Le Président. – L’ordre du jour appelle le rapport (A6-0400/2008) de Mme Kauppi, au nom de la commission des affaires juridiques, sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 68/151/CEE du Conseil et la directive 89/666/CEE du Conseil en ce qui concerne les obligations de publication et de traduction de certaines formes de société (COM(2008)0194 - C6-0171/2008 - 2008/0083(COD)).
Piia-Noora Kauppi, rapporteure. − (EN) Monsieur le Président, ce rapport s’inscrit dans le cadre du train de mesures visant à simplifier le droit des sociétés. Il est essentiel que l’Union européenne s’efforce de simplifier l’environnement des sociétés afin que celles-ci puissent prospérer et créer de la croissance pour l’économie européenne. L’objectif est de réduire la charge administrative découlant des obligations de publication et de traduction de certaines formes de société. Cette proposition s’intègre dans l’action de grande ampleur engagée afin de réduire la charge administrative; elle permettrait de libérer et de réaffecter les ressources de l’entreprise et partant, d’accroître la compétitivité des économies de l’Union européenne.
Pour l’heure, selon la première directive sur le droit des sociétés, les sociétés doivent publier certaines informations au bulletin national en plus du registre du commerce de l’État membre concerné. Dans la plupart des cas, la publication au bulletin national entraîne des coûts supplémentaires pour les sociétés, sans apporter de réelle valeur ajoutée. L’objectif de cette proposition est donc de faire disparaître toutes les dispositions de droit interne qui imposent une publication supplémentaire entraînant un surcoût pour les sociétés.
Quoi qu’il en soit, la Commission laisse une certaine liberté aux États membres en ce qui concerne ces obligations de publication supplémentaire. Les États membres ont toujours la possibilité de prévoir des obligations supplémentaires, mais celles-ci devraient être couvertes par la redevance unique proposée dans le cadre de la nouvelle plate-forme électronique.
Les États membres devraient tous disposer d’une plate-forme électronique contenant la totalité des informations ou permettant d’accéder à celles-ci dans les fichiers électroniques des sociétés contenus dans le registre. Cela constituerait un moyen peu coûteux et simple de fournir toutes les informations concernant les sociétés. Certains États membres disposent déjà de ces registres et bases de données électroniques, mais d’autres non.
Le plus important est d’introduire une redevance unique, dont le montant serait fixé par les États membres et qui couvrirait l’ensemble des coûts liés à la publication et aux exigences administratives. Cette redevance unique devrait également couvrir toutes les exigences supplémentaires imposées au niveau national en ce qui concerne la publication des informations dans la presse locale ou régionale.
Cependant, la commission des affaires juridiques souhaitait également introduire une certaine flexibilité en ce qui concerne ces coûts, et nous disons maintenant que les États membres peuvent prévoir des frais supplémentaires, à condition que ceux-ci se fondent sur des conditions objectives.
Pour ce qui est de la onzième directive sur le droit des sociétés, cette proposition vise les dispositions qui imposent la traduction des documents à verser au registre de la succursale. Lorsqu’une société enregistre une succursale, elle doit aussi insérer certaines informations dans le registre de la succursale. Cette obligation entraîne souvent des coûts supplémentaires considérables pour les sociétés puisqu’elles doivent non seulement assurer la traduction de certains documents dans la langue de l’État membre où est située la succursale, mais également respecter des obligations parfois excessives pour l’homologation de cette traduction et/ou sa certification. Nous nous efforçons donc d’assouplir les obligations de traduction en abolissant les exigences relatives à l’homologation et à la certification.
L’objectif est de ramener à un minimum les coûts de traduction et de certification. Cette solution est également avantageuse pour les sociétés, puisqu’elle permet une certaine réduction des coûts, tout en garantissant la fiabilité des traductions.
Je suis d’accord avec la proposition de la Commission et je me suis efforcée de rester la plus proche possible de la formulation adoptée dans cette proposition. Cependant, il n’a pas été possible de dégager un consensus au sein de ce Parlement sur la base de la proposition de la Commission.
Dans le rapport, nous avons introduit certaines modifications pour apporter des précisions quant à la mise en œuvre pratique des dispositions liées aux frais de publication et de celles relatives à la traduction. Nous avons également introduit certains amendements techniques visant à garantir une correspondance exacte avec la deuxième directive relative au droit des sociétés.
La commission des affaires juridiques a introduit trois amendements de compromis déposés par plusieurs collègues afin que ces obligations de publication supplémentaire puissent être maintenues, à condition qu’elles soient fondées sur des conditions objectives. Cependant, nous avons introduit ces amendements sous la forme de considérants - ils ne sont pas repris dans les articles. Je pense qu’il est essentiel que les considérants contiennent une recommandation permettant aux États membres de recourir à cette possibilité, mais nous ne les incitons pas à le faire. Si les États membres estiment qu’il est vraiment indispensable que les sociétés publient ces informations au bulletin national - et c’est quelque chose que les États membres souhaitent réellement - ils sont libres de maintenir cette obligation, mais nous n’avons intégré aucune demande en ce sens dans les articles.
La deuxième chose, c’est que j’ai personnellement essayé d’introduire une période de transition, ce qui me semblait être une bonne manière de progresser. Ces obligations de publication seraient maintenues pendant la période de transition, mais une fois ce délai écoulé, nous nous baserions uniquement sur la base de données électronique. Je pense que ce type de proposition en faveur d’une période de transition permettrait également de contourner le problème de pénétration d’Internet, sachant que certains États membres présentent un meilleur taux de pénétration que d’autres. Peut-être qu’au terme de la période de transition, nous pourrions nous assurer qu’il existe une diffusion suffisante des informations dans tous les États membres. De cette manière, nous pourrions tenir compte du fait que le taux de pénétration d’Internet n’est pas identique dans tous les États membres.
Charlie McCreevy, membre de la Commission. − (EN) Monsieur le Président, je voudrais remercier la rapporteure pour son travail sur ce dossier, qui s’est avéré plus compliqué que prévu. Nous prenons très au sérieux notre engagement visant à réduire la charge administrative qui pèse sur les entreprises et nous sommes très reconnaissants au Parlement pour ses encouragements continus à cet égard.
Cependant, il est difficile de ne pas être déçu en voyant certains des amendements proposés à la première directive sur le droit des sociétés. Permettez-moi de rappeler que, dans sa résolution du 12 décembre 2007 sur le programme de travail de la Commission pour 2008, le Parlement européen s’était félicité de la détermination de la Commission à réaliser l’objectif visant à réduire de 25 % d’ici à 2010 les charges administratives que l’UE et les États membres font peser sur les entreprises. Le Parlement avait ajouté qu’il considèrerait cette question comme une priorité pour les mois à venir, en particulier en ce qui concerne les PME, et comme une contribution essentielle en vue d’atteindre les objectifs de Lisbonne. Le Parlement avait donc souligné qu’il examinerait les propositions législatives dans cette optique.
Par ailleurs, dans sa résolution du 21 mai 2008 sur la simplification de l’environnement des sociétés, le Parlement avait soutenu cette proposition spécifique visant à modifier la première directive relative au droit des sociétés, convenant que la publication des informations réglementaires devait être rendue plus facile pour les sociétés. En particulier, le Parlement soutenait vivement l’utilisation de nouvelles technologies.
Cependant, le rapport de la commission des affaires juridiques qui est à l’examen aujourd’hui sape complètement l’objectif de la proposition déposée par la Commission. L’analyse d’impact effectuée par la Commission avait estimé le potentiel de réduction à environ 600 millions d’euros par an. Selon le projet de rapport, non seulement les États membres pourraient continuer à imposer toutes les charges administratives actuelles sur les sociétés, mais ils pourraient également en ajouter de nouvelles. Donc, alors que la proposition de la Commission repose sur l’idée que le nouvel outil offert par la plate-forme électronique devrait remplacer les méthodes de publication actuelles, qui sont extrêmement lourdes pour les sociétés, le projet de rapport ne permettrait pas de réduire les charges administratives mais, au contraire, en ajouterait de nouvelles.
L’objectif de la proposition de la Commission a été soutenu par une grande majorité des parties intéressées. Il a également été soutenu par une grande majorité des États membres lors des discussions qui ont été menées jusqu’ici au sein du Conseil. Adopter la directive telle qu’elle est actuellement proposée par la commission des affaires juridiques risquerait de compromettre la crédibilité de tout l’exercice de réduction de la charge administrative.
Dans la mesure où l’amendement déposé par la commission des affaires juridiques vise à garantir le financement des quotidiens qui dépendent actuellement des redevances payées par les sociétés à des fins de publication, la Commission peut approuver cet objectif sur le principe. Cependant, il faudra trouver d’autres moyens pour assurer ce financement. Nous ne pouvons pas imposer cela aux sociétés en les obligeant à se conformer à des obligations de publication qui n’apportent aucune valeur ajoutée significative dans l’environnement technologique actuel.
Margaritis Schinas, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et monétaires. − (EL) Monsieur le Président, au nom de la commission des affaires économiques et monétaires, je voudrais vous faire part de notre position. Nous soutenons dans une large mesure l’objectif central de cette proposition déposée par la Commission, qui est bien structurée et vise naturellement à réduire autant que possible les charges administratives.
En ce qui concerne la traduction, nous pensons que la simplification des procédures et la reconnaissance des traductions effectuées par des traducteurs certifiés établis dans un autre État membre sont absolument justifiées et nous approuvons complètement cette approche.
J’en viens maintenant à la question de la publication. Notre commission estime - comme l’estime également la commission des affaires juridiques, et je pense qu’elle a tout à fait raison - qu’au-delà des sociétés, il y a également des citoyens, qui ont eux aussi le droit de savoir. Malheureusement, Monsieur le Commissaire, les citoyens n’ont pas tous le même accès aux médias électroniques vers lesquels votre proposition initiale les renvoyait.
Nous vivons dans une Europe pluraliste, avec différents modèles et différentes valeurs. Vous qui venez d’Irlande, vous devez savoir que le résultat du référendum dans votre pays, ce sentiment qu’ont bon nombre de vos compatriotes que nous voulons imposer un seul modèle pour l’ensemble de l’Europe, nous a coûté très cher. C’est pourquoi nous ne souhaitons pas introduire ce modèle en Europe, en sachant pertinemment que dans mon pays, dans ma région, l’accès à Internet est plus que limité. Pourquoi devrions-nous priver ces personnes, ces citoyens européens, de leur droit de prendre connaissance de choses qui les concernent via d’autres moyens de communication plus traditionnels?
Je pense donc, Monsieur le Commissaire - comme le pensent également la commission des affaires économiques et la commission des affaires juridiques - que la plate-forme électronique devrait être obligatoire, c’est évident. Cependant, cette plate-forme ne doit pas être la seule option. Nous devons permettre à tous les citoyens européens d’avoir accès à ces informations. Nous ne voulons pas d’une situation où les citoyens d’Europe sont obligés d’avoir un Blackberry pour pouvoir savoir ce qui se passe dans leur région, parce que je peux vous dire que, là où je vis, de nombreuses personnes ne possèdent pas de Blackberry.
Je considère dès lors qu’en tant que représentant de la Commission - et je pense que nous devrions envoyer le même message au Conseil - vous devez tenir compte de la position exprimée à l’unanimité par la commission des affaires juridiques et à une large majorité par la commission des affaires économiques. Puis-je ajouter que, dans le cas où vous envisageriez d’ignorer cette position, je vous conseillerais d’y réfléchir à deux fois, car ce n’est que par un dialogue constructif et démocratique que nous pourrons trouver des solutions acceptables pour tous dans l’intérêt du plus grand nombre, et non pas d’une minorité.
Georgios Papastamkos, au nom du groupe PPE-DE. – (EL) Monsieur le Président, le Conseil européen de mars 2008 avait demandé que de nouvelles initiatives législatives soient rapidement mises sur pied afin d’améliorer l’environnement des sociétés dans l’Union en réduisant les obligations et les coûts administratifs. Selon moi, la proposition de directive déposée par la Commission et dont nous discutons aujourd’hui n’aide pas vraiment à atteindre cet objectif.
Le plus gros problème des sociétés, et en particulier des petites et moyennes entreprises, c’est que des conditions objectives sont requises pour améliorer l’environnement bureaucratique, législatif et fiscal dans son ensemble et nous attendons de la Commission qu’elle apporte une contribution plus importante en ce sens.
Dans ce cas précis, la publication des comptes annuels et autres états financiers des sociétés vise avant tout à appliquer le principe de transparence et de publicité dans les activités commerciales. Cependant, le faible taux de pénétration d’Internet dans bon nombre d’États membres de l’Union ne permet pas d’apporter une garantie suffisante.
Par ailleurs, si la publication de ces informations n’était obligatoire que sous format électronique, cela provoquerait la perte de milliers d’emplois spécialisés dans la presse écrite traditionnelle. La presse est également une composante essentielle du principe de transparence et de démocratie dans l’Union, dont la contribution au multilinguisme et à la diversité de l’Union européenne n’est plus à démontrer.
J’estime que le filet de sécurité que représentent l’adoption d’une redevance unique et le maintien de la possibilité de publier ces informations dans la presse écrite, en parallèle à l’introduction d’un registre électronique, tel que formulé dans le consensus qui a pu être dégagé et a été voté par tous - je dis bien tous - les membres de la commission des affaires juridiques, quelles que soient leurs convictions politiques, constitue la solution équilibrée et rationnelle dont nous avons besoin.
Pour finir, permettez-moi d’insister sur le fait que le Parlement européen a pour mission et pour devoir de donner son consentement constructif dans le cadre du processus législatif de la Communauté, tout en préservant l’indépendance de sa volonté législative. Et comme je l’ai déjà dit, la volonté de la commission des affaires juridiques est que la plénière adopte le rapport de Mme Kauppi, que je tiens à féliciter pour son travail.
En guise de post-scriptum, je voudrais vous dire ceci, Monsieur le Commissaire. Je ne sais pas dans quelle mesure la proposition de consensus déposée par la commission des affaires juridiques vous a déçu, mais j’espère sincèrement que, lorsque le traité de Lisbonne entrera en vigueur, la culture de coopération entre la Commission et le Parlement européen changera - car elle doit changer. C’est ce que nous attendons; c’est ce que le Parlement européen démocratiquement élu attend.
Ieke van den Burg, au nom du groupe PSE. – (EN) Monsieur le Président, je voudrais tout d’abord dire un mot à propos de la procédure. Il est regrettable, Monsieur le Commissaire, que nous n’ayons pas discuté de ce point ce matin, lorsque nous siégions ensemble, car j’ai été un peu surprise de vous entendre utiliser des mots très durs dans votre discours au Parlement. En ce qui concerne la procédure, je n’apprécie pas ce que la présidence française a fait de nos propositions, en refusant toute négociation et tout dialogue sur un éventuel compromis.
Il en va de même pour la Commission. Dans ce genre de dossiers, il est normal d’essayer de s’entendre et de trouver une solution qui réponde aux préoccupations des différentes parties. Je regrette que cela ne ce soit passé ainsi et j’espère que d’ici au vote en commission, nous aurons l’occasion de rectifier le tir.
En ce qui concerne le contenu, je pense que nos points de vue ne sont pas si différents. Moi aussi, je souhaite vivement alléger les charges administratives. Je suis sans cesse en train de faire pression pour que l’on introduise le système XBRL dans la comptabilité, ainsi que ce type de plate-forme électronique. Je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que c’est nécessaire, précisément parce que dans certains États membres, la société électronique n’est pas encore complètement développée. Il est nécessaire de prévoir une solution transitoire et temporaire afin que les États membres aient encore la possibilité de recourir à ce type d’enregistrement sur support papier.
Il s’agit vraiment d’un problème temporaire et il devrait être possible de trouver une solution pragmatique. J’ai entendu dire, cette semaine, que seulement 20 ans s’étaient écoulés depuis la première utilisation de la messagerie électronique et depuis la première connexion à Internet. Je pense donc que d’ici 10 à 20 ans, tout se fera par voie électronique et tout le monde trouvera ça normal. Ce n’est qu’un problème temporaire et je ne pense pas qu’il faille en faire toute une histoire. Nous devrions essayer de trouver une solution raisonnable et pragmatique, puisque c’est toujours ce que vous nous dites vouloir également.
Jean-Paul Gauzès (PPE-DE). - Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, mes chers collègues, je voudrais d’abord remercier notre collègue, Piia-Noora Kauppi, pour l’excellent rapport qu’elle a fait et pour les efforts qu’elle a menés pour permettre de trouver une solution raisonnable aux diverses questions qui se posaient, et notamment à celle de la plateforme.
La proposition de directive s’intègre dans l’action de grande ampleur engagée afin de réduire la charge administrative des entreprises pour alléger leurs contraintes et accroître leur compétitivité. Nous soutenons bien sûr activement cet objectif profitable aux PME. Nous approuvons la création d’une plateforme électronique contenant la totalité des informations et le principe d’une redevance unique couvrant l’ensemble des coûts liés aux publications nécessaires.
Il convient toutefois d’assurer la meilleure information possible et de laisser subsister les modes usuels de publication qui sont encore nécessaires, notamment au travers de la presse papier. Le texte proposé par le rapporteur après négociations, et adopté par la commission juridique à l’unanimité, permet aux États membres de prévoir le maintien des modes usuels de publication, dès lors que leur coût est intégré dans la taxe unique de publication.
Nous avons donc, Monsieur le Commissaire, respecté l’esprit de la proposition en rendant obligatoire la plateforme et en maintenant le principe d’une taxe unique. Nous avons toutefois tenu compte de la réalité des différents pays, qui ne sont pas tous numérisés de la façon dont le sont certains, et des habitudes d’information qui ne doivent pas être méconnues.
Vous savez, Monsieur le Commissaire, qu’il faut tenir compte de l’avis des citoyens et que l’Europe ne doit pas apparaître comme une source de contraintes ou de difficultés nouvelles. C’est pour cela que nous voulions la flexibilité afin de tenir compte des réalités des divers États membres, en conservant l’économie du système.
Vous avez dit de façon dure, Monsieur le Commissaire, que la proposition de la commission juridique sapait la position de la Commission. Je ne pense pas que ce soit exact, et il n’est pas exact non plus de dire que la proposition de la commission juridique introduit des formalités nouvelles, puisqu’au contraire, il est dit que ce sont les formalités existantes qui peuvent être maintenues et puisque nous excluons bien évidemment que des formalités nouvelles puissent être introduites.
Je crois, Monsieur le Commissaire, que ce qu’il faut, c’est que l’Europe montre qu’elle est capable de réduire la bureaucratie et les lourdeurs administratives, tout en respectant les identités nationales.
Manuel Medina Ortega (PSE). – (ES) Monsieur le Président, je remercie la Commission d’avoir présenté cette proposition. Je crois que celle-ci est positive et qu’elle nous aidera à réduire les charges administratives superflues.
Comme l’ont déjà dit les précédents orateurs, ce Parlement a le devoir de ramener sur terre les propositions très généreuses et très altruistes de la Commission. Le fait est que nous avons 27 pays avec des systèmes juridiques très différents et des langues très différentes, ce qui signifie que, dans chaque pays, nous devons nous adapter à la réalité nationale, y compris en ce qui concerne la question de la langue.
Cependant, comme vient de le rappeler M. Gauzès ainsi que d’autres orateurs avant lui, il est essentiel que la reconnaissance de ces spécificités nationales n’entraîne pas une augmentation des coûts, que les redevances soient uniformes et que les gouvernements assument si nécessaire ces coûts supplémentaires.
Toutefois, il y a encore un autre problème, à savoir celui des traductions. Dans l’Union européenne, nous n’avons pas de langue commune. Différentes langues sont parlées dans les 27 États membres, voire même au sein de certains de ces pays, comme c’est le cas dans celui du commissaire. Nous devons faire avec.
Aussi, en termes juridiques, nous sommes confrontés à une réalité, qui est que les documents juridiques diffèrent. La commission des affaires juridiques a proposé, par exemple, un amendement sur la certification des documents et des traductions. En ce moment, elle prépare un rapport sur la reconnaissance des documents certifiés dans différents pays de l’Union européenne, qui devrait venir compléter le rapport à l’examen.
Enfin, je crois que la Commission a bien fait de présenter cette proposition. La rapporteure a fait de l’excellent travail et nous nous sommes tous employés à élaborer une proposition de texte législatif qui puisse être reconnu dans toute l’Union, en garantissant les droits de chacun et en tenant compte du fait que l’Union est encore en construction, qu’elle rassemble différents systèmes juridiques nationaux et différents niveaux d’accès aux moyens de communication électroniques.
Françoise Grossetête (PPE-DE). - Monsieur le Président, je voudrais tout d’abord féliciter Mme Kauppi, la rapporteure, parce qu’elle a réalisé un excellent travail et grâce à elle, la commission des affaires juridiques a trouvé un compromis qui, je le rappelle, a été voté à l’unanimité, Monsieur le Commissaire. Donc le signal envoyé est clair. Il permet de concilier le besoin de simplification administrative des entreprises, en particulier des PME, et le droit à la formation des citoyens, tout en laissant la possibilité aux États membres de maintenir des obligations de publication comme ils le souhaitent.
Je suis convaincue que le Parlement européen suivra la voie tracée par la commission des affaires juridiques. Les 27 États membres ont leurs traditions, certains prônent le tout Internet, d’autres utilisent encore des solutions de communication plus traditionnelles sur du papier. Il faut respecter les traditions. N’oublions pas que 50% des citoyens européens n’ont pas d’accès Internet. Si les informations ne sont disponibles que sur une plateforme électronique unique, ceux qui n’ont pas cette possibilité d’accès à Internet ou qui préfèrent utiliser des supports papier ne pourront recevoir les informations relatives aux entreprises de leur région.
Je crois que le Parlement européen comprend bien qu’une suppression pure et simple de la publication des annonces judiciaires et légales, par exemple dans des journaux régionaux, aurait des conséquences désastreuses. En conséquence, les États membres doivent pouvoir organiser la diffusion des informations par des voies complémentaires dans des conditions spécifiques.
Monsieur le Commissaire, nous ne sommes pas dans un débat idéologique. Ne croyez-vous pas que, dans les circonstances actuelles, vous avez autre chose à faire que d’entraver ce qui se passe bien dans les États membres?
À vouloir tout simplifier, on prend parfois le risque de compliquer encore plus les choses. Réduire les coûts? Oui, mais à quel prix? Alléger les contraintes pour accroître la compétitivité? Oui, mais où est la compétitivité quand la simplification risque de porter gravement atteinte à toute l’économie d’une filière? L’attente est forte pour que la Commission prenne conscience du fait que nous devons favoriser les solutions qui permettront à la presse écrite de surmonter les difficultés qu’elle connaît actuellement.
Monsieur le Commissaire, vous ne devez pas être hermétique aux traditions des États membres. En agissant de la sorte, vous prenez la responsabilité du risque de licenciements d’un certain nombre de journalistes et du manque d’information pour une grande partie de la population.
Ce que nous voulons, c’est une directive équilibrée avec la plateforme électronique et la taxe unique. Nous sommes persuadés que nous avons apporté cette solution, vous devez respecter le vote du Parlement européen.
Lidia Joanna Geringer de Oedenberg (PSE). – (PL) Monsieur le Président, cela fait déjà longtemps que le Parlement européen essaie d’attirer l’attention sur la question des coûts administratifs inutiles et disproportionnés imposés aux entreprise européennes. Non seulement ces coûts rendent les opérations plus difficiles, mais elles constituent également un obstacle qui empêchent les entreprises de relever les défis de l’économie mondiale actuelle, fortement compétitive.
C’est pourquoi je me réjouis que la Commission se soit enfin penchée sur cette question en proposant d’appliquer la procédure accélérée pour modifier les première et onzième directives sur le droit des sociétés, ce qui contribuera à améliorer plus rapidement l’environnement des entreprises européennes. Dans le cas de la première directive, la disparition de toutes les dispositions de droit interne qui imposent une publication supplémentaire entraînant un surcoût pour les sociétés semble effectivement souhaitable. La plate-forme électronique contenant la totalité des informations sur les sociétés constituera une solution peu coûteuse et facilement accessible, tout comme la redevance unique qui devra couvrir l’ensemble des coûts, qu’il s’agisse de coûts administratifs ou de coûts liés aux exigences en matière de publication.
La proposition relative à la onzième directive sur le droit des sociétés concerne la traduction et la certification des documents à verser au registre d’une succursale établie dans un autre État membre. La reconnaissance mutuelle des traductions, que la Commission propose en vue de réduire la charge administrative, contribuera sans aucun doute à réduire les coûts supportés par les sociétés, tout en garantissant la fiabilité des traductions. Enfin, permettez-moi de féliciter la rapporteure, Mme Kauppi, pour son excellent rapport.
Costas Botopoulos (PSE). - (EL) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, puisque j’ai le privilège d’être le dernier orateur, je voudrais en profiter pour faire un commentaire politique et deux commentaires techniques à propos de la directive dont nous discutons.
Mon commentaire politique est qu’aujourd’hui, nous assistons à un événement extrêmement rare dans ce Parlement européen, à savoir une parfaite unanimité de toutes les formations politiques, de la gauche à la droite, quant à la direction que le Parlement souhaite donner à une initiative législative donnée. De nombreux collègues ont dit - et je souhaite moi aussi insister sur ce point - qu’il s’agissait là d’un fait extrêmement rare et que la Commission devait absolument en tenir compte dans sa décision finale.
Nous ne sapons pas la proposition de la Commission. Nous essayons de la moderniser et de la rendre plus humaine, plus logique et plus pragmatique. Voilà pour ce qui est de mon commentaire politique.
S’agissant de mes deux commentaires techniques, je tâcherai d’être bref. Sur la question de la publication, je voudrais me joindre aux collègues qui ont déclaré qu’il était absolument logique et juste que les États membres dans lequel l’accès à Internet est encore très limité aient la possibilité d’imposer la publication dans la presse, en parallèle à la règle générale exigeant la publication électronique, et ce pour des raisons sociales et financières évidentes.
Je voudrais aborder rapidement la question de la traduction, qui ne pose pas de problèmes particuliers. La reconnaissance des traductions constitue une solution très concrète. La question de la traduction soulevée ici n’est pas une question de langue ou de transparence, il s’agit d’une question de style. C’est un problème concret qui peut être résolu très simplement grâce à la reconnaissance des traductions.
Il convient donc de distinguer les questions politiques et les questions techniques. Nous ne sapons pas la proposition, nous l’améliorons.
Charlie McCreevy, membre de la Commission. − (EN) Monsieur le Président, permettez-moi tout d’abord de dire que si Mme van den Burg avait soulevé cette question ce matin, j’y aurais répondu avec grand plaisir. Je vous aurais demandé si vous aviez encore d’autres questions et, dans l’affirmative, je vous aurais répondu. Si vous aviez posé une question sur quelque sujet que ce soit - y compris la météo en Irlande - j’en aurais discuté avec vous également. Je n’ai pas de problème avec ça.
Je n’ai aucun problème avec les décisions du Parlement: c’est votre travail et vous devez le faire. Mais en ce qui concerne cette proposition spécifique, vous devez garder à l’esprit le contexte dans lequel elle a été élaborée et, puisque je suis sensible à votre position, j’aimerais que vous en fassiez de même avec la mienne.
Cette proposition spécifique a été proposée en vue de réduire la charge administrative qui pèse sur les petites sociétés. Elle s’inscrit dans le cadre des mesures visant à simplifier l’environnement des entreprises. Selon les estimations, cette proposition devrait permettre de réduire les coûts de 600 millions d’euros par an. Notre objectif en avançant cette proposition était donc de réduire les coûts administratifs pour les petites entreprises. Comme je l’ai signalé tout à l’heure, l’ensemble du projet de réduction des coûts a été salué par le Parlement européen dans le cadre de diverses résolutions.
C’est donc dans ce contexte que cette proposition a été déposée. C’est en voulant réduire les coûts administratifs et simplifier l’environnement des petites entreprises que nous sommes arrivés à cette proposition spécifique.
Vous ne pouvez pas attendre de moi que j’accepte des amendements qui vont dans la direction complètement opposée en ne réduisant pas les coûts administratifs, mais, au contraire, en les augmentant. Si le Parlement européen estime que, dans ce cas précis, il serait plus avantageux de maintenir les choses dans leur état actuel, très bien. Il s’agit d’un point de vue parfaitement légitime, mais inconciliable avec votre objectif initial, qui était de réduire les coûts. Si le Parlement et d’autres estiment que, pour toutes les raisons que vous avez mentionnées, il serait préférable de garder cela tel quel, vous ne pouvez pas me demander d’applaudir et de dire que cela va permettre de réduire les coûts administratifs, alors qu’en fait, c’est exactement le contraire - cela va augmenter les coûts plutôt que de les réduire.
Les amendements déposés par les deux commissions du Parlement européen auraient pour effet que la seule modification que les États membres devront mettre en œuvre après l’adoption de cette directive sera de rendre obligatoire l’utilisation d’une plate-forme électronique. Mais cela ne permettrait en aucun cas de réduire la charge administrative actuelle, ni de réaliser les économies prévues dans notre proposition initiale, qui, comme je vous l’ai dit, ont été estimées dans l’analyse d’impact à environ 600 millions d’euros par an. Par conséquent, adopter une directive qui n’entraîne aucune réduction, mais seulement quelques modifications cosmétiques, enverrait un bien mauvais signal en ce qui concerne la réduction générale de la charge administrative dont nous parlions.
Je voudrais donc demander aux députés du Parlement européen de respecter également mon point de vue. Si le Parlement décide de suivre cette approche - nous le verrons lors du vote de demain - c’est votre point de vue et vous avez tout à fait le droit d’avoir votre propre opinion. Je n’ai pas de problème avec ça. Mais vous devez également respecter mon point de vue: je ne peux accepter des amendements qui vont à l’encontre de l’objectif que nous nous étions fixé au moment de présenter cette proposition. On ne va pas se disputer pour si peu, mais je ne peux pas, à l’encontre de toute logique, approuver ce que le Parlement est en train de faire, car il augmente la charge administrative au lieu de la réduire.
Je peux écouter vos arguments en faveur du statu quo - et il y a peut-être du vrai dans ce que vous dites - mais ce n’est pas dans cet esprit que nous avons entrepris ces travaux; ce n’est pas la raison pour laquelle nous avons présenté cette proposition spécifique. Mais que voulez-vous, c’est la vie!
Piia-Noora Kauppi, rapporteure. − (EN) Monsieur le Président, je voudrais juste dire un mot à propos de la procédure. Mme van den Burg a déjà signalé que la présidence française ne s’était pas très bien comportée dans ce dossier. Nous avons essayé d’organiser plusieurs réunions de trilogue afin de trouver un éventuel compromis. Malheureusement, la présidence française ne souhaite pas assister à ces réunions. Elle ne souhaite pas non plus aborder ce sujet au sein du groupe de travail du Conseil. Elle n’est pas non plus présente aujourd’hui pour discuter de ce sujet très important.
La position de la commission des affaires juridiques laisse beaucoup de liberté aux États membres. En fait, elle leur en laisse bien plus que je ne l’aurais souhaité. Cependant, la commission des affaires juridiques est allée aussi loin qu’il lui était possible d’aller. Il s’agit de la seule proposition que le Parlement a sur la table pour le moment. Je pense que, si le Conseil n’est pas en mesure d’accepter le point de vue du Parlement, autrement dit celui de la commission des affaires juridiques - qui sera soumis au vote demain - comme nous lui avons demandé de le faire, nous devrons alors aller en deuxième lecture.
Nous ne pouvons tolérer que le Conseil se joue de nous. S’il n’accepte pas le texte tel que voté par le Parlement demain, la procédure prendra certainement du retard. Ce projet ne sera peut-être pas prêt avant les élections et il y a peut-être un risque que la Commission retire la proposition. Je pense qu’il serait très décevant que le Conseil ne trouve pas une majorité qualifiée sur ce texte et qu’il ne présente pas des propositions en vue de trouver un compromis.
Nous sommes tout à fait disposés à trouver un compromis. Personnellement, je serais ravie que le Conseil propose quelque chose dans le cadre d’une réunion de trilogue, quelque chose dont nous pourrions partir afin de trouver ce compromis, mais le Conseil préfère se cacher, il ne vient pas aux réunions et n’organise pas de trilogues. Nous nous trouvons dès lors dans une situation très difficile.
C’est la raison pour laquelle je suis très contrariée en ce qui concerne les discussions relatives à la procédure. J’espère que la Commission ne retirera pas sa proposition et que nous aurons encore l’opportunité de trouver un compromis qui satisfasse tous les États membres ainsi que le Parlement européen.