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Procédure : 2011/2656(RSP)
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RC-B7-0256/2011

Débats :

PV 06/04/2011 - 17
CRE 06/04/2011 - 17

Votes :

PV 07/04/2011 - 6.7
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Textes adoptés :

P7_TA(2011)0152

Compte rendu in extenso des débats
Mercredi 6 avril 2011 - Strasbourg Edition JO

17. Situation en Côte d’Ivoire
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Procès-verbal
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  Le Président. – L’ordre du jour appelle la déclaration de la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité sur la situation en Côte d’Ivoire.

 
  
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  Zsolt Németh, au nom de la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.(EN) Monsieur le Président, lundi dernier, les opérations des Nations unies en Côte d’Ivoire et les troupes françaises Licorne ont procédé à la neutralisation des armes lourdes aux mains de l’ancien président Laurent Gbagbo. Au cours des dernières semaines, ces armes avaient été régulièrement utilisées pour terroriser la population civile à Abidjan, causant de nombreux morts et blessés. La neutralisation de ces armes était donc nécessaire pour protéger les civils et a été effectuée conformément au mandat confié par le Conseil de sécurité des Nations unies dans sa résolution 1975.

Peu après, les Forces républicaines loyales au président Alassane Ouattara, élu démocratiquement, ont lancé une offensive au sol contre le dernier bastion de Laurent Gbagbo à Abidjan afin de le forcer à céder le pouvoir. Au vu des opérations en cours, nous espérons que l’ensemble de la Côte d’Ivoire est désormais sous le contrôle de son gouvernement légal. Je regrette que ce transfert de pouvoir n’ait pu se faire qu’au détriment de vies humaines et dans la souffrance, et que le résultat des élections n’ait pas suffi. Cependant, il s’agit d’une victoire pour la démocratie en Afrique et un message important est lancé à de nombreux pays qui organisent des élections politiques sur ce continent.

Depuis sa défaite aux élections présidentielles du 28 novembre 2010, M. Gbagbo a refusé de céder le pouvoir malgré que les observateurs internationaux aient déclaré ces élections libres et justes et que l’ensemble de la communauté internationale ait reconnu, à travers la certification des Nations unies, son opposant, Alassane Ouattara, président élu légitimement.

Au cours des quatre mois qui se sont écoulés depuis lors, plusieurs initiatives ont été prises par la CEDEAO, l’Union africaine et les Nations unies pour négocier un transfert de pouvoir pacifique. Je tiens à féliciter ces organisations pour leurs efforts en vue du rétablissement de la paix et de la démocratie. Malheureusement, toutes les propositions de transfert pacifique du pouvoir ont été rejetées par M. Gbagbo, qui s’est évertué à se cramponner au pouvoir illégalement. Par conséquent, l’UE le tient pour personnellement responsable des souffrances et des effusions de sang qui ont accablé les Ivoiriens au cours de ces quatre derniers mois de crise post- électorale. M. Gbagbo devrait donc être traduit en justice pour répondre de ses actes.

Par la voix de sa haute représentante, la baronne Ashton, l’UE a félicité le président Ouattara pour sa victoire, mais nous sommes conscients des nombreux défis qui l’attendent. Il a gagné la guerre, mais doit désormais gagner la paix. L’ordre public doit être rétabli, de manière à ce que les centaines de milliers de personnes ayant fui leur maison, voire leur pays, puissent rentrer chez elles sans danger. L’économie doit être relancée pour mettre fin aux dix dernières années de récession et apporter croissance et emploi. L’administration doit recommencer à fonctionner pour que les services publics puissent être assurés.

L’UE est restée aux côtés de la Côte d’Ivoire au cours de ces longues années de crise. La coopération européenne a fourni une assistance humanitaire, mais aussi une aide à la reconstruction et à la réconciliation après le conflit. Quelque 500 millions d’euros ont été déboursés depuis 2003. Au cours des derniers mois dramatiques, l’UE a pris plusieurs mesures restrictives à l’encontre d’individus et d’entités qui soutenaient M. Gbagbo, et cela a été reconnu par nos partenaires africains comme une aide précieuse tout au long de la crise. L’UE devrait continuer à accompagner la Côte d’Ivoire en ce moment crucial. Un programme d’aide est en cours de préparation en vue d’être lancé dès que possible. Il est désormais temps de commencer travailler à l’instauration de la paix en Côte d’Ivoire.

 
  
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  Cristian Dan Preda, au nom du groupe PPE. – Monsieur le Président, les dernières vingt-quatre heures ont été particulièrement confuses en Côte d’Ivoire. On a assisté à l’annonce d’une reddition imminente de Laurent Gbagbo, puis il y a eu un démenti. Maintenant, lasses d’attendre les résultats d’interminables tractations, les forces républicaines du président Ouattara ont lancé une offensive sur Abidjan.

Je crois que toute cette confusion ne devrait pas nous faire oublier ce qui nous a amenés à la situation actuelle. Je rappelle que, dans les quatre mois écoulés, il y a eu plusieurs centaines de morts et un million de déplacés réfugiés. Il ne faut pas laisser l’arbre cacher la forêt. Si on en est là, c’est parce que Laurent Gbagbo a obstinément refusé d’entendre la voix des urnes et d’accepter sa défaite. Je pense qu’il est enfin temps, alors que son régime s’écroule à la suite des défections de ses fidèles, qu’il cède le pouvoir au président légitime, Alassane Ouattara.

Il ne faut pas non plus oublier les violations des droits de l’homme et du droit humanitaire commises dans le pays, qui pourraient constituer des crimes contre l’humanité. Aucun effort ne doit être ménagé pour amener les auteurs devant la justice, y compris au niveau international.

Enfin, je voudrais saluer l’intervention de l’ONUCI, avec le soutien des forces françaises, pour appliquer le mandat donné par le Conseil de sécurité des Nations unies de mettre fin à l’utilisation des armes lourdes et protéger les civils.

 
  
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  Thijs Berman, au nom du groupe S&D.(NL) Monsieur le Président, la fin de la lutte pour le pouvoir est en vue en Côte d’Ivoire, après la mort de plus de 1 500 personnes, le déplacement de près d’un million de réfugiés dans la région, le pillage de rues entières et l’enlisement de l’économie. Le pays vit une catastrophe et c’est le prix que Laurent Gbagbo a eu à payer pour avoir refusé d’admettre sa défaite. Son refus incessant de respecter le souhait des électeurs doit être condamné fermement.

De nombreuses autres doivent aussi être condamnées: toute la violence des derniers mois, les nombreuses violations des droits de l’homme, les menaces, la violence à l’encontre du personnel des Nations unies, les discours incitant à la haine et aux enlèvements. On entend encore quelques coups de feu, mais le départ de Gbagbo est en cours de négociation, et c’est une bonne nouvelle. Cependant, une situation d’urgence se présente en Côte d’Ivoire. De nombreux Ivoiriens sont désormais à court de nourriture et d’eau, car ils n’ont pas osé quitter leur domicile.

Il est essentiel que le président Alassane Ouattara bénéficie de tout notre soutien au cours du processus de retour de l’état de droit, grâce auquel la population pourra à nouveau vivre en paix et sans crainte et dans le cadre duquel la liberté de la presse sera restaurée. Un retour de l’état de droit est désormais la priorité. À cet égard, le président a le devoir d’éviter que ses troupes aient recours à la force vis-à-vis de la population. De plus, il est positif que M. Ouattara ait ordonné une enquête sur les circonstances du massacre choquant de Duékoué. Quel que soit le moyen choisi par les Ivoiriens pour restaurer l’état de droit, via les tribunaux ou via une commission de vérité et de réconciliation, une chose est claire: il n’existe aucun délai de prescription pour les crimes de guerre. La Cour pénale internationale doit pouvoir faire son travail.

Les sanctions ont eu des conséquences: M. Gbagbo a été financièrement dépouillé. Cependant, nous devons maintenant lever rapidement ces sanctions dès l’entrée en fonction légitime de M. Ouattara, car tout est à l’arrêt. Même les programmes d’approvisionnement en médicaments contre le VIH/sida en Côte d’Ivoire sont désormais menacés. Monsieur le Président, ceux qui aident la Côte d’Ivoire ne devraient pas laisser le pays dans une situation difficile.

 
  
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  Marielle De Sarnez, au nom du groupe ALDE. – Monsieur le Président, à l’heure où nous parlons, on peut espérer que le dénouement de la crise ivoirienne est désormais proche et que l’annonce de la reddition de Laurent Gbagbo va intervenir – nous le souhaitons tous – dans les heures qui viennent.

La communauté internationale aura été bien patiente, l’Union africaine ayant multiplié les médiations et les Nations unies s’étant gardées d’intervenir pendant des mois entre les deux camps. Et si, en définitive, l’ONUCI est intervenue, avec l’appui de la force Licorne, conformément au mandat du Conseil de sécurité, c’est bien pour défendre les civils contre les armes lourdes utilisées par le pouvoir en place.

Cette crise ivoirienne doit désormais servir d’exemple à tous ceux qui refusent de quitter le pouvoir malgré leur défaite électorale. Ceux-là doivent savoir que, désormais, la communauté internationale est déterminée à faire respecter le droit. Mais dans des pays ainsi déchirés, où la nation est encore un concept en devenir, on ne peut se contenter de proclamer un vainqueur. Il faut œuvrer à la réconciliation nationale. C’est le message que doit maintenant entendre Alassane Ouattara, à qui incombera la responsabilité de mettre en place un gouvernement d’union nationale.

Alors que les deux camps se sont mutuellement accusés de massacres et de crimes contre l’humanité, des enquêtes doivent être ouvertes, des responsabilités doivent être établies et la justice doit passer. La justice peut être vengeresse, mais elle peut aussi être apaisante. Permettez-moi de plaider pour cette seconde option, si cela peut conduire la Côte d’Ivoire à retrouver la paix et la stabilité, et à renouer avec la croissance et le développement.

 
  
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  Judith Sargentini, au nom du groupe Verts/ALE.(NL) Monsieur le Président, je suis confuse. J’ai entendu la Présidence hongroise dire: M. Ouattara a gagné la guerre, maintenant, il doit gagner la paix. Cependant, j’ai regardé la télévision toute la journée pour suivre l’actualité et il me semble que M. Ouattara n’a pas encore tout à fait gagné la guerre. Il semblerait qu’il soit en bonne voie, mais il n’y est pas encore.

Lorsqu’il finira par occuper son poste de président du pays, il laissera derrière lui quatre mois de misère ayant plongé le pays dans une situation catastrophique avec une économie en mille morceaux, des morts et des groupes de population en conflit. Quel départ pour une nouvelle période de gouvernance! Si nous utilisons des expressions comme «une victoire pour la démocratie en Afrique» afin de décrire des élections ayant tourné à la guerre, il me semble que nous choisissons mal nos mots. Cependant, le fait que le pays ait répondu aux élections de cette façon est une question bien plus grave.

Que devrions-nous faire maintenant, en Europe, si M. Ouattara a la chance d’occuper sa fonction? Je pense qu’avec le boycott du cacao, nous avons démontré que nous sommes capables de prendre des mesures rapides et d’utiliser le commerce pour promouvoir la démocratie. La Côte d’Ivoire est un pays ACP: en tant que tel, il bénéficie d’une aide au développement de notre part et, par conséquent, un dialogue politique s’impose. Nous devons entamer ce dialogue politique avec un homme capable de nous montrer qu’il peut rassembler toutes les parties du pays. Il doit nous montrer, ainsi qu’au reste du monde, mais surtout à son peuple, qu’il est capable de dépasser la violence et de mettre des réformes en chantier.

 
  
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  Marie-Christine Vergiat, au nom du groupe GUE/NGL. – Monsieur le Président, il est difficile d’intervenir sur la situation en Côte d’Ivoire quand celle-ci évolue sans cesse et tant elle est effectivement confuse.

Au préalable, je voudrais remercier mes collègues rapporteurs fictifs, qui ont travaillé ce matin sur la proposition de résolution qui vous sera soumise demain, car nous avons tous travaillé ensemble pour que cette proposition soit équilibrée et qu’elle préserve l’avenir. Nous savons aujourd’hui que des exactions ont vraisemblablement été commises dans les deux camps, et il faudra que les coupables soient poursuivis, quels qu’ils soient.

C’est la population ivoirienne qui est la première victime de la situation en Côte d’Ivoire. L’ONU sur place, via l’ONUCI, n’a pas pu, n’a pas su les protéger. Pire, elle s’est engagée, avec l’appui des forces militaires françaises, au détriment d’un seul camp, sur la base certes d’une résolution de l’ONU, mais qui date de 1975, c’est-à-dire il y a 36 ans. Le président en exercice de l’Union africaine, M. Obiang Nguema, l’a clairement condamnée hier. Heureusement, elle ne nous semble pas participer à l’assaut final que semblent en train de lancer les troupes de M. Ouattara.

De ce fait, nous n’avons pas voulu nous associer à cette résolution, et nous ne la voterons pas. On connaît le rôle de la France en Afrique. La Françafrique a fait suffisamment de dégâts, et elle continue à en faire. D’ailleurs, les autorités françaises ne s’en cachent pas puisqu’elles disent vouloir préserver les intérêts de la France qu’elles veulent assumer.

 
  
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  Bruno Gollnisch (NI). - Monsieur le Président, ce qui est terrible dans nos sociétés modernes et, en particulier, dans notre société européenne, et plus particulièrement encore dans notre Parlement, c’est le grégarisme général, le panurgisme absolu.

À part les deux derniers intervenants, tout le monde répète en boucle les mêmes choses qu’on a lues dans la presse, qu’on entend à la radio, qu’on entend à la télévision. Tout le monde nous dit que M. Ouattara a gagné les élections, c’est bien possible, mais, en tout cas, ce n’est pas évident!

Tout le monde nous dit que l’intervention militaire brutale qui a eu lieu hier, c’est une neutralisation des armes lourdes. Qu’en termes galants ces choses-là sont dites! Une neutralisation des armes lourdes, c’est un bombardement. Et moi, j’ai vu les effets des bombardements. Moi qui suis officier de réserve, je puis vous dire qu’un bombardement, ça consiste à tuer des gens, des gens qui grillent, des gens qui éclatent! Autrement dit, c’est une action militaire en faveur d’un camp et au détriment de l’autre! C’est peut-être justifié, mais ici, entre parlementaires, entre responsables politiques, nous devrions avoir le courage de dire la vérité.

On nous dit aussi que ces armes allaient terroriser la population civile. Mais enfin, dans une guerre civile, il y a des civils qui sont armés, surtout quand un camp dispose de kalachnikovs et de la moitié des effectifs militaires du pays avec lui. Alors, je crois qu’il faudrait en finir avec cette hypocrisie. Nous sommes intervenus brutalement en faveur d’un camp contre l’autre. Était-ce justifié? C’est possible.

Je terminerai tout simplement en disant que je ne vois pas en quoi M. Ouattara serait innocent des exactions commises par ses troupes, et en quoi M. Gbagbo serait toujours responsable des exactions commises par les siennes!

(L’orateur accepte de répondre à une question «carton bleu» (article 149, paragraphe 8, du règlement))

 
  
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  Cristian Dan Preda (PPE). - Monsieur le Président, c’est tout simplement pour demander à M. Gollnisch s’il croit que le verdict des urnes signifie quelque chose, si, dans ce sens-là, la victoire de Outtara doit finalement conduire à son installation au pouvoir. C’est tout simplement une question de légitimité démocratique.

J’ai été en Côte d’Ivoire comme chef de la mission d’observation électorale, et je peux vous assurer que les élections ont été correctes et que la victoire est claire et nette.

 
  
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  Bruno Gollnisch (NI). - Monsieur Preda, j’ai dit que M. Ouattara avait peut-être gagné les élections, je ne crois pas que ce soit du domaine de l’évidence que vous ayez décrite. En tout cas, ce n’était pas l’avis du Conseil constitutionnel ivoirien, certes composé sur des bases politiques, exactement comme le Conseil constitutionnel français. Je serais ravi, en ce qui me concerne, qu’on s’occupe des élections françaises. Je représente une formation qui a pour elle des millions d’électeurs, dont le leader est arrivé en finale de l’élection présidentielle, qui n’a pas un seul député, un seul sénateur dans le parlement de son propre pays. Ça c’est un scandale qui vous laisse tous parfaitement indifférents!

(cris «hors sujet» dans la salle)

 
  
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  Filip Kaczmarek (PPE).(PL) Monsieur le Président, l’ancien président de la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo, aurait indiqué hier qu’il est prêt à se rendre et aurait demandé une protection aux Nations unies. Les négociations sur la reddition de M. Gbagbo sont en cours. Elles sont menées après que les forces loyales à M. Ouattara, président élu démocratiquement, ont pris le contrôle de la résidence présidentielle à Abidjan. Selon le Premier ministre Soro, la fin du gouvernement Gbagbo n’est plus qu’une question d’heures. Je n’en suis pas certain, mais j’espère que ce sera le cas. Cependant, nous savons avec certitude que des civils, y compris des femmes et des enfants, sont également tués dans les conflits armés. Dans les affrontements entre partisans des deux hommes politiques, environ 1 500 personnes ont été tuées et un million ont dû quitter leur domicile. Il y a quelques jours, un des conseillers de M. Gbagbo a déclaré que même un éventuel massacre à Abidjan ne convaincrait pas l’ancien président d’admettre sa défaite aux élections présidentielles et de céder le pouvoir. Il est donc facile de prévoir ce qu’il devrait se passer en Côte d’Ivoire: une fin rapide au conflit, le départ de l’ancien président du pays, ce qui stabiliserait nettement la situation, la traduction en justice de tous ceux ayant commis des crimes de guerre et des meurtres, ainsi que la stabilisation du pays. L’Union européenne devrait soutenir toutes ces mesures.

 
  
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  Mitro Repo (S&D).(FI) Monsieur le Président, nous nous sommes bien sûr empressés d’aider la Libye, mais, avec la Côte d’Ivoire, nous sommes restés inactifs depuis novembre. Les sanctions imposées par le Conseil sont un pas dans la bonne direction, mais quand seront-elles levées? Pourquoi ont-elles été utilisées pour bloquer l’exportation des fèves de cacao de l’autorité portuaire d’Abidjan et pour fermer la raffinerie de pétrole? Si nous n’aidons pas, au moins ne causons pas davantage de dommages. Les victimes innocentes seront l’économie ivoirienne et, à plus long terme, les consommateurs européens.

Laurent Gbagbo doit montrer l’exemple et un soutien doit être apporté pour un retour rapide des réfugiés à leur domicile. Les pays voisins ne peuvent pas supporter les volumes actuels de réfugiés. L’UE doit aider à l’organisation d’élections et à la construction d’institutions démocratiques. Les affaires normales ne devraient toutefois pas être empêchées. La Côte d’Ivoire est l’économie la plus prospère d’Afrique de l’Ouest. La reprise économique et l’accès aux marchés européens pour les produits exportés sont les véritables clefs du rétablissement du pays. J’attends une réponse de la Commission.

 
  
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  Charles Goerens (ALDE). - Monsieur le Président, contrairement à M. Gollnisch, je suis d’avis qu’on ne peut pas laisser crever dans l’indifférence générale des civils exposés à la force, à la violence dont fait usage le chef d’État illégitime.

La résolution 1975 du Conseil de sécurité des Nations unies autorise la communauté internationale à faire barrage à un régime qui retourne les armes contre son propre peuple. Il s’agit, dans le cas présent, d’un progrès, dans la mesure où l’on n’est plus condamné à assister sans défense à l’exposition des populations civiles à la barbarie de leurs dirigeants.

Cependant, si d’un côté, il y a lieu de saluer le fait que le droit international permet désormais de briser le mur de l’indifférence, il importe de l’autre que toutes les précautions soient prises en vue de garantir que le recours à la force militaire reste le recours ultime. En Côte d’Ivoire, le président Gbagbo n’a hélas rien entrepris pour prévenir cette issue fatale.

En définitive, j’ose exprimer l’espoir que la résolution 1975 sur la Côte d’Ivoire, tout comme la résolution 1973 sur la Libye, contribue à dissuader quiconque d’invoquer la souveraineté d’un État comme prétexte pour tuer ses propres ressortissants. Avec la Cour pénale internationale, avec l’attitude récente adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies, la barbarie dans l’impunité ne reste plus la règle, mais, espérons-le, deviendra bientôt l’exception.

 
  
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  Sabine Lösing (GUE/NGL).(DE) Monsieur le Président, dans un pays profondément divisé comme la Côte d’Ivoire, une paix durable peut-elle être amenée par des méthodes violentes et le vainqueur des élections présidentielles peut-il être légitimé? J’en doute beaucoup, principalement car les causes réelles du conflit n’ont pas trouvé de solutions. Le pays a été déstabilisé à la suite de problèmes économiques amenés, en grande partie, par les programmes d’ajustement structurel de la Banque mondiale. Les sanctions rapidement imposées en vue d’affaiblir le gouvernement Gbagbo ont exacerbé la situation et débouché sur une crise humanitaire en Côte d’Ivoire. La légitimité des deux prétendants à la présidence est contestée. Les armées des deux camps sont responsables du massacre de la population civile.

Une fois encore, l’Occident a pris position et les Nations unies (ONU) sont désormais en guerre aux côtés des troupes françaises pour tenter d’assurer la victoire d’un camp dans ce conflit. Les puissances européennes décideront-elles encore une fois du destin du peuple africain comme au temps des colonies, mais, cette fois, avec le soutien des Nations unies? Où sont passés les principes du droit international? Est-ce le concept sur lequel les Nations unies sont fondées? Au lieu de viser des solutions pacifiques aux conflits, les Nations unies semblent soutenir les guerres civiles ou prendre position au sein de celles-ci. Qui y trouve son intérêt?

 
  
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  Michèle Striffler (PPE). - Monsieur le Président, chers collègues, je voudrais quand même préciser qu’au-delà de la crise politique en Côte d’Ivoire, nous sommes face à une véritable crise humanitaire qui menace de perdurer.

Les violences postélectorales ont fait plus d’un million de déplacés internes et de réfugiés. De plus, cet afflux massif de réfugiés pourrait raviver des tensions latentes dans cette région. La crise humanitaire, chers amis, ne sera pas réglée avec l’accord politique qui est actuellement négocié. Il est impératif que nous puissions agir très rapidement pour éviter le pire. Le chaos va de toute façon durer plusieurs mois à Abidjan.

Je me félicite de la décision de la Commission, qui a quintuplé son aide humanitaire, portant ainsi le soutien européen à plus de trente millions d’euros. L’Union européenne doit mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour aider les populations les plus vulnérables et veiller à l’évolution de leurs besoins.

Il faut aussi faire attention à ce que la situation plus médiatisée en Libye n’occulte pas la gravité de la crise humanitaire en Côte d’Ivoire. De plus, en ce moment, la situation sécuritaire empêche les humanitaires d’agir et d’avoir accès aux populations, ce qui est dramatique.

Je terminerai tout simplement en disant qu’il ne pourra y avoir aucune impunité et que tout doit être fait pour que justice soit faite.

 
  
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  Bernd Posselt (PPE).(DE) Monsieur le Président, d’abord, je voudrais exprimer ma surprise que la baronne Ashton ne soit une nouvelle fois pas présente. Cependant, je suis heureux qu’elle soit représentée par mon ami, M. Németh. J’aimerais voir cet homme, M. Füle ou une autre personne coordonner en permanence la politique étrangère de l’Union européenne et pas quelqu’un qui n’est presque jamais présent au Parlement européen.

Sur le sujet lui-même, je souhaite souligner clairement que la Côte d’Ivoire a, bien sûr, de nombreux problèmes qui doivent être résolus. Cependant, le président Ouattara est clairement le vainqueur des élections et la personne qui détient la légitimité démocratique. C’est l’avis de l’Union africaine et de nombreux autres organismes. Par conséquent, nous devrions être reconnaissants que les Nations unies (ONU) et, surtout, le Secrétaire général des Nations unies ainsi que le président Sarkozy, aient permis d’éviter un massacre tel que ceux survenus dans d’autres États africains, comme le Rwanda et la République démocratique du Congo. Pour cette raison, nous ne devrions pas chicaner sur ce sujet.

Bien sûr, cela ne résout pas les problèmes. Cependant, lorsque M. Poutine commence à critiquer l’ONU et à dire que son secrétaire général outrepassé son mandat, cela déstabilise les Nations unies à un moment où cette organisation est indispensable. L’Union africaine ne devrait pas non plus exprimer son opinion si vivement, car elle n’est absolument pas parvenue à apporter son aide lors de cette crise. L’Union africaine aurait dû aider à amener la démocratie en Côte d’Ivoire. Nous, Européens, avons commis de nombreuses erreurs dans le passé et nous continuons à en commettre. Cependant, dans ce cas, les erreurs émanent de quelqu’un d’autre.

 
  
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  Le Président. – Nos services m’ont informé, et je pense qu’il est important de le savoir, qu’au début de l’année, le bureau de la vice-présidente et haute représentante a envoyé une liste des séances plénières auxquelles elle pourrait assister. On savait, dès ce moment-là, qu’elle ne pourrait pas être présente cette fois. Naturellement, si nous avons un débat impliquant des questions de ce type, quelqu’un d’autre doit la représenter et les choses doivent être claires à ce sujet.

Passons maintenant à la procédure «catch-the-eye». Il y a trois orateurs.

 
  
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  Mariya Nedelcheva (PPE). - Monsieur le Président, la Côte d’Ivoire connaît une véritable escalade de violence. Le conflit politique entre deux personnes s’est malheureusement transformé en crise humanitaire.

Il est clair que le principe démocratique de base qui consiste à respecter les résultats des élections doit être garanti. Le départ de Gbagbo relève donc de la pure évidence. Mais que prévoit-on après? Les tensions entre les deux camps risquent de s’aggraver. Et si nous débouchons sur une guerre civile, qu’avons-nous prévu? Trois choses vers lesquelles nous devons tendre.

D’abord, le maintien de la paix et de la stabilité, car l’urgence, c’est de permettre aux Ivoiriens de pouvoir vivre normalement, de pouvoir se nourrir, se soigner, travailler, aller à l’école. Une commission d’enquête indépendante sur les violences commises depuis le début du conflit devra être mise en place.

Ensuite, il faut que l’ONUCI et l’Union africaine continuent à jouer leur rôle. Mais il faut également réfléchir à la mise en place d’un mécanisme de dialogue dans lequel aucune partie, ni à l’intérieur du pays, ni au sein de la communauté internationale, ne serait exclue.

Enfin, je rappelle que l’Union européenne a envoyé une mission d’observation électorale. Il est du rôle de l’Union d’insister pour que les recommandations faites soient prises en compte et intégrées au processus de sortie de crise.

 
  
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  Catherine Bearder (ALDE).(EN) Monsieur le Président, avec l’aide de la technologie moderne, je regarde, assise ici, la situation évoluer en Côte d’Ivoire. Ces équipements jouent un rôle en Côte d’Ivoire, tout comme ils l’ont fait en Afrique du Nord, avec des gens envoyant des messages pour obtenir une assistance ou de l’aide médicale.

Au cours des six derniers mois, la patience de nos amis de Côte d’Ivoire a été mise à rude épreuve: nous avons vu le pays s’enliser dans la situation actuelle comme on regarde un accident de voiture au ralenti – et ce sont toujours les plus vulnérables qui souffrent. Cette semaine, nous avons parlé des réfugiés venant d’Afrique du Nord en Europe, mais nous avons aussi entendu parler de près d’un million d’entre eux fuyant vers les pays voisins qui sont aussi pauvres, voire plus, que la Côte d’Ivoire elle-même. Les amis de ce pays doivent se tenir prêts à aider, dès que possible, au retour de la normalité et de la santé. Ils doivent donner aux gens de là-bas une bonne perspective d’avenir.

 
  
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  Ilda Figueiredo (GUE/NGL).(PT) Monsieur le Président, la situation de guerre civile en Côte d’Ivoire reste inquiétante, avec un pays paralysé économiquement et de hauts niveaux de violence affectant le peuple et plongeant le pays dans une crise humanitaire. Il est temps de mettre fin à cela. Nous savons qu’il y a des raisons profondes à la situation grave vécue là-bas, particulièrement la pauvreté et l’inégalité sociale laissées par l’ancien colonialisme ou par les plans d’ajustement structurel imposés pendant des années par le Fond monétaire international (FMI). Cependant, ces quatre derniers mois de misère à la suite des élections ont démontré à quel point il est regrettable que la communauté internationale, y compris l’Union européenne, n’ait pas suffisamment utilisé les canaux diplomatiques pour trouver une solution pacifique et politique à la crise.

Le rôle de la France à cet égard est également regrettable, puisqu’elle a préféré avoir recours à une intervention militaire plutôt que de persister dans la voie diplomatique. Nous appelons donc toutes les parties à mettre fin à cette guerre et aux violences et nous insistons pour que l’UE agisse en conséquence.

 
  
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  Zsolt Németh, au nom de la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la sécurité.(HU) Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, pour reprendre les mots d’un célèbre poète hongrois: «parmi les meurtriers, celui qui se tait est un complice». Lorsque nous voyons que des milliers de personnes meurent et que des gens s’enfuient par millions, nous ne devons pas nous réconforter avec des phrases qui rappellent la colombe de la paix, mais nous devons agir. De plus, avant de dresser des parallèles entre l’action menée en Libye, celle qui est menée en Côte d’Ivoire et celle d’Irak, je voudrais rappeler à tout le monde que l’action actuelle ne fait pas penser à l’action menée en Irak ou même en Afghanistan, mais à celle menée au Rwanda et au Kosovo, et ce n’est pas une coïncidence si nous avons tant parlé ces dernières semaines de «notre droit et notre responsabilité de protéger» (comme nous l’avons formulé) les civils et les citoyens.

En conséquence, je tiens à répéter que oui, M. Gbagbo a perdu ce combat, il est seul dans son bunker et il attend son sort. Je voudrais aussi souligner que les fondements légaux de cette action sont indiscutables dans la situation actuelle. Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté la résolution 1975, et celle-ci délivre un mandat tout à fait clair pour cette action. Troisièmement, je souhaite aussi insister sur le fait que les crimes commis ne doivent plus rester dans l’obscurité et sans suite. Je suis très satisfait que le président Ouattara, légitimement élu, ainsi que le Premier ministre aient autorisé les Nations unies à conduire une enquête internationale sur les massacres perpétrés et aient clairement soutenu cette idée. L’enquête sur ces massacres fait donc déjà partie de tout accord et représente très clairement une condition indispensable.

En ce qui concerne la contribution de l’Union européenne, à ce stade, ECHO a déjà envisagé 30 millions d’euros d’aide humanitaire. Comme je l’ai indiqué dans mon discours introductif, un programme sera préparé par l’Union européenne dans un avenir proche en vue d’apporter le soutien de l’UE aux objectifs économiques et de construction des institutions du président légitimement élu et du gouvernement.

 
  
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  Le Président. – J’ai reçu, conformément à l’article 110, paragraphe 2, du règlement, sept propositions de résolution(1).

Le débat est clos.

Le vote aura lieu demain à 12 heures.

(La séance, suspendue à 20 h 35, est reprise à 21 heures)

 
  
  

PRÉSIDENCE DE MME SILVANA KOCH-MEHRIN
Vice-présidente

 
  

(1)Voir procès-verbal.

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