Résolution du Parlement européen du 26 avril 2007 sur les finances publiques dans l'UEM 2006 (2007/2004(INI))
Le Parlement européen,
— vu la communication de la Commission intitulée "Finances publiques dans l'UEM en 2006 - premier anniversaire du pacte de stabilité et de croissance révisé" (COM(2006)0304),
— vu les conclusions de la présidence du Conseil européen de Stockholm des 23 et 24 mars 2001 demandant que le point soit fait périodiquement quant à la viabilité à long terme des finances publiques, y compris des difficultés auxquelles il faut s'attendre en raison de l'évolution démographique,
— vu la communication de la Commission sur la viabilité à long terme des finances publiques dans l'UE (COM(2006)0574),
— vu le règlement (CE) n° 1056/2005 du Conseil du 27 juin 2005 modifiant le règlement (CE) n° 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en œuvre de la procédure concernant les déficits excessifs(1),
— vu le rapport de la Commission de décembre 2006 sur l'état de la convergence (COM(2006)0762),
— vu les recommandations de la Commission sur les programmes de stabilité et de convergence des États membres pour 2006-2007,
— vu les conclusions de la Présidence du Conseil européen de Bruxelles des 22 et 23 mars 2005 sur la réforme du pacte de stabilité et de croissance,
— vu les communications de la Commission concernant le deuxième rapport sur les préparatifs pratiques en vue du futur élargissement de la zone euro (COM(2005)0545) et la déclaration annuelle de 2006 sur la zone euro (COM(2006)0392),
— vu ses résolutions du 1er juin 2006 sur l'élargissement de la zone euro(2) et du 14 novembre 2006 sur le rapport annuel 2006 sur la zone euro(3),
— vu l'article 45 de son règlement,
— vu le rapport de la commission des affaires économiques et monétaires (A6-0076/2007),
A. considérant que le déficit budgétaire des États membres doit être inférieur à 3 % du produit intérieur brut (PIB) conformément aux dispositions régissant la monnaie unique et considérant que cette règle a été régulièrement enfreinte; considérant que, lorsque le déficit budgétaire est supérieur à 3 %, cette infraction peut être jugée plus favorablement si le déficit s'accompagne d'une forte croissance et d'une baisse du taux d'endettement (hors recettes des privatisations), faisant passer le déficit annuel au-dessous de la barre des 3 % à moyen terme;
B. considérant les avertissements en matière de déficit récemment lancés aux États membres par l'OCDE afin que ces derniers accordent toute leur attention à des réformes en vue de consolider leurs progrès économiques en utilisant le rétablissement de la situation économique pour réduire leurs déficits budgétaires et en rendant leurs marchés du travail plus compétitifs,
C. considérant que le taux moyen d'endettement pour la zone euro était de 70,6 % en 2005 et de 69,4 % environ en 2006, et qu'il devrait tomber à 68 % en 2007; considérant que la différence entre les taux d'endettement le plus bas et le plus élevé dépassait 100 points de pourcentage du PIB, tant en 2005 qu'en 2006, et que la même différence devrait se maintenir en 2007; considérant que ces chiffres restent largement supérieurs à la valeur de référence de 60 % pour le ratio endettement-PIB, l'un des deux piliers du pacte de stabilité et de croissance (PSC),
D. considérant que le déficit moyen dans la zone euro était de - 2,6 % du PIB en 2005 et de - 2 % environ en 2006, et qu'il devrait tomber à - 1,5 % en 2007; considérant que la différence de taux de déficit approchait les 9 points de pourcentage en 2005 et 2006 et qu'elle devrait tomber à environ 7 points de pourcentage en 2007,
E. considérant que le taux de croissance moyen du PIB pour la zone euro était de 1,4 % en 2005 et de 2,6 % environ en 2006, et qu'il devrait s'élever à 2,1 % en 2007; considérant que la différence de taux de croissance en 2005 et en 2006 était de 5 points de pourcentage environ et devrait rester à 5 points de pourcentage environ en 2007; considérant que ces taux de croissance sont nettement inférieurs à ceux affichés par d'autres régions du monde,
F. considérant que le taux de chômage dans la zone euro était de 8,6 % (12 600 000) en 2005 et qu'il est descendu à 8,1 % (11 900 000) en 2006; considérant que le taux de chômage devrait tomber à 7,7 % (11 500 000) en 2007 et que la diminution prévue montre qu'une réduction du déficit accroît l'activité économique et réduit le chômage,
G. considérant que les dépenses prévues liées au vieillissement de la population devraient augmenter de 4 % du PIB d'ici à 2050; considérant que, dans un certain nombre d'États membres, les dépenses publiques liées au vieillissement augmenteront par conséquent de 5 à 13 % du PIB, ce qui placera une très forte pression sur la viabilité de leurs finances publiques, alors que la croissance devrait tomber de 2,4 % au cours de la période 2004 à 2010 à 1,9 % au cours de la période 2011 à 2030, pour passer ensuite à seulement 1,2 % au cours de la période 2031 à 2050; considérant qu'une croissance en baisse et un accroissement des dépenses liées au vieillissement de la population peuvent menacer le bien-être économique et social des citoyens européens ainsi que la cohésion sociale de nos sociétés et pousser à la désintégration des institutions européennes et des politiques communes,
H. considérant que, tous les deux ans, la Commission et la BCE évaluent le respect des critères de Maastricht en vue de l'adoption de l'euro par tous les États membres faisant l'objet d'une dérogation,
L'application du PSC révisé
1. rappelle que le principal objectif du PSC est, à moyen terme, d'assurer des positions budgétaires proches de l'équilibre ou excédentaires ainsi que la viabilité et la stabilité des finances publiques, ce qui est essentiel en vue des défis démocratiques futurs;
2. se félicite du fait que bon nombre d'États membres ont fait des efforts considérables pour tenter de respecter leurs obligations à l'égard du PSC; souligne toutefois qu'il est encore trop tôt pour évaluer les résultats obtenus suite à l'entrée en vigueur du PSC révisé;
3. partage les préoccupations de la Commission en ce qui concerne l'application du volet préventif du PSC, spécialement en ce qui concerne les États membres qui ne sont pas encore parvenus à équilibrer leurs finances publiques;
4. craint que le PSC révisé, en particulier son volet correcteur, s'il est appliqué de manière indulgente, ne présente le risque d'une dette publique forte et persistante, ce qui pourrait sérieusement menacer l'équilibre des finances publiques et les possibilités d'emploi;
5. souligne que l'attitude des États membres face au PSC révisé sera en fin de compte déterminante pour le succès ou l'échec du PSC; avertit que toute révision ultérieure, laquelle ne serait probablement pas acceptée par le public ou par les acteurs économiques;
6. est préoccupé par la possibilité que s'élargissent les différents écarts entre les États membres en matière de déficit, de dette et de croissance, ce qui pourrait avoir pour effet de miner la monnaie unique, d'étouffer la croissance économique et de réduire les perspectives d'emplois; encourage les États membres à appliquer des politiques économiques coordonnées qui réduisent les écarts constatés et qui vont dans le sens d'une plus grande convergence vers des niveaux de déficit et d'endettement plus bas et des taux de croissance plus élevés;
7. est préoccupé par la lenteur de la diminution de la dette publique dans certains États membres; rejette les procédures interminables et stériles en matière de déficit et demande par conséquent instamment au Conseil et à la Commission de prendre rapidement des mesures décisives; propose de préserver la crédibilité de la procédure concernant les déficits excessifs et que les États membres continuent à faire l'objet d'un jugement selon la même norme commune;
8. se demande dans quelle mesure la croissance européenne peut revêtir un caractère cyclique et met en exergue la nécessité d'augmenter le potentiel de croissance de l'Union européenne afin de permettre la création d'emplois; rappelle aux États membres qu'une croissance accrue et une meilleure situation de l'emploi devraient conduire à un accroissement important des rentrées fiscales, ce qui réduirait le risque de déficit excessif tout en permettant une diminution importante de la dette publique;
9. souligne que les violations du PSC pourraient en fin de compte miner la politique monétaire commune et accroître la pression en vue d'augmenter les taux d'intérêts; souligne qu'une Banque centrale européenne indépendante est essentielle pour maintenir la stabilité des prix, créant ainsi des conditions pour les politiques économiques qui contribueraient à de hauts niveaux de croissance et d'emploi;
10. considère par conséquent qu'il est nécessaire que les États membres adaptent d'urgence leurs politiques fiscales aux exigences de la politique économique et monétaire commune afin d'améliorer davantage encore le bien-être des citoyens européens, et qu'un calendrier et un cadre budgétaires communs devraient s'appliquer à tous les États membres;
11. se félicite du fait que le PSC révisé permet de développer des programmes de réforme avec des délais réalistes et des objectifs budgétaires à moyen terme;
12. convient que des programmes de réforme taillés sur mesure en fonction des besoins des États membres devraient permettre une meilleure application du volet préventif du PSC;
13. regrette que les États membres n'exploitent pas suffisamment leur situation économique positive pour mettre en œuvre de profondes réformes structurelles qui renforceraient l'efficience des marchés des biens, des services, du travail et des capitaux et qui assureraient à long terme l'assainissement des finances publiques, la croissance économique et un niveau plus élevé d'emplois;
Les défis du futur
14. rappelle que le PSC est l'instrument principal et le plus performant en matière de coordination des politiques économiques dans l'Union européenne; souligne que, tant que le PSC sera appliqué d'une manière cohérente et rigoureuse, les politiques économiques continueront de mener à une plus forte croissance et à un plus grand nombre d'emplois;
15. se déclare inquiet devant les projections de la Commission faisant apparaître un très fort accroissement des dépenses liées au vieillissement de la population alors que les projections à long terme en matière de croissance font apparaître une future diminution, ce qui, conjointement, engendrera inévitablement une pression énorme sur la viabilité des finances publiques des États membres;
16. est préoccupé par le fait que six États membres sont considérés comme étant exposés à un risque élevé en ce qui concerne la viabilité à long terme de leurs finances publiques en raison de l'impact budgétaire d'une population vieillissante, alors que dix autres États membres sont considérés comme confrontés à un risque moyen et neuf États membres seulement à un risque faible;
17. demande instamment une réponse à ce formidable défi budgétaire pour l'Union; rappelle que la réduction de la dette publique devrait être accélérée pendant les périodes de croissance économique tout en évitant des mesures pro-cycliques et en mettant en œuvre des réformes structurelles et fiscales afin d'améliorer les performances économiques des États membres; encourage les États membres à tirer parti de la reprise économique actuelle pour mener les réformes nécessaires sur le marché du travail et dans le secteur des services et réduire les charges administratives qui pèsent sur les entreprises; estime qu'il subsiste des possibilités et un besoin d'accélération des investissements et demande par conséquent des réformes structurelles et des mesures complémentaires propres à améliorer de manière permanente le climat des investissements et à stimuler l'investissement;
18. demande un recentrage des dépenses publiques sur l'accumulation de capital physique et humain et l'instauration de partenariats public-privé opérant dans des domaines tels que l'innovation, les énergies renouvelables, l'éducation et la formation, la recherche, les technologies de l'information, les télécommunications et les réseaux de transports;
19. se félicite du fait que les projections faites par les États membres pour 2007 et 2008 ont incorporé la diminution du déficit de 0,5 % du PIB prévue par le PSC révisé; partage les préoccupations de la Commission quant au fait que l'ajustement structurel annuel moyen pour 2006 n'atteint pas cet objectif; est convaincu que, en raison des perspectives économiques favorables, il est possible que l'ajustement structurel aille largement au-delà des 0,5 % recommandés dans la plus grande partie des États membres;
20. demande instamment aux États membres d'éviter des projections budgétaires non étayées par des éléments pertinents et d'éviter des mesures exceptionnelles et temporaires et la comptabilité créative; demande au Conseil de veiller à ce que les États membres dont la dette publique est d'un poids insupportable rendent tout nouveau déficit public, soit inconstitutionnel, soit illégal, d'ici à 2015, en utilisant ainsi les meilleures pratiques de certains États membres et régions de l'Union européenne; recommande que la Commission élabore une étude sur les meilleures pratiques concernant la gouvernance statistique en matière de notification des données budgétaires et de comptabilisation des actifs et des engagements publics dans les États membres;
21. se félicite des récents accords de l'Eurogroupe qui prévoient l'examen en commun des projections budgétaires en vue de déterminer à l'avance la stratégie budgétaire appropriée pour l'année suivante, et est convaincu qu'un débat public sur ces projections devrait avoir lieu au Parlement européen avec des représentants des parlements nationaux;
22. recommande d'explorer la possibilité d'établir un calendrier uniforme pour les procédures budgétaires dans l'ensemble de l'Union européenne, tout en étendant la programmation budgétaire au-delà de la période actuelle d'un an; estime que la programmation budgétaire des États membres doit reposer sur des hypothèses uniformes concernant les principaux paramètres économiques à évaluer et à définir de manière uniforme à l'échelle de l'Union;
23. demande aux États membres de présenter des statistiques de haute qualité à la Commission afin d'assurer que le déficit et la dette publics puissent être comparés; encourage la Commission à vérifier rigoureusement la qualité des statistiques présentées par les États membres; demande instamment à la Commission de prendre toutes mesures nécessaires, y compris des sanctions, afin que les États membres présentent des statistiques de haute qualité, fiables, uniformes et comparables, qui reprennent tous les éléments de passif présents et futurs (comme les pensions et les dépenses de santé); invite la Commission à achever rapidement son travail;
24. convient avec la Commission que des institutions indépendantes et des règles spécifiques en ce qui concerne l'équilibre budgétaire ont une influence très positive sur les objectifs à moyen terme des États membres et sur la stabilité à long terme de finances publiques équilibrées;
25. relève que, dans son dernier rapport de convergence de décembre 2006, la Commission estime que la plupart des États membres évalués ont marqué des progrès, mais que, à l'heure actuelle, aucun ne réunit toutes les conditions nécessaires pour adopter l'euro;
26. rappelle que les critères de Maastricht sur la base desquels la Commission procède à son évaluation doivent être appliqués de manière uniforme, c'est-à-dire sans rendre, dans des circonstances particulières, l'adhésion à la zone euro plus difficile pour des États membres ou interpréter les critères avec indulgence;
27. encourage la Commission à étudier les avantages de la mise en place d'organes nationaux indépendants chargés de déterminer le niveau de déficit annuel de manière compatible avec la poursuite de l'objectif à moyen terme d'un budget équilibré;
28. salue les efforts consentis par le Conseil et la Commission en vue d'améliorer la gouvernance statistique en matière de notification des données budgétaires par la recommandation faite aux États membres concernant des normes à l'échelle de l'Union sur les instituts de statistique, y compris les principes d'indépendance professionnelle, la confidentialité, la fiabilité et l'obtention des données en temps voulu, ainsi que l'adéquation des ressources des instituts de statistique et des droits de suivi accrus pour la Commission;
29. estime qu'il est possible d'améliorer la comptabilité des engagements implicites et des actifs publics afin d'accroître la transparence et la comparabilité et de fournir une base plus saine pour la prise de décisions; estime que la Commission devrait lancer une initiative dans ce domaine;
30. déplore le manque de coordination politique au sein de la zone euro, attire l'attention sur la divergence des politiques budgétaires des États membres à l'intérieur de la zone euro et se dit inquiet quant aux effets contraires possibles d'un tel manque de coordination; encourage à étudier de manière plus approfondie les différents types de réformes structurelle et macroéconomique et les différentes mesures liées à celles-ci ainsi que leur interaction et leur impact réciproque aux différentes phases du cycle économique afin d'identifier le meilleur moyen de renforcer les finances publiques tout en réalisant simultanément la stratégie de Lisbonne;
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31. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission et aux gouvernements et parlements des États membres.