Résolution du Parlement européen sur le rapport de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur l'application des directives 90/364/CEE
, 90/365/CEE
et 93/96/CEE
(droit de séjour) et sur la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur les mesures spéciales concernant le déplacement et le séjour des citoyens de l'Union qui sont justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique (COM(1999) 127
, COM(1999) 372
- C5-0177/1999
, C5-0178/1999
- 1999/2157(COS)
)
Le Parlement européen,
- vu le rapport et la communication de la Commission (COM(1999) 127
, COM(1999) 372
- C5-0177/1999
, C5-0178/1999
),
- vu, en particulier, les articles 14, 17, 18 et 39 du traité CE,
- vu le rapport du Groupe de Haut niveau sur la libre circulation des personnes présenté à la Commission le 18 mars 1997,
- vu le deuxième rapport de la Commission sur la citoyenneté de l'Union du 17 juin 1997,
- vu le livre vert sur les retraites complémentaires dans le marché unique (COM(1997) 283
),
- vu le rapport 1997-1998 d'ECAS (European Citizens Action Service),
- vu la communication de la Commisssion : Plan d'action pour la libre circulation des travailleurs (COM(1997) 586
- C4-0650/1997
) et sa résolution du 16 juillet 1998(1)
,
- vu l'article 47, paragraphe 1, de son règlement,
- vu le rapport de la commission des libertés et des droits des citoyens, de la justice et des affaires intérieures et les avis de la commission juridique et du marché intérieur, de la commission de l'emploi et des affaires sociales, de la commission de la culture, de la jeunesse, de l'éducation, des médias et des sports ainsi que de la commission des pétitions (A5-0207/2000
),
A. considérant les articles 14, relatif à la liberté de circulation des personnes, ainsi que 17 et 18 du traité CE concernant la citoyenneté européenne qui comporte le droit de circuler et de séjourner librement sur tout le territoire de l'Union européenne,
B. considérant cependant, au vu du rapport de la Commission, ainsi que de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, que les citoyens européens sont encore aujourd'hui, toutes catégories confondues, confrontés à de nombreux obstacles à l'exercice de leur droit de déplacement et de séjour,
C. regrettant que les citoyens des pays extérieurs à l'Union européenne, qui résident légalement sur le territoire communautaire, soient exclus des droits de libre circulation et d'établissement,
D. considérant l'application encore très insatisfaisante des directives 90/364/CEE
, 90/365/CEE
et 93/96/CEE
sur le droit de séjour des étudiants et des retraités, puisque les intéressés doivent subir les conséquences de la lenteur et des coûts administratifs des procédures d'obtention du titre de séjour et des obligations de renouvellement de titre souvent injustifiées,
E. considérant que l'obtention d'un titre de séjour par les retraités est soumise à la preuve souvent difficile de ressources suffisantes appréciée différemment selon les États membres et sans relation avec leur situation matérielle réelle, d'où la nécessité d'une refonte prochaine des textes actuels,
F. considérant que les travailleurs de certaines catégories, notamment ceux qui occupent des emplois "atypiques”, de très brève durée, à temps partiel, intérimaire, saisonnier, de même que les travailleurs migrants se trouvant sans emploi, se heurtent souvent à de grandes difficultés de séjour dans le pays d'accueil en raison des formalités de renouvellement de leur titre liées à la preuve de ressources suffisantes,
G. considérant qu'il y a lieu, d'une manière générale, de dissocier autant que possible le droit de circulation et de séjour, aspect majeur du droit fondamental à la citoyenneté européenne, laquelle ne peut être réservée aux seuls citoyens des États membres, des considérations économiques qui pèsent aujourd'hui sur son libre exercice;
H. reconnaissant qu'il y a actuellement des millions de ressortissants de pays tiers résidant légalement dans l'UE,
I. considérant aussi que les travailleurs migrants sont pénalisés, dans la mesure où ils subissent les conséquences pécuniaires des lacunes de l'harmonisation des systèmes de retraite,
J. considérant les atteintes inadmissibles au droit de séjour encore trop souvent portées par les États membres qui recourent à une interprétation abusive de l'ordre public au détriment des objectifs énoncés par la directive 64/221/CEE
et de la jurisprudence de la CJCE en ce domaine,
K. considérant que le plein exercice du droit de libre circulation et de séjour, outre qu'il correspond à l'application même du principe de citoyenneté européenne, favorise aussi, en permettant la mobilité des étudiants et des travailleurs, le dynamisme et la compétitivité économique,
L. considérant que cinquante ans après que le traité de Rome ait, pour la première fois, énoncé le principe de libre circulation des personnes, ce droit est encore entravé, voire ignoré, d'où la nécessité de promouvoir une véritable citoyenneté européenne,
M. considérant qu'il appartient dès lors à la Commission et au Conseil de tout mettre en œuvre pour donner un sens effectif à la citoyenneté européenne et à "l'espace européen de liberté”;
1. approuve le rapport mais demande à la Commission d'expliquer le retard apporté à la présentation au Conseil et au Parlement d'un rapport sur l'application de la directive 93/96/CEE
;
2. observe que ce rapport ne traite pas des obstacles auxquels sont confrontés les travailleurs dans l'exercice de leur droit de déplacement et de séjour et ne couvre la situation des ressortissants de pays tiers que dans la mesure où ceux-ci sont des membres de la famille d'un citoyen européen;
3. souligne la nécessité, à partir d'une refonte globale des textes existants, d'une directive-cadre qui organise et garantisse l'exercice sans entraves de la liberté de déplacement et de séjour;
4. demande aux États membres et à la Commission, dans la mise en œuvre de cette directive-cadre, d'adopter les mesures nécessaires pour rendre, selon les différentes catégories de personnes concernées, l'exercice de la citoyenneté européenne beaucoup plus effective en mettant fin aux inégalités de traitement actuelles;
5. considère à cet égard que l'introduction pour tous les demandeurs d'une carte de séjour valable un an constituerait un premier pas dans cette perspective;
6. déplore, dans un "espace européen de liberté”, l'utilisation abusive par les États membres de l'ordre public pour procéder à des expulsions; estime dès lors indispensable que les États membres s'efforcent de parvenir, dans le cadre notamment des accords de Schengen, à une meilleure coordination dans l'appréciation de la notion d'ordre public;
7. invite instamment la Commission à s'assurer que les solutions légales apportées par la directive 64/221/CEE
ne sont pas remises en cause et que toute personne couverte par cette directive n'est pas privée de ses droits de défense et d'assistance ni de représentation ;
8. estime que l'association systématique ou automatique de la condamnation pénale et de la mesure d'éloignement constitue une violation du droit communautaire et du principe de non-discrimination; attire l'attention sur le fait que tout éloignement doit être justifié dans chaque cas en fonction du risque qui continue à peser sur l'ordre public et la sécurité et être examiné précautionneusement à la lumière de la situation personnelle de l'intéressé et de la protection de la vie des membres de sa famille;
9. estime que la citoyenneté de l'Union doit être interprétée dans son sens large; estime dès lors que les ressortissants de pays tiers qui sont nés dans le pays de séjour ou qui y habitent depuis leur enfance, et les personnes établies de longue date qui ont des liens culturels, sociaux et familiaux dans le pays de séjour ou sont mineurs, ne sauraient être expulsés;
10. estime que le Système d'information Schengen doit respecter le droit communautaire, plus particulièrement en ce qui concerne:
-
l'application de la disposition de la directive 64/221/CEE
, qui prévoit expressément que les données personnelles concernant une mesure entrant dans le champ d'application de la directive et qui n'est plus en vigueur ou qui a été abrogée ne peuvent plus être conservées, pas plus qu'elles ne peuvent être inscrites sur les listes communautaires ou transmises automatiquement, et que le refus opposé à des citoyens de l'Union ou à des personnes qui le sont devenues sur la base d'un enregistrement auprès du SIS à leur entrée dans la zone Schengen est contraire au droit communautaire;
-
l'application de la directive 95/46/CE, qui prévoit expressément que les données personnelles collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes ne peuvent être traitées de manière incompatible avec ces finalités;
demande à la Commission européenne d'assumer les responsabilités qui lui incombent en tant que gardienne des traités et de prendre des mesures en vue de faire cesser ces violations du droit communautaire;
11. regrette que le Conseil ignore les communications de la commission des pétitions relatives aux graves violations du droit communautaire commises par les autorités des États membres, ce qui témoigne d'une attitude négative du Conseil à l'égard du droit de pétition des citoyens européens, et l'invite à accorder l'attention nécessaire aux droits des citoyens de l'Union.
concernant le déplacement et le séjour des étudiants
12. demande aux États membres:
-
de veiller, concernant le droit de séjour des étudiants, au strict respect par leurs administrations nationales des dispositions actuelles de la directive 93/96/CEE
(inscription dans un établissement agréé, simple déclaration de ressources suffisantes, affiliation à un régime d'assurance maladie) à l'exclusion de toutes autres conditions;
-
de limiter au maximum les formalités de renouvellement des titres de séjour et d'envisager la gratuité de la délivrance de ces documents;
-
de faire en sorte que tous les étudiants puissent solliciter, dans le pays où ils étudient, un permis de travail pour financer leurs études;
-
de ne pas subordonner l'aide financière aux étudiants à des conditions de nationalité;
13. demande à la Commission d'étudier :
-
l'extension du champ d'application de la directive aux personnes suivant une formation et aux travailleurs volontaires;
-
les problèmes de reconnaissance des diplômes dans certaines professions;
14. prend note de l'intention de la Commission d'élargir le champ d'application de la directive 93/96/CEE
relative au droit de séjour des étudiants à tous les établissements d'enseignement et de rechercher des moyens de préciser la portée du droit de séjour des étudiants; estime qu'à cette fin, il convient d'accorder une attention particulière aux problèmes administratifs que rencontrent les stagiaires et les personnes qui prennent part aux projets de bénévolat et, si possible, de rendre gratuite la délivrance aux étudiants de leur première carte de séjour ainsi que le renouvellement de celle-ci; demande en conséquence à la Commission de soumettre au Parlement européen et au Conseil des propositions de modification de la directive qui aillent dans ce sens;
concernant le déplacement et le séjour des retraités
15. accueille favorablement les propositions de la Commission allant dans le sens de la refonte des directives actuelles en vue :
-
de simplifier et d'assouplir au maximum les modalités de preuve de ressources suffisantes exigées des retraités;
-
de considérer l'incidence des modes de vie alternés, de plus en plus fréquents entre le pays d'accueil et le pays d'origine au cours d'une même année, sur la validité des cartes de séjour;
concernant le déplacement et le séjour des travailleurs migrants
16. demande aux États membres de faciliter au maximum l'octroi et le renouvellement du titre de séjour aux travailleurs migrants, en particulier les travailleurs intérimaires, à temps partiel, saisonniers, en leur accordant une carte de séjour de cinq ans lorsqu'ils ont occupé des emplois pendant plus de douze mois sur une période de résidence dans le pays d'accueil supérieure à dix huit mois;
17. demande également aux États membres d'accueil de permettre aux travailleurs sans emploi d'obtenir :
-
la prorogation de leur droit de séjour pendant la période où ils bénéficient du versement des allocations de chômage acquises dans ce pays
-
le renouvellement automatique de leur titre de séjour pour des périodes d'au moins six mois lorsqu'ils sont à la recherche effective d'un emploi;
18. demande à cet égard au Conseil de reprendre sans plus tarder l'examen des trois propositions en ce sens de la Commission relatives à l'amélioration de la libre circulation des travailleurs et leur famille à l'intérieur de la Communauté (COM(1998) 394
)(2)
;
concernant le statut social des travailleurs migrants
19. demande aux États membres de procéder à l'amélioration et à la modernisation indispensables de la protection sociale dans l'UE pour mettre fin aux pénalisations dont souffrent les travailleurs migrants et les travailleurs détachés du fait :
-
de la non-reconnaissance de certains régimes de retraite entre États membres et des difficultés de transfert des droits acquis
-
du caractère restrictif des conditions imposées pour l'acquisition des droits de retraite complémentaire (longues périodes de carence)
-
des problèmes fiscaux liés à l'acquisition de droits à pension en de nombreux États membres;
-
des difficultés liées au transfert des prestations de préretraite octroyées à partir d'un certain âge à un travailleur en situation de chômage complet;
concernant le statut familial dans le pays d'accueil
20. considère qu'il faut simplifier et faciliter le regroupement familial, facteur indispensable d'intégration dans le pays d'accueil; demande à la Commission et aux États membres, lors de la refonte des textes dans ce domaine, qu'il soit décidé :
-
que le conjoint du résident étudiant ou retraité ou, lorsque la législation de l'État membre concerné assimile la situation des couples non mariés à celle des couples mariés, le partenaire avec lequel le résident souhaitant bénéficier du regroupement familial vit en union libre de façon permanente, dispose effectivement du droit de séjour autonome qui leur est reconnu dans les mêmes conditions, en ce qui concerne les ressources, que le résident étudiant ou retraité sans justification de ressources
-
qu'en cas de divorce ou de décès de celui qui a acquis le titre de séjour, les membres de sa famille aient le droit d'accéder ou de poursuivre l'exercice d'une activité salariée ou indépendante
-
que les dispositions précédentes s'appliquent aussi sous les mêmes conditions aux membres de la famille d'un ressortissant communautaire provenant d'un pays tiers et que, de façon générale, les formalités de visa soient facilitées, voire supprimées;
concernant l'environnement économique, social et culturel du droit de séjour des migrants
21. considère que l'exercice effectif du droit de déplacement et de séjour suppose une profonde amélioration de l'environnement social (égalité de traitement en matière d'avantages sociaux et fiscaux, plus grande transparence du marché de l'emploi, rôle accru du réseau EURES) éducationnel (accès à l'éducation, la formation ) et culturel (apprentissage des langues), des migrants et de leur famille; demande une nouvelle fois la réalisation d'étude d'impact " transfrontières " portant sur les effets de l'introduction de nouvelles réglementations ou de la modification des réglementations existantes en matière de fiscalité et de sécurité sociale sur la situation des travailleurs et de leurs familles travaillant dans un État membre autre que celui dans lequel ils résident;
22. estime que des mesures doivent être prises pour permettre la libre circulation des ressortissants de pays tiers résidant légalement dans l'Union européenne et y ayant vécu pendant une période minimale de 5 ans;
23. observe aussi que les citoyens européens concernés souffrent d'un déficit d'information sur l'étendue de leurs droits et leurs possibilités de recours auquel il convient de remédier, notamment par une meilleure formation des personnels administratifs nationaux concernés et des campagnes d'information; demande expressément que les initiatives des ONG liées au domaine des plaintes concernant la libre circulation des personnes, l'assistance juridique au cours des procédures et l'inventaire des plaintes les plus courantes, continuent à être appuyées et à se voir garantir les moyens financiers nécessaires;
24. invite instamment la Commission à accélérer ces procédures internes de façon à mettre un terme plus rapidement aux infractions à la législation communautaire;
o o o
25. charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et aux gouvernements des États membres