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Procédure : 2010/3018(RSP)
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Textes déposés :

RC-B7-0023/2011

Débats :

PV 18/01/2011 - 16
CRE 18/01/2011 - 16

Votes :

PV 19/01/2011 - 6.12

Textes adoptés :

P7_TA(2011)0018

Compte rendu in extenso des débats
Mardi 18 janvier 2011 - Strasbourg Edition JO

16. Situation en Haïti un an après le séisme: aide humanitaire et reconstruction (débat)
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Procès-verbal
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  La Présidente. – Avant d’entamer nos travaux, c’est avec une grande tristesse que je vous annonce qu’un soldat italien a été tué, et un autre grièvement blessé, lors d’une fusillade aujourd’hui en Afghanistan. Nous présentons nos condoléances à la famille de la victime, Luca Sanna.

L’ordre du jour appelle la déclaration de la Commission sur la situation en Haïti un an après le séisme: aide humanitaire et reconstruction.

 
  
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  Kristalina Georgieva, membre de la Commission. – (EN) Madame la Présidente, je me joins à vous pour exprimer ma sympathie envers les victimes et leurs familles.

Il y a un an, Haïti a connu l’une des pires catastrophes naturelles de l’histoire récente, une catastrophe qui a également déclenché l’un des plus grands élans de solidarité envers un peuple dont la résilience face au désastre et au chaos est une leçon de courage pour nous tous. Un an après la catastrophe, nous tenons à rendre hommage à ceux qui ont péri, mais aussi à ceux qui ont survécu. Nous leur avions promis notre aide et nous tenons parole.

L’UE est un maillon essentiel de l’effort mondial de solidarité envers Haïti. Nous avons mobilisé tous les moyens disponibles pour fournir une aide humanitaire et, comme le commissaire Piebalgs l’expliquera après moi, une aide au développement pour reconstruire le pays.

Au lendemain du séisme, l’UE a promis plus de 320 millions d’euros rien qu’en aide humanitaire, et la Commission en a déjà fourni 130 millions en 2010.

Ces fonds nous ont permis de soulager la vie de plus de quatre millions d’Haïtiens en leur fournissant une assistance alimentaire, des services d’assainissement et des abris. Près d’1,5 million de personnes ont reçu un endroit où se loger: une base pour recommencer leur vie. Notre aide est allée à Port-au-Prince, mais aussi à d’autres villes touchées – Léogâne et Jacmel. Nous avons apporté une assistance aux 500 000 Haïtiens qui ont quitté Port-au-Prince pour aller vivre chez des proches, dans des régions rurales, en leur fournissant de la nourriture, de l’eau et des soins médicaux, en nettoyant les routes et en soutenant des programmes «travail contre rémunération».

Actuellement, notre aide humanitaire se concentre sur la lutte contre le choléra, en utilisant 22 millions d’euros pour couvrir les besoins les plus essentiels en termes de soins de santé, ravitaillement adéquat en eau, services d’assainissement, campagnes d’information, surveillance épidémiologique et logistique. Nous avons financé à ce jour le traitement de 158 000 personnes mais, plus important encore, nous avons fourni de l’eau salubre à un demi million de personnes et des systèmes d’assainissement plus sûrs à 900 000 personnes. Nous avons également informé un million d’Haïtiens sur le choléra, la manière d’éviter la maladie et de la soigner. Nous avons distribué 1,3 million de savons et des tablettes de chlore aux communautés affectées.

Nous espérions qu’un an après le séisme, la situation serait meilleure, mais ce n’est pas le cas. C’est la raison pour laquelle nous prévoyons pour 2011 un budget de 33 millions d’euros. Nous sommes prêts à augmenter ce budget si une aide supplémentaire s’impose.

En 2011, nos priorités seront le logement, l’assainissement et les soins de santé. Nous continuerons de résoudre les problèmes d’assainissement parce qu’ils comportent clairement un risque de propagation du choléra dans les communautés. Nous poursuivrons également notre assistance médicale, mais le système de soins de santé d’Haïti est en piteux état et ne vient pas en aide à la population.

Dans le cadre de ce processus, nous avons fait appel à des travailleurs humanitaires et je tiens à exprimer toute ma gratitude à ceux qui ont risqué leur vie pour aider le peuple haïtien.

Nous soutenons également le commissaire Piebalgs en liant l’aide d’urgence à la reconstruction et au développement. Par exemple, une partie des fonds de l’enveloppe B du 9e FED sera allouée à des programmes de logement, en étroite coordination avec notre aide humanitaire. Je tiens à dire que nous avons examiné la situation haïtienne dans sa globalité, dans le but de parer aux besoins immédiats de la population, mais aussi de jeter les bases d’un relèvement du pays à plus long terme.

 
  
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  Andris Piebalgs, membre de la Commission. – (EN) Madame la Présidente, nous tenons aussi nos engagements sur le front de la reconstruction. L’UE, dans son ensemble, c’est-à-dire l’Union et les États membres, a déjà engagé 600 millions d’euros sur le montant de 1,2 milliard d’euros promis à New York et en a déjà versé 330 millions.

Dans l’engagement global de l’UE, le don promis par l’Union était initialement de 460 millions d’euros, et nous estimons nécessaire de le porter à 522 millions d’euros. Nous avons déjà engagé 327 millions. Des programmes en cours ont été adaptés, en prolongeant leur durée et/ou en augmentant leurs enveloppes financières, pour mieux répondre aux priorités révisées. De nouveaux programmes ont été mis en place afin de répondre aux besoins supplémentaires.

En 2010, les versements strictement liés à l’aide promise se sont élevés à 74 millions d’euros. Compte tenu de la situation en Haïti, cela me semble plutôt un bon résultat. Il faut se rendre compte que sur place, la situation déjà très difficile avant le séisme est devenue extrêmement difficile au lendemain du désastre, et plus encore par la suite à cause de l’ouragan Tomas, de l’épidémie de choléra et de l’instabilité politique. Les travailleurs humanitaires et les experts techniques ont souvent travaillé dans des conditions très difficiles.

Parmi les autres facteurs à prendre en compte figure, premièrement, le fait que la mise en œuvre de l’assistance à moyen et long terme pour la reconstruction s’étend sur trois à cinq années et que les versements sont répartis sur la toute la durée du programme: l’année 2010 a principalement été consacrée à l’engagement des fonds et aux préparatifs des projets, y compris les études techniques et appels d’offres nécessaires. Les activités plus concrètes débuteront en 2011 et nous pensons que les versements imputés sur l’aide promise vont doubler pour atteindre 150 millions d’euros cette année.

À ce jour, l’UE a concentré son aide au développement en premier lieu sur la fourniture des agents nécessaires pour aider le gouvernement à assurer le fonctionnement de services publics de base, tels que l’enseignement, les soins de santé et les services de police, et lui permettre d’affecter du personnel dans le secteur public. En deuxième lieu, nous nous sommes attelés au renforcement immédiat et à la reconstruction de l’infrastructure stratégique et des routes. Notre troisième priorité a été de renforcer la préparation des Haïtiens aux catastrophes, ainsi que les mécanismes et structures de protection civile.

Nous nous sommes fixé l’objectif de reconstruire Haïti sur des bases plus solides afin de rendre le pays plus résistant. Il est évident que nous avons besoin d’un gouvernement haïtien fort et que nous devons nous concentrer sur les priorités. Nous suivons donc très largement les priorités que le gouvernement haïtien nous a indiquées. Celui-ci souhaite réellement renforcer la gouvernance – dans une optique particulière incluant un soutien budgétaire et en tenant compte du niveau limité des recettes publiques – et investir de manière substantielle dans l’infrastructure, notamment les routes.

Quelles sont les leçons à tirer pour améliorer la situation? Eh bien, nous pourrions mieux coordonner l’aide et renforcer la coopération entre la Commission et les États membres. Nous sommes en train de finaliser le programme commun, dans un processus qui implique les États membres de l’UE.

Nous avons aussi une bonne expérience de travail avec tous nos partenaires de la commission intérimaire pour la reconstruction d’Haïti, et cela contribue assurément à accélérer le processus. Je crois cependant qu’il faut poursuivre notre souhait de parvenir à une stabilité en termes d’aide et de fonctionnement démocratique d’Haïti, parce que c’est indispensable si l’on veut que les efforts de l’UE et de la communauté internationale soient couronnés de succès.

Mesdames et Messieurs, nous essayons de faire de notre mieux, mais il est certain qu’il est possible de travailler mieux. Nous avons tiré des leçons de nos expériences: l’UE tient assurément ses promesses et son engagement. Bien que la situation parfois décrite dans les médias corresponde à une réalité vue sous un seul angle, je pense que nous progressons. Nous devrions voir des changements considérables sur le terrain en 2011– à condition qu’une stabilité politique soit établie en Haïti, parce l’instabilité gêne évidemment nos efforts – et nous concentrerons ces efforts sur la reconstruction d’Haïti.

 
  
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  Michèle Striffler, au nom du groupe PPE. – Monsieur le Président, Madame la Commissaire, Monsieur le Commissaire, un an après le tremblement de terre, Haïti est toujours en situation d’urgence et la reconstruction peine à démarrer, ce qui est imputable aux carences structurelles de l’État haïtien, à l’absence de volonté politique et de décision des autorités haïtiennes et au manque d’accompagnement de la communauté internationale. Sans décision majeure provenant des autorités haïtiennes, notamment d’expropriation, les millions de gravats qui bloquent les efforts de reconstruction ne seront pas déblayés.

Je tiens à saluer les efforts déployés et le travail réalisé par les organisations humanitaires. Des progrès sont accomplis et des millions de vie sont sauvées.

Cependant, les acteurs humanitaires ne peuvent pas continuer à pallier les faiblesses de l’État haïtien. Ainsi, l’Union européenne doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour soutenir fortement un processus électoral légitime et transparent afin de garantir la stabilité et la volonté politique que réclame la reconstruction. Elle doit impérativement accompagner les futures autorités haïtiennes dans l’organisation de leurs institutions vers un nouvel équilibre à tous les niveaux, vers une démocratie pleinement opérationnelle tout au long du processus de reconstruction.

De plus, il est essentiel que la Commission européenne, en tant que membre de la commission intérimaire pour la reconstruction d’Haïti, et au regard de sa contribution financière, intervienne pour accélérer la mise en œuvre du mandat de cette dernière et pour pourvoir à son fonctionnement.

Suite au séisme, la communauté internationale avait décidé de reconstruire Haïti autrement, sans commettre les erreurs du passé. Il est temps de s’attaquer, une fois pour toutes, aux causes profondes de la pauvreté en Haïti.

 
  
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  Corina Creţu, au nom du groupe S&D.(RO) Madame la Présidente, comme cela vient d’être dit, un an après la tragédie qui a dévasté Haïti, le processus de reconstruction est bien loin de correspondre aux attentes de la population et aux engagements pris par la communauté internationale. De plus, à en juger par les revers de ces derniers mois, les efforts pour reconstruire l’État semblent dans une impasse. Ce pays, dévasté par un tremblement de terre et frappé par une épidémie de choléra imputée aux Casques bleus de l’ONU, s’est également enfoncé dans une grave crise politique.

Je pense que dans les mois à venir, il faut agir par rapport à ces trois éléments de la crise haïtienne. À défaut, les efforts accomplis à ce jour risquent d’être compromis. Premièrement, les résultats de l’enquête sur les causes de l’épidémie de choléra doivent être publiés le plus rapidement possible pour apaiser la colère de la population contre la présence de l’ONU. Deuxièmement, tout doit être mis en œuvre pour éviter la prolongation de la période transitoire qui débutera à la fin du mandat du président Prévale, le 7 février prochain. L’organisation de nouvelles élections, sous étroite surveillance internationale, est la seule solution démocratique viable. Dernier point, mais non des moindres, la présente évaluation doit marquer un tournant dans les efforts de reconstruction, qui ont été minés par l’inefficacité, les retards et les intérêts contradictoires des pays de la région.

N’oublions pas que sur les dix milliards de dollars promis lors de la Conférence internationale des donateurs organisée à New York en mars 2010, seulement 1,2 milliard de dollars ont été versés à ce jour, dont une part significative par l’Union européenne. Au-delà de nos efforts pour résoudre les problèmes du million d’Haïtiens qui survivent dans des camps de fortune, où la pauvreté, le désespoir et la violence sexuelle prennent des proportions alarmantes, il faut ajouter la perspective à long terme d’investissements durables en Haïti, et un soutien concret à la construction d’une structure étatique viable.

 
  
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  Charles Goerens, au nom du groupe ALDE. – Madame la Présidente, la qualité des interventions de nos deux commissaires me permet de me limiter à deux remarques.

Premièrement, un an après le tremblement de terre, Haïti reste, pour l’essentiel, un champ de ruines. On savait que, devant l’ampleur de la catastrophe, le pays allait rencontrer des difficultés considérables. On savait aussi que, outre les nombreuses victimes civiles, le séisme avait atteint le cœur même de l’État, tant étaient importants les dégâts causés par cette catastrophe naturelle. Ajoutons les difficultés structurelles et notamment les carences en matière de gouvernance pour mettre en évidence les défis posés aux acteurs sur le terrain.

Qui est responsable en premier lieu de cette situation? Même s’il y a des circonstances atténuantes, le premier acteur, sans lequel rien ne va, est l’État haïtien lui-même. L’alternative consisterait à remettre le pays sous tutelle, ce que personne ne veut.

Deuxième remarque: on peut être complémentaire de l’action de l’État haïtien et on doit même l’être. D’ailleurs l’Union européenne n’a pas ménagé ses efforts dans ce domaine. Non seulement l’Union européenne a fait des annonces, mais encore elle les a réalisées. Ce que nous attendons de l’Union européenne pour l’avenir est certes qu’elle poursuive son engagement sans faille, mais il importe avant tout de contribuer à sortir l’État haïtien de son incapacité notoire à se libérer de cette situation de dépendance. Je concède que cela ne peut pas se faire en quelques mois.

 
  
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  Judith Sargentini, au nom du groupe Verts/ALE.(NL) Madame la Présidente, la véritable question à se poser est celle-ci: comment reconstruire un État qui a échoué? Car c’est le cas en Haïti. Peut-on réellement parler de reconstruction, sachant qu’Haïti n’a jamais été une démocratie? Voilà la tâche qui nous attend. Malgré tous les efforts de la Commission, nous n’avons tout simplement pas de réponse à cette question pour l’instant. L’épidémie de choléra, la fraude électorale lors des élections de novembre et l’intimidation du peuple ne nous aident évidemment pas dans ce qu’on appelle la reconstruction du pays. Des femmes et des jeunes filles vivaient déjà une situation terrible avant le séisme, et ce fait nous a amenés à refuser obstinément de reconnaître que des femmes et des jeunes filles sont victimes de violences sexuelles dans les camps d’accueil.

À cela s’ajoutent le retour de Baby Doc en Haïti et le fait qu’il pourrait vouloir tirer profit de la misère dans laquelle se trouvent actuellement les citoyens parce que, selon les rumeurs, il serait aujourd’hui à court d’argent. Nous ne pouvons tolérer cela en Haïti.

Notre réponse depuis la catastrophe de l’an dernier a été de permettre aux Haïtiens d’essayer de reconstruire le pays, mais ce qui leur manque réellement, c’est la capacité organisationnelle pour le faire. C’est la raison pour laquelle nous en sommes encore au stade de l’aide d’urgence, alors que nous devrions passer à la coopération au développement. Il y a un chaînon manquant. Je ne pense pas que ce soit faisable du jour au lendemain, mais c’est dans cette direction qu’il faut axer nos efforts, parce que ce pays ne pourra remettre des bâtiments debout sans être une démocratie ou, du moins, être doté d’une direction adéquate. Je souhaite donc bon courage et bonne chance aux commissaires Georgieva et Piebalgs dans cette entreprise.

 
  
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  Nirj Deva, au nom du groupe ECR. (EN) Madame la Présidente, il est bon que nous ayons à nouveau ce débat; nous en avions déjà eu un récemment sur ce thème. Cela montre que nous nous préoccupons du peuple haïtien, et nous nous en préoccupons manifestement plus que le gouvernement haïtien.

Nous parlons de la responsabilité de protéger, de la responsabilité de protéger les populations contre les meurtriers de masse et les dictateurs génocidaires, mais qu’en est-il de la responsabilité de protéger contre les gouvernements inefficaces et corrompus qui ne se soucient pas de leur peuple? Haïti compte aujourd’hui un million de sans-abri, 230 000 morts et 300 000 blessés. Mais seulement 5 % des gravats ont été déblayés et seulement 15 % des logements ont été reconstruits, d’une façon ou d’une autre.

Si le gouvernement d’Haïti ne s’occupe pas de son peuple, nous devons utiliser le concept de la responsabilité de protéger. Tant que nous ne le ferons pas, il sera assez absurde de demander à nos deux excellents commissaires de faire des allers et retours au Parlement en essayant de nous dire ce qu’ils peuvent et ne peuvent pas faire, alors que la capacité locale d’agir est si difficile et fragile.

La première chose à faire après un séisme est de déblayer les gravats. Pour cela, il faut de gros engins de levage, des grues, des hélicoptères, des bulldozers et la capacité de conduire ces engins. Si personne n’est capable de le faire, il faut faire venir des personnes compétentes d’ailleurs. Mais l’aile gauche s’oppose à l’envoi de tout personnel de l’armée de terre, de la force aérienne ou de la marine d’un État membre pour aider Haïti dans cette tâche. Or, on ne peut attendre des personnes envoyées par Oxfam, Save the Children et autres organisations de ce type qu’elles conduisent des tracteurs et soulèvent de lourds débris. Il faut dépolitiser notre discussion et nous montrer pragmatiques vis-à-vis de l’aide apportée à ce peuple.

 
  
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  Jacky Hénin, au nom du groupe GUE/NGL. – Madame la Présidente, il y a un an à peine, Haïti et son peuple étaient victimes d’une terrible catastrophe. Partout, la désolation et la mort.

Qu’il nous soit permis de saluer le courage du peuple haïtien et l’élan mondial de solidarité populaire en faveur des sinistrés. Solidarité populaire car, en Europe comme ailleurs, ce sont bien souvent ceux qui n’ont pas grand-chose qui ont donné le plus.

Je veux ici également remercier solennellement l’État et le peuple cubains pour leur aide: un engagement efficace et sans arrière-pensée, des résultats éloquents. À ce jour, la brigade médicale cubaine a soigné plus de 50 000 cas de choléra, permis de reconstruire 76 centres de santé et hôpitaux et opéré de nombreux Haïtiens. Cuba, dont l’aide est jugée particulièrement efficace par de nombreux experts. C’est tellement vrai qu’un pays comme la Norvège a souhaité demander à Cuba d’intervenir en ses lieu et place.

L’Union européenne et les États-Unis feraient bien de s’inspirer de l’exemple cubain plutôt que de se complaire derrière des mises en scène médiatiques qui cachent mal une conception caritative de l’aide qui, en définitive, sert avant tout leurs intérêts économiques et politiques au détriment d’une reconstruction durable de l’État haïtien et de son économie.

Au regard de leur responsabilité historique dans les malheurs d’Haïti, il est indécent de voir la France et les États-Unis se poser en donneurs de leçons. Rappelons quand même qu’il a fallu que la pire des catastrophes ait lieu pour qu’enfin la Banque mondiale et le FMI se décident à annuler la dette d’Haïti.

Pour l’heure, ce qui se passe en Haïti montre les limites du fonctionnement actuel de l’ONU. En Haïti, l’ingérence humanitaire montre son incapacité à mettre en œuvre des solutions durables pour les populations. Pire, elle constitue à moyen et long terme une entrave à la reconstruction d’un État démocratique et d’une économie répondant enfin aux besoins humains de développement du peuple haïtien.

11,5 milliards de dollars ont été promis par la communauté internationale pour la reconstruction du pays. Reste à savoir de quelle reconstruction on parle. Quelle part de cette aide est effectivement arrivée sur le terrain? Qui décidera des projets? Va-t-on voir, comme au Kosovo, un peuple mis au chômage regarder de grandes entreprises multinationales reconstruire leur pays car elles auront été les seules à pouvoir remporter les appels d’offres internationaux?

L’Union européenne ne doit pas s’inscrire dans une vision paternaliste ou néocolonialiste, mais doit, au contraire, concourir à l’émergence d’une renaissance démocratique de la République haïtienne qui soit l’œuvre du peuple lui-même. Le peuple haïtien a été le premier au monde à s’émanciper du colonialisme français. Outre les ravages de la guerre, cela lui a coûté plus de 20 milliards d’euros actuels pour «dédommager» les colons européens esclavagistes.

Aujourd’hui, en raison des crimes contre l’humanité que constituent l’esclavagisme et le colonialisme, l’Union européenne et, en particulier, la France, ont une dette morale, politique et économique vis-à-vis d’Haïti. Il nous faut honorer cette dette d’honneur.

 
  
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  Bastiaan Belder, au nom du groupe EFD.(NL) Madame la Présidente, un an après le terrible tremblement de terre qui a frappé Haïti, la reconstruction de ce pays est particulièrement laborieuse. Toutefois, des progrès ont été réalisés, pas à pas. Le peuple haïtien a terriblement besoin de notre aide, tout particulièrement maintenant, alors que l’épidémie de choléra fait de nouvelles victimes. Nous devons nous concentrer sur la sécurité alimentaire. L’agriculture locale a été durement frappée, ce qui a conduit le pays à devenir trop dépendant des importations de produits alimentaires. Il importe d’investir beaucoup d’énergie et d’argent dans la restauration de l’agriculture et de l’infrastructure locale. Dans ce contexte, les microcrédits revêtent une importance cruciale car ils stimulent le développement économique de la base au sommet. La Commission partage-t-elle cet avis?

En attendant, la situation politique en Haïti reste alarmante après le premier tour des élections présidentielles. Le rapport d’évaluation publié la semaine dernière par l’Organisation des États américains est clair sur ce point. Comment la Commission évalue-t-elle la situation politique actuelle en Haïti et l’impact de celle-ci sur la reconstruction du pays?

Enfin, Madame la Présidente, la semaine dernière, un ouvrage impressionnant sur Haïti a été publié par un journaliste néerlandais, et une image me poursuit depuis lors: des gens en train de déblayer les décombres après le séisme portaient des t-shirts avec l’inscription «Haiti pap peri» (Haïti ne périra pas). Cela devrait nous inspirer à tout faire pour que les Haïtiens survivent et que, grâce à notre soutien, ils aient de bonnes perspectives d’avenir.

 
  
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  Filip Kaczmarek (PPE) . – (PL) Madame la Présidente, l’Union européenne n’a pas oublié Haïti. Nous restons la plus grande source d’aide humanitaire. Cependant, il est déprimant de voir que le pays reste enlisé dans le chaos interne et politique.

L’apport d’aide humanitaire en Haïti s’est déroulé en deux phases classiques. La première phase a consisté à apporter une aide d’urgence, censée aller à ceux qui en avaient le plus besoin. Dans un deuxième temps, l’objectif était de se concentrer sur la reconstruction économique, sociale et politique du pays. Cependant, en raison de l’épidémie de choléra, de l’ouragan, de la situation sociale et politique instable, et même de tensions interreligieuses et de conflits, la phase d’aide humanitaire prend plus de temps que prévu initialement. Par conséquent, nous ne pouvons passer à la seconde phase aussi rapidement ou complètement que nous l’aurions souhaité.

La crise perdure en Haïti. Notre engagement reste nécessaire. Nous ne pouvons abandonner nos responsabilités. Comme M. Piebalgs l’a rappelé, la Commission européenne a fourni la moitié des ressources promises lors de la Conférence des donateurs à New York. Sur ce point, nos plans progressent bien.

L’objectif de la résolution que ce Parlement adoptera demain est de mobiliser les États membres et la Commission pour mettre en œuvre les déclarations que nous avons faites. N’oublions pas que des centaines de milliers de personnes vivent encore dans des camps de fortune, et que plus de 3 500 personnes sont mortes du choléra. Depuis le tout début, nous soutenons que les responsables de la reconstruction doivent être les Haïtiens eux-mêmes. Le plan haïtien de reconstruction du pays est basé sur la décentralisation et place en priorité l’agriculture locale et la sécurité alimentaire. Nous respectons ces priorités définies par le peuple d’Haïti. Nous recommandons également d’accroître nos efforts d’aide humanitaire et je sais que la commissaire y travaille déjà.

 
  
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  Kriton Arsenis (S&D).(EL) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Commissaires, Haïti est réellement un cas spécial Nous devons tous en prendre conscience. Il ne s’agit pas d’une crise humanitaire où nous versons de l’argent et puis le gouvernement décide de la mise en œuvre de projets. Haïti est un pays en effondrement total. La seule chose à laquelle l’on peut s’attendre est que ce pays, vu sa situation actuelle, sombre encore un peu plus dans la corruption et ait de plus en plus de mal à gérer la crise et à prendre les mesures nécessaires. Notre intervention dans ce pays doit être plus énergique, plus stable; il sera souvent nécessaire de jouer un rôle plus actif que dans tout autre cas.

M. Deva a indiqué que les décombres n’ont toujours pas été déblayés en vue de réparer les dégâts. Il faut déblayer les rues de ces gravats. Ce doit être notre première priorité. Au rythme où nous allons, il faudra encore cinq ans. Ce travail doit être achevé le plus rapidement possible. Il y a tant de travaux à effectuer dans ce pays que, normalement, si tout est fait correctement, il ne devrait pas y avoir de chômage.

Il faut impérativement intervenir de manière proactive dans la question des décombres, de l’approvisionnement en eau et de l’approvisionnement alimentaire, afin que ce pays puisse retrouver une autonomie et que les citoyens de ce pays, forcés de se demander chaque jour comment ils vont survivre, puissent aussi penser à l’avenir.

 
  
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  Niccolò Rinaldi (ALDE).(IT) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Commissaires, Mesdames et Messieurs, il est tout à fait exact qu’Haïti est un cas à part, différent, parce que les catastrophes sont normalement commémorées pour rendre hommage aux victimes, tirer les leçons des erreurs et s’améliorer pour l’avenir. Or, la situation est différente en Haïti, vu qu’il n’y a rien à commémorer: rien n’est en effet terminé.

Au lieu de dire un an après le séisme, nous devrions parler d’une année de séismes, parce qu’il y a eu les secousses sismiques, puis le séisme de la distribution chaotique de l’aide, puis le séisme sanitaire avec l’épidémie de choléra, ensuite le séisme politique avec les élections non transparentes probablement organisées au pire moment possible, et maintenant, le séisme - à certains égards également historique - lié au retour de l’ancien dictateur sous l’aspect d’un touriste multimillionnaire douteux.

La Commission fait du bon travail – du très bon travail, en fait. Je me suis rendu en Haïti en juin dernier avec la commission du développement et j’ai pu voir l’excellent travail accompli, pour lequel je tiens d’ailleurs à remercier la Commission. Toutefois, une plus grande protection politique est nécessaire, ainsi qu’un renforcement du rôle de la communauté internationale, qui doit fixer des objectifs et des délais et superviser directement une partie de la reconstruction.

Il importe de concilier cette implication avec celle de la population et des ONG locales, qui sont souvent tenues à l’écart. Il faut donc réduire le rôle des responsables politiques et institutions gouvernementales d’Haïti et renforcer celui du partenariat, actuellement fragile, entre les citoyens haïtiens et la communauté internationale.

 
  
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  Michèle Rivasi (Verts/ALE). - Madame la Présidente, suite à la mission d’observation que j’avais effectuée, en septembre dernier, en Haïti, j’ai pu me rendre compte des urgences à traiter. Aujourd’hui, il faut dépasser ces urgences pour enfin parvenir au stade du développement. Il ne faut pas reconstruire mais bien construire un pays dont les fondations et la gouvernance n’ont jamais été solides.

Premier constat – et cela a été dit par mes collègues – il y a vingt millions de tonnes de gravats à déblayer et seule une infime partie – 5 % – a été déblayée en un an. À ce rythme, il faudra plus de six ans pour dégager Port-au-Prince de ses décombres. C’est donc un projet politique en soi et la Commission doit y apporter sa contribution.

Une autre priorité est la gouvernance et je suis heureuse que l’Union européenne contribue en grande partie à l’appui budgétaire du pays. Nous devons renforcer cet effort financier car c’est le seul moyen de redonner au pays et au peuple haïtien ses compétences. Sa dépendance actuelle à l’égard des ONG est révélatrice au niveau des services publics de base tels que la santé et l’éducation. Mais il ne faut pas sous-traiter tous les services publics au niveau des ONG.

Il faut surtout renforcer notre soutien pour organiser rapidement des élections et achever ces élections qui, je le souhaite, doivent permettre de remplacer une élite politique corrompue. L’oligarchie actuelle – on parle de vingt familles – empêche tout développement économique puisqu’elle contrôle le commerce, sans pour autant développer les capacités de production du pays.

Enfin, il faut donner à Haïti les moyens de son engagement afin que le pays sorte de la dépendance qui le minait déjà avant même le séisme. J’appelle donc les institutions européennes à se fixer des priorités cohérentes et à soutenir massivement la mise en place des services publics avec un engagement déterminé du futur gouvernement haïtien.

 
  
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  James Nicholson (ECR).(EN) Madame la Présidente, j’ai eu, je suppose, l’honneur, comme Mme Rivasi, de conduire une délégation des pays ACP en Haïti au mois de septembre. J’ai déclaré à l’époque que je n’étais absolument pas préparé à voir ce que j’ai vu là-bas durant notre visite.

Permettez-moi de formuler quelques remarques ce soir, la première étant qu’il faut passer immédiatement de l’aide humanitaire à la reconstruction. La situation n’a pas progressé par rapport à ce problème. J’ai entendu dire de très belles choses ici ce soir, mais elles ne seront pas réalisables sur le terrain sans un accroissement de l’aide.

Nous devons faire davantage pression sur ceux qui ont promis leur aide pour qu’ils la fournissent, ainsi que sur la CIRH coprésidée par Bill Clinton et les Nations unies, pour qu’elles accélèrent le mouvement. Il faut très clairement que cela soit fait.

J’ai écouté le commissaire et il a raison: une stabilité politique n’est pas nécessaire. J’espère ardemment cette stabilité politique, mais je ne suis pas sûr que nous l’aurons.

Lorsque nous étions sur place, j’ai constaté - et je tiens à ce que ce soit dit et acté - que les Haïtiens sont des gens très fiers. Ce sont des gens formidables. Nous les avons vus, Michèle Rivasi et moi-même, sortir de leurs tentes à six heures du matin, tirés à quatre épingles, avec leur enfants tout propres. Des gens formidables, souriants, et on se demandait comment ils parvenaient à sourire.

Je tiens également à rendre publiquement hommage aux nombreuses personnes de nos ONG qui sont sur place et qui risquent leur vie, ainsi qu’au personnel de la Commission, dont j’ai salué le travail lorsque nous étions là-bas. Nous les avons trouvés excellents et il ne faut pas oublier que ces personnes risquent leur vie quotidiennement pour venir en aide au peuple haïtien. Nous ne devons pas oublier la population. Nous devons travailler pour elle et aider le peuple haïtien. S’il faut revenir dix fois encore dans cet hémicycle pour y parvenir, faisons-le.

 
  
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  Cristian Dan Preda (PPE).(RO) Madame la Présidente, le 12 janvier 2010, Haïti a été complètement détruit, comme l’ont rappelé plusieurs de mes collègues. Aujourd’hui, un an après le séisme, le pays attend toujours sa reconstruction. Entre-temps, ses problèmes se sont aggravés avec l’épidémie de choléra et les élections, ce qui a compliqué la situation.

En fait, Port-au-Prince est pour l’instant un vaste camp de réfugiés. La population survit uniquement grâce aux efforts des organisations humanitaires. Ces organisations méritent effectivement toute notre gratitude. Comme l’a déclaré un représentant spécial des Nations unies pour ce pays, Haïti est devenu une république d’ONG. Mais combien de temps cette situation peut-elle durer? La situation sanitaire est désastreuse, la reconstruction du système éducatif est absolument indispensable, sans parler du nettoyage des traces de la catastrophe. D’où la nécessité de reconstruire l’État d’Haïti. Outre le séisme, l’absence d’institutions et la gouvernance défaillante posent actuellement un énorme problème.

Par conséquent, les efforts doivent être axés sur le rétablissement des capacités étatiques et l’établissement de la démocratie en Haïti. Il faut réclamer vigoureusement un processus électoral transparent et crédible pour le second tour des élections, en février.

Une dernière remarque: Haïti doit être reconstruit différemment. Par «différemment», je veux dire que la reconstruction doit être de meilleure qualité pour éviter la répétition de pareilles catastrophes. Par «différemment», je veux dire également que nos efforts pour reconstruire le pays doivent impliquer, selon moi, les municipalités. Je pense que les principaux concernés, les Haïtiens, doivent être consultés durant ce processus de reconstruction.

 
  
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  Ricardo Cortés Lastra (S&D).(ES) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Commissaires, Mesdames et Messieurs, avant de m’exprimer, je veux saluer les organisations non gouvernementales sur le terrain. On ne peut que louer le travail qu’elles effectuent et elles représentent nos meilleures valeurs, les meilleures valeurs de l’humanité.

Une année s’est écoulée depuis le tremblement de terre qui a frappé Haïti, et il est sans doute temps d’être plus efficace. Il y a de multiples problèmes à résoudre d’urgence, aucun doute à ce sujet.

La première chose à faire est probablement de rétablir un système d’assainissement acceptable. Je crois que c’est la priorité numéro un, car le problème menace actuellement la vie en Haïti. Lorsque nous aurons réglé ce problème, nous devrons résoudre celui du logement et régler d’urgence la question des titres fonciers.

Il faut en outre un gouvernement légitime, démocratiquement élu et capable de négocier. Je sais que la situation n’est pas simple, mais nous avons besoin de cette discussion légitime pour accélérer l’amélioration de la situation en Haïti.

Il y a un autre problème important, déjà mentionné par plusieurs de mes collègues: celui des décombres, qui constitue en soi un problème politique majeur. Il faut aussi continuer de regarder vers l’avenir et commencer à établir une stratégie d’enseignement à long terme. Ce qui s’est passé en Haïti ne se serait sans doute pas produit s’il y avait eu un système d’enseignement public et si les enfants avaient été correctement pris en charge.

Il faut mettre fin à la pauvreté, mais aussi à la dépendance.

 
  
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  Zbigniew Ziobro (ECR). (PL) Madame la Présidente, il y a un an, Haïti a été frappé par une terrible catastrophe, un gigantesque séisme, à la suite duquel 200 000 personnes ont perdu la vie et 1 300 000 personnes leur logement. Une opération visant à venir en aide à la population et à soutenir sa reconstruction est en cours depuis un an. Il s’agit, sans aucun doute, d’une opération humanitaire énorme et très complexe. Cependant, l’île n’a pas seulement besoin d’une aide matérielle et financière. Il faut aussi rétablir les services administratifs et la stabilité politique, sans lesquels le pays ne peut se développer. En outre, la récente épidémie de choléra, qui a déjà tué plus de 3 500 personnes, menace encore des milliers de gens. L’expérience à Haïti montre que même des dons financiers généreux ne servent à rien s’ils ne sont pas correctement ciblés. Le cas d’Haïti devrait nous faire réfléchir car il révèle clairement la nécessité de mettre en place un système efficace d’aide internationale pour affronter d’autres éventuelles catastrophes naturelles.

 
  
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  Ria Oomen-Ruijten (PPE).(NL) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Commissaires, Mesdames et Messieurs, quand je pense à Haïti, je pense aux citoyens de ce pays mais aussi aux citoyens européens qui ont apporté un formidable soutien au peuple haïtien. Je pense également aux organisations humanitaires qui ont effectué un énorme travail. Voici, Madame la Présidente, pour le côté positif. Mais nous devons également tirer des leçons et, selon moi, il y en a trois.

Premier point: la coordination. Lors de la phase d’aide humanitaire, la coordination n’a pas été une grande réussite et nous avons reçu aujourd’hui un rapport sur cette question. Il va falloir faire mieux lors de la phase de reconstruction. Je pense ici également à l’efficacité de l’aide, car il s’agit aussi d’une question de coordination. Que peut-on faire de plus, et de plus efficace?

Deuxième point: la corruption. Si nous voulons obtenir l’aide des citoyens européens, il faut savoir qu’ils ne veulent pas que cette aide soit mal utilisée. En tant que représentants des autorités ou citoyens ordinaires, personne ne veut cela. Que peut-on faire, avec une meilleure coordination, pour que la corruption ne prenne pas le dessus dans ces systèmes?

Mon troisième point, Madame la Présidente, concerne l’aspect politique. Sans stabilité politique et sans une administration publique déterminée, cette reconstruction durable ne pourra absolument pas aboutir. Le premier tour des élections a eu lieu et ses résultats font toujours l’objet de contestations. Pourriez-vous nous indiquer si nous avons progressé en termes de coordination avec l’Organisation des États américains et d’autres acteurs en vue de garantir un bon déroulement des prochaines élections? En tant qu’Européens, nous nous sommes clairement engagés à aider Haïti à court terme, et je pense qu’il faut continuer à faire preuve de solidarité.

 
  
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  Edite Estrela (S&D).(PT) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Commissaires, Mesdames et Messieurs, le tremblement de terre a plongé Haïti dans l’une des plus graves crises humanitaires: des milliers de morts et de blessés, des millions de sans-abri et des dégâts énormes. La communauté internationale a promis beaucoup de choses mais en a accompli très peu et nous avons du mal à comprendre pourquoi le processus de reconstruction est si lent, malgré la bonne volonté de l’Union européenne et le travail des organisations non gouvernementales.

La situation s’est aggravée en raison de l’épidémie de choléra et de l’instabilité politique postélectorale, qui a suscité d’énormes violences, dont les femmes et les enfants ont été les principales victimes. L’Union européenne doit continuer à participer à la reconstruction du pays et à améliorer la situation humanitaire des groupes vulnérables de la population haïtienne, mais elle doit aussi contribuer au renforcement des capacités en matière de prévention des catastrophes sur le long terme.

Je salue par conséquent les récentes propositions de la Commission concernant la création d’une capacité de réaction renforcée de l’UE en cas de catastrophes, qui prévoit la mise en commun volontaire d’organismes d’intervention urgente des États membres, l’élaboration de plans d’urgence ainsi que la fusion des centres de crise axés sur l’aide humanitaire et ceux de la protection civile pour former un centre de réaction européen aux situations d’urgence, qui sera chargé du suivi des situations dangereuses, du lancement des alertes précoces et de la coordination de la réponse de l’UE en cas de catastrophes.

 
  
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  Jarosław Leszek Wałęsa (PPE). (PL) Madame la Présidente, cela va faire bientôt un an que nous avons tenu notre premier débat sur la coordination de l’aide humanitaire et la reconstruction d’Haïti. Notre débat d’aujourd’hui fait donc office de bilan et à cet égard, une conclusion s’impose: la catastrophe remonte à un an et le nombre de victimes augmente encore. Deux autres problèmes tout aussi importants méritent d’être soulignés à ce stade et priment sur la construction de nouveaux logements et de nouvelles routes. Premièrement, notre Parlement doit lancer un appel ferme et clair pour que cesse immédiatement «l’épidémie» d’agressions sexuelles. Comme nos sources l’indiquent, 250 femmes et jeunes filles ont été violées quelques jours à peine après le séisme, et la situation ne cesse d’empirer. Les violences de ce type sont en augmentation. Il est temps que nous discutions de ce sujet scandaleux, de ce phénomène inhumain et que nous luttions efficacement contre les agressions sexuelles en Haïti.

Deuxièmement, l’épidémie de choléra, dont mes collègues ont déjà parlé. Le nombre de personnes infectées a diminué mais c’est évidemment lié à la période de l’année. Il y a en effet un lien avec un phénomène étrange mais dérangeant: des patients prétendent avoir le choléra. C’est difficile à croire pour nous, alors que nous nous mettrons confortablement au lit ce soir, mais pour ces personnes, une nuit à l’hôpital est une bien meilleure perspective que celle de passer la nuit dans leur habitation, qui n’est rien de plus qu’un abri rudimentaire. Il faut également garder à l’esprit que l’épidémie de choléra va certainement augmenter avec le changement de saison. Il importe donc d’en tenir compte et d’améliorer ces conditions en particulier.

 
  
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  Seán Kelly (PPE). – (EN) Madame la Présidente, un proverbe dit «Aide-toi et le ciel t’aidera», mais l’Union européenne va en réalité plus loin car elle aide ceux qui ne s’aident pas eux-mêmes, en particulier en Haïti, où le gouvernement - comme M. Deva et d’autres l’ont souligné - est corrompu et ne semble pas se soucier de son peuple. Néanmoins, il importe de poursuivre ce bon travail en coopération avec l’ONU, les ONG, etc. Je sais que l’un de nos plus brillants hommes d’affaire irlandais, Denis O’Brien, joue un rôle de premier plan à cet égard.

Toutefois, tout cela ne sera qu’une goutte d’eau dans l’océan comparé à ce qui pourrait être réalisé si le gouvernement haïtien fonctionnait correctement. Il faut donc adresser un message ferme et clair au gouvernement haïtien, lui indiquant qu’il doit soit comprendre et se reprendre ou - espérons-le - être remplacé par un gouvernement plus compétent. Nous verrons alors de réels progrès.

 
  
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  Monika Flašíková Beňová (S&D). (SK) Madame la Présidente, on a certes pu atténuer et éliminer progressivement les effets du séisme destructeur, mais les habitants sont toujours confrontés à de graves problèmes. Le pays manque d’eau potable, de nourriture et d’autres fournitures de base. Voilà pour les difficultés et problèmes quotidiens. À cela s’ajoutent un gouvernement instable dépourvu de valeurs démocratiques, une épidémie de choléra, une criminalité en hausse, les pillages, les enlèvements et les viols de femmes et d’enfants.

Il faut par conséquent prendre des mesures pour limiter ces actes abominables. Les institutions européennes doivent poursuivre leurs efforts pour atténuer les conséquences de la catastrophe. En 2011, l’aide devra être consacrée à des défis complexes, notamment reconstruire des logements, répondre aux besoins fondamentaux des communautés et stabiliser la situation dans les camps de fortune.

Parallèlement, il importe d’essayer de réaliser des objectifs à long terme comme le développement des institutions publiques, des administrations locales, des écoles, des hôpitaux, etc.

 
  
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  Ilda Figueiredo (GUE/NGL).(PT) Permettez-moi de réitérer la solidarité de mon groupe avec les habitants d’Haïti, victimes du tremblement de terre l’an dernier et, plus récemment, du choléra. Il est urgent d’accroître l’aide aux populations frappées par la tragédie survenue il y a un an et par la récente épidémie. Il est inacceptable qu’une partie de l’aide ne soit toujours pas arrivée. L’aide déjà approuvée doit faire l’objet d’un suivi, en particulier par l’Union européenne. L’UE devrait en outre accorder aux actes de solidarité exemplaires de certains pays de la région l’attention qu’ils méritent. Je tiens à souligner à cet égard le cas de Cuba, dont le gouvernement a envoyé des médecins et des spécialistes qui ont déjà soigné plus de 50 000 personnes atteintes du choléra. Je voudrais aussi mettre en avant le soutien de l’Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique en termes de financement ainsi que d’approvisionnement énergétique, agricole et alimentaire.

Il serait bon que l’Union européenne en tienne compte et joue un rôle plus actif. Toutes les mesures requises pour accélérer la reconstruction rapide d’Haïti et améliorer les conditions de vie de sa population doivent être prises d’urgence, mais nous insistons sur le respect des principes de souveraineté et d’intégrité territoriale, amplement mérité par le courageux et noble peuple haïtien.

 
  
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  Elena Băsescu (PPE).(RO) Madame la Présidente, un an après le séisme dévastateur qui a frappé Haïti, on ne voit toujours pas les résultats concrets du processus de reconstruction. Ce blocage est dû, en particulier, au fait que l’État haïtien n’a pas la capacité d’assurer les services publics avec ses propres ressources. Il y a un manque de volonté politique et les autorités haïtiennes n’appliquent pas les décisions prises en vue de la reconstruction du pays.

Cela entrave considérablement le fonctionnement de la Commission intérimaire pour la reconstruction d’Haïti, le principal organisme chargé de la gestion efficace des ressources dégagées par la communauté internationale. Cette situation perdurera, sauf si une stabilité politique est établie avec succès dans le pays, si les capacités étatiques sont rétablies et si un gouvernement efficace est nommé. C’est pourquoi je pense que l’UE ne doit épargner aucun effort pour soutenir un processus électoral transparent et légitime. La seule solution pour mettre fin à la crise politique est de veiller au bon déroulement du deuxième tour électoral, prévu en février.

 
  
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  Janusz Władysław Zemke (S&D). (PL) Madame la Présidente, je veux m’assurer d’être bien compris. Je n’ai pas de réserves graves au sujet de l’aide actuellement fournie par l’Union européenne en Haïti. L’Union européenne apporte sans aucun doute une énorme aide matérielle et je suis surpris de voir que beaucoup d’autres pays n’agissent pas de la même manière.

Je rappelle que des critiques ont été formulées concernant les actions de l’Union européenne juste après la catastrophe: l’Union européenne agissait trop lentement et l’aide humanitaire était manifestement mal coordonnée Je souhaiterais entendre les conclusions spécifiques tirées par la Commission européenne en ce qui concerne la lenteur de l’aide à l’époque. Je pense qu’il s’agit d’une question importante car le délai d’attente pour obtenir de l’aide pourrait être une question de vie ou de mort pour certains.

 
  
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  Peter Jahr (PPE).(DE) Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Commissaires, le cas d’Haïti montre clairement que les véritables catastrophes sont provoquées par l’homme. La communauté internationale, et l’Union européenne en particulier, sont absolument prêtes à apporter leur aide. Le problème n’est cependant pas l’argent mais les conditions politiques instables. Actuellement, aucune nation n’est réellement disposée à investir de l’argent dans un système politique corrompu. Ma demande adressée à la Commission est par conséquent la suivante: il faut évidemment continuer à aider Haïti mais, en particulier, il faut aussi investir dans l’infrastructure politique. Jusqu’à la mise en place d’un système gouvernemental et d’une administration efficaces, il faudra faire appel aux organisations d’aide existantes car il n’y a tout simplement pas d’autre solution.

 
  
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  Kristalina Georgieva, membre de la Commission. – (EN) Madame la Présidente, je remercie sincèrement tous les députés pour leurs commentaires. En guise de conclusion, permettez-moi les cinq remarques suivantes.

Premièrement, je rejoins tous les orateurs qui ont souligné la mauvaise gouvernance comme principal facteur fondamental des problèmes auxquels Haïti est aujourd’hui confronté. Ma première réflexion après le séisme - et celle que j’ai encore aujourd’hui - a été la suivante: aussi grave que fut le séisme, ce n’est pas le plus grand problème d’Haïti. Son problème majeur, ce sont les décennies de mauvaise gouvernance et ses conséquences: il n’y a pratiquement plus aucune structure sociale et gouvernementale en place pour aider le peuple haïtien, et cela provoque un énorme déficit de confiance de la part du peuple haïtien envers le gouvernement.

Je me souviens très bien, lorsque je me suis rendue sur place, que tous les Haïtiens auxquels j’ai parlé me communiquaient toujours le même message: «Ne donnez pas d’argent au gouvernement». Pour l’instant, sur le plan humanitaire, nous ne donnons pas d’argent. Nous fournissons une assistance directe. Mais cela nous incite à réfléchir sur la question du temps qu’il faudra pour reconstruire Haïti: cela prendra beaucoup de temps parce que cela ne se fera pas tant que cette infrastructure institutionnelle n’est pas en place.

Ceci étant dit, ma deuxième remarque est qu’un aspect positif de la société haïtienne a aidé les Haïtiens à survivre: la résilience des individus et la résilience de leurs communautés. J’ai rencontré des gens qui vivaient ensemble. Ils ont perdu leurs maisons ensemble, ils se sont déplacés vers les camps ensemble et ils ont organisé dans les camps un système de soutien mutuel: certains gardent les enfants et improvisent une forme de scolarité pour eux, d’autres se chargent de trouver du travail, d’autres encore - les femmes en fait - préparent les repas pour tout le monde. Cette résilience est ce qui nous donne aujourd’hui un espoir pour l’avenir d’Haïti.

Cela m’amène à ma troisième remarque: nos programmes de soutien en faveur d’Haïti doivent tenir compte de ce que le pays a et n’a pas. C’est la raison pour laquelle, sur le plan humanitaire, nous avons mis l’accent sur le travail contre rémunération, les programmes par coupons, des innovations telles que l’offre de semences et d’outils dans les communautés. L’objectif est que la population puisse concrètement accroître son autonomie.

Quatrièmement, je vous remercie pour les commentaires concernant les leçons que nous avons tirées d’Haïti. Je ne crois pas que notre réponse a été trop lente: l’aide de l’Union européenne est arrivée dans les 24 heures. Par contre, je concède que la coordination aurait pu être meilleure et que la capacité de s’organiser avant une catastrophe est absolument essentielle. À cet égard, je vous remercie d’avoir signalé que, sur la base des leçons tirées, nous avons en effet avancé vers la création d’une capacité de réaction de l’UE et le renforcement de la coordination à travers le centre de réaction européen aux situations d’urgence.

Enfin, une dernière remarque concernant le volet humanitaire. Notre plus grand souci est de protéger la population, notamment les femmes, et d’augmenter notre soutien pour mettre fin à la situation dramatique des ménages, essentiellement dirigés par des femmes, dans les camps. Je puis vous assurer que cette année, ainsi que l’an prochain, nous ferons en sorte que ce problème de protection soit réglé et que l’UE soit là pour la population.

Je remercie à nouveau tous les députés pour leurs commentaires, et en particulier les députés qui ont salué le sacrifice accompli par les travailleurs humanitaires en faveur du peuple d’Haïti.

 
  
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  Andris Piebalgs, membre de la Commission. – (EN) Madame la Présidente, avant toute chose, je remercie les députés de cette Assemblée pour leur solidarité et leur soutien. Commençons par la dimension politique. La situation n’est certainement pas aisée en Haïti, mais la haute représentante suit les choses de très près et apporte tout le soutien diplomatique nécessaire pour assurer une stabilité. Le second tour des élections présidentielles contribuera à rétablir la crédibilité s’il n’est pas entouré de violence et nous déployons donc aussi à cet effet tous les efforts diplomatiques requis. Mais les efforts diplomatiques donnent parfois des résultats immédiats et demandent parfois du temps pour produire des résultats.

Certains d’entre vous ont mentionné la visite de Baby Doc. Chacun peut se déplacer librement, mais il est certain que cette visite ne fut pas le meilleur signe du processus politique global. Mais ne nous laissons pas duper par cela. Je pense qu’il y a un noyau politique sain en Haïti et que nous devons croire en lui. Nous espérons que les personnes élues lors des élections législatives, ainsi que le nouveau président, auront les capacités nécessaires pour diriger la reconstruction du pays.

Le deuxième point sur lequel je souhaite insister est que la coopération au développement implique des choix difficiles. Un de ces choix consiste à faire quelque chose de très visible sans que cela entraîne un changement structurel. Ce ne serait pas un problème de financer l’envoi de milliers de médecins de l’UE ou de construire une nouvelle université au nom de l’UE: ce serait visible et tout le monde dirait que c’est très bien. Mais quid de l’insécurité dans les rues? Nous finançons la sécurité dans des conditions relativement difficiles par l’intermédiaire du gouvernement. Donc, s’il y a une sécurité partielle, elle est financée par l’Union européenne. Est-ce visible? Pas vraiment, parce que le label UE n’apparaît pas, mais je pense que nous avons clairement apporté de la stabilité dans le pays.

Une autre question est celle des choix d’investissement de l’argent. A nouveau, reconstruire les maisons serait le choix politique le plus facile, mais quelle en serait l’utilité si les connexions ne sont pas rétablies dans le pays et s’il n’y a pas d’infrastructure? Et l’infrastructure requiert des investissements massifs. Grosso modo, un kilomètre de route coûte un million de dollars, et encore plus en Haïti parce qu’il faut organiser la maintenance et aussi aider les communautés le long de la route. Les coûts sont donc très élevés. Haïti n’aura pas de telles capacités d’investissement. Bizarrement, nous sommes les seuls impliqués dans l’infrastructure routière en Haïti. Normalement, plusieurs autres pays participent à la construction de l’infrastructure routière mais là-bas, nous sommes les seuls à octroyer des aides à cet effet. C’est un choix difficile, mais je crois qu’il aidera le pays à opérer un changement structurel.

Enfin, un dernier point qui n’a guère été abordé aujourd’hui, à savoir, la rapidité de l’engagement et du versement des fonds. Il faut veiller à une bonne utilisation des fonds et un soutien budgétaire demande du temps. Il ne s’agit pas simplement de recevoir un numéro de compte du gouvernement et de transférer l’argent sur ce compte. Cela ne se passe pas comme ça. Nous vérifions le compte, nous savons où vont les fonds versés, bref, la procédure est relativement complexe. On ne peut pas simplement verser directement 1,2 milliard d’euros sur un compte et croire que tout sera réglé. Nous avons également une responsabilité envers nos contribuables. Il en va de même en ce qui concerne les routes: il faut lancer un appel d’offres, être transparents dans cette procédure et cela prend un peu de temps. Mais je pense que ce temps est pris à bon escient, parce qu’il suffirait d’un cas de détournement des fonds de l’aide à la reconstruction d’Haïti pour perdre notre crédit auprès des citoyens européens. Je puis vous assurer que toutes les mesures nécessaires seront également prises à cet égard.

Une fois encore, merci pour votre soutien. Ce débat a été très utile et encourageant et je suis convaincu que nous allons essayer de progresser par rapport aux problèmes que vous avez mentionnés aujourd’hui.

 
  
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  La Présidente. J’ai reçu, conformément à l’article 110, paragraphe 2, du règlement, six propositions de résolution(1).

Le débat est clos.

Le vote aura lieu le mercredi 19 janvier 2011.

 
  

(1)Voir procès-verbal.

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