Résolution du Parlement européen du 4 septembre 2008 sur l'évaluation des sanctions communautaires prévues dans le cadre des actions et politiques de l'UE dans le domaine des droits de l'homme (2008/2031(INI))
Le Parlement européen,
— vu la Déclaration universelle des droits de l'homme,
— vu l'ensemble des conventions des Nations unies sur les droits de l'homme et leurs protocoles facultatifs,
— vu le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et ses deux protocoles facultatifs,
— vu la charte des Nations unies, en particulier les articles 1er et 25 et, au chapitre VII, les articles 39 et 41,
— vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (la Convention européenne des droits de l'homme) et ses protocoles,
— vu la Charte de Paris pour une nouvelle Europe (la Charte de Paris),
— vu l'Acte final de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe de 1975 (l'Acte final d'Helsinki),
— vu les articles 3, 6, 11, 13, 19, 21, 29 et 39 du traité sur l'Union européenne (traité UE) et les articles 60, 133, 296, 297, 301 et 308 du traité instituant la Communauté européenne (traité CE),
— vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,
— vu ses résolutions précédentes sur la situation des droits de l'homme dans le monde,
— vu ses débats antérieurs et les résolutions qu'il a adoptées précédemment dans le cadre de la procédure d'urgence sur des cas de violation des droits de l'homme, de la démocratie et de l'État de droit,
— vu sa résolution du 20 septembre 1996 relative à la communication de la Commission sur la prise en compte du respect des principes démocratiques et des droits de l'homme dans les accords entre la Communauté et les pays tiers(1),
— vu les obligations internationales de la Communauté européenne et de ses États membres, notamment celles contenues dans les accords de l'OMC,
— vu l'accord de partenariat entre les membres du groupe des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d'une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d'autre part, signé à Cotonou le 23 juin 2000 (l'accord de Cotonou)(2), en particulier ses articles 8, 9, 33, 96 et 98, et la révision de cet accord(3),
— vu le document du Conseil intitulé "Création d'une formation "Sanctions" du Groupe des conseillers pour les relations extérieures (RELEX/Sanctions)", du 22 janvier 2004 (5603/2004),
— vu le document du Conseil intitulé "Principes de base concernant le recours aux mesures restrictives", du 7 juin 2004 (10198/1/2004),
— vu le document du Conseil intitulé "Lignes directrices concernant la mise en œuvre et l'évaluation de mesures restrictives (sanctions) dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune de l'UE", mises à jour en dernier lieu le 2 décembre 2005 (15114/2005),
— vu le document du Conseil intitulé "Meilleures pratiques de l'UE en ce qui concerne la mise en œuvre effective de mesures restrictives", du 9 juillet 2007 (11679/2007),
— vu la position commune 96/697/PESC sur Cuba(4), adoptée par le Conseil le 2 décembre 1996,
— vu les positions communes du Conseil 2001/930/PESC, relative à la lutte contre le terrorisme(5), et 2001/931/PESC, relative à l'application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme(6), datées toutes deux du 27 décembre 2001, ainsi que le règlement (CE) du Conseil n° 2580/2001 du 27 décembre 2001 concernant l'adoption de mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme(7),
— vu la position commune du Conseil 2002/402/PESC concernant des mesures restrictives à l'encontre d'Oussama ben Laden, des membres de l'organisation Al-Qaida ainsi que des Taliban et autres personnes, groupes, entreprises et entités associés(8), ainsi que le règlement (CE) du Conseil n° 881/2002 instituant certaines mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités liées à Oussama ben Laden, au réseau Al-Qaïda et aux Taliban(9), toutes deux datées du 27 mai 2002,
— vu la liste commune des équipements militaires de l'Union européenne(10),
— vu sa résolution du 25 avril 2002 sur la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen, intitulée "Le rôle de l'Union européenne dans la promotion des droits de l'homme et de la démocratisation dans les pays tiers"(11),
— vu sa résolution du 14 février 2006 sur la clause relative aux droits de l'homme et à la démocratie dans les accords de l'Union européenne(12),
— vu l'ensemble des accords conclus entre l'Union européenne et les pays tiers et les clauses relatives aux droits de l'homme qui y figurent,
— vu sa résolution du 11 octobre 1982 sur la signification et les effets des sanctions économiques, notamment de l'embargo commercial et du boycottage, sur les relations extérieures de la Communauté économique européenne(13),
— vu la résolution sur l'impact des sanctions et, notamment, des embargos sur la population des pays auxquels ces mesures sont imposées(14), adoptée par l'Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE le 1er novembre 2001 à Bruxelles (Belgique),
— vu sa résolution du 6 septembre 2007 sur le fonctionnement des dialogues et des consultations sur les Droits de l'homme avec les pays tiers(15),
— vu la résolution 1597 (2008) et la recommandation 1824 (2008) sur les listes noires du Conseil de sécurité des Nations unies et de l'Union européenne, adoptées par l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe le 23 janvier 2008,
— vu le traité de Lisbonne modifiant le traité sur l'Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, signé à Lisbonne le 13 décembre 2007 et qui devrait entrer en vigueur le 1er janvier 2009,
— vu l'article 45 de son règlement,
— vu le rapport de la commission des affaires étrangères et les avis de la commission du développement et de la commission du commerce international (A6-0309/2008),
A. considérant que l'article 11, paragraphe 1, du traité UE reconnaît le respect des droits de l'homme comme un des objectifs de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et considérant que le nouvel article 21 du traité UE, tel qu'introduit par l'article 1er, point 24, du traité de Lisbonne, reconnaît que "l'action de l'Union sur la scène internationale repose sur les principes qui ont présidé à sa création, à son développement et à son élargissement et qu'elle vise à promouvoir dans le reste du monde: la démocratie, l'État de droit, l'universalité et l'indivisibilité des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le respect de la dignité humaine, les principes d'égalité et de solidarité et le respect des principes de la Charte des Nations unies et du droit international",
B. considérant que les sanctions sont mises en œuvre en application des objectifs spécifiques de la PESC énoncés à l'article 11 du traité UE qui incluent, de manière non exhaustive, la promotion du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la démocratie, de l'État de droit et de la bonne gouvernance,
C. considérant que les Principes de base précités de 2004 concernant le recours aux mesures restrictives constituent le premier document pragmatique définissant le cadre dans lequel l'Union impose des sanctions, alors que sa pratique en la matière existait depuis le début des années 1980, et notamment après l'entrée en vigueur du traité UE en 1993; considérant que ce document établit formellement les sanctions comme un instrument de la PESC et, en conséquence, constitue le point de départ d'une politique de sanctions de l'Union européenne,
D. considérant que cette politique de sanctions se base principalement sur les cinq objectifs suivants définis dans le cadre de la PESC: la sauvegarde des valeurs communes, des intérêts fondamentaux, de l'indépendance et de l'intégrité de l'Union, conformément aux principes de la Charte des Nations unies, le renforcement de la sécurité de l'Union sous toutes ses formes, le maintien de la paix et le renforcement de la sécurité internationale, conformément aux principes de la charte des Nations unies, ainsi qu'aux principes de l'acte final d'Helsinki et aux objectifs de la charte de Paris, y compris ceux relatifs aux frontières extérieures, la promotion de la coopération internationale, et le développement et le renforcement de la démocratie et de l'État de droit, ainsi que le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
E. considérant qu'existe un consensus international de plus en plus large sur le fait que toute atteinte grave et volontaire à l'environnement porte préjudice à la paix et à la sécurité internationale et constitue une violation des droits de l'homme,
F. considérant que l'Union s'est engagée à mettre systématiquement en œuvre les sanctions décidées par le Conseil de sécurité des Nations unies au titre du chapitre VII de la charte des Nations unies et, en même temps, qu'elle impose des sanctions en toute autonomie à défaut d'un mandat du Conseil de sécurité des Nations unies, dans les cas où celui-ci n'est pas habilité à agir ou est empêché de le faire faute d'accord entre ses membres; soulignant à cet égard l'obligation, tant pour les Nations unies que pour l'Union, de prendre des sanctions en conformité avec le droit international,
G. considérant que la politique de sanctions de l'Union intègre par conséquent celle du Conseil de sécurité des Nations unies, mais que la portée et les objectifs de la politique de sanctions du Conseil de sécurité sont plus larges (la paix et la sécurité internationales),
H. considérant que les sanctions ne sont qu'un instrument parmi d'autres que l'Union peut utiliser pour mettre en œuvre sa politique en matière de droits de l'homme; rappelant que le recours aux sanctions doit être cohérent avec la stratégie générale de l'Union dans la région concernée et doit être, par ordre de priorité, la dernière tentative pour atteindre les objectifs spécifiques de la PESC; considérant que l'efficacité des sanctions dépend de leur application simultanée par tous les États membres,
I. considérant que ni le droit international, ni le droit communautaire ne s'accordent sur la définition officielle de la notion de sanction; considérant toutefois, que, dans le cadre de la PESC, les sanctions ou les mesures restrictives sont considérées comme des mesures visant à interrompre ou à réduire, totalement ou partiellement, les relations diplomatiques ou économiques avec un ou plusieurs pays tiers afin d'y modifier certaines activités ou pratiques, comme les violations du droit international ou des droits de l'homme, ou des politiques de non-respect de l'État de droit ou des principes démocratiques par des gouvernements, par des entités non étatiques ou par des personnes physiques et morales,
J. considérant que les mesures restrictives englobent tout un éventail d'actions, comme des embargos sur les armes, des sanctions commerciales, financières ou économiques, le gel d'avoirs, des interdictions de vol, des restrictions d'accès, des sanctions diplomatiques, le boycottage de manifestations sportives et culturelles et la suspension de la coopération avec le pays tiers concerné,
K. considérant qu'en accord avec la pratique générale de l'Union, la présente résolution utilise de manière indifférenciée les termes "sanctions" et "mesures restrictives"; considérant que la présente résolution fait sienne la définition des mesures appropriées figurant à l'article 96 de l'accord de Cotonou(16),
L. considérant que les sanctions de l'Union reposent elles-mêmes sur des bases juridiques diverses, en fonction de la nature exacte des mesures restrictives et de la nature juridique des relations avec le pays tiers concerné ainsi que des secteurs et des objectifs concernés; considérant que ces éléments déterminent à la fois la procédure d'adoption des sanctions – qui, souvent, mais pas toujours, nécessitent une position commune PESC et, partant, l'unanimité au sein du Conseil – et la procédure législative à suivre pour rendre les sanctions légalement contraignantes et applicables, la procédure habituelle étant exposée à l'article 301 du traité CE,
M. considérant que les interdictions de visas et les embargos sur les armes sont devenues les sanctions les plus fréquemment imposées au titre de la PESC et figurent parmi les premières mesures dans l'échelle des sanctions de l'Union; considérant que ces deux types de mesures sont les seules à être mises en œuvre directement par les États membres, puisqu'elles ne nécessitent pas de législation spécifique en matière de sanctions au titre du traité CE; considérant par ailleurs que les sanctions financières (gel des avoirs) et commerciales requièrent l'adoption d'une législation spécifique,
N. considérant que, selon les Principes de base précités concernant le recours aux mesures restrictives, et les lignes directrices en la matière, des sanctions ciblées peuvent être plus efficaces que des sanctions plus générales et sont donc préférables, en premier lieu, parce qu'elles évitent les effets négatifs sur une partie plus large de la population et, en second lieu, parce qu'elles touchent directement les personnes responsables et qu'elles sont donc plus à même de provoquer des changements dans les politiques que ces personnes mettent en œuvre,
O. reconnaissant l'existence de mesures qui, bien qu'adoptées par le Conseil dans les conclusions de la Présidence, ne sont pas qualifiées de "sanctions", tout en étant différentes des autres mesures restrictives figurant parmi les outils de la PESC,
P. considérant que les relations économiques entre l'Union et les pays tiers sont souvent régies par des accords sectoriels bilatéraux ou multilatéraux que l'Union est tenue de respecter lorsqu'elle applique des sanctions; considérant que, si nécessaire, l'Union devrait donc suspendre ou dénoncer les accords concernés avant de prendre des sanctions économiques qui ne sont pas compatibles avec les droits qu'un accord existant octroie au pays tiers concerné,
Q. considérant que les relations entre l'Union et les pays tiers sont souvent régies par des accords bilatéraux ou multilatéraux qui permettent à une des parties de prendre des mesures appropriées en cas de violation par l'autre partie d'un élément essentiel de ces accords, à savoir le respect des droits de l'homme, du droit international, des principes démocratiques et de l'État de droit (clause sur les droits de l'homme), l'accord de Cotonou en étant un exemple notable,
R. considérant que l'introduction et la mise en œuvre de mesures restrictives doivent respecter les droits de l'homme et le droit humanitaire international, y compris le droit à une procédure équitable et à un recours effectif, ainsi que la proportionnalité, et qu'il y a lieu de prévoir des exemptions appropriées pour tenir compte des besoins fondamentaux des personnes visées, tels que l'accès à l'enseignement primaire, à l'eau potable et aux soins de première nécessité, y compris aux médicaments de base; considérant qu'une politique de sanctions doit prendre pleinement en compte les normes établies par la Convention de Genève, la Convention des droits de l'enfant et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que les résolutions des Nations unies relatives à la protection des civils et des enfants lors des conflits armés,
S. considérant que la crédibilité de l'Union et de ses États membres est compromise lorsque des sanctions de l'Union semblent être enfreintes, et considérant que M. Robert Mugabe a été invité à assister au sommet UE-Afrique à Lisbonne les 8 et 9 décembre 2007, bien qu'il ait été officiellement interdit de séjour sur le territoire de tous les États membres de l'Union, conformément à la position commune du Conseil 2004/161/PESC du 19 février 2004 renouvelant les mesures restrictives à l'encontre du Zimbabwe(17), récemment prorogées par la position commune du Conseil 2008/135/PESC du 18 février 2008(18),
Considérations générales en vue d'une politique de sanctions efficace de l'Union européenne
1. déplore le fait qu'aucune évaluation ni étude d'impact de la politique de sanctions de l'Union n'a été entreprise jusqu'à ce jour et qu'il est en conséquence extrêmement difficile de mesurer les effets et l'efficacité de cette politique sur le terrain et donc d'en tirer les conclusions qui s'imposent; appelle le Conseil et la Commission à entreprendre cette démarche d'évaluation; considère néanmoins que la politique de sanctions exercée à l'encontre de l'Afrique du sud a prouvé son efficacité en contribuant à mettre fin à l'apartheid;
2. considère que la disparité des bases légales pour la mise en œuvre de la politique de sanctions de l'Union, impliquant différents niveaux de décision, de mise en œuvre et de contrôle, nuit à la transparence et à la cohérence de la politique de sanctions de l'Union et, en conséquence, à la crédibilité de cette politique;
3. considère que l'efficacité des sanctions suppose que leur déclenchement soit perçu comme légitime par l'opinion publique, tant européenne qu'internationale, ainsi que par celle du pays dans lequel des changements sont attendus; souligne que la consultation du Parlement dans le processus de prise de décision renforce cette légitimité;
4. note également que les sanctions peuvent avoir une fonction symbolique, exprimant la condamnation morale par l'Union, et contribuant ainsi à renforcer la visibilité et la crédibilité de la politique étrangère de l'Union; met en garde, cependant, contre le danger de mettre trop en exergue une conception des sanctions en tant que mesures symboliques, car cela pourrait aboutir à leur complète dévalorisation;
5. considère que le recours aux sanctions doit être envisagé face à des comportements d'autorités, d'entités non étatiques ou de personnes physiques et morales portant gravement atteinte à la sécurité et aux droits des personnes ou en cas d'épuisement et d'enlisement avéré, imputable à la partie tierce, de toutes les options contractuelles et/ou diplomatiques;
6. est d'avis que toute dégradation volontaire et irréversible de l'environnement constitue une menace pour la sécurité ainsi qu'une violation grave des droits de l'homme; à cet égard, demande au Conseil et à la Commission d'intégrer toute atteinte volontaire et irréversible à l'environnement parmi les motifs pouvant conduire à l'adoption de sanctions;
7. reconnaît qu'en général, les principaux instruments de sanction de l'Union sont déployés au cas par cas, d'une manière flexible et en fonction des besoins; déplore cependant le fait que l'Union a souvent appliqué sa politique de sanctions d'une manière incohérente, en appliquant un traitement différent à des pays tiers qui affichaient pourtant un bilan semblable sur le plan du respect des droits de l'homme et de la démocratie, et qu'elle s'est par conséquent attiré la critique d'appliquer une politique de "deux poids, deux mesures";
8. est d'avis, dans ce contexte, que l'application et l'évaluation des sanctions décidées par l'Union pour des violations des droits de l'homme doivent en principe prévaloir sur d'éventuels préjudices que l'application des sanctions causerait aux intérêts commerciaux de l'Union et de ses citoyens;
9. regrette que les mésententes au sein de l'Union sur la politique à mener vis-à-vis de tel ou tel pays, comme Cuba, ou les réticences des États membres à contrarier de gros partenaires commerciaux, comme la Russie, ont conduit l'Union à n'adopter que des "sanctions informelles" dans les conclusions de la Présidence, ce qui traduit une application déséquilibrée ou incohérente des sanctions de l'Union; reconnaît cependant que des mesures figurant dans les conclusions du Conseil, comme le report de la signature d'accords avec certains pays, comme la Serbie, peuvent faire pression utilement sur les pays tiers afin qu'ils collaborent pleinement avec les mécanismes internationaux;
10. rappelle qu'en ce qui concerne Cuba, la position commune adoptée en 1996, et renouvelée périodiquement, reflète la feuille de route en faveur d'une transition pacifique vers la démocratie, reste pleinement en vigueur et ne fait l'objet d'aucune controverse au sein des institutions européennes; regrette que, jusqu'à présent, aucune amélioration significative en matière de droits de l'homme ne se soit produite; prend note de la décision du Conseil du 20 juin 2008 de lever les sanctions informelles concernant Cuba, tout en demandant la libération immédiate et inconditionnelle de tous les prisonniers politiques, de faciliter l'accès aux prisons et de ratifier et mettre en œuvre le pacte international relatif aux droits civils et politiques; note que le Conseil décidera dans un an s'il poursuit le dialogue politique avec Cuba en fonction de l'existence ou non d'améliorations significatives en matière de droits de l'homme; rappelle que la position du Conseil est également contraignante à l'égard des institutions de l'Union pour le dialogue tant avec les autorités cubaines qu'avec les représentants de la société civile; réitère sa position vis-à-vis des lauréats du prix Sakharov, M. Oswaldo Payá Sardiñas et le groupe appelé "Damas de Blanco" ("Les dames en blanc");
11. considère que l'on ne peut invoquer l'argument de l''inefficacité" des sanctions pour les lever, mais qu'on doit plutôt l'assortir de la réorientation et de la réévaluation de la sanction elle-même; estime, par ailleurs, que le maintien ou la levée des sanctions doit uniquement dépendre de la concrétisation de leurs objectifs, leur nature pouvant quant à elle être renforcée ou modifiée en fonction de leur évaluation; estime qu'à cet effet, les sanctions doivent toujours être assorties de critères d'évaluation précis;
12. considère que l'efficacité des sanctions devrait être analysée à plusieurs niveaux, tant au niveau de l'efficacité intrinsèque des mesures, à savoir leur capacité d'avoir un impact sur les activités privées ou professionnelles des personnes visées en tant que membres d'un régime visé, ou sur le fonctionnement de celui-ci, qu'au niveau de leur efficacité politique, c'est-à-dire de leur aptitude à inciter à l'arrêt, ou à la modification, des activités ou des politiques ayant motivé leur adoption;
13. considère que l'efficacité d'une sanction suppose la capacité de l'Union de la maintenir pour toute la période prévue et déplore, à cet égard, l'utilisation de clauses de levée automatique du type clauses de suspension ("sunset clauses");
14. oppose à l'application, dans n'importe quel cas, de sanctions générales et aveugles à l'encontre d'un quelconque pays, dans la mesure où cette approche mène de facto à l'isolement total de la population; considère que des sanctions économiques utilisées sans coordination avec d'autres instruments politiques ne réussissent que très difficilement à faciliter des réformes politiques au sein des régimes visés par ces sanctions; insiste donc pour que toute prise de sanction à l'encontre d'autorités étatiques s'accompagne systématiquement d'un soutien à la société civile du pays concerné;
Les sanctions dans le cadre d'une stratégie générale en faveur des droits de l'homme
15. constate que la plupart des sanctions imposées par l'Union découlent de préoccupations sécuritaires; souligne cependant que les violations des droits de l'homme devraient constituer une raison suffisante pour appliquer des sanctions, puisqu'elles aussi constituent une menace pour la sécurité et la stabilité;
16. rappelle que les sanctions ont pour principal objectif de provoquer des modifications des politiques ou des activités dans le sens des objectifs de la position commune de la PESC, des conclusions adoptées par le Conseil ou de la décision internationale sur laquelle elles reposent;
17. insiste sur le fait que le Conseil, en adoptant les Principes de base précités concernant le recours aux mesures restrictives, s'est engagé à recourir aux sanctions dans le cadre d'une approche globale et intégrée; souligne à cet égard que cette approche devrait inclure, en parallèle, le dialogue politique, des mesures d'incitation et la conditionnalité, et pourrait même aller, en dernier ressort, jusqu'à la mise en œuvre de mesures coercitives, comme le prévoient les Principes de base; estime que cette approche globale et intégrée devrait avoir comme outils les clauses relatives aux droits de l'homme et à la démocratie, le système des préférences généralisées et l'aide au développement;
18. souligne que la mise en œuvre de la clause sur les droits de l'homme ne peut pas être considérée comme une sanction complètement autonome ou unilatérale de l'Union, car elle découle directement des accords bilatéraux ou multilatéraux, qui contiennent un engagement réciproque en faveur du respect des droits de l'homme; considère que les mesures appropriées prises en conformité avec cette clause concernent exclusivement la mise en œuvre de l'accord concerné en fournissant aux parties la base juridique pour suspendre ou dénoncer l'accord; considère en conséquence que la mise en œuvre de la clause sur les droits de l'homme et les sanctions autonomes ou unilatérales sont forcément complémentaires;
19. en conséquence, accueille favorablement l'idée que tous les nouveaux accords bilatéraux, y compris les accords sectoriels signés avec des pays tiers, contiennent systématiquement une clause sur les droits de l'homme et insiste sur l'intégration d'un mécanisme de mise en œuvre spécifique; rappelle à cet égard l'importance des recommandations formulées pour une mise en œuvre plus efficace et systématique de la clause, à savoir l'élaboration d'objectifs et de critères de référence et l'évaluation régulière; réitère son appel pour que les clauses relatives aux droits de l'homme soient mises en œuvre via une procédure plus transparente de consultation entre les parties, notamment le Parlement européen et la société civile, détaillant les mécanismes politiques et juridiques à utiliser en cas de demande de suspension de la coopération bilatérale sur la base de violations répétées et/ou systématiques des droits de l'homme et du droit international; soutient le modèle de procédure établi dans le cadre de l'accord de Cotonou en matière de réaction face aux graves violations des droits de l'homme, des principes démocratiques et de la règle de l'État de droit; considère que le système du dialogue politique intensif (article 8 de l'accord de Cotonou)) et des consultations (article 96 de l'accord de Cotonou), avant et après l'adoption de mesures appropriées, a, dans plusieurs cas, constitué un instrument adéquat pour améliorer la situation sur place;
20. invite instamment la Commission et les États membres à ne pas proposer d'accords de libre-échange ni d'accords d'association - même comportant des clauses relatives aux droits de l'homme - aux gouvernements de pays dans lesquels, selon les rapports du Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, des violations généralisées des droits de l'homme sont perpétrées;
21. considère qu'une situation persistante de violations des droits de l'homme ne donnant lieu à aucune mesure appropriée ni restrictive porte gravement atteinte à la stratégie de l'Union en matière de droits de l'homme, à sa politique de sanctions et à sa crédibilité;
22. considère qu'une politique de sanctions est bien plus efficace lorsqu'elle s'inscrit dans une stratégie cohérente en faveur des droits de l'homme; réitère sa demande au Conseil et à la Commission d'élaborer dans chaque document de stratégie par pays et dans les autres documents de même nature une stratégie spécifique concernant les droits de l'homme et la situation en matière de démocratie;
23. estime que, lorsque des sanctions sont imposées, les dialogues et les consultations sur les droits de l'homme devraient nécessairement et systématiquement prévoir des discussions sur les progrès réalisés dans la concrétisation des objectifs et dans le respect des critères de référence fixés lors de l'adoption des mesures restrictives; considère dans le même temps que les objectifs atteints lors de ces dialogues et de ces consultations ne peuvent en aucun cas se substituer à la concrétisation des objectifs sous-tendant les sanctions;
Une action coordonnée par la communauté internationale
24. est d'avis qu'une action coordonnée par la communauté internationale a davantage d'effets que des actions disparates et inégales menées par des États ou des entités régionales; approuve par conséquent le fait que la politique de sanctions de l'Union doit continuer à reposer sur la préférence en faveur du régime des Nations unies;
25. invite le Conseil, à défaut de sanctions du Conseil de sécurité des Nations unies, à coopérer avec les États qui ne sont pas membres de l'Union et qui appliquent des sanctions, à partager des informations, et à coordonner ses actions au niveau international afin de créer l'effet le plus large possible au niveau international pour empêcher les contrevenants d'échapper aux sanctions et maximiser l'efficacité et l'application des sanctions communautaires et autres sanctions, conformément au droit international;
26. considère que l'Union doit chercher à coopérer avec d'autres organisations régionales, comme l'Union africaine et l'Association des Nations d'Asie du Sud-Est (ANASE), afin de promouvoir les droits de l'homme et d'assurer la coordination des actions sur les sanctions;
27. invite l'Union à dialoguer systématiquement avec les États qui n'appliquent pas de sanctions, en vue d'atteindre une position commune sur des mesures restrictives, en particulier au niveau régional; signale que, comme on l'a constaté avec la Birmanie, les sanctions n'entraînent pas souvent les modifications des politiques ou des activités escomptées lorsque la communauté internationale est divisée et que ses grands acteurs ne participent pas à leur mise en œuvre;
28. demande au Conseil et à la Commission d'inscrire systématiquement à l'ordre du jour des dialogues politiques avec les États qui n'appliquent pas de sanctions la question de leur rôle et de leur influence avec le régime ou les acteurs non étatiques ciblés, qu'il s'agisse d'individus, d'organisations ou encore d'entreprises;
29. considère que la perspective de la signature d'un accord de libre-échange avec la région d'un pays ciblé doit être utilisée comme "carotte" et moyen de pression et qu'en tout état de cause, un tel accord doit exclure le pays soumis à un régime de sanctions;
Mise en place de processus de décision, d'objectifs, de critères de référence et de mécanismes d'évaluation transparents
30. souligne la nécessité d'une analyse plus approfondie de chaque situation spécifique préalablement à l'adoption de sanctions, afin d'évaluer l'effet potentiel de différentes sanctions et de choisir celles qui sont les plus efficaces à la lumière de tous les autres facteurs en jeu et des expériences comparables; considère qu'une telle analyse préalable se justifie d'autant plus qu'il est difficile de faire marche arrière une fois le processus de sanctions lancé sans porter atteinte à la crédibilité de l'Union ni à la manifestation du soutien qu'elle se doit d'apporter à la population du pays tiers visé, compte tenu de la possibilité pour les autorités de ce pays d'instrumentaliser sa décision, prend note, à cet égard, de la pratique actuelle, dans le cadre de laquelle la pertinence, la nature et l'efficacité des sanctions proposées sont discutées au sein du Conseil sur la base de l'évaluation des chefs de mission dans les pays concernés, et demande qu'un rapport d'expert indépendant fasse partie de cette évaluation;
31. indique cependant qu'une telle analyse ne doit pas servir à retarder l'adoption de sanctions; souligne, à cet égard, que la procédure en deux étapes pour l'imposition de sanctions dans le cadre de la PESC offre la possibilité d'une réaction politique urgente, initialement via l'adoption d'une position commune à définir après une analyse plus approfondie du règlement, détaillant la nature exacte et l'étendue des sanctions;
32. demande l'inclusion systématique, dans les instruments juridiques, de critères de référence clairs et précis en guise de conditions à la levée des sanctions; insiste notamment pour que ces critères soient établis sur la base d'une expertise indépendante et pour qu'ils ne soient pas modifiés dans le temps au gré des changements politiques au sein du Conseil;
33. demande au Conseil et à la Commission de mettre en place un processus-modèle d'évaluation des sanctions, qui prévoie notamment l'inclusion systématique d'une clause d'évaluation qui implique de revoir le régime des sanctions sur la base des critères de référence et de vérifier si leurs objectifs ont été atteints; insiste sur le fait que des déclarations d'intention ou la volonté d'instaurer des procédures à même de conduire à des résultats positifs doivent être saluées; relève toutefois que celles-ci ne peuvent en aucun cas, lors de l'évaluation des sanctions, se substituer à la réalisation de progrès tangibles et réels en vue de la satisfaction des critères de référence;
34. estime que l'embargo sur les armes imposé à la Chine illustre la cohérence et la constance de l'Union, étant donné que cet embargo a été originellement décidé à la suite du massacre de Tiananmen en 1989, que, jusqu'à ce jour, l'Union n'a reçu aucune explication quant à ce massacre, et qu'il n'y a donc aucune raison de lever cet embargo;
35. invite la formation "Sanctions" du Groupe des conseillers pour les relations extérieures (RELEX/Sanctions) à remplir pleinement son mandat; insiste en particulier sur la nécessité d'effectuer des recherches avant d'adopter des sanctions et, après leur adoption, à diffuser régulièrement des informations actualisées sur l'évolution de la situation et à déployer les meilleures pratiques concernant la mise en œuvre et l'application des mesures restrictives;
36. reconnaît que tant les États que les organisations internationales et régionales doivent être responsables des actes répréhensibles au niveau international lors de la mise en œuvre des sanctions, et insiste, à cet égard, sur la nécessité d'un mécanisme judiciaire pour en garantir la conformité au droit international et au droit humanitaire;
37. demande que le Parlement soit associé à toutes les étapes du processus de sanctions: le processus décisionnel menant aux sanctions, le choix des sanctions les plus appropriées à la situation, ainsi que la définition des critères de référence, l'évaluation de leur mise en œuvre dans le cadre du mécanisme de révision et la levée de la sanction;
Les actions ciblées sont-elles plus efficaces?
38. déplore que, par manque d'évaluation, il soit impossible de juger l'efficacité des mesures ciblées; reconnaît néanmoins le vif souci humanitaire de l'Union, qui l'a conduite à abandonner les sanctions d'une portée économique générale, comme celles qu'elle avait appliquées dans le passé à l'Irak, et à imposer des sanctions "intelligentes", plus ciblées, conçues pour avoir un impact maximal sur ceux dont elles sont censées influencer le comportement, tout en limitant autant que possible les effets négatifs sur le plan humanitaire ou les conséquences pour les personnes non ciblées ou les pays voisins;
39. considère que les sanctions économiques utilisées indépendamment d'autres instruments politiques sont très peu susceptibles de contraindre le régime visé à effectuer des modifications politiques d'importance; souligne de plus que des restrictions économiques d'ampleur peuvent comporter des coûts économiques et humanitaires très élevés; réitère donc son plaidoyer en faveur de sanctions économiques mieux ciblées et soigneusement conçues, de manière à avoir essentiellement un impact sur les principaux dirigeants des régimes concernés et sur les auteurs de violations des droits de l'homme;
40. met en évidence que toute sanction économique devrait avant tout viser les secteurs qui ne recourent pas à une main-d'œuvre abondante et n'ont qu'un faible impact sur les petites et moyennes entreprises, lesquelles sont importantes à la fois pour le développement économique et pour la redistribution des revenus;
41. soutient le recours à des sanctions financières ciblées sur les principaux dirigeants des régimes visés et les membres de leur famille proche, sanctions qui portent directement sur les revenus des personnes sanctionnées; souligne qu'il est nécessaire de joindre à ces sanctions des actions adéquates à l'égard des entités économiques de l'Union qui coopèrent avec ces personnes; souligne que les sanctions ciblées sur certains produits et visant une source précise ou principale de revenus d'un régime risquent d'avoir des effets plus profonds et aveugles sur la population et peuvent favoriser le développement d'une économie souterraine;
42. considère que les sanctions de nature économique et financière, même lorsqu'elles sont ciblées, doivent être appliquées par toutes les personnes physiques et morales qui exercent une activité commerciale dans l'Union, y compris les citoyens de pays tiers, et les citoyens de l'Union ou les personnes morales déclarées ou constituées selon la législation d'un État membre de l'Union qui exercent des activités commerciales en dehors de l'Union;
43. demande que l'application des "exemptions extraordinaires" soit limitée au gel des avoirs; souhaite la création d'une procédure spécifique pour les objections au cas où un État membre souhaiterait accorder une exemption au gel des avoirs, puisque l'inexistence d'une telle procédure hypothèque l'efficacité d'une telle mesure restrictive, étant donné que les États membres sont uniquement tenus d'informer la Commission préalablement à l'octroi d'une exemption de ce type;
44. réclame des mesures visant à améliorer l'application des sanctions financières ciblées de l'Union afin de garantir que, dans la pratique, ces sanctions empêchent totalement l'accès des personnes et des entités visées à l'ensemble des services financiers relevant de l'ordre juridique de l'Union, y compris ceux qui transitent par des banques de compensation de l'Union ou qui recourent d'une autre manière à des services financiers à l'intérieur de l'ordre juridique de l'Union; souligne la nécessité d'une plus grande flexibilité dans la distribution des listes de sanctions au sein de l'Union et au sein des États membres, à destination de toutes les personnes obligées visées dans la troisième directive visant à combattre le blanchiment des capitaux(19); propose que chaque État membre désigne une institution chargée de la diffusion de ces informations;
45. souhaite un renforcement de la collaboration du Conseil et de la Commission avec la direction et l'actionnariat de Swift en Europe, afin d'accroître l'efficacité du gel des comptes placés sur une liste noire et du blocage des transferts de fonds depuis et vers ces comptes;
46. invite le Conseil et la Commission à analyser les possibilités et les moyens de faire un usage constructif des revenus gelés des autorités visées, par exemple en les attribuant aux victimes des violations des droits de l'homme ou à des fins de développement dans le cadre du chapitre VII de la Charte des Nations unies;
47. constate que les embargos sur les armes sont une forme de sanction destinée à interrompre le flux d'armements et de matériel militaire vers des zones de conflit ou vers des régimes susceptibles de les utiliser à des fins de répression interne ou d'agression sur un pays étranger, au sens du code de conduite sur les exportations d'armes;
48. demande la mise en place d'une coopération coordonnée entre les États membres et la Commission quant à la mise en œuvre, par chaque État membre, des embargos sur les armes décrétés par l'Union;
49. invite les États membres à adopter la position commune sur les exportations d'armes, qui rendra juridiquement contraignant le code de conduite sur les exportations d'armes ;
50. prie instamment le Conseil, la Commission et les États membres à poursuivre leurs travaux visant à améliorer les moyens de suivi et de mise en œuvre dont disposent les Nations unies et estime qu'il serait opportun de créer une équipe permanente des Nations unies chargée d'évaluer le commerce des marchandises qui servent à financer des conflits, ainsi que l'utilité des sanctions par rapport à ces échanges;
51. rappelle que les restrictions d'accès (interdictions de déplacements, de visas) sont une des premières mesures dans l'échelle des sanctions de l'Union et impliquent l'interdiction pour les personnes ou les entités non étatiques qui figurent sur une liste noire d'assister à des réunions officielles de l'Union et de voyager dans l'Union à des fins privées;
52. déplore que les États membres n'ont pas appliqué d'une manière optimale les interdictions de visas décrétées par l'Union; les invite à adopter une approche concertée dans l'application des restrictions de déplacements et des clauses d'exemption qui s'y rapportent;
Le respect des droits de l'homme lors de l'application de sanctions ciblées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme
53. prend en considération le fait que les sanctions autonomes de l'Union contre le terrorisme, de même que la mise en œuvre par l'Union des sanctions antiterroristes du Conseil de sécurité, sont au centre de plusieurs affaires portées devant la Cour de justice et le Tribunal de première instance ;
54. rappelle l'obligation, pour les États membres, de prendre des sanctions qui soient conformes à l'article 6, paragraphe 2, du traité UE, qui prescrit à l'Union de respecter les droits fondamentaux, tels qu'ils sont garantis par la Convention européenne des droits de l'homme et tels qu'ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux États membres; souligne que les procédures fondées sur des listes noires, actuellement utilisées au niveau de l'Union et des Nations unies, présentent des carences sur le plan de la sécurité juridique et des voies de droit; prie instamment le Conseil de tirer toutes les conclusions nécessaires et d'appliquer pleinement les arrêts du Tribunal de première instance en ce qui concerne les sanctions autonomes de l'Union;
55. invite le Conseil et la Commission à revoir la procédure actuelle d'inscription et de désinscription de personnes physiques et morales sur des listes noires, de manière à respecter les droits fondamentaux de l'homme , les droits de procédure et, en particulier, les normes internationales en ce qui concerne le droit à un recours effectif devant un tribunal indépendant et impartial et à un procès équitable, notamment le droit pour les personnes en question d'être averties et dûment informées des charges retenues contre elles et des décisions prises, ainsi que le droit à un dédommagement en cas de violation des droits de l'homme; demande, au même titre, aux États membres de l'Union de promouvoir un réexamen semblable au sein des mécanismes des Nations unies, afin de garantir le respect des droits fondamentaux lors de l'application de sanctions ciblées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme;
56. considère que l'article 75 du TFUE constituerait une occasion que doit saisir le Parlement pour remédier aux manquements de la pratique actuelle en matière d'inscription sur une liste noire, et soutient tous les travaux parlementaires en cours destinés à être inscrits à l'ordre du jour du programme législatif 2009;
57. regrette qu'aucune des instances judiciaires ne soit en mesure d'évaluer le bien-fondé des listes noires, étant donné que les éléments qui justifient une inscription sur ces listes reposent principalement sur des informations détenues par les services secrets qui, ipso facto, opèrent secrètement; considère toutefois que la discrétion de rigueur ne doit pas être synonyme d'impunité en cas de non-respect des lois internationales; demande, à cet égard, aux États membres de garantir un contrôle parlementaire effectif sur les activités de ces services secrets; considère, à cet égard, qu'il est nécessaire d'associer le Parlement aux travaux réalisés par la Conférence des comités de surveillance des services de renseignement des États membres déjà en place;
58. réaffirme cependant que, pour autant qu'il respecte la dernière jurisprudence de la Cour de justice, le système des listes antiterroristes est un outil pertinent de la politique de l'Union en matière de lutte contre le terrorisme;
59. souligne que le terrorisme représente une menace pour la sécurité et la liberté et invite, par conséquent, le Conseil à réviser et à actualiser la liste des organisations terroristes en tenant compte des activités de ces organisations sur tous les continents;
Pour une politique mixte de sanctions
60. note que l'Union a toujours encouragé une approche positive de l'usage des sanctions dans le but d'inciter aux changements; souligne, à cet effet, qu'il est important de privilégier une action globale intégrée via une stratégie graduée de pressions et d'incitations;
61. considère qu'une stratégie d'ouverture et une politique de sanctions ne s'excluent pas l'une l'autre; en conséquence, est d'avis que la politique de sanctions de l'Union peut contribuer à une amélioration du respect des droits de l'homme dans l'État sanctionné quand elle est explicitement révisée en une politique de mesures positives; relève, à cet égard, le cycle de sanctions imposées à l'Ouzbékistan entre novembre 2007 et avril 2008: tout en maintenant pendant un an les sanctions imposées à ce pays pour n'avoir pas satisfait aux critères initiaux relatifs aux enquêtes sur le massacre d'Andijan et au respect des droits de l'homme, le Conseil a décidé de suspendre l'application de l'interdiction de visas, ce qui a laissé au gouvernement ouzbek un délai de six mois pour se conformer à une série de critères sur les droits de l'homme, tandis qu'il restait sous la menace de la réinstauration automatique de cette interdiction; constate que le panachage d'engagements et de sanctions a donné quelques résultats positifs, grâce à la possibilité de réinstaurer les sanctions automatiquement et à la fixation de critères précis; souligne que ces critères doivent pouvoir être respectés dans un délai limité et doivent être adaptés au régime général des sanctions; déplore toutefois l'absence de développements positifs substantiels et le manque persistant de coopération avec le gouvernement ouzbek;
62. demande instamment que les sanctions soient systématiquement accompagnées, dans le cadre d'une stratégie à plusieurs échelons, de mesures positives renforcées pour soutenir la société civile, les défenseurs des droits de l'homme et tous les types de projets en faveur des droits de l'homme et de la démocratie; demande que les programmes et instruments thématiques (IEDDH(20), acteurs non étatiques, programme "investir dans les ressources humaines"), contribuent pleinement à la réalisation de cet objectif;
63. invite le Conseil et la Commission à saisir l'occasion de la ratification du traité de Lisbonne et de la création du service européen pour l'action extérieure (SEAE), qui s'ensuivra, afin de garantir une optimisation de la cohérence des différents instruments d'action extérieure de l'Union comme élément clé d'une meilleure efficacité de la politique de sanctions de l'Union;
Recommandations en rapport avec les institutions de l'UE et les États membres
64. invite le Conseil et la Commission à entreprendre une évaluation complète et approfondie de la politique communautaire de sanctions afin de déterminer son impact actuel et de définir les actions à mettre en œuvre pour la renforcer; invite le Conseil et la Commission à présenter le programme de telles actions; invite le Conseil et la Commission à évaluer les conséquences des sanctions sur la politique de développement dans les pays concernés, de même que sur la politique commerciale de l'Union;
65. demande à la Commission de faire en sorte que les stratégies d'aide au développement relevant de l'Instrument de coopération au développement et du Fonds européen de développement soient cohérentes avec les régimes de sanctions et les dialogues sur les droits de l'homme déjà en place; demande à la Commission de faire en sorte que les conditions d'un soutien budgétaire général, y compris sur la base des "contrats des objectifs du Millénaire pour le développement", soient explicitement liées à des critères ayant trait aux droits de l'homme et à la démocratie;
66. invite le Conseil et la Commission à saisir l'occasion de la ratification du traité de Lisbonne, de la nomination d'un Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité – qui sera en même temps vice-président de la Commission et président du Conseil affaires étrangères – et de la création qui s'ensuivra du SEAE afin de donner davantage de cohérence et de consistance aux actions extérieures de l'Union, d'améliorer les compétences des services communautaires actifs dans le domaine des sanctions et de renforcer la coopération entre les différents services;
67. demande en même temps l'instauration d'une coopération renforcée entre les autorités compétentes des États membres et la Commission afin de garantir une mise en œuvre plus cohérente et plus efficace des mesures restrictives;
68. demande également aux États membres qui sont membres du Conseil de sécurité des Nations unies de chercher systématiquement à internationaliser les sanctions édictées par l'Union européenne, conformément à l'article 19 du traité UE;
69. appelle les États membres, lorsqu'ils agissent au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, à ne pas violer les obligations qu'ils ont contractées par ailleurs en matière de respect des droits de l'homme, notamment la Convention européenne des droits de l'homme;
70. charge ses organes parlementaires, en particulier ses délégations permanentes et ad hoc, de faire usage de leurs contacts avec les parlements de pays n'appliquant pas de sanctions pour améliorer la compréhension des régimes de sanctions mis en place par l'Union pour la région concernée ainsi que d'examiner les possibilités d'une action coordonnée visant à promouvoir les droits de l'homme;
71. invite la Commission à se doter d'un réseau d'experts indépendants chargé de proposer au Conseil, en fonction de la situation, les mesures restrictives les plus pertinentes et de rédiger un rapport régulier sur l'évolution de la situation au regard des critères de référence et des objectifs visés, et, le cas échéant, de suggérer les améliorations à apporter à la mise en œuvre des sanctions; estime que la création de ce réseau améliorerait la transparence et les discussions sur les sanctions en général et renforcerait l'application et le suivi permanent des sanctions dans des cas particuliers; estime par ailleurs que la Commission devrait jouer un rôle plus proactif dans la définition d'une politique européenne claire en matière de sanctions;
72. considère que la légitimité de la politique de sanctions de l'Union, qui constitue un élément phare et sensible de la PESC, doit être renforcée par l'implication du Parlement à tous les stades de la procédure, et ce conformément à l'article 21 du traité UE, en particulier lors de l'élaboration et de la mise en œuvre des sanctions, sous la forme d'une concertation systématique avec le Conseil et la Commission et à travers des rapports communiqués par ces deux institutions; estime également que le Parlement devrait participer à la supervision du respect des critères de référence par les destinataires des sanctions; charge sa sous-commission "droits de l'homme" de systématiser et de superviser les travaux dans ce domaine pour toute sanction dont les objectifs et les critères de référence concernent les droits de l'homme;
o o o
73. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission, aux gouvernements et parlements des États membres, ainsi qu'aux Secrétaires généraux des Nations unies et du Conseil de l'Europe.
L'article 96 de l'accord de Cotonou du 23 juin 2000 dispose: "Éléments essentiels – Procédure de consultation et mesures appropriées concernant les droits de l'homme, les principes démocratiques et l'État de droit1. Aux fins du présent article, on entend par "partie", la Communauté et les États membres de l'Union européenne, d'une part, et chaque État ACP, d'autre part.2. a) Si, nonobstant le dialogue politique mené de façon régulière entre les parties, une partie considère que l'autre a manqué à une obligation découlant du respect des droits de l'homme, des principes démocratiques et de l'État de droit visés à l'article 9, paragraphe 2, elle fournit à l'autre partie et au Conseil des ministres, sauf en cas d'urgence particulière, les éléments d'information utiles nécessaires à un examen approfondi de la situation en vue de rechercher une solution acceptable par les parties. À cet effet, elle invite l'autre partie à procéder à des consultations, portant principalement sur les mesures prises ou à prendre par la partie concernée afin de remédier à la situation. Les consultations sont menées au niveau et dans la forme considérés les plus appropriés en vue de trouver une solution. Les consultations commencent au plus tard 15 jours après l'invitation et se poursuivent pendant une période déterminée d'un commun accord, en fonction de la nature et de la gravité du manquement. Dans tous les cas, les consultations ne durent pas plus de 60 jours. Si les consultations ne conduisent pas à une solution acceptable par les parties, en cas de refus de consultation, ou en cas d'urgence particulière, des mesures appropriées peuvent être prises. Ces mesures sont levées dès que les raisons qui les ont motivées disparaissent. b) Les termes "cas d'urgence particulière" visent des cas exceptionnels de violations particulièrement graves et évidentes d'un des éléments essentiels visés à l'article 9, paragraphe 2, qui nécessitent une réaction immédiate. La partie qui recourt à la procédure d'urgence particulière en informe parallèlement l'autre partie et le Conseil des ministres, sauf si les délais ne le lui permettent pas. c) Les "mesures appropriées" au sens du présent article, sont des mesures arrêtées en conformité avec le droit international et proportionnelles à la violation. Le choix doit porter en priorité sur les mesures qui perturbent le moins l'application du présent accord. Il est entendu que la suspension serait un dernier recours. Si des mesures sont prises, en cas d'urgence particulière, celles-ci sont immédiatement notifiées à l'autre partie et au Conseil des ministres. Des consultations peuvent alors être convoquées, à la demande de la partie concernée, en vue d'examiner de façon approfondie la situation et, le cas échéant, d'y remédier. Ces consultations se déroulent selon les modalités spécifiées aux deuxième et troisième alinéas du point a).".
Directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 octobre 2005, relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme (JO L 309 du 25.11.2005, p. 15).
Règlement (CE) n° 1889/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 instituant un instrument financier pour la promotion de la démocratie et des droits de l'homme dans le monde (JO L 386 du 29.12.2006, p. 1).