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Procédure : 2008/2085(INI)
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A6-0370/2008

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PV 21/10/2008 - 6
CRE 21/10/2008 - 6

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PV 22/10/2008 - 6.2
CRE 22/10/2008 - 6.2
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P6_TA(2008)0513

Textes adoptés
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Mercredi 22 octobre 2008 - Strasbourg
Défis pour les conventions collectives dans l'UE
P6_TA(2008)0513A6-0370/2008

Résolution du Parlement européen du 22 octobre 2008 sur les défis pour les conventions collectives dans l'UE (2008/2085(INI))

Le Parlement européen,

—  vu l'article 2, et notamment le premier tiret, du traité UE et l'article 3, paragraphe 1, point j), du traité CE,

—  vu les articles 136, 137, 138, 139 et 140 du traité CE,

—  vu les articles 12, 39 et 49 du traité CE,

—  vu le traité sur l'Union européenne tel que modifié par le traité de Lisbonne du 13 décembre 2007, et notamment son article 3,

—  vu l'article 152 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui reconnaît l'importance du dialogue social et de la négociation collective pour le développement,

—  vu les articles 27, 28 et 34 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,

—  vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et notamment son article 11,

—  vu la charte sociale européenne, et notamment ses articles 5, 6 et 19,

—  vu la convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant,

—  vu la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services(1) (ci-après dénommée "la directive sur le détachement"),

—  vu le rapport des services de la Commission sur la mise en œuvre de la directive 96/71/CE et concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services (SEC(2006)0439) (ci-après dénommé "le rapport des services de la Commission"),

—  vu la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services(2) (la directive sur les marchés publics),

—  vu la clause "Monti" inscrite dans le règlement (CE) n° 2679/98 du Conseil du 7 décembre 1998 relatif au fonctionnement du marché intérieur pour ce qui est de la libre circulation des marchandises entre les États membres(3),

—  vu la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur(4) (la directive sur les services),

—  vu l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) du 27 mars 1990 dans l'affaire C–113/89 Rush Portugesa Ltda/Office national d'immigration(5),

—  vu les arrêts de la CJCE du 9 août 1994 dans l'affaire C–43/93, Vander Elst(6), du 23 novembre 1999 dans les affaires jointes C–369/96 et 376/96, Arblade(7), du 25 octobre 2001 dans les affaires jointes C–49/98, C–50/98, C–52/98, C–54/98, C–68/98 et C–71/98, Finalarte(8), du 7 février 2002 dans l'affaire C–279/00, Commission/Italie(9), du 12 octobre 2004 dans l'affaire C–60/03, Wolff & Müller GmbH(10), du 21 octobre 2004 dans l'affaire C–445/03, Commission/Luxembourg(11), et du 19 janvier 2006 dans l'affaire C-244/04, Commission/Allemagne(12),

—  vu l'arrêt de la CJCE du 11 décembre 2007 dans l'affaire C–438/05, International Transport Workers' Federation and Finish Seamen's Union/Viking Line ABP(13) (ci-après dénommée "l'affaire Viking"),

—  vu l'arrêt de la CJCE du 18 décembre 2007 dans l'affaire C–341/05, Laval un Partneri Ltd(14),

—  vu l'arrêt de la CJCE du 3 avril 2008 dans l'affaire C–346/06, Rüffert(15),

—  vu les conventions suivantes de l'Organisation internationale du travail (OIT): n° 94 sur les clauses de travail (contrats publics), n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, n° 98 sur le droit d'organisation et de négociation collective, n° 117 sur les objectifs et normes de base de la politique sociale, notamment sa partie IV, et n° 154 sur la négociation collective,

—  vu sa résolution du 26 octobre 2006 sur l'application de la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs(16),

—  vu sa résolution du 15 janvier 2004 sur la mise en œuvre de la directive 96/71/CE dans les États membres(17),

—  vu sa résolution du 23 mai 2007 sur le thème "Promouvoir un travail décent pour tous"(18) ,

—  vu les principes communs de la flexicurité, approuvés par le Conseil européen le 14 décembre 2007, et la résolution du Parlement du 29 novembre 2007 sur des principes communs de flexicurité(19),

—  vu l'article 45 de son règlement,

—  vu le rapport de la commission de l'emploi et des affaires sociales et les avis de la commission des affaires juridiques ainsi que de la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs (A6-0370/2008),

A.  considérant que le traité CE reconnaît les droits fondamentaux définis dans la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, dans les constitutions des États membres et dans différents traités et conventions internationaux comme étant des références essentielles pour le droit et les pratiques communautaires,

B.  considérant que le traité CE énonce un certain nombre de principes pertinents, que l'un des objectifs principaux de la Communauté est l'établissement d'un marché intérieur caractérisé par la suppression, entre les États membres, des entraves à la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux, et comportant une dimension sociale,

C.  considérant que l'un de ces principes consiste à reconnaître aux citoyens des droits constitutionnels de base, lesquels incluent le droit de constituer des syndicats, le droit de grève et le droit de négocier des conventions collectives,

D.  considérant que les principes fondamentaux du marché intérieur incluent la libre circulation des travailleurs, la liberté d'établissement et la liberté de prestation de services,

E.  considérant que, conformément à l'article 39 du traité CE, la libre circulation des travailleurs implique l'abolition de toute discrimination fondée sur la nationalité entre les travailleurs des États membres en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail,

F.  considérant que des restrictions des libertés fondamentales sont possibles au regard du traité CE si elles répondent à des objectifs légitimes compatibles avec le traité, sont justifiées par des raisons impérieuses d'intérêt général, sont proportionnées à la réalisation des objectifs poursuivis et ne vont pas au delà de ce qui est nécessaire pour les réaliser, et considérant en même temps que, conformément à l'article 52 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, toute limitation de l'exercice des droits et libertés reconnus par ladite charte ne peut être apportée que si elle proportionnée, nécessaire et répond effectivement à des objectifs d'intérêt général reconnus par l'Union ou au besoin de protection des droits et libertés d'autrui,

G.  considérant que la CJCE reconnaît le droit de recourir à des actions collectives en tant que droit fondamental faisant partie intégrante des principes généraux du droit communautaire et que ce droit sera également inscrit dans les traités, si le traité de Lisbonne est ratifié,

H.  considérant que la Commission a souligné, à plusieurs occasions, l'importance que le cadre de la législation en matière d'emploi et des négociations collectives en vigueur au niveau national revêt pour la protection des droits des travailleurs,

I.  considérant que le rapport 2006 de la Commission sur les relations industrielles en Europe montre qu'un niveau très développé de négociation collective peut exercer une influence positive sur l'intégration sociale,

J.  considérant que, en vertu de l'article 136 du traité CE, la Communauté et les États membres ont pour objectif "l'amélioration des conditions de vie et de travail, permettant leur égalisation dans le progrès" et qu'en vue de réaliser cet objectif, l'article 140 du traité CE dispose que la Commission encourage une étroite coopération entre les États membres dans le domaine de la politique sociale, et notamment dans les matières relatives au droit syndical et aux négociations collectives entre employeurs et travailleurs,

K.  considérant que, selon le préambule de la directive sur le détachement, la promotion de la prestation de services dans un cadre transnational nécessite des conditions de concurrence libre et loyale ainsi que des mesures garantissant le respect des droits des travailleurs et en conformité avec le cadre juridique relatif à la législation nationale en matière d'emploi et aux relations du travail en place dans les États membres,

L.  considérant que la directive sur le détachement énonce clairement, dans son considérant 12, que "le droit communautaire ne s'oppose pas à ce que les États membres étendent le champ d'application de leur législation ou les conventions collectives de travail conclues par les partenaires sociaux à toute personne effectuant un travail salarié, y compris temporaire, sur leur territoire, même si l'employeur est établi dans un autre État membre" et que "le droit communautaire n'interdit pas aux États membres de garantir le respect de ces règles par les moyens appropriés",

M.  considérant que l'objectif de la directive sur le détachement, à savoir créer un climat de concurrence loyale et mettre en place des mesures garantissant le respect des droits des travailleurs, est important, dans un contexte où la prestation transnationale de services se développe, pour la protection des travailleurs concernés, dans le respect du cadre de la législation sur l'emploi et des relations du travail en place dans les États membres, sous réserve qu'il ne soit pas porté atteinte à la législation communautaire,

N.  considérant que, selon la directive sur le détachement, les législations des États membres doivent prévoir un noyau de règles impératives de protection minimale des travailleurs détachés, qui doivent être observées dans le pays d'accueil, sans faire obstacle à l'application de conditions d'emploi et de travail plus favorables pour les travailleurs,

O.  considérant que l'article 3, paragraphe 8, de la directive sur le détachement permet de mettre en œuvre ladite directive par la voie de dispositions législatives ou de conventions collectives déclarées d'application générale ou ayant un effet général sur toutes les entreprises similaires appartenant au secteur concerné, ou qui ont été conclues par les organisations des partenaires sociaux les plus représentatives au plan national et qui sont appliquées sur l'ensemble du territoire national, et que la CJCE a également dit pour droit que la directive sur le détachement ne visant pas l'harmonisation des systèmes de fixation des conditions de travail et d'emploi, les États membres restent libres de choisir, au niveau national, un système qui ne figure pas expressément parmi ceux prévus par la directive sur le détachement,

P.  considérant que le noyau de dispositions visé à l'article 3, paragraphe 1, de la directive sur le détachement consiste en des règles internationales impératives que les États membres ont adoptées d'un commun accord; considérant que les dispositions d'ordre public visées à l'article 3, paragraphe 10, consistent également en des règles internationales qui sont impératives mais qui sont conçues de telle manière que les États membres disposent d'une marge discrétionnaire pour ce qui est de leur définition en droit national, et considérant, en outre, que le recours à l'article 3, paragraphe 10, est important pour les États membres en ce sens qu'il leur permet de prendre en compte diverses considérations touchant au marché du travail, à la politique sociale et à d'autres aspects, y compris la protection des travailleurs, tout en respectant le principe de l'égalité de traitement,

Q.  considérant que la mobilité des travailleurs a largement contribué à l'emploi, à la prospérité et à l'intégration dans l'Union en offrant aux citoyens de nouvelles possibilités d'approfondir leurs connaissances, d'acquérir de l'expérience et d'obtenir de meilleures conditions de vie,

R.  considérant que l'article 28 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne codifie le droit de mener des négociations et des actions collectives,

S.  considérant que la directive sur le détachement a permis à plus d'un million de travailleurs d'exercer une activité professionnelle à l'étranger dans des conditions de sûreté et de sécurité, sans problèmes ni conflits,

T.  considérant qu'une application et une exécution uniformes des dispositions de la directive sur le détachement sont essentielles à la réalisation de ses objectifs, s'agissant notamment du respect des conventions collectives existant dans les États membres,

U.  considérant que l'article 3, paragraphe 1, point a), de la directive sur les services indique clairement qu'elle n'est pas destinée à remplacer la directive sur le détachement et qu'elle n'y porte pas atteinte,

V.  considérant qu'aux fins de la libre circulation des marchandises, la clause suivante (appelée "clause Monti") a été inscrite dans le règlement (CE) n° 2679/98, dont l'article 2 est libellé comme suit: "Le présent règlement ne peut être interprété comme affectant d'une quelconque manière l'exercice des droits fondamentaux, tels qu'ils sont reconnus dans les États membres, y compris le droit ou la liberté de faire grève. Ces droits peuvent également comporter le droit ou la liberté d'entreprendre d'autres actions relevant des systèmes spécifiques de relations du travail propres à chaque État membre",

W.  considérant que l'article 1, paragraphe 7, de la directive sur les services dispose que "La présente directive n'affecte pas l'exercice des droits fondamentaux tels que reconnus dans les États membres et par le droit communautaire. Elle n'affecte pas non plus le droit de négocier, de conclure et d'appliquer des conventions collectives et de mener des actions syndicales conformément aux législations et aux pratiques nationales respectant le droit communautaire",

X.  considérant que le Conseil européen a défini des principes pour la création de modèles du marché du travail qui, outre un degré élevé de sécurité, présentent un haut niveau de flexibilité ("modèle de flexicurité"); considérant qu'il est admis que des partenaires sociaux forts, disposant d'une marge substantielle pour la conduite de négociations collectives, constituent un élément important pour la réussite du modèle de flexicurité,

Y.  considérant qu'il appartient à la CJCE d'interpréter le droit communautaire eu égard aux libertés et aux droits fondamentaux, et de veiller au respect du droit dans l'interprétation et l'application du traité CE, sans objet en français,

Z.  considérant qu'il appartient aux juridictions nationales de déterminer au cas par cas si les critères concernant les limitations des libertés fondamentales et leur compatibilité avec le droit communautaire sont respectés,

AA.  considérant que le droit de mener des actions collectives et de conclure des conventions collectives constitue un droit fondamental faisant partie intégrante des principes généraux du droit communautaire, et considérant qu'à cet égard, la CJCE ne doit pas se fonder sur une déclaration du Conseil et de la Commission datée du 24 septembre 1996, et non adoptée par le Parlement en tant que colégislateur, qui limiterait l'interprétation des notions de "dispositions d'ordre public" et de "dispositions nationales essentielles pour l'ordre politique" aux seules règles obligatoires prévues par les textes législatifs,

AB.  considérant que l'arrêt du 21 septembre 1999 dans l'affaire C-67/96(20), Albany International BV, se rapportant au domaine de la concurrence, a reconnu aux syndicats une importante marge discrétionnaire pour ce qui est des questions touchant au marché du travail,

AC.  considérant qu'il a été constaté que différentes vues et interprétations existaient au sein de la CJCE et entre la Cour et ses avocats généraux dans les diverses affaires concernant la directive sur le détachement, notamment dans les affaires Laval et Rüffert, précitées, et que, lorsque ces vues et interprétations divergent, une clarification pourrait être nécessaire quant à l'équilibre à respecter entre les droits et libertés fondamentaux,

1.  souligne que la libre prestation des services constitue l'une des pierres angulaires du projet européen; estime toutefois que cet élément doit être mis en balance, d'une part, avec les droits fondamentaux et les objectifs sociaux inscrits dans les traités et, d'autre part, avec le droit des partenaires publics et sociaux de garantir la non-discrimination, l'égalité de traitement et l'amélioration des conditions de vie et de travail; rappelle que la négociation collective et les actions collectives sont des droits fondamentaux reconnus par la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et que l'égalité de traitement est un principe fondamental de l'Union européenne;

2.  est d'avis que tout citoyen de l'Union devrait avoir le droit de travailler n'importe où dans l'Union et donc avoir droit à l'égalité de traitement; regrette dès lors que ce droit ne soit pas appliqué de manière uniforme dans l'Union; estime que les mécanismes transitoires qui subsistent devraient faire l'objet d'un examen minutieux par la Commission afin d'établir dans quelle mesure ils sont vraiment nécessaires pour prévenir les distorsions sur les marchés nationaux du travail et pour, le cas échéant, les supprimer dans les meilleurs délais;

3.  souligne que la libre prestation des services ne s'oppose pas et n'est pas supérieure au droit fondamental des partenaires sociaux de promouvoir le dialogue social et de recourir à des actions collectives, sachant en particulier qu'il s'agit d'un droit constitutionnel reconnu dans plusieurs États membres; souligne que la clause Monti visait à protéger les droits constitutionnels fondamentaux dans le contexte du marché intérieur; rappelle, dans le même temps, que la libre circulation des travailleurs est l'une des quatre libertés attachées au marché intérieur;

4.  se félicite du traité de Lisbonne et note avec satisfaction que la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit se voir conférer un caractère juridiquement contraignant; note que cela incluerait le droit des syndicats de négocier et de conclure des conventions collectives aux niveaux appropriés et de recourir, en cas de conflits d'intérêts, à des actions collectives (comme la grève) pour la défense de leurs intérêts;

5.  souligne que la liberté de fournir des services ne prime pas les droits fondamentaux inscrits dans la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et notamment le droit des syndicats à recourir à une action collective, sachant en particulier qu'il s'agit d'un droit constitutionnel reconnu dans plusieurs États membres; souligne par conséquent que les arrêts de la CJCE dans les affaires Rüffert, Laval et Viking, précitées, montrent qu'il est nécessaire de préciser que les libertés économiques, inscrites dans les traités, devraient être interprétées de manière à ne pas porter atteinte à l'exercice des droits sociaux fondamentaux reconnus dans les États membres et par le droit communautaire, y compris le droit de négocier, de conclure et d'appliquer des conventions collectives et le droit de mener des actions collectives, et à ne pas porter atteinte à l'autonomie des partenaires sociaux lorsqu'ils exerçent ces droits fondamentaux pour la défense d'intérêts sociaux et la protection des travailleurs;

6.  souligne que la directive sur le détachement autorise les pouvoirs publics et les partenaires sociaux à établir des conditions d'emploi et de travail plus favorables pour les travailleurs, conformément aux différentes traditions dans les États membres;

7.  souligne que le considérant 22 de la directive sur le détachement précise que ladite directive est sans préjudice du droit des États membres en matière d'action collective pour la défense des intérêts commerciaux et professionnels, droit qui est confirmé par l'article 137, paragraphe 5, du traité CE;

8.  souligne dès lors qu'il est nécessaire de garantir et de renforcer l'égalité de traitement et l'égalité de rémunération pour un même travail sur le même lieu de travail, inscrites aux articles 39 et 12 du traité CE; estime que, dans le cadre de la libre prestation de services ou de la liberté d'établissement, la nationalité de l'employeur, des employés ou des travailleurs détachés ne peut justifier des inégalités en matière de conditions de travail, de salaire ou d'exercice de droits fondamentaux comme le droit de grève;

9.  souligne qu'il importe de prévenir toute incidence négative sur les modèles de marché du travail qui combinent déjà un degré élevé de flexibilité sur le marché du travail et un haut niveau de sécurité, et qu'il convient, au contraire, de promouvoir encore cette approche;

Incidences générales

10.  note que l'effet horizontal de certaines dispositions du traité CE dépend de la réalisation de conditions précises, entre autres de la condition que ces dispositions confèrent des droits à un particulier intéressé à l'observation des obligations concernées; se dit préoccupé du fait que, dans les circonstances spécifiques propres aux arrêts récemment rendus par la CJCE, l'effet horizontal de l'article 43 du traité CE était dûment identifié, et estime que cela pourrait multiplier le nombre des affaires portées devant la CJCE;

11.  se félicite du fait que, conformément aux principes et aux traditions de l'Union, de nombreux États membres, en coopération avec les partenaires sociaux, ont mis en place, en matière de conditions de travail, des normes élevées qui améliorent le bien-être de tous les travailleurs et stimulent la croissance économique ainsi que la compétitivité;

12.  estime que l'intention du législateur dans les directives sur le détachement et sur les services est incompatible avec des interprétations qui sont de nature à encourager les entreprises à se livrer une concurrence déloyale; relève que les entreprises qui signent et appliquent des conventions collectives pourraient être défavorisées, en termes de concurrence, par rapport aux entreprises qui refusent de le faire;

13.  estime que l'application et l'observation correctes des dispositions de la directive sur le détachement sont essentielles pour garantir la réalisation de ses objectifs, à savoir: faciliter la fourniture de services tout en garantissant la protection appropriée des travailleurs, et respecter totalement les accords sur les conventions collectives existant dans les États membres dans lesquels des travailleurs sont détachés dans le cadre de cette directive;

14.  estime également que la libre prestation des services transfrontaliers sur le marché intérieur se trouve renforcée dès lors que les prestataires de services nationaux et étrangers se voient garantir des conditions similaires, sur le plan économique et sur le marché du travail, sur le lieu où les services sont prestés;

15.  encourage activement une compétitivité fondée sur la connaissance et l'innovation, comme le prévoit la stratégie de Lisbonne;

16.  conteste l'introduction d'un principe de proportionnalité pour les actions menées à l'encontre d'entreprises qui, en se prévalant du droit d'établissement ou du droit de prester des services transfrontaliers, s'attaquent délibérément aux conditions d'emploi; estime que l'on ne saurait remettre en cause le recours à une action collective pour défendre l'égalité de traitement et garantir des conditions de travail décentes;

17.  souligne que les libertés économiques de l'Union ne sauraient être interprétées de manière à accorder aux entreprises le droit de se soustraire ou de contourner les lois et les pratiques nationales dans le domaine social et en matière d'emploi, ou bien d'imposer une concurrence déloyale jouant sur les salaires et les conditions de travail; estime par conséquent que les activités transfrontalières des entreprises qui pourraient porter atteinte aux conditions d'emploi dans le pays d'accueil doivent être proportionnées et ne sauraient être justifiées automatiquement par les dispositions du traité CE relatives, par exemple, à la libre circulation des services ou à la liberté d'établissement;

18.  souligne que le droit communautaire doit respecter le principe de non-discrimination; souligne en outre que le législateur communautaire doit veiller à ce qu'il ne soit pas mis d'obstacles à la conclusion de conventions collectives, visant par exemple à mettre en œuvre le principe "à travail égal, salaire égal" pour tous les travailleurs sur le lieu de travail, indépendamment de leur nationalité ou de celle de leur employeur, sur le lieu où le service est presté, ou à la conduite d'actions syndicales à l'appui d'un tel accord, conformément à la législation ou à la pratique nationale;

19.  reconnaît que les arrêts rendus par la CJCE dans les affaires Laval, Rüffert et Luxembourg, précités, ont engendré de vives inquiétudes quant à la manière d'interpréter les directives d'harmonisation minimale;

20.  constate que les considérations sociales visées aux articles 26 et 27 de la directive sur les marchés publics permettent aux États membres de créer des conditions de concurrence loyale en fixant des conditions d'emploi qui vont au-delà des règles obligatoires de protection minimale;

21.  est d'avis que la base juridique limitée sur laquelle la directive sur le détachement se fonde, pour ce qui est de la libre circulation, peut conduire à ce que ladite directive soit interprétée comme une invitation expresse à pratiquer une concurrence déloyale jouant sur les salaires et les conditions de travail; estime dès lors que la base juridique de la directive sur le détachement pourrait être élargie pour inclure une référence à la libre circulation des travailleurs;

22.  souligne que la situation actuelle pourrait donc conduire à ce que les travailleurs dans les pays d'accueil se sentent soumis aux pressions de la concurrence des bas salaires; estime par conséquent qu'il faut veiller à ce que la directive sur le détachement soit appliquée de manière cohérente dans tous les États membres;

23.  rappelle que neuf États membres ont ratifié la convention n° 94 de l'OIT; déplore que même la jurisprudence ne tienne pas suffisamment compte de la convention n° 94 de l'OIT et se dit préoccupé du fait que l'application de ladite convention dans les États membres concernés pourrait aller à l'encontre de la mise en œuvre de la directive sur le détachement; demande à la Commission de clarifier d'urgence cette situation et de continuer à promouvoir la ratification de cette convention afin d'améliorer encore le développement de clauses sociales dans les règles régissant les marchés publics, ce qui constitue en soi un objectif de la directive sur les marchés publics;

24.  relève qu'il n'a pas été tenu compte du fait que, en vertu des conventions n° 87 et n° 98 de l'OIT, des restrictions au droit de mener une action collective et aux droits fondamentaux ne peuvent être justifiées que par des motifs de santé, d'ordre public et d'autres considérations similaires;

Demandes

25.  demande à tous les États membres d'appliquer comme il se doit la directive sur le détachement; souligne en outre que la législation régissant le marché du travail et les règles en matière de négociations et de conventions collectives relèvent de la compétence des États membres et des partenaires sociaux; fait observer, à cet égard, qu'il appartient aux États membres d'améliorer et d'utiliser pleinement les mesures de prévention, de contrôle et d'application, conformément au principe de subsidiarité;

26.  estime que la législation communautaire en vigueur présente des lacunes et des incohérences et qu'elle peut dès lors prêter à des interprétations de la directive sur le détachement qui ne correspondent pas à l'intention du législateur communautaire, lequel a cherché à établir un juste équilibre entre la libre prestation des services et la protection des droits des travailleurs; demande à la Commission d'élaborer les propositions législatives nécessaires, qui contribueraient à prévenir tout conflit d'interprétation à l'avenir;

27.  se félicite dès lors de la déclaration du 3 avril 2008, dans laquelle la Commission s'engage non seulement à continuer à lutter contre la concurrence fondée sur le dumping social, mais souligne également que la libre prestation des services ne l'emporte en aucune façon sur les droits fondamentaux de faire grève et de s'affilier à un syndicat et ne s'y oppose pas; préconise de donner effet sans tarder aux conclusions du Conseil du 9 juin 2008 pour remédier aux carences dans la mise en œuvre de la législation en vigueur, prévenir l'apparition d'autres situations problématiques et abus et créer le climat souhaité de confiance mutuelle; demande à la Commission et aux États membres de promouvoir une coopération plus étroite entre les États membres, les autorités nationales et la Commission en matière de suivi et d'échange de bonnes pratiques; estime que cela constituerait un moyen efficace de lutter contre les abus;

28.  note qu'il importe que les règles sur le marché de l'emploi de l'Union européenne soient transparentes et équivalentes pour tous, mais aussi que la diversité des traditions politiques rend très difficile la création d'un modèle unique du marché de l'emploi; considère dès lors que si certains États membres sont particulièrement affectés, une analyse d'impact circonstanciée des arrêts précités devrait être effectuée au niveau national, en concertation avec les partenaires sociaux;

29.  se félicite du fait que la Commission a indiqué qu'elle était maintenant prête à réexaminer l'impact du marché intérieur sur les droits du travail et les négociations collectives;

30.  suggère que ceci n'exclue pas une révision partielle de la directive sur le détachement. Toute révision de cette directive devrait intervenir après une analyse approfondie au niveau national des véritables défis auxquels sont confrontés les différents modèles de négociation collective. La révision, si elle est jugée utile, devrait porter notamment sur des questions telles que les conditions de travail applicables, aux taux de rémunération, au principe de l'égalité de traitement des travailleurs dans le contexte de la libre circulation des services, au respect des différents modèles de travail et à la durée du détachement;

31.  estime que l'exercice des droits fondamentaux reconnus dans les États membres, dans les conventions de l'OIT et dans la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, y compris le droit de négocier, de conclure et d'appliquer des conventions collectives et le droit de mener des actions syndicales, ne saurait être remis en question;

32.  souligne qu'il doit être absolument clair que la directive sur le détachement et les autres directives n'empêchent pas les États membres et les partenaires sociaux d'exiger des conditions plus favorables, visant à garantir l'égalité de traitement des travailleurs, et qu'il existe des garanties quant à la possibilité d'appliquer la législation communautaire sur la base de tous les modèles de marché du travail existants;

33.  demande à la Commission d'appliquer d'urgence les décisions du Conseil concernant la mise en place d'un système électronique d'échange d'informations, sachant que cela permettrait aux États membres de lutter plus efficacement contre les abus;

34.  demande aux États membres et à la Commission de prendre des mesures pour lutter contre les abus, en particulier en ce qui concerne les activités des sociétés "boîtes aux lettres" qui n'exercent aucune activité véritable et effective dans le pays d'établissement mais ont été créées, parfois même directement par l'entrepreneur principal dans le pays d'accueil, à la seule fin d'opérer dans le pays d'accueil pour se soustraire à l'application pleine et entière des règles et réglementations de ce pays, notamment en ce qui concerne les salaires et les conditions de travail; demande à la Commission d'établir, dans son code de conduite pour les entreprises dans le cadre de la directive sur les services, des règles claires pour lutter contre les sociétés "boîtes aux lettres";

35.  réaffirme que les droits sociaux fondamentaux ne passent pas après les droits économiques dans un ordre hiérarchisé des libertés fondamentales; demande dès lors que l'équilibre entre les droits fondamentaux et les libertés économiques soit réaffirmé dans le droit primaire pour contribuer à prévenir un nivellement par le bas des normes sociales;

36.  se félicite de la position commune arrêtée par le Conseil sur une nouvelle directive relative au travail intérimaire, qui prévoierait l'application d'un traitement non discriminatoire dès le premier jour d'une mission, à moins que les partenaires sociaux n'en décident autrement;

37.  demande à la Commission de présenter la communication tant attendue sur la négociation collective transnationale, proposant l'instauration d'un cadre légal pour les conventions collectives transnationales;

o
o   o

38.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission, ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres.

(1) JO L 18 du 21.1.1997, p. 1.
(2) JO L 134 du 30.4.2004, p. 114.
(3) JO L 337 du 12.12.1998, p. 8.
(4) JO L 376 du 27.12.2006, p. 36.
(5) Recueil. 1990, p. I-1470.
(6) Recueil. 1994, p. I-3803.
(7) Recueil. 1999, p. I-8453.
(8) Recueil. 2001, p. I-7831.
(9) Recueil. 2002, p. I-1425.
(10) Recueil. 2004, p. I-9553.
(11) Recueil. 2004, p. I-10191.
(12) Recueil. 2006, p. I-885.
(13) Recueil. 2007, p. I-10779.
(14) Recueil. 2007, p. I-11767.
(15) Non encore publié au Recueil.
(16) JO C 313 E du 20.12.2006, p. 452.
(17) JO C 92 E du 16.4.2004, p. 404.
(18) JO C 102 E du 24.4.2008, p. 321.
(19) Textes adoptés de cette date, P6_TA(2007)0574.
(20) Recueil 1999, p. I-5751.

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