Le Président. − L’ordre du jour appelle la déclaration du Conseil sur SWIFT.
Beatrice Ask, présidente en exercice du Conseil. – (SV) Monsieur le Président, dans le cadre de la lutte globale contre le terrorisme, la question centrale est de savoir comment sont financées ces activités. Empêcher le financement du terrorisme et suivre les traces que ces transactions peuvent laisser derrière elles permet à la fois de prévenir des actes terroristes, mais aussi d’apporter des éléments importants dans le cadre des enquêtes sur ces crimes. Pour cela, nous avons besoin d’une coopération internationale. À ce titre, nous devons souscrire à la convention des Nations unies de 1999 sur la répression du financement du terrorisme et aux conventions du Conseil européen dans ce domaine.
Les députés qui ont participé à la réunion à huis clos de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures le 3 septembre 2009 ont entendu comment le programme de traque du financement du terrorisme, le TFTP, avait contribué à améliorer la sécurité des citoyens européens et d’autres parties du monde. Ces dernières années, les informations du TFTP ont permis d’identifier les responsables d’actes terroristes, mais aussi de déjouer des attentats sur le sol européen.
Le 27 juillet 2009, la Présidence a reçu, à la suite d’une décision unanime du Conseil, un mandat de négociation qui repose sur une proposition de la Commission. Il aurait été préférable que les négociations avec les États-Unis se déroulent sur la base du traité de Lisbonne. Le Parlement européen aurait ainsi été pleinement impliqué, mais, comme vous le savez, ce n’est pas encore possible pour l’instant. À la fin de cette année, SWIFT transférera sa base de données des États-Unis vers l’Europe. Il est donc essentiel que l’UE conclue dès que possible un accord à court terme avec les États-Unis de façon à ce que les échanges d’informations ne soient pas interrompus. Il y va de l’intérêt de tous.
Je tiens à souligner qu’il s’agira là d’un accord temporaire, jusqu’à ce qu’un accord permanent puisse être conclu. Cet accord intérimaire couvrira une période qui ne pourra excéder douze mois et la Commission a annoncé son intention de présenter une proposition d’accord permanent dès que le nouveau traité sera entré en vigueur. Pour que l’UE et ses États membres puissent profiter du TFTP, il faut que les États-Unis continuent à fournir aux autorités compétentes de l’UE les informations tirées de ce programme de la même manière qu’auparavant. C’est naturellement ce qui se passera.
Par ailleurs, l’accord intérimaire autorisera expressément les autorités européennes compétentes pour la prévention de la criminalité à demander elles-mêmes des informations contenues dans les bases de données du TFTP dans le cadre d’enquêtes sur des actes terroristes. La Présidence est convaincue de l’avantage que procure le fait de disposer des informations du TFTP. En même temps, il est évident que l’accord intérimaire devra contenir les mécanismes nécessaires afin de garantir la protection de la vie privée des individus, l’État de droit et la protection des données. Aussi, le projet d’accord contient une disposition établissant que toute demande des États-Unis en vue d’obtenir des informations de SWIFT doit être envoyée, traitée et approuvée par une autorité européenne indépendante.
Il faut également que l’accord intérimaire contienne des dispositions détaillées quant à la protection des données dans le cas des informations transmises par SWIFT aux États-Unis par l’intermédiaire de l’autorité européenne. À cet égard, l’accord ira plus loin que les engagements unilatéraux pris par les États-Unis vis-à-vis de l’UE en 2007, tels qu’ils ont été publiés dans le journal officiel de l’Union européenne.
Permettez-moi de citer d’autres dispositions qui devront obligatoirement figurer dans cet accord. Les données doivent être conservées en sécurité; tous les accès aux données devront être enregistrés dans un journal de bord; toutes les recherches effectuées dans la base de données TFTP seront limitées et ne couvriront que les personnes ou les informations pour lesquelles il existe de bonnes raisons de soupçonner un lien avec une activité terroriste. Les informations ne pourront être conservées que pendant une période limitée et devront être supprimées de la base de données après cinq ans tout au plus, ou plus tôt lorsque c’est possible.
Nous pouvons vous assurer que l’utilisation du TFTP ne sera autorisée que dans le cadre d’enquêtes concernant des actes terroristes, y compris leur financement. Ni les États-Unis ni l’UE ne pourront utiliser le système pour enquêter sur d’autres types de crimes ou à d’autres fins. Naturellement, il faut également que le transfert d’informations de l’UE vers les États-Unis dans le cadre du TFTP soit proportionné. En plus des règles concernant l’autorité européenne, que j’ai mentionnées précédemment, l’accord contient également une disposition établissant que le système doit être évalué par un organe d’évaluation indépendant. Pour ce qui est de l’UE, cet organe sera composé de représentants de la Présidence, de la Commission et de deux personnes issues des États membres représentant les autorités nationales compétentes pour la protection des données. L’organe d’évaluation aura pour mission de vérifier que l’accord est respecté, que les dispositions relatives à la protection des données sont correctement appliquées et que le transfert de données est proportionné.
Nous avons la responsabilité conjointe de veiller à ce que les autorités compétentes pour la prévention de la criminalité puissent lutter efficacement contre le terrorisme. Nous avons également la responsabilité conjointe de veiller à ce que ces activités s’inscrivent dans une certaine sécurité juridique et dans le respect des droits fondamentaux. La Présidence est convaincue que l’échange d’informations avec les États-Unis dans le cadre du TFTP nous permet de mieux nous protéger contre le terrorisme. Elle est également persuadée que nous arriverons à conclure un accord intérimaire - et ensuite, permanent - qui non seulement satisfera à nos exigences strictes en matière de protection des données mais respectera aussi les droits fondamentaux.
Jacques Barrot, vice-président de la Commission. − Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les parlementaires, je veux d’abord remercier chaleureusement Mme Béatrice Ask pour nous avoir fait le point sur tous les développements concernant SWIFT et sur les négociations en cours avec les États-Unis pour la poursuite du programme de traque du financement du terrorisme, le TFTP.
J’ai moi-même, lors de la réunion de la commission LIBE du 22 juillet dernier, eu l’occasion d’expliquer le fonctionnement du TFTP et pourquoi il nous faut une solution intérimaire permettant de ne pas l’interrompre. La réunion conjointe des commissions LIBE et ECON du 3 septembre s’est déroulée en présence de la Présidence suédoise, du directeur général JLS, M. Faull, et de M. Bruguière. Je crois que cette réunion a permis de clarifier un certain nombre de questions qui restaient ouvertes.
Je voudrais souligner quelques aspects brièvement. La valeur ajoutée de l’évaluation, par le Trésor américain, des données dans le cadre du TFTP a été confirmée par le rapport de M. Bruguière, dont les membres des commissions LIBE et ECON ont pu prendre connaissance lors de la réunion conjointe, début septembre. Comme la Présidence l’a aussi rappelé, cette analyse des données a permis aux autorités américaines de prévenir des attentats ou de faciliter des enquêtes concernant les attentats terroristes, aussi bien aux États-Unis qu’en Europe.
D’autre part, le rapport du juge Bruguière a confirmé que les autorités américaines avaient respecté les engagements pris en 2007 en matière de protection des données, à savoir – ce qu’a très bien rappelé Béatrice Ask tout à l’heure – la limitation de la conservation des données et l’accès limité pour qu’elles ne soient utilisées que s’il y a suspicion de financement du terrorisme. Bref, M. Bruguière a dit que les engagements ont été respectés.
Il est toutefois évident que l’encadrement juridique négocié en 2007 ne sera plus opérationnel dès lors que les données ne se trouveront plus aux États-Unis, à la suite du changement d’architecture de SWIFT, prévu pour la fin de l’année. Pour que les autorités américaines puissent continuer à analyser les données concernant ces transactions intereuropéennes situées aux Pays-Bas, un accord international intérimaire entre l’Union européenne et les États-Unis est nécessaire.
L’inclusion dans cet accord de toutes les garanties nécessaires pour sauvegarder les droits fondamentaux de nos citoyens, notamment celui de la protection des données personnelles, est une condition absolue. Bien entendu, nous soutenons pleinement la Présidence dans les efforts qu’elle déploie dans cette direction.
Puis, je voudrais surtout dire au Parlement, Monsieur le Président, comme Mme la ministre vient de le mentionner, qu’il s’agit d’un accord intérimaire dont la durée ne peut pas excéder un maximum de douze mois, ce qui doit permettre sa renégociation immédiate, une fois le traité de Lisbonne entré en vigueur, avec la pleine implication du Parlement européen. Je peux vraiment prendre ici l’engagement que la Commission continuera, bien sûr, à tenir le Parlement constamment informé de l’évolution de ce dossier.
J’ajoute que nous sommes heureux de pouvoir ainsi préparer cet accord, qui sera un accord permanent, un accord durable, en exigeant, bien entendu, de nos partenaires américains une parfaite réciprocité. La lutte contre le terrorisme nous intéresse aussi et il n’y a pas de raison qu’il n’y ait pas de réciprocité pleine et entière. Voilà pourquoi, je crois, la venue du Parlement dans cette négociation d’un prochain accord durable sera bénéfique.
Voilà ce que je crois, en mon âme et conscience. Je remercie encore la Présidence suédoise et Mme Béatrice Ask de nous avoir bien exposé la situation qui implique aujourd’hui cet accord, encore une fois, momentané.
Ernst Strasser, au nom du groupe PPE. – (DE) Monsieur le Président, Madame Ask, Monsieur le Commissaire, chers collègues, les États-Unis sont un partenaire important dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Cependant, en ce qui ce qui concerne la question des données sensibles en particulier, nous voulons élaborer, dans le cadre de notre coopération avec les Américains, des règlements européens relatifs à la sécurité des données, aux droits civils et aux droits individuels de nos concitoyens en matière de données. C’est pourquoi le groupe du Parti Populaire Européen (Démocrates-Chrétiens) demande qu’un certain nombre de critères fondamentaux soient définis pour conclure ce genre de contrat.
Premièrement, il convient de trouver un équilibre entre la sécurité civile et les droits civils. Deuxièmement, nous devons garantir une certaine sécurité juridique pour les entreprises concernées et pour nos concitoyens. Troisièmement, nous tenons à ce que le Parlement européen puisse jouer un rôle de colégislateur et, par conséquent, accueillons favorablement l’intention de conclure un accord de transition. Nous souhaitons à Mme Ask et à la Commission beaucoup de succès dans les semaines à venir.
Quatrièmement, nous pensons que les données européennes devraient être traitées conformément au droit européen, que ce soit dans l’accord de transition ou dans l’accord définitif. Cinquièmement, nous voulons qu’un instrument similaire au TFTP soit également introduit au niveau européen, car sixièmement, nous pensons que c’est là une condition préalable à la réciprocité.
Voici donc notre point de vue qui, nous en sommes convaincus, devrait faire l’objet d’un large consensus en plénière. Une fois que l’accord de transition aura été conclu, il nous faudra négocier et conclure l’accord définitif rapidement.
Claude Moraes, au nom du groupe S&D. – (EN) Monsieur le Président, SWIFT est clairement devenu un terrain d’expérimentation pour trouver le juste équilibre entre notre coopération avec les États-Unis, la lutte contre le terrorisme et la protection de nos droits fondamentaux.
Lorsque, dans nos résolutions de 2006 et 2007, le Parlement a demandé que le site miroir de SWIFT soit transféré des États-Unis vers l’UE, c’était naturellement parce que nous pensions que la protection offerte aux citoyens européens par le cadre américain n’était pas conforme aux normes de l’UE et devait être améliorée. Il s’agit donc d’une évolution positive et notre groupe se félicite que deux nouveaux serveurs de SWIFT soient transférés en Europe et qu’un nouveau cadre juridique soit établi afin que le TFTP américain continue à utiliser et traiter des données en coopération avec nos autorités répressives.
Mon groupe constate également que la recommandation adoptée par le Conseil s’efforce de répondre à certaines des inquiétudes formulées par le Parlement et le contrôleur européen de la protection des données. Mais d’autres questions clés restent sans réponse. Si les normes juridiques américaines continuent à s’appliquer sur le sol européen en ce qui concerne le traitement de données européennes, comment pouvons-nous garantir le respect des normes communautaires relatives aux droits procéduraux et à la protection des données personnelles? Vers quel juge les citoyens et les entreprises de l’UE peuvent-ils se tourner en cas de poursuites pénales?
Naturellement, l’une des questions les plus importantes est, comme l’ont souligné le Conseil et la Commission, le moment auquel intervient cet accord et la nature temporaire de celui-ci. Le choix d’une base juridique relevant du troisième pilier, combiné à son caractère temporaire, laisse le Parlement - et donc les citoyens européens - complètement en dehors du processus législatif. Le groupe des Socialistes et Démocrates insiste pour que cet accord intérimaire ne s’applique que pendant 12 mois et qu’un nouvel accord soit négocié avec le Parlement en tant que colégislateur, ceci afin que nous puissions garantir un juste équilibre entre la protection des droits fondamentaux des citoyens européens et la lutte contre le terrorisme, qui est certes importante et nécessaire.
Sophia in 't Veld, au nom du groupe ALDE. – (NL) Monsieur le Président, après toutes ces déclarations enthousiastes, je me vois obligée de jeter un pavé dans la mare. Je ne vais pas parler du contenu de l’accord, puisque je pense qu’il est évident que ce qui a été négocié est conforme aux normes européennes en matière de protection juridique et de protection des données personnelles. Cependant, je voudrais maintenant obtenir quelques réponses en ce qui concerne la procédure, puisqu’encore une fois, le Conseil a décidé de se réunir à huis clos pour prendre des décisions qui affectent les citoyens. Les gouvernements d’Europe et des États-Unis veulent tout savoir de notre vie privée, mais nous, citoyens, ne pouvons pas savoir ce que fait le Conseil. Je trouve que c’est un peu le monde à l’envers. La lutte contre le terrorisme est pratiquement devenue une sorte de train fou, conduit par un Conseil affichant un mépris total pour les citoyens européens et la démocratie parlementaire. Que les discussions portent sur SWIFT, le PNR, la conservation des données ou sur quoi que ce soit d’autres, chaque fois, on nous répète qu’il est «indispensable de lutter contre la terreur». Je vous le concède volontiers, Madame la Ministre, mais quand pourrons-nous enfin avoir des faits? Quand procéderons-nous enfin à une évaluation? Concernant SWIFT, il y a également plusieurs questions auxquelles je souhaiterais vraiment que vous apportiez une réponse, puisque nous n’en avons pas reçues le 3 septembre. Pourquoi maintenant? On sait depuis 2007 que l’architecture de SWIFT doit être réformée. Pourquoi le Conseil a-t-il attendu le dernier moment, cet été, pour présenter ce plan, alors que le Parlement n’était même pas encore constitué? Pourquoi n’avez-vous pas consulté les parlements nationaux à propos du mandat? Pourquoi? Ne peut-on pas parler de «blanchiment politique», Madame la Ministre, lorsque les gouvernements européens essaient d’accéder à nos données par l’intermédiaire du gouvernement américain? Mais dans ce cas, dites-le franchement!
Enfin, je voudrais parler de la transparence. Les documents, et plus précisément les conseils juridiques fournis par les services juridiques du Conseil, doivent être rendus publics, non pas dans une petite pièce accessible uniquement aux députés - étant donné que nous en avons trouvé un exemplaire à côté de la photocopieuse, nous savons déjà ce qu’ils contiennent - mais à tous les citoyens de l’Europe. C’est cela, la vraie transparence.
Jan Philipp Albrecht, au nom du groupe Verts/ALE. – (DE) Monsieur le Président, la Présidence et la Commission parlent constamment de renforcer les droits civils et de créer une Europe des citoyens. Dans les faits, cependant, les droits fondamentaux s’érodent et il n’est pas possible d’avoir un débat public digne de ce nom à ce sujet. Tout est fait pour exclure les parlements et retenir certaines informations. Ce manque de transparence est inacceptable dans une Europe démocratique.
Se contenter de frapper à la porte n’est pas suffisant; un Parlement responsable se doit de mettre un terme à cette évolution indésirable. La Présidence doit interrompre les négociations jusqu’à ce qu’elle soit capable de garantir les droits des citoyens et des parlements. Les maquignonnages auxquels vous entendez vous livrer en ce qui concerne les données bancaires, sans aucun mécanisme de protection contraignant, auront pour effet de vendre au rabais les droits des citoyens européens et de créer un climat de suspicion préventive envers tous les citoyens.
Les Verts refusent d’être mêlés à cela. Même pas de manière temporaire et certainement pas si des serveurs sont installés en Europe, et plus seulement aux États-Unis, car les données continueront de toute façon à être envoyées aux États-Unis et la protection juridique ne sera pas garantie.
Marie-Christine Vergiat, au nom du groupe GUE/NGL. – Monsieur le Président, mes chers collègues, c’est un grand honneur pour moi d’intervenir pour la première fois dans cet hémicycle pour porter la voix de ces millions d’Européens qui veulent une autre Europe.
L’affaire SWIFT est symptomatique des dérapages sécuritaires imposés au nom du terrorisme, en faisant fi des droits les plus fondamentaux de nos concitoyens. Dans cette affaire, les États-Unis ont piraté des données bancaires, sans base légale, et même sans la moindre information des autorités en Europe. Le scandale a fait réagir les autorités européennes. Un accord a été signé avec le gouvernement américain. Un expert a fait le bilan de cet accord. Mais quel expert? Un juge anti-terroriste français, le juge Bruguière, dont on connaît, en France, les dérapages sur les droits fondamentaux. Nous sommes donc sceptiques sur la qualité de son rapport.
Au-delà de la question de principe, la proposition de résolution qui nous est soumise comporte de nombreuses mises en garde avec lesquelles nous sommes d’accord, mais elles sont insuffisantes. Nous proposons des amendements pour renforcer les exigences que se doit d’émettre le Parlement européen. Nous devons aller plus loin et exiger la suspension de l’accord en cas d’entorse aux principes énoncés. Nous voulons savoir pourquoi les instances européennes ont mis si longtemps à informer le Parlement et pourquoi on met tant de précipitation à conclure ce nouvel accord.
Nous comptons sur la Présidence suédoise. Nous veillerons sans cesse au respect des droits fondamentaux. Oui, nos concitoyens ont droit à la sécurité, mais ce doit être mis en œuvre sans que nous soyons obligés de vivre dans une société de contrôle social et de fichage généralisé.
Beatrice Ask, présidente en exercice du Conseil. – (SV) Monsieur le Président, merci pour ces points de vue importants. Je vais essayer de répondre à quelques questions dans le peu de temps qui m’est imparti.
La première question qui se pose est, naturellement, de savoir comment nous pouvons être sûrs que les États-Unis respecteront l’accord. Je voudrais dire que, premièrement, nous avons le rapport Bruguière, qui nous offre une bonne description de la manière dont ont été respectées les conditions que nous avions convenues jusqu’ici. Deuxièmement, le projet d’accord mentionne un organe d’évaluation, que je vous ai décrit, ainsi que la participation de la Présidence, de la Commission et de représentants des autorités nationales chargées de la protection des données afin de vérifier que tout se déroule correctement. Naturellement, il est essentiel que les informations soient fiables. Il importe également que tout le monde comprenne que, si des informations sont transférées dans ce programme, cela ne signifie pas pour autant que n’importe qui pourra y accéder n’importe quand et regarder tout ce qui lui plaît. Pour que l’accès à ces informations soit autorisé, il faut qu’il y ait suspicion d’acte terroriste ou de financement d’acte terroriste. Naturellement, cela réduit l’utilisation qui peut être faite de ces informations.
S’agissant des critiques sur le fait que ce sujet soit abordé maintenant, pendant l’été, je voudrais souligner que la Présidence a posé plus ou moins les mêmes questions que celles soulevées par les députés européens. Nous avons été chargés de préparer soigneusement ce dossier et d’analyser - entre autres choses - ce rapport, qui répond à certaines questions. La vérité, c’est que ce n’est pas nous qui avons décidé que SWIFT serait transféré en Europe. Cet évènement découle d’autres décisions. Cependant, les États-Unis tiennent à pouvoir utiliser cet outil dans le cadre de leur lutte contre le terrorisme et nous pensons que des informations équivalentes nous seraient également utiles. Pour cela, nous avons besoin d’un accord. Le traité de Lisbonne n’étant pas encore entré en vigueur, nous avons estimé qu’il était nécessaire de trouver une solution temporaire. C’est ce que nous sommes en train de négocier et c’est ce que le Conseil nous a chargé de faire, comme j’ai tenté de vous l’expliquer.
La Présidence n’a aucunement l’intention de restreindre inutilement le débat ou les informations mises à votre disposition. Premièrement, nous venons bien d’avoir un débat public, il me semble. Deuxièmement, nous serons naturellement ravis de vous tenir informés de l’évolution des négociations. Cependant, pendant les négociations, il n’est pas possible de fournir un accès continu aux documents, puisque le principe même des négociations est que les choses changent sans arrêt. J’ai néanmoins essayé de vous expliquer notre point de départ et le mandat précis que nous avons reçu du Conseil. Ainsi, nous sommes déterminés à assurer un niveau élevé d’efficacité et de fonctionnalité, tout en établissant des règles strictes en matière de sécurité juridique et en garantissant le respect des libertés civiles et des droits de l’homme. Je suis convaincue que nous y parviendrons. Et si, contre toute attente, ce n’est pas le cas, c’est simple: il n’y aura pas d’accord.
PRÉSIDENCE DE M. RAINER WIELAND Vice-président
Jacques Barrot, vice-président de la Commission. − Monsieur le Président, je veux simplement confirmer ce qu’a dit Mme la ministre qui, d’ailleurs, vient de conclure de manière très claire: si nous n’avions pas vraiment, pour l’accord durable que la Présidence devra négocier et pour lequel la Commission prêtera son concours, les assurances nécessaires pour la protection des données, il n’y aurait pas d’accord.
Cela étant, je crois qu’on doit pouvoir arriver à concilier les choses et ainsi mener une lutte antiterroriste, dans le respect, bien sûr, des grandes valeurs et des grands principes qui font que nous attachons, en Europe, beaucoup d’importance à la protection de la vie privée, d’une part, et au fait d’éviter tout espionnage de type commercial, d’autre part.
Je veux simplement dire, pour ce qui me concerne, que depuis que j’ai pris mes fonctions, j’ai évidemment pris acte du fait que le Conseil avait demandé au juge Bruguière d’aller effectuer cette mission d’enquête aux États-Unis. Le rapport Bruguière, qui date de décembre 2008, m’a été remis en janvier 2009. Ce rapport a été présenté au Parlement européen et au Conseil JAI en février 2009. C’est à partir de ce moment que la Commission s’est considérée investie des éléments essentiels pour dire que l’on pouvait en effet assurer la continuité du TFTP en attendant que, le traité de Lisbonne étant signé et le Parlement devenant colégislateur, on puisse vraiment négocier un accord durable avec toutes les garanties que Mme la ministre a évoquées et toutes les exigences de réciprocité que M. Strasser, notamment, a évoquées aussi.
Je crois que dans cette affaire, le Conseil vient d’exprimer une volonté très claire. La Commission se joint à cet avis, à cet engagement extrêmement ferme et clair du Conseil de faire en sorte que le Parlement soit bien colégislateur, le moment venu, pour l’accord durable.
Sophia in 't Veld (ALDE). – (EN) Monsieur le Président, c’est une motion de procédure. Je constate qu’une fois encore, le Conseil ne répond pas aux questions que nous lui posons. J’ai demandé pourquoi le Conseil avait attendu deux ans, jusqu’au dernier moment, pour décider de conclure cet accord et je voudrais également savoir - et nous nous satisferons d’une réponse par écrit - pourquoi les parlements nationaux ont été complètement exclus de la procédure. Enfin, je suppose, d’après votre réponse, qui était plutôt vague, que vous ne publierez pas l’avis juridique rendu par les services juridiques du Conseil.