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Вторник, 16 май 2017 г. - Страсбург Редактирана версия

5. Реч на Moussa Faki Mahamat, председател на Комисията на Африканския съюз
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Протокол
  

Le Président. – Chers collègues, c’est un plaisir pour moi de recevoir aujourd’hui le Président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat.
Monsieur le Président, vous êtes le premier président de la Commission de l’Union africaine à vous adresser à cette assemblée. L’Afrique est une priorité pour l’Union. Nous partageons beaucoup sur le plan des valeurs et de la culture, mais aussi beaucoup de défis: sécurité, immigration, chômage, changement climatique. C’est pourquoi nous devons renforcer notre partenariat stratégique et travailler ensemble, d’égal à égal, pour trouver des solutions concrètes aux préoccupations de nos citoyens.

Je salue les efforts de l’Union africaine dans sa lutte contre le terrorisme. Notre coopération est essentielle dans le Sahel, dans la région du lac Tchad, dans la Corne de l’Afrique ou encore en Libye. Nous avons un intérêt commun à gérer les flux migratoires, à combattre la traite des êtres humains, à prévenir la radicalisation.

Il est aussi indispensable de créer des possibilités d’emploi pour la jeunesse africaine en Afrique. Nous devons donc développer une forte diplomatie économique et investir plus et mieux sur ce continent.

J’exprime ma forte préoccupation pour la crise alimentaire et la famine qui ravagent de nombreuses régions africaines. Demain, à l’occasion de sa visite à Strasbourg, je discuterai avec le Secrétaire général des Nations unies de cette crise humanitaire. Je suis convaincu que nous devons renforcer nos liens avec les États africains mais aussi, et surtout, à un niveau interinstitutionnel, avec notre organisation sœur, l’Union africaine.

Monsieur le Président, vous avez la parole.

 
  
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  Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l’Union Africaine. – Monsieur le Président, honorables Députés, Excellences, Mesdames, Messieurs, je me réjouis de l’opportunité que vous m’offrez de prendre la parole devant votre prestigieuse assemblée représentative des peuples européens dans leur diversité.

Le partenariat Afrique-Europe, renforcé depuis notre premier sommet au Caire en 2000, a franchi dans son exaltante aventure des étapes décisives. Je suis convaincu que le prochain sommet de novembre, en cours de préparation, constituera une nouvelle étape dans notre marche vers un avenir radieux pour nos peuples.

Le couple Afrique-Europe a une belle histoire où se sont croisées, par le passé, les ombres et les lumières mais, de nos jours, il s’enorgueillit de sa vivacité, de son dynamisme et de ses promesses d’un futur horizon tout en bleu. Jalons successifs d’une série d’apports, d’une rive à l’autre de la Méditerranée, l’Égypte, la Grèce, la Phénicie, Rome et Carthage tissaient, depuis des siècles, entre nos deux continents, la toile d’une relation indissoluble.

La colonisation, tout au long de deux siècles, aura mis face à face nos cultures et nos civilisations si différentes dans leurs spiritualités et dogmes structurants, mais complémentaires dans leur humanisme et leur essentielle et impérissable inclination à la liberté.

La colonisation de l’Afrique par des puissances européennes a été, assurément, un moment controversé de notre histoire commune. Oui, il y eut la domination, l’exploitation, l’asservissement, l’esclavage même, cette insulte exécrable à la dignité humaine dont les traces ne disparaîtront pas comme par enchantement.

Des poètes célèbres ont immortalisé cette affliction. Des penseurs et intellectuels africains et européens ont interprété et exploré ce segment de notre histoire. Des hommes politiques ont fait du procès de la colonisation et de l’hymne à la gloire de la décolonisation le paradigme de leurs doctrines libératrices. Tous ont, à juste titre, tiré les leçons adéquates pour que cela ne se répète plus jamais.

Cependant, je ne suis pas venu aujourd’hui, en passéiste, remuer le couteau dans les plaies et encore moins me laisser tenter par l’illusion d’une construction d’un destin continental en m’épanchant de l’exaltation d’un passé révolu. J’ai tout simplement voulu, en propos liminaire de mon intervention, souligner le caractère indélébile des cicatrices laissées par ce legs d’hier, tel qu’il est forgé et inscrit dans la mémoire collective des peuples africains.

L’histoire de notre relation, comme toute histoire, ardente et passionnelle, n’a pas eu que des ombres. Elle est aussi – heureusement – une histoire de lumières, d’échanges féconds, d’influences culturelles et spirituelles réciproques, enrichissantes, vivifiantes et émancipatrices.

Cette rencontre a, à travers les siècles, contribué à l’héritage civilisationnel qui est le vôtre, qui est le nôtre.

Mesdames, Messieurs, notre environnement international se recompose à une vitesse surprenante et non moins inquiétante. De nouvelles puissances émergent, cherchant leur place dans un monde devenu multipolaire. De nouveaux défis se posent, pour lesquels le seul espoir de solution durable réside dans l’action collective et solidaire.

Dans cette restructuration d’un univers géostratégique, par ailleurs fortement mondialisé, l’Europe et l’Afrique semblent inévitablement vouées à l’entente stratégique, saisies par l’évidence, vitale, de leur communauté de destin. Leur histoire, leurs valeurs différentes mais complémentaires, leur proximité géographique fait de chacune le prolongement de l’autre, les y incitent et les y engagent sans cesse, avec force et raison.

Mesdames, Messieurs, pour s’épanouir et porter ses fruits, le partenariat entre l’Union européenne et l’Union Africaine doit reposer sur des principes solides et dessiner tous les champs à la mesure de son envergure multidimensionnelle, de ses ambitions visionnaires et de ses enjeux globaux, en constante extension.

Le respect mutuel, l’égalité, la liberté et la solidarité sont les repères et les jalons inaltérables d’une relation solide, durable, mutuellement avantageuse.

L’Afrique a rassemblé ses intelligences pour concevoir et adopter un agenda ambitieux pour les cinquante prochaines années, visant la construction d’une Afrique intégrée, prospère et en paix. À l’examen, pareil agenda recoupe certaines questions essentielles, la stratégie Afrique-Europe dont nous célébrons ensemble, cette année, le dixième anniversaire. L’agenda 2063 est aujourd’hui le fanion de l’Union Africaine. C’est lui qui balise nos chemins vers le futur et jette les bases de notre coopération internationale et nos partenariats stratégiques.

Quoique l’Afrique ait été et demeure le théâtre de très nombreux conflits meurtriers dont les principaux se situent à la Corne de l’Afrique, au Sahel, dans le bassin du lac Tchad et en Afrique centrale, les éléments de sa renaissance sont aujourd’hui tangibles.

Elle regorge de richesses que sont ses mines, ses ressources halieutiques, ses immenses étendues arables et surtout la vitalité de sa population majoritairement jeune. Une bonne gouvernance articulée sur une vision courageuse et déterminée de l’intégration africaine, des incitations commerciales, un effacement des barrières douanières, des initiatives innovantes en agriculture propre et énergies renouvelables, et des technologies et services constitue un levier essentiel de la renaissance recherchée.

Son taux de croissance économique est demeuré soutenable ces dix dernières années. Viendra soutenir notre ambition une lutte sans merci contre l’impunité, la gabegie, la corruption, le gaspillage et le détournement des fonds publics. De ce point de vue, la priorité pour nous porte sur la mise en œuvre des instruments pertinents adoptés par les instances compétentes de notre Union et le respect par les États membres des engagements qui y sont contenus.

La réforme de l’Union africaine décidée par le sommet de janvier 2017 se présente comme une réelle chance de notre renaissance en ce qu’elle commande résolument une prise en charge de l’organisation par nous-mêmes. À ce titre, elle est appelée à soutenir fortement les tendances positives observées.

Notre continent conjugue désormais toutes ses forces pour faire reculer, en vue de les éradiquer, les drames sociaux auxquels elle fait face à travers la sécheresse, la famine, les conflits armés et les violations des droits de l’homme.

Ces crises et conflits placent les questions jumelles de paix et de sécurité en tête de nos priorités. Faire taire les armes à l’horizon 2020 est un objectif que nous poursuivons avec acharnement et détermination.

La lutte contre le terrorisme, le djihadisme et la radicalité est au cœur de notre engagement constant en faveur de la paix, la sécurité et la stabilité auquel nous consacrons des efforts inlassables et vigoureux, tant en prévention qu’en gestion et reconstruction post-conflit.

Nous apprécions hautement l’appui multiforme que nous apporte l’Union européenne dans ce combat à travers, notamment, la Facilité de paix.

Mesdames, Messieurs, toutes les expertises actuelles et prospectives indiquent avec certitude que l’Afrique est la région du monde qui souffre le plus de la dégradation de l’environnement naturel et des changements climatiques. Les effets ravageurs sur la faune et la flore réduisent – parfois annihilent – de manière irréversible la possibilité même de la vie dans de larges espaces du continent. Le paradoxe atrocement déconcertant réside ici dans le fait que l’Afrique, continent le moins pollueur de la planète, est celui qui souffre le plus des changements climatiques.

N’est-il pas, à cet égard, superflu de rappeler que l’Afrique ne bénéficie que de portions congrues des efforts et sacrifices internationaux pour contrecarrer ou, à tout le moins, soulager l’universelle menace que font peser sur l’humanité les changements climatiques? Cette question est l’un des champs de notre partenariat qui devra désormais être mieux appréhendé, mieux traité, mieux priorisé.

À cette exigence est intimement liée l’ouverture de larges couloirs aux secteurs privés africain et international. II faut aussi se féliciter que le commerce européen avec l’Afrique ait augmenté ces dernières années de 50 %, ramenant le volume global de l’investissement privé européen à environ 200 milliards d’euros par an.

L’entreprise est le premier créateur de richesses, d’emploi et de prospérité économique. Son rôle crucial dans notre développement économique et social se taillera désormais une place de choix dans nos politiques et partenariats stratégiques.

Notre profonde conscience des impératifs d’une nouvelle gouvernance économique nous encourage à nous situer dans la perspective d’une zone continentale de libre-échange.

Cette conscience nous rend particulièrement attentifs et sensibles aux idées d’investissement dans le privé et à l’invention hardie d’un plan Marshall pour l’Afrique, concepts défendus opportunément par la présidence allemande du G20. Du haut de cette prestigieuse et honorable tribune, j’exprime notre ferme soutien à ses démarches dans cette direction.

La jeunesse africaine représente plus de 60 % de la population. Les femmes constituent, quant à elles, plus de la moitié du peuplement actuel de l’Afrique. Jeunesse et dimension de genre sont dans notre vision stratégique des préoccupations transversales qui arrosent tous nos programmes conduits seuls ou en partenariat avec d’autres acteurs.

La question de l’émigration de pans entiers de nos jeunes en Europe pose un double défi: à ceux qui se jettent aveuglément sur les chemins du naufrage, comme à ceux qui, sans préparation, se trouvent submergés par ces flots d’êtres humains.

Le défi que nous lancent tous ces phénomènes n’a point de solution, à l’exception d’une seule: développer l’Afrique et réinventer pour notre jeunesse un avenir meilleur sur le continent. Notre partenariat trouve ici un champ, encore inexploité, d’une exceptionnelle communauté d’intérêts et d’avantages mutuels.

La diaspora, considérée dans notre vision comme la sixième région d’Afrique après celles du Nord, du Sud, de l’Est, de l’Ouest et du Centre, occupe dans notre agenda une place importante. Sa contribution multiforme au développement du continent puise dans les ressources intellectuelles et financières qu’elle véhicule.

Mesdames, Messieurs, j’ai insisté dans les passages précédents sur les champs du partenariat qui nous sont à peu près communs. Ils sont l’essentiel du message que vous me faites l’honneur d’écouter.

Je serais cependant incomplet et ma soif ardente de vous parler à cœur ouvert, sans fard, resterait inassouvie si je ne posais pas la question de fond du rapport à établir entre l’universalisme de notre partenariat et son relativisme.

De nombreuses questions attestent, une fois posées, des nuances, voire parfois des divergences entre l’Europe et l’Afrique. II n’est pas de mon tempérament, ni de la philosophie politique sur la base de laquelle les chefs d’État ou de gouvernement de l’Afrique m’ont élu, de prêcher le conflit des civilisations, des cultures, des religions. Mon credo sur ce terrain est le dialogue, la recherche du consensus, la découverte mutuelle, l’entente, la solidarité des civilisations, des cultures et des religions. Je plaide non en faveur de la construction de murs pour se protéger de l’Autre mais pour la construction de ponts pour socialiser et communier avec cet Autre.

(Applaudissements)

En construisant des ponts, nous ne saurions prêcher l’uniformité et la négation des différences. Notre diversité est le moteur de notre mouvement, de notre vie, de notre dynamisme.

N’est-il pas injuste, déshonorant et nuisible d’éluder, par abus diplomatique, cette féconde diversité?

Oui, l’Afrique a des vues qui lui sont propres sur une série de questions: les questions de justice pénale internationale et de la compétence universelle, les rapports entre la justice, la paix et la réconciliation.

À l’évidence, le mot d’ordre, souvent galvaudé, «aux problèmes africains, des solutions africaines» ne saurait servir d’alibi ou de prétexte de légitimation des déviances ou autres égarements politiques. Il n’en garde cependant pas moins une brûlante actualité. Je me réjouis ici de la vigilance remarquable des sociétés civiles africaines et de leur mobilisation sur la quasi-totalité des champs de notre coopération.

Peut-être, honorables Parlementaires, trouverez-vous que j’ai surchargé le train de notre partenariat. J’ose espérer me protéger de ma turpitude par la fameuse formule de Jules Verne: «Rien ne se fait de grand qui ne soit une espérance exagérée».

Mesdames, Messieurs, je vous invite à considérer que vous avez en Afrique un cœur ouvert, un esprit éveillé et des mains fermes, laborieuses mais généreusement tendues.

Je vous remercie de bien vouloir considérer cette invitation et, davantage encore, d’accepter mes vifs remerciements pour votre bienveillante attention.

Je vous remercie.

(L’Assemblée, debout, applaudit l’orateur)

 
  
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  Le Président. – Monsieur le Président, je vous remercie. Comme vous le voyez, nous sommes déjà en train de bâtir les ponts entre l’Union européenne et l’Union africaine. Les députés se sont levés pour vous saluer et pour vous remercier de votre discours. Maintenant, il faut commencer à travailler. Il faut être pragmatique et concret. Je pense qu’avec Mme Mogherini, qui est la Haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, nous pouvons faire du bon travail.

Le Parlement est fortement engagé sur ce sujet. Il faut bâtir des ponts au niveau économique, au niveau politique ainsi qu’au niveau des transports. J’ai toujours été favorable à l’idée de relier les réseaux transeuropéens de transport et les réseaux transafricains de transport que vous êtes en train de bâtir. Il faut beaucoup travailler ensemble. Je suis optimiste, mais il faut aussi être très clair. Nous ne pouvons pas gagner le défi contre le terrorisme et nous ne pouvons pas résoudre le problème de l’immigration si l’Europe et l’Afrique ne travaillent pas ensemble. Voilà pourquoi il faut renforcer ces liens et, je le dis à mes amis européens, il faut toujours regarder l’Afrique non pas avec des lunettes européennes, mais avec des lunettes africaines.

Voilà où en est l’amitié entre l’Union africaine et l’Union européenne. Par conséquent, vous êtes toujours le bienvenu au Parlement européen.

Encore un grand merci.

(Applaudissements)

 
  
  

PRZEWODNICTWO: BOGUSŁAW LIBERADZKI
Wiceprzewodniczący

 
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