Résolution du Parlement européen du 15 mars 2007 sur le Cambodge
Le Parlement européen,
— vu ses résolutions du 13 janvier 2005(1), du 10 mars 2005(2) et du 19 janvier 2006(3) sur le Cambodge et sa résolution du 1er décembre 2005 sur la situation des droits de l'homme au Cambodge, au Laos et au Vietnam(4),
— vu l'accord de coopération entre la Communauté européenne et le Royaume du Cambodge(5), approuvé le 4 octobre 1999,
— vu la déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l'homme, adoptée le 9 décembre 1998,
— vu les orientations de l'Union européenne concernant les défenseurs des droits de l'homme, adoptées par le Conseil le 14 juin 2004,
— vu le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et le pacte international relatif aux droits civils et politiques, adoptés le 16 décembre 1966, auxquels le Cambodge est partie,
— vu l'accord entre l'Organisation des Nations unies et le gouvernement royal cambodgien, du 6 juin 2003, concernant la poursuite, conformément au droit cambodgien, des auteurs des crimes commis pendant la période du Kampuchea démocratique,
— vu l'article 115, paragraphe 5, de son règlement,
A. considérant que, le 24 février 2007, M. Hy Vuthy, président du syndicat libre des travailleurs du Royaume du Cambodge (FTUWKC) de l'usine textile Suntex, a été abattu après y avoir terminé son service de nuit, dans le quartier de Dangkao à Phnom Penh,
B. considérant que M. Chea Vichea, président du FTUWKC, avait été abattu le 22 janvier 2004 et que M. Ros Sovannarith, président du FTUWKC de l'usine Trinunggal Komara, avait été assassiné le 7 mai 2004, tandis que d'autres syndicalistes ont été victimes, au Cambodge, d'actes graves de harcèlement et d'intimidation ainsi que d'agressions physiques au cours de l'année dernière,
C. considérant que l'affaire du meurtre de M. Chea Vichea n'a toujours pas été résolue; considérant que, le 28 janvier 2004, M. Born Sammang et M. Sok Sam Oeun ont été arrêtés pour avoir prétendument tué M. Chea Vichea et qu'ils ont ensuite été jugés coupables et condamnés à une peine de 20 ans d'emprisonnement malgré l'absence de preuve crédible de leur culpabilité,
D. considérant que le Cambodge est partie au pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et au pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui garantissent à toute personne le droit de constituer des syndicats et d'adhérer au syndicat de son choix, et aux syndicats le droit d'exercer librement leurs activités,
E. considérant que la déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l'homme garantit aussi le "droit, individuellement ou en association avec d'autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l'homme (article 1er)",
F. sérieusement préoccupé par le fait que, comme les affaires précitées le démontrent, l'indépendance et l'impartialité du pouvoir judiciaire ne sont toujours pas garanties, de même que sa capacité à juger, indépendamment de toute ingérence politique, les dirigeants khmers rouges devant le tribunal spécialement créé à cet effet,
G. considérant que les procédures devant les chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens n'ont toujours pas commencé en raison de plusieurs désaccords entre les officiers ministériels cambodgiens et internationaux concernant le projet de règlement intérieur de ces chambres,
H. profondément inquiet de l'incertitude qui pèse sur le statut juridique des Montagnards vietnamiens réfugiés au Cambodge,
1. condamne le meurtre de M. Hy Vuthy et tous les autres actes de violence commis à l'encontre de syndicalistes; demande instamment aux autorités cambodgiennes de lancer une enquête urgente, impartiale et efficace concernant les meurtres de M. Hy Vuthy, M. Chea Vichea, M. Ros Sovannarith et M. Yim Ry, d'en publier les conclusions et de traduire les coupables en justice; demande aux autorités de rejuger M. Born Sammang et M. Sok Sam Oeum dans le cadre d'un procès rapide conforme aux normes internationales;
2. insiste pour que le gouvernement cambodgien mette un terme au climat actuel d'impunité et pour qu'il sanctionne efficacement les personnes coupables de violation des droits de l'homme et des libertés civiles;
3. rappelle au gouvernement cambodgien qu'il est tenu de remplir ses obligations et de tenir ses engagements au regard des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l'homme, qui constituent un élément essentiel de l'accord de coopération conclu avec la Communauté européenne, ainsi que le prévoit l'article 1er de cet accord;
4. demande aux autorités cambodgiennes d'engager des réformes politiques et institutionnelles en vue de construire un État démocratique soumis à l'état de droit et fondé sur le respect des libertés fondamentales, ainsi que de garantir en toutes circonstances le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, conformément aux normes internationales en matière des droits de l'homme et aux conventions internationales que le Cambodge a ratifiées;
5. prie instamment le gouvernement cambodgien de permettre au tribunal relatif aux khmers rouges de débuter ses travaux sans plus attendre, conformément aux normes internationales en matière d'indépendance du pouvoir judiciaire, de procès équitable et de procédure judiciaire régulière, comme convenu avec les Nations unies en juin 2003;
6. soutient les efforts fournis par la commission d'examen chargée du règlement intérieur des chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens pour rapprocher les points de vue sur un certain nombre de questions afin de faire avancer les poursuites et le déroulement des procès;
7. demande au Conseil et à la Commission d'aborder les problèmes relatifs aux droits de l'homme et à l'état de droit au Cambodge dans le cadre de leurs relations avec le gouvernement cambodgien;
8. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission, ainsi qu'au gouvernement et à l'Assemblée nationale du Royaume du Cambodge, au secrétaire général des Nations unies, au haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, au représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour les droits de l'homme au Cambodge et aux gouvernements des États membres de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est.