Proposition de résolution commune - RC-B7-0362/2013Proposition de résolution commune
RC-B7-0362/2013

PROPOSITION DE RÉSOLUTION COMMUNE sur la crise en Égypte

3.7.2013 - (2013/2697(RSP))

déposée conformément à l'article 110, paragraphes 2 et 4, du règlement
en remplacement des propositions de résolution déposées par les groupes:
PPE (B7‑0362/2013)
S&D (B7‑0364/2013)
ECR (B7‑0365/2013)
Verts/ALE (B7‑0366/2013)
ALDE (B7‑0367/2013)

Cristian Dan Preda, Bernd Posselt, Tokia Saïfi, Roberta Angelilli, Arnaud Danjean, Krzysztof Lisek au nom du groupe PPE
Véronique De Keyser, Libor Rouček, Pino Arlacchi, Emine Bozkurt, Saïd El Khadraoui, Ana Gomes, Richard Howitt, María Muñiz De Urquiza, Raimon Obiols, Pier Antonio Panzeri, Joanna Senyszyn, Boris Zala au nom du groupe S&D
Guy Verhofstadt, Marietje Schaake, Graham Watson, Edward McMillan-Scott, Sarah Ludford, Kristiina Ojuland, Louis Michel, Angelika Werthmann, Izaskun Bilbao Barandica, Alexandra Thein, Hannu Takkula, Robert Rochefort, Ramon Tremosa i Balcells, Marielle de Sarnez au nom du groupe ALDE
Judith Sargentini, Franziska Katharina Brantner, Hélène Flautre, Barbara Lochbihler, Raül Romeva i Rueda, Bart Staes, Tarja Cronberg, Nicole Kiil-Nielsen, Helga Trüpel au nom du groupe Verts/ALE
Charles Tannock, Ryszard Czarnecki, Sajjad Karim, Adam Bielan au nom du groupe ECR


Procédure : 2013/2697(RSP)
Cycle de vie en séance
Cycle relatif au document :  
RC-B7-0362/2013
Textes déposés :
RC-B7-0362/2013
Débats :
Textes adoptés :

Résolution du Parlement européen sur la crise en Égypte

(2013/2697(RSP))

Le Parlement européen,

–   vu ses résolutions antérieures sur l'Égypte, en particulier celle du 14 mars 2013[1],

–   vu les conclusions du Conseil européen du 8 février 2013 sur le printemps arabe,

–   vu les conclusions du Conseil des affaires étrangères des 27 février 2012, 25 juin 2012, 31 janvier 2013 et 8 février 2013 sur l'Égypte et celles du 31 janvier 2013 sur le soutien de l'UE en faveur d'un changement durable dans les sociétés en transition,

–   vu la déclaration de la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union, Catherine Ashton, du 28 juin 2013, sur les manifestations prévues en Égypte,

–   vu les déclarations de la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union, Catherine Ashton, du 3 juillet 2013 sur la situation en Égypte et du 28 juin 2013 sur les manifestations prévues en Égypte à l'occasion du premier anniversaire de l'investiture du président Morsi,

–   vu la déclaration du Président du Parlement européen, Martin Schulz, du 6 juin 2013 sur la condamnation de 43 employés d'ONG en Égypte, la déclaration conjointe de Catherine Ashton, vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union, et de Štefan Füle, membre de la Commission, du 5 juin 2013, sur les décisions de justice prises à l'encontre d'ONG égyptiennes, et la déclaration du porte‑parole de Catherine Ashton, vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union, du 2 juin 2013 sur la nouvelle loi sur les ONG en Égypte,

–   vu l'accord d'association UE-Égypte de 2001 qui est entré en vigueur en 2004 et qui a été renforcé par le plan d'action de 2007, et le rapport de la Commission du 20 mars 2013 sur l'état d'avancement de sa mise en œuvre,

–   vu les réunions du groupe de travail de l'Union des 13 et 14 novembre 2012 et leurs conclusions,

–   vu la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948,

–   vu le pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques, auquel l'Egypte est partie,

–   vu la déclaration du 1er juillet 2013 du général Abdul Fatah Khalil Al-Sisi, président du conseil suprême des formes armées égyptiennes, ainsi que la feuille de route politique présentée par le Mouvement du 6 avril,

–   vu les déclarations de la haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, du 8 mai 2013, et du secrétaire général des Nations unies, du 5 juin 2013, sur les projets de loi relatifs à la société civile en Égypte,

–   vu l'avis provisoire, adopté par la commission pour la démocratie par le droit (commission de Venise) le 15 juin 2013, sur le projet de loi sur les organisations de travail civique d'Égypte,

–   vu la déclaration de 40 organisations de la société civile égyptienne du 30 mai 2013,

–   vu les 8 principales conventions de l'Organisation internationale du travail, que l'Égypte a ratifiées,

–   vu le rapport spécial de la Cour des comptes européenne du 18 juin 2013 sur "la coopération de l'UE avec l'Égypte dans le domaine de la gouvernance",

–   vu l'article 110, paragraphes 2 et 4, de son règlement,

A. considérant que l'Égypte est le plus grand pays du printemps arabe, un pays charnière du sud de la Méditerranée, un important partenaire commercial de l'Union et l'un des principaux bénéficiaires de l'aide octroyée par cette dernière; que l'évolution politique, économique et sociale de l'Egypte a des répercussions importantes sur l'ensemble de la région et au-delà;

B.  considérant que l'Egypte se trouve dans une période critique de transition vers la démocratie; que le pays fait face à des enjeux fondamentaux dans les domaines de l'état de droit, du respect des droits humains et des libertés fondamentales, ainsi que de la justice sociale; que les tensions politiques croissantes accentuent la polarisation interne de la société égyptienne, ce qui conduit à des manifestations et des heurts violents; que les cas de recours excessif des forces de sécurité et de groupes non identifiés à la force et à la violence contre des manifestants pacifiques restent impunis;

C. considérant que le 22 novembre 2012, à savoir huit jours après l'issue de la réunion du groupe de travail UE‑Égypte, le président Morsi a effectué une déclaration constitutionnelle destinée notamment à placer le président au-delà de tout contrôle judiciaire; que, quelques jours plus tard, le président a annulé cette déclaration, mais que, déjà, les manifestations prenaient de plus en plus d'ampleur;

D. considérant que plusieurs millions de personnes ont envahi les rues du Caire et d'autres villes du pays dans le cadre de manifestations pacifiques d'une grandeur sans précédent pour exiger le départ du président Morsi; que les partisans du président Morsi ont organisé des manifestations de soutien au président et aux Frères musulmans; que des douzaines de personnes ont été tuées et de nombreuses autres blessées au cours des manifestations; que plusieurs ministres et fonctionnaires ont démissionné en témoignage de soutien au mouvement massif de protestation populaire; que les forces armées égyptiennes ont, dans une déclaration en date du 1er juillet 2013, accordé 48 heures aux responsables politiques égyptiens pour satisfaire les demandes du peuple, faute de quoi l'armée interviendrait et proposerait une feuille de route politique pour le pays;

E.  considérant que les manifestants protestent depuis des mois contre le président Morsi pour dénoncer la situation générale dans le pays qui, sous le gouvernement des Frères musulmans, ne s'est pas améliorée mais a, au contraire, empiré; que le mouvement rebelle (Tamarod) a annoncé que ses militants avaient recueilli plus de 22 millions de signatures lors de leur campagne de pétition demandant que la confiance soit retirée au président Mohamed Morsi et que des élections présidentielles anticipées soient organisées, et prévenu qu'il lancerait une campagne de désobéissance civile si le président ne répondait pas à cet appel; que l'opposition du Front du salut national (FSN) a, dans sa "déclaration révolutionnaire n° 1", appelé les manifestants de toute l'Égypte à poursuivre les rassemblements pacifiques jusqu'à la chute du régime actuel;

F.  considérant que seul un processus politique ouvert à toutes les parties, fondé sur le consensus et l'appropriation commune ainsi que sur un véritable dialogue national avec la participation significative de toutes les forces politiques démocratiques, permettra de mettre fin aux divisions et tensions politiques et sociales actuelles, afin de créer une démocratie solide et durable en Égypte, permettre la réforme économique indispensable et mettre en place la gouvernance qui s'impose; que l'Égypte ne doit pas revenir sur ses acquis démocratiques en renouant avec une dictature militaire;

G. considérant que les femmes sont dans une situation particulièrement vulnérable en cette période de transition en Égypte; que les femmes qui participent aux manifestations sont souvent exposées à des actes de violence, à des agressions sexuelles, à des tests de virginité ainsi qu'à d'autres formes de traitement dégradant, alors que les personnes militant pour les droits des femmes font régulièrement l'objet de menaces et de harcèlement; que la participation des femmes à la vie politique a largement régressé dans le pays;

H. considérant que l'Egypte est confrontée à des difficultés économiques qui s'aggravent; que la prospérité économique dans le pays passe par la stabilité politique, une approche économique saine, la lutte contre la corruption et l'aide internationale; que la justice sociale et un niveau de vie plus élevé pour les citoyens sont des aspects déterminants de la transition vers une société égyptienne ouverte, stable, démocratique, libre et prospère;

I.   considérant que la société civile a un rôle crucial à jouer dans la transition démocratique du pays et qu'elle doit être autorisée à agir librement; que le droit d'association va de pair avec le droit d'accéder à des financements, et qu'il en dépend; que les ONG internationales et égyptiennes sont confrontées à une pression croissante, à des opérations hostiles, à des actes de harcèlement et à des intimidations dans le pays; que, le 4 juin 2013, un tribunal pénal du Caire a condamné 43 employés d'ONG étrangères et égyptiennes à des peines allant jusqu'à cinq ans de prison pour activités de la société civile, et a ordonné la fermeture et la confiscation des biens des antennes locales de cinq ONG internationales qui œuvraient en Égypte depuis longtemps, à savoir la fondation Konrad Adenauer, les organisations National Democratic Institute, International Republican Institute, Freedom House et International Center for Journalists; que ces décisions de justice s'inscrivent dans le cadre d'une campagne d'intimidation visant les ONG et orchestrée par le gouvernement égyptien;

J.    considérant qu'un nouveau projet de loi sur les associations a été remis par le président Morsi au conseil de la choura le 29 mai 2013; que ce projet de loi a fait l'objet de vives critiques, à la fois dans le pays et à l'étranger, en ce qu'il autorise les autorités de l'État à imposer des restrictions excessives et discrétionnaires sur les activités des organisations de la société civile; que toute nouvelle loi sur les associations doit être conforme aux normes internationales et aux obligations de l'Égypte;

K. considérant que les syndicats indépendants ont un rôle essentiel à jouer dans le domaine des relations du travail en cette période critique de transition politique, économique et sociale en Égypte; qu'il est fait régulièrement mention de restrictions au droit des travailleurs de créer des syndicats indépendants ainsi que de représailles et d'actes d'intimidation contre ceux qui cherchent à s'organiser et à faire la grève; que le refus des employeurs de reconnaître les syndicats indépendants ou de négocier avec eux constitue une source de vives tensions sociales;

L.  considérant que l'inquiétude grandit face aux restrictions imposées à la liberté de conscience, de conviction et de religion dans le pays;

M. considérant que, dans une véritable démocratie, l'indépendance et la liberté de la presse et des médias représentent un des fondements de la société; que les violences physiques et les actes de harcèlement dont sont la cible les journalistes s'intensifient; qu'un certain nombre de procédures judiciaires ont été engagées contre des journalistes et des blogueurs au motif qu'ils insultaient le président; que le nombre d'affaires de blasphème a augmenté depuis l'investiture du président Morsi;

N. considérant que l'article 2 de l'accord d'association UE-Égypte indique en substance que les relations entre les parties se fondent sur le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l'homme et qu'elles débouchent sur une politique du "donner plus pour recevoir plus", pierre angulaire de la politique européenne de voisinage révisée de l'UE;

O.  considérant qu'entre 2007 et 2013, l'Égypte a reçu environ 1 milliard d'euros de l'Union européenne sous forme d'aide et que l'UE s'est engagé à en verser 5 milliards de plus, qui ne seront entièrement mobilisés qu'au moment où les conditions dont l'aide est assortie, liées à celles du FMI, seront remplies;

P.  considérant qu'un rapport spécial élaboré récemment par la Cour des comptes européenne sur "la coopération de l'UE avec l'Égypte dans le domaine de la gouvernance" indique que les interventions de l'Union en matière de soutien de la démocratie et des droits de l'homme n'ont permis d'accomplir que de faibles progrès dans le pays au cours des dernières années;

1.  exprime sa solidarité avec le peuple égyptien lors de cette difficile transition vers la démocratie, présente ses sincères condoléances aux familles des victimes et exige que les responsables soient traduits en justice;

2.  demande au gouvernement égyptien de garantir la sécurité de l'ensemble des citoyens, indépendamment de leur orientation ou de leur appartenance politique et de leur confession, de respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales, de protéger la liberté d'association et d'expression ainsi que de se conformer à ses obligations internationales; demande à l'ensemble des parties de faire preuve de responsabilité, en évitant toutes les actions et provocations violentes qui pourraient saper ou compromettre le droit légitime du peuple à manifester pacifiquement et à exprimer librement sa volonté et son point de vue;

3.  invite instamment les acteurs politiques à ouvrir dans les meilleurs délais, dans une optique de réconciliation, un dialogue national fondé sur la tolérance, l'inclusion et la non-violence, afin de promouvoir la transition démocratique du pays et la mise en place d'institutions démocratiques réelles;

4.  exige qu'il soit immédiatement mis fin à tous les actes de violence, aux agressions sexuelles, aux tests de virginité et aux autres formes de traitements dégradants infligés aux femmes qui prennent part aux manifestations, aux personnes qui militent pour les droits des femmes et à la communauté LGBT, et demande que tous ces actes fassent l'objet d'enquêtes sérieuses et impartiales et que les responsables soient traduits en justice;

5.  dénonce vivement la décision de justice prise le 4 juin 2013 par la cour pénale du Caire, qui a condamné 43 membres d'ONG égyptiennes et étrangères à la détention, de fermer les sections locales des 5 ONG étrangères concernées et de confisquer leurs biens; estime que ce jugement à connotation politique, qui érige en délit le travail légitime d'organisations étrangères en Égypte, constitue une attaque inacceptable contre la liberté d'expression et d'association dans le pays et un coup grave porté contre les efforts de la communauté internationale et de l'Union européenne pour soutenir l'Égypte dans sa transition politique; demande instamment aux autorités égyptiennes de mettre fin sans délai à toutes les formes de harcèlement et d'intimidation que subissent les ONG indépendantes dans le pays et, en particulier, d'abandonner toutes les poursuites pénales à l'encontre de travailleurs de ces ONG;

6.   exprime la profonde préoccupation que lui inspire le nouveau projet de loi sur les ONG et appuie les consultations en cours entre les autorités égyptiennes et la commission de Venise du Conseil de l'Europe, qui ont été lancées par le représentant spécial de l'UE pour les droits de l'homme;

7.  s'inquiète du nombre des dénonciations de violation du droit du travail constaté en Égypte; invite les autorités égyptiennes à permettre aux travailleurs d'exercer leur droit de s'associer et de mener des activités syndicales, et à aligner la législation nationale sur les conventions de l'OIT auxquelles l'Égypte est partie; demande que soit levée la limitation à un seul syndicat par profession, prévue par l'article 53 de la nouvelle constitution;

8.  demande aux autorités égyptiennes de prendre leurs responsabilités et de répondre aux conditions requises pour le versement de l'aide du FMI et de l'Union européenne; rappelle que l'Union européenne est prête à aider l'Égypte afin d'assurer des réformes et une reprise économique rapides et responsables;

9.  invite instamment l'Union et ses États membres à continuer de fournir un appui financier substantiel et une assistance technique aux ONG égyptiennes et à collaborer avec elles afin de renforcer la sensibilisation de la société civile, la culture de l'action civile et les activités de la société civile dans le pays, qui sont des éléments cruciaux d'une démocratie solide et durable;

10. demande à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union de proposer ses bons services pour trouver une issue à la crise;

11. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice‑présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aux gouvernements et aux parlements des États membres, ainsi qu'au gouvernement et au parlement de la République arabe d'Égypte.