Le Président. - L’ordre du jour appelle la discussion commune sur:
- le rapport de Manuel Medina Ortega, au nom de la commission des affaires juridiques, contenant des recommandations à la Commission sur l’acte authentique européen (2008/2124(INI)) (A6-0451/2008),
- le rapport de Diana Wallis, au nom de la commission des affaires juridiques, contenant des recommandations à la Commission sur l’e-justice (2008/2125(INI)) (A6-0467/2008), et
- le rapport d’Antonio López-Istúriz White, au nom de la commission des affaires juridiques, contenant des recommandations à la Commission sur la protection juridique des adultes: implications transfrontalières (2008/2123(INI)) (A6-0460/2008).
Manuel Medina Ortega, rapporteur. – (ES) Monsieur le Président, il s’agit d’une initiative de la commission parlementaire des affaires juridiques visant à établir la reconnaissance des actes authentiques européens.
Cette initiative du Parlement invite la Commission à adopter les mesures qu’il considère appropriées. Elle s’appuie sur le programme de La Haye, à savoir la reconnaissance non seulement des décisions judiciaires mais aussi des actes authentiques.
L’objectif de cette initiative est de faciliter la position des consommateurs au sein de l’Union européenne.
Les formalités requises pour la reconnaissance de ces actes sont à la fois coûteuses et fastidieuses.
Il semble donc qu’il nous appartienne de faciliter la circulation ou la reconnaissance de ces actes authentiques, de manière à ce que toute formalité transfrontalière, par exemple un mariage, un contrat ou un document similaire, ne soit pas entravée par des procédures fastidieuses.
La difficulté que ce rapport peut présenter réside dans la nature de l’acte authentique européen ou de l’acte public proprement dit, qui est reconnu dans la plupart des pays de l’Union européenne et pas dans d’autres.
Dans certains pays, le système de l’acte authentique européen établi par un officier public n’existe pas. Il n’y a que des simples documents privés légalisés par un notaire public, bien que la nature du document ne varie pas.
À l’origine de cette proposition figure l’arrêt Unibank rendu par la Cour européenne de justice, qui a défini une série d’exigences en matière de reconnaissance des actes authentiques. Plus précisément, la première exigence spécifiait que ce sont les officiers publics qui devraient dresser ces actes. En d’autres termes, la personne authentifiant l’acte doit être un officier public, une fonction qui n’existe pas dans certains pays de l’UE, qui ne disposent donc pas de cette capacité.
Deuxièmement, l’acte doit s’assurer que la volonté des parties soit propre à garantir la réalisation de certains objectifs juridiques. L’acte notarié, tout au moins dans le droit continental, a un certain caractère constitutif dans le sens où les parties expriment leur volonté à son égard, mais que c’est l’officier public qui exécute l’acte.
Troisièmement, l’acte ne peut produire un effet qui dépasse ce qui est reconnu dans son pays d’origine. C’est-à-dire que, si un acte a une simple force probante dans son pays d’origine, il ne peut pas être considéré comme un acte exécutoire.
Je dirais que ces trois facteurs sont fondamentaux: d’abord, la personne autorisant l’acte doit avoir le statut d’officier public, ensuite l’acte est constitutif par nature et ne certifie pas seulement une signature, et enfin, il ne doit pas produire d’effets autres que ceux qu’il produirait dans son pays d’origine.
Un domaine qu’il convient de toute évidence d’exclure concerne tout ce qui relève du droit de propriété. Le droit de la propriété immobilière semble être étroitement lié à la terre, à l’endroit où est implantée la propriété. La possibilité de transferts dans ce domaine est donc limitée par l’existence de registres publics et par le fait que chaque pays possède une législation stricte imposant des exigences spéciales dans ce domaine.
J’espère que la Commission examinera cette proposition et sera en mesure de déposer une initiative. Les bases juridiques pertinentes sont l’article 65, point a), et le second alinéa de l’article 67, paragraphe 5, du traité CE.
Je pense que la base juridique est adéquate et que ce type d’initiative faciliterait les relations juridiques entre les citoyens et, avant toute chose, améliorerait leurs vies.
La difficulté que la Commission peut et va soulever est le problème de la diversité de nos systèmes juridiques, mais je pense que c’est une question dont nous aurons le temps de discuter à un stade ultérieur, une fois que la Commission aura présenté sa proposition.
Diana Wallis, rapporteure. − (EN) Monsieur le Président, l’e-justice semble avoir été au cœur des deux précédentes Présidences, slovène et française, et nous savons que la Présidence tchèque à venir souhaite également poursuivre l’excellent travail réalisé en matière d’e-justice.
L’e-justice au sein de ce Parlement, et certainement au sein de la commission des affaires juridiques, est également en phase avec une thématique qui nous tient à cœur depuis longtemps, celle de l’accès à la justice au-delà des frontières. Il est déjà compliqué d’avoir accès à la justice dans un contexte national: nous pensons à l’accès aux avocats, à l’accessibilité financière, à la compréhensibilité du système juridique. Placez tout cela dans un contexte transfrontalier européen, caractérisé par la diversité des cultures juridiques et des langues, et l’accès de nos concitoyens à la justice devient encore plus complexe et difficile.
Mais nous devrions être en mesure de faire face à ces difficultés et de les confronter à l’ensemble des possibilités offertes par la technologie moderne. Si l’Europe est sans frontière, l’internet l’est également; si les langues sont difficiles, les outils technologiques nous offrent aujourd’hui la possibilité d’une traduction instantanée. Nous devrions être en mesure de développer les instruments technologiques capables d’améliorer l’accès transfrontalier à la justice.
Il apparaît clairement qu’un certain nombre d’États membres ont perçu ces possibilités à l’intérieur de leurs frontières et développent leurs propres systèmes. C’est une bonne chose! On observe également une coopération dans le cadre de plusieurs projets – certains visent à créer des registres interconnectés pour traiter les registres des sociétés et fonciers. Encore une fois, c’est une bonne chose.
Mais ce que nous, parlementaires, souhaitons mettre en place, c’est un système qui s’adresse directement à nos concitoyens et qui réponde à leurs préoccupations en matière de justice dans leur vie quotidienne. Nous voulons que les citoyens d’Europe perçoivent la différence établie par le projet d’e-justice au niveau européen.
Il apparaît que les travaux relatifs au portail de la justice pourraient aboutir à ce résultat: ce portail pourrait fournir des informations sur les responsables, sur les modalités de moyen et de lieu, sur les avocats, sur les interprètes, sur la manière d’obtenir de l’aide juridique, des informations en tout genre. Le projet est ambitieux et il devra l’être.
Mais nous ne voulons pas nous arrêter au domaine de l’information. Nous voudrions voir se concrétiser l’accès en ligne à une justice transfrontalière, la possibilité pour les citoyens d’utiliser en ligne les instruments européens d’ordre de paiement et de dépôt de petites plaintes. Certains États membres travaillent manifestement sur des projets communs et, répétons-le, il est important que nous soutenions cet enthousiasme et cette ambition. Il importe néanmoins aussi que la Commission continue à inscrire cet objectif dans le contexte européen – en tant qu’ambition européenne – afin que nous avancions ensemble de manière coordonnée. C’est pourquoi le rapport du Parlement est accompagné d’un plan d’action ayant trait à un grand nombre de ces thématiques. Ceci pourrait concrétiser notre rêve d’une véritable Europe de la justice sans frontière. Réalisons-le.
Antonio López-Istúriz White, rapporteur. – (ES) Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Monsieur le Vice-président de la Commission, le rapport que je vous présente aujourd’hui examine la protection des adultes au sein de l’Union européenne. Il n’a pas été facile de traiter cette question dans des délais aussi brefs, d’autant moins que les objectifs visés sont vastes et transversaux.
En outre, le rapport a fait l’objet de divergences au sein de la commission des affaires juridiques quant à la direction qu’il devrait emprunter.
Nous examinons ce texte aujourd’hui dans le cadre d’une discussion commune parallèlement à deux autres rapports de la commission des affaires juridiques: un rapport sur l’acte authentique européen de M. Medina Ortega, et le rapport sur l’e-justice de Mme Wallis.
La coordination accrue établie par notre commission entre ces instruments distincts renforce sans aucun doute l’efficacité de nos propositions et fournira assurément un meilleur service aux citoyens européens.
Tout d’abord, je voudrais féliciter la Présidence française pour l’excellent travail qu’elle a effectué au cours des six derniers mois à la tête de l’Union européenne. En la matière, je me dois en particulier de remercier la ministre française de la justice, Mme Dati, pour l’intérêt qu’elle a affiché à porter ce débat au-delà des dispositions établies afin d’aboutir à des solutions nouvelles, pratiques et efficaces pour tous les États membres.
Tant que je parle de la France, je voudrais aussi décerner une mention spéciale à la juge et conseillère de la ministre de la justice, Amélie Durand, et à mes collègues français qui ont joué un rôle actif, parmi lesquels M. Gauzès et M. Toubon.
Notre commission des affaires juridiques partage la préoccupation de la Présidence concernant la thématique qui nous rassemble aujourd’hui: la protection des adultes vulnérables. Elle a décidé, par conséquent, de rédiger un rapport d’initiative visant à réaliser des avancées et à trouver de nouvelles solutions dont nos concitoyens adultes pourraient être les grands bénéficiaires.
Notre commission a également pris une part active à l’adoption récente d’une batterie de mesures de droit civil, notamment sur la médiation, sur la signification et la notification des actes, et sur le droit applicable en matière de responsabilité civile.
En témoigne l’audition du colloque sur la coopération judiciaire en matière civile, qui a eu lieu le 2 décembre au sein de la commission des affaires juridiques, en association avec la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures, et qui avait inscrit à l’ordre du jour la nécessité de protéger les adultes dans notre société.
Mesdames et Messieurs, il s’agit d’une question qui concerne tous les États membres, étant donné que l’Union européenne fait face au vieillissement accentué de ses populations. D’ici 2050, 37 % des citoyens auront plus de 60 ans et 10 % plus de 80 ans.
Il est important de se rappeler que cette évolution a des implications économiques mais aussi budgétaires et sanitaires qui nous affectent tous. Nous devons commencer à trouver des solutions à ces problèmes aussi rapidement que possible.
Ce rapport a l’objectif d’instaurer un espace de justice, de liberté et de sécurité suivant deux approches: l’exécution de la loi et la coopération entre les autorités compétentes des différents États membres.
Comme je l’ai déjà mentionné, ce rapport a surmonté de nombreuses embûches avant d’être adopté à l’unanimité par la commission des affaires juridiques le 17 décembre.
Un amendement de compromis a été atteint, rapprochant les points de vue divergents des membres de notre commission. Cet amendement, qui est devenu l’article 2 du rapport final, est essentiel à ce rapport, car il donne la possibilité aux États membres d’intégrer la convention de La Haye du 13 janvier 2000 dans leur propre législation.
En outre, le rapport prévoit que, dès qu’une expérience suffisante aura été acquise dans ce domaine, la Commission soit invitée à présenter une proposition législative visant à renforcer la coopération entre États membres, ainsi qu’à améliorer la reconnaissance et l’exécution des décisions relatives à la protection des adultes et aux mandats d’inaptitude.
Je voudrais souligner à l’Assemblée qu’à ce jour, quatre pays seulement ont signé la convention de La Haye, et que huit seulement l’ont ratifiée. Nous encourageons les États membres à ratifier cette convention de manière à ce que nous puissions traiter cette question qui nous affecte tous avec davantage de cohérence et d’efficacité.
Il convient de se rappeler qu’en vertu du traité instituant la Communauté européenne, le pouvoir législatif incombe à la Commission européenne. Comme nous le savons tous, une petite disposition du Traité – l’article 192 – confère toutefois au Parlement le droit de demander à la Commission de soumettre une proposition de législation.
Mesdames et Messieurs, nous voudrions faire appliquer cet article. Je terminerai en disant que, comme l’indique ce rapport, la Commission devrait surveiller l’expérience acquise dans le cadre de la convention de La Haye afin de proposer des dispositions communautaires complétant la convention et suggérant des instruments additionnels potentiels pour l’avenir.
Rachida Dati, présidente en exercice du Conseil. − Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, cher Jacques, Mesdames et Messieurs les parlementaires, voici encore une occasion privilégiée de dialoguer avec votre Assemblée et je souhaite, à ce titre, vous remercier, au nom de la Présidence, des progrès enregistrés dans le domaine de la justice.
Après le débat précédent, qui concernait la vie des entreprises, les rapports qui seront discutés maintenant concernent le quotidien des citoyens européens. Ce sont des sujets qui ont été abordés à de nombreuses reprises sous la Présidence française, notamment lors des colloques organisés sur la circulation des actes authentiques ou sur la protection juridique des adultes.
Vous le savez, la Présidence française s’est efforcée de faire progresser l’Europe de la justice à travers des projets concrets, afin de rapprocher les institutions européennes de nos concitoyens, et – comme l’a dit d’ailleurs Diana tout à l’heure – la Présidence slovène avait aussi beaucoup fait en ce sens et nous avons poursuivi ses travaux.
Les trois textes qui figurent à notre ordre du jour ce matin en témoignent: le rapport Medina sur l’acte authentique européen, le rapport Wallis sur e-justice, et le rapport López-Istúriz White sur la protection juridique des adultes. Ils correspondent en effet au souci de la Présidence de promouvoir des initiatives nouvelles non seulement pour faire adopter de nouveaux outils, mais aussi pour échanger nos méthodes, confronter nos pratiques et envisager l’avenir.
En ce qui concerne le rapport sur les actes authentiques, la Présidence, tout d’abord, se félicite de l’initiative prise par M. Medina et de la qualité de son rapport. L’intérêt de votre Parlement pour la reconnaissance et la circulation des actes authentiques en Europe démontre qu’il s’agit d’un sujet important dans le domaine de la coopération judiciaire civile. Ces travaux participent de notre volonté de faciliter la vie quotidienne de nos concitoyens mais également de nos entreprises, et le droit est d’abord fait pour pacifier les relations sociales, la saisine du juge devant rester l’exception.
Il est également important que l’Union européenne s’engage dans cette direction et l’acte authentique est très présent dans la vie des familles et des entreprises, qu’il s’agisse d’un contrat de mariage, d’une donation, d’un testament, d’un acte de vente ou d’un contrat entre entreprises. Il permet aux personnes, dans le cadre d’une relation non conflictuelle, de confier à une autorité reconnue le soin de certifier des engagements qu’elle souhaite prendre et d’en régler par avance toutes les conséquences en donnant à cet acte force exécutoire. Mais vos travaux montrent aussi qu’il faut aujourd’hui se poser la question des conditions à poser pour qu’un acte authentique puisse circuler librement en Europe, quel que soit le domaine.
Cette réflexion devra sans nul doute être prise en compte dans le futur programme législatif de la Commission européenne. La réflexion menée sur les actes authentiques ne nous empêchera pas de réfléchir ultérieurement à l’amélioration de la circulation d’autres types d’actes. Il faut avancer de façon progressive, mais il faudra aussi définir un cadre extrêmement clair. Il est possible d’alléger les conditions et les procédures pour la reconnaissance mutuelle des actes authentiques parce qu’ils offrent des garanties renforcées.
Si l’on veut soumettre au régime des actes qui offrent des garanties de niveau inégal, notre ambition devra être revue à la baisse ce qui, évidemment, serait problématique. Le point de vue du Parlement européen tel qu’il ressort de ce rapport converge largement avec les orientations développées et proposées par la Présidence. Votre rapport, Monsieur Medina, fournira une base de travail essentielle pour les futurs travaux puisque la Présidence prendra bonne note du débat d’aujourd’hui.
Améliorer et renforcer l’espace judiciaire européen, c’est également améliorer et moderniser le fonctionnement de la justice. Cela passe par le recours aux nouveaux modes de communication; c’est tout l’enjeu du projet de l’e-justice. Celui-ci a pour objet de développer, dans un cadre transfrontalier européen, l’utilisation des nouvelles technologies, de l’information et de la communication. Cela doit nous permettre de renforcer les connexions entre nos systèmes judiciaires et de faciliter les échanges. D’ailleurs, la décision-cadre qui a été adoptée sur l’interconnexion des casiers judiciaires y participe largement. Le plan d’action relatif à l’e-justice européenne, qui a été soumis au dernier Conseil JAI du 28 novembre dernier, s’inscrit dans la ligne des travaux menés par les Présidences successives, depuis la Présidence allemande.
Au cours du dernier semestre, nous nous sommes attachés à bâtir un projet de plan d’action relative à l’e-justice européenne aussi équilibré que possible, en tenant compte des États membres impliqués dans ce projet, de la position de votre Parlement, mais également du rôle que devra jouer la Commission. Les objectifs sont partagés par le Parlement et la Présidence souhaite, à ce titre, remercier encore une fois la rapporteure, Diana Wallis, pour son engagement sur ce dossier et pour son rapport de qualité. La réflexion intense menée au Parlement européen a enrichi le projet de la Présidence et permis, finalement, d’aboutir à un projet pleinement partagé.
Faciliter l’accès et assurer la libre circulation des personnes ou des décisions de justice, ces objectifs ne peuvent être pleinement atteints que s’ils prennent en compte les personnes les plus vulnérables. C’est l’une des raisons pour lesquelles la Présidence française a souhaité que soit améliorée la situation des adultes faisant l’objet de mesures de protection juridique.
En effet, les majeurs protégés doivent pouvoir bénéficier de la même liberté de circulation que les autres citoyens, indépendamment de la protection dont ils bénéficient. La Présidence se félicite que cette question ait trouvé un écho au sein du Parlement et remercie son rapporteur, M. López-Istúriz White, pour ses propositions sur la protection juridique des adultes. C’est le signe évident de notre intérêt commun.
La Convention de La Haye du 13 janvier 2000 va entrer en vigueur le 1er janvier prochain, entre la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni. Au cours du semestre passé, d’autres États membres de l’Union l’ont signée: la Finlande, la Grèce, l’Irlande, le Luxembourg et la Pologne. Il est important que tous les États puissent participer à cet instrument. Je sais que les futures Présidences tchèque et suédoise s’engageront dans ce domaine – elles nous l’ont d’ailleurs indiqué lors de cette Présidence française – et, plus largement, la circulation des décisions de justice prises en matière de protection des majeurs doit figurer parmi nos objectifs.
C’est à cette condition que nous donnerons l’image d’une Europe capable de répondre aux besoins de ses citoyens, y compris les plus vulnérables d’entre eux. Votre rapport apporte une contribution importante. Là encore, la Présidence française souhaite que cette question puisse être intégrée dans le futur programme législatif de la Commission, mon cher Jacques. C’est un enjeu de société majeur. Je sais que c’est un sujet qui a été une priorité et qui est essentiel pour la Commission et pour vous en particulier, Jacques. C’est une preuve aussi que l’Europe, en créant un environnement juridique plus sûr, protège également les plus vulnérables d’entre eux.
La Présidence vous remercie pour ces contributions et je prendrai évidemment bonne note de toutes les observations qui seront formulées au cours de ce débat.
Jacques Barrot, vice-président de la Commission. − Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les parlementaires, je suis très heureux de pouvoir, à mon tour, féliciter les auteurs de ces trois rapports, et je dirai à l’attention de Rachida Dati que, vraiment, ces rapports s’inscrivent parfaitement dans les efforts qu’a déployés la Présidence française et qui, évidemment, ont retenu toute notre attention. C’est vraiment là, je crois, les premiers jalons de cet espace judiciaire et juridique européen auquel je suis personnellement très attaché et que nous allons construire ensemble, notamment à travers le programme de Stockholm.
Donc, il est vrai que ce débat, ce matin, est tout à fait opportun. Mme Dati a déjà très bien fait le tour des trois rapports, mais je vais tout de même reprendre brièvement ce qu’elle a dit pour confirmer les intentions de la Commission.
Tout d’abord laissez-moi vous remercier, Monsieur Medina. M. Medina Ortega nous a fait un excellent rapport sur l’acte authentique européen. Il est certain qu’il y va de la vie quotidienne des consommateurs et des citoyens, et les recommandations que vous adressez à la Commission touchent vraiment à la réalité de la vie des citoyens, aussi bien des particuliers que des entreprises.
En effet, chaque citoyen et les entreprises ont souvent l’intention de décider, dans les matières familiales ou les transactions commerciales, par la voie tout simplement d’un accord gracieux avec une authentification d’une autorité publique, et il est bien évident que dans ce libre espace de circulation, les actes authentiques doivent pouvoir aussi circuler.
Or, cette libre circulation n’a été réalisée que partiellement aujourd’hui et, comme vous le savez, évidemment, nous avons, à côté des instruments déjà existants, prévu de nouvelles mesures. Je suis en train d’y travailler: il y a celles qui viennent d’être adoptées – et merci, Rachida, pour les obligations alimentaires –, je prépare aussi, Monsieur Medina Ortega, la mesure pour mars 2009 en matière de succession. Mais j’ai bien conscience que le chantier est encore plus large, et c’est la raison pour laquelle la Commission va préparer un livre vert sur l’acte authentique ainsi qu’éventuellement sur d’autres documents publics pour avoir vraiment la chance d’une large consultation à ce sujet.
Mais, évidemment, dans ce contexte, votre rapport et l’étude préparée par le Parlement européen seront d’une grande utilité, et, comme vous l’avez souligné, il doit aussi exister, à mon sens,– je suis d’accord avec vous – une base juridique pour prendre une initiative, tout en sachant en effet que la diversité des systèmes juridiques exigera quand même un travail approfondi pour pouvoir prendre cette initiative. Mais, merci encore de cet excellent travail.
Je me tourne maintenant vers Mme Wallis qui a bien insisté sur cette nécessité de moderniser le fonctionnement de la justice, et c’est vrai que le plan d’action qui vient d’être adopté sous la Présidence française intéresse au plus haut point la Présidence tchèque. Donc, nous allons pouvoir, Madame Wallis, faisant écho à votre rapport, voir comment nous pouvons utiliser pleinement cet accès à la justice en ligne.
Vous avez notamment évoqué des cas où cela rendrait d’immenses services pour le règlement des petits litiges, par exemple. Il est bien certain que les recommandations que vous faites vont nous aider à renforcer les actions déjà entreprises par la Commission et vont enrichir les discussions et les décisions prises au Conseil européen.
Nous travaillerons ensemble pour que l’e-justice européenne permette un accès plus aisé aux informations sur la législation européenne, sur les systèmes légaux nationaux ainsi que sur les procédures européennes. Je voulais préciser aussi que le portail prévu sera mis en œuvre au plus tard fin décembre 2009. Nous allons, évidemment, y travailler en étroite coordination avec le Parlement. Donc, ce portail européen e-justice doit être absolument opérationnel fin décembre 2009. Il est destiné aux citoyens, mais nous verrons aussi comment résoudre les questions qui concernent plus directement les autorités judiciaires.
Je suis encore une fois très heureux de voir là cette synergie entre nos institutions européennes, le Conseil, le Parlement et la Commission; je crois, Madame Wallis, que, conformément à votre vœu qui nous disait «attention, ne réduisez pas l’ambition, ayez de l’ambition pour l’e-justice», que la Présidence française et Rachida Dati ont montré cette ambition. Soyez sûrs que le commissaire que je suis sera très engagé dans cette voie.
Enfin, j’en viens au rapport de M. López-Istúriz White, je le remercie beaucoup là aussi d’avoir fait écho à l’excellente initiative qu’a prise Rachida Dati en nous faisant travailler notamment à Lille sur ce sujet très important dans nos sociétés. Nous savons, en effet, que nos sociétés vont compter de plus en plus de personnes âgées de plus de 65 ans – déjà 16 % de la population européenne totale –, aussi sommes-nous convaincus de l’importance de la question de la protection des majeurs vulnérables, et voilà pourquoi nous avons soutenu très fort l’initiative française en invitant les États membres à ratifier la Convention de La Haye du 13 janvier 2000. Grâce à l’obstination de Rachida Dati, cette Convention va pouvoir entrer en application le 1er janvier 2009.
Mme la ministre a énuméré un certain nombre de pays qui sont maintenant déjà membres de cette Convention, ce qui va, encore une fois, permettre, je crois, de faire boule de neige et nous permettre de convaincre tous les États membres de ratifier cette Convention.
Il est vrai qu’au plan communautaire, il n’y a pas d’instruments existants. Nous n’avons pas encore évoqué l’élaboration d’un instrument existant. Nous allons regarder de très près la mise en application de cette Convention, puis nous allons évidemment inscrire cette proposition dans le cadre du programme de Stockholm. Nous allons examiner toutes les mesures qui permettraient d’améliorer la coopération entre les États membres et puis nous pourrons inscrire l’éventualité d’une initiative communautaire en la matière.
Voilà ce que je peux dire sur ce sujet dont, personnellement, je mesure toute l’importance. En tout cas, merci, le débat de ce matin en présence de Rachida Dati nous permet déjà de voir comment nous allons essayer de proposer un programme de Stockholm ambitieux, à la mesure de l’attente des citoyens qui veulent cet espace judiciaire européen. Merci au Parlement.
PRÉSIDENCE DE M. MIGUEL ANGEL MARTÍNEZ MARTÍNEZ Vice-président
Panayiotis Demetriou, rapporteur pour avis de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures. − (EL) Monsieur le Président, permettez-moi tout d’abord de féliciter la Présidence française pour tout ce qu’elle a accompli à ce jour, en particulier en matière de justice. Je voudrais également féliciter le commissaire. La commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures souscrit aux positions du rapporteur Antonio López-Istúriz White telles qu’exprimées dans son rapport. Nos homologues plus âgés, dont les capacités sont limitées, comme tous nos semblables qui ont des problèmes, ne peuvent pas être laissés sans protection juridique; ils ne peuvent pas être abandonnés à leur sort et sous le joug, bien souvent, de protecteurs opportunistes qui, parfois, les humilient et profitent de leur situation. Chaque société, chaque État de droit a le devoir de prendre des décisions et des actes judiciaires et administratifs visant à préserver la dignité et le patrimoine des personnes âgées, et l’Union européenne a une responsabilité transfrontalière. J’invite la Commission à aider et à encourager les États membres à signer et à ratifier la convention de La Haye, qui offre un cadre pour cette protection. J’invite tous mes collègues députés des pays qui ne l’ont pas encore fait à œuvrer dans ce sens.
Luca Romagnoli, rapporteur pour avis de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures. – (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je voudrais féliciter la Présidence française, le commissaire Barrot et tous les rapporteurs, car le développement technologique est inexorable et le système judiciaire ne peut pas échapper à cette évolution.
Je pense que l’introduction de technologies d’information et de communication dans l’administration judiciaire offre de nombreuses solutions possibles en améliorant le fonctionnement du pouvoir judiciaire et en contribuant ainsi à rationaliser et à simplifier les procédures, et donc à réduire les coûts. L’e-justice pourrait également présenter des avantages évidents et satisfaire plusieurs besoins différents, les plus importants de tous étant l’accès à la justice et des améliorations en termes d’efficacité et de réduction des délais et des frais. Il est donc capital que l’e-justice vise à développer l’utilisation des technologies de l’information par le pouvoir judiciaire, et ce d’autant plus que près de dix millions de citoyens européens sont impliqués dans des litiges transfrontaliers et que ce chiffre va probablement s’accroître à l’avenir.
Au-delà des citoyens, nous devons également penser aux avantages que cela induira pour ceux qui travaillent dans le secteur juridique et ne pas oublier, par conséquent, les procédures de coopération en matière judiciaire et pénale. Comme j’ai déjà pu m’en rendre compte dans le cadre de mon travail de rapporteur concernant le système européen d’information sur les casiers judiciaires (ECRIS), en complément de cet avis, le champ d’application potentiel de la justice électronique est vaste et voué à évoluer parallèlement aux progrès réalisés dans l’espace judiciaire européen et aux développements technologiques. Je me félicite dès lors que le commissaire Barrot ait annoncé que le portail serait opérationnel d’ici la fin 2009.
Pour conclure, j’espère que notre Europe pourra enfin disposer d’un système judiciaire équitable et que la responsabilité des parties prenantes pourra enfin être partagée. Il arrive beaucoup trop souvent, dans mon pays par exemple, que la partie investigatrice doive s’acquitter d’un prix extrêmement élevé et que la tortueuse procédure judiciaire se termine par un acquittement. En Italie, les juges ne sont pas civilement responsables des erreurs de la justice, c’est une grave injustice sociale qui doit être rectifiée. J’espère que l’espace judiciaire européen contribuera tôt ou tard à corriger cette grande injustice.
Mes remerciements vont une fois de plus à la Présidence française pour les efforts réalisés dans ce domaine, ainsi qu’à Mme Wallis.
Jean-Paul Gauzès, au nom du groupe PPE-DE. – Monsieur le Président, Madame la Ministre, Monsieur le Vice-président, je voudrais d’abord saluer les efforts de la Présidence française et les efforts que vous avez faits personnellement, Madame la Ministre, pour promouvoir un meilleur espace de liberté juridique et d’efficacité au profit de nos concitoyens.
Nos rapporteurs ont fait un excellent travail. C’est la raison pour laquelle le groupe PPE soutiendra ces trois rapports: rapport de Mme Wallis, rapport de M. Istúriz et rapport de M. Medina. Je voudrais, pour ma part, donner quelques explications sur la position de notre groupe concernant le rapport de M. Medina avec lequel j’ai travaillé en étroite collaboration.
Ce rapport, vous l’avez dit, Madame la Ministre, Monsieur le Vice-président, vient nous proposer de faire un effort important pour reconnaître de façon mutuelle les actes authentiques. Il y a eu un débat à l’occasion de ce rapport concernant l’éventualité d’une ouverture sur la terminologie.
Pour notre part, nous estimons que ce rapport porte sur l’acte authentique dont les caractéristiques ont été définies par la jurisprudence et que, à ce stade, il convient de se limiter aux actes authentiques et de ne pas introduire une confusion juridique en étendant avec des termes inappropriés ce que doit être un acte authentique.
Vous avez dit, Madame la Ministre, Monsieur le Vice-président, ce que sont les caractéristiques de l’acte authentique et je n’y reviendrai pas. Je dirai simplement que, si des débats doivent s’ouvrir sur d’autres questions, sur d’autres actes qui sont différents et qui sont essentiellement sous signature privée, ce n’est pas le rôle de ce rapport d’initiative qui pose bien la vraie question aujourd’hui de la reconnaissance mutuelle de ce que la jurisprudence reconnaît comme des actes authentiques. Je voudrais remercier à nouveau M. Medina pour l’excellent travail qu’il a fait sur ce sujet.
Manuel Medina Ortega, au nom du groupe PSE. – (ES) Monsieur le Président, j’endosse à présent un rôle différent. J’interviens cette fois non plus en tant que rapporteur de mon rapport, mais au nom du groupe socialiste au Parlement européen à propos des trois rapports.
Ces trois rapports ont une chose en commun: ils visent tous les trois à améliorer la situation des citoyens. Le fait est que, dans le domaine de la justice, la situation des citoyens ne peut être améliorée qu’en respectant certains principes d’équilibre, en prenant certains facteurs en considération. En matière de justice électronique, par exemple, nous ne devons pas tomber dans un enthousiasme excessif vis-à-vis des nouvelles technologies si celles-ci peuvent affaiblir certaines garanties en faveur des citoyens. En d’autres termes, le souci de permettre à chacun de disposer d’une adresse électronique, par exemple, pourrait avoir pour effet d’exclure de la justice les personnes qui n’ont pas accès à une connexion internet.
Dans le domaine spécifique de mon rapport sur l’acte authentique, tant la présidente en exercice du Conseil, Mme Dati, que M. Barrot ont mis en évidence l’importance que revêtent également ici les garanties juridiques. Il s’agit de transférer des actes qui ont une valeur juridique d’un pays à l’autre, mais pas de reconnaître tout type d’acte si nous avons des doutes quant à leur efficacité. C’est-à-dire que, même si un acte sous seing privé est notarié dans un pays où il n’existe pas d’acte authentique, il ne peut pas avoir la valeur exécutoire dont disposent les actes notariés dans le droit continental, puisque ces derniers ont une valeur exécutoire contraignante qui est complètement différente.
La recherche d’un équilibre entre la nécessité d’un fonctionnement efficace des marchés et la nécessité d’une circulation efficace au sein de l’Union européenne ne devrait donc pas nous inciter à renoncer à des garanties juridiques essentielles. En l’absence de garanties juridiques, de garanties pour la population, le droit n’existe pas. C’est la raison pour laquelle, lorsque le temps sera venu de voter ces rapports, le groupe socialiste continuera à affiner ses positions dans le but, avant toute chose, de protéger les intérêts du citoyen normal, ordinaire, et pas uniquement les intérêts des plus puissants.
Diana Wallis, au nom du groupe ALDE. – (EN) Monsieur le Président, je pense que mon groupe n’aura aucune difficulté, je l’espère en tout cas, à appuyer mon rapport et, certainement, celui de M. López-Istúriz White.
Le rapport que je souhaite examiner – car il pose problème à certains membres de cette Assemblée – est celui de M. Medina Ortega. Nous partageons tous la même idée: nous avons la liberté de circulation des jugements. Nous souhaiterions la liberté de circulation des actes authentiques, et j’ajouterai: «ou de documents équivalents». On a beaucoup parlé du souci de faciliter la vie de nos concitoyens. Selon moi, cela signifie la vie de tous les citoyens d’Europe et nous n’aurions aucun intérêt à ce que certains pays et certaines traditions juridiques soient exclus de ce domaine de la justice. C’est ce qui se produira si nous n’avons pas une vision plus large et si nous ne faisons pas preuve de patience et de tolérance à l’égard de systèmes juridiques qui peuvent sembler différents à première vue, mais qui présentent des approches très similaires si on les examine de plus près.
Nous sommes parvenus à reconnaître nos documents respectifs. Il n’y aucune raison que, par la tolérance et le respect, nous ne puissions pas reconnaître nos actes respectifs lorsqu’ils sont scellés par un contrat ou un acte notarié, et ce bien qu’ils n’aient pas exactement la même forme.
Ma requête est la suivante: veuillez respecter les amendements déposés aujourd’hui. Ils ne seront peut-être pas votés, mais leur esprit est qu’il s’agit d’une Europe de la justice pour tous les citoyens et toutes les cultures juridiques. Elle ne doit pas devenir exclusive.
Ryszard Czarnecki, au nom du groupe UEN.– (PL) Monsieur le Président, nous examinons trois rapports très importants. Je voudrais remercier tout particulièrement Mme Wallis pour son rapport très complet, substantif, compétent et de qualité, qui couvre tous les aspects du problème. Le Parlement est d’accord avec Mme Wallis lorsqu’elle souligne l’importance d’un problème touchant au moins 2 % des citoyens des États membres de l’Union européenne. Pas moins de 10 millions des 500 millions de citoyens de l’Union européenne sont impliqués dans des litiges transfrontaliers. Pour ces personnes, la mise en œuvre des systèmes TI les plus récents dans le domaine de la justice pourrait avoir un impact décisif, tout comme elle pourrait rendre les procédures juridiques plus efficaces, plus simples et plus rapides.
Nos propositions, si elles sont approuvées par la Commission européenne, peuvent faciliter l’accès à la justice tout en limitant le coût des actions en justice, ce qui est important pour nos concitoyens. Il semble justifié de soutenir la création de deux portails internet en matière d’e-justice. Le premier portail bénéficierait aux citoyens et garantirait l’accès des entreprises à des conseils juridiques dans plusieurs langues. Le second portail, destiné à la profession juridique, serait un instrument à l’usage des avocats, juges, procureurs publics, conseillers juridiques et agents travaillant au sein des ministères de la justice.
Les nouvelles technologies peuvent également contribuer à la lutte contre la criminalité internationale et dans le domaine de la prévention des crimes, sans parler de l’usage étendu de la vidéoconférence comme moyen évident d’obtention et de collecte de preuves dans le cadre d’actions en justice.
Rareş-Lucian Niculescu (PPE-DE) . – (RO) Il est capital que les nouvelles technologies soient introduites et utilisées aussi loin que possible dans le processus judiciaire. On ne peut pas accepter que le système judiciaire accuse en la matière un tel retard vis-à-vis d’autres domaines. Il va sans dire également que toute stratégie y afférente doit être examinée avec le plus grand sérieux. Il n’en reste pas moins que, au vu de la situation actuelle, nous devons garder les pieds fermement sur terre.
Dans l’Union européenne du XXIe siècle, certains tribunaux n’ont pas d’ordinateur ou d’accès à l’internet, une réalité dont ce rapport fait également état. Quelle que soit la méthode de recherche utilisée, il est encore extrêmement compliqué d’accéder à des informations juridiques, à la fois pour les praticiens du droit et, en particulier, pour les citoyens ordinaires qui tentent de protéger leurs droits. Je suis convaincu que des moyens supplémentaires seront dégagés à l’avenir dans le cadre des systèmes financiers européens, aussi bien pour la justice civile que pour la justice pénale, afin de remédier à ces manquements. De manière similaire, les États membres devront de toute évidence fournir des efforts supplémentaires pour utiliser efficacement les fonds actuellement disponibles.
Le rapport met aussi en évidence des problèmes très similaires concernant le réseau judiciaire européen en matière civile et commerciale, sur lequel le Parlement s’est prononcé il y a à peine deux jours. Je déplore que ce rapport n’ait pas été débattu. L’amélioration du fonctionnement du réseau est sans aucun doute importante et apportera une valeur ajoutée aux citoyens européens. Toutefois, les problèmes auxquels j’ai déjà fait référence subsistent dans ce domaine également et concernent le manque d’informations, le manque de traductions dans toutes les langues officielles et la difficulté d’accès au système judiciaire sur une base transfrontalière.
Je vous remercie de votre attention. Encore une fois, j’espère que ces problèmes, qui constituent des préoccupations majeures pour le Parlement, figureront davantage parmi les priorités de l’agenda futur de la Commission et du Conseil également, en particulier parce que les citoyens ordinaires attendent de l’Union européenne qu’elle prenne des mesures concrètes qui simplifieront leur vie quotidienne.
Neena Gill (PSE). - (EN) Monsieur le Président, je salue les trois rapports, mais je parlerai tout d’abord de la tutelle. La protection des citoyens les plus vulnérables est une question à laquelle j’accorde une grande importance. Nous savons que la population de l’Europe vieillit: l’espérance de vie a atteint 80 ans aujourd’hui et, d’ici 2050, 37 % de la population aura plus de 60 ans. Les populations sont aussi plus mobiles. L’an dernier, dans mon pays, 400 000 personnes ont émigré pour passer leur retraite à l’étranger. Il est donc important de veiller à ce qu’ils reçoivent la même protection que celle dont ils bénéficieraient chez eux.
Les défis posés à la société européenne par ces changements démographiques sont nombreux, à l’image de ceux que nous avons déjà entendus concernant les soins de santé et l’aide sociale. Il est indispensable de permettre aux aînés de vivre une vie indépendante et digne.
J’ai fait office de rapporteure l’an dernier dans le cadre d’un rapport dont l’objectif était d’aider les personnes âgées à mieux vivre et à rester en bonne santé et autonomes plus longtemps. Le rapport dont nous débattons aujourd’hui s’inscrit très bien, selon moi, dans le cadre des propositions visant à assurer que les personnes les plus âgées puissent continuer à gérer leur patrimoine et leurs affaires courantes où qu’elles vivent, sans devoir subir ni exploitation ni abus. J’ai également des préoccupations concernant la convention de La Haye. Je salue l’action du ministre dans ce domaine, mais nous ne devrions pas nous contenter de garantir la ratification de la législation existante: nous devrions veiller à ce qu’elle soit efficace.
Je voudrais dire quelques mots sur l’acte authentique. Je me félicite des initiatives visant à réduire les charges administratives de nos concitoyens, mais je m’inquiète moi aussi que ce rapport ne prenne pas en considération les différentes traditions juridiques qui existent au sein de la Communauté, en ce compris différents instruments juridiques comme le deed anglais ou diverses formes de professions notariales telles qu’elles existent en Angleterre. Je pense que, dans sa forme actuelle, le rapport risque d’affaiblir le droit national de certains États membres, en particulier le mien, en termes d’administration successorale. Ignorer de telles différences enfreindrait le principe de reconnaissance mutuelle et compromettrait l’objectif de l’égalité d’accès à la justice pour tous les citoyens. Pour ces raisons, ma délégation et moi-même soutiennent les amendements de Mme Wallis.
Je suis très enthousiaste vis-à-vis du rapport de Mme Wallis sur l’e-justice. Je pense que certaines questions soulevées dans les autres rapports sont interconnectées, ce qui signifie que, où qu’ils soient dans l’Union européenne, les citoyens bénéficieront d’une égalité d’accès à la justice.
Cristian Silviu Buşoi (ALDE) . – (RO) Je voudrais féliciter les rapporteurs: Diana Wallis, Manuel Medina Ortega et Antonio López-Istúriz White pour leurs excellents rapports. L’e-justice est nécessaire à une époque où le nombre de personnes impliquées dans des litiges transfrontaliers en Europe est estimé à 10 millions. En effet, l’utilisation des technologies de l’information dans le système judiciaire pourrait grandement contribuer à l’amélioration de l’accessibilité et de l’efficacité du système juridique et judiciaire de l’Europe. C’est pourquoi le rapport et les efforts de Mme Wallis méritent la plus grande attention.
Je pense également que cette résolution concernant l’acte authentique est particulièrement importante. Exerçant la profession d’avocat en Roumanie, je ne peux que témoigner des avantages considérables qui découlent de l’acte authentique et d’un système judiciaire cordial et non contentieux. En fait, l’acte notarié authentique est l’instrument de justice préventive le plus important dont disposent la Roumanie et les autres pays européens ayant une juridiction de droit civil. Je prends note que M. Medina Ortega voudrait faire exclusivement référence aux actes authentiques et distinguer les actes publics authentiques établis uniquement par un professionnel spécialisé délégué par les autorités publiques de ceux qui sont certifiés sous seing privé.
Toutefois, quelle que soit l’issue des débats et l’inscription ou non des actes équivalents à l’ordre du jour d’une autre initiative, je pense que ce rapport doit veiller à ce que son objectif soit de garantir la protection des citoyens et leur sécurité juridique, ainsi que de leurs rapports familiaux et patrimoniaux au-delà des frontières, en proposant la reconnaissance réciproque des actes authentiques.
Bogusław Rogalski (UEN). – (PL) Monsieur le Président, l’Union européenne doit s’attaquer au problème du vieillissement significatif de la population des États membres, qui est lié à une augmentation considérable de l’espérance de vie. En conséquence, d’ici 2050, près de 40 % des citoyens européens auront plus de 60 ans et 10 % de ces personnes auront plus de 80 ans.
Ces changements démographiques auront un impact majeur sur notre économie, notre société, notre santé et notre budget. Nous devons donc instaurer des mécanismes de protection appropriés et spécifiques qui garantiront l’égalité des droits et des obligations à tous les niveaux. Les personnes protégées passent de plus en plus de temps en dehors de leur pays de résidence ou effectuent des séjours hospitaliers à l’étranger, à savoir dans un autre pays que celui où se situe leur patrimoine. C’est pourquoi le système de protection juridique doit assurer la continuité des décisions de justice, des décisions administratives et des décisions prises par les personnes elles-mêmes. Ceci concerne particulièrement les mandats affectant la protection juridique future, qui doivent être exécutés dans les États membres de l’Union.
Nous devons donc créer un mécanisme de transmission efficace des documents, en particulier dans les cas urgents, par exemple lorsqu’une personne protégée a besoin de soins hospitaliers lors d’un séjour temporaire en dehors de son pays d’origine. De la sorte, les Européens pourront rester ou vivre sans obstacle dans un État membre qui n’est pas leur pays d’origine, tout en conservant un accès efficace et rapide à des soins.
Dushana Zdravkova (PPE-DE) . – (BG) Madame le Ministre, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, je voudrais vous assurer que le débat mené aujourd’hui sur ces trois rapports a un intérêt considérable tant pout les citoyens de l’Union européenne que pour mes confrères avocats. C’est pourquoi je voudrais féliciter les rapporteurs des trois rapports.
J’ai effectué toute ma carrière au sein du système judiciaire: à la fois comme présidente de l’un des plus grands tribunaux de Bulgarie, qui a été le premier à introduire une technologie en ligne pour le traitement des dossiers, et comme présidente du comité d’experts sur les technologies de l’information et le droit au Conseil de l’Europe jusqu’en 2000. Je suis donc très au fait des questions relatives à l’e-justice. Lorsque nous avons introduit des technologies d’information en 1995, je ne pouvais pas imaginer que cette thématique susciterait un tel émoi au Parlement européen. C’est pourquoi je me félicite d’avoir l’occasion d’en parler aujourd’hui.
Je voudrais féliciter Mme Wallis en particulier pour son rapport sur l’e-justice, car je crois que l’utilisation des technologies de l’information et des nouvelles technologies de communication dans le domaine de la justice favoriseront le renforcement de la coopération judiciaire transfrontalière tout en facilitant l’accès des citoyens de l’Union européenne au système judiciaire.
Je voudrais toutefois souligner que, pour aboutir à un système européen efficace dans ce domaine, il est capital de concevoir une stratégie globale au niveau institutionnel et d’élaborer des normes générales en faveur d’une communication plus efficace entre les systèmes nationaux, tout en gardant à l’esprit la nécessité de disposer de nombreux spécialistes hautement qualifiés.
Nous ne pourrons exploiter le potentiel des nouvelles technologies dans la lutte contre la criminalité transfrontalière et améliorer l’accessibilité du système judiciaire pour les citoyens en matière civile et commerciale que si ces conditions prérequises sont réunies.
Sachant cela, je voudrais insister pour que l’on promeuve tous les projets pertinents, qu’il s’agisse du réseau en ligne des casiers judiciaires, des registres d’insolvabilité ou du réseau judiciaire européen en matière civile et commerciale. Il n’y a qu’ainsi que nous réaliserons l’un des objectifs fondamentaux de l’Union européenne: une plus grande interaction entre ses citoyens.
Lidia Joanna Geringer de Oedenberg (PSE). – (PL) Monsieur le Président, dans une communication au Parlement et au Conseil du 10 mai 2005 et relative au programme de La Haye, la Commission a inscrit parmi ses priorités spécifiques que, d’ici 2011, elle chercherait à garantir un véritable espace européen de justice en matières civiles dans le contexte de la reconnaissance et de l’exécution des décisions judiciaires et du principe de la reconnaissance mutuelle, car ces mesures constituaient un réel moyen de garantir la protection juridique transfrontalière des citoyens de l’Union européenne.
L’Union européenne s’élargit, et ses citoyens sont encouragés à accroître leur mobilité. Dans le même temps, la circulation des personnes sur le territoire de la Communauté est à la base de problèmes liés à la transmission des actes authentiques. La diversité des solutions mises en œuvre par les États membres pour faire face au problème de la reconnaissance mutuelle des actes authentiques a pour conséquence que, à l’heure actuelle, la circulation de ces documents est compliquée et qu’il y a des restrictions quant au nombre et au type de documents qui peuvent être transmis.
La Commission doit prendre des mesures concrètes pour instaurer immédiatement un système unique, adapté et uniforme pour l’exécution et la reconnaissance mutuelle des actes authentiques dans tous les États membres, qui facilitera considérablement la vie quotidienne des citoyens et des entreprises.
Dans le même temps, compte tenu des différences quant à la structure et à l’organisation des systèmes de registres publics dans le domaine de la propriété immobilière, les inscriptions dans les registres publics fonciers devraient être exclus de cet instrument communautaire. Hormis cette exception, la reconnaissance de l’authenticité, de la force probante et de la force exécutoire d’un acte authentique aux fins de son utilisation dans l’État membre souhaité ne peut être refusée qu’en cas de doute sérieux et motivé sur son authenticité, ou si la reconnaissance était contraire à l’ordre public de l’État membre requis.
Enfin, je voudrais remercier le rapporteur, M. Medina Ortega, pour ce document très bien préparé.
Toomas Savi (ALDE). - (EN) Monsieur le Président, je suis très heureux que la Commission prépare un plan d’action sur l’e-justice. J’ai été grandement surpris d’apprendre qu’une telle initiative n’avait pas encore été introduite. Je voudrais remercier ma collègue Diana Wallis d’avoir traité cette question urgente avec beaucoup d’à-propos. L’évolution technologique rapide nous offre des outils efficaces que nous ne devrions pas hésiter à utiliser.
Hélas, elle nous pose également de nouveaux défis, par exemple la criminalité informatique comme la surveillance non autorisée, la fraude, la guerre cybernétique et beaucoup d’autres. Il est grand temps que l’Union européenne introduise une législation sur la définition, l’investigation et la pénalisation de la criminalité informatique. La criminalité informatique franchit les frontières nationales et devrait par conséquent être examinée sur un plan supranational. J’espère que la Commission présentera très rapidement une initiative législative en la matière.
Costas Botopoulos (PSE). - (EL) Monsieur le Président, l’e-justice – la justice électronique – est-elle envisageable dans un domaine conditionné par les faiblesses et les vertus humaines, qui sont des caractéristiques très humaines? Non! Peut-il y avoir une justice sans frontière? Comme vous l’avez dit, non! Parce que c’est une activité humaine, exercée par ailleurs très différemment dans chaque région du monde.
Ces deux «non» signifient-ils que nous devons tourner le dos à l’innovation technologique? Certainement pas! Nous devons essayer d’exploiter l’innovation humaine. Un portail d’information: oui! L’échange de données: oui! La conscience de l’interdépendance des systèmes judiciaires: oui! Contribuer à la création d’un démos européen: oui! Mais à une justice commune sans visage – et je n’insinue pas que vous faites cela dans votre rapport - c’est non!
Mon père, qui était juge, ne verrait pas d’un bon œil que je défende la justice électronique au Parlement européen. Si je parlais depuis le Parlement européen à mon père, qui est au ciel, je lui dirais ma conviction que la justice confrontera toujours un homme, son avocat et un juge – pas devant Dieu mais devant leur conscience.
Nicolae Vlad Popa (PPE-DE). – (RO) Je voudrais adresser mes félicitations pour l’initiative relative à la circulation des actes authentiques en Europe, car elle renforcera la libre circulation des personnes et des entités commerciales au sein de l’Union européenne. L’élimination des frontières physiques n’a pas levé toutes les frontières juridiques. J’en veux pour preuve les procédures complexes, différentes d’un État à l’autre, qui régissent l’application des contrats signés en présence d’un représentant des autorités publiques.
Il est de notre devoir d’offrir à chaque citoyen la possibilité d’appliquer les dispositions de l’acte authentique européen sans procédure additionnelle dans un État membre de l’Union européenne lorsque l’acte authentique a été établi dans un autre État membre.
Je salue l’initiative de Mme Wallis et le rapport sur l’e-justice, car je crois que l’adoption de ce rapport garantira l’accès des citoyens européens au système juridique et judiciaire européen grâce à l’utilisation des technologies de l’information et de la communication. La gestion rapide des preuves à un coût minimal, et la simplification des procédures judiciaires au moyen d’instruments simples et pratiques, faciliteront l’accès à la justice des citoyens en cas de litige transfrontalier. Pour réaliser ces…
Armando França (PSE). – (PT) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Madame Dati, l’e-justice est une étape importante en vue de garantir l’accès au droit, à la justice et aux tribunaux. Je salue cette initiative et félicite la rapporteure et la Présidence française. Le projet d’e-justice faisait partie de ceux qui ont été examinés durant la Présidence portugaise et il est dès lors revenu au Portugal de mener le développement et la mise en œuvre du projet pilote, qui permettra à tous les citoyens d’avoir accès à des services dans d’autres États membres d’une manière plus simple, moins coûteuse et plus conviviale et dans leur propre langue.
Ce portail multilingue devrait être conçu pour aider les citoyens et les entreprises qui recherchent une aide juridique et des conseils juridiques initiaux sur des problèmes juridiques transfrontaliers. Le portail d’e-justice devrait être coordonné et géré par une unité qui sera également chargée de coordonner les contributions des différents États membres et de garantir leur interopérabilité. Le projet e-justice bénéficiera aux citoyens et renforcera notre démocratie. Je me félicite du lancement du portail en décembre 2009.
Marcin Libicki (UEN). – (PL) Monsieur le Président, je voudrais avant tout féliciter Mme Wallis pour son excellent rapport et attirer votre attention sur deux éléments. En tant que président de la commission des pétitions, je remarque que les citoyens de l’Union européenne n’ont souvent pas conscience de leurs droits et, inversement, pensent qu’ils peuvent intervenir dans des matières dans lesquelles ils n’ont aucun droit de le faire. Dès lors, ce portail internet, également appelé portail d’e-justice, aidera sans aucun doute les citoyens de l’Union européenne à contacter le Parlement européen et sa commission des pétitions.
Je voudrais aussi attirer votre attention sur un autre point mentionné par Mme Wallis dans son intervention, à savoir que nous devons respecter les lois locales. Cette question a été posée il y a 250 ans par le célèbre philosophe français Charles de Montesquieu, qui disait que, lorsqu’on élabore une législation à un niveau territorial supérieur, il faut toujours garder à l’esprit que les régions et territoires de plus petite taille, en l’occurrence les États membres de l’Union européenne, ont leurs propres traditions qu’il convient de respecter.
Le Président. – Mesdames et Messieurs, lors d’une discussion que nous avons eue l’autre jour au Bureau du Parlement, il a été convenu par la plupart d’entre nous qu’on ne devrait plus donner la parole aux membres qui étaient déjà intervenus dans un débat. Néanmoins, en vertu de ce qu’on appelle en Espagne l’esprit de Noël, nous allons faire une exception et redonner la parole à M. Romagnoli.
Luca Romagnoli (NI). – (IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je ne peux m’exprimer au nom de chacun d’entre nous, mais j’espère que les membres non inscrits conviennent que l’espace commun de justice représente un avantage indiscutable pour les citoyens de l’Union et qu’ils appuieront par conséquent l’initiative en la matière.
Mesdames et Messieurs, nous étions pratiquement tous présents il y a quelques minutes et je ne voudrais pas répéter ce qui a déjà été dit. Je tiens dès lors à vous souhaiter à tous, et avant tout à souhaiter à l’Europe et aux nombreux citoyens de l’Union, qui s’inquiètent pour leur qualité de vie, une année nouvelle de prospérité et, bien sûr, de justice.
Reinhard Rack (PPE-DE). – (DE) Monsieur le Président, il est positif que l’intégration progresse dans le secteur de la justice, qui est traditionnellement une chasse gardée des États nations. Cette évolution est conforme aux changements intervenus dans les conditions de vie des citoyens de l’Union. Toutefois – cette remarque a déjà été formulée à plusieurs reprises – cette intégration ne doit pas s’immiscer excessivement dans des structures qui ont évolué par tradition et, surtout, qui fonctionnent. On ne peut pas tout mesurer suivant le même critère.
L’organisation des instruments authentiques et des bureaux d’enregistrement est très différente dans beaucoup d’États membres. En Autriche, mais pas uniquement, l’étude du notaire a une longue tradition et jouit d’un degré de sécurité et de confiance aussi élevé que les bureaux d’enregistrement publics. Cette réalité ne doit pas être compromise pour la seule et unique raison que ces professions n’existent pas ailleurs. Je suis donc en faveur de l’intégration et d’une ouverture mutuelle, mais de manière équilibrée.
Czesław Adam Siekierski (PPE-DE). – (PL) Monsieur le Président, chaque État membre a un système juridique différent et des principes différents en matière de reconnaissance des documents administratifs. Il nous appartient donc de chercher à simplifier autant que possible la circulation transfrontalière des actes authentiques. Gardons néanmoins à l’esprit que la priorité consiste à garantir la certitude et la sécurité des situations et des actes avant de simplifier la circulation des documents.
Nous devons aussi harmoniser les principes de reconnaissance des documents administratifs afin de faciliter la vie quotidienne de nos concitoyens et le fonctionnement des entreprises. C’est en effet ce qu’ils attendent de nous. Il ne fait aucun doute que ces règles leur épargneront du temps et de l’argent. Nous devons œuvrer à l’instauration d’une base harmonisée pour la reconnaissance mutuelle des actes authentiques dans les différents États membres, mais nous ne devrions certainement pas élargir le champ d’application de ce régime afin d’y incorporer des documents qui ne remplissent pas les critères de base.
Rachida Dati, présidente en exercice du Conseil. − Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs les parlementaires, la Présidence a été très attentive à vos travaux sur les trois sujets.
Vos rapports témoignent d’abord de votre intérêt pour ces questions et je sais que nous aurons d’autres occasions d’en reparler dans le futur. Je voudrais, une nouvelle fois, remercier M. Manuel Medina Ortega pour ses propos et sa contribution. Nous devons avancer dans le domaine de la circulation et de la reconnaissance des actes authentiques.
Vous l’avez mentionné, à juste titre, l’arrêt Unibank donne un cadre d’action et une définition des actes authentiques. Comme l’a souligné Jean-Paul Gauzès, tout à l’heure, il s’agit d’un excellent rapport qui va contribuer à une meilleure coopération judiciaire. Je voudrais également le préciser à l’attention de Diana Wallis, cela doit concerner tous les citoyens européens, mais il faut aussi veiller à créer les conditions d’une véritable confiance mutuelle. C’est nécessaire pour la sécurité juridique.
Je souhaite également souligner l’implication de Diana Wallis dans le domaine de la justice électronique. Vous avez raison, c’est un moyen de renforcer l’accès à la justice. N’oublions pas que dix millions de personnes seraient impliquées dans des litiges transfrontaliers, d’où la nécessité d’avoir des modes de communication efficaces. Je partage les propos de Jacques Barrot, «nous conserverons cette ambition». L’intervention de Mme Zdravkova va dans ce sens puisque l’interconnexion du système judiciaire nous ouvre de nombreuses perspectives.
Monsieur López-Istúriz White, je partage votre constat, il faut mieux protéger les adultes vulnérables, et notamment les personnes âgées, et je me félicite de l’adoption de ce rapport qui va tout à fait dans le sens des préconisations et de nos ambitions. Je remercie également Neena Gill pour ses observations puisque votre témoignage rend ce rapport extrêmement concret.
Monsieur le Commissaire, cher Jacques, vous avez également manifesté votre intérêt pour ces sujets et j’espère que notre débat d’aujourd’hui pourra enrichir la consultation que vous organisez, je crois, en ce moment.
Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs les parlementaires, je voudrais, au nom de la Présidence, remercier tous les orateurs qui se sont exprimés. Les observations émises sont très professionnelles, très concrètes et, en outre, elles permettent d’avoir confiance en l’avenir et démontrent l’intérêt de l’Union pour ces sujets de protection des citoyens européens.
Le bilan que je fais de la Présidence française sur la justice, c’est que les sujets ont été concrets, les décisions ont été concrètes et les ambitions que nous avons le sont encore plus. Cela a été encore une occasion privilégiée de dialoguer avec votre Assemblée, lors de vos travaux en plénière ou en commission, mais également à l’occasion de toutes les conférences thématiques qui ont été organisées en France sur ces sujets.
Je vous remercie pour l’excellente coopération qui a été instaurée entre le Conseil et le Parlement, qui nous a permis, d’ailleurs, d’avancer très rapidement. Je me souviens du début de la Présidence, lorsque nous avons débattu des objectifs et des priorités. Je peux vous dire que les objectifs ont été atteints et les priorités ont été renforcées et je pense que les Présidences qui vont suivre la Présidence française vont tout à fait aller dans ce sens.
Le Président. – Madame Dati, en ma qualité de président, je tiens aussi à vous remercier, ainsi que la Présidence du Conseil, pour le travail accompli et les efforts réalisés, notamment d’un point de vue personnel, au cours des six derniers mois.
Jacques Barrot, vice-président de la Commission. − Monsieur le Président, chère Rachida Dati, Mesdames et Messieurs les parlementaires, je me contente de rappeler tout simplement, d’abord sur le rapport de M. Medina Ortega, que nous allons avoir des rendez-vous sur la reconnaissance des actes authentiques dans le cadre du règlement Bruxelles I. Nous allons adopter un rapport concernant l’application de Bruxelles I début 2009, et nous verrons, au cours de l’année 2009, comment revoir ce Bruxelles I.
Deuxièmement, je vous l’ai dit tout à l’heure, nous aurons un autre rendez-vous avec l’instrument sur les successions et sur les régimes matrimoniaux. La question des actes authentiques sera donc aussi évoquée dans le cadre d’un livre vert qui traitera, plus généralement, de tous les actes publics. Ce livre vert est prévu pour la fin 2009.
Il est certain que la libre circulation des actes et documents doit être améliorée, et comme l’a très bien dit Mme la ministre, il faut tout de même bien s’assurer de la sécurité juridique qui ne peut naître que d’une véritable confiance mutuelle. Voilà pour ces rendez-vous concernant les actes authentiques qui vont mobiliser beaucoup notre attention dans les mois qui viennent au cours de l’année 2009.
S’agissant de l’e-justice, je veux bien confirmer que la Commission est en train de mettre en place les contrats qui permettront de développer la première mouture du portail européen de l’e-justice dans les délais convenus, et comme cela a été souligné, l’interconnexion des casiers judiciaires est déjà, me semble-t-il, une prémisse très prometteuse de la réussite de cette initiative relative à l’e-justice.
Enfin, comme je l’ai indiqué, nous allons suivre avec beaucoup d’attention la mise en œuvre de la convention de La Haye relative à la protection des personnes vulnérables. Nous allons, tout au cours de l’année 2009, voir quelles sont exactement les améliorations qui pourraient être envisagées et voir si nous aurons besoin d’une initiative communautaire en la matière pour faciliter la mise en œuvre concrète des dispositions de la Convention de La Haye. Je pense à la transmission des dossiers, à l’information des personnes vulnérables sur leurs droits. Voilà la réponse de la Commission.
Vous me permettrez, Monsieur le Président, de féliciter vraiment personnellement Rachida Dati, car nous avons eu une Présidence française extrêmement active, dans le domaine de la justice, avec les séminaires auxquels nous avons été conviés, aussi bien le Parlement que la Commission, qui ont beaucoup enrichi le débat et lancé, je dirais, les fondements de ce nouveau programme de Stockholm.
Soyez très vivement remerciée pour votre engagement personnel, pour la qualité d’écoute de la Présidence française et, tout simplement, pour la manière dont vous avez aussi travaillé, en matière d’obligations alimentaires, comme en matière de communication des casiers judiciaires et de renforcement d’Eurojust. Vous avez vraiment un beau bilan. Bravo!
Manuel Medina Ortega, rapporteur. – (ES) Bien que ce Parlement ne soit pas très généreux en termes de temps de parole, et ce de par sa nature même, nous avons eu malgré tout l’occasion, durant la petite heure que nous avons consacrée au sujet de la justice, de discuter dans une certaine mesure de quelques-uns des points cruciaux. Plus particulièrement, concernant l’acte authentique, un point nécessite selon moi une clarification. L’acte authentique est différent du document privé, même si ce dernier passe devant un notaire public.
Un document privé déposé auprès d’un notaire public peut être considéré comme l’expression de la volonté des parties. Dans certains systèmes juridiques, le rôle du notaire public se limite à certifier que la volonté des parties est exprimée. Ceci est universellement reconnu en vertu du principe de l’autonomie de la volonté et de la reconnaissance de son existence.
Ce dont il est question aujourd’hui est un instrument totalement différent. Nous parlons d’un document public, un document impliquant l’intervention d’un officier – généralement un notaire dans la plupart des pays de droit continental – qui est investi de l’autorité publique. Cette intervention confère à l’acte un niveau presque similaire à celui d’un jugement.
Il n’y a aucune discrimination fondée sur le pays à l’heure actuelle. Si nous adoptons des règles sur l’acte authentique européen, tout pays européen pourrait disposer de ce document et obtenir cette reconnaissance, mais il faudrait pour cela lui confère la même reconnaissance dans le système juridique en question que celle qu’elle détient dans les autres.
En d’autres termes, la troisième condition nécessaire à la reconnaissance de l’acte authentique est qu’il ne peut pas avoir en dehors de ce pays des effets différents de ceux qu’il produit dans le pays différent. Plus précisément, un acte notarié anglais est reconnu sur le continent, mais dans la même mesure qu’il est reconnu dans le droit anglais. Il ne peut pas y produire un effet supérieur. Un document juridique anglais ne peut pas être reconnu en France comme s’il s’agissait d’un document public français, car il ne présente pas les mêmes caractéristiques. C’est un type de document tout à fait différent.
On ne peut donc parler de discrimination en la matière. C’est une tentative d’instauration d’un système commun à l’ensemble de l’Union européenne, et je pense qu’il est possible que certains pays qui n’en disposent pas adopteront ce type de document. À cette fin, l’adoption d’un acte européen unique constituerait un instrument important.
Diana Wallis, rapporteure. − (EN) Monsieur le Président, j’ai bien peur de ne pas pouvoir résister. M. Medina dit que l’acte authentique – et c’est la raison pour laquelle j’insiste pour que nous procédions à un examen précis et approfondi – doit être un acte public. Si l’on prend l’exemple du common law anglais et de l’avocat conseil (solicitor) anglais préparant des actes (deeds), cet avocat conseil est un fonctionnaire du tribunal, autorisé par le tribunal, et il peut donc préparer un document public. Examinez cela, comprenez-le s’il-vous-plaît. Certaines choses sont communes et méritent davantage de recherche et de considération dans d’autres juridictions et d’autres cultures juridiques.
J’abandonne à présent cette humeur pinailleuse pour me tourner vers la Présidence française et lui dire: Madame la Ministre, merci beaucoup de votre coopération et du travail réalisé par votre staff et d’autres personnes durant les mois de votre Présidence. C’était fabuleux. Nous avons accompli tellement de choses, et le dynamisme et la détermination que vous affichez pour changer réellement la vie des citoyens dans le domaine de la justice ont été très appréciés. Merci. Vous nous manquerez.
Le Président. – Je devrais céder la parole à M. López-Istúriz White, mais mon compatriote me dit qu’il souhaiterait donner une minute de son temps de parole à M. Toubon.
Jacques Toubon (PPE-DE). – Monsieur le Président, chers collègues, Madame la Ministre de la justice, c’est justement en cette qualité que je voulais m’adresser à vous à la fin de ce débat. En effet, avec la Présidence portugaise, la Présidence slovène, et aujourd’hui la Présidence française, c’est-à-dire Rachida Dati comme garde des sceaux, je crois vraiment – et je le dis avec mon expérience d’ancien ministre de la justice – que nous avons franchi, en Europe, un pas, une étape, et que nous ne reviendrons pas en arrière.
Aujourd’hui il est en train de se créer, entre les systèmes juridiques et judiciaires, qui sont pourtant par nature méfiants les uns par rapport aux autres, une entreprise de rapprochement, de reconnaissance et d’harmonisation. Il y a même, sur certains points, une démarche visant à entreprendre des législations qui soient des législations communautaires, totales ou partielles, comme par exemple sur les obligations alimentaires. De cette façon, au-delà même de ce que nous avons fait sous la pression de la nécessité, par exemple en matière de sécurité, de droit pénal et de lutte contre le terrorisme, nous nous adressons aujourd’hui à ceux qui ont besoin de règles et de règlement des litiges qui s’appliquent partout en Europe, parce qu’ils vivent, par définition, dans leur pays mais aussi partout ailleurs, qu’ils travaillent et qu’ils ont des relations avec tout le monde dans l’ensemble de l’Europe.
Et cela, Monsieur le Président, il faut le souligner. C’est la marque, incontestablement, de la Présidence française. Tous mes collègues l’ont dit, mais il faut souligner que c’est un pas historique qui est franchi, incontestablement, dans la justice en matière de coopération et de législation. L’Europe, je pense, ne sera plus pareille si, véritablement, les gens ont le sentiment que l’espace judiciaire européen c’est quelque chose qui n’est pas seulement pour les discours dominicaux.
Antonio López-Istúriz White, rapporteur. – (ES) Monsieur le Président, il s’agit, je le pense, d’une très bonne solution, et je vous suis reconnaissant de votre courtoisie à mon égard et à celui de mon collègue.
Pour ma part, j’apprécie simplement toutes les interventions et je remercie en particulier certains propos aimables vis-à-vis du rapport, ainsi que la collaboration de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures.
Je voudrais mentionner tout particulièrement l’intervention de M. Rogalski. En tant que représentant de la région des Îles Baléares et député espagnol, je tiens à vous assurer que la raison pour laquelle je me suis chargé de ce rapport était d’aider les personnes, les personnes plus âgées qui vivent actuellement sur nos îles espagnoles en tant que résidents ou touristes. Il est essentiel pour moi qu’ils bénéficient de cette protection.
Personne n’aura donc manqué de constater que j’ai inclus mon propre pays dans l’aspiration à la ratification et la signature prochaines de la convention de La Haye.
Mon point de vue diffère de celui de la ministre sur un point seulement. Comme vous le voyez, je n’ai fait mention d’aucune autre Présidence. Je me rallie à chacun d’entre vous pour dire que, au final, nous aurions souhaité que cette Présidence française dure plus longtemps. Elle a été trop courte pour beaucoup d’entre nous.
C’est là ma seule divergence d’opinion.
Le Président. − Le débat est clos.
Le vote aura lieu aujourd’hui à 11 h 30.
(La séance, suspendue à 11 heures, est reprise à 11 h 35)
Déclarations écrites (article 142)
Louis Grech (PSE), par écrit. – (EN) Cette initiative vise à instaurer un cadre juridique clair et complet pour généraliser davantage la reconnaissance et faciliter la mise en œuvre des actes authentiques.
Jusqu’à présent, la reconnaissance des actes authentiques au sein des États membres a fait l’objet d’une gestion incohérente, ce qui a créé incertitude juridique et imprévisibilité pour les citoyens et les entreprises.
La création d’un système commun pour la reconnaissance mutuelle et l’exécution des actes authentiques bénéficiera à l’Union européenne en termes d’économie de temps et d’argent et, plus important encore, par l’adoption de procédures simplifiées. Cela favorisera également la circulation des actes authentiques en les rendant plus sûrs.
La force exécutoire de l’acte authentique et sa force probatoire supérieure contribueraient au développement et à l’intégration économiques de l’Union en facilitant la circulation des biens et services. C’est particulièrement pertinent en période de crise économique et je voudrais que cette législation soit mise en œuvre aussi rapidement que possible.
Je me félicite également que ce rapport limite son champ d’application aux actes authentiques et respecte la particularité des accords privés et d’autres catégories intermédiaires d’actes.