La Présidente. - L’ordre du jour appelle le rapport de M. Szájer, au nom de la commission des affaires juridiques, sur le pouvoir de délégation législative (COM(2009)0673 – 2010/2021(INI)) (A7-0110/2010).
József Szájer, rapporteur. – (HU) Madame la Présidente, Monsieur Šefčovič, de nombreux orateurs commencent leur discours au Parlement en disant que leur sujet est important, très important, voire parmi les plus importants. Moi aussi, je tiens à le dire, mais à bien plus juste titre que beaucoup d’autres, puisque le sujet dont nous discutons à présent, c’est-à-dire le pouvoir de délégation législative du Parlement à la Commission, est peut-être l’innovation la plus importante, quoique fréquemment négligée, du traité de Lisbonne.
Ceux qui ont critiqué le traité de Lisbonne ont parlé d’un déficit démocratique. Mesdames et Messieurs, je voudrais dire que cette modification, à savoir la garantie du pouvoir de délégation législative du Parlement, constitue l’une des extensions les plus significatives de la compétence du Parlement. Elle signifie que les représentants élus directement par les citoyens seront désormais en mesure, au Parlement et en vertu de leurs pouvoirs législatifs, de superviser et d’opposer leur veto aux résolutions et décisions d’exécution présentées par la Commission européenne. En d’autres termes, cet élément du traité de Lisbonne, souvent mentionné dans le cadre de l’extension des pouvoirs du Parlement, à savoir le fait que les sujets traités par la procédure de codécision ont considérablement augmenté en nombre et que les domaines dans lesquels le Parlement est habilité à participer se sont étendus, représente, avec la question du pouvoir de délégation législative du Parlement, une expansion non seulement quantitative, mais aussi une importante expansion qualitative. Désormais, en d’autres termes, à la suite d’une longue lutte et d’un long combat livrés durant de nombreuses années, et qui continuent d’être livrés par les députés du Parlement européen, nous sommes assurés que les décisions prises par la Commission européenne et qui ne relèvent pas de sa compétence propre, mais sont adoptées par le biais de pouvoirs législatifs délégués, seront supervisées par le Parlement. Beaucoup diront bien sûr qu’officiellement, cette supervision existait déjà. En un sens, ceci est vrai, mais avec des délais et dans des circonstances, et moyennant une coopération législative et interinstitutionnelle qui ne permettaient pas un contrôle efficace. Je voudrais également attirer l’attention sur le fait que cette nouvelle possibilité, à savoir l’article 290 du traité de Lisbonne, transformera également les travaux du Parlement au cours des prochaines années, en particulier si nous, membres du Parlement, prenons au sérieux ces pouvoirs et si nous sommes véritablement en mesure de prendre des décisions sur ces questions.
Si nous voulons que le monde extérieur et les personnes non spécialisées dans ce domaine comprennent également ce que tout cela signifie, puisqu’il s’agit d’une question très complexe techniquement, qui concerne pourtant une institution démocratique et sert à éliminer le prétendu déficit démocratique en Europe, nous devons souligner les points suivants: cela signifie que le Parlement et le Conseil, qui sont les deux pouvoirs législatifs de l’Union européenne, ne peuvent pas de leur propre chef traiter chaque point de détail. Le Parlement se réunit tous les mois, et il existe parfois des circonstances dans lesquelles, comme maintenant, nous siégeons, mais nous ne pouvons pas voter, même si le Parlement doit après tout superviser les questions que le Conseil ou la Commission traitent en vertu de la délégation législative. Il sera dorénavant possible de le faire.
Dans mon rapport, je me suis efforcé de préciser que le Parlement insiste sur ces droits. Nous n’accepterons aucune obligation supplémentaire qui aille au-delà de ce qui est prévu dans le traité. Nous ne l’accepterons pas car nous entendons exercer pleinement nos droits, et je pense qu’en conséquence, la démocratie européenne progressera. Si nous voulons procéder ainsi, il sera bien sûr nécessaire de coopérer étroitement avec la Commission et le Conseil, mais nous ne devons pas oublier que désormais la compétence incombe aux législateurs, et donc au Parlement et au Conseil. Je tiens à remercier tout le monde, tous mes collègues, pour leur coopération sur cette question complexe, et souhaite également que le Parlement, à l’avenir, tire pleinement parti de ses nouveaux pouvoirs.
Maroš Šefčovič, vice-président de la Commission. – (EN) Madame la Présidente, je voudrais commencer par remercier M. Szájer pour son rapport de très haute qualité, parce que nous apprécions beaucoup, à la Commission, le soutien qu’a évoqué le Parlement en ce qui concerne l’approche horizontale des actes délégués.
Le législateur est tout à fait libre, bien entendu, de réglementer toutes les questions liées aux actes délégués dans chaque acte de base, mais certaines lignes directrices sont nécessaires afin d’éviter une approche fragmentaire.
Tel était l’objet de la communication que la Commission a déjà émise au mois de décembre pour indiquer au législateur quel serait le type d’action privilégié en vue d’adopter une bonne approche pratique de la future législation.
Je tiens à souligner que la Commission soutient fermement l’idée d’une entente commune, ou même d’un accord interinstitutionnel entre les trois institutions à propos des actes délégués, car cela apportera l’ordre nécessaire à l’élaboration de la législation.
Sur le fond, je me contenterai de rappeler que la Commission accueille très favorablement ce rapport. Nous pouvons être en désaccord sur certaines questions, mais nos objectifs sont les mêmes. Nous voulons voir de la précision, de l’efficacité, de la transparence, ainsi qu’un équilibre clair et équitable du pouvoir.
Si vous me permettez d’être un peu plus précis, je formulerai simplement quelques commentaires très brefs au sujet de certains éléments du rapport.
En ce qui concerne le caractère limitatif de l’article 290, et notamment de son deuxième paragraphe, nous avons ici une légère divergence d’opinion pour ce qui est des moyens de contrôle du législateur sur les actes délégués, mais nous ne tenons pas à entrer dans une controverse juridique, car ce que nous pensons, c’est qu’il est très important de rechercher des solutions pratiques concernant la législation spécifique.
En ce qui concerne la durée de la délégation de pouvoir, nous nous félicitons de l’idée d’une tacite reconduction telle qu’elle est exprimée dans le rapport, et nous la soutenons, car nous l’avons trouvée très constructive et nous pouvons dire que des solutions de cette nature ont déjà été trouvées dans plusieurs dossiers législatifs.
J’ai un autre commentaire à formuler, à propos de la durée du droit d’opposition. Ici encore, je dirais que nous jouons la même partition, parce que nous partageons aussi dans une large mesure l’avis du rapporteur en faveur d’une durée standard de deux mois, avec possibilité de prolongation pour deux mois supplémentaires, qui pourrait être décidée dans le cadre d’une entente entre nos trois institutions, entente à laquelle, espérons-le, nous parviendrons à l’avenir. Je pense que nous avons déjà vu environ 10 exemples positifs de la manière dont cela a été appliqué dans les travaux législatifs actuels.
En ce qui concerne la procédure d’urgence, nous avons déjà eu, dans le passé, quelques exemples clairs montrant que certains problèmes concernant la sécurité alimentaire ou la sécurité des jouets, par exemple, exigent parfois une procédure très urgente et, par conséquent, nous pensons que nous devons trouver quelque chose d’encore plus urgent que la proposition d’approbation précoce avancée par le rapporteur.
Si vous me permettez de conclure sur l’harmonisation, car ce point est très important pour le Parlement, là encore, nous préconisons l’approche pragmatique, parce que ce Parlement, conjointement avec la Commission, a déjà accompli un travail considérable en ce qui concerne l’harmonisation de plus de 250 actes législatifs de base qui ont été harmonisés dans le cadre de l’approche pragmatique.
Maintenant, nous pensons que la priorité doit aller aux domaines dans lesquels nous ne nous sommes pas conformés, jusqu’à présent, à la procédure réglementaire avec contrôle avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne. Je pense que nous devrions nous concentrer sur ces domaines. Encore une fois, cela va représenter une somme énorme de travail, mais nous réfléchissons déjà à la manière dont nous pouvons l’aborder de la façon la plus pragmatique et la plus souple possible.
Jo Leinen, rapporteur pour avis de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire. – (DE) Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, il y a longtemps que le Parlement européen attendait ce moment, à savoir celui où le Parlement serait sur un pied d’égalité avec le Conseil en ce qui concerne le contrôle de la délégation législative. Pour illustrer ce point: en 2008, il y a eu 6 000 actes délégués, en d’autres termes, une montagne de normes, qui ont été transformées en une sorte de législation secondaire par la Commission et l’ancienne procédure de comitologie. Le Parlement avait très peu de droits dans le cadre de cette procédure. Nous étions tenus informés, mais nous n’étions pas colégislateurs. À présent, le traité de Lisbonne a changé ce point.
En ce qui concerne le contrôle des actes délégués, nous sommes sur un pied d’égalité avec le Conseil, et nous entendons aussi tirer pleinement parti de ce statut d’égalité. Cela veut dire, Monsieur le Commissaire, que lorsque vous faites valoir que la procédure d’urgence est possible, alors il faut aussi que nous recevions des informations à un stade aussi précoce que possible. Nous souhaitons recevoir ces informations aussitôt que le Conseil les reçoit.
Carlos Coelho, au nom du groupe PPE. – (PT) Je pense qu’il n’est que juste de commencer par féliciter M. Szájer pour l’excellent rapport qu’il nous a présenté. Comme il a été dit à juste titre, le traité de Lisbonne renforce les pouvoirs du Parlement européen et introduit des règles destinées à renforcer le contrôle démocratique. Par conséquent, je pense que le Parlement mérite d’être félicité deux fois: non seulement pour l’excellent rapport de M. Szájer, que je viens de mentionner, mais aussi parce que les nouvelles règles abolissent l’ancien système de comitologie, que nous avons si souvent critiqué dans cette Assemblée.
Nous avons maintenant l’article 290 du traité de Lisbonne, et je note que le rapport de M. Szájer suggère un certain nombre de méthodes de travail protégeant les prérogatives du Parlement. Grâce à cette nouvelle disposition, le Parlement peut se concentrer sur les actes législatifs essentiels, et donner à la Commission une marge de manœuvre pour finaliser les actes législatifs non essentiels dans les limites fixées par le législateur. Comme M. Leinen l’a fort justement observé, nous sommes maintenant sur un pied d’égalité avec le Conseil et, par conséquent, le Parlement ne se trouve pas en position d’infériorité.
Madame la Présidente, je voudrais mettre en lumière certains aspects du rapport de M. Szájer qui me paraissent particulièrement importants. Le premier est l’idée selon laquelle nous rejetons toutes les dispositions qui imposent au législateur des obligations supplémentaires à celles déjà incluses dans l’article 290. Deuxièmement, la Commission doit assurer la transmission rapide et continue des informations et des documents pertinents. Troisièmement, les périodes ne devraient commencer qu’une fois que toutes les versions linguistiques – je dis bien toutes les versions linguistiques – ont été reçues. Le dernier point est le fait que les périodes d’interruption des activités du Parlement doivent être prises en considération.
Eva Lichtenberger, au nom du groupe des Verts/ALE. – (DE) Madame la Présidente, ces problèmes structurels, souvent sous-estimés, concernant les relations au sein du triangle institutionnel ont été très bien résumés dans le rapport de M. Szájer. La coopération a été extrêmement constructive, et je tiens également à exprimer mes sincères remerciements pour celle-ci.
Par le traité de Lisbonne, nous avons créé de nouvelles relations, et il ne faut pas que ces nouvelles relations soient à nouveau compromises de manière insidieuse. C’est effectivement, à cet égard, l’aspect essentiel. Le but sous-jacent était de placer le Parlement européen sur un pied d’égalité avec le Conseil, y compris en ce qui concerne les actes délégués, et de faire en sorte, d’une part, que cela soit faisable et, d’autre part, que cela puisse être garanti lors de la procédure.
Les points absolument essentiels à nos yeux sont donc que les conditions appropriées soient créées, et par exemple que nous ayons un accès facile aux documents, en temps utile, afin de prendre les décisions nécessaires et, d’autre part, qu’aucune procédure ne soit utilisée sur la base d’une «entente commune», mais que nous ayons plutôt des accords fixes et ne pouvant pas être soumis à l’arbitraire politique, ou à l’agenda politique du jour.
Pour ce faire, nous avons besoin de règles fermes et solides, grâce auxquelles nous pourrons protéger les droits du Parlement dans la pratique au lieu de nous contenter d’en prendre bonne note dans la théorie. Je vous remercie, Monsieur Szájer. Ce fut une excellente collaboration, et j’espère que nous pourrons également la mettre à profit pour réaliser ce que nous devons réaliser pour nos collègues députés.
William (The Earl of) Dartmouth, au nom du groupe EFD. – (EN) Madame la Présidente, le rapporteur a bien raison d’évoquer le déficit démocratique. La construction élitiste qu’est l’Union européenne présente un déficit démocratique qui est allé en augmentant, s’accroît toujours et, après le traité de Lisbonne, va encore s’accroître. Je dois dire que je suis stupéfait que le rapporteur, quelle que soit son éloquence, considère l’article 290 comme une solution.
Notre interprétation de l’article 290 est que celui-ci donne à la Commission la possibilité de compléter ou de modifier la législation. Cette possibilité recouvre un éventail de grande envergure et très large, ouvert à des interprétations presque illimitées. Nous estimons que les garanties contre une utilisation abusive des pouvoirs ainsi délégués à la Commission sont nettement insuffisantes. Peut-être le rapporteur commentera-t-il dans sa réponse les raisons pour lesquelles il estime celles-ci suffisantes. Cela équivaut donc à un nouveau transfert de pouvoir du Parlement élu à la Commission non élue, quoi qu’en dise le traité de Lisbonne.
Nous avons toujours soutenu, et continuons de soutenir, que le traité de Lisbonne manque de légitimité démocratique en grande partie parce qu’un référendum a été promis au Royaume-Uni par les trois partis de l’establishment politique, et que les trois partis traditionnels sont spectaculairement revenus sur cette promesse. L’article 290 est donc un produit de l’illégitime traité de Lisbonne. Il accroît le déficit démocratique – je serais intéressé d’entendre de la bouche du rapporteur en quoi cela n’est pas le cas – et il convient donc de s’y opposer.
Hans-Peter Martin (NI). – (DE) Madame la Présidente, en tant que pro-européen fervent, j’étais opposé au traité de Lisbonne, précisément parce qu’il rend possible le type d’arguments que nous venons d’entendre, et précisément parce qu’il n’a pas créé la clarté explicite que je souhaite avant toutes choses pour les générations futures. Je suis cependant réaliste, et je dirais que nous devons maintenant vivre avec ce traité. Il est très important de réaffirmer une fois de plus expressément que cet article, l’article 290, peut être interprété comme disant que non seulement le Conseil, mais aussi le Parlement, peuvent abroger à eux seuls les délégations concernées, de manière relativement simple. Il convient de nous en souvenir encore et encore.
Bien entendu, ce que M. Leinen a dit est également vrai, à savoir que nous avons déjà, actuellement, des milliers d’actes législatifs qui occupent une zone grise en termes de compréhension, et qui, à leur tour, apportent en permanence de l’eau au moulin des anti-européens, des opposants à un projet européen, à une Union européenne qui devrait fonctionner dans les domaines où nous avons cruellement besoin d’elle. Encore une fois, cela a beaucoup à voir avec la transparence. Il me semble donc très important que dans le paragraphe 10, il soit suggéré que les modalités de la transmission de documents, entre autres, soient clarifiées de manière plus explicite.
Bon nombre d’entre nous connaissent le «Freedom of Information Act», et bon nombre d’entre nous ont l’expérience de la manière dont les choses se pratiquent aux États-Unis. Pourquoi donc ne faisons-nous pas tout simplement un «copier-coller», et ne permettons-nous pas aux citoyens – ainsi qu’à nous-mêmes, au Parlement – d’obtenir les documents pertinents de façon indépendante, et non à titre de faveur et au prix d’interventions massives de la part des groupes politiques? Pourquoi ne pas en faire un droit, étant donné que nous avons déjà pris le grand risque d’avoir des milliers d’actes législatifs délégués? Sur ce, je dirai: poursuivez votre bon travail, nous serons des partenaires constructifs en vue de révolutionner la démocratie.
Silvia-Adriana Ţicău (S&D). – (RO) Madame la Présidente, Monsieur le Commissaire, en ce qui concerne le processus de délégation de pouvoir exécutif à la Commission, le traité de Lisbonne dit quelque chose de nouveau à ce sujet. En effet, l’article 290 se réfère précisément à cette question. Les actes délégués sont effectivement des actes généraux qui peuvent modifier les aspects superflus d’un acte législatif de base, en conférant un mandat de délégation de pouvoir exécutif à la Commission.
En pratique, cela permet de définir un mandat, avec la durée de la délégation, le délai dans lequel le Parlement et le Conseil peuvent formuler des objections, ainsi que les conditions de révocation du mandat. Le Parlement et le Conseil exercent un contrôle, mais seulement après l’adoption des actes délégués. Les actes délégués peuvent également être publiés au cours du délai dans lequel le Parlement européen et le Conseil sont habilités à soulever des objections. Toutefois, je vous demande, Monsieur le Commissaire, de garantir également une plus grande transparence au cours du processus d’élaboration des actes délégués.
Maroš Šefčovič, vice-président de la Commission. – (EN) Madame la Présidente, permettez-moi de réagir aux commentaires des députés. Je suis absolument d’accord avec M. Leinen pour dire que le traité de Lisbonne a apporté des changements énormes. Ce fait a été souligné par le rapporteur, M. Szájer. Je tiens à vous assurer que nous en sommes pleinement conscients et que nous aurons recours à la procédure avec le plus grand respect pour le législateur, car c’est très important pour nos relations mutuelles et pour la qualité de notre coopération.
Pour ce qui est de l’urgence et des procédures d’urgence, je tiens à assurer chacun d’entre vous que nous allons les utiliser uniquement dans des cas extrêmes et exceptionnels. Nous savons que, si nous abusions de cet instrument, nous aurions une relation très difficile, et ce n’est certainement pas notre intention.
En ce qui concerne les commentaires de M. Coelho et Mme Lichtenberger, je tiens également à vous assurer que nous ferons de notre mieux pour garantir, et vous fournir, une transcription rapide de tous les documents en même temps que le Conseil, et avec toutes les traductions nécessaires. Nous savons que le traité de Lisbonne introduit ce changement très important qui veut que, pour ce qui est des questions législatives ou financières, le Parlement européen se trouve strictement sur le même pied que le Conseil.
En outre, nous prévoyons de développer un nouveau type de coopération par lequel le Parlement européen participerait aux travaux préparatoires des actes délégués, et nous souhaitons le faire sur un terrain très solide. Vous trouverez donc également l’expression de cette nouvelle relation dans l’accord-cadre que nous sommes en train de négocier entre la Commission et le Parlement européen.
Quant aux commentaires du comte de Dartmouth et de M. Martin concernant les pouvoirs illimités que cet article 290 conférerait à la Commission, je ne pense pas qu’ils soient vraiment exacts, parce que c’est vous, le législateur, qui déciderez (ou non) de déléguer le pouvoir à la Commission. C’est vous, le législateur, qui aurez la possibilité de révoquer ce pouvoir ou de vous opposer aux propositions que fera la Commission. Je ne peux donc pas accepter que nous entrions dans une zone grise, car je pense que les pouvoirs du législateur sont très clairement définis dans le traité, et la Commission respectera bien entendu ce point.
József Szájer, rapporteur. – (HU) Je tiens à remercier mes collègues pour ce débat, la rédaction de ce rapport ayant été rendue possible par la coopération très étroite entre les commissions – et je voudrais mentionner en particulier la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire, qui aura de nombreuses tâches similaires dans la période à venir – et entre les partis politiques. Je voudrais également ajouter, mes chers collègues, qu’il s’agit d’une lutte. Une lutte avec la Commission, une lutte avec le Conseil, puisqu’il s’agit d’une lutte pour nos droits. Ce rapport consiste à affirmer clairement que ce sont nos droits, et que nous insistons sur ces droits. Il est beaucoup plus facile de le faire dans une situation où les commissions ainsi que les collègues des autres partis se tiennent à mes côtés, pour faire comprendre à nos institutions partenaires que le Parlement insiste de façon résolue sur ces questions. Dans le même temps, afin d’être en mesure d’exercer efficacement ce droit, je prends les paroles de M. Šefčovič comme un encouragement indiquant que l’harmonisation générale peut s’accélérer au cours des prochains mois, et que nous pouvons effectivement étendre ces droits aussi largement que possible. Nous considérons que c’est surtout important pour les domaines dans lesquels la codécision n’existait pas auparavant.
Un autre aspect capital, que mes collègues ont également mentionné ici, est l’importance que revêt l’accès à l’information. Cet accès doit être stipulé dans le cadre d’un accord interinstitutionnel, et des discussions sont en cours avec la Commission et le Conseil à cet égard. Toutefois, nous aimerions savoir ce que fait le Conseil, et quel type de consultations il mène sur ces questions. En ce qui concerne la question de savoir si nos droits ont été élargis ou réduits, Mesdames et Messieurs, je vous invite à lire le rapport et à examiner la législation. Je ne peux interpréter cette dernière autrement qu’en disant que nos droits se sont étendus. Jusqu’à présent, nous n’avions pas notre mot à dire sur ce qui arrivait aux pouvoirs que nous avions délégués. Dans la pratique, le Parlement ne s’est pas vu attribuer de rôle dans ce processus. On nous a écoutés par politesse, mais les délais étaient si brefs que le Parlement n’a même pas siégé durant cette période. Maintenant, par ailleurs, nous pouvons opposer notre veto à ces décisions ou les abroger, sans même être tenus d’indiquer nos raisons: en d’autres termes, il s’agit assurément d’une extension des droits. Nous détenons le pouvoir législatif, et nous déléguons ce pouvoir à la Commission. Par conséquent, je ne peux considérer cela autrement que comme une extension de nos droits. Chers collègues, c’est maintenant à nous, et à nous seuls, qu’il revient de décider ou non d’exercer ces droits à l’avenir.
La Présidente. – Le débat est clos.
Le vote aura lieu lors de la prochaine session plénière à Bruxelles.
Déclarations écrites (article 149)
Raffaele Baldassarre (PPE), par écrit. – (EN) Tout d’abord, je tiens à remercier M. Szájer pour le travail remarquable qu’il a effectué en si peu de temps. Les actes délégués seront d’une importance primordiale pour le droit de l’Union et l’équilibre interinstitutionnel au sein de l’UE. Il est par conséquent fondamental qu’ils soient élaborés et décidés d’une façon totalement transparente, qui permette effectivement au Parlement et au Conseil de contrôler démocratiquement l’exercice du pouvoir délégué à la Commission. Dans cette mesure, comme l’affirme le rapport Szájer, certaines questions revêtiront une importance cruciale et exigeront un engagement plus fort de notre part. Il s’agit, entre autres, de la possibilité pour le Parlement européen de révoquer la délégation à tout moment, et de s’assurer que le Parlement et le Conseil se voient conférer les mêmes droits concernant leur participation au processus de délégation. Enfin, je tiens à souligner qu’il devrait être prioritaire, pour la Commission, de présenter toutes les propositions législatives nécessaires pour adapter l’acquis aux dispositions des articles 290 et 291, y compris l’acquis relatif aux domaines politiques qui, en vertu du traité de Lisbonne, relèvent désormais de la procédure de codécision.
Zita Gurmai (S&D), par écrit. – (EN) Je me félicite vivement des résultats du rapport de M. Szájer. La définition du nouveau système législatif est une question difficile et complexe. Je suis convaincue que le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) et, en particulier, ses articles 290 et 291, renforcent le caractère démocratique de l’Union et rationalisent son ordre juridique. L’introduction du nouveau concept d’actes législatifs a de lourdes conséquences. Le rapport met l’accent sur les légères différences entre les principaux colégislateurs, les compétences et l’ordre du jour détaillé de leur coopération. La vraie question est la suivante: dans l’éventualité où la Commission européenne recevrait davantage de compétences législatives et des autorités législatives plus étendues, ce qui signifierait un accroissement immédiat de son importance communautaire, quel type de méthodes de contrôle devrait être introduites par le Conseil et le Parlement européen? Le nouveau cadre législatif du TFUE a mis les outils en place, mais il n’y a pas encore eu d’expérience pratique de leur adaptation au niveau communautaire. Enfin, j’exhorte les colégislateurs à conclure un accord interinstitutionnel le plus tôt possible entre le Parlement, le Conseil et la Commission quant à l’application de l’article 290, car nous avons besoin de toute urgence d’une transparence accrue.
Rafał Trzaskowski (PPE), par écrit. – (PL) La procédure de délégation, même si elle reste à l’arrière-plan, est une transition très importante en termes de qualité mise en place par le traité de Lisbonne. Elle doit être traitée comme un accomplissement du traité, sans lequel la position du Parlement ne sera pas pleinement consolidée, par rapport aux autres institutions, dans le cadre du processus décisionnel. En effet, ce n’est que par cette procédure que nous obtiendrons un pouvoir législatif complet, et que nous acquerrons un rôle dans le processus de mise en œuvre de tout acte législatif. Nous connaissons bien la frustration associée à un laborieux processus de négociation avec le Conseil dans le cadre de la procédure de codécision, et en cas de décisions dont la mise en œuvre va à l’encontre de l’accord interinstitutionnel. Jusqu’à présent, la «comitologie» reflétait le manque de confiance des États membres envers la Commission, alors qu’à présent, le rôle du Parlement dans la mise en œuvre d’un acte juridique confère au processus une plus grande légitimité. Le Parlement, et, indirectement, les citoyens de l’Union européenne, vont se trouver plus près du processus d’adoption du droit communautaire, et c’est ainsi que nous devrions considérer la procédure de délégation. Toutefois, pour que cela ait un sens, le Parlement doit avoir pleinement accès à l’information et, en cela, je suis pleinement d’accord avec les autres participants à ce débat.
Zbigniew Ziobro (ECR), par écrit. – (PL) L’instauration de la possibilité de délégation législative vise à faire en sorte que la législation, et en particulier la législation de nature technique, soit complétée et actualisée de manière plus efficace, sans qu’il soit nécessaire d’instituer à chaque fois une procédure législative complète. La délégation doit donc être considérée comme un outil pour améliorer le processus d’élaboration des normes au niveau de l’Union européenne.
Dans le même temps, il est essentiel d’assurer un contrôle approprié de l’utilisation des pouvoirs de réglementation conférés à la Commission. Le Parlement et le Conseil doivent, entre autres, disposer d’un temps suffisant pour exercer le droit de s’opposer à la réglementation prévue. Mais surtout, ils doivent bénéficier d’un accès adéquat aux documents, aux analyses et aux contributions élaborés au cours des travaux préparatoires sur les projets d’actes délégués. C’est seulement ainsi que le pouvoir de la Commission de publier des actes délégués sera vraiment utile à l’amélioration du processus législatif dans l’Union tout en conservant, dans le même temps, le contrôle essentiel sur les activités de la Commission et la transparence de ces activités. Il est également essentiel de mettre au point des mécanismes appropriés de coopération entre le Parlement et la Commission afin que le Parlement soit tenu informé des travaux préparatoires en cours, et qu’il soit en mesure d’acquérir une bonne connaissance de la nature des questions examinées.
La résolution sur le pouvoir de délégation législative, qui est le résultat d’un compromis entre tous les groupes politiques, présente correctement les questions ci-dessus et mérite le soutien du Parlement.