Le Président. − J’ai reçu six propositions de résolution(1) concernant les meurtres de défenseurs des droits de l’homme en Russie (Article 122).
Heidi Hautala, auteure. − (FI) Monsieur le Président, nous devrions réellement avoir ici une pensée pour ces militants des droits de l’homme récemment assassinés dans le nord du Caucase et allumer une bougie en leur mémoire. Il faut nous souvenir que Natalia Estemirova, Zarema Sadulayeva, Alik Dzhabrailov et beaucoup d’autres, qui ont souffert et perdu la vie en défendant les droits de l’homme, méritent notre soutien à tous. Malheureusement, nous n’avons pas été en mesure de leur apporter suffisamment de soutien quand ils étaient en vie.
Il est alarmant que la Russie n’ait pas été capable de procéder à des enquêtes criminelles suffisamment rigoureuses pour élucider ces meurtres et traduire les coupables en justice. J’ai noté que l’Union européenne a fait part à la Russie de ses préoccupations concernant cette question. Toutefois, il est assez manifeste que nos efforts sont insuffisants, et il nous faudra sérieusement réfléchir à la manière dont nous pourrions contribuer au fonctionnement de l’État de droit en Russie et à la manière dont nous pourrions mettre en avant les données de ce problème au moment de négocier le nouvel accord de partenariat et de coopération avec ce pays.
Nous devons également réfléchir à la manière dont nous pourrions soutenir les défenseurs des droits de l’homme en Russie mieux que nous ne le faisons actuellement. Nous devrions discuter de la possibilité d’offrir notre protection aux personnes en danger et de la possibilité pour les institutions de l’Union de leur accorder des visas rapidement pour qu’ils puissent s’échapper de Russie où leur vie est menacée. Le groupe Verts/Alliance libre européenne pense qu’il serait important que le Parlement européen dispose d’un organisme diffusant des informations sur la situation des militants des droits de l’homme dont la vie est menacée et s’efforçant de les aider en collaboration avec les autres institutions. Il y a beaucoup de choses que nous pouvons faire. Anna Politkovskaïa a dit un jour que les pays occidentaux pouvaient faire tant de choses, mais qu’ils faisaient si peu.
(Applaudissements)
Véronique De Keyser, auteure. − Monsieur le Président, je vais prendre le peu de temps que j’ai pour préciser la position de mon groupe, qui n’a pas signé la déclaration conjointe et qui présente une résolution séparée.
Je voudrais vous dire, d’abord, que nous sommes entièrement d’accord avec la résolution conjointe en ce qui concerne Natalia Estemirova, Zarema Sadulayeva et Alik Dzhabrailov.
Nous avons été bouleversés par ces nouveaux assassinats qui, effectivement, ne sont que des assassinats parmi d’autres parmi les militants des droits de l’homme en Tchétchénie.
Nous avons demandé, dans notre résolution, exactement la même chose que dans la résolution conjointe, c’est-à-dire que nous condamnons l’attaque, que nous demandons une enquête, que nous nous préoccupons du climat de détérioration des droits de l’homme pour les militants en Russie.
Là où notre position diverge, c’est sur l’extension qui a été donnée, dans la résolution conjointe, à tous les défenseurs des droits de l’homme et à la situation dans le nord du Caucase en général. Nous pensons qu’il y a peut-être d’autres lieux pour cela – et je m’engage à le faire –, notamment dans la résolution qui précédera le Sommet Union européenne-Russie. Nous voulons que cet agenda des militants des droits de l’homme et de la défense de ces militants fasse partie de cette résolution, mais aussi de toutes les négociations que nous entreprendrons avec la Russie.
Donc, c’est simplement ici, et je le précise, un problème de timing et un problème de lieu. C’est une question politique qui doit être traitée de façon politique et pas seulement ici, aux urgences. C’est la raison pour laquelle nous avons préféré faire le distinguo mais, bien entendu, sur le fond du problème, nous sommes entièrement d’accord avec les autres groupes.
Renate Weber, auteure. − (EN) Monsieur le Président, permettez-moi de présenter à cette Assemblée quelques faits. En janvier de cette année, Stanislav Markelov, le défenseur des droits de l’homme qui représentait la journaliste assassinée Anna Politkovskaïa a été abattu en plein après-midi en plein centre de Moscou. Anastasia Baburova, une journaliste qui essayait de le protéger, a été assassinée elle aussi.
En juillet, Natalia Estemirova, célèbre militante russe des droits de l’homme et également journaliste, était retrouvée morte en Ingouchie après avoir été enlevée par des hommes armés dans la Tchétchénie voisine. Moins d’un mois plus tard, une autre militante d’ONG, Zarema Sadulayeva, ainsi que son mari étaient kidnappés et tués.
En août, le journaliste Malik Akhmedilov était abattu peu après avoir quitté son domicile au Daguestan. Cela fait six journalistes remarquables et militants des droits de l’homme tués en moins de huit mois.
Ces enlèvements et ces assassinats ne sont que la pointe de l’iceberg de la détérioration de la situation des droits de l’homme en Russie, où les voix indépendantes, comprenant des avocats, journalistes et autres militants, sont confrontées à une violence croissante, des menaces et des poursuites injustifiées.
Les violations des droits de l’homme en Russie, et notamment dans le nord du Caucase, ne peuvent plus être ignorées. Il faudrait que nous soyons bien naïfs pour croire que la superpuissance russe, qui dispose de services secrets parmi les plus puissants de la planète, est incapable de retrouver les auteurs de ces crimes et de les traduire en justice.
Nous tous, indépendamment de nos couleurs politiques, devons comprendre que l’impunité pour les attaques perpétrées contre les défenseurs des droits de l’homme va provoquer plus de violence et la montée d’une culture du non-droit. Les autorités russes doivent garantir la sécurité des personnes et la liberté de mouvement et d’expression des défenseurs des droits de l’homme, conformément à la déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme.
Bernd Posselt, auteur. – (DE) Monsieur le Président, on a un jour demandé à notre ancien plus ancien membre, Otto de Habsbourg, s’il ne regrettait pas d’être député européen plutôt qu’empereur. Il a répondu par la négative en ajoutant que s’il avait été empereur, il aurait dû appeler un imbécile «Votre Excellence», alors qu’en tant que député européen, il pouvait appeler un imbécile un imbécile. Cette histoire me revient toutes les fois qu’est soulevée ici la question des droits de l’homme.
Nous ne sommes pas un organe diplomatique, nous sommes un organe parlementaire politique. Nous pouvons dire la vérité. Comme dit le proverbe: «le poisson pourrit toujours par la tête». Il n’est pas vrai – et je voudrais remercier ici Mme Weber pour ses paroles claires – que ces événements, ces assassinats soient, d’une manière quelconque, le fait du hasard ou l’œuvre de quelque force obscure; bien plutôt, depuis l’accession de M. Poutine au pouvoir, liée à la question de la Tchétchénie et à l’explosion mystérieuse de plusieurs immeubles à Moscou, c’est une trainée de sang qui, depuis des années, nous ramène à la Tchétchénie et frappe des innocents, des civils et plus particulièrement des militants des droits de l’homme qui, comme ceux qui ont été cités – et nombre de ces personnes étaient connues de nous personnellement – ne travaillent pas seulement pour les droits humains des Tchétchènes mais aussi pour une Russie démocratique, pour une entente entre les peuples de Tchétchénie et de Russie et pour la paix dans le Caucase. Ces personnes se font assassiner l’une après l’autre.
C’est pourquoi, Madame De Keyser, il était nécessaire d’avoir ce débat de toute urgence. Nous allons nous couvrir de ridicule parce qu’une femme qui a été applaudie par cette Assemblée et nous a rendu visite ici à Strasbourg dans le cadre de son engagement pour la cause des droits de l’homme vient d’être assassinée sous nos yeux et nous, nous reporterions ce débat à une date ultérieure!
La Russie nous observe de près et elle veut voir si nous sommes capables de réagir immédiatement, et nous devons réagir sur le champ en disant très clairement ceci: mettez fin aux assassinats, aux violations des droits de l’homme et apportez la paix en Tchétchénie et en Russie, mais, avant tout, mettez un terme à la violation systématique des droits de l’homme et aux assassinats perpétrés dans des circonstances mystérieuses.
Tomasz Piotr Poręba (ECR) , auteur. – (PL) Une nouvelle fois, la question des violations des droits de l’homme en Russie figure à l’ordre du jour du Parlement européen.
À la persécution systématique des minorités ethniques et religieuses viennent s’ajouter les assassinats répétés de militants des droits de l’homme. Les journalistes et les collaborateurs d’ONG en Russie risquent leur vie chaque jour dans l’exercice de leur travail. Menaces, enlèvements, tortures, détentions arbitraires et meurtres deviennent monnaie courante. Le fait que les autorités russes ne mènent pas d’enquêtes actives sur ces crimes, qu’aucun résultat concret n’ait été obtenu et que leurs auteurs se promènent en toute liberté ne démontre pas seulement l’inefficacité complète des actions conduites par les autorités mais aussi leur consentement tacite et leur indifférence.
Le respect des droits de l’homme devrait être un élément clé des relations entre l’Union européenne et la Russie. Il est de notre devoir d’exiger de la Russie qu’elle garantisse la mise en œuvre d’enquêtes véritables et efficaces, le châtiment des auteurs et la fin des assassinats.
Cornelia Ernst, auteure. – (DE) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, en tant que nouvelle députée, permettez-moi tout d’abord de dire à quel point les questions liées aux droits de l’homme sont également d’une importante majeure pour le parti que je représente, la gauche allemande, et nous condamnons à cet égard toute violation de ces droits, quels qu’en soient les lieux ou leurs auteurs. Cela n’a rien de commun avec une quelconque ingérence dans les affaires intérieures d’un pays.
Je suis, depuis quelques années, véritablement préoccupée et scandalisée par les assassinats répétés de militants des droits de l’homme impliqués dans la situation en Tchétchénie. Natalia Estemirova, Stanislav Markelov et Zarema Sadulayeva, sont les victimes exemplaires de meurtres réellement choquants. Par conséquent, il est important qu’en tant que députés de cette Assemblée, nous nous préoccupions de cette question.
Je m’inquiète que des cas comme celui de l’assassinat d’Anna Politkovskaïa ne fassent pas l’objet d’une enquête. Si ce procès est à présent rouvert, j’espère très sincèrement que les auteurs seront trouvés et arrêtés, parce qu’autrement le risque demeure de voir plus de sang couler et d’ouvrir la porte à d’autres actes de ce genre. Nous attendons simplement que ces meurtres fassent l’objet d’une enquête immédiate et complète, que celle-ci soit conduite sans pitié pour leurs auteurs, que la Russie ne perde plus de temps mais prenne à son compte la lutte pour les droits de l’homme. Il est inconcevable que la protection des droits de l’homme condamne, pour ainsi dire, des gens à mort. Je crois également que le prochain sommet Union européenne-Russie doit aborder d’urgence ces questions et non comme un problème secondaire, mais avec toute l’attention qu’elles méritent.
Pour ma part, je m’attends également à ce que les questions des droits de l’homme fassent l’objet d’un débat honnête au sein de cette Assemblée. J’aurais préféré ne pas discuter de telles questions un jeudi après-midi, et je crois que ce thème devrait également nous concerner même lorsque nous discutons de politique d’entreprise et de commerce. Ces questions se voient souvent attribuer un rôle secondaire. C’est cela que nous voudrions changer et c’est aussi quelque chose que je tenais à dire devant vous.
Filip Kaczmarek, au nom du groupe PPE. – (PL) Monsieur le Président, dans un pays au taux de criminalité élevé, on pourrait avancer cette théorie que les décès de militants des droits de l’homme relèvent d’une coïncidence. Coïncidence, car, de manière générale, les victimes de crimes, dans ces pays, sont nombreuses. En ce 17 septembre, je dois vous rappeler à tous un triste anniversaire, à savoir le 70e anniversaire de l’invasion soviétique de la Pologne. Au cours de cette invasion, les troupes soviétiques ont assassiné au moins 21 768 citoyens polonais. Pourquoi avoir parlé de cet événement? Parce que les Russes prétendent aujourd’hui qu’il s’agissait d’un crime ordinaire, de la même manière que les meurtres de militants des droits de l’homme sont des «crimes ordinaires».
L’ampleur des meurtres perpétrés à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme en Russie est telle qu’interpréter ce phénomène comme le résultat d’un taux de «criminalité ordinaire» relève d’un non-sens complet. La théorie qui veut que ces meurtres soient l’effet d’une «coïncidence» n’est pas crédible. Il est probable que le caractère systématique de ces assassinats est lié au climat politique et social qui règne en Russie, à l’origine de la fréquence de ces meurtres. La crise morale que traverse ce pays, une tendance à banaliser la mort, la déshumanisation, le relativisme et la perte de valeurs expliquent que ce problème ne soit pas pris au sérieux. J’estime que notre résolution est équilibrée et qu’elle aidera les Russes à résoudre ce problème.
Justas Vincas Paleckis, au nom du groupe S&D. – (LT) Le groupe social-démocrate ne peut rester indifférent aux meurtres récents perpétrés contre la personne de militants des droits de l’homme en Russie. Les décès d’Anna Politkovskaïa, Natalya Estemirova, Zarema Sadulayeva et Andrei Kulagin ne doivent pas demeurer sans explication. Nous condamnons sans restriction les auteurs de ces actes barbares et déplorons qu’il règne dans certaines régions de Russie une atmosphère d’impunité et que les assassinats politiques ne fassent l’objet d’aucune enquête.
Le président russe, Dmitri Medvedev, a promis que les auteurs de ces assassinats seraient retrouvés et punis. Sa réaction a été plus ferme que celle de son prédécesseur, mais, jusqu’à présent, ce ne sont que des mots. Le temps nous dira si les autorités russes sont en mesure de respecter les engagements pris, qui sont tellement importants pour les citoyens de ce pays et la communauté internationale. À notre avis, l’évaluation, dans la proposition de résolution, des activités russes dans le nord du Caucase a outrepassé le champ d’application de cette résolution; c’est la raison pour laquelle les sociaux-démocrates ont décidé d’adopter leur propre document séparé. Les sociaux-démocrates sont persuadés que la situation des droits de l’homme en Russie pourrait véritablement s’améliorer si les consultations entre l’Union européenne et la Russie sur la question des droits de l’homme s’intensifiaient. Le Parlement européen, la Douma, les organisations civiles, sociales et des droits de l’homme dans l’Union et en Russie devraient s’impliquer activement dans ces consultations. Nous insistons sur le fait que la protection des droits de l’homme doit être longuement débattue lors du prochain sommet Union européenne-Russie. Cette question devient partie intégrante du nouvel accord entre l’Union et la Russie.
Laima Liucija Andrikienė (PPE). - (LT) Ce débat et la résolution du Parlement européen sur les meurtres de militants des droits de l’homme en Russie sont particulièrement importants, surtout en ce moment où, reportages après reportages, nous prenons connaissance des meurtres en Russie de défenseurs des droits de l’homme comme Natalya Estemirova, Alik Jabrailov, Zarema Sadulayeva et d’autres. L’Union européenne ne peut rester indifférente à l’assassinat brutal de militants des droits de l’homme. Dans nos relations avec la Russie, nous devons souligner, et nous le faisons, que les enquêtes sur ces meurtres durent trop longtemps et s’achèvent généralement sans avoir établi de culpabilité. Ce type de pratique inacceptable devient la norme en Russie, notamment en ce qui concerne les crimes commis en Tchétchénie, où l’impunité prospère. L’une de nos valeurs fondamentales est le respect des droits de l’homme, de la dignité humaine et de la vie humaine, et aucun intérêt d’ordre pragmatique ne peut être supérieur à ces valeurs. Je pense que le président russe, Dmitri Medvedev, devrait mettre un point d’honneur à s’assurer que tout est fait pour enquêter en profondeur sur les cas d’enlèvement et d’assassinat impliquant des défenseurs des droits de l’homme et pour traduire les coupables en justice.
Tunne Kelam (PPE). - (EN) Monsieur le Président, la situation des droits de l’homme en Russie a empiré. Nous demandons à présent aux autorités russes de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour garantir la protection des défenseurs des droits de l’homme. Nous savons que la chose manquante essentielle est cette volonté de faire «tout» ce qui est possible. Cela peut être fait, étant donné que le Kremlin exerce une influence décisive sur les structures du pouvoir en Russie et sur le pouvoir judiciaire. Pour cette raison, l’échec du pouvoir judiciaire russe à protéger les défenseurs des droits de l’homme invite à supposer la complicité du régime dans ces crimes.
Notre message devrait aujourd’hui s’adresser aux gouvernements de l’Union européenne et à la Commission. Tant que le Kremlin présumera que nos inquiétudes quant au sort des défenseurs des droits de l’homme restent au niveau de déclarations sans conséquences sur les relations économiques, MM. Poutine et Medvedev pourront en déduire que l’Union européenne n’a pas su tirer les leçons de l’assassinat scandaleux d’Anna Politkovskaïa.
Bogusław Sonik (PPE). – (PL) Nous sommes bien en train de discuter des violations des droits de l’homme en Russie en ce jour dont la valeur symbolique est forte. Il y a exactement 70 ans, le 17 septembre 1939, l’Armée rouge – de connivence avec Hitler – occupait un tiers de la Pologne, qui luttait alors contre l’invasion allemande. Les armées de Staline ont assassiné des milliers de Polonais, et des centaines de milliers d’autres ont été envoyés dans les camps de travail soviétiques. À Katyń, des milliers d’officiers polonais ont été massacrés sur ordre de Staline. Pour nous, le 17 septembre restera pour toujours un jour de honte pour la Russie stalinienne.
La Russie d’aujourd’hui n’est pas assez courageuse pour affronter cette horrible vérité. Son gouvernement actuel avance des justifications peu convaincantes de l’alliance passée avec Hitler. Aujourd’hui encore, Moscou refuse d’ouvrir les archives du massacre de Katyń.
L’histoire de nombreux pays est pleine d’atrocités. La maturité d’une nation se mesure à sa capacité d’affronter son passé et de dénoncer ce qui doit l’être dans son histoire. L’Allemagne d’aujourd’hui en est un exemple. C’est seulement alors que le passé cessera d’être un fardeau pour la Russie d’aujourd’hui et lui permettra d’entrer tête haute dans la communauté des nations libres et démocratiques. Alors seulement, la Russie sera en mesure, une fois pour toutes, de se débarrasser du fardeau de son passé stalinien et de cesser de s’en prendre à ses propres citoyens, lesquels risquent aujourd’hui leur vie pour défendre les libertés fondamentales et les droits de l’homme.
Nous rendons hommage aux victimes de ces assassinats. Nous ne vous oublierons pas.
Rui Tavares (GUE/NGL). – (PT) Bonsoir à tous. L’assassinat de Natalia Estemirova a suscité une grande tristesse en nous tous au sein de cette Assemblée, puisque nous avons appris son enlèvement le jour même où nous nous réunissions pour la première fois et, quelques heures plus tard, son assassinat. C’est une chose qui ne peut manquer d’émouvoir, où que l’on se trouve dans le monde. Comme l’a déjà dit ma collègue, Mme Ernst, je crois fermement que la gauche doit défendre les droits de l’homme et leurs défenseurs partout, indépendamment du pays où ils se trouvent.
Les effets de ces attaques, de ce siège contre les militants des droits de l’homme en Russie, sont très préoccupants. Il s’agit ni plus ni moins d’intimidation et cela est certainement extrêmement traumatisant pour tous ceux qui veulent défendre les droits de l’homme en Russie. C’est la première vague d’une offensive qui, plus tard, se traduira par une détérioration de la situation globale des droits de l’homme, pour ne pas parler des droits des militants eux-mêmes.
Les effets de ces assassinats sont donc imprévisibles et préoccupants. En l’absence d’une enquête judiciaire rapide et efficace et de la garantie que la sécurité des militants des droits de l’homme sera respectée, la situation peut en effet devenir extrêmement préoccupante. C’est pourquoi j’aurai grand honneur à voter en faveur de cette résolution et à relayer ses appels auprès des autorités russes pour qu’elles protègent les défenseurs des droits de l’homme.
Je viens du Portugal, de l’autre extrémité de l’Europe, et, la semaine prochaine, je me rendrai en Russie. Demain, j’irai même chercher mon visa à l’ambassade de Russie. Je crois que les relations entre l’Europe et la Russie sont de la plus haute importance et que l’Europe doit beaucoup à la Russie. La première chose que l’Europe doit à la Russie est la sincérité et la clarté dans sa défense des droits de l’homme et des libertés de nos concitoyens européens de Russie.
Eija-Riitta Korhola (PPE). - (FI) Monsieur le Président, votre langue est si belle que je me suis décidée d’essayer de vous remercier en hongrois: köszönöm! Monsieur Tavares, je voudrais apporter une réponse à vos commentaires. Le travail en faveur des droits de l’homme ne concerne pas seulement la gauche; il est aussi notre affaire, au centre-droit, et souhaitons que ceci nous encourage à coopérer. Mme Ernst a mentionné quelque chose qui est absolument exact. Nous sommes en train de débattre de cette question ici, en plénière, alors que la plupart des députés sont déjà en train de rentrer chez eux, et nous devons travailler ensemble pour faire de cette question une priorité politique.
J’ai été naguère membre de la commission des affaires étrangères et lorsque la sous-commission «droits de l’homme» a été créée, j’en ai également fait partie. Lorsque je présentais des amendements, je les soumettais parfois à la commission des affaires étrangères et mes collègues me demandaient alors pourquoi je continuais de les présenter là-bas, alors que nous disposons pour cela d’une sous-commission des droits de l’homme. Sur le moment, j’ai pensé que quelque chose n’irait pas si notre sous-commission des droits de l’homme devenait un ghetto ou si les droits de l’homme devenaient le domaine réservé d’un tel organisme. Nous devons travailler ensemble afin d’empêcher le cloisonnement de la question des droits de l’homme.
Kristian Vigenin (S&D). - (BG) Monsieur le Président, Monsieur le Commissaire, il y a quelque chose qui me dérange dans l’exposé de M. Posselt. Je voudrais souligner que le palmarès de Mme De Keyser en matière de défense des droits de l’homme ne saurait être remis en question dans un débat de cette nature. Elle a toujours fait preuve de détermination en s’engageant sur cette question au sein de cette Assemblée.
Je ne permettrai en aucun cas, et je ne pense pas qu’il soit juste de mettre en cause l’engagement du groupe S&D en matière de défense des droits de l’homme, parce que c’est aussi la façon dont nous nous sommes comportés lorsque votre groupe, Monsieur Posselt, tentait de minimiser les crimes commis à Guantanamo et le traitement infligé aux prisonniers par les troupes américaines en Iraq.
Sur la question des droits de l’homme en Russie, il se pose en effet un problème grave, nous en convenons, et la résolution que nous soumettons est suffisamment ferme et éloquente. Toutefois, nous estimons que ce Parlement doit se concentrer sur ces questions et non simplement se présenter à chaque fois avec une longue liste de problèmes dans nos relations avec la Russie, si ceux-ci restent sans effet là-bas.
À cet égard, nous enverrons en négociation à Moscou la semaine prochaine une délégation du groupe S&D qui évoquera cette question spécifique. N’utilisez pas les cas d’urgence liés aux droits de l’homme tels que celui-ci pour mettre sur la table une longue liste de questions. Ce n’est pas l’objet du débat d’aujourd’hui.
Miroslav Mikolášik (PPE). – (SK) Je voudrais exprimer ma tristesse et ma profonde inquiétude devant les événements qui se sont déroulés en juin de cette année dans la Fédération de Russie. Je suis bouleversé par les meurtres brutaux de ces militants russes, notamment Natalia Estemirova et Andrei Kulagin qui, avec d’autres, s’étaient engagés à soutenir les droits de l’homme et défendaient la vérité et la justice. Tout doit être tenté pour arrêter et punir les assassins. J’accueille volontiers et soutiens les mesures qui doivent être prises afin d’élucider ces crimes.
En août 2008, il y a eu également violation des accords internationaux quand, durant le conflit entre la Russie et la Géorgie, les forces armées russes ont attaqué des agglomérations et négligé de protéger la population civile de la violation de leurs droits par des combattants armés venus de l’Ossétie du Sud occuper un territoire qui de facto passait sous contrôle russe. Le gouvernement russe doit déclarer sans équivoque que les violations des droits de l’homme ne seront pas tolérées.
Charles Tannock (ECR). - (EN) Monsieur le Président, une culture de l’impunité pénale est en train de se développer en Russie en ce qui concerne les mauvais traitements infligés aux militants des droits de l’homme. Les journalistes qui osent défier le point de vue officiel subissent des harcèlements; les minorités ethniques sont, d’une façon disproportionnée, victimes d’infractions violentes qui semblent rester non résolues; les militants réclamant plus de libertés sont, au mieux, marginalisés et, au pire, réduits au silence par la force.
Il est difficile de voir précisément d’où provient la menace contre les défenseurs des droits de l’homme en Russie mais, maintes et maintes fois, nous observons des traitements injustifiés qui restent impunis et un comportement apathique de la part des autorités judiciaires.
La Russie s’est habituée aux tergiversations de l’Union européenne. Cela semble évident à la manière dont l’Union a réagi aux pressions exercées par la Russie sur l’Ukraine ou à l’invasion et l’occupation du territoire géorgien souverain par la Russie l’été dernier.
En clair, il y a des questions stratégiques vitales qui sont en jeu dans les bonnes relations que l’Union s’efforce d’entretenir avec la Russie, mais nous ne pouvons permettre que ces questions effacent l’obligation qui est la nôtre de parler en faveur de nos libertés fondamentales et des valeurs communes que nous partageons en Europe, des libertés et valeurs que le peuple russe lui-même devrait pouvoir partager pleinement dans la paix et la sécurité.
Krisztina Morvai (NI). – (HU) Depuis 25 ans, je suis engagée professionnellement dans la protection des droits de l’homme. C’est pourquoi, en particulier en tant qu’avocate, j’éprouve une profonde compassion en pensant à mes collègues qui ont perdu la vie dans l’exercice de cette profession tout à fait merveilleuse. À cet égard, je voudrais également exprimer toute ma sympathie à l’égard de leurs familles et proches.
Quelle serait la bonne ligne de conduite à adopter en ce moment précis? Exiger une enquête immédiate et approfondie conduite par les services officiels ad hoc. Je voudrais que ce Parlement jouisse de la confiance et de l’autorité morale qui lui permettraient de le faire. Mais je crains que ce ne soit pas le cas. Pour quelle raison? Parce que de telles demandes ne sont faites que pour des États extérieurs à l’Union européenne. Il en va autrement quand les droits de l’homme sont bafoués grossièrement dans un État membre de l’Union européenne, comme cela s’est produit dans mon pays, la Hongrie, où des personnes ont été blessées au visage lors d’une manifestation de masse de plusieurs milliers de personnes organisée par le parti de l’homme qui préside actuellement cette séance, le vice-président Pál Schmitt, afin de commémorer l’anniversaire de la révolution de 1956 et de la lutte pour la liberté. Ce Parlement n’a mené aucune enquête dans cette affaire et la situation de crise qui prévaut depuis lors.
Je crains que tant qu’il n’y aura pas d’enquête et tant que quelqu’un qui a été membre d’un gouvernement qui a autorisé à tirer sur la foule pourra être vice-président de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures du Parlement européen, nous ne puissions bénéficier d’aucune réelle confiance ni d’aucune autorité morale dans aucun pays pour demander que ce type d’enquête soit mené dans un pays extérieur à l’Union européenne. C’est pourquoi je voudrais vous demander de proposer et d’exiger une enquête immédiate sur les violations des droits de l’homme en Hongrie. Je vous remercie.
Cristian Dan Preda (PPE). – (RO) Je voudrais dire, avant toute chose, que je suis déçu, parce que pour parler de la crise du lait, l’hémicycle était plein, et maintenant qu’il est question des droits de l’homme, je ne pense pas qu’il y ait plus de 40 d’entre nous qui soient restés ici. C’est regrettable. Je ne suis pas en train de dire que la crise du lait n’est pas importante, mais une question comme celle des droits de l’homme est d’une importance politique majeure pour chacun d’entre nous.
Je voudrais dire également que je trouve inacceptable l’idée même qu’en cette année où, comme vous le savez, plusieurs pays d’Europe centrale et orientale célèbrent le 20e anniversaire de la chute du communisme, une puissance qui est juste à notre porte et qui était l’initiatrice de ces régimes communistes, fasse preuve d’autant d’indifférence à l’égard de crimes commis contre des militants des droits de l’homme. Je crois que la rupture avec le totalitarisme doit être clairement affirmée par chacun d’entre nous.
Meglena Kuneva, membre de la Commission. − (EN) Monsieur le Président, le débat d’aujourd’hui sur la situation des défenseurs des droits de l’homme en Russie vient en temps voulu et est très approprié. La vague récente de violence qui s’est abattue sur les défenseurs des droits de l’homme, a mis en lumière les dangers sérieux auxquels ils sont exposés dans l’exercice de leur mission. Nombreux sont ceux qui ont payé le prix ultime pour avoir révélé ces violations des droits de l’homme. Nous rendons hommage à tous ceux qui ont perdu la vie et à ceux qui poursuivent leur travail dans de telles conditions.
Une grande partie des violences exercées contre les défenseurs des droits de l’homme ont lieu dans le nord du Caucase, dans un climat d’instabilité croissante. La Commission connaît nombre de ces personnes. Il s’agit de partenaires hautement respectés dans la mise en place de projets concernant les droits de l’homme. Des civils innocents, des membres des forces de l’ordre et des fonctionnaires gouvernementaux ont perdu la vie dans le cadre des conflits en cours dans la région.
Les violences contre les défenseurs des droits de l’homme ne se limitent pas au nord du Caucase. Il y a des rapports de militants, de juristes et de journalistes indépendants qui, dans l’ensemble de la Fédération de Russie, sont soumis à la violence, au harcèlement et à l’intimidation. L’Union européenne doit continuer à condamner ces violences et exiger de la Russie qu’elle respecte les engagements qu’elle a pris en tant que membre des Nations unies, de l’OSCE et du Conseil de l’Europe.
Il est essentiel que les attaques et les assassinats brutaux perpétrés contre des militants de la société civile fassent l’objet de véritables enquêtes et que leurs auteurs soient rapidement identifiés et punis. Ce n’est qu’en lançant des poursuites efficaces et légales contre les auteurs de ces assassinats que l’on parviendra à dissiper le climat de peur et d’impunité qui prédomine.
Le président Medvedev a dénoncé ce qu’il a qualifié de «nihilisme juridique», attitude qui prévaut actuellement en Russie. L’Union se tient prête à soutenir la Russie dans la poursuite de ses réformes du système judiciaire. L’Union européenne apprécie à sa juste valeur l’occasion qui lui a été donnée de discuter avec les autorités russes de ses préoccupations concernant les droits de l’homme. Nous nous félicitons de l’attitude plus ouverte adoptée par le président Medvedev lors des discussions avec l’Union sur ces questions.
Le prochain sommet Union européenne-Russie sera encore l’occasion de poursuivre ces discussions. Il devra être suivi d’échanges entre experts. Des consultations UE-Russie régulières concernant les droits de l’homme permettront d’élargir la portée de ces discussions et la gamme des interlocuteurs avec lesquels nous évoquons les questions de droits de l’homme.
La sécurité des défenseurs des droits de l’homme doit être notre préoccupation première. Nous exhortons les autorités russes à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour s’assurer que ceux qui travaillent à faire la lumière sur les violations des droits de l’homme puissent poursuivre leur mission sans craindre la violence ou l’intimidation.