Le Président. - Je souhaite la bienvenue au Président de la République française, M. François Hollande. Bienvenue, Monsieur le Président, au Parlement européen.
(Applaudissements)
Permettez-moi également, Monsieur le Président, de souhaiter la bienvenue au ministre des affaires étrangères de la République française, M. Laurent Fabius. Bienvenue Monsieur le Ministre.
(Applaudissements)
Je souhaite aussi la bienvenue à un autre collègue qui travaille régulièrement avec nous, le ministre délégué aux affaires européennes, M. Bernard Cazeneuve. Bienvenue Monsieur le Ministre.
(Applaudissements)
Meine sehr geehrten Damen und Herren, liebe Kolleginnen und Kollegen! Es ist eine außerordentliche Ehre für das Europäische Parlament, dass der Präsident der Französischen Republik als Staatsoberhaupt des Landes, in dem wir mit unserer Institution zu Gast sind, uns heute einen Besuch abstattet. Das tut er in seiner Eigenschaft als Staatsoberhaupt. Zugleich hat der Präsident der Französischen Republik sich bereit erklärt, auch als politischer Gast in unserem Hause an einer Debatte mit dem Europäischen Parlament teilzunehmen. Das ist ein erstmaliger Vorgang, Herr Präsident. Das hat es in dieser Form noch nie gegeben und ist sicher eine innovative Neuerung für das Europäische Parlament.
(Beifall)
Doch zunächst erteile ich Ihnen, Herr Präsident, in Ihrer Eigenschaft als Staatsoberhaupt des wunderschönen Landes, in dem wir hier in Straßburg zu Gast sind, das Wort.
François Hollande, Président de la République française. − Monsieur le Président du Parlement européen, cher Martin Schulz, Monsieur le Président de la Commission européenne, Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie de l'honneur que vous me faites en me permettant de m'exprimer ici, à Strasbourg, devant le Parlement européen.
La France respecte le rôle et la place de votre Assemblée dans l'ensemble des institutions européennes.
Je m'adresse à vous en tant que représentant d'une nation qui a lié son destin à celui de l'Europe et qui porte encore aujourd'hui une responsabilité particulière.
Je m'adresse à vous en tant qu'homme politique dont la conviction européenne a guidé l'engagement.
Je m'adresse à vous en tant que chef d'État qui a placé la réorientation de l'Europe au cœur de son action et qui se consacre depuis neuf mois à cette tâche.
Je m'adresse à vous en tant que Président d'une République dont la promesse, depuis 200 ans, est de faire en sorte que la génération suivante vive mieux que la précédente.
L'Europe est une formidable idée, une immense aventure, une construction politique exceptionnelle. Elle a réussi à faire l'histoire sans défaire les nations. Elle a produit un modèle envié sur tous les continents. Elle a instauré la paix, les droits de l'homme, la démocratie, ce que le prix Nobel, à juste raison, est venu consacrer.
Mais, depuis trop longtemps, l'Europe doute d'elle-même, hésite sur ses choix, pratique tantôt la fuite en avant, tantôt l'immobilisme. Elle met trop de temps à prendre des décisions majeures, celles qui sont attendues, espérées, et elle met trop peu de temps à réfléchir à ses orientations et à son architecture d'ensemble.
L'Europe, elle s'honore d'être un grand marché mais elle le défend mal face aux concurrences déloyales. Elle laisse sa monnaie – l'euro – vulnérable à des évolutions irrationnelles, dans un sens ou dans un autre.
Enfin, l'Europe est un continent où la croissance est trop faible, où le chômage de masse révèle la profondeur de la crise, qui n'est pas seulement, comme on l'a dit, une transition passagère, mais une mutation profonde. Et s'il est vrai que la crise de la zone euro est désormais largement derrière nous, nous sommes loin d'en avoir tiré toutes les conséquences.
Ce qui nous menace aujourd'hui n'est plus la défiance des marchés, c'est celle des peuples. Qui ne voit, à travers une suite de déclarations, que l'intérêt national est en train de prendre le pas sur l'intérêt européen? Alors, la question que les chefs d'État et de gouvernement, comme la Commission européenne et le Parlement européen, ont à résoudre est la suivante. Ce n'est pas la question d'un moment, c'est la question de notre propre avenir: "Comment faire pour retrouver l'adhésion, pour faire resurgir l'envie d'Europe? Et d'abord, comment faire pour relever le défi de la stabilité financière et de la croissance économique?"
Je veux saluer les efforts qui ont été engagés depuis plusieurs mois et les avancées qui ont été obtenues sur ces terrains-là. L'Europe a été capable de se doter de moyens indispensables pour garantir le sérieux budgétaire.
Je veux rendre hommage au Parlement européen, qui y a contribué largement à travers le six-pack et le two-pack. Les États eux-mêmes ont ratifié le traité budgétaire, et la France, sous mon autorité, en a pris la responsabilité. Mais, parallèlement, le Conseil européen de juin dernier a également décidé d'un pacte de croissance en harmonie avec les orientations du Parlement européen. Cette Europe qui était jugée trop lente a également été capable de mettre en place des instruments de stabilité, de solidarité, notamment le mécanisme européen de stabilité.
La Banque centrale européenne a redéfini ses interventions en annonçant clairement ses intentions face aux visées spéculatives. Ainsi, le calme est revenu sur les marchés et les taux d'intérêt sur certaines dettes souveraines ont pu baisser.
Nous avons aussi permis à la Grèce de rester dans la zone euro quand certains avaient déjà, trop vite, annoncé son départ.
Enfin, les principes d'une union bancaire ont été définis pour prévenir les dérives d'un système financier. Là encore, ce sera un enjeu considérable: la supervision bancaire, un mécanisme de résolution et des épargnants mieux protégés par une garantie de dépôt.
L'Europe a été capable de progrès mais, en même temps, elle ne peut en rester là car, à mes yeux, il n'y aura pas de répit tant que 27 millions d'Européens seront au chômage. Il n'y aura pas de répit tant que, dans certains pays de l'Union, un jeune sur deux cherche un emploi. Il n'y aura pas de répit tant que des millions de personnes resteront plongées dans la précarité. Il n'y aura pas de répit tant que nous n'aurons pas défini une transition énergétique capable de nous faire passer d'un monde à un autre.
Tel est le défi de la croissance et de l'emploi que nous devons relever. Cela passe sûrement, nécessairement, par le désendettement et l'amélioration de la compétitivité. Mais je le dis ici, devant vous, cette politique, aussi nécessaire soit-elle, doit être adaptée aux situations nationales et appliquée avec discernement dans la durée, sinon nous condamnerions l'Europe à l'austérité sans fin, et je m'y refuse.
La France elle-même a pris des engagements. Elle les tiendra. En même temps, nous devons, collectivement et constamment, ajuster nos objectifs aux réalités de la conjoncture.
La prochaine étape que nous devons ouvrir, c'est la coordination des politiques économiques nationales. C'est nécessaire pour résorber les déséquilibres. Il y a des pays qui ont des excédents, une compétitivité élevée, d'autres qui ont des déficits et des efforts à faire. Les pays qui sont dans la première situation doivent relancer leur demande intérieure pour permettre aux autres de pouvoir connaître à un moment le retour de l'activité.
De la même manière, nous devons réfléchir à la place de notre monnaie, l'euro, dans le monde. Elle ne peut fluctuer selon les humeurs du marché. Une zone monétaire doit avoir une politique de change, sinon elle se voit imposer une parité qui ne correspond pas à l'état réel de son économie. Il ne s'agit pas, dans ce propos, d'assigner de l'extérieur un objectif à la Banque centrale européenne, qui est indépendante, mais d'engager l'indispensable réforme du système monétaire international, sinon cela revient à demander à des pays de faire des efforts de compétitivité qui sont annihilés par la valorisation de l'euro.
Le moment est venu de lancer le grand chantier de l'approfondissement de l'Union économique et monétaire. La France y est prête. Elle a deux principes: l'intégration et la solidarité. L'intégration, c'est la définition d'objectifs partagés, c'est l'harmonisation des politiques fiscales. L'intégration, ce sont des réformes structurelles pour rendre nos économies plus fortes, mais également des politiques communes en matière d'infrastructures, de recherche. L'intégration, ce sont nos nouveaux instruments financiers pour lancer des projets innovants dans les domaines des nouvelles technologies, des énergies renouvelables, de la transition énergétique et écologique.
Puisque nous sommes pour l'intégration, nous sommes pour la solidarité car l'une ne va pas sans l'autre. La solidarité, ce n'est pas seulement le transfert entre nations européennes, la solidarité, c'est une ambition sociale. C'est de garantir à chaque jeune Européen un emploi ou une formation à la fin de ses études, en renforçant les échanges entre les États membres. La solidarité, c'est la lutte contre le chômage, notamment dans les territoires où il frappe le plus durement. C'est l'enjeu, notamment, du Fonds d'ajustement à la mondialisation.
La solidarité, ce sont les transitions professionnelles, c'est accompagner les salariés tout au long de leur parcours, leur permettre de garder leurs droits à la retraite, à l'assurance chômage, à la sécurité sociale quand ils changent de métier et parfois, même, de pays. La solidarité, c'est ouvrir le chantier du salaire minimum. La solidarité, ce sont aussi des instruments financiers, à travers de nouvelles ressources, à travers la taxe sur les transactions financières, à travers tout ce qui peut permettre d'imaginer l'avenir ensemble.
Le Parlement européen, de ce point de vue, a ouvert la voie. Vous avez, au-delà des sensibilités politiques, lancé l'idée d'emprunts communs. Je n'ose pas dire d'eurobonds, mais vous avez imaginé ce que pouvait être le terme même de l'intégration et de la solidarité. C'est dans cette perspective que doit se situer la discussion sur le cadre financier européen. Je veux m'en ouvrir directement devant vous.
Nous connaissons toutes les difficultés de cette négociation. Les uns veulent des coupes, les autres – parfois les mêmes – veulent des garanties sur leur chèque ou sur leur rabais. La plupart des pays sont intéressés par telle ou telle part du budget européen mais pas par l'autre... Ma position, elle s'énonce simplement: faire des économies, oui, affaiblir l'économie, non!
(Applaudissements)
Dès lors, notre position, celle de la France, se décline en quatre principes.
Le premier principe, c'est un niveau de dépenses qui préserve les politiques communes. D'abord, la politique de cohésion, qui finance les investissements indispensables, non pas seulement pour les pays bénéficiaires, mais pour l'ensemble de l'Europe qui en tire avantage en termes de croissance.
La politique commune, c'est la politique agricole, qui permet de renforcer une industrie agroalimentaire précieuse pour l'Union européenne, mais qui doit aussi respecter l'environnement. C'est pourquoi les aides directes et le développement rural sont complémentaires. Je n'oppose pas les deux politiques, comme il est commode de le faire: politique de la cohésion contre politique agricole. Nous devons garder le socle des politiques européennes, sinon comment construire?
Mon deuxième principe, c'est que le budget, le cadre financier qui doit être proposé, doit prolonger le pacte de croissance adopté en juin dernier, ce qui suppose d'augmenter les moyens prévus pour l'innovation, les infrastructures, les nouvelles énergies. Car où serait la cohérence d'avoir défini au mois de juin un pacte de croissance et de faire ensuite un pacte de déflation à travers le cadre financier européen?
Mon troisième principe, c'est que le budget doit soutenir les Européens les plus fragiles et les plus exposés à la crise, d'où l'enjeu du programme d'aide aux plus démunis, qui doit être non seulement préservé, mais correctement doté.
(Applaudissements)
D'où l'enjeu de ce Fonds d'ajustement à la mondialisation, nécessaire si l'on veut faire face aux restructurations qui frappent de nombreux pays, l'enjeu de la place du Fonds social européen dans les programmes régionaux et, enfin, l'enjeu de l'emploi des jeunes, qui doit devenir un véritable programme européen avec une véritable priorité pour les choix que nous avons à faire.
(Applaudissements)
Enfin, le dernier principe que je défendrai dans la négociation qui s'ouvre, c'est celui d'un système de ressources qui soit plus juste et plus lisible. Dans l'immédiat, le montant des chèques et des rabais doit cesser d'augmenter et, pour l'avenir, de véritables ressources propres seront indispensables, sinon c'est la construction européenne qui se trouvera remise en cause.
(Applaudissements)
Telle est la position de la France. Je ne suis pas sûr qu'elle soit éloignée des aspirations du Parlement européen.
Un compromis est possible, mais il doit être raisonnable. Il va donc falloir raisonner ceux qui veulent amputer le budget européen au-delà de ce qu'il est possible d'accepter. Car, je le dis ici, il ne servirait à rien de négocier un accord entre chefs d'État et chefs de gouvernement s'il ne devait pas être suivi par un vote conforme de votre Assemblée.
Chacun doit bien comprendre la logique des institutions communautaires et donc, vous, parlementaires, et nous, les chefs d'État et de gouvernement, nous devons, avec la Commission, faire preuve de lucidité et de responsabilité.
Voilà le sens de la position de la France dans cette négociation, qui doit permettre à l'Europe d'avoir un cadre d'action pour sept ans et de montrer que nous sommes capables de décider ensemble, chefs d'État et de gouvernement et parlementaires européens. C'est notre crédibilité qui se joue, crédibilité non plus financière mais politique. Au-delà de ces choix budgétaires, c'est une conception de l'Europe qui est en débat. Je vais vous livrer la mienne.
L'Europe ne peut se contenter d'être un marché, un budget, une monnaie, aussi précieux que soient ces instruments. Elle ne peut pas non plus être une somme de traités, un ensemble de règles nécessaires pour vivre ensemble. L'Europe ne peut pas être non plus une addition de nations, chacune venant chercher dans l'Union ce qui lui serait utile pour elle et pour elle seule.
(Applaudissements)
L'Europe, parce que c'est son histoire, parce que c'est son destin, est avant tout une volonté politique, c'est-à-dire un engagement, où chacun accepte l'équilibre des droits et des obligations, où les règles sont respectées, où la confiance crée la solidarité, c'est-à-dire un projet dont on ne peut pas discuter sans cesse les acquis et remettre tout en cause à chaque étape.
En revanche, je considère légitime de travailler à une nouvelle architecture de l'Union. Je plaide pour une Europe différenciée, selon l'expression de Jacques Delors. Ce ne serait pas une Europe à deux vitesses, qui deviendrait d'ailleurs vite une Europe inégale ou une Europe divisée. Ce n'est pas davantage une Europe à la carte. Non! L'Europe différenciée, c'est une Europe où des États – pas toujours les mêmes – décident d'aller de l'avant, d'engager de nouveaux projets, de dégager des financements, d'harmoniser leurs politiques au-delà du socle substantiel des compétences communes, qui doit subsister.
Je n'invente rien en vous disant cela. C'est cette démarche qui a permis de dépasser les frontières, avec Schengen, de créer une monnaie unique, avec l'euro, d'instituer la taxe sur les transactions financières. Cette démarche, c'est la voie des coopérations renforcées, ouvertes à tous, à tous ceux qui veulent les rejoindre, pour un jour nous rassembler tous autour de ces principes. Dans cette Europe, le Parlement européen aura un rôle majeur à jouer parce que, par son contrôle, il assurera la cohérence d'ensemble.
Je veux également rendre l'Europe plus lisible. J'ai plaidé pour une intégration budgétaire, fiscale, sociale. Elle est là. Elle appelle une union politique plus forte, sinon elle serait hémiplégique. Ceci veut dire un gouvernement de la zone euro, de nouveaux instruments financiers pour agir et un budget, sous certaines conditions, de la zone euro, s'articulant au budget de l'Union européenne. Tout cela sous le contrôle du Parlement européen et des parlements nationaux.
(Applaudissements)
Je souhaite que les élections européennes, l'année prochaine, soient l'occasion d'un grand débat sur l'avenir de l'Europe, qui permettra de déterminer les politiques que nous aurons à mener, sans doute, mais surtout l'architecture que nous aurons à proposer, sans oublier les candidats aux postes essentiels de notre Union, pour qu'il y ait une grande délibération collective en Europe et que l'on sorte, ensuite, avec une légitimité renforcée. Car l'Europe doit avoir les institutions qui lui permettront de peser sur le destin du monde.
L'Europe est un continent de paix et de démocratie qui ne cherche rien pour lui-même, mais qui apporte au reste du monde son héritage, ses valeurs, ses principes. L'Europe doit donc prendre sa part du combat pour la démocratie, pour la dignité humaine. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé, au nom de la France, d'intervenir au Mali.
(Applaudissements)
J'ai pris cette décision dans le cadre du droit international. Il n'y avait pas de temps à perdre ou, plus exactement, si nous avions laissé le temps, c'était celui du terrorisme, qui aurait à ce moment-là conquis l'ensemble du Mali. J'ai fait ce choix au nom de la France, parce que c'était notre responsabilité. Nous étions présents dans cette région du monde, nous pouvions apporter immédiatement l'aide que le président malien attendait de nous. Cette décision, je l'ai prise aussi au nom de l'Europe, au nom de la communauté internationale.
Je veux, ici, remercier le Parlement européen pour le soutien et pour la compréhension dont il a fait preuve dans ce moment si particulier où un pays européen s'engage pour un pays africain, où il s'engage non plus pour ressusciter les séquelles du passé mais, au contraire, pour apporter la dignité à un peuple qui, lui-même, avait permis à mon pays d'être libéré de la servitude durant la Seconde Guerre mondiale.
(Applaudissements)
J'assure ici qu'à mesure que le Mali retrouvera son intégrité territoriale – et ce moment est proche –, viendra le temps politique, celui du dialogue, de la réconciliation, de la stabilité dans ce pays et dans cette région de l'Afrique de l'Ouest, le temps du développement. Ce temps-là doit être celui des organisations africaines. Elles sont prêtes. Elles sont déjà présentes sur place. Ce doit aussi être le temps de l'Europe, parce que nous avons à agir, non seulement pour la paix, mais nous avons à agir pour la sécurité dans cette partie-là de l'Afrique, former et équiper l'armée malienne et les forces de la MISMA, qui permettent d'assurer la sécurité sur le territoire, d'éviter les exactions et les règlements de compte, nous avons à agir pour permettre la transition politique, le rétablissement de la démocratie, le processus électoral.
L'Europe est attendue aussi là-bas, pour ces raisons. L'Europe est attendue également pour participer au développement du Sahel, en tirant les leçons des politiques qui ont été menées jusqu'à présent et qui n'ont pas empêché l'effondrement des économies de ces pays et, surtout, le développement des trafics. Je l'affirme ici, la lutte contre le trafic de drogue est un élément essentiel si nous voulons lutter contre le terrorisme, parce que le terrorisme se nourrit du trafic narcotique partout dans le monde et, notamment, en Afrique de l'Ouest.
(Applaudissements)
Nous devons, aussi, dans cette redistribution des cartes de la puissance à l'échelle du monde, ne laisser aucun doute sur la détermination de l'Europe à porter ces valeurs. Mais nous devons en tirer, là encore, les conséquences, avoir la lucidité indispensable pour élaborer une stratégie, pour conduire une véritable politique extérieure commune, pour avoir une défense européenne. La France y est prête.
Il est temps, là encore, d'en finir avec la dispersion des initiatives, de rassembler nos forces et nos moyens, de rapprocher nos industries, d'harmoniser aussi nos positions dans les instances internationales, où l'Europe doit parler d'une seule voix, d'agir pour résoudre les conflits qui heurtent les consciences humaines – je pense à la Syrie –, pour éviter la prolifération nucléaire – je pense à l'Iran –, pour peser sur les négociations entre Israéliens et Palestiniens, parce que ce moment-là, aussi, est venu et que l'Europe ne doit pas attendre les États-Unis, mais être déjà là pour hâter la reprise de ces discussions.
(Applaudissements)
L'Europe doit également prendre sa part dans l'enjeu climatique. La France est prête à organiser la conférence sur le climat en 2015, mais nous ne réussirons pas seuls. L'Europe, là encore, doit être exemplaire en matière d'énergies renouvelables et d'efficacité énergétique.
Je crois à l'Europe parce que je pense qu'elle est utile, non seulement aux Européens, mais au monde tout entier. La meilleure manière pour l'Europe de protéger ses intérêts c'est de défendre son modèle, ses valeurs à l'échelle du monde.
Nous devons revenir au sens même du projet européen, qui est un projet politique fondé sur des valeurs et sur la circulation des personnes, des connaissances, des idées, des œuvres, de la culture, de la création. C'est en rappelant inlassablement cette ambition que nous serons à la hauteur de notre histoire et, surtout, de l'espérance des nouvelles générations. C'est l'Europe de la connaissance, c'est l'Europe des universités, de la recherche, de la culture qui est attendue.
Nous, Européens, portons une culture qui va bien au-delà de nous-mêmes. Nous ne devons pas la considérer comme un patrimoine à protéger mais comme un mouvement à promouvoir. C'est le principe de l'exception culturelle. C'est l'idée que les œuvres de l'esprit ne sont pas des marchandises comme les autres. C'est la conviction que l'identité culturelle de nos nations est essentielle et que le pluralisme, la liberté doivent être défendus à l'échelle du monde.
Une fois encore, à cette tribune, j'appelle, après d'autres, à donner une dimension culturelle à la construction européenne, ce qui exige de garantir la propriété intellectuelle et les droits d'auteur, de définir ensemble les règles économiques et fiscales pour que les artistes soient rémunérés davantage que ceux qui font circuler leurs œuvres, c'est-à-dire les fournisseurs d'accès, de faire en sorte que nous ayons une Europe du numérique où les technologies soient au service d'un projet de civilisation.
Mesdames et Messieurs les députés, François Mitterrand, devant le Parlement européen, il y a dix-sept ans – dix-sept ans –, demandait à ceux qui l'écoutaient de tout faire pour que les Européens aiment l'Europe. Dix-sept ans après, convenons-en, nous sommes loin du compte. Le risque n'est plus l'indifférence, mais le détachement, pour ne pas dire la rupture. Telle est notre responsabilité. Celle des chefs d'État et de gouvernement, celle de la Commission européenne, celle du Parlement européen. Regardons-la en face.
Je vous le dis tout net, le sursaut sera collectif ou il ne sera pas, mais le temps presse. Nous pouvons sortir de cette période difficile en ouvrant un nouveau chemin. L'Europe a été capable de surmonter des épreuves bien plus graves que celle d'une crise, mais il nous faut définir une nouvelle ambition. Cette nouvelle ambition ne pourra pas réduire la précédente. C'est une illusion de penser qu'il faudrait abandonner ce que nous avons engagé, depuis des années, pour construire une nouvelle espérance. Au contraire, il nous faut partir de tout ce que nous avons réalisé pour mener à bien ce qui reste encore à accomplir. Je sais aussi que toute avancée européenne doit correspondre à une nouvelle étape de la démocratie.
Mesdames et Messieurs les députés, pour parcourir cette nouvelle étape, pour accomplir le projet européen, pour faire avancer la démocratie, c'est vous qui allez décider.
(Applaudissements vifs et prolongés)
José Manuel Barroso, président de la Commission. − Monsieur le Président, Monsieur le Président de la République, Monsieur le Ministre, Mesdames et Messieurs les députés, tout d'abord, je voudrais vous féliciter pour l'organisation de ce débat.
Monsieur le Président de la République, j'aimerais vous féliciter pour votre discours d'une si claire et si forte conviction européenne. C'est pour moi un plaisir de vous répondre dans votre langue maternelle, qui n'est pas la mienne, et donc vous m'excuserez pour certaines erreurs, mais cela me permet de vous dire de façon plus spontanée ce que je sens et ce que je pense sur l'Europe et sur le rôle exceptionnel de votre pays dans notre projet commun de construction européenne.
Tout d'abord, un grand merci à la France, en mon nom propre et au nom de la Commission européenne, un grand merci à la France pour tout ce que votre pays a donné à l'Europe et au monde, non seulement par son rayonnement culturel et civilisationnel, mais aussi pour son engagement concret en faveur de l'approfondissement de notre projet. Votre discours, aujourd'hui, était encore une preuve de cette volonté.
Merci aussi à la France pour ses efforts, et aussi pour vos efforts personnels, visant à garantir l'intégrité et la stabilité de l'Union économique et monétaire. Comme vous l'avez dit, ce n'était pas évident. La France a toujours été aux côtés de ceux qui voulaient l'approfondissement, la cohérence, l'intégration et la solidarité dans notre union économique et monétaire.
Mais la vérité, c'est que nous ne sommes pas encore sortis de la crise. Comment pourrait-on dire que la crise est passée quand nous avons ce niveau de récession, ce niveau intolérable de chômage dans beaucoup de nos pays? C'est pourquoi nous devons poursuivre nos réformes sur le plan national et aussi approfondir nos efforts sur le plan européen.
Pour ce qui est de nos économies nationales, je voudrais aussi saluer la France pour ses efforts d'assainissement des comptes publics, pour ses efforts de réformes en faveur de la compétitivité, pour ses efforts visant à inverser la courbe du chômage. Et là, je tiens à souligner l'importance de l'accord entre les partenaires sociaux en ce qui concerne le marché du travail, qui montre qu'il est possible de trouver des solutions qui peuvent garantir la flexibilité pour les entreprises et la sécurité pour les travailleurs.
Cependant, il nous faut faire davantage pour approfondir l'Union économique et monétaire, pour renforcer la gouvernance économique. Je compte sur vous pour que nous puissions approfondir cette Union économique et monétaire tout en maintenant l'intégrité du marché intérieur et la cohérence de l'Union dans son ensemble.
Bien sûr, l'assainissement des finances publiques, les réformes pour la compétitivité, bien que nécessaires, indispensables même, ne sont pas suffisants pour garantir la croissance que, depuis le début de votre mandat, vous avez, à juste titre, placée au centre du débat en France et en Europe. Pour garantir cette croissance durable, nous avons aussi besoin de l'investissement, et l'instrument le plus important dont nous disposons pour l'investissement au niveau européen, c'est précisément le budget européen.
C'est pourquoi je lance un appel aux chefs d'État et de gouvernement, qui vont se réunir cette semaine à Bruxelles, pour qu'ils puissent trouver un compromis qui soit à la mesure de l'ambition que nous avons pour l'Europe, qui nous permette de soutenir toutes les réformes pour la compétitivité, qui nous permette d'étayer l'agenda européen, l'agenda Europe 2020, tout en maintenant l'accent sur nos préoccupations de solidarité.
La cohésion économique, sociale, territoriale est un principe inscrit dans nos traités. Nous devons nous atteler en priorité à la lutte contre le chômage, en particulier le chômage des jeunes, pour éviter d'avoir demain une génération perdue.
Nous devons aussi renforcer la capacité d'action de l'Union européenne en Europe et dans le monde, comme vous l'avez souligné à juste titre.
Pour conclure, je voudrais rendre un hommage très sincère au courage et à la détermination de la France. En étant aux côtés du peuple du Mali, vous avez apporté la garantie que l'Europe était aussi présente, en défendant nos intérêts et nos valeurs, pour montrer que nous avons une mission qui dépasse, bien sûr, les frontières de l'Europe.
Monsieur le Président de la République, merci, car vous nous avez apporté aujourd'hui non seulement le volontarisme de la France, mais votre conviction personnelle pour l'intégration et pour la solidarité.
Joseph Daul, au nom du groupe PPE. – Monsieur le Président, cher Martin, Monsieur le Président de la République, Monsieur le Président de la Commission, Mesdames, Messieurs, chers collègues, je voudrais d'abord vous remercier, Monsieur le Président de la République, pour votre déclaration, pour votre politique européenne, mais aussi de nous permettre de tenir ce débat aujourd'hui. Si je m'adresse à vous aujourd'hui, c'est en tant que compatriote, mais aussi, et avant tout, en tant que Président du groupe PPE au Parlement européen, un groupe dont les députés sont issus de 26 États membres, et à ce titre je tiens à vous dire notre inquiétude. Passons tout de suite au vif du sujet.
Nous sommes préoccupés pas les propositions du Conseil européen sur le prochain cadre financier pluriannuel. Ces propositions vont dans la mauvaise direction. Au lieu d'investir dans l'avenir de l'Europe, on s'attaque à l'un de nos meilleurs outils de croissance: le budget européen; un budget dont 94% retourne dans les États membres sous forme d'investissements, des investissements qui, en plus, génèrent un puissant levier. Sans ce budget, certains États membres ne pourraient pas mener à bien les réformes rendues nécessaires par la crise économique. Le réduire à ce point, c'est une faillite politique; autant mettre la clé sous la porte tout de suite et dire la vérité à nos concitoyens.
Pour autant, ne nous méprenons pas; nous ne sommes pas des enfants gâtés; nous sommes conscients des réalités économiques et nous ne sommes pas en train de vous soumettre une liste de cadeaux, mais nous plaidons pour un budget qui soit crédible, pour une Europe qui se montre à la hauteur des ambitions qu'elle affiche. Or ce n'est pas le cas du document qui nous est proposé à ce jour. La proposition actuelle constitue un renoncement politique et je vous le dis tout de suite, Monsieur le Président, nous allons le rejeter.
Il y a plus grave: pour la première fois dans l'histoire de l'Union européenne, les propositions qui nous sont soumises vont nous conduire à un déficit. Déjà pour 2012, le budget présente un déficit de 16 milliards d'euros. Résultat des courses: on a failli sacrifier Erasmus et pénaliser des milliers d'étudiants. Quel est le sens de tout cela? Les chefs d'États veulent-ils nous obliger à faire du déficit? Je peux vous assurer, Monsieur le Président, que nous ne marcherons pas dans cette combine. Il y a des règles et nous allons les faire respecter, à commencer par l'article 310 du traité qui oblige à un équilibre budgétaire. Dois-je rappeler que c'est cette même course au déficit qui a mené les États membres dans la situation économique actuelle?
C'est tout de même incroyable, ce que les États membres nous proposent: d'un côté, ils nous demandent de renforcer la gouvernance économique avec le six-pack, le two-pack, et ils nous demandent d'empêcher la course au déficit; de l'autre, ils voudraient nous faire prendre de mauvaises habitudes. On voudrait nous faire avaler un budget avec 960 milliards d'euros de crédit d'engagement contre seulement environ 900 milliards d'euros de crédit de paiement. N'importe quel chef d'entreprise vous dira qu'un tel écart est suicidaire.
Monsieur le Président, il serait trop facile de vous cacher derrière David Cameron; vous êtes face à un choix entre deux camps opposés et vous avez bien indiqué quel était votre choix. Alors choisissez la bonne option, ne choisissez pas l'option David Cameron; il veut détricoter petit à petit l'Union européenne. Si vous choisissiez l'option du Parlement européen pour une Union européenne capable de relever le défi, vous devez dire clairement les choses à vos concitoyens.
Monsieur le Président, je voudrais vous remercier d'avoir fait ratifier par votre majorité le traité budgétaire, car c'est un bon signal pour l'Europe. Mais j'aimerais vous poser une autre question. J'ai beau chercher, je ne vois pas où est passé votre Pacte de croissance de 120 milliards d'euros. Où sont ces milliards, Monsieur le Président? Dites-le-nous! Nous sommes des législateurs et nous sommes de bonne volonté, mais nous avons une responsabilité vis-à-vis de nos concitoyens.
Nous sommes là pour discuter et négocier, mais sachez qu'il y a des points sur lesquels nous ne transigerons pas. Le premier, c'est la flexibilité. Il faut donner une réelle flexibilité au cadre financier, entre les lignes budgétaires et entre les années. C'est comme cela que nous arriverons à gérer correctement notre budget dans un contexte d'austérité et d'équilibre budgétaire. Le deuxième point, c'est les ressources propres. Si, à terme, le budget européen est financé directement, cela permettra de diminuer d'autant les contributions des États membres et, surtout, cela mettra fin aux systèmes de marchandage et de maquignonnage et, surtout aussi, au système des fameux chèques retours. Et le troisième point, c'est l'introduction d'une clause de révision. Les chiffres actuels sont limités à cause de la crise. Nous en prenons acte et j'espère aussi, et nous espérons tous ici, que, d'ici deux à trois ans, nous nous trouverons dans une meilleure situation; on aura alors besoin d'un nouveau budget et aussi d'une harmonisation fiscale et sociale.
Je sais que certains craignent que le conseil de jeudi et vendredi soit un échec; ce n'est pas mon cas. Je connais même un très bon moyen d'éviter un mauvais accord. On fonctionne pendant deux ou trois ans avec des budgets annuels, comme vous l'avez dit, on fait le point, on nous prépare les nouvelles perspectives, comme vous l'avez dit, cela ne nous pose aucun problème.
Chers collègues, il ne faut pas craindre ce passage au budget annuel, parce que, dans l'état actuel des choses, de toute façon, il faudra qu'on prenne des décisions courageuses. Il manque 60 milliards au budget. On renonce à quoi au nom des 60 milliards: à Erasmus, au Fonds social européen, aux programmes de recherche? Il faut qu'on nous dise la vérité. Où va-t-on trouver ces 60 milliards?
Monsieur le Président, chers collègues, comportons-nous en hommes d'État et non en hommes politiques, parce qu'un homme d'État pense aux prochaines générations et au chômage des jeunes. Nous assistons à une hausse sans précédent des populismes de droite comme de gauche. Il est de notre responsabilité de rappeler à nos concitoyens que l'Europe qui protège, c'est une réalité. Sans elle nous aurions été frappés beaucoup plus durement par la crise. Et tous les oiseaux de mauvaise augure qui annonçaient la fin de l'euro, nous leur avons donné tort.
Monsieur le Président, les États ne peuvent plus tout, l'Europe c'est notre chance, c'est notre force, l'Europe c'est nos valeurs et, en plus des États, elle protège nos concitoyens. Ce n'est vraiment pas le moment de détruire notre rempart et notre image.
Hannes Swoboda, au nom du groupe S&D. – Monsieur le Président, je voudrais tout d'abord vous remercier d'être là parmi nous à Strasbourg, à un moment où la France assume d'importantes responsabilités au Mali.
Vous avez pris une décision courageuse en engageant des soldats français et africains pour libérer un pays du joug jihadiste. Vous pouvez compter sur notre soutien dans cette lutte contre les terroristes, mais nous avons besoin d'une nouvelle alliance entre l'Europe et l'Afrique pour combattre le terrorisme ensemble, le trafic de drogues, mais aussi la pauvreté et la corruption.
Vous avez été élu, Monsieur le Président, à un moment où l'Europe traverse une triple crise: une crise économique, sociale et politique. Au cours de ces huit mois, vous avez déclenché des changements en Europe, et c'est une bonne nouvelle pour l'Europe et ses citoyens. Mme Merkel n'est plus le commandant en chef, comme au temps du couple Merkozy. L'Europe a besoin d'une relation franco-allemande équilibrée, ouverte aux compromis et tournée vers l'avenir.
Grâce à vous, Monsieur le Président, l'Europe dispose désormais d'un pacte de croissance pour corriger les méfaits d'une austérité budgétaire aveugle. Mais il faut maintenant dynamiser ce pacte pour réussir à créer plus d'emplois. Les coûts du chômage sont énormes et représentent plus de 1 % du produit intérieur brut. Vous avez, Monsieur le Président, arraché à Mme Merkel un premier accord vers la mise en place d'une union bancaire en Europe. Nous devons trouver maintenant un accord entre le Parlement et les ministres européens des finances dans quelques semaines.
L'Europe sociale n'est plus aux abonnés absents. L'engagement a été pris de renforcer la dimension sociale de la zone euro, mais nous demandons des mesures concrètes. Ce sont des progrès tangibles, mais l'Europe est toujours en crise. Dans ce Parlement, les Socialistes et Démocrates bataillent depuis des mois afin d'empêcher l'économie européenne de succomber à une overdose d'austérité. Ce n'est pas notre vision de l'Europe. Mon groupe a proposé il y a déjà deux ans que l'on déduise certains investissements du calcul du déficit public avec une règle d'or. Peine perdue. La droite dans cette enceinte s'y oppose farouchement.
Aujourd'hui, Monsieur le Président, la zone euro entre dans une deuxième année de récession; le chômage explose. À la fin de cette année, l'Europe comptera dix millions de chômeurs en plus par rapport à 2008. Nous ne voulons plus de cette austérité qui entraîne nos peuples dans le chômage et la pauvreté. Il faut donner de l'oxygène à l'économie européenne. Même le Fonds monétaire international – très attaché à l'orthodoxie libérale – dirigé par Mme Lagarde a fait son mea culpa, reconnaissant s'être trompé sur l'impact des politiques d'austérité. Mon groupe, les Socialistes et Démocrates, milite en faveur d'une consolidation budgétaire raisonnable et supportable pour les peuples. Pour reprendre une formule du Président Mitterrand, il faut donner du temps au temps.
L'Europe, Monsieur le Président, doit investir pour retrouver le chemin de la croissance. Elle regagnera en compétitivité en innovant par des investissements dans la recherche et le développement ainsi que dans les nouvelles technologies et l'environnement.
Monsieur le Président, dans deux jours, vous participerez à une réunion cruciale pour l'avenir de l'Europe. Elle porte sur le budget de l'Union européenne pour les sept prochaines années. Nous voulons un budget ambitieux, modernisé et orienté vers la croissance et l'emploi. Et c'est là, Monsieur le Président, que le couple franco-allemand doit se manifester et s'unir. Et comme vous l'avez dit, faire des économies, oui; affaiblir l'économie européenne, non! C'est la position de notre groupe socialiste et démocrate.
Enfin, nous devons poursuivre les réformes pour stabiliser durablement la zone euro sans fermer la porte aux pays qui veulent la rejoindre. Mais ces réformes économiques devront s'appuyer aussi sur un pacte social solide. Je citerai, à titre d'exemple, une garantie pour la jeunesse, par rapport à laquelle votre gouvernement a déjà fait preuve d'un réel engagement – nous sommes 100 % d'accord avec vous concernant le rôle de la jeunesse –, un revenu minimum en Europe, une relance du dialogue social aux niveaux national et européen. Votre gouvernement a déjà emprunté ce chemin en permettant un accord historique entre les partenaires sociaux. La zone euro doit rester attractive, offrir les garanties démocratiques nécessaires, et le Parlement européen, en collaboration avec les parlements nationaux, doit jouer pleinement son rôle.
Monsieur le Président, nous venons de fêter les cinquante ans de l'amitié franco-allemande. Mais un autre anniversaire ne peut nous laisser indifférents: les soixante ans du premier traité européen, de la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Aujourd'hui, l'acier européen est menacé de mort. Notre sidérurgie est la proie de prédateurs venus d'ailleurs et munis de promesses mensongères. Certains dirigeants estiment que l'industrie n'est plus un secteur d'avenir. Ils se trompent lourdement. L'Europe sans industrie, c'est une Europe encore plus vulnérable dans un monde globalisé.
(Applaudissements)
Voilà les éléments d'une stratégie globale et progressiste de compétitivité. Ceux qui n'en voudraient pas n'auraient qu'à quitter le navire, ils verraient bien ce qu'il leur en coûterait d'être livrés seuls aux turbulences mondiales. Pour nous, sociaux-démocrates, l'Europe à la carte n'est pas une option. Ce n'est pas notre vision de l'Europe. L'Europe n'est pas qu'un simple grand marché dépourvu d'ambition politique.
Depuis le début, la construction européenne a pour destin l'union politique, une union faite de solidarité entre les peuples et nations, une union fondée sur les valeurs humanistes, une union qui garantisse l'égalité entre hommes et femmes, une union porteuse de tolérance et de justice, une union qui n'accepte aucune discrimination fondée sur la religion, le sexe ou les origines. Et à ce propos, Monsieur le Président, je me félicite que votre gouvernement défende le mariage pour tous. C'est aussi notre position.
(Applaudissements)
Monsieur le Président, le changement est en cours en France. Il est aussi en cours en Europe. Il faut poursuivre dans cette voie afin de construire en même temps une Europe socialement plus juste, plus solidaire et plus forte dans la compétition mondiale. Votre rôle, Monsieur le Président, est crucial. Il ne faut pas céder à la vision simpliste du marché unique qui est celle de M. Cameron. La vision de M. Cameron n'est pas la nôtre. Au contraire, Monsieur le Président, vous devez dire à Mme Merkel: "Angela, tu es l'héritière de Konrad Adenauer, de Willy Brandt, de Helmut Schmidt, de Helmut Kohl, autant d'hommes d'État porteurs d'une vision européenne. Aide-moi à redonner vie au rêve européen."
Vous avez, Monsieur le Président, lancé votre campagne en France en promettant de réinventer le rêve français. Maintenant, en qualité de membre du Conseil européen, vous pouvez nous aider à réinventer le rêve européen.
Guy Verhofstadt, au nom du groupe ALDE. – Monsieur le Président, Monsieur le Président de la République française, en fait M. Swoboda l'a déjà dit, mais je vais quand même le répéter: permettez-moi d'abord de féliciter le libéral qui est en vous. Je ne veux pas vous créer de problèmes chez vos amis socialistes, mais il est un fait que votre combat pour le mariage pour tous est un progrès, une nouvelle liberté et le cœur du combat que nous menons avec notre groupe. Merci pour cela.
Il y soixante ans, comme vous le savez, Jean Monnet disait: "Nous ne coalisons pas des États, nous unissons des hommes". Cela reste vrai, Monsieur le Président. Notre Union n'a de sens que si elle devient une véritable fédération de peuples et de nations, ce que Winston Churchill appelait les États-Unis d'Europe.
Naturellement, pour Monnet et pour Churchill, cette Union n'était qu'un rêve lointain, je dirais même un mirage. Tandis qu'aujourd'hui, elle est devenue un devoir vital pour la survie de l'Europe, parce que le monde d'aujourd'hui n'est plus une planète de près de deux cents États nations, mais est devenu quelque chose de différent: un conglomérat de grandes et puissantes fédérations, d'empires, de civilisations.
Prenez par exemple la Chine. Ce n'est pas une nation, c'est une civilisation. L'Inde n'est pas une nation, c'est un continent, avec deux mille ethnies, vingt-deux langues et au moins quatre grandes religions. Les États-Unis sont le pays multiculturel par excellence.
Donc, l'Europe n'a qu'un seul avenir, c'est de faire elle aussi, comme vous l'avez indiqué, le saut vers une grande fédération, un empire – mais un empire du bien. La civilisation européenne, contrairement à ce que disent ceux qui nient l'existence de l'Europe, n'est pas une chimère, mais une réalité, que l'on peut voir et ressentir, de la Volga jusqu'à l'océan Atlantique.
De plus, soyons honnêtes envers les citoyens, envers nos électeurs. Comment résoudre la crise financière, comment résoudre la récession économique, le changement climatique? Tous ces dossiers réclament une action commune, une approche globale, qui dépasse les limites de la souveraineté nationale. Nous devons dire aux citoyens que c'est au niveau européen qu'il faut regagner cette souveraineté, qu'il faut défendre nos intérêts, parce que c'est le seul niveau où cette souveraineté peut être exercée dans le monde de demain.
Je crois, Monsieur le Président, que, de tous les États membres de l'Union européenne, c'est la France, peut-être avec l'Angleterre, qui avait déjà compris il y a des siècles qu'une unification de son territoire, de son économie, de sa gestion publique pourrait être bénéfique pour ses habitants.
Donc, je dirais que la France a la vocation, et même le devoir de promouvoir cette unification au niveau de notre continent. La France sait mieux que quiconque que, tout comme les paroisses ont disparu dans le concert des nations du dix-neuvième siècle, les nations ne seront plus dominantes au vingt-et-unième siècle de demain.
Dans ce cadre, une bataille se déroulera vendredi prochain. Mais, après le discours de Joseph Daul, je me demande de quoi vous allez encore discuter. En tout état de cause, s'agissant des futures finances de l'Union, on ne peut nier les difficultés actuelles. Mais est-il si difficile, Monsieur le Président, de faire comprendre à vos collègues qu'en temps d'austérité, il vaut mieux mettre en commun les rares ressources, plutôt que de renationaliser les politiques européennes?
Donnons quelques exemples: défense, diplomatie, recherche, innovation, ce sont des dizaines de milliards qui peuvent être épargnés si nous collaborons ensemble, dans le cadre d'un budget européen renforcé. Tout comme il y a aussi des millions à épargner si nous voulons entamer le dialogue sur la question du siège de nos institutions.
Malheureusement, c'est l'inverse qui se produit pour l'instant. Il existe un strabisme politique qui gouverne l'Europe, soyons honnêtes. Pire, c'est une véritable escroquerie budgétaire – n'ayons pas peur des mots – qui se prépare vendredi prochain. En effet, on fixe les engagements au niveau souhaité par les pays de la cohésion et on fixe les paiements au niveau souhaité par les pays contributeurs. Résultat des courses: un déficit de soixante milliards d'euros en plus des seize milliards que nous avons déjà, septante-six milliards de déficit!
Je vous le dis, c'est un énorme problème. Et c'est peut-être très étrange que je vous demande ceci, à vous qui êtes socialiste, Monsieur le Président. Dites non! Et disons non ensemble! Non à un cadre financier qui n'est pas sérieux! Et non à un cadre financier qui n'est certainement pas à la hauteur de nos défis! Voilà le message qu'il faut donner vendredi prochain.
Enfin, je voudrais quand même revenir sur la question du Mali. Vous avez entendu les applaudissements, vous avez pris la bonne décision. Il n'était pas concevable qu'un régime djihadiste s'installe à Bamako.
Mais laissez-moi parler aussi d'un autre drame, beaucoup plus grave pour le moment, à savoir la Syrie. Deux ans d'horreur, des dizaines de milliers de morts, des centaines de milliers de réfugiés. Chaque jour perdu sans aider la rébellion démocratique est un jour gagné par les insurgés islamistes. Parce que, nous le savons, Assad tombera, j'en suis sûr. Mais ce sont les djihadistes qui risquent de gagner.
Je vous en supplie – et peut-être pourrons-nous parler de cela vendredi, plutôt que de ce budget qui est erroné –, il faut donner maintenant une aide humanitaire massive, il faut établir une zone de survol interdit dans le nord de la Syrie. Si nous n'avons pas le courage de le faire, donnons-leur au moins les armes antiaériennes qui leur permettront de se défendre eux-mêmes dans cette situation.
Monsieur le Président, vous avez été accueilli en libérateur au Mali. J'espère qu'avec vos collègues européens, vous pourrez aussi devenir des héros en Syrie.
(Applaudissements de son groupe)
Daniel Cohn-Bendit, au nom du groupe Verts/ALE. – Monsieur le Président, Monsieur le Président, François, je t'ai compris!
(Rires)
Le changement c'est maintenant. Alors, allons-y tout droit. Chiche et banco! Ne nous racontons pas d'histoires entre nous, même s'il y a beaucoup de spectateurs.
Deux choses. Tu as parlé des valeurs européennes. Il faut avoir l'intelligence de dire aussi que, pendant des années, l'Europe, quand elle pactisait avec les dictateurs au sud de la Méditerranée, ne défendait pas ces valeurs. Que ces valeurs, quand ces peuples se sont révoltés, ont été des valeurs universelles que nous avons partagées avec eux.
(Applaudissements)
Il est important, aussi, de dire qu'il y a un équilibre difficile à trouver en politique entre les valeurs partagées et nos intérêts et que, parfois, lorsqu'on soutient l'Arabie saoudite ou je ne sais quelle autre force du mal occidentale, c'est au nom de nos intérêts contre nos valeurs, que nous devons peut-être, Laurent, agir comme cela. Mais disons-le, c'est une contradiction parfois difficile à gérer.
Puis, quand on parle maintenant de l'avenir de l'Europe, il faut parler non seulement du budget mais d'un problème fondamental entre le Conseil et ce Parlement, à savoir quelle est l'idée ou la compréhension de ce qu'est la valeur ajoutée du budget européen.
La bêtise la plus grande est de dire: "Puisque nous sommes obligés de faire des économies au niveau national, il faut faire des économies au niveau européen". C'est le contraire qui est vrai! C'est parce qu'il y a récession dans les États membres qu'il faut un budget capable de relancer l'économie.
Joseph Daul a raison quand il dit: "Où sont passés les 120 milliards?" Ce n'est pas de la faute de François Hollande, il faut le demander à Mme Merkel, à M. Schäuble. Ce n'est pas François Hollande qui est responsable du budget allemand, ça aussi tu dois le dire, Joseph.
Pourquoi est-ce que je dis cela? Parce qu'aujourd'hui, les citoyens européens ne voient pas cette relance. Au contraire, quand on voit la crise de la sidérurgie, quand on voit la crise de l'automobile, les États-nations, la France comme l'Allemagne, croient pouvoir s'en sortir seuls. Ce n'est pas vrai! Nous ne sauverons pas l'automobile européenne, nous ne sauverons pas la sidérurgie européenne pays par pays. Lançons vraiment, maintenant, un défi de la mobilité, du redéploiement industriel en Europe.
Par exemple, faisons l'EADS du tramway, repensons la mobilité dans nos villes. Ce sera aussi un facteur d'exportation, comme Airbus l'est déjà. Par conséquent, quand tu dis qu'il faut de la lucidité, il faut de la détermination et de la responsabilité, je rajoute qu'il faut de l'imagination, sinon nous tournons en rond et nous ne faisons rien de nouveau.
Si c'est avec les idées d'hier que nous voulons construire le monde de demain, je dis qu'avec les idées d'hier on a construit les contradictions du monde d'aujourd'hui. Il faut donc parfois laisser les idées du passé derrière nous pour retrouver des idées pour le monde de demain.
Par exemple, tu as parlé de la PAC – ne nous racontons pas d'histoires: il y a le rabais anglais et le rabais français, c'est la PAC. Aujourd'hui, quand tu as parlé de la PAC, tu n'as parlé que de l'agroalimentaire. Non! La politique agricole commune doit être au service de tous les agriculteurs européens et non pas d'une minorité de l'agroalimentaire. Voilà ce qu'il faut dire.
(Applaudissements)
Quand on sait que 80 % de l'argent de la PAC sont répartis sur 20 % des agriculteurs, je n'appelle pas cela de la solidarité, quand je sais que, aussi bien la France que l'Angleterre, que l'Allemagne s'opposent au plafonnement des dépenses par exploitation. Si l'on plafonnait les dépenses à 100 000 euros... mais donnons les chiffres – parce qu'on nous dit que nous sommes complètement fous: ceux qui ont plus de 300 000 euros, c'est 160 exploitations en France et 1 200 en Europe. Plus de 100 000 euros, c'est 5 000 exploitations en France et 10 000 exploitations en Europe, alors qu'il y a des millions d'agriculteurs! Plafonnons, redistribuons pour tout le monde contre les gros! L'agroalimentaire peut se défendre lui-même. Il n'a pas besoin du budget européen.
(Applaudissements)
Pour finir, s'agissant du Mali, tu as eu raison, mais il faut aller jusqu'au bout maintenant. L'Europe doit jouer un rôle important. La réconciliation c'est aussi la réconciliation, difficile, avec les Touaregs, et c'est aussi la réconciliation à l'intérieur du Mali. Il faut dire aussi que le problème du Mali c'est que des pays qui ne sont pas tout à fait démocratiques, comme l'Algérie, par exemple, n'ont pas joué leur rôle dans la région.
Au contraire, ils jouent avec le feu en attaquant les terroristes et en les soutenant d'un autre côté. Il faut dire la vérité, aller jusqu'au bout des choses, et le faire aussi au niveau international. Sur ce point, je suis d'accord, ce n'est pas la France qui le peut, c'est l'Europe, mais c'est une autre histoire, un autre conte de fées parce qu'il nous faudrait une représentante aux affaires étrangères qui soit digne de ce poste. Ce n'est pas tout à fait le cas en ce moment mais c'est un autre problème.
(Applaudissements)
Si tu veux vraiment faire une Europe de l'énergie, faire une Europe de l'énergie renouvelable, faire une Europe où, en 2030, la France aura des objectifs contraignants sur les énergies renouvelables, tous les écologistes d'Europe diront: "François est avec nous et nous sommes avec lui!"
(Applaudissements de son groupe)
Martin Callanan, on behalf of the ECR Group. – Mr President, may I start by joining with the other group leaders and paying tribute to you and to your brave armed forces for the current operation in Mali. Your troops, aided by British and other Member States’ forces, are risking their lives to protect us, and we owe them a huge debt of gratitude. I think the Chamber is united on that point.
Mr President, thank you for agreeing to hold a debate here in Strasbourg today. It is, of course, a beautiful and welcoming city, one that should perhaps be visited by everyone at least once, but maybe not once every month. You label yourself a pro-European, but if you truly were, then you would allow the Treaties to be changed so that this Parliament can finally decide where and when it sits. A large majority of Members in this Chamber, from all different nationalities, from all political groups – even including some French Members – are now in favour of this reform. I hope that you will support it, and I am sorry that none of the other group leaders had the courage to mention it.
Mr President, I do not want to concentrate purely on Strasbourg today. Instead, I want to convey to you a simple message: thank you. Thank you for brilliantly demonstrating to the rest of Europe exactly what a socialist government looks like in practice – one that gets elected on to put an end to austerity and is then mugged by economic reality into introducing harsh budget cuts. I hope that the British Labour Party and all of the other socialist parties across Europe campaigning on similar themes are watching what actually happens in practice.
When the socialists left power in my country, they left a note in the country’s Treasury. It said: ‘I am afraid there is no money left’. Last week your Labour Minister admitted that France is bankrupt. Let us be clear. Things are not in great shape in other countries either, but since you have come to power we have seen how devastating socialism can actually be, even to a country as well-placed and talented as France. When we look at the start of the crisis, it was socialist governments – in Spain, in Britain, in Portugal and in Greece – that maxed out the national credit cards, and it is conservative and centre-right parties that are helping to clear up the mess that they created.
Mr President, you have shown us our socialist future. If we increase taxes to 75%, if we lower the retirement age to 60, and if we have a 35-hour working week, then of course that is electorally attractive. However, it is also devastating to our international competitiveness. Ronald Reagan used to have a great saying: ‘If it moves, tax it; if it keeps moving, regulate it; and, when it stops moving, subsidise it’. Reagan, of course, meant that as a joke, but sadly many of our socialists in this Chamber see it as some sort of manifesto.
If Europe is to thrive then we need to take a new direction. For socialists – and you have said it again today – the single market means harmonised labour rules. It means, as you said, harmonised taxes and harmonised economic policies. For me, the single market means a free forum where we all compete with each other and, in turn, we then become more competitive in the international market.
I raise this point because many in this House – and I think you hinted at it in your speech – keep suggesting that David Cameron was somehow asking for an unfair competitive advantage in his speech two weeks ago. That is simply not the case. He wants reform for all of Europe – a single marketplace where one country can have lower taxes, such as in Ireland, where other countries can have more flexible labour rules, such as in the UK, where some countries can have industry-friendly policies such as in Germany or the new Member States, and yet all still be integral members of the single market. It is time to make the EU about competition once again.
After David Cameron’s speech, Mr President, your Foreign Minister said that this approach was like joining a football club and wanting to play rugby. Now, I like Mr Fabius; he has been right before. If you remember, he led the French ‘No’ campaign against the European Constitution. I think he is right again. In fact, I do not think he realised quite what a good analogy that actually was. This is because, of course, a football pitch is exactly where the game of rugby was first invented. No doubt the person who picked up that ball at the time and ran with it was derided, insulted and shouted at by his fellow players. But now, of course, we know that he invented a game followed by millions, although I suspect its popularity is waning a bit in France after Sunday’s result. Congratulations to Italy.
Personally, I prefer football. In fact I am proud to be a fan of Newcastle United. I am delighted to tell you that this month we have signed five new French players. I do not know whether your new 75% tax rate had anything to do with their enthusiasm to leave France and join Newcastle, but if it did, can I say on behalf of all Toon fans: ‘Merci beaucoup, Monsieur le President’. France’s loss is Newcastle’s gain.
Mr President, I want to see a strong France helping to move Europe in a new direction. So far, the first few months of your Presidency have shown that socialism will deliver neither.
Philippe de Villiers, au nom du groupe EFD. – Monsieur le Président, Monsieur le Président de la République, mes chers collègues, je vous demande de bien vouloir, par prudence, laisser s'exprimer la minorité dans cette enceinte qui, peut-être, représente, sans doute, représentera demain, si ce n'est pas le cas aujourd'hui, l'immense majorité des peuples à l'extérieur de cette enceinte.
Monsieur le Président, vous avez reçu les félicitations chaleureuses de M. Barroso, de la Commission de Bruxelles. Cela vous a satisfait; cela m'inquiète. Vous avez eu un mot, dans votre propos, qui est juste: vous craignez la défiance des peuples européens. Peut-être ce mot vous est-il inspiré par votre voisin, qui a voté "non" en 2005, lors de la dernière consultation référendaire. Pour le reste, le "conte de fées", pour reprendre une expression utilisée il y a un instant, continue.
Monsieur le Président, je voudrais vous dire solennellement, et de façon respectueuse et cordiale, que votre rêve de la fusion des nations européennes par l'intégration, le rêve des élites post-nationales, est un rêve qui s'est évanoui dans le cœur des peuples. Il s'est désintégré parce qu'il était tramé dans un tissu de mensonges: le mensonge de Schengen, qui devait nous apporter la sécurité en abattant les frontières internes; le mensonge d'une Europe sans protection douanière, qui devait nous apporter la prospérité, le courant des échanges – la fin de notre industrie est là, vous le savez, et M. Montebourg le déplore tous les jours –; puis aussi l'euro, qui devait nous apporter la croissance; et puis, le pouvoir d'une oligarchie à Bruxelles, qui devait finalement rencontrer la confiance des peuples.
Aujourd'hui, les peuples s'éloignent, parce que, partout c'est l'austérité, l'appauvrissement, le marasme et le sentiment d'un pouvoir de plus en plus lointain. Alors on ne résout pas un problème, Monsieur le Président, avec les modes de pensée qui l'ont engendré. Aujourd'hui, ce que nous attendons de vous, c'est que vous prononciez un mot tabou dans cette enceinte, un mot tabou dans le milieu confiné où se rencontrent les banquiers et les marchés, les milieux d'affaires et les grands profiteurs de la mondialisation sauvage: il s'agit du mot référendum.
Pour que les peuples puissent exprimer leurs aspirations profondes, on a besoin de racines, on a besoin de frontières, on a besoin de protection, on a besoin d'un univers juridique stable, on a besoin de ne pas perturber le droit de la filiation, on a besoin que vous protégiez nos attachements vitaux. Monsieur le Président, vous avez évoqué François Mitterrand. Nous appartenons tous les deux à la génération qui a vu avec bonheur tomber le Mur de Berlin. Prenez garde, Monsieur le Président! Ne marchez pas trop sous le Mur de Maastricht. Il pourrait s'effondrer sur vous.
Gabriele Zimmer, im Namen der GUE/NGL-Fraktion. – Herr Präsident! Sehr geehrter Herr Präsident Hollande, willkommen im Europäischen Parlament! Im Allgemeinen gilt ja: An ihren Taten sollt ihr sie erkennen. Ja, manchmal sind aber auch Reden sehr wichtig, vor allem dann, wenn sie einen Kontrapunkt zu den Auslassungen anderer Regierungschefs setzen.
Ihre Wahl zum Präsidenten hat eine ganze Reihe von Hoffnungen genährt – in Frankreich und auch in anderen Ländern der Europäischen Union. So haben Sie die Verbindung zwischen der Staatsverschuldung und der Verschuldung der Banken betont. Wegen der Bankenrettung ist die öffentliche Verschuldung der Euro-Zone von 66 % des Bruttoinlandproduktes auf 92 % im vergangenen Jahr gestiegen, ohne dass sich das tägliche Leben der Menschen verbessert hätte.
Sie selbst haben auch immer wieder das Fehlen einer echten Regulierung der internationalen Finanzmärkte kritisiert. Sie haben sich in Ihren Reden gegen die Doktrin der Austerität gewendet und damit die Hoffnung auf einen Kampf um die Erneuerung der Wirtschafts- und Sozialpolitik in Europa genährt. Sie haben selbst immer gesagt, dass eine Reorientierung Europas äußerst wichtig wäre.
Damit sind Sie nicht allein. Viele politische Kräfte unterstützen genau einen solchen Ansatz, viele angesehene Ökonomen haben ähnliche Argumente gebracht. Die Frage lautet jetzt aber: Wo sind wir heute angekommen? Sind wir wirklich dabei, die Ursachen der Krise zu beseitigen? Leider nein. Die Schuldenkrise kann nur überwunden werden, wenn die darunter liegenden globalen Krisen, also auch die Krise der Akkumulation des Kapitals, überwunden werden, wenn es um die Bekämpfung der globalen Finanzwirtschaftskrise und auch des Klimawandels und vor allem der Sozialkrise geht. Davon sind wir weit entfernt.
Die internationalen Finanzmärkte spekulieren längst wieder hemmungslos mit Nahrungsmitteln, Rohstoffen, Immobilien und Boden. Der Europäische Rat hat beschlossen, dass 120 Milliarden für Wachstum bereitzustellen sind. Welches Wachstum bitteschön? Wohin gehen die Investitionen, welches Geld wird tatsächlich eingesetzt? Werden die drastischen Reduzierungen der öffentlichen Ausgaben ebenso gestoppt wie beispielsweise der Ausverkauf des öffentlichen Eigentums? Geht es wieder um Finanzierung von Bildung, Gesundheitswesen, sozialen Ausgaben für Umwelt und öffentliche Dienstleistung?
Jedes Prozent Austerität bringt gleichzeitig einen Verlust an Wachstum. Austerität und Lohnzurückhaltung sind Gift. Der Rat verschärft die Haushaltsdisziplin der Mitgliedstaaten. Er pokert aber gleichzeitig um Milliardendefizite für laufende und kommende EU-Haushalte. Er zieht der EU-Struktur- und -Kohäsionspolitik die Zähne. Sie haben vorhin gesagt, Sie stehen für die EU-Kohäsionspolitik. Dann wenden Sie sich aber bitte auch konsequent gegen die makroökonomischen Konditionalisierungen, denn das passt nicht zusammen. Das Gefälle zwischen dem Zentrum der EU und der Peripherie verfestigt sich. Setzen Sie sich auch für das Hilfsprogramm für Mittellose ein! Gehen Sie keinen Kompromiss ein! Gehen Sie keinen Kompromiss am Freitag ein, der nicht genau diese Zielstellung auch in den Mittelpunkt stellt und deutlich sagt: Daran wird die EU scheitern, wenn sie diese Programme einfach streicht und wenn sie diese Zielstellung aufgibt.
Über die Jugendarbeitslosigkeit ist viel gesprochen worden. Womit soll aber die Jugendgarantie finanziert werden? Es geht um sozialrechtlich abgesicherte Arbeitsplätze für junge Menschen. Tragen Sie dazu bei, dass nicht wieder ein neues Heer, prekär beschäftigter Jugendlicher geschaffen wird! Wir brauchen eine ambitionierte europäische Initiative, die die Zukunft der Jugend garantiert.
Ein letztes Wort noch zu Mali. Im Unterschied zu vielen anderen hier im Saal halten wir die militärische Intervention für den falschen Weg. Die mittelfristigen und langfristigen Folgen sind nicht absehbar. Sicher ist nur, dass die lokale Zivilbevölkerung am meisten leiden muss. Auch wir als EU tragen Verantwortung für den Konflikt in Mali. Nicht nur unsere Außen- und Handelspolitik, sondern vor allem auch der Glaube an die Exportfähigkeit unserer westlichen demokratischen Institutionen hat versagt. Lassen Sie mich an dieser Stelle auf einen Aufruf aus der Gemeinde Falea in Mali verweisen: Kein Rohstoffabbau gegen Menschenrechte, Demokratie und Umwelt! Unterstützen Sie – nehmen Sie gerade angesichts der militärischen Intervention in Mali die Gelegenheit wahr – unterstützen Sie den Protest dieser Gemeinden und sorgen Sie dafür, dass die EU-Afrika-Strategie tatsächlich mit Leben erfüllt wird, dass es um Gerechtigkeit geht, dass es um Umweltschutz geht, dass es um Lebensbedingungen für Menschen und Natur geht. Das wäre eine Herausforderung auch für Frankreich, für die Europäische Union. Da haben Sie uns an Ihrer Seite.
Marine Le Pen, au nom du groupe NI. – Monsieur le Président, Monsieur le Président de la République, j'ai écouté votre intervention, celles de M. Daul, de M. Verhofstadt, de M. Swoboda. Je constate que les louanges adressées les uns aux autres demeurent cet artifice déjà usé du temps où votre prédécesseur était venu ici. Je me souviens d'ailleurs qu'il s'était adressé aux eurosceptiques, aux eurocritiques que nous sommes, en annonçant notre disparition, dans un éclat de rire généralisé de ce Parlement. Aujourd'hui, force est de constater que l'hilarité qui accompagnait les discours enflammés sur l'avenir radieux de cette Union européenne a fait place aux rictus.
Monsieur le Président, à l'heure où votre ministre de l'économie vient enfin de reconnaître que l'euro est fort, peut-être, d'ailleurs, trop fort, a-t-il dit, au moment où la monnaie unique évolue au-dessus de 1,35 dollar, ce qui pénalise durablement nos exportations hors zone euro et plombe, à l'intérieur de la zone, notre compétitivité par rapport à l'Allemagne, alors que la balance commerciale de la France est en déficit, avec un record annuel de 70 milliards d'euros, alors que nos finances publiques sont gravement surendettées, ce qui menace la solvabilité de la France, plus de 1 800 milliards d'euros de dette et près de 1 500 milliards d'intérêts déjà versés depuis 1973, alors que nous sommes à la veille d'un chômage endémique, il est plus que temps de s'apercevoir que vous vous êtes trompé de chemin, que poursuivre dans votre politique socio-économique, semblable d'ailleurs à celle de vos prédécesseurs, c'est faire le jeu exclusif des puissances d'argent et d'une Union européenne quasi totalitaire, une Europe de Bruxelles et de Berlin, sous l'emprise des "banksters" de Goldman Sachs, dont le seul objectif est la rentabilité financière à court terme – oui, oh, vous les défendez Monsieur Cohn-Bendit, cela ne m'étonne pas de vous. Cette rentabilité financière à court terme passe par la déflation salariale, puisque Goldman Sachs demande une baisse de 30 % des salaires, avec pour conséquence, et vous le savez, un véritable saccage social.
Pourtant, une dévaluation externe s'imposerait pour la compétitivité. Selon une étude de l'INSEE, une dépréciation de 20 % de l'euro pourrait entraîner une hausse immédiate d'environ 3 % du PIB réel. Cette dévaluation ne règlerait pas le problème de fond, bien sûr, parce que celui-ci reste l'existence d'une monnaie unique, partagée pourtant par des pays si différents, mais elle donnerait, allez, un petit bol d'air pur, un petit bol d'air provisoire. Cette monnaie unique, il faudra bien accepter de la déconstruire ensemble avant qu'elle ne le fasse d'elle-même dans la surchauffe et la panique des salles de marché.
Oui, je parle des Européens, mais en tant qu'euroréaliste, car les peuples que vous êtes tous censés écouter et servir se détournent, chaque jour un peu plus, de votre projet fédéraliste forcené. Ils se détournent parce que vous ne montrez aucun signe allant dans le sens, notamment, de leur protection, parce que vous vous refusez à admettre vos erreurs et à changer radicalement de chemin.
Pire, l'Europe de la paix, Monsieur Cohn-Bendit, devient menaçante, voire haineuse. Hier, Budapest, aujourd'hui, à Athènes, demain, à Londres, dès que les peuples montrent des signes de résistance à vos diktats mondialistes, la réponse des institutions européennes est celle, d'ailleurs, que vient de démontrer M. Cohn-Bendit: le mépris, l'arrogance, la menace et l'insulte. Eh bien, eh bien, vous ne pourrez pas vous en sortir très longtemps en caricaturant les opposants que nous sommes à ce modèle.
Dans ces conditions, Monsieur le Président, quand, au nom de la France et d'une autre Europe, déciderez-vous enfin de tourner le dos à ce modèle économique ultralibéral et mondialiste qui détruit depuis plus de vingt ans les emplois, le niveau et la qualité de vie des Français et des Européens?
François Hollande, Président de la République française. − Je savais que ma venue ici, devant le Parlement européen, serait un moment utile pour préparer les échéances qui arrivent. Et, vraiment, je vais vous confirmer que je ne regrette pas ma présence ce matin, non pas pour retrouver des partenaires de la vie politique française que je n'avais plus eu l'occasion de rencontrer depuis quelques mois, mais pour entendre différents groupes me demander de faire au Conseil européen ce qui devrait être leur responsabilité auprès des chefs d'État et de gouvernement qui leur sont proches. Mais je dois dire que je pars avec, dans mes bagages, tous les arguments possibles pour obtenir un compromis avec un niveau d'exigence élevé.
Je suis conscient que ce qui est aujourd'hui sur la table ne peut pas satisfaire une majorité du Parlement européen. Je le dirai donc à mes collègues chefs d'État et de gouvernement. J'ai entendu le Parlement européen, dans sa diversité, souhaiter qu'il y ait un niveau correct de dépenses et que des ressources soient revues pour que nous puissions envisager l'avenir avec confiance. Je ne doute pas que le Président de la Commission européenne fera également rapport sur ces interventions. Parce que, parfois, à la table du Conseil européen – je ne vais rien révéler ici –, j'entends un certain nombre dire: "Nous ferons notre affaire des groupes parlementaires du Parlement européen!". Je veux croire que ce ne sera pas le cas cette fois-ci. Donc, que devons-nous chercher ensemble?
Je l'ai dit, d'abord, il faut éviter que les coupes budgétaires finissent par mettre en cause la croissance, et je me sens comptable du plan qui a été adopté au mois de juin dernier. M. Joseph Daul me disait: "Mais où sont passés les 120 milliards d'euros?" Eh bien, ils devront pour une part se trouver dans le cadre financier européen. Une partie a déjà été mise à la disposition de la Banque européenne d'investissement, dont le capital a été reconstitué à hauteur de 10 milliards, dans les obligations de projets, mais ils seront nécessairement, ces crédits-là, dans les Fonds structurels, pour ceux qui n'ont pas été dépensés, dans le cadre financier européen, pour ceux qui ont vocation à l'être.
De la même manière, je ne peux pas défendre un principe de solidarité en même temps qu'un principe de croissance et constater que certains pays continuent d'exiger des chèques et des rabais, alors même qu'ils nous disent: "Vous, la France, vous aurez un avantage si on réduit les dépenses de la politique commune, notamment de cohésion, parce que la contribution nette de votre pays sera réduite d'autant." Je n'accepte pas ce raisonnement. Je considère que la France doit participer pleinement au budget européen, recevoir ce qu'elle peut espérer, mais ne pas elle-même revendiquer un chèque ou un rabais, parce que cela voudrait dire que les thèses de Mme Thatcher, selon lesquelles chacun viendrait demander le juste retour de sa contribution, auraient fini par prévaloir.
(Applaudissements)
Je veux néanmoins chercher le compromis, car il ne serait pas responsable de ma part, en tant que chef d'État d'un grand pays européen, de souhaiter l'échec. Je dois le chercher, cet accord, et vous m'aiderez à le trouver. Parce que, si nous pensons qu'il y a nécessité de préserver les politiques communes – je vais revenir sur la politique agricole – et de préserver aussi les politiques de croissance, nous pouvons avoir un chiffre de 960 milliards d'euros d'engagements, mais j'ai bien compris qu'il y avait comme une subtilité consistant à distinguer engagements et paiements, comme l'a très bien démontré M. Verhofstadt, qui a laissé entendre que nous pourrions faire des promesses et ne pas les tenir. Mais nous ne pouvons pas accepter qu'il puisse y avoir chaque année un déficit du budget européen et qu'ensuite, ce soit vers les États membres qu'il faille se retourner pour combler le trou qui serait ici constaté au niveau européen.
Enfin, de quoi parle-t-on avec le cadre financier et le budget européen? Un pour cent, un pour cent de la richesse européenne, et nous serions en train de nous poser la question de savoir si un peu plus viendrait déséquilibrer l'ensemble des budgets nationaux? Eh bien, non! Nous pouvons faire en sorte que le budget européen reste un budget de croissance.
(Applaudissements)
C'est d'autant plus nécessaire, cela a été rappelé, que nous devons mettre de l'ordre dans nos finances publiques, et donc nous avons à faire nous-mêmes des réductions de crédits parfois difficiles, raison pour laquelle nous avons besoin d'un soutien européen.
Puisque l'on évoque un certain nombre de références venant d'autres époques ou d'autres continents, à un moment il faut bien que ce qui existe au niveau fédéral, au niveau en tout cas ici européen, puisse permettre de contrebalancer ce que nous faisons au niveau national.
(Applaudissements)
En ce qui concerne les priorités qu'a évoquées M. Swoboda, il a raison de dire qu'il y a soixante ans, nous avons été capables d'inventer la Communauté européenne du charbon et de l'acier. Sûrement, il y a aujourd'hui toujours, dans ces secteurs-là, des restructurations à opérer, mais également des industries à préserver. Je crois à la sidérurgie européenne. Daniel Cohn-Bendit nous appelait à faire preuve d'imagination. De ce point de vue, il y a quand même une cohérence, chez lui, de la mettre au pouvoir.
(Applaudissements)
Mais est-ce que nous ne pourrions pas faire aujourd'hui et pour les cinquante prochaines années, la Communauté européenne de l'énergie, où nous mettrions en place les instruments pour l'efficacité énergétique, le développement du renouvelable et la moindre dépendance par rapport aux énergies fossiles? Eh bien, engageons ces politiques, mais cela suppose qu'il y ait aussi des crédits qui soient maintenus dans le cadre financier européen.
Il est vrai que la facilité consiste à aller chercher les dépenses d'avenir pour préserver un certain nombre de dépenses du présent ou du passé. Je veux parler de la politique agricole. Non pas parce que je serai le représentant de la France et, forcément, attaché simplement à ces crédits-là. Je ne peux pas laisser accroire que la France ne serait pas favorable à un plafonnement des aides agricoles. Nous y sommes favorables. De la même manière, je suis conscient qu'aujourd'hui, ce sont les productions animales qu'il convient de favoriser par rapport aux productions végétales, et qu'il y a une vraie crise de l'élevage en Europe, compte tenu du coût des matières premières, et notamment du cours des céréales. Et enfin, je suis prêt à accepter une diminution des aides directes, mais en ayant aussi un deuxième pilier, le développement rural, qui puisse permettre à toutes les agricultures d'être ainsi soutenues par l'Union européenne – et je l'ai bien dit, avec des règles sur le respect de l'environnement, parce que je connais certains pays qui, maintenant, veulent remettre en cause le verdissement de la politique agricole, alors que cela a été un progrès, à la fois pour l'agriculture et pour l'Union européenne.
De la même façon, je suis favorable aux politiques de cohésion, pas simplement pour satisfaire les demandes des pays qui sont les plus concernés, mais parce que nous avons besoin d'avoir cette solidarité et nous avons besoin d'avoir des investissements qui puissent tirer l'ensemble de l'économie européenne. Voilà pourquoi je ferai en sorte de défendre, non pas le Parlement européen, mais l'idée simple que, si nous voulons un accord, il devra ensuite être adopté par le Parlement européen, et qu'il ne servirait à rien, pour plaire à celui-ci ou à celle-là, de trouver un compromis en deux jours, nuit comprise, pour ensuite nous réveiller avec le refus du Parlement européen. Alors, essayons ensemble de défendre la position qui nous paraîtra la meilleure!
Il y a effectivement un paradoxe, qui sera relevé: c'est que ceux qui sont les plus attachés à vouloir des coupes dans le budget européen sont les pays qui ont le plus à perdre si on revient à l'annualisation de ce budget, et je leur demande d'y réfléchir. Parce qu'un certain nombre de chèques et de rabais tomberont si nous en revenons à une procédure annuelle et il y aura aussi, sur un certain nombre de dépenses, plus de dépenses avec le budget annuel qu'il n'y en aurait avec un compromis sur le cadre financier européen.
(Applaudissements)
Je veux également vous remercier pour le soutien que vous avez apporté à l'intervention française au Mali. Je pense que nous ne pouvions pas prendre une autre décision. Ne pas prendre de décision aurait abouti – ce n'est pas une hypothèse, c'est une certitude – à ce que les groupes terroristes contrôlent l'ensemble du Mali et pèsent ainsi sur les pays de l'ensemble de l'Afrique de l'Ouest.
Dany Cohn-Bendit a évoqué l'Algérie. Je veux dire ici combien l'Algérie a souffert pendant des années et des années du terrorisme, et que, s'il y a un pays qui, ici, est la victime de la barbarie, c'est bien l'Algérie. Elle l'a encore été ces derniers jours avec cette prise d'otages. Je n'ai pas discuté de ce qui a été fait par les Algériens, sur leur territoire, pour frapper les terroristes qui retenaient en otages 600 personnes. Nous aurons besoin de l'Algérie dans cette région du monde. Nous aurons besoin de l'Algérie pour lutter contre le terrorisme. Nous aurons besoin de l'Algérie pour favoriser une politique de développement. Nous aurons besoin de l'Algérie pour le dialogue politique, y compris avec les Touaregs.
Sur le Mali, Madame, je peux vous dire une chose, revenant de Bamako et de Tombouctou. Les populations que j'ai vues et qui ne se sont pas rassemblées parce qu'on leur avait demandé de le faire, qui ont acclamé non pas le président français, mais les soldats qui étaient présents au Mali, ces populations-là, elles étaient libérées de la servitude, de l'oppression et de la barbarie. Et ce qu'elles nous demandaient, c'est de rester. Je leur ai répondu que nous ne resterons que si les Africains eux-mêmes le décident et, surtout, nous resterons le temps nécessaire parce que nous avons besoin que ce soient les Africains qui assurent leur propre sécurité.
Une chose est certaine – et je vous le promets ici – c'est que, si nous le voulons tous, nous avons maintenant le devoir, dans cette région-là, d'être présents, de donner, non pas une aide, non pas des subsides, non pas des concours momentanés, mais une orientation de développement et de soutien à une région du monde qui est parmi les plus pauvres de la planète, mais une région qui contient aussi des richesses.
À cet égard, je vous le dis aussi, si la France est intervenue au Mali au nom de la communauté internationale, au nom de l'Europe, ce n'est pas pour défendre un intérêt. Il n'y a pas de mines, il n'y a pas de ressources pétrolières au Mali. Il n'y a pas d'entreprises françaises dont je voudrais assurer la protection. La France ne poursuit aucun intérêt en intervenant au Mali. En revanche, ce que nous protégeons, ce sont les Maliens eux-mêmes, et c'est la possibilité d'un développement économique.
S'il y a une responsabilité que l'Europe doit assumer maintenant, c'est de considérer que nous devons développer ces régions. Je dirai aussi un mot sur le dialogue politique. Je suis conscient, on me le dit souvent, que le plus dur reste à faire. Oui, le plus dur, c'est d'assurer la stabilité, la sécurité. Oui, le plus dur, c'est de permettre le rétablissement de la démocratie. Oui, le plus dur, c'est de veiller à ce que le problème touareg, qui remonte à loin et qui n'a pas été réglé, puisse l'être à cette occasion. Mais là, ce n'est plus la responsabilité de la France uniquement. C'est la responsabilité de toute l'Europe. Je sais que, grâce à votre soutien aujourd'hui, il sera possible de la porter. Merci.
Marine Le Pen (NI). - Monsieur le Président, Monsieur le Président de la République, j'ai constaté qu'il était politiquement correct, en ce moment, de taper sur la Grande-Bretagne. D'ailleurs, vous l'avez fait à de multiples reprises, il faut bien le dire.
Pour de bonnes ou de mauvaises raisons, la Grande-Bretagne remet publiquement le système en cause. À côté de cela, que penser de ceux qui tuent sournoisement ce système? Il faut tout de même regarder la réalité en face. Parmi les pays qui sont des fondateurs historiques de l'Europe, il en est qui pratiquent un dumping social véritablement intensif sans que personne, en l'occurrence, ne les montre du doigt.
Est-ce cette Europe-là que vous souhaitez? Ce n'est en tout cas pas celle que vous mettez en place, au grand dam, d'ailleurs, des travailleurs français. Je pense plus particulièrement à l'Allemagne, dont les employés de l'agriculture et de l'agroalimentaire travaillent pour des salaires de 3 à 4 euros de l'heure!
La généralisation de ces pratiques dans des filières qui ne sont pas couvertes par des accords sectoriels confine à l'esclavage, de l'avis même des syndicats allemands, et menace directement des pans entiers de l'économie française.
Ah, c'est sûr, pendant que ceux-là se taillent la part du lion à l'exportation, nos éleveurs bovins, porcins, avicoles, nos maraîchers, nos industriels de la transformation perdent chaque jour des parts de marché, y compris, bien entendu, en France.
On nous dit: "Mme Merkel envisage de mettre en place un salaire minimum". Eh bien, le moins qu'on puisse dire, c'est qu'elle réfléchit lentement, puisque ce sujet, évoqué il y a plus d'un an, n'a toujours pas fait l'ombre d'un début de commencement de bonne volonté de sa part. Et pour cause, car vous ne pouvez ignorer qu'une des raisons de la puissance économique de l'Allemagne est précisément ce dumping social.
Aurez-vous le même courage pour dénoncer ces pratiques et ce dumping social de l'Allemagne que celui que vous avez eu pour dénoncer, comme tous les autres, d'ailleurs, les réticences de M. Cameron face au fonctionnement du système? L'avenir nous le dira.
Patrick Le Hyaric, au nom du groupe GUE/NGL. – Monsieur le Président, Monsieur le Président de la République, vous avez insisté, à juste titre, sur la nécessité d'une Europe solidaire et vous vous battez avec votre gouvernement contre une violente fracture, qui, en raison des politiques d'austérité, mine nos peuples. Le nombre de pauvre augmente de manière incessante et l'on est en train, aujourd'hui, de tenter de supprimer les crédits du Fonds européen d'aide aux plus démunis, alors qu'on donne des milliards aux banques. Ne croyez-vous pas nécessaire, par-delà le Conseil européen, de lancer un appel aux peuples européens pour que ce niveau d'aide alimentaire soit maintenu?
Seconde remarque: dans chaque pays désormais est appliquée l'austérité budgétaire et salariale – c'est aussi le cas chez nous en France –, soi-disant au nom de la compétitivité. C'est une vis sans fin qui broie le travail et les droits démocratiques. Mais la surévaluation de l'euro, dont vous avez parlée à l'instant, n'est jamais combattue comme un handicap à la compétitivité, alors qu'elle détruit des emplois et des entreprises.
N'est-il pas grand temps de tenter de changer le rôle de la Banque centrale européenne et de transformer le Mécanisme européen de stabilité en un fonds pour le développement social, humain et écologique, avec l'activation d'un nouveau crédit, en lieu et place de la flexibilité du travail, de la baisse de la rémunération du travail et de la destruction de nos services publics?
Enfin, vous avez à l'instant apporté une réponse à une question de M. Daul sur le pacte de croissance qui m'a un peu surpris. Vous avez dit que vous allez le recycler dans le prochain budget. Cela veut-il dire que les fonds annoncés étaient virtuels?
Nigel Farage, on behalf of the EFD Group. – Mr President, despite his own views, President Hollande is are doing rather a lot for the eurosceptic debate in France. President Hollande, the decision to reduce the retirement age, to increase the minimum wage and above all, of course, to introduce the ‘hate tax’ to make sure that all of your successful entrepreneurs – and now footballers – flee France, these all mean that the competitiveness gap between France and Germany is getting wider. That is now being reflected in a flight of capital from French banks. And people are beginning to notice that, ultimately, the euro is not just doomed in the Mediterranean, but it is going to be impossible for France and Germany to stay together inside the same economic and monetary union.
So, when your Employment Minister says the country is bankrupt, what do you do? The old trick of launching a foreign military intervention. Your troops go off to Mali; and yes, it is very good to see the smiling faces in Timbuktu for the moment, but you have done this on behalf of the European Union. It is now an EU mission. Just two days ago, Tony Blair said that the European Union is not about peace, but about power. I think what he meant is the European Union increasingly will be about war because the response to Mali, the response to it being an EU mission – and we have heard it all around the the Chamber today, the Liberals urging us to intervene militarily in Syria, support from right and left in this House – is that the EU should intervene militarily.
I have to say this: if you really think that taking on fundamentalist radical Islam in battle is something that we can somehow succeed in, I suspect we will launch ourselves in the same way we have in Afghanistan on a decade of unending, unwinnable misery. I do not want the United Kingdom to be part of a militaristic, warlike European Union, and that is the speech that I have heard both from you, President Hollande, and from most people in this Chamber today.
Martin Callanan, on behalf of the ECR Group. – Mr President, I think we have had a very good discussion today. President Hollande, I certainly want to thank you for agreeing to have a debate with us. We are aware that it is something you did not have to do as a Head of State and certainly something which your predecessor never did, so thank you for that.
Let me say that if you want to push ahead with your socialist policies in France, then of course I wish you good luck. I don’t think that they will work, but good luck anyway. We will certainly not stand in your way. However, I would make one plea: that you do not allow socialism and militant trade unionism to interfere with the proper functioning of the single market. In particular, I want to raise with you the recent actions by French fishermen in Boulogne who have prevented Dutch and Belgian vessels from landing their catches there. French fishermen have even vandalised Dutch and Belgian ships. In my own country, the main Dover-Calais ferry route is regularly blocked by militant fishermen and farmers, with the knock-on effect of traffic jams around the south east of England.
So I would ask you to do two things: first of all, tackle these militant unions, restore order in your ports and protect those fishing and trading routes. Secondly, do not try to use the single market as a means of harmonising the rest of Europe down to your level. Because if you do, people will not just be removing their money from France they will be removing it from Europe as well.
Daniel Cohn-Bendit, au nom du groupe Verts/ALE. – Monsieur le Président, si on a bien écouté tout ce qui a été dit ici, on ne peut pas trouver un compromis pour le budget pluriannuel. Je crois que la proposition de Joseph Daul, mon camarade de groupe, est la bonne, à savoir: attendons 2014, faisons deux ans de budget année par année, et trouvons ensemble ce qu'est l'intérêt général européen. La crise du budget, c'est la crise de la compréhension de ce que serait l'intérêt général européen.
La Communauté européenne de l'énergie, elle est sacrifiée en ce moment dans ce budget par "connecting Europe" et toutes les infrastructures des énergies renouvelables. Vous pouvez prendre des tas d'exemple où, effectivement, aujourd'hui, on tire tout au rabais, et on n'y arrivera pas. Jacques Delors dit: "il faut augmenter le budget européen de 20 %". Helmut Schmidt nous dit: "il faut que le Parlement européen fasse un putsch. Donc, moi, comme je suis devenu pacifiste, je dis qu'il faut trouver un compromis entre le Conseil et le Parlement. Et ce compromis, c'est aucun compromis aujourd'hui. Rouvrons la discussion, les débats et, après, nous pourrons, en 2014, après les élections européennes, avoir un budget pluriannuel qui sera contrôlé démocratiquement par le nouveau parlement.
Marielle de Sarnez, au nom du groupe ALDE. – Monsieur le Président, nous savons les difficultés qui touchent l'Europe et le doute qui s'installe parfois à l'égard de l'idée européenne même, mais nous savons aussi, et c'est ma conviction, que la seule façon d'y répondre, c'est d'affirmer, d'assumer la nécessité historique d'une Europe plus unie et plus forte, ce que vous avez fait ce matin.
Et je pense que nous devons agir dans deux directions si nous voulons retrouver l'adhésion des peuples. D'abord, et c'est évident, il manque à l'Europe de savoir décider et cette faiblesse, elle nourrit tous les doutes. L'Europe se réunit interminablement, mais elle ne tranche pas. Nous voulons une Europe qui décide sur un budget conséquent – Alain Lamassoure va en parler encore – sur une ressource propre, sur une vraie politique énergétique, sur notre indépendance industrielle, sur les questions monétaires, de politique étrangère ou de défense. Décider, c'est le cœur même de la politique.
Monsieur le Président, vous venez de vivre l'intervention au Mali. Vous avez vérifié combien il a été crucial de pouvoir trancher en quelques heures pour défendre les valeurs que nous défendons et que nous partageons tous ici. Il n'est pas de crise où l'Europe soit en mesure de décider en temps utile; nous voulons que cela change.
Mais plus il y aura d'Europe, et plus cette Europe exigera, pour être légitime, de devenir authentiquement démocratique. Il faut que les citoyens aient accès aux dirigeants de leur Union, qu'ils les connaissent, qu'ils les élisent directement, qu'ils connaissent et qu'ils valident les orientations politiques que l'Europe met en œuvre pour eux, en leur nom. Voilà, Monsieur le Président, les convictions qui sont les miennes, voilà l'espoir qui est le mien, je vous remercie.
Catherine Trautmann, au nom du groupe S&D. – Monsieur le Président, je voudrais m'adresser au Président de la République – ici, je ne m'adresse pas à François –, car c'est un plaisir et un honneur de le faire au nom de mon groupe.
Dans cette période troublée où d'aucuns s'interrogent sur le devenir de l'Union – c'est l'objet de notre débat de ce matin – ou même sur sa raison d'être, je voudrais rappeler ce à quoi nous aspirons et ce à quoi aspirent les Européens: à plus de solidarité.
Solidarité des Européens sur la scène internationale. Vous avez pu entendre, Monsieur le Président, le large assentiment de notre Assemblée s'agissant de l'intervention au Mali. Mais parce que les Européens ne peuvent pas sous-traiter les affaires militaires à certains États membres seulement, il faut mettre sur le métier une authentique politique de sécurité et de défense commune.
Solidarité interne aussi et surtout. C'est le sens de votre démarche de réorientation de l'Europe. Le budget communautaire et, par conséquent, les négociations sur le cadre financier pluriannuel sont un test politique de solidarité où se vérifie notre crédibilité, c'est-à-dire l'adéquation entre les politiques adoptées et les moyens de les réaliser. Ce sujet a été clairement posé par mes prédécesseurs dans ce débat.
Je voudrais dire, au nom de notre groupe, que pour nous, c'est non aussi, mais nous ne pratiquerons pas la politique de la chaise vide. Vous l'avez dit, nous devons prendre la responsabilité, nous devons avoir la lucidité de discuter des conditions dans lesquelles nous pouvons avoir le budget qui correspond aux politiques que nous avons adoptées.
Quand nous débattons des perspectives financières, nous devons tracer des perspectives d'avenir pour la jeunesse, pour l'emploi et pour la croissance. C'est la raison d'être du budget communautaire, un budget d'investissement et le fondement de la mise en commun de nos ressources, mais qui ne peut plus se résumer aux seules contributions nationales.
Nous avons besoin de ressources propres, comme la taxe sur les transactions financières, à laquelle la France a beaucoup contribué, et qui peut constituer une première pierre de ces ressources. Il s'agit pour tous, dorénavant, de se doter d'outils modernes pour penser notre croissance, et nous serions incapables d'organiser la solidarité entre les peuples d'Europe? Il faut ici parler du Fonds européen d'aide aux plus démunis dont l'avenir soulève de nombreuses incompréhensions dans nos populations, au risque précisément d'y perdre notre crédibilité.
La proposition de la Commission doit être entendue. La forme juridique de notre action pour les plus démunis ne dépendra que de notre volonté à mettre en œuvre cette solidarité sans obérer les autres politiques du Fonds social européen.
Parallèlement, nous devons concevoir un plan européen d'investissement pour créer de nouveaux emplois et réaffecter une partie des Fonds structurels à des projets pour les jeunes. Au-delà du pacte pour la croissance et l'emploi, c'est le sens de la garantie pour la jeunesse européenne.
Enfin, et je conclurai, nous devons travailler ensemble à la légitimité de tous les parlements nationaux et du Parlement européen. Nous devons devenir des codécideurs de l'examen annuel de la croissance dans le respect de la souveraineté des parlements nationaux et des progrès que notre Parlement peut apporter à la démocratie.
Alain Lamassoure, au nom du groupe PPE. – Monsieur le Président, Monsieur le Président de la République, en Europe, la France est un pays normal, mais elle n'est pas un État ordinaire. En cette période d'incertitude, l'Europe attend deux choses d'elle.
D'abord qu'elle soit exemplaire chez elle, qu'elle honore les engagements qu'elle a pris, qu'elle joue en harmonie dans le concert européen. Elle en a accepté la partition commune, et l'Europe vous en est reconnaissante, mais cette partition, votre gouvernement l'exécute avec de curieuses dissonances. Et là, l'Europe s'étonne. Quand la durée de la vie s'allonge, la France d'aujourd'hui rajeunit l'âge de la retraite, entre 60 et 62 ans. Quand la fiscalité est partout mise au service de la course aux emplois, aux capitaux, aux talents, la France donne l'impression d'imposer toutes les formes de réussite et même de punir ceux des salariés qui osent travailler plus de 35 heures par semaine.
(Mouvements divers)
Ses partenaires taillent dans les dépenses administratives à la hache. La France s'y attaque avec une lime à ongles. Son gouvernement s'est engagé à ne pas réduire d'une seule unité, pour les cinq prochaines années, le nombre de ses cinq millions de fonctionnaires.
Alors, dans la deuxième puissance économique de l'Union, en ce moment même, la production s'arrête, les usines ferment, le chômage augmente, les talents s'en vont, et l'Europe s'inquiète.
On attend aussi de la France qu'elle éclaire la voie de l'Europe avec ses partenaires les plus engagés. Vous l'avez fait au Mali, Monsieur le Président, et le Parlement l'a salué. Cela montre bien que la France n'est écoutée que lorsqu'elle propose une vision pour toute l'Europe.
Ce que nous devons inventer aujourd'hui, ensemble, c'est le modèle de solidarité de l'Europe, Catherine Trautmann l'a dit. Votre chance, c'est que c'est maintenant que nous devons décider du budget européen jusqu'à la fin de la décennie. Notre malheur, c'est que, à ce jour, de l'aveu même du Président Van Rompuy, autour de la table du Conseil, personne ne défend l'Europe. Chacun ne parle que de lui.
Monsieur le Président de la République, vous avez convaincu le Parlement européen quand vous avez plaidé pour un budget élevé. Il faut maintenant que vous convainquiez le Président de la République française. Parce que, certes, le Royaume-Uni a un droit de veto, mais la France aussi dispose de ce droit. Vous avez évoqué le Président Mitterrand, à juste titre. Mme Thatcher avait un droit de veto, mais le Président Mitterrand et Helmut Kohl se sentaient responsables de l'Europe. Ils ont su amadouer la Dame de fer tout en doublant les fonds régionaux.
Sur les priorités européennes, vous l'avez dit, nous en sommes d'accord, la valeur ajoutée d'un budget européen, c'est de permettre d'atteindre la masse critique là où la mondialisation la rend nécessaire: d'un côté les grands investissements d'avenir, de l'autre l'influence de l'Europe dans le monde. Vous avez dit "Peser sur le destin du monde".
Alors, tremblez concurrents d'Asie ou d'Amérique, tremblez terroristes de tous les continents! La proposition qui est mise sur la table affecterait à la recherche européenne huit dix-millièmes du PIB et affecterait sept dix-millièmes à son action extérieure. Et on nous dit – je me trompe? – en coulisses: "La France s'emploie ardemment à raboter encore ces chiffres pour améliorer son retour comptable". Au moins ce budget sera-t-il équitable!
Dans votre discours d'investiture à Paris, Monsieur le Président, vous avez déclaré que la justice, l'équité serait le premier critère de toute votre action. Voilà une occasion de mettre ce principe en pratique, car le système actuel de financement de l'Union est le plus injuste qui soit. Cinq des pays les plus riches paient relativement moins que les dix pays les plus pauvres, qui sont tous des nouveaux membres. Le Parlement a proposé une réforme d'ensemble fondée sur de nouvelles ressources propres et nous nous réjouissons de ce que vous avez dit sur ce point.
La France se bat. Elle en retient le principe. Mais jusqu'à votre discours de ce matin, elle se battait surtout pour plafonner sa propre contribution, donc pour aggraver la charge des pays pauvres.
Du côté des dépenses, la potion magique qui est concoctée secrètement par les alchimistes du Conseil européen aboutirait à réduire, je dis bien à réduire, pour les sept années qui viennent, les fonds de cohésion alloués, par exemple, à des pays comme la Grèce, le Portugal, l'Espagne ou la Hongrie. Jamais ces pays n'ont eu autant besoin de l'Europe. Jamais ils n'ont autant souffert. Jamais ils n'ont fait autant d'efforts. Et c'est maintenant qu'on déciderait de les aider moins? Silence, les pauvres? Parce que de toute façon, ils n'ont pas les moyens politiques de dire non?
Monsieur le Président, accepter un compromis élaboré sur de telles bases, ce serait prétendre faire l'Europe de la solidarité, à commencer par l'Europe sociale, pendant toute la durée de votre mandat, avec le budget européen de M. Cameron. Quel socialiste pourrait l'accepter? Qui de nous pourrait accepter cela? Le groupe PPE, lui, ne l'acceptera pas.
François Hollande, Président de la République française. − Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais d'abord vous remercier pour la qualité de ce débat, pour la franchise des échanges et pour l'utilité, je crois, de notre discussion.
En entendant M. Lamassoure, je me disais qu'on demande à un socialiste d'empêcher que les conservateurs fassent un mauvais budget.
(Rires et applaudissements)
Je vous remercie pour votre confiance,
(Rires)
mais elle révèle tant de défiance, pour ne pas dire tant de distance à l'égard des gouvernements que vous soutenez dans vos pays respectifs.
(Applaudissements)
Parce que je dois quand même informer le Parlement: les socialistes sociaux-démocrates sont très minoritaires au sein du Conseil européen. J'ai bien entendu votre message mais si, d'ici jeudi, vous pouviez le transmettre à vos chefs de gouvernements et à vos chefs de partis respectifs, ce serait heureux.
(Vifs applaudissements)
Je prends un engagement vis-à-vis de vous: tout au long du Conseil européen, je ne cesserai de citer Joseph Daul, Alain Lamassoure, M. Verhofstadt si c'est nécessaire. Pour les autres, pardonnez-moi, je crains que votre renfort soit inutile...
Je pourrais me satisfaire de cette situation mais, en même temps, ce ne serait pas responsable. Je suis chef d'État. Je représente la France à la table du Conseil européen et je n'y vais pas pour exprimer d'avance un refus ou espérer un échec. Mon devoir, c'est de chercher le compromis, parce que je souhaite que l'Europe puisse donner la meilleure image qui soit, c'est-à-dire celle de vingt-sept chefs d'État et de gouvernement qui, entendant le Parlement européen, constatant l'état de la croissance, voyant le doute qui existe dans les opinions publiques, prennent les décisions nécessaires.
Donc, j'irai chercher un accord. On me dit que ce sera difficile, voire impossible du côté du Royaume-Uni. Mais pourquoi un pays pourrait-il décider à la place des vingt-six autres? Je pense même que, lors du dernier Conseil européen, il était possible d'arriver à un accord et que, dans un souci de laisser les uns et les autres affirmer que l'échec était finalement une victoire, nous avons laissé faire. Aujourd'hui, nous constatons qu'il devient plus difficile de conclure un accord.
Je pense que nous pouvons convaincre, parce que de nombreux pays – vous l'avez dit, pas forcément pour de bonnes raisons ou de bons motifs – veulent garder leur chèque et leur rabais. La menace de l'échec peut être un facteur favorable à la lucidité et à la prise de conscience. Je souhaite un accord parce que je considère que, dans une démocratie – et elle est là, vous êtes ses représentants –, il est bon que vous puissiez juger l'action des chefs d'État et de gouvernement et donc, ce qu'ils auront trouvé.
Il est vrai, je ne peux pas vous dire le contraire, que la plupart des chefs d'État et de gouvernement viennent défendre autant l'intérêt national que l'intérêt européen et parfois même, davantage le premier. Mais je ne laisserai pas dire que la France, en tout cas la France d'aujourd'hui, serait prête à sacrifier les politiques de croissance pour défendre simplement la politique agricole commune, parce que ce n'est pas vrai. Parce que la politique agricole commune va voir ses crédits diminués par rapport à ce qu'était la proposition de la Commission. Parce que cela engendrera nécessairement des restructurations difficiles dans un secteur qui est essentiel pour nos territoires.
Je ne laisserai pas dire que nous voulons remettre en cause les politiques de croissance parce que nous avons été, non pas les seuls, mais les premiers à dire que la priorité, maintenant, devait être la croissance. Je constate qu'effectivement, la facilité c'est de faire des coupes là où l'avenir est en cause, dans la recherche, la connectique, les infrastructures, l'énergie.
Deuxième réflexion – je ne serai pas plus long parce que je veux répondre à nos amis britanniques qui ont pour la France, je le vois, toujours les mêmes yeux de Chimène, mais c'est une vieille histoire que nous avons ensemble... Je ne remonterai pas au général de Gaulle, que vous auriez dû soutenir à l'époque, mais je vais vous dire simplement les choses.
Il nous arrive d'être d'accord David Cameron et moi. Je salue d'abord le soutien qu'il a apporté à l'intervention de la France au Mali. Il a été le premier et le premier, même, à proposer des avions et du matériel. Je n'aurai donc pas, aujourd'hui, l'attitude grossière qui serait de caricaturer un responsable politique et un pays. Merci au Royaume-Uni. Par ailleurs, je constate qu'effectivement David Cameron est pour le mariage pour tous, ce qui facilite forcément la discussion de ce sujet en France.
(Applaudissements)
Je veux répondre aux questions qui m'ont été adressées par rapport à des enjeux majeurs pour l'Europe. Je veux parler des jeunes. Nous sommes un continent qui vieillit. Nous sommes un continent où la natalité est aujourd'hui faible, en tout cas, insuffisante. Nous mettons en cause, par nos politiques, par nos choix, la place des jeunes dans nos sociétés. Je considère que, s'il y a un seul sujet qui mérite que nous nous rassemblions tous, y compris pour la préparation de ce budget, c'est la place de la jeunesse en Europe.
(Applaudissements)
Quant je dis "la place de la jeunesse", je ne pense pas seulement au programme Erasmus, aux échanges universitaires, à la mobilité des chercheurs, qui sont des éléments essentiels, mais je pense aussi à la jeunesse précarisée, à la jeunesse pauvre, à la jeunesse qui ne connaît pas la chance de pouvoir suivre un enseignement supérieur et qui a l'impression que l'Europe ne s'occupe pas d'elle.
Nous devons donc dans ce budget – nous verrons ce qu'il sera – prévoir un dispositif exceptionnel pour les jeunes qui nous permettra, dans tous les pays d'Europe, au-delà de ce qui aura été décidé dans l'Union, d'accompagner ces orientations pour qu'aucun jeune ne soit sans solution, c'est-à-dire sans formation, sans qualification, sans insertion, sans emploi. Parce que le risque de rupture n'est pas simplement civique, il est générationnel et qu'à un moment, il y a une jeunesse qui se met en porte-à-faux avec l'évolution d'une société.
Je veux également indiquer que, concernant la politique de change, nous ne pouvons pas constater simplement l'appréciation de l'euro et nous en désoler ou nous en réjouir, en fonction des positions de chacun. Nous devons avoir UNE politique de change. Elle est prévue par les traités. Elle ne dépend pas que de la Banque centrale européenne. C'est aussi le rôle des gouvernements de la zone euro que de dire quelle priorité nous voulons accorder à la monnaie et qu'il y a un paradoxe – c'est vrai – à demander des efforts de compétitivité à des pays et, en même temps, à renchérir le prix de leurs exportations, en empêchant ainsi tout rétablissement de la balance des paiements ou de la balance commerciale. Donc, cette politique de change, nous devrons à un moment ou à un autre nous en saisir.
Je terminerai par la question de Strasbourg, puisqu'elle a été posée.
Je connais, ici, la diversité des positions. Mais je ne défends pas simplement Strasbourg parce que c'est dans le traité, je défends Strasbourg, capitale européenne, parce que c'est l'histoire qui nous rappelle le rôle de Strasbourg.
Parce que, c'est vrai, nous avons célébré le 50e anniversaire du traité d'amitié entre la France et l'Allemagne et que Strasbourg faisait partie de la réconciliation entre nos deux pays. Je parle de Strasbourg parce que c'est l'histoire et l'avenir de l'Europe, parce qu'il y a des villes qui représentent symboliquement ce qu'est l'Europe.
Je ne défends pas Strasbourg simplement parce que c'est en France, parce que, finalement, il y a d'autres sièges de l'Europe qui sont dans d'autres pays. Je défends Strasbourg parce que c'est l'Europe, et si on ne pense pas que Strasbourg peut être le siège du Parlement européen, alors le doute s'installe sur les convictions européennes de chacun, quelles que soient les difficultés matérielles que vous pouvez rencontrer.
Merci, en tout cas, de m'avoir reçu ici, à Strasbourg, au siège du Parlement européen!
(Applaudissements vifs et prolongés)
Le Président. - Merci beaucoup, Monsieur le Président.
Déclarations écrites (article 149)
Nuno Teixeira (PPE), por escrito. – Subscrevo as declarações do Presidente Francês, François Hollande, pois entendo que é necessário reforçar o orçamento europeu, preservando assim as políticas europeias, sobretudo a política de coesão que é fundamental para apoiar as 271 regiões europeias e a política agrícola comum. Ambas as políticas europeias representam um elevado valor acrescentado para o crescimento económico, a criação de emprego e a geração de riqueza e não entendo como é possível que alguns Estados-Membros queiram diminuir duas das principais políticas de investimento existentes no continente europeu. Saliento que, no final da presente semana, deverá ser novamente discutido o novo Quadro Financeiro Plurianual 2014-2020 e os novos regulamentos da Política de Coesão. Espero que exista um alargado consenso à volta dos assuntos em questão e gostaria de sensibilizar o Conselho para a necessidade de ter em conta as especificidades naturais e económicas das Regiões Ultraperiféricas da UE. Felicito ainda o Presidente Francês pela intervenção militar realizada no Mali e que tem alcançando um tremendo sucesso, ajudando assim a população local a viver de forma livre e democrática.