Le Président. – L’ordre du jour appelle les déclarations du Conseil et de la Commission sur la fourniture de gaz à l’Ukraine et l’UE par la Russie.
Alexandr Vondra, président en exercice du Conseil. − (EN) Monsieur le Président, le Conseil souhaiterait remercier le Parlement européen d’avoir placé ce point à l’ordre du jour de sa première période de session de cette année. Vous conviendrez probablement avec moi que le gouvernement tchèque a fait preuve d’une prévoyance remarquable lorsqu’il a choisi de faire de la sécurité de l’approvisionnement énergétique l’une des pierres angulaires, c’est-à-dire l’une des priorités, de sa présidence de cette année.
L’Union européenne est indubitablement confrontée à une grave perturbation de son approvisionnement en gaz en raison du litige opposant les Russes et les Ukrainiens, ainsi que Gazprom et Naftogaz. La Communauté est aujourd’hui coupée d’environ 30 % du total de ses importations de gaz. C’est une situation inédite: même durant la guerre froide, nous n’avions pas été confrontés, comme nous le sommes aujourd’hui, à une interruption pure et simple des livraisons de gaz.
Le Conseil et la Commission avaient conscience du danger existant. En effet, vous n’ignorez pas que nous avions déjà été confrontés à une situation semblable il y a trois ans, en 2006. C’est d’ailleurs un problème qui revient à peu près tous les ans, car, chaque année, la Russie augmente le prix du gaz exporté vers ses pays voisins afin de se rapprocher du prix du marché. C’est pourquoi nous avons été extrêmement vigilants, étant donné la forte dépendance de la Communauté envers le gaz russe. D’ailleurs, certains États membres dépendent à 100 % du gaz importé de Russie.
Je souhaiterais souligner en particulier la situation difficile de pays comme la Bulgarie ou la Slovaquie. Cette dépendance explique également pourquoi ceci est le problème numéro un dans les pays d’Europe centrale et orientale, par exemple: les gens gèlent et cela fait la une des journaux. Je sais que la situation est sans doute différente, en tous cas en termes de relations publiques, dans des pays qui ne sont pas touchés à ce point par le problème.
Cette fois-ci, les Russes nous avaient déjà fait savoir officiellement le 18 décembre 2008, par le biais du mécanisme d’alerte précoce UE-Russie, qu’il pourrait y avoir un problème si les négociations en cours avec l’Ukraine ne débouchaient pas sur un accord concernant les prix, les frais de transit et le remboursement des dettes. Les événements ne nous ont donc pas surpris outre mesure. Cela dit, nous ne nous attendions pas à être confrontés à une interruption de cette ampleur et de cette intensité.
Des contacts ont donc eu lieu au plus haut niveau avant le premier janvier 2009, dans le but d’éviter une perturbation de notre approvisionnement. La présidence tchèque surveillait déjà la situation bien avant le début de cette année. Pour ma part, j’avais déjà rencontré des représentants des autorités russes à Prague deux jours avant le réveillon de Noël.
La Commission a fait ce qu’il fallait pour suivre l’évolution de la situation durant la période de vacances. Elle a fait part des informations en sa possession au groupe de coordination pour le gaz au début du mois de janvier. Tant avant qu’après le premier janvier 2009, les deux parties ont assuré à la présidence et à la Commission, en particulier Andris Piebalgs, avec qui nous collaborons très étroitement, que les livraisons de gaz à destination de l’UE ne seraient pas affectées.
Comme vous le savez, la présidence tchèque, en collaboration avec la Commission et avec l’aide de certains États membres, a des contacts avec les deux compagnies gazières, russe et ukrainienne, et a entrepris plusieurs voyages afin de rencontrer les deux parties.
Lors de ces contacts, nous n’avons pas cherché à faire porter la responsabilité à l’un ou à l’autre, ni à prendre parti, ni même à faire office de médiateur, dans la mesure où il s’agit d’un différend commercial. Notre but était plutôt de faire comprendre aux deux parties la gravité de la situation, en soulignant que le problème nuisait gravement à la crédibilité et à la fiabilité de la Russie en tant que pays producteur et de l’Ukraine en tant que pays de transit. Face à l’aggravement de la situation, nous avons également endossé le rôle de «facilitateur» s’agissant des livraisons de gaz à la Communauté. Ce rôle a été très apprécié des deux parties, qui refusaient tout dialogue direct.
Permettez-moi de revenir brièvement sur la succession des événements depuis le petit matin de ce premier janvier, jour du nouvel an. Le premier janvier 2009, la Russie a annoncé qu’elle avait interrompu ses livraisons de gaz à l’Ukraine, tout en maintenant celles à destination de l’UE à leur niveau habituel. Le même jour, la présidence tchèque et la Commission ont publié une déclaration appelant les deux parties à chercher une solution rapide et à honorer leurs obligations contractuelles envers les consommateurs européens.
Le 2 janvier 2009, lorsqu’il est devenu évident que les livraisons à destination de l’UE commençaient à être affectées, la présidence tchèque a publié une déclaration formelle au nom de l’UE. Au début de la matinée, le même jour, nous avons reçu à Prague une délégation ukrainienne dirigée par le ministre de l’énergie, Iouri Prodan. Cette délégation, représentative de l’ensemble du paysage politique ukrainien, comprenait également, entre autres, un conseiller du président Ioutchenko, des représentants de Naftogaz et un représentant du ministère des affaires étrangères.
Le 3 janvier 2009, nous avons organisé à Prague un déjeuner avec le directeur de Gazexport, Alexander Medvedev. J’étais moi-même présent aux deux occasions. Ces deux entrevues nous ont permis de constater un manque flagrant de transparence en ce qui concerne les contrats liant Gazprom à Naftogaz et surtout un manque de confiance empêchant de progresser vers la conclusion d’un accord. Sur certains points, les deux parties nous ont livré une interprétation radicalement différente. C’est à ce moment là que nous avons commencé à avancer la possibilité d’une mission de contrôle.
Afin de résoudre ce problème de points de vue divergents, l’idée d’organiser une mission d’enquête conjointe de la présidence et de la Commission, sous la direction du ministre tchèque de l’industrie, Martin Říman, et du directeur général de la DG TREN, Matthias Ruete, a germé. Cette mission a reçu mandat du COREPER I, lors d’une réunion extraordinaire organisée à notre initiative le 5 janvier 2009, soit le premier jour ouvrable après les vacances.
La mission s’est rendue à Kiev, ainsi qu’au centre de répartition. Le jour suivant, le 6 janvier 2009, elle a rencontré les représentants de Gazprom à Berlin. Le même jour, les quantités de gaz livrées à plusieurs États membres de l’UE ont fortement diminué, ce qui a engendré une grave perturbation de l’approvisionnement. En conséquence, la présidence et la Commission ont publié une déclaration des plus fermes, appelant les deux parties à reprendre immédiatement et sans conditions les livraisons de gaz à l’UE. La présidence et la Commission ont ensuite essayé d’accélérer la conclusion d’un accord politique entre la Fédération de Russie et l’Ukraine afin que l’approvisionnement en gaz puisse être rétabli sans délai. Les livraisons de gaz ont également dominé l’ordre du jour de la traditionnelle réunion de stratégie qui a réuni la Commission européenne et le gouvernement tchèque à Prague, le 7 janvier 2009. Cela a également été le cas lors du premier conseil informel organisé par la République tchèque, à savoir la réunion informelle du Conseil Affaires Générales qui s’est tenue à Prague jeudi dernier. Encore une fois, nous avions de toute façon prévu de discuter de la sécurité énergétique, mais, face à l’urgence, le Conseil a adopté, à l’unanimité, une déclaration ferme de la présidence au nom de l’UE.
Suite à l’arrêt complet des livraisons de gaz transitant par l’Ukraine depuis le 7 janvier 2009, compte tenu des graves conséquences que cela entraîne pour certains États membres incapables d’amortir les effets de cette coupure, nous avons renforcé la pression. Au terme de négociations aussi longues que difficiles, les deux parties ont accepté le déploiement d’une mission d’observation composée d’experts indépendants de l’UE, accompagnés par des observateurs des deux parties. Cette équipe est chargée de contrôler en toute indépendance le flux de gaz transitant par l’Ukraine à destination de l’UE. Elle est déployée dans les deux pays. La Russie considère ce contrôle comme une condition préalable à la reprise des livraisons de gaz.
Comme vous l’aurez probablement remarqué, le déploiement de cette mission n’a pas été facile. Tout d’abord, il a fallu surmonter la résistance des Ukrainiens, opposés à la présence d’un expert russe au sein de la mission. Ensuite, cela a été au tour de la Russie de refuser une annexe ajoutée unilatéralement par l’Ukraine à l’accord négocié péniblement par notre présidence.
Après plusieurs voyages du premier ministre Topolánek à Kiev et à Moscou et des négociations difficiles avec le président Ioutchenko et le premier ministre Timochenko, d’une part, et le premier ministre Poutine, d’autre part, l’accord a finalement été signé le 12 janvier. Celui-ci fournit une base juridique pour le déploiement des observateurs et demande la reprise des livraisons de gaz russe à l’UE. À ce stade, la Russie a annoncé que la fourniture reprendrait au matin du 13 janvier, à huit heures. Toutefois – je ne sais pas si c’est parce que l’on était le 13 janvier – les choses n’ont pas évolué comme on l’attendait.
Ce lundi 12 janvier, la présidence tchèque a convoqué une session extraordinaire du Conseil des ministres de l’énergie, dans le but d’insister sur une plus grande transparence des questions liés au transit, d’envisager des mesures à prendre à brève échéance afin d’atténuer les conséquences des coupures jusqu’à la reprise complète des livraisons et d’identifier les mesures nécessaires à moyen terme pour prévenir les effets de perturbations de cette ampleur à l’avenir.
Dans ses conclusions, reprises dans le document 5165, le Conseil demande instamment aux deux parties de rétablir immédiatement l’approvisionnement en gaz de l’UE et de trouver des solutions pour éviter qu’un tel différend se reproduise. Dans le même document, le Conseil convient de la nécessité d’élaborer et de renforcer de toute urgence des mesures à moyen et à long termes en ce qui concerne, entre autres, la transparence s’agissant des flux gaziers physiques, de la demande et les volumes de stockage et des mécanismes de solidarité régionaux ou bilatéraux. Il convient également de se pencher sur le problème (énorme) du manque d’interconnexions des infrastructures énergétiques, de poursuivre la diversification des sources et des voies d’approvisionnement et de considérer les possibilités de financement de cette politique, notamment en accélérant le réexamen de la directive concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l’approvisionnement en gaz naturel.
Il semble aujourd’hui probable que le groupe de coordination pour le gaz se réunira à nouveau le lundi 19 janvier.
Le Conseil TTE (Énergie) reviendra sur le dossier lors de sa réunion programmée pour le 19 février, au cours de laquelle il devrait adopter ses conclusions concernant la communication de la Commission sur la deuxième analyse stratégique de la politique énergétique.
Ces conclusions, ainsi que la communication de la Commission, seront à l’ordre du jour du Conseil européen de mars, qui prêtera sans aucun doute l’attention qui se doit aux événements de ces dernières semaines.
Permettez-moi de clôturer cette introduction en formulant plusieurs remarques. Tout d’abord, le premier objectif de la présidence dans ce différend reste la reprise immédiate de la fourniture des volumes de gaz convenus contractuellement. Nous savons tous que le différend n’est pas encore réglé. Il est donc essentiel que l’UE n’aille pas s’empêtrer dans les querelles bilatérales entre Gazprom et Naftogaz.
Ensuite, la présidence comme la Commission continuent d’appeler instamment les deux parties au dialogue, dans le but d’obtenir un compromis permettant de restaurer l’approvisionnement en gaz de l’UE. La présidence et la Commission considéreraient comme inacceptable que la Russie ou l’Ukraine ne respectent pas l’accord du 12 janvier. Les conditions préalables à la reprise des livraisons, telles que stipulées dans l’accord, sont à présent remplies. Il n’y a donc aucune raison pour que l’approvisionnement ne soit pas pleinement rétabli.
La présidence est tout à fait consciente que certains problèmes persistent et que ceux-ci devront être réglés si l’on veut éviter que perdure l’incertitude qui entoure les livraisons de gaz russe via l’Ukraine.
Premièrement, il y a la question des volumes de gaz techniquement nécessaires à l’Ukraine pour assurer le fonctionnement continu de son réseau de transit. Il faut que les deux parties parviennent à un accord transparent définissant les responsabilités concernant la fourniture et le financement du «gaz technique».
Deuxièmement, il est essentiel que les contrats russo-ukrainiens sur le prix du gaz et les frais de transit fixent des conditions claires et juridiquement contraignantes pour prévenir la récurrence de telles perturbations. La présidence, avec la Commission, a, à plusieurs reprises, appelé les deux parties à signer un tel accord. Cependant, ni nous, ni la Commission n’avons l’intention d’intervenir dans la négociation de conditions contractuelles entre les deux sujets commerciaux.
La présidence prend note également que, en règle générale, tous les États membres reconnaissent la nécessité d’adopter au plus vite des solutions à court, moyen et long termes pour éviter qu’une telle situation se reproduise à l’avenir. La sécurité énergétique est parmi les principales priorités de la présidence, qui a entrepris de mener le débat sur les solutions possibles pour nous sortir du piège de notre dépendance énergétique, que ce soit lors du Conseil informel que j’ai mentionné plus tôt ou de la session «énergie» du TTE. J’aimerais revenir sur plusieurs des questions mentionnées dans les conclusions du Conseil Énergie.
Premièrement, les États membres ont convenu que la future sécurité énergétique de l’UE devait obligatoirement passer, entre autres, par la création d’un mécanisme de solidarité fonctionnel et efficace.
Deuxièmement, il n’y aura pas de solidarité sans interconnexion des réseaux énergétiques européens et amélioration de l’infrastructure énergétique.
Troisièmement, l’accroissement des capacités de stockage du gaz est crucial pour garantir le fonctionnement du mécanisme de solidarité.
Quatrièmement, à la lumière de la crise actuelle, la présidence appelle instamment à ce qu’un accord soit conclu d’ici à la fin de l’année 2009 sur le réexamen de la directive concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l’approvisionnement en gaz naturel.
En outre, l’UE doit diversifier ses sources et ses voies d’approvisionnement en gaz. À cette fin, la présidence organisera, en mai 2009, un sommet sur le corridor méridional. Nous en attendons des résultats tangibles concernant la diversification des sources et des voies d’approvisionnement et l’approfondissement de notre coopération avec les pays du sud du Caucase et d’Asie centrale.
Il ne sera pas possible pour l’UE d’atteindre la sécurité énergétique sans un marché intérieur de l’énergie complet, fonctionnel et sûr. C’est pourquoi la présidence se réjouit de pouvoir coopérer étroitement avec le Parlement européen en vue d’obtenir un compromis sur le troisième paquet énergétique en deuxième lecture.
La présidence est également prête à poursuivre les discussions sur la deuxième analyse stratégique, dans le but de pouvoir en reprendre les résultats dans les conclusions du Conseil de printemps.
Enfin, pour améliorer sa sécurité énergétique, l’UE devrait renforcer le mécanisme de transparence, entre autres.
Je pense que la Communauté est prête à faire face à la situation, tant du point de vue politique que technique. Sur le plan politique, la présidence, avec l’aide de la Commission et d’autres États membres, a investi et continuera d’investir des efforts considérables afin de résoudre la situation. Sur le plan technique, nous avons, au cours des dernières semaines, agi conformément à la directive concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l’approvisionnement en gaz naturel.
Cette directive a porté création du groupe de coordination pour le gaz, qui prouve à présent sa valeur. Elle exige des États membres qu’ils prévoient des mesures d’urgence pour réagir à ce genre de situations. Elle fixe en outre des normes minimales concernant la sécurité de l’approvisionnement en gaz des ménages et confie au groupe de coordination la tâche de coordonner l’action communautaire en la matière.
Ce mécanisme a largement contribué à atténuer les effets de la crise. Pour vous donner une idée, du gaz stocké a été utilisé et vendu aux pays voisins, en ce y compris aux membres de la Communauté de l’énergie, de l’électricité a été produite à partir de combustibles de remplacement, la production de gaz a été augmentée, y compris en Algérie, en Norvège et à partir d’autres sources russes, et nous avons livré plus de gaz que d’habitude aux pays voisins.
Je m’arrêterai ici. Je vous assure que nous mettons tout en œuvre, au niveau politique comme technique, pour pousser les négociateurs ukrainiens et russes à ramener les livraisons de gaz à l’Europe à leur niveau contractuel et, tant que ce ne sera pas le cas, pour limiter les conséquences néfastes de la situation sur nos citoyens et nos économies. Comme vous le savez, depuis le début de la journée, nous multiplions les contacts téléphoniques depuis ce Parlement, car le temps est compté et nous devons obtenir des résultats. Dans le cas contraire, il y aura inévitablement des conséquences politiques pour nos relations avec les deux pays.
Andris Piebalgs , membre de la Commission. − (EN) Monsieur le Président, l’Europe traverse actuellement l’une des plus graves crises énergétiques de son histoire. Celle-ci est comparable aux crises pétrolières des années 1970 et 1980, à ceci près que ces crises étaient mondiales, alors que la crise actuelle est très clairement limitée à l’UE.
Où en sommes-nous aujourd’hui? Eh bien! Malgré les promesses et malgré le protocole signé ce lundi 12 janvier par les ministres russe et ukrainien, moi-même et les deux entreprises concernées, le gaz russe ne parvient toujours pas au consommateur européen par l’entremise de l’Ukraine.
La Commission a respecté sa part du contrat: elle a mis sur pied une équipe d’observateurs européens à déployer à des lieux clés en Russie et en Ukraine afin de contrôler les opérations et de témoigner de leur conformité. En 24 heures, nous avons réussi à rassembler une équipe composée de représentants de la Commission et d’experts du secteur. Samedi dernier, ils étaient déjà présents en Russie et en Ukraine afin de permettre un rétablissement immédiat du flux gazier dès la signature du protocole.
Hier, la Russie a repris ses livraisons de gaz vers l’Ukraine, mais dans une relativement petite quantité représentant moins d’un tiers du volume habituel. En outre, elle a décidé d’utiliser un point d’entrée qui, selon la compagnie ukrainienne, est difficile à exploiter. L’Ukraine a donc suspendu l’acheminement. Le rapport de nos observateurs confirme qu’il était difficile (bien que pas impossible), d’un point de vue technique, d’assurer le transport dans ces conditions.
Malheureusement, cette situation est la même aujourd’hui. La seule solution est que les deux parties assurent la pleine coordination de leurs opérations techniques, de manière à ce que les volumes et les points d’entrée soient conformes aux exigences du système de transport du gaz.
Sans une meilleure coordination, l’approvisionnement en gaz ne pourra pas reprendre. C’est pourquoi les observateurs et les représentants de la Commission sur place tentent d’encourager les deux parties à conclure cet accord technique.
Ceci dit, je ne prends pas parti. Je ne veux pas jeter l’opprobre sur l’un ou sur l’autre. Toutefois, il est évident que les deux parties ont perdu leur réputation de partenaires dignes de confiance pour l’approvisionnement en énergie de l’Union européenne.
(Applaudissements)
Pour en revenir aux événements du mois dernier, je souhaiterais souligner la rapidité avec laquelle l’UE a réagi et a fait part de ses préoccupations. Les dirigeants politiques les plus haut placés ont, sans discontinuer, appelé instamment les deux parties à rétablir sans délai l’approvisionnement et à respecter leurs obligations.
Notre expérience nous ayant montré que des accords étaient souvent signés dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier, nous avons, lors de nos contacts routiniers au cours de l’année dernière, constamment répété le même appel aux deux parties: «S’il vous plaît, trouvez une solution à vos différends gaziers bilatéraux car cela affecte notre approvisionnement.»
Malheureusement, cet appel n’a pas été entendu et, malgré tous nos efforts, voici où nous en sommes aujourd’hui. Or je suis fermement persuadé que les deux parties détiennent la solution. Mais la veulent-elles? La présidence et la Commission ont appelé et appellent toujours la Russie et l’Ukraine à reprendre immédiatement les livraisons de gaz. Nous avons rempli notre part du contrat. Nous sommes réellement capables de dire où va l’intégralité du gaz: pas un seul mètre cube ne peut être dévié sans que nous le remarquions. Je pense que les mesures que nous avons prises sont suffisantes.
Toutefois, si les deux parties estiment que des mesures complémentaires sont nécessaires, nous sommes prêts à les envisager, car je constate aussi qu’il y a un manque de coordination et de contacts entre les deux parties.
Voici pour ce qui est de la crise immédiate. Et ensuite? Je sais que, quelle que soit la solution à laquelle nous parviendrons ces jours-ci, celle-ci ne sera que temporaire. Afin de restaurer la crédibilité de cette voie d’acheminement à l’avenir, nous aurons besoin d’une solution à long terme. Il est donc clair que les contacts avec les parties vont se poursuivre durant la présidence tchèque et, j’en ai bien peur, également sous la présidence suédoise.
Toutefois, je pense que la deuxième analyse stratégique de la sécurité énergétique et les travaux du Parlement et du Conseil sur le paquet climat/énergie contiennent déjà des réponses. Les solutions se trouvent là et nous ne pouvons pas dépendre de fournisseurs extérieurs qui, à mon grand regret, n’honore par leurs obligations contractuelles et ne font aucun cas des intérêts des consommateurs.
Cependant, je souhaiterais souligner en particulier deux problématiques à résoudre sans attendre.
La première est le manque d’interconnexions. Certes, la solidarité existe, mais dans de nombreux cas, celle-ci est freinée par l’absence d’infrastructures suffisantes pour acheminer le gaz depuis les installations de stockage existantes jusqu’aux endroits où ce gaz fait cruellement défaut. Dans le cadre du débat actuel sur le plan de relance, un volet «infrastructures» est évoqué. Je pense qu’il s’agit réellement d’un instrument approprié pour résoudre les problèmes qui se posent ici, car des interventions de ce type ne sont pas toujours suffisamment intéressantes d’un point de vue commercial.
La seconde est l’inadéquation de la directive de 2004 concernant des mesures visant à garantir la sécurité de l’approvisionnement en gaz naturel. Lorsque nous en avons débattu en 2004, nous avons réellement manqué le coche: l’instrument élaboré à l’époque n’est pas suffisamment ambitieux et est inadapté aux besoins actuels. Nous travaillons sur une nouvelle proposition de directive sur la sécurité de l’approvisionnement en gaz. Le projet sera présenté sous peu et soumis au Parlement dans les semaines à venir, au terme d’une étude d’impact qui est déjà en cours.
Je pense que nous devons réagir sans attendre et faire en sorte d’établir des mécanismes communautaires coordonnés permettant de faire face à ce genre de crises.
La présidence n’a pas ménagé ses efforts et je souhaiterais la féliciter pour avoir pris la direction des opérations à tous les stades de cette crise, avec le soutien total de la Commission. Je pense que, en ces temps difficiles, l’Union européenne prouve qu’elle peut parler d’une seule voix. L’Union européenne est menée par la présidence avec le soutien de la Commission.
Cependant, je me félicite également sans réserve de toutes les activités menées par le Parlement européen, sans lesquelles un accord ne serait pas possible. Lorsque deux parties n’entretiennent pas de dialogue au niveau des gouvernements et lorsque les entreprises tentent de se livrer à des petits jeux, vers qui peut-on se tourner pour garantir une stabilité politique? En Ukraine et en Russie, un dialogue existe au niveau de la base politique au sens large. Je souhaiterais remercier M. Saryusz-Volski pour les efforts qu’il a entrepris afin de rendre possible ce dialogue, ainsi que le président Pöttering, qui s’est impliqué dans les efforts de conciliation des deux parties. Il serait si facile de trouver une solution si seulement les parties acceptaient de se parler.
Je pense que l’action du Parlement a joué un rôle très important et j’espère sincèrement que notre débat d’aujourd’hui, qui est, il faut le préciser, suivi par les deux parties, incitera encore davantage à débloquer la situation. Aujourd’hui, ceux qui souffrent le plus de la situation sont ceux qui, bien que n’en étant pas responsable, s’investissent pour faciliter le dialogue. Cette médiation coûte de l’argent au contribuable et au consommateur européen.
Je pense donc qu’il est plus que temps que le gaz retrouve le chemin de l’Union européenne, dans des conditions permettant de garantir la stabilité.
PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD ONESTA Vice-président
Jacek Saryusz-Wolski, au nom du groupe PPE-DE. – (EN) Monsieur le Président, cette perturbation majeure de notre approvisionnement est grave pour le citoyen, les entreprises et l’emploi en Europe et vient s’ajouter à la crise économique. Nous, députés de cette Assemblée, allons tous devoir répondre aux questions des citoyens à l’occasion des élections européennes qui se profilent. Nous devrons expliquer ce que nous avons fait pour protéger nos entreprises, nos emplois et nos citoyens.
Contrairement à ce qui a été dit, le problème est de nature politique et multilatérale et non de nature commerciale et bilatérale. Il y a trois ans, lors de la première crise gazière qui a fait suite à l’interruption de l’approvisionnement énergétique en provenance de Russie, l’Europe s’est rendue compte de sa vulnérabilité et de ses limites. Déjà à l’époque, la nécessité pour l’UE de se doter d’une politique étrangère commune an matière d’énergie est apparue comme évidente.
Notre groupe, le PPE-DE, a appuyé cette idée dès ses balbutiements. Nous avons pris les devants en demandant l’établissement d’un rapport d’initiative sur les tenants et les aboutissants d’une politique étrangère européenne commune dans le domaine de l’énergie, que j’ai eu l’honneur de présenter à cette Assemblée en septembre 2007. Ce rapport a reçu le soutien de l’ensemble des groupes politiques et a été adopté presque à l’unanimité.
Ce rapport appelait à l’élaboration d’une stratégie globale assortie d’une feuille de route détaillée en vue de la mise en place d’une politique étrangère européenne commune dans le domaine de l’énergie. Nous avons formulé plusieurs recommandations avec, à court terme, le développement de mécanismes de solidarité, l’unité dans la défense de nos intérêts et une politique étrangère plus efficace en matière d’énergie et, à moyen terme, le besoin de diversification, reprenant Nabucco ainsi que les problématiques du stockage, des investissements et des interconnexions.
La deuxième analyse stratégique de la sécurité énergétique donne suite, bien que tardivement, à une partie de ces recommandations. Nous nous en félicitons, tout comme nous saluons les efforts entrepris par la présidence tchèque en vue de résoudre la crise actuelle en servant de médiateur entre les deux parties.
Cependant, il faudra faire plus si nous voulons éviter de nouvelles situations de ce genre à l’avenir et cela ne sera possible que si nous nous dotons d’une véritable solidarité et d’une véritable politique européenne commune en matière de sécurité énergétique qui nous fournisse des solutions à long terme, viables et systémiques. Cela signifie que les États membres doivent joindre leurs efforts pour peser de tout leur poids, en étant représentés par la Commission, dans les négociations. L’UE doit présenter à ses partenaires, pays producteurs ou de transit, un interlocuteur unique. Dans l’intervalle, nous pourrions envisager de nous approvisionner directement en gaz russe à la frontière russo-ukrainienne.
J’ai deux questions pour le président en exercice et la Commission. Monsieur le Commissaire Piebalgs, Monsieur le Vice-premier ministre Vondra, que pensez-vous d’un scénario dans lequel l’UE interviendrait pour endosser, aux côtés de l’Ukraine, la responsabilité du transit? Ensuite, de quels moyens de pression dispose l’UE? Que pourrions-nous faire en réaction? Notre groupe attend de la présidence et de la Commission qu’elles entreprennent des actions et prennent des mesures rapides et radicales envers nos partenaires énergétiques russe et ukrainien afin que soit rétabli l’acheminement du gaz. D’ici aux élections, nous demanderons au Parlement de ne pas relâcher son implication, même durant la campagne. Il nous faut suivre la situation de près et en permanence. Je vous informe que nous avons mis sur pied un groupe de contact entre les parlements européen, russe et ukrainien.
Hannes Swoboda, au nom du groupe PSE. – (DE) Monsieur le Président, mon groupe réclame la création d’une commission temporaire en vertu de l’article 175 afin de répondre à bon nombre de ces questions, que M. Saryusz-Wolski a également soulevées; autrement dit, que nous emboîtions le pas de la Commission et du Conseil aussi, bien sûr, afin de tirer les conclusions qui s’imposent – et nous espérons les tirer ensemble – d’ici la période de session du mois de mai.
Les pourparlers que nous avons eus avec les représentants de Gazprom et de Naftogaz – en d’autres termes la Russie et l’Ukraine – ont confirmé notre impression selon laquelle les deux parties se comportaient de façon irresponsable. Je peux réaffirmer clairement ce que le commissaire Piebalgs a déclaré: pour le moment, aucune des deux parties ne fait preuve de responsabilité, pas même en tant que partenaire responsable de l’Union européenne. Nous devons réagir en conséquence.
Sur la base de tout le soutien que j’ai accordé aux initiatives prises, je dois dire que nous savons depuis un certain temps déjà que l’Ukraine refuse de construire les stations de contrôle qu’elle a promises; les fonds apportés par l’Union européenne demeurent inutilisés, et nous n’avons pas réagi. Nous savons aussi depuis deux mois au moins qu’aucun accord n’a été conclu avant l’échéance du 1er novembre fixée début octobre. À mes yeux, la date du 18 décembre était peut-être un peu éloignée. La Commission aurait dû en faire davantage afin de se préparer au pire, de même qu’elle aurait dû dire aux États membres ce qui était possible. Il faut reconnaître qu’elle a fait preuve de beaucoup de solidarité, mais je m’attendais à ce qu’elle envisage la possibilité que les choses tournent aussi mal.
Néanmoins, ce qui importe maintenant, ce n’est pas de lancer des accusations – telle n’est pas mon intention -, mais bien de tirer les conclusions qui s’imposent, afin d’être mieux préparés la prochaine fois; ou plutôt – ce qui serait préférable, bien entendu – afin que nous puissions empêcher une telle situation de se reproduire.
Je dois ajouter, Monsieur le Commissaire, que nous avons peut-être passé un peu trop de temps à discuter libéralisation et marchés - surtout dans le secteur du gaz, comme vous le savez. Cela ne nous a sans doute pas réussi, comme on peut effectivement le constater. Nous l’avons toujours dit, le secteur du gaz est atypique, il est dénaturé – on pourrait même dire déterminé – par la politique, et il ne sert à rien d’élever la libéralisation du secteur du gaz au rang de principe suprême alors que l’Ukraine et la Russie se la jouent politiquement. Nous avons besoin d’une ligne de communication solide et commune à cet égard, que nous devons démontrer avec la même énergie.
Je fais miens bien des propos formulés dans cette Assemblée aujourd’hui. Il nous faut davantage de gazoducs; nous reconnaissons que celui de Nabucco représente un projet de la plus haute importance. Vous-même avez mentionné le gazoduc transsaharien, qui mérite que l’on y réfléchisse. Davantage d’interconnecteurs et d’interconnexions sont nécessaires. Tout cela ne se fera pas en un jour, mais il convient d’envoyer des signaux. Ils ne vont pas non plus apparaître comme par magie. Ne comptez pas sur le marché pour s’en charger; il ne le fera pas, car il n’a pas d’intérêt à le faire. Après tout, ce ne sont pas là des investissements immédiatement rentables, mais des investissements réalisés en vue d’une réserve. Il en va de même des réserves de gaz, bien entendu. Il est absolument inacceptable que de nombreux pays aient peu voire pas de réserves de gaz, ou même qu’ils refusent de communiquer à la Commission ces réserves. Nous devons faire cause commune dans ce domaine.
Au vu de toutes les circonstances que j’ai critiquées, cette Assemblée et la Commission doivent réellement rappeler à l’ordre plusieurs États membres et exiger d’eux qu’ils poursuivent enfin une politique énergétique européenne commune. Je rejoins M. Saryusz-Wolski sur ce point: nous avons en effet lancé ensemble cet appel, et reçu trop peu de soutien de la part du Conseil – ou plutôt des États membres. Si c’est ce que nous voulons, je demande que nous définissions une stratégie commune en la matière avant le mois de mai. Après tout, il serait inacceptable que ce Parlement, avant les vacances ou même les élections, n’ait toujours pas réellement tiré les conclusions qui s’imposaient à la suite de ces évènements tragiques, des conclusions qui – espérons-le – seront tirées ensemble.
István Szent-Iványi, au nom du groupe ALDE. – (HU) Nous avons désormais un accord et quantité de promesses, mais toujours pas de gaz. Ça suffit! Nous ne pouvons permettre que l’Europe soit la victime innocente d’une épreuve de force cynique. Si la fourniture de gaz ne reprend pas immédiatement, les conséquences devront être claires et décisives. Nous ne pouvons tolérer une situation dans laquelle des millions d’Européens se retrouvent sans chauffage, nous ne pouvons tolérer que de plusieurs centaines de milliers d’emplois soient menacés.
Jusqu’à présent, l’Europe a évité les conflits avec les pays concernés, elle a fait des concessions et posé des gestes politiques. Cette politique n’a pas porté ses fruits. En tant que libéraux, nous réclamons depuis longtemps une réduction importante de notre dépendance, notre dépendance énergétique, vis-à-vis de la Russie.
Clairement, la leçon à tirer de cette crise est que le gazoduc de Nabucco doit devenir une véritable solution alternative et, partant, recevoir un soutien financier. Nous devons définir une politique commune en matière d’énergie, caractérisée par une plus grande solidarité entre les États membres, par une meilleure coordination et par des réseaux reliés. Nous devons accélérer le développement de sources d’énergie alternatives et améliorer l’efficacité énergétique.
Cella ne résoudra nos problèmes qu’à moyen et long termes. Nous devons donc rappeler fermement à Kiev et à Moscou qu’ils doivent respecter leurs engagements internationaux et que, tant qu’elles ne les respecteront pas, tous les aspects de nos relations bilatérales auront à en subir les conséquences.
La Russie doit prouver qu’elle agit de bonne foi et faire tout ce qui est en son pouvoir afin que la fourniture de gaz reprenne sans délai. L’Ukraine doit aussi être consciente de ce que, même si elle paie actuellement sont gaz à un prix politique inférieur à celui du marché, cela lui coûte en réalité plus cher que le prix du marché, puisque cette situation augmente sa vulnérabilité et qu’elle prête ainsi davantage le flanc au chantage.
Par ailleurs, l’Union européenne est pour l’instant mise à l’épreuve devant ses citoyens. Est-elle à même de défendre effectivement ses intérêts? Si elle échoue, l’Europe n’aura pas de réel avenir, mais si elle réussit, elle pourra regarder l’avenir avec optimisme.
Hanna Foltyn-Kubicka, au nom du groupe UEN. – (PL) Monsieur le Président, la crise du gaz en Europe est une crise permanente et bien plus profonde que ce que les élites politiques européennes le font croire. Nous devons souligner avec emphase qu’elle n’est pas de nature purement économique. C’est avant tout une crise politique, fondée sur le manque de défense de l’Europe face à la politique agressive de Poutine.
Ne nous leurrons pas – la Russie ne se préoccupe pas d’une poignée de dollars. Le contexte des évènements des derniers jours est marqué par les actions agressives du Kremlin, qui vise à étendre sa domination dans la région du sud-est de l’Europe. L’Ukraine revêt une importance stratégique pour les Russes, pas seulement parce qu’un gazoduc vers l’Europe traverse son territoire, mais parce que la flotte russe en mer Noire est basée à Sébastopol. Le contrat relatif à cette base doit prendre fin en 2017, mais rares sont ceux qui pensent que les Russes quitteront de leur plein gré la Crimée. Les exigences de Gazprom sont soutenues par tout l’appareil politique et militaire du Kremlin, dont le but est de discréditer et d’affaiblir le gouvernement ukrainien et de mettre l’Ukraine à genoux. Malheureusement, l’attitude passive de l’Europe a aidé Poutine à se rapprocher de cet objectif.
Rebecca Harms, au nom du groupe des Verts/ALE. – (DE) Monsieur le Président, je tiens moi aussi à commencer par dire que la République tchèque a eu un début difficile pour sa présidence du Conseil et que, en ce qui concerne cette nouvelle crise du gaz, elle n’aurait pas pu mieux rectifier le manque de clarification en matière de politique énergétique extérieure de l’Europe qui a prévalu ces dernières années.
Nous assistons pour l’instant à une démonstration de ce que l’expression bien connue «politique énergétique extérieure» représente une stratégie commune qui n’existe pas en Europe. Au-delà de ce débat sur le gaz russe, les Européens doivent se demander collectivement le type de relation qu’ils souhaitent avoir avec la Russie à l’avenir. Le gaz est une chose, le commerce de matières premières en est une autre, mais il est ici question de la relation fondamentale de l’Union européenne avec son plus grand voisin à l’est de notre continent. Aussi convient-il de clarifier cette question.
Dans le même temps, il faut clarifier comment l’Union européenne envisage de traiter à l’avenir avec les pays qui restent hésitants entre la Russie et l’UE. À mon avis, nous aurions en réalité pu prévoir ce qui vient de se passer avec l’Ukraine. Ceux qui connaissent bien l’Ukraine n’ont pas été surpris de voir non seulement Gazprom, mais aussi l’État russe, mélanger politique et intérêts économiques. La pire menace pour l’Ukraine aujourd’hui, c’est que les intérêts de certains acteurs politiques nuisent aux relations étroites que ce pays est parvenu à tisser avec l’Union européenne et à la réputation dont il jouit au sein de l’Union européenne. Les critiques qui ont été adressées à l’égard des mandataires compétents en Russie dans le cadre de ce litige sont au moins aussi valables pour Naftogaz, pour RosUkrEnergo, pour les responsables et pour le gouvernement ukrainien.
C’est bien plus qu’un différend commercial et je pense que la présidence tchèque nous a guidés au mieux ces derniers jours. J’espère que les projets que le commissaire nous a présentés porteront leurs fruits. Il me tient à cœur de féliciter la Commission pour sa position sans équivoque à l’égard de la tentative inappropriée de reconnecter le réacteur à haut risque de Bohunice au réseau électrique. Cela n’aurait servi à rien, sinon à enfreindre davantage le droit communautaire, cette fois au sein même de l’Union européenne.
Esko Seppänen, au nom du groupe GUE/NGL. – (FI) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Commissaires, Monsieur le Président en exercice du Conseil, la Commission a joué son rôle de médiateur dans le litige relatif au gaz qui a opposé la Russie et l’Ukraine et elle a fait de son mieux pour que la fourniture reprenne.
Je n’ai pas pour habitude de louer la Commission, mais, au nom de mon groupe, je tiens à la remercier. Elle a agi non pas comme un juge, mais comme un médecin; pas comme un chirurgien, mais plutôt comme un psychiatre. C’est ce genre de personnes qui sont désormais nécessaires et utiles.
D’autres parties d’Europe, certains ont froid dans lorsqu’en Ukraine, le président et le Premier ministre se livrent à une épreuve de force. Compte tenu des circonstances, la proposition avancée hier par M. Saryusz-Wolski, président de la commission des affaires étrangères, visant à ce que l’UE introduise des sanctions pour préserver le flux de gaz, est irresponsable. Devrions-nous accepter que l’UE commence à boycotter le gaz russe? La Pologne, bien entendu, devrait montrer l’exemple et refuser le gaz russe.
Notre groupe espère que la Commission continuera de jouer activement les médiateurs pour restaurer l’harmonie.
Gerard Batten, au nom du groupe IND/DEM. – (EN) Monsieur le Président, je souhaiterais citer un discours tenu à ce sujet par mon collègue Godfrey Bloom, le 25 octobre 2006: «La pensée, l’idée ou la notion que l’énergie du Royaume-Uni puisse éventuellement être contrôlée via un quelconque accord avec un escroc tel que Poutine est absolument ridicule! Il est totalement insensé d’espérer quoi que ce soit d’un morceau de papier signé par Poutine […]. Cet homme est un escroc.»
M. Poutine est en train de faire ce que ferait n’importe quel escroc digne de ce nom: il suspens l’offre pour faire grimper les prix. L’Europe a deux options: soit elle s’apprête à payer un prix beaucoup, beaucoup plus élevé pour un approvisionnement précaire en gaz russe, soit elle trouve d’autres fournisseurs, pour autant que cela soit possible. Le Royaume-Uni doit s’assurer que son gaz, de plus en plus rare, reste une ressource nationale et doit empêcher qu’il devienne un bien européen commun. Nous devons également entamer un programme de construction de nouvelles centrales nucléaires.
Jana Bobošíková (NI). – (CS) Mesdames et Messieurs, malgré tous les efforts déployés actuellement par le Conseil de l’Union européenne et la Commission, certains États membres sont toujours privés de gaz en provenance de Russie, leurs économies sont menacées et les citoyens craignent de mourir de froid. C’est le prix à payer pour la politique étrangère et énergétique sans vision à long terme de l’Union européenne. Malheureusement, ce sont les plus faibles qui le paient.
Mesdames et Messieurs, des gazoducs vides, des baisses de production et des écoles non chauffées: tel est le prix de la vaine russophobie qu’alimentent les membres de l’Union qui se sont opposés à la reprise de négociations sur le partenariat stratégique avec la Russie. Tel est le prix de notre soutien sans réserve à l’égard du segment orange de l’échiquier politique ukrainien, et de notre tentative de gérer la politique de l’Europe de l’Est depuis Bruxelles. Tel est le prix de notre rejet fanatique du nucléaire. Tel est le prix, aussi, des efforts de longues dates visant à s’immiscer dans les politiques énergétiques nationales des États membres. Quel conseil donneriez-vous au Premier ministre slovaque, qui est maintenant confronté à un «choix de Sophie»? Alors que les températures sont inférieures à moins vingt degrés et que le gaz a cessé d’arriver de l’Est, la Commission à Bruxelles menace de pénaliser la Slovaquie si elle relance la centrale nucléaire de Jaslovské Bohunice. Est-elle réellement censée ne rien faire alors que des usines s’écroulent et que des personnes meurent de froid durant les vingt jours de réserves qui lui restent?
Mesdames et Messieurs, nous constatons à présent l’importance de l’indépendance énergétique de chaque pays au sein de l’Union européenne. Comme il vaut mieux avoir une chemise filée à domicile bien chaude qu’un pardessus élimé de l’UE. Nous avons des enseignements à tirer de cette situation et nous devons éviter le transfert vers Bruxelles de compétences en matière d’énergie, comme on le vise avec le traité de Lisbonne.
Giles Chichester (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, il y a quelque chose d’étonnant dans cette manière qu’a de se répéter l’histoire de l’interruption des livraisons de gaz transitant par l’Ukraine en cette période de l’année. Toutefois, nous ne devrions pas être surpris. Après tout, ne s’agit-il pas du meilleur moment pour attirer l’attention, surtout lorsque nous sommes frappés par une vague de froid?
Les intentions de la Russie ne sont pas difficiles à discerner dans cette affaire, mais j’ai été particulièrement frappé par l’idée véhiculée par la presse selon laquelle il serait urgent pour Gazprom d’obtenir un accord sur la base d’un prix plus élevé du gaz, toujours lié à la flambée des prix du pétrole de l’année dernière, avant que ce prix ne redescente, entraîné cette fois par la chute des prix du pétrole.
Quoi qu’il en soit, les enjeux sont les mêmes qu’il y a trois ans. Les États membres de l’UE sont menacés par une dépendance excessive envers le gaz acheté à un fournisseur dominant. Dorénavant, il ne suffit plus de dire que nous avons besoin du gaz russe, tandis que la Russie, en retour, a besoin de nos devises fortes et que, donc, le marché est sans danger. Nous devons agir afin de préserver la sécurité de notre approvisionnement.
Les États membres doivent serrer les dents et s’apprêter à financer la construction d’infrastructures adéquates pour le stockage du gaz ainsi que la constitution de réserves suffisantes. Si nous nous accordions sur le nombre de jours d’approvisionnement constituant une réserve raisonnable, ce serait déjà un bon début. Une autre mesure importante est évidemment la diversification de notre d’approvisionnement. À cet égard, la construction de terminaux GNL est un bon exemple. Il semble en outre logique de se montrer plus favorables aux projets de gazoducs Nord Stream et Nabucco. Nous devons redoubler d’efforts pour améliorer la performance énergétique et les économies d’énergie au niveau de la consommation électrique des entreprises comme des ménages. Le potentiel d’économies est énorme.
Avant tout, cependant, nous devons rééquilibrer notre palette énergétique avec comme double objectif la sécurité de notre approvisionnement et la lutte contre le changement climatique. Ces deux objectifs peuvent être atteints parallèlement si nous augmentons la part de notre électricité qui est produite à partir de sources renouvelables, de l’énergie nucléaire et des technologies du charbon propre. Cependant, toutes ces options sont longues à mettre en œuvre et, entre-temps, nous devons tenter d’améliorer notre performance énergétique dans l’urgence et avec imagination.
Jan Marinus Wiersma (PSE). - (NL) Monsieur le Président, je peux me rallier à bien des avis formulés par mes collègues. Les évènements de ces dernières semaines ont été très surprenants. Hier encore, j’ai été très irrité d’entendre les homologues russes et ukrainiens déclarer qu’ils n’étaient certainement pas à blâmer. Nous recevons sans cesse des informations contradictoires sur ce qui se passe réellement. Nous entendons une histoire, puis l’autre, et il est très difficile pour nous, députés européens, de découvrir les faits précis. Nous espérons que cette confusion sera résolue dans les prochains jours et que les flux de gaz reprendront, comme promis.
Si la fourniture reprend, devons-nous reprendre les affaires comme avant? Je ne le pense pas. En 2006, la même chose s’est produite, mais à l’époque, l’incidence sur l’Union européenne était moins grave; à l’époque, la cause du conflit entre Moscou et Kiev était le prix du gaz, qui a entraîné une rupture de la fourniture de gaz à l’Europe. À l’époque, nous avons prévenu que le scénario risquait de se répéter, et c’est ce qui s’est passé. Nous savons que la fourniture de gaz est renégociée chaque année, parce que l’Ukraine et la Russie travaillent sur la base de contrats d’un an. Ce n’est que le mois dernier, lorsque la crise est à nouveau apparue, que l’Union européenne a réagi. Bon nombre de nos discussions de 2006 n’ont pas eu le moindre effet. Même à l’époque, nous savions que nous étions trop dépendants d’un gazoduc en particulier, qui fournit près de 80 % du gaz via un seul pays. Même à l’époque, il a été dit que nous devions d’urgence trouver des routes de fourniture alternatives. Même à l’époque, il était clair que nous n’étions pas tout-à-fait sûrs que nous pourrions nous entraider, en tant que pays de l’UE, si des problèmes survenaient dans certains pays, comme c’est pour l’instant le cas en Bulgarie, en Slovaquie et dans plusieurs autres pays de l’UE. Ces dernières années, peu de progrès ont été réalisés. Les semaines qui viennent de s’écouler ont montré toute la difficulté de mettre en place un mécanisme pour nous permettre de nous entraider.
La Russie et l’Ukraine se sont porté des coups durs, à elles-mêmes ainsi qu’à leur réputation. J’estime que ce n’est pas à nous d’accuser un pays plutôt que l’autre. Ce qui est évident, c’est que ces deux pays ne s’y connaissent guère en convivialité avec le client. En réalité, ils sont en train de léser considérablement leur principal client. Nous sommes un bon client pour la Russie, nous payons ce gazoduc via l’Ukraine, nous payons nos factures à temps et nous payons des prix mondiaux pour le gaz. Je pense que nous ne pourrions trop insister sur ce point auprès des deux parties.
Cette situation soulève bien entendu plusieurs questions. Que penser du conflit d’intérêt dans le secteur du gaz en Russie, de l’influence du Kremlin sur Gazprom? Je connais particulièrement bien l’Ukraine et je sais d’expérience que le secteur du gaz dans ce pays est pour le moins obscur; je crois que nous devrions analyser certains détails plus en profondeur. Comme M. Swoboda, je suis favorable à une enquête parlementaire sur la façon dont cette situation est apparue, sur ce que l’UE n’a pas fait et qu’elle aurait dû faire ces dernières années, ainsi que sur la manière exacte dont ces secteurs du gaz en Ukraine et en Russie sont structurés, afin que nous puissions empêcher pareille situation de se reproduire à l’avenir et de mieux comprendre ce qui se passe actuellement.
Janusz Onyszkiewicz (ALDE). - (PL) Monsieur le Président, Monsieur le Président en exercice du Conseil, Monsieur le Commissaire, dans l’accord signé en octobre de l’année dernière, la Première ministre ukrainienne Yulia Timoshenko et Vladimir Poutine ont affirmé leur volonté de passer aux prix mondiaux pour la fourniture et le stockage du gaz dans un délai de trois ans. Cet accord a été souligné par un accord officiel entre Gazprom et la compagnie ukrainienne Naftogaz.
Or, Gazprom a récemment réclamé une forte augmentation des prix, à des niveaux irréalistes. Ce type de chantage est possible du fait que Gazprom a un monopole sur l’Ukraine. De nombreux pays de l’Union européenne sont dans une situation semblable. Cela implique que, contrairement au pétrole, il n’y a pas de marché libre du gaz en Europe.
Aux États-Unis, les prix du gaz sont dernièrement tombés à 198 dollars américains pour 1000 m³, alors que Gazprom en exige 450 dollars de l’Ukraine. Il convient de changer cette situation en diversifiant les fournisseurs de gaz et en construisant un réseau de fourniture au sein de l’Union européenne et entre les pays voisins, de façon à ce que, comme pour le pétrole, il existe un véritable marché paneuropéen du gaz, lequel permettra de fléchir la possibilité de chantage monopolistique sur les prix.
Marcin Libicki (UEN). - (PL) Monsieur le Président, cette crise du gaz montre combien il importe que l’Union européenne parle d’une seule voix en matière d’approvisionnement en gaz, notamment en provenance de Russie, qui n’est pas un partenaire et un fournisseur fiable.
En juillet de l’année dernière, le Parlement européen a adopté un rapport de la commission des pétitions, dont j’ai été l’auteur et qui indiquait clairement que la fourniture d’énergie et de gaz à l’Europe n’était pas à laisser aux relations bilatérales. À l’époque, le problème concernait le gazoduc nord-européen entre la Russie et l’Allemagne. J’en appelle désormais à la Commission, ainsi qu’à la présidence, pour qu’ils garantissent que l’Union européenne parle d’une seule voix et que cette question ne soit plus laissées aux relations bilatérales, mais soit traitée entre la Russie et l’Union européenne. Je demande la mise en œuvre de toutes les mesures réclamées dans le rapport du 8 juillet dernier, dans lequel nous indiquions que l’Union européenne devait être véritablement intégrée.
Bernard Wojciechowski (IND/DEM). - (PL) Monsieur le Président, plusieurs responsables politiques se sont exprimés dans le débat sur le gaz d’un côté et de l’autre du conflit. Nous ne connaissons toutefois pas les faits réels. Les observateurs de l’UE sont impuissants. Tout ce que nous savons, c’est que nous avons affaire avec des organisations frivoles.
Cette situation atteste aussi le manque de politique énergétique de l’Union européenne. Les idées alternatives, telles que la construction de centrales nucléaires, ne reçoivent aucun soutien. L’on s’oppose à l’utilisation du charbon sous des prétextes environnementaux. Nous avons atteint une situation où la seule option est de rendre l’Europe centrale dépendante de l’Est, la situation de la pauvre Slovaquie n’en étant qu’un exemple.
Irena Belohorská (NI). – (SK) Au sujet du conflit russo-ukrainien sur la fourniture de gaz, en tant que députée européenne représentant les citoyens de la République slovaque, je voudrais attirer l’attention de l’Union européenne sur le fait que ce conflit d’intérêt n’affecte pas seulement les deux parties qui se rejettent la faute, mais aussi un pays tiers, dont les citoyens deviennent les victimes, alors qu’il n’existe toujours aucune perspective de reprise de la fourniture de gaz russe via l’Ukraine.
Cela fait huit jours que la Slovaquie est privée de gaz et, avec les restrictions d’urgence imposées aux industries et entreprises en situation de crise, nous ne pouvons assurer la fourniture que pour onze jours encore. Le gaz slovaque est une fois de plus bloqué quelque part entre les deux parties au conflit. En résumé, deux parties – deux vérités, et pas de gaz.
Permettez-moi de vous informer qu’aujourd’hui, à 11 h 45, la Première ministre ukrainienne Timoshenko a rejeté la demande slovaque visant à ce que la fourniture de gaz naturel reprenne, en indiquant que: «l’Ukraine n’a pas assez de gaz, nous n’avons pas nos propres réserves et vous n’aurez pas non plus les vôtres». Je tiens à souligner qu’en raison de notre dépendance vis-à-vis du gaz russe et de l’impossibilité de rouvrir la centrale nucléaire V1 de Jaslovské Bohunice, la sécurité énergétique de la République slovaque est de plus en plus menacée.
Monsieur le Commissaire, je vous remercie pour vos propositions et pour vos efforts afin de trouver une solution. Je connais pourtant une mesure que vous pouvez prendre - suspendre les contributions apportées à l’Ukraine pour son irresponsabilité.
Herbert Reul (PPE-DE). – (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, la situation est dramatique, comme nous le savons. L’attitude de la Russie et de l’Ukraine est irresponsable. Il faut aussi reconnaître que la Commission est à blâmer pour sa relative lenteur de réaction, même s’il est vrai aussi que le commissaire Piebalgs a traité cette question de manière remarquable ces deniers jours. L’équipe d’experts était une idée splendide et je pense que nous devons le remercier pour les évènements des jours derniers.
Néanmoins, il est temps aussi de se demander pourquoi nos réactions face à de telles situations sont toujours à ce point axées sur le court terme. Combien de fois la Russie a-t-elle attiré l’attention à cet égard? Ce n’est certainement pas la première. Depuis plusieurs années, la fourniture de gaz est régulièrement interrompue. Aussi devons-nous nous demander si nous – le Parlement européen et les institutions européennes – en avons fait assez sur la question de la sécurité de l’approvisionnement ou si nous n’avons pas accordé la priorité à d’autres questions. Je pense que c’est à raison que M. Swoboda a posé cette question.
Je pense que nous nous sommes réellement efforcés de déterminer si nous devions vendre et privatiser les réseaux et, le cas échéant, à qui et dans quelles conditions. Nous avons passé des semaines et mêmes des mois sur la question de savoir comment réagir face au problème du climat, et nous n’avons pas accordé assez de réflexion au fait qu’il existe un troisième projet politique très important aussi: celui de la sécurité de l’approvisionnement. Qu’avons-nous fait pour garantir une combinaison énergétique plus variée en Europe et pour réduire notre dépendance? Qu’avons-nous fait pour veiller à ce que les centrales à charbon fassent aussi partie de cette combinaison? Avec notre politique en matière de climat, nous avons en fait déconsidéré ces centrales à charbon et, partant, augmenté notre dépendance vis-à-vis du gaz. Qu’avons-nous fait pour soutenir davantage le nucléaire? La réponse est: bien trop peu, bien trop timidement. Qu’avons-nous fait pour trouver d’autres gazoducs acceptables? Qu’avons-nous fait dans le domaine du LNG? Qu’avons-nous fait dans le domaine de la politique énergétique extérieure? Les évènements de ces derniers jours montrent qu’il est grand temps de s’atteler à la question de la sécurité de l’approvisionnement dans le cadre de la politique énergétique. C’est vraiment un problème crucial.
Reino Paasilinna, (PSE). - (FI) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Commissaires, trois paquets sur les marchés de l’électricité et du gaz seront bientôt soumis au vote du Parlement. Nous venons d’approuver le paquet sur l’énergie et le climat, mais face à la crise actuelle, nous devrions organiser une rencontre à plus grande échelle afin d’impliquer nos partenaires. Nous en avons la capacité politique et nous avons besoin de coopération.
Je suis favorable à l’idée d’un groupe de travail en vertu de l’article 175, qui ferait rapport à ce Parlement, en mai par exemple. Les délégations russe et ukrainienne devraient aussi y participer.
Comme on l’a dit, la situation est grave. Des millions de personnes meurent de froid et des usines sont fermées. En empêchant le gaz d’arriver jusqu’à l’UE, l’Ukraine nous a impliqués dans ce problème. La Russie a fait de même lorsqu’elle a coupé la fourniture de gaz à l’UE.
Le gaz arrive toutefois via d’autres pays de transit. Grâce à la promptitude de l’Union – et c’est le commissaire qu’il faut remercier -, les compteurs sont en place. Évidemment, le gaz russe est de retour dans le réseau ukrainien, mais il n’atteint toujours pas l’Union. Une situation particulière s’est fait jour. Tant l’UE que la Russie tente de construire des pipelines dans de nouvelles régions: l’UE en dehors de la Russie et la Russie en dehors de ses anciennes républiques soviétiques. L’industrie des pipelines a du boulot.
Je ne pousserais toutefois pas à ce que des sanctions soient imposées aux parties au conflit et je ne pense pas que les sanctions soient judicieuses. Je suis sceptique quant à l’utilisation de la force, car cela pourrait nous nuire plus qu’à eux. Par ailleurs, j’estime qu’il importe de lier le traité sur la Charte de l’énergie au futur accord de partenariat et de coopération. Une possibilité serait aussi de mettre sur pied un syndicat chargé de gérer le flux de gaz via l’Ukraine: ce serait une mesure rapide et urgente. Il convient aussi d’impliquer une partie neutre.
Le Président. - Merci beaucoup pour cette précision ultime.
Henrik Lax (ALDE). - (SV) Monsieur le Président, l’UE est la plus grande puissance économique au monde. Pourtant, de nombreux Européens ont froid chez eux. Pourquoi l’UE est-elle incapable de garantir le chauffage? Maintenant plus que jamais, il est clair que l’UE doit réduire sa dépendance vis-à-vis du gaz russe. L’UE doit mettre en place un marché commun de l’électricité et du gaz afin de protéger l’accès de sa population à l’énergie. Il faut pour ce faire une certaine solidarité au sein de l’Union. La France et l’Allemagne se trouvent dans une position clé. Aucun pays, pas même l’Allemagne, ne pourra encore compter sur Gazprom pendant des années encore. Nordstream n’est pas une solution. La médiation dans la guerre du gaz entre la Russie et l’Ukraine donnera à l’UE une bonne occasion de demander à ce que les deux parties suivent des règles qui soient compatibles avec un marché commun de l’énergie au sein de l’Union. Nous devons saisir cette occasion.
Inese Vaidere (UEN). - (LV) Mesdames et Messieurs, je voudrais analyser ce problème dans un contexte politique plus large. En réalité, la «guerre russo-ukrainienne du gaz» n’est qu’une étape dans la lutte pour l’influence en Europe. L’Ukraine et la Géorgie sont deux États que nous aurions volontiers à nos côtés, mais la Russie veut les remettre sous son influence. De même que la Russie a choisi le milieu de l’été, avec le début des Jeux olympiques et en pleine période de vacances, pour envahir la Géorgie, elle a choisi le milieu de l’hiver, les vacances du Nouvel an, pour déclarer la guerre du gaz. Le chemin de l’adhésion à l’OTAN et à l’Union européenne n’a pas non plus été proposé à ces deux pays. Il était prévisible que, vu notre incapacité à riposter de manière appropriée face à l’agression de la Russie contre la Géorgie, que l’Ukraine serait la cible suivante. La technologie politique russe est l’une des plus fortes au monde et cet État a montré qu’il était disposé à sacrifier des ressources énormes sur l’autel de ses objectifs politiques, cette fois en faisant traîner la conclusion de l’accord afin de discréditer l’Ukraine. Ce type de technologie politique a aussi suffisamment de ressources pour influencer les processus dans les pays où elle a des intérêts et, contrairement à nous, elle projette et prévoit des évènements. Il faut trouver un compromis et la fourniture de gaz doit reprendre si la Russie a suffisamment de réserves pour en fournir. Je vous remercie.
Dimitar Stoyanov (NI). – (BG) Merci, Monsieur le Président. De l’avis général, la Bulgarie est le pays le plus touché par la crise du gaz. Il va sans dire que la faute revient à la fois à ceux qui ont coupé le gaz et aux responsables de l’insuffisance des ressources de la Bulgarie pour faire face à cette crise du gaz. Il faut toutefois que nous réfléchissions maintenant à ce que nous pouvons faire à l’avenir. Une des options relève purement de la politique interne et consiste à trouver une source alternative que la Bulgarie pourrait utiliser pour satisfaire ses besoins dans d’autres situations similaires. L’autre option qui s’offre actuellement à nous dépend toutefois directement de la volonté de la Commission.
Nous avons – ou plutôt la Bulgarie a – une énorme source énergétique qui a été fermée à l’époque pour des raisons politiques. Cette source est la centrale nucléaire de Kozloduy. Pour l’instant, la Bulgarie fait tourner des centrales électriques au charbon, lesquelles polluent l’environnement bien plus qu’une centrale nucléaire. Nul doute que mes collègues écologistes me rejoindront sur ce point. La fermeture du premier des quatre blocs de la centrale nucléaire de Kozloduy, qui ont subi des dizaines et des dizaines de tests prouvant qu’ils étaient absolument sûrs, était une erreur colossale. Cette fermeture a causé d’énormes préjudices au peuple bulgare et, à présent, le peuple bulgare continue de souffrir davantage encore, parce que nous n’avons nulle part où trouver de l’énergie.
Voilà pourquoi je lance l’appel suivant à la Commission: il est grand temps de permettre à la Bulgarie et à la Slovaquie d’ouvrir leurs centrales nucléaires tout-à-fait sûres, pour qu’elles puissent se prémunir contre les pénuries d’énergie.
Charles Tannock (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, encore une fois, l’utilisation par la Russie de ses exportations de gaz comme arme diplomatique montre pourquoi nous avons besoin d’une politique européenne commune en matière de sécurité énergétique, par le biais de la coopération intergouvernementale. Une telle politique nous permettra incontestablement de réduire notre exposition aux tactiques brutales de la Russie. Elle passe par la promotion de nouvelles sources d’énergie, comme le GNL, le soutien de nouveaux projets de gazoducs tels que Nabucco ou le projet transsaharien et la création d’un réseau électrique européen intégré.
Cependant, cette situation va également permettre de donner un nouvel élan aux préoccupations écologiques, encourager le recours aux sources d’énergie renouvelables et favoriser la performance énergétique ainsi que la renaissance de l’énergie nucléaire. J’appuie la demande urgente adressée par la Slovaquie à la Commission concernant la réouverture du réacteur fermé de Bohunice. Cela contribuera également à la lutte contre le changement climatique.
Il ne fait aucun doute pour moi que la Russie tente d’intimider l’Ukraine et de déstabiliser son gouvernement. Alors que des élections présidentielles se tiendront en Ukraine l’année prochaine, la Russie va à présent jusqu’à impliquer les États-Unis dans ce fiasco intégral et à mettre en péril les aspirations euro-atlantiques de l’Ukraine.
Quant à l’UE, elle est, dans cette affaire, une victime collatérale de la diplomatie gazière du Kremlin. Je ne peux m’empêcher de penser que ce n’est pas un hasard si l’action de la Russie coïncide avec le lancement de la présidence tchèque. Je souligne cependant que le premier ministre et président en exercice du Conseil, M. Topolánek, a réagi à cette crise avec beaucoup de doigté.
Il est possible que l’Ukraine se soit effectivement rendue coupable de siphonner un peu de gaz russe, mais cela peut se comprendre dans le contexte des différends bilatéraux qui demeurent irrésolus entre ces deux pays.
À l’heure actuelle, l’Ukraine est forcée de verser 500 millions de dollars par an à un intermédiaire. Or la dette de l’Ukraine envers la Russie s’élève à 2,4 milliards de dollars et aurait donc pu être épongée en cinq ans en supprimant le paiement de ce montant annuel qui, selon le vice-premier ministre ukrainien, atterri dans la poche de politiciens corrompus.
Nous devons résister à toutes les tentatives de ceux qui désirent hypothéquer les relations futures entre l’Ukraine et l’Occident, et en particulier l’avenir du pays en tant que membre à part entière de l’Union européenne. La meilleure manière de s’assurer que la Russie ne puisse plus intimider ou faire pression sur l’Ukraine, ou même pousser l’UE à forcer l’Ukraine à plier, est de défendre une politique étrangère européenne commune en matière de sécurité énergétique se traduisant par une solidarité entre les États membres en période de crise et de pénurie d’énergie.
Adrian Severin (PSE). - (EN) Monsieur le Président, le problème auquel nous faisons face ne peut pas être résumée à un simple différend opposant la Russie à l’Ukraine. Il existe également un différend opposant l’Europe à la Russie concernant le statut géopolitique de l’Ukraine, un différend opposant l’UE à l’Ukraine concernant l’avenir européen du pays, un différend opposant l’Union européenne à la Russie concernant le monopole russe sur la fourniture de gaz et un différend opposant l’Union européenne à l’Ukraine concernant le monopole du pays sur le transit de gaz.
Tous ces différends additionnés nous placent au milieu d’une guerre de l’énergie, dont l’enjeu n’est autre que le partage du pouvoir. Dans cette guerre, nous ne sommes pas des otages, mais des belligérants. Nous ne sommes pas des médiateurs, mais bien l’une des parties détentrices d’un intérêt légitime. D’une crise à l’autre, les conséquences de cette guerre se multiplient. Ne pourrions-nous pas cesser les hostilités et organiser des pourparlers de paix?
Nous avons besoin d’un marché de l’énergie libre et réglementé, que nous pouvons partager avec nos partenaires russes et ukrainiens. Nous avons besoin de garanties et de mécanismes pour faire valoir ces règles, un système d’arbitrage pour le règlement des litiges ainsi qu’une institution chargée de la mise en œuvre des mécanismes. L’Europe doit se doter d’une politique énergétique commune servie par des instruments juridiques et politiques appropriés et consolidée par un accord unique avec les pays producteurs et de transit, à savoir la Russie et l’Ukraine respectivement. Les sanctions sont vouées à l’échec, tout comme l’est la confrontation. Nous devons joindre nos forces et négocier un accord stratégique et exhaustif. À cette fin, nous devons créer un groupe de travail interparlementaire ad hoc composé de députés du Parlement européen, de la Douma russe et de la Rada ukrainienne, dans le but d’assurer, tant que cela sera nécessaire, un suivi permanent des progrès du consensus et de la construction d’une stratégie.
Toine Manders (ALDE). - (NL) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, notre société ne peut fonctionner sans énergie, comme la situation présente le montre de façon criante. Le gaz doit continuer à arriver et j’estime qu’à court terme, il importe tout particulièrement que toutes les voies diplomatiques soient exploitées. C’est ce que la Commission et le Conseil sont en train de faire de manière très louable, de sorte à garantir que la fourniture de gaz reprenne sans délai; bien entendu, menacer de sanctions juridiques n’est guère efficace.
À moyen terme, il me semble qu’il importe au plus haut point de créer un marché européen de l’énergie, et de prendre des mesures que nous n’avons pas encore prises. Il est temps d’agir. Les États membres ont pour moi un rôle majeur à jouer à cet égard, comme dans l’installation accélérée des gazoducs de Nabucco et Nordstream, par exemple. Avant tout, nous devons veiller à ce qu’un réseau européen soit créé à la fois pour le gaz et pour l’électricité, ce qui réduira notre dépendance et nous permettra d’établir un marché qui fonctionne correctement, de faire preuve de solidarité et de mieux anticiper les pénuries. Nous devrons toutefois retrousser nos manches et je me demande pourquoi les États membres n’ont encore pris aucune mesure.
Dariusz Maciej Grabowski (UEN). - (PL) Monsieur le Président, l’Union européenne est parvenue à enrayer le réchauffement planétaire: l’adoption d’une proposition a suffi à garantir un succès immédiat. Nous sommes parvenus à réduire les températures en Europe et à amener un hiver qui a affecté tout le continent. Telle est la preuve de la puissance et de la capacité de l’Union européenne, conformément au principe «vouloir, c’est pouvoir». Mais notre victoire s’est muée en défaite, parce que maintenant, il nous faut chauffer davantage nos maisons et nos lieux de travail, ce que les responsables n’avaient pas prévu.
En matière de politique énergétique, l’Union européenne commence à ressembler au docteur dans le roman d’Hasek, «Les aventures du brave soldat Chvéïk», qui prescrivait un seul traitement pour toutes les maladies – un lavement. L’Union européenne s’est contentée de déclarations verbales, de conférences et, en particulier, de flirter avec la Russie, en lui donnant le courage d’utiliser ses ressources énergétiques en tant qu’instrument de pression politique. Pour empirer les choses, elle a trouvé en l’Allemagne un allié, avec laquelle elle est en train de construire un gazoduc sous la mer Baltique.
La conclusion est limpide: nous devons d’urgence prendre des mesures en vue de notre indépendance vis-à-vis du gaz russe, en gardant à l’esprit la maxime «c’est toujours le plus faible qui coule en premier». Cela veut dire que nous devons d’abord sauver les pays qui bordent la Russie ou qui sont totalement dépendants des fournitures de gaz en provenance de l’Est, comme la Pologne et les États baltes, sauf si l’Union européenne considère que les intérêts privés et les intérêts de ceux qui représentent la Russie sont plus importants.
Nickolay Mladenov (PPE-DE). – (BG) Merci, Monsieur le Président. Pour l’heure, les citoyens de 18 États membres sont les otages du litige politique opposant l’Ukraine et la Russie. J’emploie l’expression «litige politique», car nous avons tous vu comment Gazprom et la fourniture de gaz en provenance de Russie étaient utilisées comme une arme politique afin de faire pression sur un État souverain. Le gaz provient de Russie. La vanne a été fermée en Russie. Oui, l’Ukraine a une part de responsabilité et j’en appelle dès lors au Conseil et à la Commission européenne pour qu’ils disent clairement à nos amis ukrainiens qu’à moins que l’opposition et le gouvernement adoptent une position unie sur les questions essentielles qui affectent leur développement, ils ne seront pas en mesure de faire face à cette pression qui est exercée sur eux et sur nous respectivement. Tout comme nous avons dans nos pays un consensus sur les questions clé, ils doivent aussi dégager des consensus sur les questions fondamentales.
Deuxièmement, Gazprom doit verser des amendes à nos pays, parce que pour l’instant, la Bulgarie, qui est le pays le plus touché en Europe et qui dépend totalement de la fourniture de gaz russe, doit faire valoir ses droits, et ce contre le fournisseur, qui est la Russie dans le cas présent.
Troisièmement, pour ce qui est de l’énergie en Europe, un seul et même message doit être donné. Nous devons clairement dire «oui» au nucléaire en Europe, «oui» aux sources d’énergie alternatives, «oui» aux différents pipelines qui réduisent notre dépendance vis-à-vis d’un seul fournisseur, «oui» à des installations de stockage plus grandes et «oui» à des liens plus nombreux entre les États membres afin d’éviter des crises similaires.
Enfin, je tiens également à dire que, dans notre cas, le gouvernement bulgare mérite aussi d’être sévèrement critiqué. Durant toutes ces années où il a été au pouvoir, le gouvernement a caché les accords de fourniture passés avec la Russie et n’a rien fait pour diversifier les sources d’approvisionnement de notre pays.
Atanas Paparizov (PSE). – (BG) Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Monsieur le Commissaire, en tant que représentant du pays le plus touché, je vous demande, ainsi qu’aux institutions que vous représentez, de prendre des mesures immédiates pour que la fourniture reprenne, en utilisant tous les moyens politiques et tous les moyens de droit international. J’espère que, au nom du principe de solidarité, le Conseil et la Commission accepteront les propositions bulgares d’inclure dans les 5 milliards d’euros non utilisés les projets visant à établir des liens transfrontaliers entre la Bulgarie et la Roumanie et entre la Bulgarie et la Grèce, et à agrandir les installations de stockage de Chiren, afin que les besoins les plus urgents soient couverts et que soient développées les possibilités d’utiliser conjointement les terminaux de gaz liquéfié.
En tant que rapporteur pour un des documents compris dans le troisième paquet «énergie», j’estime que la nécessité de garantir la transparence avant tout et de respecter les règles est plus importante que toutes les autres questions relatives à la clause du pays tiers. J’espère aussi que la Commission répondra le plus vite possible aux demandes que nous avons adressées avec Mme Podimata concernant les mesures à long terme qui seront adoptées. Ainsi, nous pourrons réellement nous doter, avant le Conseil européen de printemps, d’une politique commune et de mesures efficaces qui résoudront les problèmes tels que ceux qui viennent de se produire et que M. Barroso a décrits aujourd’hui comme sans précédent, injustifiés et incompréhensibles.
Metin Kazak (ALDE). – (BG) Malgré l’accord passé entre la Russie et l’Ukraine et consistant à reprendre la fourniture de gaz russe en Europe, nos espoirs de recevoir du gaz ont à nouveau été anéantis. Que les raisons soient d’ordre technique, financier ou politique, cet embargo sans précédent sur le gaz ne peut être justifié. Alors que des températures négatives record ont été enregistrées cet hiver, il est irresponsable et inhumain de condamner au froid des millions de citoyens européens. Pour la Bulgarie, le pays de l’UE le plus touché par cet embargo, il est de la plus haute importance que le principe Pacta sunt servanda soit observé et que la fourniture de gaz reprenne immédiatement. Il convient de réclamer une compensation équitable pour le préjudice et la souffrance infligés à la population, ainsi que pour le non-respect des accords.
Je tiens à féliciter la présidence tchèque pour le rôle actif qu’elle a joué en tant que médiateur afin de résoudre cette crise. Plus que jamais, l’Union européenne doit mettre en pratique la traditionnelle devise de solidarité des Mousquetaires, «un pour tous et tous pour un», et apporter une aide financière aux pays qui en ont pâti, comme la Bulgarie, pour des projets cruciaux qui assureront leur sécurité énergétique. Il est grand temps de montrer la force et l’unité de notre union en adoptant une stratégie énergétique à long terme.
Eugenijus Maldeikis (UEN). - (LT) Cette crise de la fourniture de gaz est à l’évidence un problème d’ordre politique, et non commercial. Gazprom et Naftogaz ont toutes le rôle principal dans ce conflit – en tentant de prouver à tous, et à la société, combien le transit est impossible sur les plans technique, technologique et économique. Elles ne cessent de le répéter. D’autant plus que ces partenaires que nous avons, ces partenaires de l’Union européenne, ne respectent ni la pratique commerciale élémentaire, ni la Charte de l’énergie. Cela ne semble pas exister pour nos partenaires. Malheureusement, je ne vois ni dans le chef de Kiev ni dans celui de Moscou la volonté de parvenir à un accord. Ils semblent selon moi vouloir gagner du temps dans ces négociations et je pense que seules des mesures politiques permettront de résoudre le problème politique jusqu’à ce que les questions techniques relatives au transit soient résolues. Je pense que nous devons nous efforcer d’obtenir des accords politiques et des garanties politiques entre l’Union européenne, la Russie et l’Ukraine, jusqu’à ce que nos objectifs soient atteints à moyen ou long terme. Une autre remarque sur la solidarité énergétique: le Premier ministre bulgare et le Premier ministre slovaque se rendent à Moscou et à Kiev pour négocier. Cette semaine de la solidarité énergétique ne devrait pas se terminer par des négociations à nouveau sur le plan bilatéral; je pense que la solidarité énergétique voudrait que la Bulgarie et la Slovaquie reprennent leurs activités nucléaires dans pareille situation. Ce serait là de la véritable solidarité énergétique.
John Purvis (PPE-DE). - (EN) Monsieur le Président, je tire trois conclusions assez évidentes de l’impasse dans laquelle nous ont placés la Russie et l’Ukraine.
Premièrement, nous devons réduire notre dépendance envers le gaz qui, de plus en plus, va devoir être importé. Cela signifie que nous devons nous engager davantage en faveur de sources d’énergie indigènes comme les renouvelables et le nucléaire.
Deuxièmement, nous devons améliorer la solidarité au sein de l’UE. Les États membres doivent se venir en aide mutuellement s’agissant de l’approvisionnement en électricité et en hydrocarbures. Pour cela, nous devons améliorer et étendre considérablement notre réseau électrique, nos gazoducs et nos oléoducs. Pourquoi la Bulgarie devrait-elle être privée de gaz alors que, de l’autre côté du Danube, la Roumanie en dispose? Pourquoi la Slovaquie devrait-elle en être privée également, alors que ses voisins, qu’il s’agisse de l’Autriche, de la Pologne ou de la République tchèque, eux, en ont? Il faut de toute urgence compléter le réseau gazier. À quelle échéance, Commissaire Piebalgs?
Troisièmement, nous devons diversifier nos sources d’approvisionnement et renforcer nos capacités de stockage d’hydrocarbures. Pourquoi ne tirons-nous pas davantage parti des gisements de gaz épuisés du sud de la mer du Nord à cette fin?
Notre infrastructure pour le gaz naturel liquéfié doit être considérablement étoffée et nous devons développer de nouveaux réseaux de gazoducs en diversifiant nos sources et nos voies d’approvisionnement. Nous devons étendre et améliorer notre interconnexion avec la Norvège, l’Afrique du Nord et l’Afrique de l’Ouest, avec la région de la mer Caspienne et le Caucase, avec l’Orient et les États du Golfe au Moyen-Orient.
En conclusion, je demande donc à la Commission et au Conseil s’ils pensent, dans l’état actuel des choses, qu’ils encouragent les sources d’énergie renouvelables et le nucléaire avec toute l’urgence nécessaire et qu’ils investissent suffisamment dans la construction de gazoducs et de terminaux GNL et dans le développement de relations politiques qui permettront de garantir la continuité et la diversité de notre approvisionnement?
Il est évident que nous ne pouvons plus du tout nous permettre un tel degré de dépendance envers la Russie et l’Ukraine. Les Européens doivent placer leurs propres intérêts au premier rang, et ceci sans attendre.
Dariusz Rosati (PSE). - (PL) Monsieur le Président, Monsieur le Président en exercice, Monsieur le Commissaire, le comportement de la Russie consistant à fermer le gaz à ses clients au sein de l’Union européenne est intolérable eu égard aux engagements contractuels pris par ce pays. Les clients européens paient leur approvisionnement en gaz russe dans les délais et ont le droit d’être livrés à temps, qu’importent les litiges entre la Russie et l’Ukraine. La décision du Premier ministre Poutine de cesser la fourniture devant les caméras de télévision non seulement constitue une violation des contrats signés, mais montre en outre que Gazprom n’est pas une entreprise qui fonctionne selon les principes du marché, mais qu’elle agit sous les ordres politiques du Kremlin. Ce débat devrait envoyer un message clair à la Russie et à l’Ukraine pour qu’elles reprennent immédiatement la fourniture de gaz.
Je tiens également à dire que le comportement des Ukrainiens est décevant. Le manque d’entente avec la Russie, des règles vagues quant au paiement des intermédiaires pour le gaz et les querelles politiques intestines aux plus hauts rangs du gouvernement compromettent l’Ukraine aux yeux de l’opinion publique et empêchent le pays de réaliser ses aspirations européennes. J’en suis peiné, dès lors que l’Ukraine est pour nous un important voisin et un partenaire stratégique.
L’actuelle crise du gaz confirme enfin que l’Europe doit veiller à sa propre sécurité énergétique. Nous ne pouvons plus tolérer l’inaction. Monsieur le Commissaire, j’invite la Commission européenne à présenter sans délai des initiatives législatives qui permettront de diversifier l’approvisionnement en énergie, qui garantiront une solidarité véritable, et non feinte, et qui résulteront en l’interconnexion des systèmes nationaux de fourniture de gaz des différents États membres.
Bilyana Ilieva Raeva (ALDE). – (BG) Mesdames et Messieurs, à lumière de l’intense crise économique et des graves conséquences du conflit du gaz, une synergie est de mise entre toutes les institutions nationales et européennes. L’étendue du problème exige que nous concentrions nos efforts et nos alliances à l’échelon de l’UE et au-delà des dissensions entre partis au nom des citoyens européens et de leurs droits et intérêts.
Les sources d’énergie alternatives et les nouvelles technologies réduiront notre dépendance vis-à-vis de l’importation de matières premières et d’énergie. Les problèmes économiques et sociaux découlant de la crise du gaz s’assortissent à présent de problèmes écologiques. Le passage du gaz au mazout pour des industries entières, comme en Bulgarie, sape les projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne. Nous apprécions l’intervention prompte des institutions européennes, mais nous avons besoin d’un partenariat privilégié afin d’améliorer notre indépendance énergétique. C’est pourquoi le plan de relance économique européen doit tenir compte, grâce à un soutien financier, de la nécessité actuelle de construire des infrastructures énergétiques alternatives, notamment pour les pays les plus dépendants, comme la Bulgarie.
Nous invitons le Parlement européen à adopter une position claire soutenant les actions coordonnées prises par toutes les institutions en vue de résoudre cette crise du gaz et d’empêcher que de nouvelles crises surviennent à l’avenir.
PRÉSIDENCE DE Mme Diana WALLIS Vice-présidente
Romana Jordan Cizelj (PPE-DE). - (SL) Le transport de gaz russe via l’Ukraine n’est pas qu’une question bilatérale ou qu’un litige commercial. C’est un problème avec une forte composante multilatérale, car la vente et le transit de gaz ne peut constituer une activité commerciale que si les conditions nécessaires sont réunies. À cet égard, les conditions minimales sont, à mon avis, la transparence, des règles claires, la compétitivité, la crédibilité et le contrôle.
Ma question et préoccupation est la suivante: qui va indemniser les entreprises qui ont déjà dû suspendre leurs activités? Qui va indemniser les citoyens qui ont été touchés? J’insinue par là que l’Europe doit réclamer des comptes.
Que pouvons-nous faire maintenant? Intensifions nos efforts diplomatiques. Nous devons définir une politique énergétique commune plus rapidement et de façon plus efficace. Le troisième domaine sur lequel je voudrais attirer votre attention est la diversification: la diversification des sources, des voies d’approvisionnement et des pays desquels nous importons des produits énergétiques.
Concernant le gaz, je tiens à mentionner deux domaines prioritaires, notamment: l’utilisation du gaz liquéfié et le projet de gazoduc de Nabucco. Ces deux points nous aideront à diversifier les voies d’approvisionnement et les pays exportateurs. Le projet Nabucco doit prévaloir sur les projets Nordstream et South, non seulement au niveau européen, mais aussi au niveau de chaque État membre.
C’est pourquoi je voudrais demander à la Commission de nous fournir au moins des informations de base sur l’avancement du projet Nabucco. Je voudrais également demander quelles mesures supplémentaires la Commission a prises afin d’empêcher que de telles difficultés se représentent en 2010, et qu’elle nous donne une indication du moment où la fourniture de gaz est susceptible de reprendre au sein de l’Union.
Szabolcs Fazakas (PSE). – (HU) Madame la Présidente, à présent que la fourniture de gaz est censée reprendre grâce à l’intervention décisive, d’abord hésitante, mais finalement coordonnée, de l’Union européenne et malgré les prétendus problèmes techniques et autres, nous pouvons pousser un soupir de soulagement, mais pas nous reposer sur nos lauriers.
D’une part, la cause du litige entre la Russie et l’Ukraine n’a pas été révélée et résolue. Elle pourrait par conséquent resurgir à tout moment. En outre, la crise du gaz a une fois de plus démontré notre dépendance et notre vulnérabilité. La reconnaissance de ce fait peut débloquer le retard accusé dans l’élaboration d’une politique énergétique européenne commune, dont la première étape consiste à ce que l’Europe assume une responsabilité conjointe afin de garantir l’approvisionnement.
Pour ce faire, nous devons trouver de nouvelles sources et de nouvelles voies d’approvisionnement, ainsi que prévoir des interconnexions entre les réseaux des États membres. Nous ne pouvons toutefois pas attendre du marché qu’il s’en charge. En lieu et place, des sources européennes doivent être mises à disposition sur la base des intérêts européens communs.
Le gazoduc de Nabucco représente une solution à long terme et la mise en place de réseaux reliant les nouveaux États membres pourrait commencer dès maintenant, en utilisant les 5 milliards d’euros réservés à cette fin dans le programme de relance de l’économie. Ce serait faire d’une pierre deux coups, puisque cette infrastructure pourrait stimuler l’économie européenne et créer de nouveaux emplois, tout en atténuant les effets de crises similaires.
Ivo Belet (PPE-DE). - (NL) Madame la Président, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs, ce problème n’est pas nouveau: cela fait des années qu’il fait l’objet de débats ici en plénière et au sein de la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie. Moscou n’a jamais montré avec une telle évidence à quel point nous sommes devenus vulnérables et à quel point il est facile de nous corrompre. Il est temps d’agir.
Monsieur le Commissaire, votre diagnostic d’un manque d’interconnexion ne pourrait être plus proche de la vérité. Nous devons y travailler, car, en effet, c’est un des éléments sur lesquels nous pouvons agir. Nous devons relier les réseaux de gaz au sein de l’UE. Une des raisons pour lesquelles ce n’est pas encore chose faite est que les licences étaient nationales. Nous devrions les harmoniser de façon plus effective, puisqu’elles sont différentes dans chaque État membre. Nous devons trouver des solutions afin de rationaliser davantage les procédures nationales. J’ai bien conscience du peu d’autorité de la commission en la matière, mais nous devrions tenter de progresser. Ce qui pourrait fonctionner – et la proposition de la Commission le mentionne -, c’est qu’un coordinateur soit désigné pour chaque projet transfrontalier, lequel ferait office de médiateur dans le domaine des interconnexions et pourrait faire avancer les choses. Cette coordination peut s’avérer fondamentale et concerne en effet l’énergie éolienne. J’ai été ravi de constater que, dans votre deuxième examen, vous avez clairement indiqué que la coordination serait un élément du projet de réseau offshore pour les turbines éoliennes, notamment en ce qui concerne la connexion avec les réseaux sur terre.
Nous devons ensuite accorder bien davantage d’attention au gaz liquéfié (LNG), puisqu’il est nettement plus flexible et diminue notre vulnérabilité. Troisièmement, les réseaux devraient s’aligner sur l’énergie durable qui, comme nous le savons, sera produite localement, et nous devons veiller à ce qu’elle ait un accès prioritaire au réseau.
Mesdames et Messieurs, Mesdames et Messieurs les Commissaires, ce qui nous reste à faire est clair. Je suppose que la volonté politique est là pour que nous réagissions et que les décisions fondamentales et spécifiques soient prises au prochain sommet de printemps.
Zbigniew Zaleski (PPE-DE). - (PL) Madame la Présidente, le client qui paie un prix convenu a rempli une obligation. La Russie est responsable de cette crise et devrait dès lors être sanctionnée, Monsieur le Commissaire. L’Ukraine est clairement entre les deux. Si la Russie ne peut pas accepter la direction politique de l’Ukraine, elle devra s’y faire, tout comme elle s’est remise de la perte d’influence politique sur les pays du bloc soviétique. Le monde change et il lui faut tout simplement accepter ce fait.
La représentation théâtrale de la Russie lorsqu’elle a coupé le gaz semblait indiquer que peu lui importait de nous vendre son produit. Du moins, c’était l’impression donnée. Je pense que pour le bien de son économie et de son peuple, la Russie devrait faire attention au marché et à son image en tant que partenaire fiable. L’interdépendance entre les parties – je le souligne – est probablement l’aspect le plus important de ce contrat et de la coopération.
Je crois que les Russes finiront par découvrir la vérité, que l’Europe finira par avoir de la considération pour la Russie et par devenir un bon médiateur.
Zita Pleštinská (PPE-DE). – (SK) Gazprom et Naftagas jouent avec la confiance des consommateurs européens. Des centaines d’entreprises slovaques sont contraintes de suspendre leur production et des citoyens meurent de froid dans leurs maisons en Bulgarie. Les citoyens européens ne devraient pas avoir à payer le prix de ces jeux commerciaux et politiques.
Il est difficile de juger quelle partie est la plus à blâmer, mais une chose est sûre: la Slovaquie et la Bulgarie ont d’urgence besoin d’aide. Elles ont besoin d’une solution immédiate, elles ont besoin que la fourniture de gaz reprenne sans délai et elles ont besoin de savoir ce qui va se passer avec leurs centrales nucléaires.
Je pense que malgré tous ces évènements, nous ne tournerons pas le dos aux pays de l’ancien bloc soviétique, en ce compris l’Ukraine, qui souhaitent se libérer de l’influence russe. Les citoyens ukrainiens ne devraient pas avoir à subir l’échec de leurs responsables politiques.
Evgeni Kirilov (PSE). - (EN) Madame la Présidente, d’un point de vue général, je pourrais me rallier aux collègues qui ont fait l’éloge du rôle actif joué par la présidence tchèque.
Cependant, je ne peux pas me rallier au ton politique adopté par le vice-premier ministre Vondra dans ses propos liminaires. Je pense que ce ton est trop calme. Oui, nous avons parlé, et nous parlons toujours, d’une seule voix, mais cette voix n’est pas assez forte. Comment rester calmes lorsque l’on voit ce que doivent endurer des millions de citoyens européens qui souffrent de cet hiver rigoureux? Je me demande comment cela est possible. Nous allons devoir agir. Je me rallie à la plupart des collègues qui ont demandé une enquête. Nous devons définir lequel des deux camps détient la plus grande part de responsabilité, même si tous les deux sont responsables. Peut-être l’adoption d’un discours politique aussi modéré s’explique-t-il par l’implication, aux côtés de la Russie, de l’Ukraine? Si c’est le cas, c’est une erreur.
Je pense sincèrement que non seulement ce Parlement, mais également la présidence devraient hausser le ton au nom des citoyens qui souffrent.
Fiona Hall (ALDE). - (EN) Madame la Présidente, cette crise souligne combien il est important de renforcer l’indépendance énergétique de l’UE. Cependant, le débat sur notre approvisionnement énergétique ne doit pas nous faire oublier qu’il est tout aussi fondamental de contrôler la demande.
Avec le triple 20, l’UE s’est fixé un objectif d’amélioration de sa performance énergétique et nous disposons de plusieurs textes législatifs axés sur les économies d’énergie. Ces actions en faveur de la performance énergétique ne vont pas seulement contribuer à la lutte contre le changement climatique et la précarité énergétique, mais également améliorer considérablement la sécurité énergétique de l’Europe.
Ce n’est bien sûr pas pour rien que le plan d’action de la Commission pour l’efficacité énergétique inclus une dimension internationale et reconnaît qu’il est important d’encourager l’amélioration de la performance énergétique dans les pays tiers, en particulier dans les pays qui produisent et acheminent notre énergie. En effet, si ces pays utilisent moins d’énergie, il est probable que nous en aurons plus. Voilà ce qui importe, au delà de l’aspect politique immédiat de cette crise.
András Gyürk (PPE-DE). – (HU) Madame la Présidente, je propose que nous parlions clairement. L’Union européenne n’a pas appris de son expérience lors de la crise du gaz qui a opposé la Russie et l’Ukraine en 2006, et elle a essuyé un échec cuisant dans la crise actuelle. Les décideurs ont réagi à la fermeture du gaz comme s’ils ne s’y attendaient absolument pas. Cette crise de l’approvisionnement en énergie, la plus grave à ce jour, est peut-être le dernier avertissement pour les États membres, et nous devons prendre des mesures afin de réduire notre dépendance énergétique.
J’imagine que tout le monde sait maintenant que le conflit qui est apparu entre la Russie et l’Ukraine n’est pas qu’un litige juridique bilatéral privé, ne serait-ce que parce qu’il touche des centaines de millions de citoyens de l’Union européenne. La crise actuelle n’est pas seulement un test pour notre politique énergétique commune; c’est aussi un test pour la solidarité de l’UE.
La question maintenant est de savoir si les États membres peuvent dépasser leurs politiques jusqu’ici basées sur des accords séparés et si l’Union européenne est capable de s’exprimer et d’agir avec unité dans un domaine aussi crucial.
Eluned Morgan (PSE). - (EN) Madame la Présidente, je suis heureuse de revoir M. Vondra parmi nous. Je le remercie de nous avoir expliqué la gravité de la situation. Cependant, quand le Conseil comprendra-t-il que tant que l’UE ne parlera pas d’une seule voix en matière d’énergie, en particulier face à la Russie et à l’Ukraine, nous resterons dans une position de faiblesse?
Le Conseil ne semble pas encore l’avoir compris et je vais vous donner un exemple. Bientôt, nous allons commencer à négocier sur la deuxième lecture du paquet de libéralisation de l’énergie. La Commission a mis sur la table une position rédigée avec beaucoup de soin concernant les investissements de pays tiers dans l’UE, dans laquelle elle proposait de s’exprimer au nom de l’UE sur ces questions. Qu’a fait le Conseil? Il s’est replié sur les positions nationales. Il a dit: «Non, nous, les États membres, voulons avoir le dernier mot. Nous ne voulons pas laisser la Commission décider.»
Monsieur le Ministre, vous et vos homologues êtes tombés dans le plus vieux piège du monde: vous vous êtes laissés avoir par la tactique du «diviser pour régner». Tant que vous ne comprendrez pas qu’il n’y a pas d’autre choix que de joindre vos forces pour avoir plus d’influence sur la scène internationale, nous serons toujours en position de vulnérabilité. Vous allez devoir expliquer aux citoyens européens pourquoi ils ont froid cet hiver. Vous devez changer de position dans ce dossier. Le ferez-vous?
Alexandr Vondra, président en exercice du Conseil. − (EN) Madame la Présidente, je souhaiterais tout d’abord m’excuser. C’est la première fois que je m’exprime devant cette Assemblée et j’ai peut-être été trop long dans mes remarques liminaires, ce qui a contribué à ce retard. Cependant, je pense qu’il était utile de résumer notre action depuis le petit matin du premier janvier.
Parler d’une seule voix, c’est précisément ce que nous essayons de faire dans ce dossier. Je pense que, pour l’instant, nous y arrivons plutôt bien.
Vous avez mentionné le paquet sur le marché intérieur de l’énergie. Ce n’est pas l’objet du présent débat. Nous discutons de la situation d’urgence. Toutefois, je peux vous assurer que, pour ce que je sais des discussions au Conseil, les différentes craintes au sujet d’une libéralisation complète étaient simplement motivées par les préoccupations stratégiques de certains pays. Je parle ici du débat sur une clause relative aux pays tiers, entre autres. Cependant, j’ai mentionné plus tôt que ce dossier était une priorité pour la présidence tchèque. Nous ferons tout ce que nous pouvons pour trouver une solution et un compromis entre le Conseil et le Parlement.
Toutefois, il ne faut pas s’attendre à ce que cela apporte une solution miracle pour ce qui est de ces petits jeux gaziers en Europe centrale et orientale. Si vous vivez sur une île, vous êtes libres d’importer de l’énergie dans n’importe quel port, mais la situation est différente en Slovaquie et en Bulgarie, par exemple. Vous avez raison: certains pays sont mieux équipés que d’autres pour faire face à ce genre de situations d’urgence, même dans la région en question. Cependant, je pense qu’il faut avoir conscience, par exemple, que l’on ne peut pas construire des installations de stockage de gaz n’importe où. L’environnement géologique doit s’y prêter.
Ainsi, mon pays a la chance de disposer d’installations de stockage dans l’est de son territoire. Nous pouvons puiser dans ces réserves et distribuer du gaz, même en cas de coupure presque complète de l’approvisionnement extérieur. Nous avons une capacité de survie de quelques semaines, voire quelques mois, mais pas plus. La Slovaquie, elle, a moins de chance, car les sols qui se prêtent aux installations gazières sont situées dans l’ouest du pays. Or il est difficile d’inverser le flux. Vous avez pour cela besoin d’équiper vos conduites de compresseurs. Dans le cas contraire, c’est problématique.
Certains ont dit qu’il s’agissait d’un problème politique. Pour ce qui est de parler d’une seule voix, je peux vous assurer que, d’après mon expérience, il s’agit effectivement d’un problème politique. En outre, la situation est délicate d’un point de vue politique parce que les gens ont froid. Bien sûr, je suis d’accord avec ceux qui, comme Jacek Saryusz-Wolski ou István Szent-Iványi, parlent d’un jeu cynique et disent que tout ceci cache une lutte pour le contrôle des infrastructures dans le pays concerné. Je suis également d’accord avec ceux qui, comme Hannes Swoboda et Jan Marinus Wiersma, soulignent que nous devrions éviter d’adopter une approche manichéiste et que l’Ukraine a sa part de responsabilité. Il est vrai que l’Ukraine ne nous facilite pas la tâche. C’est en tous cas ma propre opinion sur le sujet. Mais n’oublions pas que la Bulgarie et la Slovaquie vivent des moments terribles, car, soudainement, un pays a décidé d’exploiter leur situation difficile pour générer un différent entre ces pays et l’Ukraine. C’est ce qui ressort, par exemple, de l’évolution de la situation aujourd’hui. La situation est donc délicate. Que pouvons nous faire?
Ensuite, il y a ceux qui refusent purement et simplement d’entrer dans ce jeu, car ils le voient comme une partie de valet noir. Ils craignent que celui qui terminera avec la mauvaise carte ait à payer la facture. Je ne pense pas que ce soit là faire preuve de courage. Je pense que faire preuve de courage, c’est être prêt à prendre des risques.
Pourquoi ne pas acheter notre gaz directement à la frontière russo-ukrainienne? Excellente question! Nous en avons débattu; mais à qui l’UE achète-t-elle son gaz? À des entreprises privées qui ne sont pas prêtes à prendre le risque, car elle n’ont aucun contrôle sur le flux de gaz entrant. Bien sûr, il devrait être possible de trouver une solution, mais cela présupposerait que l’Ukraine cède une participation dans son gazoduc. Or, comme vous le savez, le parlement ukrainien l’interdit et n’est pas prêt à revoir sa position. Il y a un rôle à jouer pour les entreprises européennes, mais il ne suffira pas pour cela de quelques semaines, ni même de quelques mois. Nous devons donc continuer d’accentuer la pression, tout en envisageant, comme nous le faisons par exemple aujourd’hui, une solution juridique à plus long terme. Je pense que c’est important pour les deux parties.
Je ne veux pas me répéter et dépasser à nouveau mon temps de parole, mais je souhaite avant tout vous remercier pour votre intérêt et votre attitude active. J’adresse ces remerciements à Jacek Saryusz-Wolski, du groupe PPE-DE, ainsi qu’à l’ensemble d’entre vous. Nous avons besoin de votre aide et de votre attention. Nous avons besoin de votre aide pour attirer l’attention des pays européens dans lesquels ce problème ne fait pas la une des journaux, principalement dans cette partie de l’Europe où il n’y a pas de situation d’urgence. Cela devrait nous aider à développer une univocité plus active.
Enfin et surtout, je suis d’accord avec la plupart de ceux d’entre vous qui ont souligné la nécessité d’adopter une approche plus stratégique avec des solutions à moyen et long termes. C’est exactement ce que la présidence tchèque a l’intention de faire pendant les six mois dont elle dispose, même si nous ne pourrons sans doute travailler ensemble que pendant quatre mois. Quoi qu’il en soit, nous sommes, avec la Commission et les États membres, tout à fait d’accord pour presser le pas et faire de ce dossier l’un des principaux points à l’ordre du jour du Conseil européen de Mars et, bien sûr, en vue de l’organisation, en mai, du sommet sur le corridor méridional, dont le but est de promouvoir la diversification de nos sources d’approvisionnement, par le biais de projets comme Nabucco, entre autres.
Benita Ferrero-Waldner, membre de la Commission. − (EN) Madame la Présidente, je tenterai d’être aussi brève que possible. Sur le plan de la politique étrangère, il y a de nombreuses conclusions à tirer, et nous avons déjà commencé à le faire lors du premier signal d’alarme, en 2006. La question la plus importante est de savoir ce que nous pouvons faire ensemble à l’avenir. Nous avons cependant un problème: le Traité, évidemment. Celui-ci ne prévoit pas de politique étrangère commune en matière de sécurité énergétique. Par contre, le traité de Lisbonne, lui, comprendra une clause de solidarité, grâce à laquelle nous pourrions organiser la meilleure coopération que tout le monde appelle de ses vœux. Par ailleurs, nous nous sommes lancés, il y a deux ans, dans une diplomatie énergétique. Nous avons signé un nombre non négligeable de protocoles d’accord. Cependant, malgré le travail accompli, une grande partie de ces efforts en sont toujours au stade de la théorie ou de la préparation. Dans l’état actuel des choses, il est très difficile de réunir tous les acteurs. Souvent, nous devons nous contenter de créer les conditions, comme dans le cas de Nabucco, où nous avons ensuite tenté d’obtenir le volume de gaz nécessaire pour permettre l’approvisionnement et la construction du gazoduc. À ce stade, selon moi, il est nécessaire d’avoir recours à des partenariats public-privé. C’était là le deuxième point que je voulais souligner. Le troisième est que, bien sûr, nous le savons tous et cela a été répété à de nombreuses reprises: ce différend gazier est certes de nature commerciale, mais il a également une forte connotation politique.
Nous constatons également le très mauvais état des relations russo-ukrainiennes, mais notre premier objectif doit être de stabiliser autant que possible la situation. Une des possibilités en ce sens est notre nouvelle idée de «partenariat oriental», dans le cadre duquel nous voulons encourager nos partenaires orientaux à collaborer entre eux. Pour ce qui est de l’Ukraine, nous allons organiser, à la fin du mois de mars, une conférence internationale sur l’investissement conjoint en faveur de la remise en état et de la modernisation du réseau de transit gazier ukrainien. Je pense que cet événement tombe à point nommé. En ce qui concerne les relations bilatérales de l’UE avec, d’une part, la Russie et, d’autre part, l’Ukraine, les questions de l’approvisionnement et de l’acheminement des ressources énergétiques ont, de toute évidence, pris une nouvelle dimension dans le cadre des négociations en cours sur de nouveaux accords.
Enfin, nous ne nous tournons pas uniquement vers l’est, mais également vers le sud. Nous travaillons déjà avec de nombreux pays arabes sur des initiatives portant sur l’acheminement de gaz via la Turquie et, nous l’espérons, le gazoduc Nabucco. Ainsi donc, il conviendra de miser pour l’avenir sur la diversification des sources et des voies d’approvisionnement et, comme il l’a été dit, des types de sources d’énergie. Pour cela, nous avons besoin d’une base juridique appropriée. Or c’est là que réside la difficulté.
Andris Piebalgs, membre de la Commission. − (EN) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Députés, je n’ai qu’une poignée de remarques à formuler. Premièrement, notre mission est de rétablir sans délai l’approvisionnement, car des personnes souffrent, tout comme les entreprises, ce qui entraîne des pertes d’emplois. C’est là notre priorité, et nous devons éviter de créer de nouveaux obstacles.
Mais, une fois que cela sera fait, il faudra analyser ce qui s’est passé et prendre des mesures. Nous allons devoir revoir certaines de nos idées reçues, car, si l’on peut considérer 2006 comme un signal d’alarme, cette fois-ci, le choc est bel et bien là.
En réalité, nous sous-estimons la portée réelle des récents événements. Si les autorités des deux pays concernés s’accusent mutuellement d’avoir interrompu l’acheminement du gaz, alors je ne peux en tirer qu’une seule conclusion, car je fais confiance à ces pays et à leurs autorités: dans ce cas, quelqu’un doit avoir saboté les gazoducs. Or c’est très difficile à croire.
Ce qui nous arrive est vraiment loin d’être banal, et je pense que cela devrait avoir une incidence énorme sur les politiques énergétiques que nous tentons d’élaborer. Il faut donc, selon moi, lever tous les tabous. Nous devons débattre sans réserve des moyens par lesquels nous pourrions garantir la sécurité de notre approvisionnement dans n’importe quelles conditions.
Enfin, pour être honnête, jamais je ne me serais attendu à une interruption totale des livraisons. Je ne l’avais jamais imaginé et ce fut donc un choc pour moi également. Vous pouvez me jeter la pierre, me dire que, en tant que commissaire en charge de l’énergie, j’aurais dû le prévoir. Mais rien ne permettait de l’envisager. Nous sommes face à une situation inédite. À l’avenir, cependant, nous devrons y être préparés.
La Présidente. − Le débat est clos.
Le vote aura lieu demain (mardi 15 janvier 2009).
Déclarations écrites (article 142)
Cristian Silviu Buşoi (ALDE), par écrit. – (RO) L’Union européenne est à nouveau confrontée à une crise concernant son approvisionnement en gaz naturel. L’on ne sait pas trop à qui en vouloir. À la Russie? À l’Ukraine? Aux deux? J’invite la Commission européenne à publier des informations sur les raisons qui ont provoqué cette situation. L’Union européenne doit assumer la responsabilité d’indiquer qui est à blâmer.
Cette crise a malheureusement souligné que nombreux pays de l’Union européenne étaient vulnérables au chantage énergétique et pourraient finir par pâtir de la mésentente, de nature davantage politique qu’économique, entre les pays de l’ex-Union soviétique. Nous devons à l’évidence accélérer le processus de création d’une politique énergétique européenne commune, basée notamment sur une approche extérieure commune. Nous devons activer le processus de diversification des sources et des voies d’approvisionnement en gaz naturel. En réalité, il est vital d’accélérer le projet Nabucco.
J’estime que le commissaire en charge de l’énergie doit soumettre un rapport détaillant les mesures qui ont été prises ou, plus précisément, qui n’ont PAS été prises par la Commission en vue de soutenir le projet Nabucco au cours de l’année dernière.
Sylwester Chruszcz (UEN), par écrit. – (PL) Pendant le débat d’aujourd’hui, beaucoup de choses ont été dites sur l’approvisionnement en gaz et sur les liens, les interconnexions et la dépendance des économies européennes. Nous devons tirer les enseignements de la crise actuelle.
Nous devons aussi considérer le projet Yamal 2 comme un projet rationnel et intéressant pour nous. Non seulement il est préférable au gazoduc de la mer Baltique vers l’Allemagne, qui contourne la Pologne, mais il renforce aussi notre sécurité énergétique. S’il voit le jour, Yamal 2 entraînera un transit de gaz considérablement accru vers l’Europe, via la Pologne. Il s’agit en outre d’une solution plus rentable et plus efficace que le gazoduc du Nord et, qui plus est, ce projet peut être construit plus rapidement.
Telle est selon moi la direction dans laquelle nous devons axer nos efforts afin de garantir la sécurité énergétique de tous les États membres de l’UE.
Corina Creţu (PSE), par écrit. – (RO) La crise du gaz met en lumière deux problèmes majeurs auxquels l’Union européenne est confrontée.
Dans le domaine de l’énergie, nous n’avons toujours pas de stratégie commune, en raison de l’absence de cohésion nécessaire pour ce faire. Pour l’instant, 11 des 27 pays de l’UE ont été touchés par la cessation de l’approvisionnement. Cependant, la dépendance vis-à-vis du gaz russe est un problème sécuritaire commun, étant donné que l’arme énergétique peut être utilisée à n’importe quel moment, notamment contre les anciens États satellites de la Russie. Dans ces circonstances, le devoir de l’UE est de trouver une solution visant à créer une zone énergétique sûre pour les nouveaux États membres. Le véritable problème de l’Europe est la diversification des sources de gaz, et non celle des voies d’approvisionnement entre la Russie et l’UE.
Deuxièmement, la crise du gaz montre la faiblesse politique d’une Union européenne divisée, hésitante. L’une des lacunes flagrantes vient de la présidence de l’UE. Nous avons besoin, surtout en temps de crise, d’une voix représentative pour parler au nom de l’UE. Un chœur de plusieurs voix risque de ridiculiser l’idée d’une Europe unie, sans parler de son image et de son influence sur la scène internationale. C’est pourquoi il convient d’établir une présidence européenne de plus longue durée, qui soit également indépendante des structures politiques des États membres.
Daniel Dăianu (ALDE), par écrit. – Un nouveau signal d’alarme.
La crise du gaz que nous traversons démontre, une fois de plus, la faiblesse et l’inefficacité de la politique énergétique de l’UE. Au fond, en cas de crise grave, les autorités des États membres comptent sur leurs propres sources et ressources. Cela n’est pas surprenant, étant donné les circonstances, mais cela n’est qu’une expression parmi d’autres du manque de solidarité dans l’UE. Cette crise met également en évidence les caractéristiques indispensables des prochaines étapes à franchir pour nous doter d’une politique énergétique commune, si c’est véritablement ce que nous voulons. Comme pour le pétrole, nous devons développer le stockage du gaz. Nous devons diversifier nos fournisseurs ainsi que nos voies et nos méthodes d’approvisionnement (le gaz naturel liquéfié, par exemple). Il faut accélérer la progression du projet Nabucco et en accroître le financement par l’intervention de la BEI. L’argument selon lequel les quantités de gaz disponibles seraient insuffisantes en cas d’ouverture de nouvelles voies d’acheminement ne résiste pas à un examen minutieux. Nous devons accélérer le passage aux sources d’énergie renouvelables et économiser l’énergie. Enfin et surtout, nous devons améliorer l’interconnexion des réseaux énergétiques aux frontières, de manière à ce que les États membres puissent se venir en aide mutuellement en cas de besoin.
Dragoş Florin David (PPE-DE), par écrit. – (RO) Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs.
Le secteur de l’énergie constitue un facteur économique et géopolitique de taille. Aujourd’hui, l’UE importe près de la moitié de son énergie et les prévisions indiquent que les importations représenteront 70 % de l’approvisionnement en gaz naturel et 100 % de l’approvisionnement en pétrole d’ici 2030. C’est surtout pour ces raisons que nous devons de toute urgence concevoir une politique énergétique commune. Il faut pour ce faire fonder la mise en œuvre d’une politique énergétique commune sur trois piliers: l’interconnexion totale entre les réseaux nationaux au niveau de l’UE, la diversification de nos sources d’approvisionnement et l’adoption de mesures actives destinées à économiser l’énergie.
Toutes ces mesures doivent aussi viser à éviter des crises énergétiques telles que celles que nous connaissons maintenant concernant le gaz fourni par la Russie via l’Ukraine, laquelle entraîne d’importants problèmes pour la population de l’UE et perturbe son économie. Est-il vraiment possible de voler du gaz d’un réseau comme un portefeuille d’une poche? Est-il vraiment possible de couper l’approvisionnement comme ça, en quelques minutes, sans en avertir le consommateur à l’avance? Je pense qu’avant d’examiner le non-respect des traités et accords internationaux et le fait que le fournisseur qui tire la plus grande part de ses revenus des exportations de gaz menace les Européens, lesquels paient de façon fiable pour ce gaz, avec indifférence et mépris, nous devons chercher des solutions pour la sécurité énergétique de l’UE.
András Gyürk (PPE-DE), par écrit. – (HU) L’Union européenne n’a pas appris de son expérience lors de la crise du gaz qui a opposé la Russie et l’Ukraine en 2006. Les décideurs ont réagi à la fermeture du gaz comme s’ils ne s’y attendaient absolument pas. Cette crise de l’approvisionnement en énergie, la plus grave à ce jour, est peut-être le dernier avertissement pour les États membres: nous devons prendre des mesures afin de réduire notre dépendance énergétique. Le conflit qui est apparu entre la Russie et l’Ukraine n’est pas qu’un litige juridique bilatéral privé, puisqu’il touche des centaines de millions de citoyens de l’Union européenne.
La crise actuelle n’est pas seulement un test pour notre politique énergétique commune; c’est aussi un test pour la solidarité de l’UE. La question maintenant est de savoir si les États membres peuvent dépasser leurs politiques jusqu’ici basées sur des accords séparés et si l’Union européenne est capable de s’exprimer et d’agir avec unité dans un domaine aussi crucial.
L’inactivité des derniers jours est particulièrement pénible, étant donné que la Commission européenne a fait du bon travail en définissant les mesures susceptibles de réduire la dépendance de l’Europe. Nous ne pouvons que nous rallier à ce qui est exposé dans le plan d’action en matière de sécurité et de solidarité énergétique. Il convient d’investir sans tarder dans le développement de voies d’approvisionnement alternatives et dans l’interconnexion des réseaux existants. L’aide apportée aux infrastructures propices à l’efficacité énergétique doit être renforcée et nous devons consolider le volet «énergie» de la politique étrangère de l’UE qui est en train de prendre forme.
Je pense que la crise actuelle n’aurait pas eu un effet aussi dramatique si les États membres n’avaient pas repris leurs esprits qu’à la dernière minute et s’étaient engagés à définir une politique énergétique européenne commune autrement qu’avec des mots.
Filip Kaczmarek (PPE-DE), par écrit. – (PL) La crise actuelle de l’approvisionnement en gaz de l’Ukraine et de l’Europe semble avoir des ramifications bien plus vastes que les crises précédentes, qui résultaient du même problème de la position de monopole de la Russie dans la fourniture de gaz à l’UE. Elle nous a aidés à saisir la véritable signification de concepts et de termes que nous utilisons souvent, mais que nous ne comprenons pas toujours, des concepts tels que sécurité énergétique, solidarité de l’UE, politique énergétique commune ou diversification des sources et des voies d’approvisionnement en gaz et en autres combustibles. Nous n’avons même pas besoin de connaître les véritables raisons du comportement de la Russie pour tirer nos conclusions. Il importe bien entendu de connaître ces raisons pour porter une évaluation morale et politique de la façon dont certains pays et certaines entreprises se comportent, mais le fait est que, quels que soient les raisons de chacune des parties à l’accord, certains citoyens de l’Union européenne ont été exposés aux conséquences douloureuses du manque de gaz. La vérité est importante, mais elle ne ramènera pas le gaz. Saisissons cette occasion de répondre sérieusement à plusieurs questions. Serons-nous capables de tirer les bonnes conclusions de la situation actuelle? Serons-nous capables de dépasser la perspective à court terme utilisée par les partis politiques actuellement dans l’opposition et qui, de façon cynique, utilisent cette situation pour lancer des attaques non fondées contre leurs propres parlements nationaux? Le projet Nabucco verra-t-il le jour? Allons-nous augmenter nos réserves obligatoires de combustible? Les opposants idéologiques de l’énergie atomique vont-ils changer d’avis? Espérons-le.
Janusz Lewandowski (PPE-DE), par écrit. – (PL) Madame la Présidente, la leçon à tirer de l’actuelle crise du gaz est inéluctable, et l’Union européenne doit la retenir. Nous voilà à un nouveau tournant, et ce devrait être le dernier à exposer le manque de gouvernance des 27 pays. C’est ce que les Européens attendent, même dans les pays qui ne sont pas directement touchés par l’embargo sur le gaz et qui dépendent moins de la fourniture de Gazprom.
Le mécanisme de solidarité exposé dans la directive de 2004 n’est aucunement adapté aux défis actuels. Nous devons convenir d’une politique commune pratique sur la solidarité, la sécurité et la diversification en matière d’énergie. Nous n’avons pas besoin de slogans, nous avons besoin d’investissements dans les infrastructures. Nous devons nous prémunir contre une crise future en augmentant notre capacité de stockage de gaz. La solidarité énergétique exige des connexions transfrontalières qui relient les réseaux de transmission de chaque pays. La Pologne en est un bon exemple: bien qu’elle soit approvisionnée de Russie par des pipelines qui contournent l’Ukraine et qu’elle soit par conséquent moins exposée dans la crise actuelle, elle est toutefois coupée du système de transmission et de stockage de l’Europe occidentale.
Nous sommes préoccupés par le fait qu’une des conséquences de la crise actuelle est que la crédibilité de l’Ukraine, et pas seulement de la Russie, s’en trouve affaiblie. Cet effet de la guerre du gaz n’est pas moins important que les problèmes temporaires auxquels les consommateurs sont confrontés en cet hiver rude.
Marusya Ivanova Lyubcheva (PSE), par écrit. – (BG) Il est très difficile pour nous de discuter de la crise du gaz alors que le Conseil, le Parlement européen et la Commission européenne se sont finalement retrouvés pieds et poings liés. Ce débat est toutefois très important, quoique inapproprié. Je tiens à remercier tous mes collègues de différents groupes politiques et États membres pour leurs marques de soutien à l’égard de la Bulgarie et des autres pays touchés par cette crise.
Dans le même temps, ce n’est pas ce qui va ramener le gaz et créer des conditions de vie normales pour nos concitoyens. En raison de cette crise, la Bulgarie est passée d’un centre de l’énergie dans les Balkans en une capitale de la crise du gaz.
C’est pourquoi des mesures urgentes s’imposent. Les conséquences de cette crise sont humanitaires et économiques. Elles déstabilisent notre pays, en plus de la crise financière et économique. Le Parlement européen doit adopter une résolution dans laquelle il exprime sa position et définit les mesures qui nous aideront à surmonter cette crise. Ici et maintenant. Ces mesures doivent couvrir l’énergie nucléaire et la recherche de nouvelles sources de gaz naturel. Il nous faut un nouveau mécanisme d’action et de nouveaux instruments.
Si le Parlement européen ne fait pas partie de la solution au problème d’aujourd’hui, il fera partie du réel problème. Le résultat politique pour l’UE sera négatif.
Marian-Jean Marinescu (PPE-DE), par écrit. – (RO) La crise actuelle a souligné une fois de plus que le principal problème est la dépendance vis-à-vis des sources d’énergie situées en Fédération de Russie et l’utilisation de cette situation par la Fédération de Russie en dehors des procédures internationales standards.
Les déclarations faites au moment de la crise en Géorgie par le président de la Commission européenne et par le président du Conseil concernant un changement dans la relation de l’UE avec la Russie doivent être mises en pratique.
Le traité de Lisbonne doit être ratifié afin que nous puissions créer une politique énergétique européenne commune.
Nous devons commencer sans plus tarder à construire le gazoduc de Nabucco.
Il est absolument nécessaire de promouvoir des projets énergétiques qui relèvent le profil de la région de la mer Noire et utilisent les sources d’énergie de la région de la mer Caspienne.
L’élargissement de la Communauté européenne de l’énergie à l’Est et l’inclusion, en tant que priorité, du domaine de l’énergie dans le nouveau cadre créé via le partenariat orientant peuvent aussi contribuer à résoudre la situation actuelle.
Katrin Saks (PSE), par écrit. – (ET) Madame la Présidente, Monsieur le Président.
Il est regrettable que la présidence tchèque n’ait pas débuté comme prévu, mais avec la résolution imposée sur le conflit russo-ukrainien sur le gaz, tout comme la présidence précédente a dû commencer par chercher une solution à la guerre russo-géorgienne.
Cependant, il y a un côté positif en toute chose. Grâce à cette guerre sur l’approvisionnement en gaz, la question de l’énergie est revenue à l’avant-plan, et notamment la nécessité d’une politique énergétique commune.
Cette politique énergétique commune ne peut toutefois pas être façonnée à Bruxelles, si les États membres ne sont pas mus par des intérêts communs, mais plutôt conclure des accords bilatéraux à des conditions favorables à eux seuls. En ce sens, une politique commune doit provenir des capitales des États membres, et non des couloirs du pouvoir à Bruxelles, comme on pourrait s’y attendre.
J’espère que le porte-parole parviendra à renforcer ce point de vue.
Toomas Savi (ALDE), par écrit. – La Russie a interrompu ses livraisons de gaz à un moment très inopportun pour les consommateurs européens et il est essentiel que ces livraisons reprennent sans discussion. Toutefois, une fois la crise résolue, nous devrons étudier avec soin notre dépendance par rapport au gaz russe, en tenant compte de deux aspects.
Premièrement, la Russie doit donner des garanties quant à sa capacité de respecter ses engagements envers l’UE. La défaillance de technologies et d’infrastructures dépassées pourrait mettre en danger la stabilité du flux gazier à destination de l’UE. Notons également que, malgré l’existence de plans ambitieux concernant le projet de gazoduc Nord Stream, il n’est pas certain que la capacité des champs gaziers russe soit suffisante pour garantir le respect des engagements.
Deuxièmement, le Kremlin a déjà, par le passé, exploité des instruments économiques à des fins politiques. L’Union européenne ne doit en aucun cas devenir la victime d’un tel comportement politique. Je l’encourage à diversifier sa palette énergétique afin de ne pas dépendre d’un seul fournisseur de gaz naturel.
Daniel Strož (GUE/NGL), par écrit. – (CS) À mes yeux, le problème de la fourniture de gaz russe à l’Ukraine puis à l’UE a deux facettes. La première est que beaucoup s’insurgent en criant «Comment la Russie ose-t-elle?» Je demande: pourquoi ne le ferait-elle pas? Si l’UE est elle-même essentiellement un projet néolibéral où le marché est censé tout résoudre, pourquoi la Russie ne pourrait-elle pas avoir une attitude commerciale et réclamer à son débiteur l’argent qui lui est dû? La crise du gaz n’a pas été déclenchée par la Russie, mais par l’Ukraine, et ce n’est pas un problème d’ordre politique, mais économique. Ce doit être bien clair! Le deuxième aspect (et je l’ai critiqué à plusieurs reprises par le passé) est que les organes et institutions de l’UE - et le Parlement ne fait pas exception - se concentrent sur des problèmes qui ne sont sans pertinence et que ne font que détourner l’attention des problèmes vraiment urgent. Cet état de fait a été à nouveau confirmé par la réaction à la décision légitime de la Russie de suspendre la fourniture de gaz. Plutôt que de s’embarrasser à dorloter l’administration ukrainienne en tant que «filtre de protection» entre la Russie et les pays de l’UE et de rêvasser à la forme idéale d’un concombre, il y a longtemps que l’UE aurait dû se préparer à une crise de ce genre. Comment l’UE a-t-elle aidé les Slovaques et les Bulgares, par exemple, qui ont été les plus touchés par la crise du gaz? A-t-elle même été capable de les aider? Si non, quelque chose ne va pas dans l’intégration.
Kristian Vigenin (PSE), par écrit. – (BG) Dans la guerre du gaz entre la Russie et l’Ukraine, ceux qui ont été les plus touchés sont les plus innocents. La situation actuelle montre clairement toute la dépendance de l’Europe vis-à-vis non seulement des sources d’approvisionnement, mais aussi des pays de transit. Elle montre aussi combien les critiques sur les gazoducs alternatifs, tels que les projets Nordstream et South Stream étaient injustes. Malheureusement, elle souligne aussi l’incapacité de l’Union européenne à aider ses États membres les plus touchés et à garantir la sécurité de ses citoyens.
Notre premier devoir maintenant est de restaurer l’approvisionnement en gaz. L’UE doit aussi utiliser toutes ses ressources politiques pour persuader la Russie et l’Ukraine de libérer les 18 États membres qu’elles tiennent en otages.
La deuxième mesure doit être de soutenir les pays les plus sévèrement touchés. Dans le climat de crise économique et de marchés qui se contractent, le coup porté par une pénurie de gaz peut s’avérer fatal pour de nombreuses sociétés dans mon pays et des milliers de personnes se retrouveront sans emploi. Qui en sera responsable?
La troisième mesure et la plus importante à long terme est la construction de gazoducs alternatifs, notamment celui de Nabucco, les investissements visant à relier les réseaux d’approvisionnement en gaz des États membres et la construction d’installations de stockage afin de garantir de meilleures réserves.
La seule conclusion à tirer est que nous avons besoin d’une politique européenne unique, mais il est regrettable que nous nous en rendions toujours compte après une crise profonde.
Andrzej Tomasz Zapałowski (UEN), par écrit. – (PL) Madame la Présidente, la crise de l’approvisionnement en gaz de l’UE, de l’Ukraine et des Balkans, doit être essentiellement considérée comme un élément de la lutte pour l’influence politique et économique au sein des anciennes républiques soviétiques.
Le pays pour lequel on se bat maintenant est l’Ukraine. La Russie s’est ralliée à la campagne électorale en cours dans ce pays. Elle voulait l’utiliser pour montrer à la population ukrainienne que si elle restait fidèle à la Russie, l’Ukraine aurait du gaz et du pétrole à bon marché.
Le conflit actuel montre aussi que ce genre d’influence géopolitique a plus d’importance aux yeux de la Russie que de bonnes relations avec l’UE. La Russie a pris en considération les coûts économiques de la cessation de la fourniture de gaz dans ses décisions. Ne nous leurrons donc pas – ce n’est là que le début de la lutte pour le pouvoir en Ukraine.
Dans son aveuglement inhérent, l’Union européenne veut continuer à dépendre des importations de gaz et de pétrole pour son énergie. Dans le même temps, ses propres ressources de charbon et de lignite (y compris en Pologne) restent inexploitées. Je ne sais si c’est de la stupidité politique, ou s’il s’agit seulement de maintenir une pression en matière d’énergie sur certains pays de la Communauté.
Marian Zlotea (PPE-DE), par écrit. – (RO) Il convient de résoudre sans tarder la question de l’approvisionnement en gaz de l’Ukraine et de l’Union européenne par la Russie. L’Union européenne a besoin d’une politique en matière de sécurité énergétique, ainsi que de la diversification de ses ressources et de solidarité dans le secteur de l’énergie afin d’empêcher de telles crises d’affecter ses citoyens.
Plus de la moitié des États membres de l’UE sont touchés par la décision russe de cesser la fourniture de gaz. En Bulgarie, la fourniture de gaz aux industries a été réduite ou interrompue, puisque ce pays est dépendant à 90 % du gaz russe.
Je soutiens la position de la présidence et de la Commission, qui ont invité les deux parties au dialogue afin de trouver un compromis. Sans coordination technique entre les deux parties, le gaz ne peut être fourni. À l’avenir, nous devons maintenir le dialogue avec les deux parties pour éviter de se retrouver dans une situation semblable.
Dans le cadre du paquet sur l’énergie en cours de discussion, le Conseil et le Parlement proposent une série de mesures, consistant notamment à recourir à davantage de fournisseurs d’énergie au profit du consommateur. Nous espérons que ce paquet sera adopté en deuxième lecture.
Cette crise doit être résolue dès que possible parce qu’elle affecte les citoyens de l’Europe et son industrie. Nous avons besoin d’une politique étrangère commune dans le secteur de l’énergie.