - et je voudrais ici la remercier très chaleureusement pour son remarquable rapport -, il subsiste quelques doutes quant au fait que cet accord sera suffisant pour s’attaquer sérieusement au problème de la déforestation. Treize millions d’hectares de forêt tropicale disparaissent chaque année à cause de l’abattage, et environ 20 % des émissions de gaz à effet de serre peuvent être imputées à ce phénomène.
La raison pour laquelle presque une année s’est écoulée entre le renvoi du texte au Parlement et le débat d’aujourd’hui en séance plénière n’est en aucun cas que la commission du commerce international souhaitait reporter ce débat ou n’accordait pas assez d’importance au problème, mais plutôt que, selon nous, ou plutôt selon la commission des affaires juridiques en particulier, cet accord requiert l’avis conforme plutôt qu’une simple consultation du Parlement. Je voudrais à présent remercier en particulier la rapporteure, Mme Panayotopoulos-Cassiotou, et le président de la commission des affaires juridiques, M. Gargani, pour leurs conseils juridiques clairs et rapides concernant la base juridique.
À la lumière de l’avis de la commission des affaires juridiques, le président Pöttering a écrit au secrétaire général du Conseil en janvier et lui a expliqué que cet accord crée, selon nous, un cadre institutionnel spécifique et requiert en conséquence l’avis conforme du Parlement en vertu de l’article 300, paragraphe 3, alinéa 2, du traité CE. Malheureusement, le Conseil n’a répondu à cette lettre que le 23 mai 2008. La réponse - qui se compose de quatre paragraphes - ne contenait pas d’argument juridique d’aucune sorte ou aucun autre motif justifiant le rejet de la demande du Parlement. C’est dans ce contexte que la commission du commerce international a adopté le rapport de Mme Lucas, la présente question orale et la résolution correspondante que nous débattons aujourd’hui.
Je voudrais donc insister non seulement sur l’importance de l’accord en soi et de la lutte contre le changement climatique, mais également sur les droits et prérogatives du Parlement. Les traités actuels n’accordent que peu de grandes compétences au Parlement dans le domaine des accords de commerce international, à l’exception des accords relevant de l’article 300, paragraphe 3, alinéa 2. La création d’un cadre institutionnel spécifique comme celui-ci est la base d’application la plus fréquente de cette disposition du Traité, et elle justifie également l’application de la procédure de l’avis conforme lors de la conclusion d’accords de partenariat économique entre l’UE et les pays ACP ainsi que d’éventuels accords avec la Corée, l’Inde et l’Asie du Sud-Est - qui revêtent une importance particulière dans la lutte contre la déforestation.
Pourquoi l’application de la procédure de l’avis conforme est-elle aussi importante à nos yeux? Nous nous occupons d’avoir des discussions parlementaires et de procéder à un examen au nom des citoyens européens et nous conférons donc une plus grande légitimité et une plus grande reconnaissance publique aux accords. Partant, le Conseil et la Commission ont également intérêt à y associer le Parlement en tant que colégislateur.
À la lumière de l’intérêt que porte le public à la préservation de la biodiversité et à la lutte contre le changement climatique, j’espère que la Commission se pliera au moins à notre demande visant à ce qu’elle présente des rapports annuels sur l’application de l’accord international sur les bois tropicaux et sur son interaction avec les accords bilatéraux.
Jacques Barrot, vice-président de la Commission. − Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, permettez-moi de remercier tout d’abord Mme Lucas pour son rapport, qui attire l’attention sur la nécessité impérieuse de faire face au problème de la destruction des forêts tropicales.
Malgré ses imperfections, l’accord conclu en 2006 est un pas important dans ce sens et son entrée en vigueur ne pourra que faire progresser la cause que vous défendez à juste titre dans votre rapport. Cet accord est sensiblement plus vert et plus social que son prédécesseur de 1994. Il est clair que l’Organisation internationale des bois tropicaux ne peut pas, à elle seule, mettre un terme à la surexploitation et aux coupes illégales dont les principaux facteurs responsables sont souvent extérieurs au secteur forestier. Je me réfère à la conversion des forêts pour l’agriculture permanente ou temporaire, à la rentabilité relativement limitée du maintien des forêts par rapport à d’autres usages du sol et, tout simplement, à la pauvreté. Dans ce contexte difficile, cette organisation est devenue l’un des acteurs majeurs qui prend des mesures pratiques visant à améliorer la gestion durable des forêts tropicales et elle mérite donc l’attention et le soutien de la Communauté.
En ce qui concerne la base juridique pour la conclusion de cet accord, la Commission a procédé à une analyse de la question et est arrivée à la conclusion, partagée par le Conseil et les États membres, qu’elle maintiendrait sa proposition originale. Ce qui presse aujourd’hui, c’est de pouvoir finaliser la procédure visant à l’entrée en vigueur du nouvel accord international des bois tropicaux en 2009.
Plutôt que de rentrer dans des répétitions de l’argumentation juridique qui sous-tend cette décision, je pense plus utile de donner une réponse aux autres questions soulevées dans votre rapport et dans la question orale associée de M. Markov.
Permettez-moi de confirmer qu’il n’existe aucun lien formel entre l’accord international sur les bois tropicaux et les autres conventions, telles que la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, la convention sur la diversité biologique et les accords du partenariat Forest Law Enforcement, Governance and Trade (FLEGT). En effet, ces accords sont très différents en termes de membres signataires des accords, de contenu, de champ d’application et d’organisation. L’interaction entre ces différents accords réside dans la mesure dans laquelle les développements accomplis dans le cadre d’un processus alimentent les débats et les initiatives qui se déroulent ailleurs, ainsi que dans la capacité des processus à produire des synergies. Dans le cadre de tous ces accords, l’Union européenne poursuit son objectif clé d’exploiter pleinement la contribution importante que le commerce peut apporter au développement durable, y compris en assurant l’adhésion aux accords multilatéraux et à la législation nationale en matière d’environnement.
La Commission est bien sûr prête à faire rapport au Conseil et au Parlement sur les activités de l’Organisation internationale des bois tropicaux, mais je voudrais néanmoins attirer votre attention sur le fait que cette dernière publie elle-même des rapports annuels. On peut donc s’y référer et, le cas échéant, la Commission est prête à apporter des informations supplémentaires. Quant au Forest Law Enforcement, Governance and Trade (FLEGT), le règlement du Conseil prévoit d’ores et déjà que la Commission présente un rapport annuel sur le fonctionnement du régime de licence.
Voilà les éléments que je vous donne. Étant donné que Louis Michel est en déplacement et n’a pas pu vraiment être là ce soir, je suis tout à fait habilité, personnellement, à transmettre à M. Michel, dont les services sont présents autour de moi, toutes les remarques et les observations auxquelles donnera lieu ce débat particulièrement intéressant, au moment où nous réfléchissons au développement d’un certain nombre de pays, et notamment des pays africains.
Donc, je remercie vraiment le Parlement de ce travail, Mme Lucas et M. Markov, et je vais maintenant écouter avec attention les propos des différents intervenants.
Georgios Papastamkos, rapporteur pour avis de la commission des affaires juridiques. - (EL) Monsieur le Président, le président de la commission du commerce international, M. Markov, a mentionné les aspects juridiques de la question lorsqu’il a pris la parole à la place de Mme Panayotopoulos-Cassiotou au nom de la commission des affaires juridiques. Comme vous le savez, lors de la réunion du 19 décembre 2007, la commission en question a donné son avis sur la base juridique de la proposition de résolution du Conseil. Cette résolution a été adoptée au nom de la Communauté européenne concernant la conclusion de l’accord international de 2006 sur les bois tropicaux, présenté par la Commission.
La base juridique proposée se compose des articles 133 et 175 ainsi que du premier alinéa du paragraphe 2 de l’article 300 et du premier alinéa du paragraphe 3 de l’article 300 du traité CE.
La commission des affaires juridiques du Parlement européen a décidé de proposer une modification de la base juridique de façon à faire référence au deuxième alinéa du paragraphe 3 de l’article 300. Cette modification permettrait au Parlement européen de bénéficier de la procédure de l’avis conforme au lieu d’une simple consultation.
La Commission a donné une réponse différente, et continue avec la base juridique proposée. La commission des affaires juridiques justifie la décision de modifier la base juridique. Il s’agit d’un accord international qui crée un cadre institutionnel spécifique en organisant des procédures de coopération.
Zbigniew Zaleski, au nom du groupe PPE-DE. - (PL) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, le bois est un matériau de construction précieux; il est sain, pratique et manque peut-être un peu de résistance au feu, mais il est de plus en plus prisé. Bref, il s’agit d’un produit attrayant et très recherché, et souvent du principal produit d’exportation d’un pays. Les bois tropicaux - à savoir les bois qui sont limités à une région géographique précise - sont encore plus attrayants et font l’objet d’un commerce qui est souvent illégal et destructeur pour les forêts et l’écosystème tout entier.
Nous sommes dès lors confrontés à un dilemme: d’une part, nous avons besoin de bois et de matériaux de construction, et de l’autre, nous devons protéger les forêts tropicales. Si l’exploitation ne fait plus l’objet d’un contrôle efficace et rationnel, cela entraînera une catastrophe non seulement environnementale, mais aussi démographique. Sans les forêts, il n’y aura plus d’autre végétation, plus d’animaux ni de peuples qui y vivent. Des accords internationaux sont nécessaires, mais la sensibilisation à une gestion rationnelle du bois est probablement prioritaire ici. Sans une telle rationalisation, nous détruirons un important élément irremplaçable du monde naturel. Nous serons des destructeurs, et non de sages gestionnaires.
Pour résumer, je suis donc en faveur de l’extension de l’accord (en n’oubliant pas la possibilité de continuer à l’améliorer), qui règlemente, même si ce n’est que partiellement, un commerce libre et juste - ou plutôt «équitable» - de ces bois et qui est peut-être dans le même temps un modèle pour l’exploitation des bois en provenance d’autres régions - de Sibérie, Monsieur le Commissaire, dont nous entendons trop peu parler ces derniers jours, d’Amazonie, dont nous entendons un peu plus parler, et d’autres régions vulnérables du monde.
David Martin, au nom du groupe PSE. - (EN) Monsieur le Président, permettez-moi de dire au début de ce débat que le groupe socialiste félicite Caroline Lucas pour son rapport qui bénéficie de notre total soutien, et qu’il votera en faveur de tous les amendements qu’elle y propose.
Je salue le fait que l’accord international révisé sur les bois tropicaux mette davantage l’accent sur la gestion durable - par exemple, en s’attaquant à l’abattage illégal - et sur la restauration et la préservation des forêts dégradées. Comme d’autres l’ont dit, la préservation des forêts tropicales est vitale pour la préservation de la biodiversité et pour notre lutte contre le changement climatique car, comme nous le savons tous, les forêts tropicales jouent un rôle vital dans l’élimination du dioxyde de carbone de l’atmosphère. À l’heure actuelle, la déforestation est responsable de 20 % des émissions totales de carbone.
Je partage l’objectif de Caroline Lucas de garantir que l’accord révisé accorde réellement la priorité aux questions sociales et environnementales et ne se concentre pas uniquement sur l’augmentation du commerce des bois tropicaux.
Les pays en développement doivent évidemment disposer des ressources pour protéger, restaurer et gérer de manière durable les forêts. L’accord prévoit des dispositions de financement sur la base de programmes thématiques, en plus du financement de projets. J’espère que les programmes thématiques pourront se concentrer sur des questions telles que la gouvernance et la réduction de la pauvreté, et que les États membres pourront apporter une contribution généreuse à ces programmes.
Je partage la déception qu’ont exprimée Caroline et Helmuth Markov quant au refus d’accorder la procédure de l’avis conforme au Parlement pour cet accord, et je suis également d’avis que nous devrions bénéficier de cette procédure.
J’espère que nous pourrons compter sur la Commission pour présenter au Parlement un rapport annuel qui analyse - et «analyse» est le mot clé - l’application de l’accord. Je comprends ce que la Commission nous a dit ce soir - que l’Organisation internationale des bois tropicaux publie son propre rapport annuel -, mais nous voulons entendre la réponse de la Commission à ce document.
Quant aux accords bilatéraux, l’UE a signé plus tôt ce mois-ci un accord avec le Ghana pour empêcher l’importation de bois illégaux sur les marchés européens. Cet accord garantira en théorie que les règles de base de la préservation des forêts, comme un contrôle sérieux par le gouvernement de l’abattage, sont respectées - et à l’heure actuelle, nous devons signaler que l’abattage des forêts ghanéennes atteint un rythme annuel de près de 2 %. Si cet accord bilatéral fonctionne, il peut être profitable aux deux parties. Au Ghana, où l’abattage illégal a réduit la taille des forêts tropicales de quelque 25 % par rapport à sa taille originelle en moins de 50 ans, l’accord contribuerait à assurer l’avenir de l’industrie du bois - qui est la quatrième industrie du pays en termes de rentabilité.
Au sein de l’Union européenne, où les consommateurs sont de plus en plus soucieux de l’environnement, nous pouvons garantir que le bois que nous importons du Ghana est totalement certifié comme propre. S’il faudra peut-être plusieurs années pour que cet accord soit pleinement opérationnel, je pense qu’il s’agit d’un début prometteur, et je soutiens les projets de la Commission de signer des accords similaires avec d’autres pays africains, tels que le Gabon, le Cameroun et le Liberia.
Enfin, je voudrais réitérer un point qu’a soulevé Caroline: cet accord constitue un modeste départ, c’est mieux que rien, mais il ne va pas suffisamment loin, et nous avons besoin d’autres propositions de la Commission et de la communauté internationale.
Magor Imre Csibi, au nom du groupe ALDE. - (EN) Monsieur le Président, je voudrais féliciter la rapporteure pour les conclusions de son rapport, qui bénéficie de mon total soutien. Après plus de 20 ans d’accords sur les bois tropicaux, leur impact sur la gestion durable des forêts tropicales semble limité. La Food and Agriculture Organisation (FAO) de l’ONU estime que rien qu’entre 2000 et 2005, le taux de déforestation des forêts tropicales a augmenté de 8,5 % par rapport aux années 90.
Il est dommage que les parlementaires et la société civile ne soient pas davantage associés à l’élaboration de ces accords, afin de contrebalancer les intérêts commerciaux et de faire pression en faveur d’une gestion plus durable des forêts tropicales. Toutefois, quel que soit son degré d’efficacité, tout accord doit faire partie d’une approche plus générale, où chaque région reconnaît sa responsabilité et prend des mesures fermes pour arrêter la destruction des forêts.
En Europe, nous pourrions penser que nous disposons de mécanismes efficaces pour protéger la biodiversité et le consommateur, mais la réalité nous prouve le contraire. De gros volumes de bois et de produits dérivés illégaux arrivent dans des ports communautaires chaque jour. Lorsque le bois illégal est entré sur le marché d’un État membre, il peut facilement être vendu à n’importe quel autre des 27 États membres sans autre contrôle quant à sa légalité. Ainsi, les consommateurs européens qui achètent de bonne foi des meubles ou des matériaux de construction en provenance de sources soi-disant légales, deviennent à leur insu complices de crimes à l’égard des forêts.
En tant que gros importateur et consommateur de bois qui s’est engagé à réduire de moitié la déforestation dans le cadre de ses plans de lutte contre le changement climatique, l’UE a l’obligation de lutter contre l’abattage illégal et le commerce de produits du bois récoltés de manière illégale. Si nous voulons sérieusement nous attaquer au problème de la déforestation et de l’abattage, nous devrions d’abord affûter notre action chez nous en appliquant une législation européenne qui empêche la mise sur le marché de l’UE de bois et de produits dérivés illégaux. Malheureusement, une proposition législative en ce sens a été constamment reportée, en dépit de la résolution de l’UE de juillet 2006 et de l’annonce par la Commission d’un programme de travail en octobre 2007.
À l’occasion de ce débat, je voudrais inviter la Commission à clarifier les raisons pour lesquelles la publication du «paquet forêt» a été reportée. Par ailleurs, je demande instamment à la Commission de présenter, sans plus tarder, une législation visant à assurer que seul les bois tropicaux et les produits dérivés récoltés légalement sont mis sur le marché de l’UE.
Je crains que l’on ait déjà perdu trop de temps. Je demande à présent à la Commission d’accélérer la procédure de présentation de cette proposition législative importante, afin de permettre une première lecture avant la fin de cette législature. Nous devons veiller à envoyer les bons messages et à les envoyer à temps.
Wiesław Stefan Kuc, au nom du groupe UEN. - (PL) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, la conclusion d’un accord international sur les bois tropicaux constitue certainement un pas très important vers la protection des forêts tropicales et vers un commerce plus civilisé de certaines espèces de bois. Les questions procédurales ne devraient toutefois pas nous détourner de nos objectifs fondamentaux. Il est peut-être important d’établir une base juridique, il est peut-être important qu’il s’agisse de la procédure de consultation ou de l’avis conforme, mais cela nous permettra-t-il de protéger les forêts tropicales et d’aller plus loin?
Chaque jour, des milliers d’hectares de forêts, et pas uniquement de forêts tropicales, disparaissent irrémédiablement. Les terres qui subsistent se transforment en marécages ou en déserts. La déforestation ne peut être évitée par une nouvelle plantation, en tout cas pas à court terme. Les pays pauvres d’Afrique, d’Amérique et d’Asie n’ont pas les moyens de contrôler la surexploitation des forêts, de l’empêcher ou de procéder à une gestion rationnelle. Cela vaut également pour les forêts sibériennes. Nous ne protégeons pas les arbres et nous n’avons aucun respect pour le bois. Plus le pays est pauvre, plus cela est vrai. Au cours de la révolution culturelle en Chine, de nombreux kilomètres carrés de forêt ont été coupés. Le bois est utilisé comme principale source d’énergie.
C’est la raison pour laquelle l’Organisation internationale des bois tropicaux a un rôle aussi important à jouer. N’oublions pas que le progrès technique et les machines modernes pour l’abattage et le débusquage d’arbres accélèrent ce processus, et le bois moins coûteux résultant de l’abattage illégal est attrayant pour les commerçants. Toute faille comblée dans le commerce, tout obstacle, certificat d’origine et contrôle sera une autre réussite. J’espère que cet accord jouera son rôle le plus rapidement possible.
Margrete Auken, au nom du groupe des Verts/ALE. - (DA) Monsieur le Président, je voudrais remercier Mme Lucas pour son excellent rapport. Nous avons établi, et tout le monde est d’accord sur ce point, que le commerce des bois tropicaux dans l’UE est une honte. Comme cela a été dit à maintes reprises ce soir, nous sommes fatigués de ne voir que des déclarations solennelles et aucune action. J’espère que la Commission réalise à quel point ceux qui lui demandent de prendre des mesures pour tenter de changer les choses, afin que l’avenir soit un peu plus prometteur, sont nombreux.
Le bois illégal afflue sur le marché de l’UE, et c’est en soi complètement absurde. S’il s’agissait d’un autre produit, nous parlerions de recel d’objets volés. Les programmes d’étiquetage volontaire sont une mesure plutôt étrange. Les actes illégaux devraient être interdits, y compris au sein de l’UE; il faudrait y mettre un frein non pas via un étiquetage, mais via une réelle interdiction. Je pense que cela surprendra bon nombre de personnes d’apprendre qu’il est tout à fait légal d’acheter du bois illégal au sein de l’UE. Évidemment, l’étiquetage, c’est mieux que rien.
L’ampleur du contrôle qu’ont les grandes sociétés d’abattage - dont certaines des pires viennent de mon pays, le Danemark - sur la législation communautaire, ou l’absence de cette législation, est également grotesque. En conséquence, je soutiens l’appel qu’a lancé la rapporteure au commissaire afin qu’il commence dès à présent à réviser l’accord international, et nous devons également nous mettre au travail à l’échelle communautaire. Nous avons désespérément besoin d’introduire de l’efficacité. Si la mauvaise gouvernance et la corruption dans les pays producteurs de bois jouent un rôle important, nous ne pouvons pas ignorer la demande, comme cela a été réitéré à maintes reprises, car il s’agit du facteur le plus important.
L’UE doit assumer sa responsabilité car elle est l’un des plus grands importateurs de bois au monde. Nous avons besoin d’une législation efficace qui garantisse que tous les produits du bois vendus sur le territoire communautaire - y compris les produits transformés - sont légaux et durables. Nous pouvons commencer dès aujourd’hui avec les marchés publics. Tout le reste serait inconcevable.
Jens Holm, au nom du groupe GUE/NGL. - (SV) Monsieur le Président, la destruction de forêts tropicales se poursuit sans relâche. Treize millions d’hectares par an, soit un terrain de football par seconde, telle est la superficie forestière qui disparaît chaque année de la planète et ce, en dépit de l’entrée en vigueur, il y a 20 ans, du premier accord sur le bois. En 2006, l’accord international sur les bois tropicaux a été signé. Si le champ d’application de l’accord est général et laisse quelque peu à désirer, cet accord nous donne au moins un outil pour nous attaquer au problème.
Mme Lucas a attiré l’attention sur ce point, et ses amendements indispensables nous donneront un meilleur moyen de protéger les forêts tropicales. Je voudrais poser une question directement à la Commission. Mme Lucas a dit dans son introduction que l’ensemble du Parlement européen attendait la législation de la Commission sur la lutte contre l’abattage illégal. Quand l’aurons-nous? Est-il vrai que la Commission a déjà voté sur cette question en mai de cette année? Pourquoi n’avons-nous encore rien vu? Vous n’avez pas abordé ce point dans votre discours, mais le Parlement veut savoir. Qu’est-il advenu de la proposition législative? Donnez-nous une explication, s’il vous plait.
Je remercie Mme Lucas pour avoir insisté sur l’ensemble du problème du commerce du bois. Est-il raisonnable que tant d’hectares de forêts soient coupés et leurs produits, exportés? Mon pays, la Suède, est l’État le plus densément boisé de l’UE. Dans le même temps, nous importons un sixième de tout le bois que nous consommons. Pourquoi? Évidemment car acheter du bois sur le marché mondial est meilleur marché. Mme Lucas veut faire quelque chose à ce propos et demande à l’UE de soutenir les pays qui adoptent des stratégies visant à protéger leurs forêts tropicales. Elle a raison, il s’agit d’une très bonne proposition.
Une autre mesure qu’a abordée Mme Lucas consiste à assortir les accords commerciaux à des conditions et à veiller à ce que les entreprises européennes et les producteurs du Sud soient obligés d’y satisfaire, et à ce que les conventions et accords internationaux soient respectés. L’idée est que le commerce international devrait être mis à profit - comme un outil de promotion de la durabilité et du développement dans le monde.
Une autre dimension de la déforestation qui fait l’objet d’un débat trop limité est l’industrie de la viande. Une grande partie de la viande et des aliments pour animaux consommés dans le monde provient des terres auparavant couvertes par des forêts. La production de viande est l’une des principales causes de déforestation en Amazonie. Le président du groupe d’experts des Nations unies sur l’évolution du climat, Rajendra Pachauri, a récemment lancé un appel à la réduction de la consommation de viande. Il a raison. J’ai une autre question pour la Commission: quand y aura-t-il une stratégie de réduction de la consommation de viande? Comme je l’ai déjà dit, Mme Lucas a également raison dans la plupart de ce qu’elle dit dans son rapport. Le groupe pour la Gauche unitaire européenne soutient donc cet excellent rapport.
Maciej Marian Giertych (NI). - (PL) Monsieur le Président, les accords internationaux existants concernant la dendroflore tropicale sont très clairement inadéquats. Les ressources génétiques des forêts tropicales diminuent à une vitesse alarmante du fait de la surexploitation par l’homme.
Il y a deux raisons à cela. Les espèces les plus intéressantes de bois tropicaux ont encore un marché dans les pays riches. Elles sont recherchées et abattues de manière encore plus efficace. Entre-temps, le potentiel de culture de ces espèces dans des conditions forestières gérées est limité par l’absence de méthodes de pépinières permettant leur culture. Les semences sont en général non dormantes, en d’autres termes, elles ne conviennent pas à l’entreposage et au transport. Elles germent dès qu’elles sont tombées de l’arbre. Des études spéciales sur ces espèces en voie de disparition sont donc nécessaires pour la production de semences, la culture de plantes et la gestion de pépinières. Ceux qui font le commerce de ces bois devraient être taxés pour financer ces études.
La deuxième raison est la surexploitation du couvert arboré, y compris des buissons, par les populations locales, qui l’utilisent pour se chauffer et pour cuisiner. Il est impossible de mettre un terme à cette destruction sans organiser la fourniture d’un autre combustible à ces populations.
Georgios Papastamkos (PPE-DE). - (EL) Monsieur le Président, la conclusion de l’accord international de 2006 sur les bois tropicaux est un événement extrêmement positif. Par ailleurs, il reflète le consensus entre 180 organisations internationales et gouvernements d’États producteurs et consommateurs.
L’importance des objectifs exposés dans l’accord ne fait dès lors aucun doute. Nous devons uniquement penser aux effets néfastes de l’abattage illégal et de la déforestation, en particulier à leur contribution à l’effet de serre. Il est donc essentiel de soutenir les politiques nationales des pays producteurs en vue d’une utilisation et d’une exploitation durables des forêts tropicales, et de renforcer leur capacité à mettre en œuvre une législation forestière et à lutter efficacement contre l’abattage illégal.
La question du financement adéquat pour atteindre les objectifs du nouvel accord est évidemment cruciale. On demande à l’UE de veiller à ce que seuls les bois tropicaux abattus de manière légale soient importés et distribués sur le marché européen. Nous devons promouvoir des actions d’information et de sensibilisation des consommateurs.
Examinons toutefois si les programmes volontaires suffisent ou s’il faut adopter des règles et spécifications juridiquement contraignantes concernant le commerce légal des bois tropicaux. Cet objectif doit être poursuivi non seulement à l’échelle internationale, mais également dans le cadre des accords bilatéraux couverts par le programme FLEGT et des accords commerciaux en cours de négociation; en d’autres termes, des accords de libre échange. L’accord UE - Ghana est un exemple qui montre la voie de la coopération bilatérale.
Francisco Assis (PSE). - (PT) Monsieur le Président, ce cas spécifique est un exemple clair où la préoccupation pour la libération du commerce internationale devrait être reléguée au second plan par rapport à des objectifs plus importants, dans le cas présent, de nature environnementale et sociale. La préservation des forêts tropicales est essentielle au maintien de l’équilibre écologique de la planète et nous pouvons dire, sans exagérer, qu’en tant que telles, les forêts tropicales sont réellement l’héritage de l’humanité et que nous avons tous l’obligation de préserver les forêts tropicales. Les pays les plus riches et développés en particulier ont des responsabilités auxquelles ils ne peuvent se dérober. Ces forêts se trouvent dans des pays qui sont pour la plupart des pays pauvres confrontés à d’énormes difficultés, et tout discours que nous produisons ici serait tout à fait inutile si nous ne pouvons pas promouvoir des actions de développement à l’intention de ces pays.
Il est crucial que nous aidions ces pays et il est absolument nécessaire que les principaux consommateurs et les régions les plus développées du monde - et c’est clairement le cas de l’Union européenne - s’engagent, d’une part, à veiller à ce que des mécanismes de contrôle approfondis de l’utilisation de ces forêts soient en place et, d’autre part - et cet élément est vital -, à garantir une aide aux pays producteurs.
Ces pays dépendent des forêts tropicales et leurs économies sont en grande partie liées aux forêts. La déforestation rapide finira par avoir des conséquences dramatiques à tous les niveaux - pour nous, à une échelle plus globale, au niveau environnemental, mais pour eux, de manière plus tangible, au niveau économique et social, et cela mettra même en péril leur propre survie. En conséquence, tout ce que nous pouvons faire doit partir d’ici. Nous devons apporter un soutien et disposer de mesures qui encouragent le développement et la transformation de la structure de production dans ces pays, afin qu’ils puissent entretenir une relation avec leurs forêts et leurs ressources qui soit mieux adaptée à leurs intérêts et qui soit plus compatible avec les intérêts généraux de l’humanité. Il s’agit d’une responsabilité qui incombe à l’Union européenne. Cet accord va dans la bonne direction: cela ne suffit pas encore mais le rapport démontre clairement ces lacunes, ce qui nous donne quelque espoir pour l’avenir.
Jean-Claude Martinez (NI). – Monsieur le Président, les bois tropicaux ce soir, la crise financière cette semaine, et puis les grandes pandémies, les flux migratoires, ou encore quarante pays en crise alimentaire, tout cela amène à la même conclusion: les grands problèmes politiques d’aujourd’hui sont planétaires et appellent une réponse politique planétaire.
Certes, a priori, personne ne conteste la souveraineté permanente de l’Indonésie sur ses ressources forestières tropicales et son droit à planter des palmiers pour faire de l’huile de palme, tout comme le Brésil a le droit de remplacer sa forêt par des zébus, tout comme le Gabon. Mais il se trouve que l’exercice des droits souverains territoriaux entraîne des conséquences négatives hors des territoires souverains. La déforestation, l’appauvrissement, les menaces pesant sur la faune et sur la flore, l’arrivée des bois sur les marchés à des prix de dumping, créent des dommages à l’échelle planétaire. Alors, le problème n’est pas de dire: «tout fait des hommes qui cause aux autres hommes un dommage oblige ceux par la faute de qui le problème est arrivé à le réparer». Le problème est de traiter ces questions au niveau juridique. Comment traite-on ce problème? Où agit-on? En Europe, avec des étiquettes sur les bois, parce qu’ils sont certifiés comme une sorte de bois équitable comme on parle de café équitable, avec des accords commerciaux bilatéraux? C’est une première étape sans doute nécessaire, mais la solution doit être globale. Il faut bien plus qu’un accord multilatéral sur le bois parce que les hommes des Communautés, parce que les Africains, les Latinos, les Asiatiques ont droit eux aussi à ce qu’on rémunère la multifonctionnalité qu’ils remplissent. Voilà pourquoi, Monsieur le Président, il faut monter ces problèmes politiquement au niveau planétaire et trouver les concepts et les paradigmes pour que la vie continue sur notre planète.
Le Président. – Merci pour votre plaidoyer transnational, Monsieur Martinez.
Corien Wortmann-Kool (PPE-DE). - (NL) Monsieur le Président, je voudrais également remercier sincèrement Mme Lucas et M. Zaleski pour les efforts qu’ils ont déployés en vue de produire cette résolution. En fin de compte, et c’est regrettable, le commerce du bois récolté de manière illégale ou non durable se déroule encore à grande échelle en Europe.
Le plan d’action FLEGT de 2003 de la Commission européenne, qui vise spécifiquement à empêcher le commerce en Europe du bois récolté illégalement, n’a eu qu’un effet très limité. Partant, il est regrettable que la Commission européenne doive encore présenter les nouvelles propositions. Finalement, la mauvaise conduite des importateurs semble être encore payante, étant donné que des mesures ne sont presque jamais prises à l’encontre du commerce illégal et qu’il n’y a aucune sanction. Les importateurs de bois qui se comportent de manière responsable payent donc un prix élevé, tant au propre qu’au figuré, pour respecter les normes environnementales et de sécurité, étant donné que le commerce de bois illégal bien moins coûteux se poursuit à grande échelle.
L’industrie du bois elle-même a déjà lancé certaines initiatives sérieuses, comme la certification. Nous devons les soutenir par le biais d’une législation contraignante, conformément au cadre de l’OMC. C’est pour cela que je plaide également en faveur de la reconnaissance des systèmes de certification existants qui ont été créés en partie par le secteur lui-même et en partie par des ONG. Ce que veut Mme Lucas, à savoir la création d’un nouvel organe européen, générerait une importante bureaucratie et n’est pas selon nous nécessaire.
Des mesures doivent évidemment être adoptées au niveau local pour lutter contre l’abattage illégal, mais nous attendons également de la Commission européenne qu’elle présente une proposition pour l’introduction de sanctions, qui devraient également avoir un effet dissuasif sur les importateurs de bois. Après tout, si nous n’imposons pas de sanctions aux entreprises qui font du commerce illégal, le danger est que ce comportement illégal continue à être payant, et c’est cela que nous devons éliminer.
Rovana Plumb (PSE). - (RO) Je voudrais féliciter la rapporteure, Mme Lucas, et tous ses collègues pour leur travail sur ce rapport. Je pense que l’accord international sur les bois tropicaux contribuera à la gestion durable des forêts du monde, même si 80 % d’entre elles ont déjà été détruites ou dégradées. Nous savons tous que les forêts sont un havre pour la préservation de la biodiversité et qu’elles jouent un rôle crucial dans la lutte contre le changement climatique. Les importations de meubles et de bois à bas prix dans le cadre d’accords d’association volontaires déstabilisent les marchés internationaux et provoquent une perte d’emplois dans les pays tant exportateurs qu’importateurs. En conséquence, je voudrais insister une fois de plus sur la nécessité de mesures législatives visant à protéger les forêts tropicales et les autres forêts également, et à empêcher le commerce illégal du bois. Je salue l’accord révisé, et je compte sur la Commission pour qu’elle transmette un rapport annuel sur l’évolution de cet accord.
Béla Glattfelder (PPE-DE). - (HU) Nous ne pouvons arrêter le changement climatique que si nous arrêtons également la déforestation. Les efforts que nous déployons en Europe en vue de protéger l’environnement resteront vains si nous tolérons la destruction de l’environnement dans d’autres régions du monde.
La libéralisation du commerce international et la mondialisation stimulent la destruction de l’environnement qui couvre les continents. Les règles de l’OMC doivent être complétées par des dispositions strictes relatives à la protection de l’environnement. Dans le cas contraire, la poursuite de la libéralisation conduira à une destruction plus poussée de l’environnement. Il ne suffit toutefois pas d’interdire le commerce illégal du bois: l’importation de produits et meubles fabriqués à partir de bois récolté illégalement doit également être interdite.
Les gens pensent-ils réellement que l’importation de meubles chinois peu coûteux n’a rien à voir avec la déforestation? Ce rapport constitue un pas dans la bonne direction, mais il faut des mesures encore plus radicales, que nous réclame l’état de notre planète. Jusqu’à ce que soient adoptées des règles plus strictes, nous devons demander aux grands distributeurs internationaux de meubles, comme IKEA, de faire usage d’une retenue transparente, et de ne pas vendre de meubles fabriqués à partir de bois illégal.
Enfin, la déforestation stimule non seulement le commerce du bois et des meubles, mais elle augmente également les prix des produits agricoles et la demande de biocarburants. Si nous autorisons le commerce de biocarburants produits via la déforestation, nous devons alors être conscients que, chaque fois que nous faisons le plein de notre voiture avec ces carburants, nous avons également contribué à l’abattage de quelques mètres carrés de forêt tropicale.
Zuzana Roithová (PPE-DE). - (CS) Monsieur le Président, l’état des forêts tropicales est alarmant depuis plusieurs années maintenant et il est impossible de fermer les yeux sur le pillage sans scrupule de cet élément essentiel de la biosphère de notre planète. Il est triste que la législation de lutte contre l’abattage illégal de bois tropicaux ait rencontré de gros obstacles en Europe, tandis que, selon les estimations, 13 millions d’hectares de forêts anciennes sont détruits chaque année, ce qui contribue évidemment fortement à l’augmentation des émissions de CO2. Je soutiens totalement l’appel en faveur de l’inclusion d’exigences en matière de protection de l’environnement dans la politique commerciale commune de l’Union européenne. Je suis très heureuse que le rapport de Mme Lucas mette également l’accent sur la diffusion d’informations sur les conséquences catastrophiques de la déforestation. Ce type d’accord devrait être ratifié par le Parlement et il est important que nous discutions du rapport de la Commission sur l’application de l’accord international et sur l’état de la déforestation chaque année, ici, au Parlement européen. Malheureusement, il est trop tard pour prévenir ou arrêter le changement climatique, mais il nous incombe d’y mettre au moins un frein. Cet accord, quoiqu’insuffisant, constitue un pas dans la bonne direction.
Czesław Adam Siekierski (PPE-DE). - (PL) En dépit de son addiction aux slogans sur la protection de l’environnement, l’Europe unie semble faire fi du problème croissant de la disparition des forêts originelles, dont la cause principale est la gestion rapace des forêts pour répondre à la demande du commerce des bois tropicaux. Près de 80 % de la superficie totale de ces forêts a déjà disparu, victime de la déforestation.
L’UE doit augmenter l’aide financière qu’elle accorde aux États producteurs afin d’empêcher l’abattage illégal et de promouvoir la gestion durable des forêts. L’introduction de la certification du bois pour le marché européen est une autre très bonne idée. Selon les statistiques officielles, les importations de bois de l’UE représente une proportion relativement faible de la production totale de bois, mais n’oublions pas entre-temps les énormes quantités de bois importées en Europe sous forme transformée. La lutte pour préserver ce qui reste de nos forêts originelles est de facto une lutte pour l’avenir des générations futures.
Jacques Barrot, vice-président de la Commission. − Monsieur le Président, merci aux parlementaires qui sont intervenus. Je voudrais rappeler d’abord que l’accord de 2006 vise à promouvoir l’expansion du commerce international des bois tropicaux issus de forêts faisant l’objet d’une gestion durable et d’une exploitation dans le respect de la légalité et à encourager à la gestion durable des forêts tropicales productrices de bois.
Alors, je voudrais dire aussi que c’est le seul instrument international qui soit de nature multilatérale et qui couvre le domaine des forêts, notamment tropicales, dans un cadre juridiquement agréé. L’accord touche aussi indirectement les autres forêts, mais de manière moins évidente, plus marginale.
Ce qui est intéressant, c’est que l’accord établit un cadre de coopération qui permet de conjuguer toutes les initiatives en matière de forêts. La Commission entend bien être un participant actif à cet accord, avec la participation de la Communauté au budget administratif, et nous souhaitons que l’on arrive également à financer des actions d’envergure à travers des programmes thématiques.
Mais, bien entendu, tout cela ne doit pas exclure, bien au contraire, des accords bilatéraux dans le cadre du programme FLEGT. Vous l’avez souligné et vous avez raison. Il faut que, dans ces accords bilatéraux, qui seront de plus en plus le fruit d’une approche plus globale, nous introduisions ce problème du respect des bois tropicaux.
Il est vrai que l’accord dont nous avons parlé ce soir est un début – je reprends l’expression de l’un d’entre vous – modeste, mais cela devrait être le point de départ d’une stratégie beaucoup plus efficace que par le passé. En principe, le texte sur l’abattage illégal et le règlement d’application sur FLEGT sont prévus pendant le mois d’octobre et je pense qu’ainsi la Commission pourra répondre aux attentes que vous avez exprimées ici.
Alors, encore une fois, je remercie Mme Lucas, je remercie aussi bien sûr l’auteur de la question, M. Markov, et je transmettrai extrêmement fidèlement tous les propos et toute la sensibilité du Parlement à ce problème qui, en effet, est un problème majeur, comme vous l’avez souligné les uns et les autres. Il s’agit d’un patrimoine de l’humanité qui est essentiel pour l’avenir. Et j’ai bien aimé l’expression «le berceau de la biodiversité». C’est évident, les forêts sont les berceaux de la diversité.
Cette protection des forêts est véritablement une action majeure qui engage l’avenir de la planète. Donc, je remercie le Parlement européen de s’être vraiment engagé dans cette voie et j’espère que, avec la Commission, nous pourrons répondre progressivement à des attentes dont j’ai mesuré aujourd’hui l’importance et l’acuité. Je remercie encore une fois tous les parlementaires et en particulier votre rapporteure.
Caroline Lucas, rapporteure. - (EN) Monsieur le Président, je voudrais remercier mes collègues pour leurs commentaires et leur soutien, mais je voudrais dire quelques mots au commissaire Barrot en particulier. J’espère que vous avez entendu l’impatience et la frustration qu’ont exprimées ce soir ici tous les orateurs quant aux retards interminables de cette proposition législative tant attendue relative aux mesures de lutte contre l’abattage illégal. Veuillez faire savoir à vos collègues que le Parlement estime qu’il est tout à fait inacceptable que cette proposition législative soit constamment reportée.
Je regrette vivement que vous n’ayez pas été en mesure de répondre à une question qui vous a été posée au moins trois fois par des intervenants ici, ce soir, concernant la date à laquelle nous pourrions recevoir cette proposition. Je pense que cette situation joue également un très mauvais tour au public. Je pense que le fait que l’UE ne soit pas en mesure de faire le ménage chez elle donne une très mauvaise image. Nous aimons parler de l’autorité politique que nous aimons à penser que nous avons sur la scène mondiale. Si l’autorité politique a un sens, il devrait être que nous mettions un terme à la vente et à l’importation de bois illégal dans l’UE, et nous voulons voir des mesures bien plus rapides pour y parvenir.
Je profite que j’ai la parole pour soulever une autre question. De nombreux collègues ont mentionné le lien entre la déforestation et le changement climatique et je voudrais ajouter une remarque finale concernant le paquet climat que les députés voteront au cours des semaines à venir. Comme vous le savez, la déforestation est un élément clé du système d’échange de quotas d’émission, et je voudrais demander à mes collègues de ne pas se laisser convaincre par des arguments en faveur de l’inclusion des «crédits de puits» dans le système d’échange de quotas d’émission. Aujourd’hui, lors du déjeuner, nous avons tenu un débat sur ce sujet et nous avons insisté sur les raisons pour lesquelles inscrire la déforestation dans le système d’échange de quotas d’émission est une mauvaise idée, et elles sont nombreuses, en particulier le fait que cela déformerait l’ensemble du système. D’importants problèmes entourent les mesures de vérification, de surveillance, de déclaration et de responsabilité. Nous ne devons certainement pas nous attaquer à la déforestation dans le cadre du paquet climat, mais nous soutenons que cela doit être fait en utilisant les revenus des enchères pour investir de manière adéquate dans les pays confrontés à ce problème.
Monsieur le Commissaire, veuillez faire en sorte qu’en automne, l’UE commence réellement à être crédible en matière sylvicole. Veuillez nous garantir que vous présenterez cette proposition le plus rapidement possible.
Jacques Barrot , vice-président de la Commission. − Je crains que Mme Lucas ne m’ait pas entendu. Parce que je crois avoir répondu, Madame, de manière claire. J’ai annoncé un texte pour octobre. Alors, est-ce que c’est la traduction? Est-ce que je n’ai pas été assez clair? Je tenais à apporter cette précision. J’ai l’habitude d’écouter le Parlement, je me ferai l’écho de l’impatience du Parlement mais j’ai en même temps annoncé, il y a quelques minutes, ce délai du mois d’octobre!
Le Président. – Bien. Octobre, c’est la semaine prochaine, rendez-vous la semaine prochaine alors. Je vous remercie.
En conclusion de ce débat, j’ai reçu, conformément à l’article 108, paragraphe 5, du règlement, une proposition de résolution au nom de la commission du commerce international(1).
Le débat est clos.
Le vote aura lieu demain mercredi.
Déclarations écrites (article 142)
Péter Olajos (PPE-DE), par écrit. - (HU) Personne ne peut plus douter de l’impact du défrichement et de la destruction des forêts sur le changement climatique et la biodiversité. Pour être plus précis, la déforestation affecte aujourd’hui 13 millions d’hectares dans le monde et représente la troisième source d’émissions de gaz à effet de serre. La production illégale de bois engendre une érosion, mine la subsistance de communautés locales et représente une perte annuelle de 10 à 15 milliards d’euros pour les pays producteurs de bois.
Je salue bien sûr la création d’un accord international sur les bois tropicaux, même si nous sommes loin d’avoir atteint notre but avec cet accord. Nous y arriverons si nous parvenons à adopter une approche plus générale qui englobe les forêts tempérées, au moins au sein de l’Union européenne; une approche qui garantisse la fabrication légale des produits du bois ainsi que la traçabilité tout au long de la chaîne d’approvisionnement. Seul un tel accord pourrait contribuer réellement à la protection des forêts et à l’utilisation durable du bois.
Je ne me fais évidemment aucune illusion, en particulier vu la déclaration que plusieurs de mes collègues et moi-même avons rédigée au cours du printemps et de l’été cette année, et qui a été signée par un quart de tous les députés du Parlement.
J’espère que, tôt ou tard, la question des forêts tropicales attirera l’attention sur nous, sur l’Europe. Peut-être que, grâce à un accord sur les forêts tropicales, la Commission présentera une législation disposant que seuls le bois et les produits dérivés récoltés légalement peuvent être importés sur le marché l’Union européenne.