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Cycle relatif au document : O-0180/2010

Textes déposés :

O-0180/2010 (B7-0808/2010)

Débats :

PV 19/01/2011 - 11
CRE 19/01/2011 - 11

Votes :

Textes adoptés :


Compte rendu in extenso des débats
Mercredi 19 janvier 2011 - Strasbourg Edition JO

11. Conditions de sécurité dans la région du Sahel (débat)
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Procès-verbal
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  Le Président. – L’ordre du jour appelle le débat sur la question orale à la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité sur l’état de la sécurité dans la région du Sahel de Arnaud Danjean, Ioannis Kasoulides, Elmar Brok, José Ignacio Salafranca Sánchez-Neyra, Michael Gahler, Krzysztof Lisek et Andrey Kovatchev, au nom du groupe du Parti populaire européen (Démocrates-Chrétiens) (O-0180/2010 – B7-0808/2010).

 
  
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  Arnaud Danjean, auteur. – Monsieur le Président, Madame la Haute représentante, le sujet que nous abordons aujourd’hui aurait mérité notre attention depuis de nombreux mois, tant il est vrai que la situation de la sécurité au Sahel se dégrade en permanence depuis plus de trois ans maintenant. Et nous en parlons la semaine même où, en France, nous venons d’inhumer deux jeunes et innocentes victimes du terrorisme islamique, qui ont été tuées à la frontière entre le Niger et le Mali il y a quelques semaines.

Au-delà de l’immense émotion que ces crimes soulèvent, il nous faut reconnaître la réalité des menaces qui se concentrent dans cette région aux portes de l’Europe, car il ne s’agit pas que d’une menace terroriste, même si les enlèvements et les attentats sont les manifestations les plus spectaculaires de la dégradation de la situation en Mauritanie, au Mali et au Niger. Les réseaux criminels prospèrent. Les trafics de drogue, d’armes, d’êtres humains affectent la stabilité non seulement de ces pays, mais aussi de notre continent. Car, il ne faut pas s’y tromper, de la même façon que la majorité des victimes des actes terroristes dans cette région sont des citoyens européens, le point de destination de tous ces trafics, c’est le continent européen.

Face à cette situation extrêmement préoccupante, l’Union européenne doit déployer une stratégie globale, intégrée, capable de combiner les politiques de développement et de sécurité. C’est une nécessité vitale. Des actions existent déjà, bien sûr, notamment à travers le dixième FED, et ce sont près de 2 milliards d’euros qui sont dédiés à ces pays pour des actions de lutte contre la pauvreté, de développement de l’économie et d’établissement d’une meilleure gouvernance. Et, par ailleurs, certains États membres ont évidemment des politiques de coopération bilatérales.

Mais il nous faut aller aujourd’hui beaucoup plus loin. Il faut surtout agir de façon beaucoup plus coordonnée. Il faut renforcer l’approche régionale pour amener ces pays à mieux coopérer face à des défis communs et il faut élargir et intégrer au maximum l’éventail des politiques que l’Union peut mobiliser, du développement à la sécurité, en passant par le renforcement des structures institutionnelles, les douanes, la justice, la police.

Madame la Haute représentante, il y a peu de zones aussi proches de l’Europe qui recèlent autant de menaces pour notre sécurité et il y a peu de zones dans lesquelles l’Union peut enfin concrétiser l’approche globale prévue par Lisbonne et qui a inspiré la création du service d’action extérieure que vous avez aujourd’hui l’honneur de présider.

Madame la Haute représentante, merci de nous donner des indications sur la stratégie que vous comptez mettre en œuvre pour cette région.

 
  
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  Catherine Ashton, vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.(EN) Monsieur le Président, à l’exemple de M. Danjean, je voudrais commencer par rappeler le sort terrible des deux jeunes Français capturés il y a dix jours à Niamey, capitale du Niger, et tués quelques heures après. Nous avons condamné ce crime réellement effroyable et je renouvelle l’expression de mes condoléances aux familles des victimes, ainsi qu’à celles des responsables nigériens tués lors des fusillades qui ont suivi. Je voudrais exprimer ma solidarité à l’égard des autorités françaises et des autorités nigériennes.

Nous n’oublions pas, naturellement, les cinq autres citoyens français toujours détenus quelque part dans le désert au nord du Mali par Al-Qaïda pour le Maghreb islamique. Rien que l’année dernière, 10 citoyens européens ont été kidnappés et quatre tués.

L’état de la sécurité au Sahel est alarmant: les réseaux de crime organisé, la faible présence gouvernementale dans les zones désertiques et la faiblesse des moyens des services de sécurité s’ajoutent à une pauvreté galopante, à la sécheresse et aux disettes. Ces menacent représentent des défis considérables pour les opérations et les perspectives en matière de développement, dans la mesure où la poursuite des activités de développement dans un tel environnement est devenue désormais trop dangereuse pour les opérateurs concernés.

Depuis plusieurs années, l’UE et ses États membres ont contribué à aborder les problèmes de développement et de sécurité dans les différents pays du Sahel, mais les menaces qui pèsent sur la sécurité ne s’arrêtent pas aux frontières nationales et la seule réponse possible et efficace ne peut être que régionale et approfondie. Nous devons rendre l’engagement européen actuel au Sahel plus cohérent, plus coordonné et plus efficace.

En octobre dernier, le conseil des affaires étrangères m’a confié la tâche de préparer, en association avec la Commission, une stratégie pour le Sahel pour le début de cette année. Cette stratégie devait se baser sur une approche globale et intégrée, en recourant de manière cohérente aux différents instruments à notre disposition, de manière à nous permettre de renforcer la sécurité, la stabilité, le développement et la bonne gouvernance au Sahel.

Je pense que, pour répondre à la complexité des enjeux du Sahel, nous devons agir à différents niveaux. Tout d’abord, nous avons besoin d’une dimension politique et diplomatique. Cette dimension est nécessaire pour nous assurer que nous facilitons réellement le dialogue entre les pays du Sahel, qui continuent de nourrir une méfiance mutuelle. Nous devrions nous fonder sur les stratégies nationales que nous avons – quand elles existent – et encourager l’adoption d’initiatives et d’outils régionaux permettant d’aborder ensemble les menaces qui pèsent sur la sécurité.

Parallèlement, l’UE devrait renforcer le dialogue sur la sécurité dans le Sahel avec les pays du Maghreb, les organisations régionales – l’Union africaine, la CEEAO et la CEN-SAD – ainsi que la communauté internationale dans son ensemble, les Nations unies, les États-Unis et le Canada en particulier.

Ensuite, nous devons aider les pays du Sahel à renforcer les capacités des services de sécurité – l’armée, la police, les systèmes judiciaires et de contrôle aux frontières – dans chaque pays. Ils doivent être en mesure de rétablir efficacement l’état de droit et la sécurité et de redéployer l’autorité gouvernementale dans les régions les plus fragiles. Nous encouragerons la coopération régionale entre le Mali, la Mauritanie et le Niger au niveau opérationnel, de manière à leur permettre d’affronter conjointement et plus efficacement la menace d’Al-Qaïda pour le Maghreb islamique, le crime organisé et le banditisme national.

Troisièmement, à plus long terme, l’UE devrait poursuivre sa contribution au développement des pays du Sahel, de manière à permettre à ces derniers d’améliorer leurs capacités en matière de prestations sociales et de possibilités de développement au profit de la population. Les pays du Sahel continueront de promouvoir la stabilité interne et s’attèleront à dégager des solutions socio-économiques et des solutions aux tensions ethniques.

Quatrièmement, pour empêcher et combattre l’extrémisme et la radicalisation, nous devons soutenir les États et légitimer les acteurs non gouvernementaux lorsqu’ils élaborent et mettent en œuvre des stratégies et des activités destinées à lutter contre la radicalisation islamique et à promouvoir des visions démocratiques, tolérantes et non violentes de la société.

Notre effort portera sur l’exploitation cohérente des instruments à court et long terme que nous avons à notre disposition pour mettre en œuvre les différentes composantes de cette stratégie. L’engagement des États membres de contribuer à cette stratégie fait, bien entendu, partie intégrante de cela.

Je collabore très étroitement avec le commissaire Piebalgs, dont l’engagement dans la préparation de la stratégie de sécurité et de développement est essentiel, pour veiller à dégager les ressources nécessaires à sa mise en œuvre.

Je suis convaincue que si nous élaborons cette nouvelle stratégie globale et approfondie en poursuivant les orientations politiques, diplomatiques et opérationnelles de notre engagement au Sahel, nous conférerons un nouvel élan à la lutte contre les différentes menaces et à la rencontre des enjeux présents dans la région. Je suis impatiente de pouvoir présenter cette stratégie comme elle le mérite dans quelques semaines et d’inviter au débat les honorables députés du Parlement européen.

 
  
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  José Ignacio Salafranca Sánchez-Neyra, au nom du groupe PPE.(ES) Monsieur le Président, comme énoncé dans le texte de la question orale que nous avons déposée, nous avons, au cours des trois dernières années, été les témoins de l’escalade de la situation, une escalade préjudiciable aux intérêts et aux citoyens de l’Union européenne dans le Sud du Sahara, devenu le refuge d’une branche d’Al-Qaïda, avec son lot de meurtres, de kidnappings, de vols, de chantages, de trafic de stupéfiants, de faits de traite d’êtres humains, dont les victimes sont des citoyens allemands, italiens, espagnols et, très récemment, français. C’est pourquoi nous désirons exprimer notre solidarité avec nos confrères députés français et dire, Madame Ashton, que cette situation exige une réponse ferme et inflexible de la part de l’Union européenne, comme l’a exigé le président Sarkozy.

Dans ce contexte, cette réponse doit impliquer les sphères politique, économique et développementale, et M. Danjean nous a rappelé les ressources considérables que recèle le Fonds européen de développement.

Madame Ashton, je voudrais que vous livriez votre évaluation du sommet du G8 contre le terrorisme en octobre au Mali – lorsque vous avez reçu mandat du Conseil –, un sommet auquel l’Algérie n’a pas assisté. Vous avez déclaré que la réponse devait être régionale. Je pense que c’est un mauvais signe que deux des parties au conflit, le Maroc et l’Algérie, ne coopèrent pas, en plus de l’instabilité de la situation en Tunisie.

Enfin, Madame Ashton, je voudrais que vous nous communiquiez votre évaluation du centre de lutte contre le terrorisme fondé par l’Algérie à 2 000 km au sud d’Alger, et auquel participent le Mali, la Mauritanie et le Niger. Je voudrais que vous me disiez si vous partagez l’opinion que l’objectif de ce centre de lutte contre le terrorisme est d’empêcher la présence de l’Union européenne et des États-Unis pour assurer la sécurité dans la région.

 
  
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  Roberto Gualtieri, au nom du groupe S&D.(IT) Monsieur le Président, Madame la Haute représentante, Mesdames et Messieurs, il semble qu’un accord se dégage entre les remarques de M. Danjean et ce que vous avez évoqué dans votre discours, Madame Ashton, en ce qui concerne l’analyse de la situation, à savoir que la situation du Sahel est critique.

Nous parlons d’une des régions les plus pauvres du monde, d’une région qui est partagée par des pays dont certains ont été, la semaine dernière, la proie d’une instabilité plus dangereuse que jamais. Il s’agit également d’une région où infiltration terroriste et trafic de drogues sont si inextricablement liés que cela en devient réellement préoccupant. En conséquence, la situation n’est plus tenable et constitue une menace réelle pour l’Europe.

C’est la raison pour laquelle l’initiative européenne doit réellement être l’occasion d’un saut qualitatif. À ce jour, l’initiative 2009 pour la sécurité et le développement au Sahel s’est révélée inefficace. Nous avons besoin de la nouvelle stratégie pour la sécurité au Sahel que le Conseil des ministres des affaires étrangères a appelé à adopter et que nous attendons. Je pense que deux points importants ont été mis en lumière: tout d’abord, le caractère régional de l’approche; ensuite, son caractère intégré qui doit nous permettre d’exploiter les différents instruments à la disposition de l’UE d’une manière concrète, opérationnelle et coordonnée. Cela étant, nous devons réaliser qu’il importe d’examiner très soigneusement la possibilité d’une nouvelle mission, parce que les missions de la politique de sécurité et de défense commune sont certes des instruments dont nous pouvons disposer mais elles ne remplacent pas une stratégie politique.

Par conséquent, notre groupe soutient pleinement l’engagement nouveau et renouvelé de l’Europe au Sahel et nous attendons impatiemment de voir cette nouvelle stratégie, d’en discuter dans le détail et d’appuyer sa mise en œuvre.

 
  
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  Charles Goerens, au nom du groupe ALDE. – Monsieur le Président, les incidents mentionnés dans la question orale se multiplient de façon inquiétante dans la région sahélienne.

Sont concernés en premier lieu par les agissements des réseaux de criminels et terroristes, des expatriés qui, pour nombre d’entre eux, font preuve d’un comportement irréprochable, comme les deux ressortissants français dont nous déplorons le sort tragique. En même temps, chaque incident contribue à miner l’autorité des pouvoirs en place, qui aspirent à aborder le traitement de leurs problèmes économiques, de sécurité, de coopération politique dans un cadre régional, dont le système institutionnel est largement d’inspiration européenne, ne l’oublions pas. Les questions soulevées dans le présent débat sont très pertinentes.

Si nous voulons être à la hauteur des attentes en tant qu’Union européenne, nous devons, premièrement, nous entendre sur une lecture commune de la région sahélienne, en particulier, et de la CEDEAO en général.

Deuxièmement, il nous faut prendre à cœur tant les causes directes que les causes sous-jacentes de la détérioration de la situation dans cette région. Parmi les causes sous-jacentes, citons, entre autres, la pauvreté extrême des États faibles incapables de remplir leurs fonctions régaliennes.

Troisièmement, nous devons préciser la stratégie de l’UE dans ce domaine. Merci, Lady Ashton, de nous l’avoir annoncée.

Quatrièmement, nous ne devons pas lésiner sur les moyens à mettre en œuvre pour aider les États concernés à se réapproprier la maîtrise de la situation, notamment dans le domaine de la sécurité. Terminons en disant que le fait d’aborder les problèmes soulevés dans la question de M. Danjean revient à s’occuper de notre propre sécurité.

 
  
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  Sabine Lösing, au nom du groupe GUE/NGL.(DE) Monsieur le Président, de quoi est-il question? De criminalité organisée et/ou de terrorisme politique et/ou religieux? La question importe dès lors que nous voulons évaluer la situation. Les experts de la région estiment qu’il s’agit davantage de criminalité que de terrorisme international sur fond religieux. Les mesures de lutte contre le terrorisme ont souvent des conséquences fatales pour la paix et la démocratie et peuvent être utilisées comme prétexte pour promouvoir d’autres intérêts.

Il se peut également qu’il soit question de l’Afrique en tant que l’une des régions dans laquelle l’Europe a le plus d’intérêts. Pour reprendre les mots de Gilles de Kerchove, coordinateur de la lutte contre le terrorisme de l’UE, la question concerne l’Afrique parce que l’Afrique est le jardin de l’Europe. Je suis opposée à des politiques de sécurité qui contribuent à militariser l’Afrique. La région du Sahel ne peut être sécurisée que si on améliore la situation de la population. Accroître la sécurité et les budgets militaires dans des pays où la population souffre de disettes aigues est une option désastreuse.

Enfin, je voudrais que vous réfléchissiez sur le fait que le kidnapping et les autres formes de criminalité forment un ensemble d’activités qui implique nombre de personnes dans une grande confusion d’organisations. Le financement occidental de structures sécuritaires peut avoir un effet contreproductif à l’égard des efforts de lutte contre le terrorisme et continuer à mettre en péril la vie d’innocents.

 
  
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  Cristian Dan Preda (PPE).(RO) Monsieur le Président, le kidnapping et les meurtres d’Antoine de Lecour et Vincent Delory au Niger nous rappellent douloureusement la nécessité de mettre en œuvre une stratégie de promotion de la sécurité, de la stabilité et de la bonne gouvernance dans la région du Sahel. Le groupe du Parti populaire européen (Démocrates-Chrétiens) soutient une telle stratégie de longue date et, dans ce contexte, je voudrais saluer l’annonce de la Commission européenne, à savoir qu’une stratégie associant les questions de sécurité aux questions de développement sera présentée à la fin de ce mois.

Je pense vraiment que nous devons examiner la question de la sécurité au Sahel sous toutes les coutures parce que, si le terrorisme a réussi à prendre racine dans cette région, c’est parce qu’il y a trouvé des conditions politiques mais surtout sociales et certainement économiques favorables à son implantation. Nous avons affaire à des frontières particulièrement perméables et à l’absence de tout contrôle gouvernemental efficace. Tous ces facteurs ont clairement facilité la diffusion de trafics illégaux en tout genre. Des lacunes au niveau du développement sont également patentes.

À mes yeux, deux facteurs extrêmement utiles permettraient d’assurer la sécurité du Sahel et, par extension, des citoyens européens. Tout d’abord, il faut une stratégie qui couvre la région Sahel-Sahara, destinée à rétablir l’autorité des États de la région sur les territoires abandonnés ainsi qu’à réinstaurer clairement l’état de droit. Ensuite, je pense que nous devrions lancer des programmes de développement socio-économique dans les régions frontalières, de manière à créer des possibilités d’emploi pour les populations locales.

 
  
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  Pier Antonio Panzeri (S&D).(IT) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, ce n’est pas la première fois que d’aucuns demandent à débattre de ce sujet, loin s’en faut, et chaque fois on s’est attaché à prendre des engagements pour mettre en pratique les initiatives demandées dans la région du Sahel, qu’il s’agisse de stabiliser la région ou de renforcer la sécurité.

Comme nous le savons, compte tenu de l’absence des frontières et de la taille énorme de la région, le Sahel est une plate-forme idéale de transit pour les trafiquants de drogues et les groupes terroristes, notamment Al-Qaïda pour le Maghreb islamique. La faiblesse et l’instabilité des États dans cette région représentent le principal problème et, comme on l’a signalé, les menaces touchent directement les populations et les pays de la région, notamment la Mauritanie, le Mali et le Niger.

La tâche principale qui incombe à l’Union européenne est d’élaborer une stratégie de sécurité crédible basée sur les différentes facettes d’une éventuelle action européenne: politique de coopération et de développement, programmes régionaux, stratégies de coordination pour la sécurité des autoroutes, et politiques de formation à la sécurité. C’est pourquoi l’Union européenne non seulement devrait mais doit réellement intervenir le plus rapidement possible, et c’est pourquoi nous attendons avec impatience le texte de la stratégie complète de la Commission, comme vous nous l’avez annoncé, Madame Ashton, de même qu’une intervention forte sur le terrain.

Je terminerai sur une invitation sans équivoque: nous devons accorder beaucoup plus d’attention à ce qu’il se passe dans le Sud de l’Europe parce que beaucoup de choses sont sur le point de changer, et nous ferions mieux d’y être préparés. L’UE a tout intérêt à faire preuve d’une plus grande prévoyance.

 
  
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  Olle Schmidt (ALDE).(SV) Monsieur le Président, la détérioration de la situation de la sécurité au Sahel est extrêmement grave. Elle a coûté quantité de vies et menace de saper les avancées politiques réalisées ces dernières années dans la lutte contre le terrorisme. Bien entendu, je voudrais également témoigner toute ma sympathie à tous ceux qui ont été si durement touchés par cette violence terrible.

En particulier, il est regrettable que les assauts d’Al-Qaïda visent de plus en plus la région du Sahel, alors qu’ils se font plus rares dans nombre d’autres parties du monde. On estime à 25 % le trafic global de cocaïne qui chaque année transite par la région du Sahel pour aboutir en Europe au départ de l’Amérique latine. Le trafic des stupéfiants finance les activités terroristes en leur assurant un revenu stable et, de surcroît, il rend possible le recrutement des jeunes gens dans la région en leur assurant un bon salaire.

Cette évolution effrayante préoccupe également nos collègues de la région du Sahel et, lors de la très récente réunion de l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE de décembre, nous avons précisément discuté de la manière d’améliorer l’état de la sécurité dans cette région et de réduire les trafics. Madame Ashton, les efforts de l’UE à cet égard doivent être sans équivoque et doivent également être revus à la hausse. En collaboration avec les pays de la bande sahélienne, nous devons intensifier et coordonner nos efforts au moyen d’une stratégie régionale globale exactement comme vous l’avez indiqué. L’UE a, à cet égard, une énorme responsabilité commune, celle de fournir une aide de grande qualité accompagnée d’un renforcement net des forces démocratiques.

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. STAVROS LAMBRINIDIS
Vice-président

 
  
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  Santiago Fisas Ayxela (PPE).(ES) Monsieur le Président, comme vous le savez, le Niger, l’un des pays centraux de la région du Sahel, organisera à la fin de ce mois des élections présidentielles et législatives. Je pense que la décision de Mme Ashton d’envoyer une délégation de l’Union européenne pour observer ces élections constitue un geste de soutien important et je voudrais la remercier d’avoir pensé à moi pour la présider.

Tout d’abord, permettez-moi d’exprimer mes regrets eu égard au meurtre récent de deux jeunes ressortissants français par des terroristes aux Niger, sans oublier les soldats nigériens morts pendant l’opération de sauvetage.

La population de la région a clairement rejeté la violence et le terrorisme dans la mesure où ses membres en sont les premières victimes, mais elle demande à l’Union européenne de faire tout ce qui est en son pouvoir pour l’aider à éradiquer la violence terroriste et, notamment, de fournir des armes et un entraînement à ses troupes de manière à permettre à ces dernières de répondre adéquatement aux incursions terroristes.

En outre, en dépit d’une manne importante de richesses naturelles, le Niger est l’un des pays les moins développés du monde. L’Union européenne doit donc œuvrer à établir une stratégie de coopération et de développement efficace en vue d’aider le Niger et la totalité de la région à sortir de la situation difficile dans laquelle elle est plongée. Je pense que nous avons un défi de taille à relever dans cette partie du monde parce que de sa stabilité dépendent non seulement sa prospérité, mais également celle de l’Europe, compte tenu de la proximité géographique.

 
  
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  Ana Gomes (S&D).(PT) Monsieur le Président, l’insécurité dans la région du Sahel exige de consentir des efforts en matière de développement, comme le commissaire Piebalgs l’a déclaré il y a quelques jours. Néanmoins, le développement, même s’il s’agit de quelque chose d’essentiel et de durable, n’est pas suffisant en soi. Comme l’a défendu Mme Ashton aujourd’hui, l’UE a besoin d’une stratégie cohérente capable d’exploiter tous les instruments disponibles, notamment ceux qui visent à réformer les services de sécurité des pays de la région, ainsi qu’à renforcer les capacités institutionnelles et démocratiques. L’Union européenne n’a toutefois pas agi dans ce sens. Qu’il nous suffise de tourner le regard vers la Guinée-Bissau, aujourd’hui presque narco-État à part entière et d’où l’Union européenne a très récemment retiré une mission relevant de la politique de sécurité et de défense commune. C’était une erreur, parce qu’au contraire, il fallait augmenter la taille et élargir le mandat de cette mission, particulièrement depuis que le centre de la criminalité organisée en Guinée-Bissau vise directement l’Europe.

Autre exemple de la manière dont l’Union européenne agit erronément dans la région du Sahel: elle a perdu de vue la nécessité de dégager une solution au conflit du Sahara occidental. Si nous continuons de nous défausser – à l’heure actuelle qui plus est, compte tenu des événements très graves dont la Tunisie est le théâtre et des conséquences de ces événements pour toute la région – nous ne ferons qu’aggraver l’état de la sécurité au Sahel et contribuerons à livrer une nouvelle génération de jeunes désespérés et acculés aux organisations criminelles et terroristes comme Al-Qaïda pour le Maghreb islamique, déjà largement implantée dans la région.

Nous ne pouvons pas continuer de nous priver de cette stratégie cohérente qu’a décrite Mme Ashton.

 
  
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  Mariya Nedelcheva (PPE). – Monsieur le Président, Madame Ashton, chers collègues, le Sahel est une zone charnière entre l’Afrique subsaharienne et l’Europe. Le niveau inquiétant d’insécurité qui y règne nous concerne tous.

J’aimerais attirer votre attention sur la résolution adoptée le 4 décembre dernier par l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE, qui traite justement de ce sujet, et sur les recommandations qui y sont faites.

Il est évident qu’une stratégie européenne commune doit être définie, mais l’Union européenne n’arrivera à rien si elle est seule à agir. C’est pourquoi une grande concertation devrait être menée par les acteurs présents dans la région. Organiser un sommet des chefs d’État des pays de la région sous l’égide de l’ONU, de l’Union européenne et de l’Union africaine permettrait d’affronter clairement le problème et de tenter d’y apporter une solution grâce à la définition d’une stratégie large.

La mise en place d’un plan d’action régional en deux étapes, faisant apparaître une volonté politique claire, est indispensable. La première étape relève de l’urgence. Il s’agit de la mise en commun des moyens et des informations dont les États de la région disposent, ainsi que de la coordination de leurs actions.

La deuxième étape, quant à elle, a trait à la sensibilisation des populations locales et à la prévention du phénomène. Il s’agit d’éviter que les rangs du terrorisme ne grossissent de jour en jour en raison de la frustration et du désœuvrement des populations de la région.

Face à ce problème, l’Union européenne ne peut rester sans rien faire. Je prie donc Mme Ashton de prendre toutes les mesures nécessaires pour accélérer le débat et de proposer des solutions concrètes à ce problème majeur.

 
  
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  Corina Creţu (S&D).(RO) Monsieur le Président, la détérioration de l’état de la sécurité dans la région du sahel n’est plus un problème régional. Hélas, c’est devenu un problème qui concerne l’Union européenne, compte tenu du nombre croissant d’attaques dont des citoyens européens sont les victimes.

Le Sahel fait face, d’abord et avant tout, à une menace terroriste qui croît résolument et dont les victimes sont principalement des Européens, kidnappés et assassinés avec une régularité frappante. Il s’agit également d’une région de transit pour le trafic d’armes et de stupéfiants et un canal pour l’émigration illégale vers l’Europe. Je pense qu’il convient de rehausser le niveau de coopération pratique avec les pouvoirs publics d’Afrique du Nord afin d’accroître l’implication des formes armées et de sécurité dans la région dans la lutte contre le terrorisme. Parallèlement, nous disposons d’un certain nombre d’instruments politiques permettant de stimuler la coopération régionale et, ce faisant, de faire face à cette menace.

J’espère que les efforts en matière d’assistance technique de l’Union européenne seront majoritairement ciblés sur l’appui au processus de développement, parce que nous ne pouvons pas passer outre le fait que les groupes terroristes ont trouvé dans le Sahel un terreau fertile pour leur cause, en raison notamment de la pauvreté qui règne parmi la population et de la fragilité de l’autorité des pouvoirs publics. Je pense qu’une aide au développement accrue et bien ciblée peut contribuer de manière cruciale à améliorer la situation dans la région.

 
  
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  Dominique Vlasto (PPE). – Monsieur le Président, chers collègues, Madame la Haute représentante, nous sommes tous d’accord pour dire que la situation dans la région du Sahel s’est considérablement dégradée. Laisser s’installer une zone de non-droit aux portes de l’Europe est un danger que nous devons combattre fermement et sans attendre. Les groupes extrémistes se multiplient et menacent la vie des populations civiles.

À mon tour, je déplore les pertes en vies humaines et les prises d’otages et m’inquiète pour les ressortissants européens sur place. Jusqu’à présent, le Maroc était un rempart contre les trafics en tous genres en provenance du Sahel. Désormais, les trafiquants de drogue, d’armes ou d’êtres humains contournent le Maroc en passant par la Mauritanie, vers les îles Canaries en direction de l’Union européenne. Il est de la responsabilité, me semble-t-il, de l’Union européenne d’agir pour aider ces États à mettre un terme à ces menaces.

La sécurité de l’Europe se joue sur notre territoire mais aussi dans son voisinage direct. Il est temps pour nous d’agir, et je demande à la Commission et au Conseil de mettre en œuvre un plan d’action pour aider au retour à la sécurité au Sahel.

 
  
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  Gilles Pargneaux (S&D). – Monsieur le Président, Madame la Vice-présidente, Madame la Commissaire, c’est à mon tour, après M. Danjean, en tant que parlementaire européen originaire du nord de la France, de dire non seulement l’émoi qu’a provoqué cet assassinat de jeunes Nordistes mais aussi cette injustice révoltante. Nous saluons leur mémoire.

J’approuve non seulement le diagnostic de M. Danjean, mais je me félicite aussi des premières réponses faites par Lady Ashton au début de notre débat. Mais permettez-moi, Madame Ashton, de vous poser une question: nous savons la porosité des frontières entre le Mali et le Sud algérien, nous savons qu’au-delà du Sahel, le Sahara occidental peut être, demain aussi, source d’insécurité, au même titre que le Sahel aujourd’hui.

En conséquence, pouvez-vous nous dire si vous envisagez d’adopter des initiatives, notamment pour répondre au plan d’autonomie tel que le Royaume du Maroc l’a présenté devant l’ONU, qui permettrait – je le crois – de sécuriser la zone et d’établir le dialogue nécessaire avec notamment les autorités algériennes.

 
  
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  Charles Tannock (ECR).(EN) Monsieur le Président, hélas, les troupes salafistes qui relèvent de l’organisation mondiale Al-Qaïda ont trouvé refuge dans la région du Sahel, territoire étendu et éloigné, parfait pour l’entraînement des terroristes, l’enlèvement d’infortunés innocents – et je me joins à tous ceux qui ont exprimé leurs condoléances aux familles des deux citoyens français récemment assassinés – et, bien sûr, le trafic de drogues et la criminalité organisée.

Voilà qui représente un sérieux défi pour la sécurité qui vient s’ajouter aux problèmes de même nature que nous rencontrons déjà dans la région frontalière de l’Afghanistan et du Pakistan, en Somalie et au Yémen. Désormais, l’UE doit coopérer étroitement avec notre allié, les États-Unis, et avec d’autres pays démocratiques comme l’Inde et Israël, ainsi qu’avec certains gouvernements voisins arabes et africains modérés, en vue de dégager une stratégie commune permettant de vaincre cette menace qui pèse sur la sécurité mondiale.

Madame la Haute représentante, l’opération Atalanta, lancée au large de la Somalie, a constitué un succès. Peut-être convient-il désormais d’envisager une initiative – sous la tutelle de l’OTAN, une mission relevant de la politique de sécurité et de défense commune présidée par la France, ou quelque chose comme ça – destinée à triompher de cette menace mondiale, notamment dans la région du Mali, de la Mauritanie et du Niger, qui sont déjà des pays extrêmement pauvres et qui ont besoin de toute l’aide possible.

 
  
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  Catherine Ashton, vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.(EN) Monsieur le Président, je me permettrai d’être brève parce que les honorables députés ont non seulement largement contribué à soutenir l’étendue de l’approche que nous nous proposons d’adopter mais ont également soulevé quelques questions particulières.

J’en relèverai deux. La première est celle-ci et d’une certaine manière, c’est Mme Salafranca qui l’a abordée la première: comment allons-nous soutenir les initiatives régionales, qui sont souvent le fait d’un pays en particulier mais n’associent pas tous les membres de la région, et comment allons-nous nous efforcer au mieux de fournir le type de soutien qui garantira l’engagement de tous les pays de la région? C’est à dessein que j’élargis la portée de la question posée par l’honorable députée. L’un des défis auquel nous sommes confrontés est de soutenir les initiatives que les pays sont en mesure de prendre individuellement et collectivement, tout en veillant à leur efficacité grâce à de leur caractère étendu, sur le plan du nombre de pays concernés ou sur le plan de l’approche abordée.

S’il est une chose que nous devons examiner, c’est le moyen de maintenir un équilibre entre nos propres actions et le soutien aux actions qui émanent de ceux qui sont les plus concernés. Je suis toujours très préoccupée d’examiner tous les moyens d’intervention qui s’offrent à nous, qu’il s’agisse d’octroyer notre soutien ou d’utiliser les moyens à notre disposition. Soutenir et appuyer les initiatives de terrain, nées sur le terrain, se révèle souvent, mais pas toujours, la voie à suivre.

En ce qui concerne le Sahara occidental et les propositions déposées, il nous faut examiner cela. Je dois étudier où il est le plus judicieux d’accorder notre soutien. À la suite d’un certain nombre de discussions avec quelques honorables députés, je réalise que certaines questions, notamment concernant le Sahara occidental, sont devenues prioritaires. Nous devons réfléchir à cette approche de manière approfondie. Nous allons continuer d’œuvrer à cet égard. Cela fera partie des discussions que nous tiendrons au Conseil des affaires étrangères mais nous reviendrons vers le Parlement à ce sujet pour nous assurer que nous faisons bonne route.

Désormais, il importe que nous avancions dans une stratégie qui considère réellement le court terme, le moyen terme et le long terme, mais également l’ampleur de la voie dans laquelle nous nous engageons au nom de l’Union européenne, du Parlement, de la Commission, et d’un ensemble d’États membres capable d’embrasser tout cela dans le cadre d’une stratégie bien pensée pour le futur.

 
  
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  Le Président. – Le débat est clos.

 
  
  

PRÉSIDENCE DE M. JERZY BUZEK
Président

 
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