Résolution du Parlement européen du 18 décembre 2008 sur l'impact de la contrefaçon sur le commerce international (2008/2133(INI))
Le Parlement européen,
— vu le rapport de 2007 de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) intitulé "L'impact économique de la contrefaçon et du piratage",
— vu la communication de la Commission du 10 novembre 2005, intitulée "Mise en œuvre du programme communautaire de Lisbonne – Une politique des PME moderne pour la croissance et l'emploi" (COM(2005)0551),
— vu la communication de la Commission du 4 octobre 2006, intitulée "Une Europe compétitive dans une économie mondialisée – Une contribution à la stratégie européenne pour la croissance et l'emploi" (COM(2006)0567),
— vu la communication de la Commission du 18 avril 2007, intitulée "L'Europe dans le monde: un partenariat renforcé pour assurer aux exportateurs européens un meilleur accès aux marchés extérieurs" (COM(2007)0183),
— vu sa résolution du 19 février 2008 sur la stratégie de l'UE pour assurer aux entreprises européennes un meilleur accès aux marchés extérieurs(1),
— vu sa résolution du 22 mai 2007 sur l'Europe mondialisée: aspects extérieurs de la compétitivité(2),
— vu sa résolution du 5 juin 2008 sur des règles et procédures efficaces d'importation et d'exportation au service de la politique commerciale(3),
— vu sa résolution du 1er juin 2006 sur les relations économiques transatlantiques UE-États-Unis(4),
— vu sa résolution du 12 octobre 2006 sur les relations économiques et commerciales entre l'UE et le Mercosur en vue de la conclusion d'un accord d'association interrégional(5),
— vu sa résolution du 13 décembre 2007 sur les relations économiques et commerciales avec la Corée(6),
— vu sa résolution du 8 mai 2008 sur les relations commerciales et économiques avec l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE)(7),
— vu sa résolution du 13 octobre 2005 sur les perspectives des relations commerciales entre l'Union européenne et la Chine(8),
— vu la communication de la Commission du 24 octobre 2006, intitulée "UE – Chine: rapprochement des partenaires, accroissement des responsabilités " (COM(2006)0631) et le document de travail qui l'accompagne, intitulé "Un partenariat renforcé, des responsabilités accrues – Document stratégique sur le commerce et les investissements UE–Chine: concurrence et partenariat" (COM(2006)0632),
— vu le règlement (CE) n° 3286/94 du Conseil du 22 décembre 1994 arrêtant des procédures communautaires en matière de politique commerciale commune en vue d'assurer l'exercice par la Communauté des droits qui lui sont conférés par les règles du commerce international, en particulier celles instituées sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce (OMC)(9) (règlement sur les obstacles au commerce),
— vu la communication de la Commission du 16 juillet 2008, intitulée "Une stratégie dans le domaine des droits de propriété industrielle pour l'Europe" (COM(2008)0465),
— vu la communication de la Commission du 21 février 2001, intitulée "Programme d'action: accélération de la lutte contre le VIH/SIDA, le paludisme et la tuberculose dans le cadre de la réduction de la pauvreté" (COM(2001)0096),
— vu la communication de la Commission du 26 février 2003, intitulée "Actualisation du programme d'action communautaire – Accélération de la lutte contre le VIH/SIDA, le paludisme et la tuberculose dans le cadre de la réduction de la pauvreté" – Questions politiques en suspens et défis futurs (COM(2003)0093),
— vu la communication de la Commission du 26 octobre 2004, intitulée "Élaboration d'un cadre politique européen cohérent pour les actions extérieures visant à lutter contre le VIH/SIDA, le paludisme et la tuberculose" (COM(2004)0726),
— vu le règlement (CE) n° 816/2006 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2006 concernant l'octroi de licences obligatoires pour des brevets visant la fabrication de produits pharmaceutiques destinés à l'exportation vers des pays connaissant des problèmes de santé publique(10),
— vu le règlement (CE) n° 980/2005 du Conseil du 27 juin 2005 portant application d'un schéma de préférences tarifaires généralisées(11) (règlement SPG),
— vu le rapport de la Commission du 19 mai 2008 sur l'activité des douanes communautaires en matière de lutte contre la contrefaçon et le piratage – Résultats à la frontière européenne 2007,
— vu le règlement (CE) n° 450/2008 du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 établissant le code des douanes communautaire (code des douanes modernisé)(12),
— vu la communication de la Commission du 1er avril 2008 intitulée "Une stratégie pour l'avenir de l'union douanière" (COM(2008)0169),
— vu la proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux mesures pénales visant à assurer le respect des droits de propriété intellectuelle, du 26 avril 2006 (COM(2006)0168),
— vu sa résolution du 19 juin 2008 sur le quarantième anniversaire de l'Union douanière(13),
— vu la directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle(14),
— vu le règlement (CE) n°1383/2003 du Conseil du 22 juillet 2003 concernant l'intervention des autorités douanières à l'égard de marchandises soupçonnées de porter atteinte à certains droits de propriété intellectuelle ainsi que les mesures à prendre à l'égard de marchandises portant atteinte à certains droits de propriété intellectuelle(15),
— vu l'article 45 de son règlement,
— vu le rapport de la commission du commerce international ainsi que les avis de la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs et de la commission des affaires juridiques (A6-0447/2008),
A. considérant qu'il convient de lutter efficacement contre le phénomène de la contrefaçon pour réaliser les objectifs de l'agenda de Lisbonne renouvelé, qu'il s'agisse de la dimension intérieure ou des aspects extérieurs, comme indiqué par la Commission dans sa communication du 18 avril 2007 précitée,
B. considérant que l'Union est le deuxième importateur mondial de biens et de services et que son marché unique, largement ouvert et transparent, offre d'importantes possibilités mais se trouve également exposé à un véritable risque d'invasion de produits contrefaits,
C. considérant que l'économie de l'Union s'est spécialisée dans les productions de grande qualité à forte valeur ajoutée, souvent protégées par des marques, des brevets ou des indications géographiques et qui, par essence, comptent parmi celles qui sont le plus exposées à la contrefaçon,
D. considérant que les graves violations des droits de propriété intellectuelle (DPI) constituent des barrières commerciales non tarifaires qui rendent plus difficile et onéreux l'accès aux marchés extérieurs, en particulier pour les petites et moyennes entreprises (PME) qui disposent de moyens et de ressources limités,
E. considérant que la compétitivité européenne dépend traditionnellement de la qualité de la main-d'œuvre et de plus en plus souvent, surtout pour les PME, de la recherche et du développement, de l'innovation et des DPI,
F. considérant que les DPI, y compris les indications géographiques et les dénominations d'origine, ne sont pas toujours efficacement protégés par les partenaires commerciaux de l'Union,
G. considérant que les types de produits contrefaits sont nombreux et en augmentation, qu'ils ne se limitent plus aux produits de luxe et de grande qualité mais qu'ils englobent également les produits d'usage courant tels que les jouets, les médicaments, les cosmétiques et les produits alimentaires,
H. considérant qu'une récente étude de l'OCDE a estimé que le commerce international né des violations des DPI s'établissait à 150 milliards d'euros en 2005, auxquels il convient d'ajouter la valeur des transactions nationales et les produits contrefaits ou piratés distribués sur Internet,
I. considérant que, en 2007, le volume des biens contrevenant aux DPI saisis par les autorités douanières de l'Union a enregistré une progression de 17 % sur un an, cette augmentation étant de 264 % pour les cosmétiques et les produits d'hygiène personnelle, de 98 % pour les jouets et de 51 % pour les médicaments,
J. considérant que le phénomène de la contrefaçon et du piratage a des répercussions dramatiques sur l'économie de l'Union et sur l'ensemble du système socioéconomique communautaire, dès lors qu'il réduit l'incitation à l'innovation, freine les investissements directs étrangers, fait disparaître des emplois qualifiés dans l'industrie et jette les bases d'une économie clandestine contrôlée par le crime organisé, parallèle au système officiel,
K. considérant que le rapport de l'OCDE de 2007 précité et le prochain rapport (phase II) de cette même organisation sur "le piratage de contenus numériques" mettent en exergue la dimension mondiale, la croissance rapide et les incidences économiques préjudiciables du piratage numérique sur les titulaires de droits,
L. considérant que la contrefaçon occasionne de graves problèmes environnementaux, tant par l'absence d'adéquation des normes qualitatives des produits contrefaits que par les coûts élevés générés par leur élimination et leur destruction,
M. considérant que l'accès aux procédures visant à lutter contre les produits contrefaits est compliqué, onéreux et long, notamment pour les PME,
N. considérant que le marché unique garantit au consommateur européen la possibilité de choisir librement, de manière transparente et sûre les produits qu'il achète et que la contrefaçon, si elle n'est pas combattue correctement, peut nuire non seulement au principe de confiance sur lequel se fonde l'ensemble du système, mais aussi constituer une grave menace pour la sécurité, la santé, et dans des cas extrêmes, la vie même des consommateurs, et que, dans ces conditions, il convient de mieux protéger les droits de ceux-ci,
O. considérant que les initiatives visant à sensibiliser les consommateurs aux risques qu'ils encourent en termes de santé et de sécurité, ainsi que, de manière générale, aux conséquences de l'achat de produits contrefaits, sont des instruments efficaces pour lutter contre la contrefaçon,
P. considérant que des mesures plus sévères doivent être prises à l'encontre des contrefacteurs de produits ayant un impact direct sur la santé publique,
Q. considérant que les différences qui demeurent dans les législations des États membres en matière de DPI, notamment en ce qui concerne les mesures pénales visant à faire respecter ces droits, affaiblissent la position de négociation de l'Union et peuvent saper les efforts accomplis jusqu'à présent pour combattre de manière plus efficace la contrefaçon à l'échelle internationale,
R. considérant que la procédure simplifiée prévue à l'article 11 du règlement (CE) nº 1383/2003, qui autorise rapidement la destruction d'importantes quantités de produits contrefaits, et ce à un coût relativement faible, a rencontré un franc succès dans les États membres tels que le Portugal, la Grèce, la Hongrie, les Pays-Bas et la Lituanie,
S. considérant que le sommet du G8 de Saint-Pétersbourg en 2006 a reconnu le caractère mondial du problème de la contrefaçon et du piratage et insisté sur la nécessité de renforcer la coopération entre les pays du G8, les pays tiers et les organisations internationales compétentes,
T. considérant que le sommet suivant du G8 à Heiligendamm a, dans le cadre du processus du même nom(16), créé un groupe d'experts sur les DPI consacré à la lutte contre la contrefaçon et le piratage,
U. considérant que, en 2007, l'Union européenne, le Japon et les États-Unis ont annoncé l'ouverture de négociations en vue de finaliser un nouvel accord multilatéral tendant à améliorer la mise en œuvre des DPI et à lutter contre le phénomène de la contrefaçon et du piratage (accord commercial anti-contrefaçon – ACAC),
V. considérant qu'une conclusion positive de l'ACAC permettra de définir des normes communes de protection civile et administrative, d'améliorer la coopération tant interinstitutionnelle qu'avec le secteur privé, et d'intégrer des projets d'assistance technique, afin de simplifier, de sécuriser et de rendre moins onéreux le respect des DPI,
W. considérant qu'il est nécessaire d'établir une distinction entre les médicaments génériques, dont il convient d'encourager la diffusion et la vente aussi bien au sein de l'Union que dans les pays en développement, et les médicaments contrefaits qui, d'une part, constituent un danger pour la santé publique et qui, d'autre part, sont à l'origine d'importantes pertes économiques pour les entreprises du secteur, tout en étant de nature à retarder la mise au point de nouveaux produits, sans pour autant profiter aux populations des pays les moins développés; considérant, par ailleurs, que les médicaments contrefaits ne représentent qu'une partie des médicaments illégaux,
X. considérant que pour les produits ayant un impact direct sur la santé publique, Internet et les réseaux de distribution parallèles contribuent fortement à la diffusion de produits contrefaits dangereux pour la santé publique,
Y. considérant que l'Union poursuit actuellement ses efforts tendant à harmoniser les mesures d'application des DPI, notamment avec la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux mesures pénales visant à assurer le respect des droits de propriété intellectuelle, du 12 juillet 2005 (COM(2005)0276), et que ce processus ne devrait pas être mis à mal par des négociations commerciales qui ne relèvent pas du champ d'application du processus décisionnel normal de l'Union,
Z. considérant qu'il est également crucial de veiller à ce que les mesures d'application des DPI soient mises en place sans faire obstacle à l'innovation ou à la concurrence, sans porter atteinte aux limitations et exceptions applicables aux DPI ni aux données à caractère personnel, sans limiter la libre circulation des informations et sans pénaliser de manière indue les échanges commerciaux légitimes,
AA. considérant que l'Union a fait preuve de sa volonté de mettre en œuvre les DPI de manière efficace et équilibrée en adoptant, dans ce domaine, un ensemble de directives qui fait suite à de nombreuses années d'examen approfondi par le Parlement et le Conseil,
AB. considérant qu'il est essentiel, au moment d'examiner des mesures juridiques, de reconnaître qu'il existe une différence de fond entre les droits relatifs à la propriété intellectuelle et ceux touchant à la propriété matérielle et, partant, entre violation des droits et vol,
AC. considérant que toute violation des droits de propriété intellectuelle nuit au commerce et aux entreprises, mais que les violations commises à une échelle commerciale ont des incidences plus graves et plus étendues,
AD. considérant qu'en ce qui concerne les brevets couvrant les produits pharmaceutiques, la violation de ceux-ci demande un examen au cas par cas sur la base des arguments de fond exposés dans le cadre d'une procédure civile pour violation de brevet, alors que les violations des droits d'auteur et des marques constituent des délits intentionnels,
Le cadre multilatéral
1. estime que le régime de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) vise à permettre une plus large reconnaissance des DPI au niveau international en prévoyant un niveau convenu de normes de protection au travers de l'accord relatif aux aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), un dialogue entre les États membres et divers organismes tels que l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) et l'Organisation mondiale des douanes (OMD), ainsi que la mise en place d'un mécanisme de prévention et de règlement des différends;
2. invite la Commission à continuer à œuvrer, au sein du Conseil des ADPIC, pour que les disciplines minimales transposées dans le droit national s'accompagnent de mesures d'application et de prévention efficaces en cas de violation; est d'avis qu'il y a lieu de préserver les flexibilités prévues par l'accord sur les ADPIC, confirmées par la déclaration de Doha sur l'accord sur les ADPIC et la santé publique, dès lors qu'elles visent à établir un juste équilibre entre les intérêts des titulaires de droits et ceux des utilisateurs finals;
3. demande à la Commission de présenter au Parlement des propositions visant à garantir que les opérations d'exportation, de transit et de transbordement sont dûment prises en compte dans l'accord sur les ADPIC et à examiner la possibilité d'apporter de nouvelles modifications à cet accord pour arriver à un juste équilibre entre les intérêts des titulaires et ceux des utilisateurs potentiels des DPI, tout en tenant compte notamment du niveau de développement des parties concernées et en établissant une distinction entre pays producteurs, pays de transit et pays d'utilisation des produits contrefaits ou piratés;
4. se félicite des progrès réalisés par l'Union dans les programmes d'assistance technique qui ont contribué à renforcer les DPI dans les pays émergents et les pays en développement, et rappelle l'importance de poursuivre ces programmes en raison des avantages qu'ils sont en mesure de procurer aussi bien en termes de développement économique durable qu'au regard du rôle éminent qu'ils jouent dans la lutte contre la contrefaçon;
5. demande à la Commission et aux États membres de mettre en œuvre, pour améliorer la diffusion de l'éducation des consommateurs en Europe et dans les pays en développement, des actions précises bénéficiant d'un financement approprié, et ce pour éviter les risques liés aux produits contrefaits potentiellement dangereux;
6. appuie les solutions proposées au sein de la XIIe session de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement au titre de son initiative "Afrique créative", dès lors qu'elles voient dans l'industrie de la créativité un puissant moteur de croissance pour les pays sous-développés, et réaffirme le rôle majeur de la protection intellectuelle dans le développement durable de ces régions;
7. demande à la Commission et aux États membres de proposer et d'appuyer la rédaction d'un protocole sur la contrefaçon, additionnel à la convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (convention de Palerme);
8. rappelle que, dans certaines économies émergentes, la production de biens contrefaits ou piratés a atteint des proportions alarmantes et fait observer que, même s'il se félicite des mesures de coopération mises en œuvre à ce jour, des actions particulières s'imposent pour renforcer la coordination entre les services des douanes, les organes judiciaires et les services de police avec les pays concernés, ainsi que pour favoriser l'harmonisation des législations nationales de ces pays avec le droit de l'Union;
9. demande à la Commission d'insérer, sur le modèle de l'article 3, paragraphe 2(17), de la directive 2004/48/CE, des sauvegardes destinées à garantir, au niveau international, que toute mesure additionnelle visant à faire respecter les brevets n'est pas utilisée de façon à constituer une entrave aux échanges commerciaux légitimes;
10. encourage la Commission et les États membres à renforcer leur coopération avec les pays partenaires euro-méditerranéens dans le cadre du programme EuroMed Marché et à promouvoir dans la région euro-méditerranéenne une approche commune de la législation, des procédures et de l'exécution concernant la coopération douanière et la lutte contre la contrefaçon et la piraterie afin de faciliter les échanges commerciaux entre les pays partenaires euro-méditerranéens;
11. est persuadé que le renforcement de la lutte contre la contrefaçon passe aussi par une saisine plus fréquente et ciblée de l'organe de règlement des différends de l'OMC, qui, avec les juridictions nationales et communautaires, est de nature à permettre une meilleure protection de l'industrie et des consommateurs européens grâce à la consolidation d'une jurisprudence renforçant le contenu et la portée de l'accord sur les ADPIC;
12. rappelle que toute harmonisation du droit matériel doit respecter la souveraineté nationale et les traités internationaux applicables en la matière;
ACAC et autres actions bilatérales et régionales de l'Union
13. demande à la Commission, parallèlement aux négociations multilatérales, de continuer à lutter contre la contrefaçon et le piratage en promouvant également des accords bilatéraux, régionaux et multilatéraux qui visent à rapprocher les législations et leur application et en prévoyant des mécanismes performants de règlement des différends ainsi qu'un régime de sanctions en cas de manquement aux obligations souscrites;
14. invite la Commission et les États membres à négocier l'ACAC dans des conditions maximales de transparence pour les citoyens européens, notamment en ce qui concerne la définition des termes "contrefaçon" et "piratage" ainsi que les sanctions pénales prévues; estime qu'il est impératif d'évaluer tant l'impact social de cet accord que ses conséquences sur les libertés civiles; soutient la mise en place d'un groupe opérationnel chargé d'examiner la mise en œuvre de l'accord, par la promotion de ce sujet dans le dialogue entre l'Union et les pays tiers et dans le cadre des actions de coopération avec ces pays;
15. estime qu'il n'est pas encore certain que le traité CE fournisse une base juridique pour les mesures communautaires établissant le type et le niveau des sanctions pénales et que, par conséquent, la Communauté pourrait ne pas disposer de la compétence nécessaire pour négocier, au nom de la Communauté, un accord international établissant la nature et le niveau des mesures pénales qui doivent être adoptées à l'encontre des personnes contrevenant à la législation sur les marques et les droits d'auteur;
16. souligne qu'il y a lieu, dans l'ensemble des accords envisagés destinés à faire respecter le droit de la propriété intellectuelle, d'établir une distinction entre l'utilisation privée dénuée de tout but lucratif et la commercialisation intentionnelle et frauduleuse de produits contrefaits ou piratés;
17. invite la Commission à négocier avec les pays tiers la mise en place d'équipes opérationnelles de lutte contre la contrefaçon;
18. demande à la Commission de veiller à ce que l'ACAC n'autorise pas les pouvoirs publics à accéder aux ordinateurs et autres équipements électroniques privés;
19. se félicite de l'intérêt croissant que de nombreux pays de l'OMC manifestent à l'égard de l'ACAC; estime qu'il y a lieu de s'efforcer d'associer aux négociations de l'accord les économies émergentes, notamment la Chine, l'Inde et le Brésil, ainsi que les blocs commerciaux régionaux que sont le Mercosur, la CARICOM et l'ANASE, en les invitant, dès aujourd'hui, à s'engager à faire respecter les DPI sur leurs territoires;
20. invite la Commission à veiller à ce que l'ACAC n'empiète pas sur l'accord sur les ADPIC et sur les autres traités internationaux relatifs aux DPI et qu'il ne les contredise pas;
21. demande à la Commission de veiller à ce que l'ACAC se concentre sur les mesures visant à faire respecter les DPI et pas sur les questions de fond liées à ces droits, notamment la portée de la protection, les limitations et les exceptions, la responsabilité subsidiaire et la responsabilité des intermédiaires;
22. demande à la Commission de veiller à ce que l'ACAC ne serve pas d'instrument tendant à modifier le cadre européen actuel d'application des DPI mais qu'il reflète pleinement l'équilibre établi par les différentes directives adoptées par le Parlement européen et le Conseil en la matière, et notamment la teneur du considérant 2 de la directive 2004/48/CE;
23. appelle la Commission et le Conseil à préciser le rôle et les attributions du comité de l'article 133 et des autres comités impliqués dans la négociation de l'ACAC;
24. estime que la Commission devrait, dans les négociations en cours, tenir compte de certaines critiques véhémentes formulées à l'encontre de l'ACAC, et notamment du fait que cet accord serait de nature à permettre aux titulaires de marques et de droits d'auteur de s'immiscer, sans procédure judiciaire régulière, dans la vie privée des prétendus contrevenants, qu'il pourrait également criminaliser les violations du droit d'auteur et des marques à des fins non commerciales, qu'il serait de nature à renforcer les technologies dédiées à la gestion des droits numériques au détriment du droit d''utilisation équitable", qu'il pourrait mettre en place un mécanisme de règlement des différends parallèle aux structures actuelles de l'OMC et, enfin, qu'il pourrait obliger l'ensemble des signataires à supporter les coûts liés au respect des droits d'auteur et à la contrefaçon de marques;
25. demande, dans ce contexte, à la Commission de veiller à mettre en place une procédure de consultation publique, continue et transparente, de promouvoir les avantages d'un tel processus auprès de l'ensemble des parties prenantes à la négociation et de veiller à ce que le Parlement soit régulièrement et pleinement informé de l'état d'avancement des négociations;
26. rappelle que le traité CE prévoit des dérogations pour la négociation et la conclusion d'accords relatifs aux aspects commerciaux de la propriété intellectuelle ayant trait au commerce des services culturels et audiovisuels; souligne que la négociation et la conclusion de ce type d'accords relèvent de la compétence partagée de la Communauté et de ses États membres; attire par ailleurs l'attention sur le fait que, outre une décision de la Communauté adoptée conformément aux dispositions pertinentes du traité CE, la négociation de ce type d'accords requiert l'accord de l'ensemble des États membres et que les accords ainsi négociés doivent être conclus conjointement par la Communauté et par les États membres;
27. rappelle à la Commission, dans le cadre des négociations de l'ACAC, l'existence de l'article 8 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, relatif à la protection des données personnelles, et de la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données(18);
28. est d'avis que l'article 4 du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2001 relatif à l'accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission(19) ne doit pas prévaloir sur l'intérêt public à la publication des travaux préparatoires de l'ACAC, y compris des rapports d'étape, et du mandat de négociation de la Commission, et invite instamment le Conseil à mettre en œuvre l'article 255 du traité CE de façon à garantir l'accès le plus large possible aux documents, pour autant que les mesures de sécurité obligatoires en matière de protection des données soient prises;
29. est au regret de constater que la protection des DPI en Turquie n'est toujours pas au niveau des normes de l'Union et qu'il y a donc lieu de la revoir; rappelle que la Turquie ne sera un candidat crédible à l'adhésion que si elle est en mesure de transposer l'acquis communautaire et de garantir le plein respect des DPI à l'intérieur de ses frontières;
Relations Union – Chine
30. invite les autorités chinoises à redoubler d'efforts et à poursuivre avec une vigueur accrue les personnes violant les droits de propriété intellectuelle et se félicite, dans ce contexte, du changement d'attitude des tribunaux qui viennent de reconnaître à des sujets de l'Union la qualité de titulaires de DPI sur le territoire chinois et de condamner des entreprises locales qui ont violé ces droits;
31. réaffirme la nécessité de développer la coopération avec les autorités douanières chinoises tout en garantissant une assistance et une aide de leurs homologues administratifs européens;
32. souligne que 60 % des produits contrefaits saisis par les autorités douanières de l'Union sont fabriqués en Chine et demande à la Commission de présenter dans les meilleurs délais, avec les autorités chinoises, un plan de lutte contre la contrefaçon;
Mesures d'appui extérieur dans la lutte contre la contrefaçon
33. préconise l'instauration d'un mécanisme efficace destiné à surveiller les violations éventuelles des DPI protégés par les divers accords, ce mécanisme étant couplé à des instruments d'incitation commerciale en cas d'engagement concret à lutter contre la contrefaçon et le piratage;
34. rappelle que le règlement SPG prévoit, entre autres, la possibilité d'une suspension temporaire des préférences pour les partenaires commerciaux qui recourent à des pratiques commerciales déloyales; estime que, dans des cas de violations particulièrement graves de la propriété intellectuelle, tels les cas constituant une grave menace pour la sécurité et la santé publique, la Commission devrait sérieusement réfléchir à recourir à cet instrument dissuasif;
35. estime que le règlement sur les obstacles au commerce peut être d'une grande aide pour les entreprises européennes qui rencontrent des problèmes d'accès aux marchés de pays tiers, imputables à des violations de la propriété intellectuelle, et invite la Commission à encourager et à faciliter son utilisation, notamment par les PME;
36. estime qu'une meilleure coopération entre l'Union et les États membres dans les pays tiers est de nature à renforcer l'efficacité des échanges d'informations, à permettre une meilleure utilisation des ressources disponibles et à accentuer l'impact des initiatives de lutte contre la contrefaçon, tant sur les plans politique et diplomatique qu'au niveau purement technique;
37. invite la Commission à faire des "équipes d'accès au marché" des délégations de l'Union un point de repère matériel pour les entreprises communautaires (surtout les PME) qui se plaignent de violations de la propriété intellectuelle;
Aspects législatifs et organisationnels
38. prend acte des efforts entrepris par la Commission pour renforcer les DPI dans l'Union et lui demande de s'investir davantage dans la lutte contre la contrefaçon et dans l'harmonisation des législations en vigueur dans les États membres;
39. fait observer qu'il n'existe pas, au sein de l'Union, une définition harmonisée des termes "contrefaçon" et "piratage" et que les définitions nationales divergent les unes des autres;
40. mesure l'évolution inquiétante du phénomène de la contrefaçon et du piratage, en particulier, dans une économie mondialisée, et sa gravité pour la compétitivité de l'Union, pour ses entreprises, ses créateurs et ses consommateurs; invite, dès lors, les États membres à informer suffisamment les consommateurs des dangers de la contrefaçon et du piratage, en particulier des risques considérables pour la santé et la sécurité que les produits contrefaits, entre autres les médicaments, font courir aux consommateurs;
41. demande à la Commission de se pencher plus spécialement sur les risques que fait courir la contrefaçon en termes de santé et de sécurité, afin d'évaluer la nécessité éventuelle de mesures additionnelles;
42. invite la Commission à déployer tous les efforts nécessaires pour convenir de sanctions minimales communes en cas de graves violations des DPI;
43. est convaincu que l'harmonisation des législations nationales actuelles en matière de lutte contre la contrefaçon s'impose pour garantir une application efficace et cohérente du futur ACAC;
44. insiste sur la nécessité de mieux coordonner, au sein de la Commission, les services chargés de lutter contre la contrefaçon et de multiplier les actions communautaires mises en œuvre par la Commission dans ce domaine, dès lors que la fragmentation des systèmes de sanctions nuit au marché intérieur et affaiblit l'Union dans ses négociations commerciales; insiste également sur la nécessité pour le secteur privé et le secteur public d'étendre leur coopération pour rendre la lutte contre la contrefaçon plus active, plus dynamique et plus efficace;
45. insiste sur la nécessité de développer des formations adaptées et continues s'adressant au personnel des services des douanes, aux magistrats et aux autres professionnels concernés, et d'inciter les États membres à constituer des équipes spécialisées dans la lutte contre la contrefaçon;
46. prend acte du fait que la Commission, dans son Livre blanc de juillet 2007 sur le sport, reconnaît que la viabilité économique de l'exploitation des droits relatifs au sport dépend de la disponibilité de moyens efficaces de protection contre les activités des contrevenants aux droits de propriété intellectuelle au niveau national et international, et invite à prendre en compte les titulaires de droits sportifs dans les différentes actions visant à lutter contre la contrefaçon et le piratage numérique;
47. encourage à perfectionner davantage et à mieux coordonner les procédures douanières au sein de l'Union pour limiter de manière substantielle l'entrée de produits contrefaits ou piratés dans le marché unique; appelle, en outre, la Commission à présenter au Parlement et au Conseil une proposition tendant à fournir à l'Union et à ses États membres des données statistiques, à l'échelle de l'Union, relatives à la contrefaçon;
48. appelle la Commission à prendre en compte les spécificités de l'utilisation du vecteur Internet dans la diffusion de produits contrefaits et à en mesurer l'impact sur l'économie des États membres en développant des outils statistiques à même de faciliter une réponse coordonnée;
49. demande à la Commission de mettre en place ou de faciliter la création d'un service d'assistance dédié aux PME, de préférence intégré dans une structure regroupant d'autres services, afin de fournir aux PME des conseils techniques sur les procédures à suivre en cas de produits contrefaits;
50. estime qu'il est primordial que l'industrie européenne ne retire pas son soutien et son aide aux actions que les institutions européennes mettront en œuvre; considère, en particulier, qu'il est essentiel que les PME bénéficient de conditions leur permettant de défendre efficacement leurs droits, notamment en cas de violation des DPI dans des pays tiers;
51. demande à la Commission et aux États membres d'encourager les initiatives visant à mieux sensibiliser les consommateurs aux conséquences de l'achat de produits contrefaits et souligne le rôle majeur que doivent jouer les entreprises dans ce contexte;
52. estime qu'il est nécessaire, à des fins de traçabilité, d'encourager les démarches de l'industrie visant à utiliser des technologies modernes pour mieux distinguer les produits originaux des produits contrefaits et demande à la Commission de faire le nécessaire pour pérenniser et favoriser toute démarche constructive en ce sens;
53. invite instamment les États membres qui n'ont pas encore transposé la directive 2004/48/CE à le faire sans retard;
54. souligne la nécessité de respecter les quatre libertés fondamentales du marché intérieur et d'améliorer son fonctionnement;
55. invite la Commission à collecter des données auprès des États membres concernant les problèmes de santé qu'ont connus des consommateurs à cause de produits contrefaits et les plaintes de consommateurs concernant des produits contrefaits; invite la Commission à veiller à ce que les autorités de tous les États membres aient accès à ces données;
56. insiste à cet égard sur la nécessité d'une mobilisation de tous les acteurs concernés pour renforcer l'efficacité des instruments de lutte contre la contrefaçon et le piratage dans le marché intérieur;
57. invite les États membres à renforcer leurs effectifs douaniers sur leur territoire national et à mettre en place un service, identifiable pour les tiers (États membres, pays tiers, institutions communautaires, entreprises et particuliers entre autres), chargé de la lutte contre la contrefaçon et de l'information sur ce problème;
58. rappelle aux États membres l'importance de disposer d'un brevet communautaire et d'un système juridictionnel pour les brevets comme moyen de faire respecter les droits de propriété intellectuelle des utilisateurs dans l'ensemble de l'Union, et de permettre ainsi aux entreprises innovantes de protéger le plus possible leurs inventions et d'en tirer profit au mieux;
59. invite les États membres à renforcer la sensibilisation et l'information dans la lutte contre la contrefaçon et le piratage dans les zones touristiques, ainsi que sur les salons professionnels et les foires;
60. attire l'attention sur l'importance de l'harmonisation des DPI et des brevets nationaux et communautaires existants dans la lutte contre la contrefaçon, et invite les États membres à encourager les entreprises à protéger leurs services et produits en déposant leurs marques, dessins, brevets, etc., afin de pouvoir mieux faire respecter leurs DPI;
61. invite la Commission à mettre au point un tableau de bord permettant de mesurer la performance des services des douanes des États membres afin de renforcer la lutte contre la contrefaçon, et à mettre en place un réseau d'échange rapide d'informations sur les produits contrefaits, en s'appuyant sur des points de contacts nationaux et sur des outils modernes d'échange d'informations;
62. invite les États membres à renforcer la coordination entre leurs services de douanes et à appliquer de façon uniforme dans l'Union les règles communautaires en matière de droits douaniers;
63. invite les États membres à élaborer, de concert avec la Commission, une stratégie commune pour la destruction des produits contrefaits;
64. demande à la Commission de promouvoir, dans l'ensemble des États membres, la mise en œuvre de la procédure simplifiée prévue à l'article 11 du règlement (CE) n° 1383/2003;
65. fait en outre remarquer que certaines des principales caractéristiques de la contrefaçon (imitation de produits/violation de marques commise à une échelle commerciale) diffèrent de celles de la piraterie (violation des droits d'auteur à une échelle commerciale), et qu'il conviendrait d'envisager de les traiter de façon indépendante et séparée, eu égard, notamment, à la nécessité urgente d'agir en vue de remédier aux problèmes de santé et de sécurité publiques, qui sont plus importants dans le cas de la contrefaçon;
66. adhère, s'agissant du domaine de la santé publique, à la définition des médicaments contrefaits donnée par l'Organisation mondiale de la santé: médicaments qui "sont étiquetés frauduleusement de manière délibérée pour en dissimuler la nature et/ou la source. La contrefaçon peut concerner aussi bien des produits de marque que des produits génériques, et les médicaments contrefaits peuvent comprendre des produits qui contiennent les principes actifs authentiques mais un emballage imité, ou d'autres principes actifs, aucun principe actif ou des principes actifs en quantité insuffisante.";
67. souligne qu'il est important, lors de l'adoption de mesures de lutte contre la contrefaçon et le piratage, de respecter les droits fondamentaux tels que la protection de la vie privée et des données;
Considérations finales
68. invite la Commission, en association avec le Conseil et les États membres, à définir une ligne politique claire, cohérente et ambitieuse qui, parallèlement aux actions internes dans le domaine douanier, coordonne et oriente les actions "extérieures" de l'Union et des États membres dans la lutte contre la contrefaçon et le piratage;
69. invite la Commission à encourager des actions complémentaires aux normes législatives et notamment à développer, en Europe, la sensibilisation aux dangers de la contrefaçon de manière à favoriser un changement de perception du public par rapport au phénomène de la contrefaçon et du piratage;
70. estime que la Commission devrait réfléchir à mettre en place un tableau d'affichage international de la contrefaçon qui, calqué sur le tableau d'affichage du marché intérieur, pourrait mettre en évidence les pays qui sont à la traîne dans la lutte contre la contrefaçon;
71. invite instamment le Conseil et la Commission à conférer au Parlement un rôle plus central dans la lutte contre la contrefaçon; juge, en particulier, opportun que l'Union affirme sa présence politique aussi bien dans les réunions internationales spécialisées comme le Congrès mondial sur la lutte contre la contrefaçon et le piratage qu'au sein des organisations internationales œuvrant pour la protection de la propriété intellectuelle;
72. invite la Commission et le Conseil à le tenir pleinement informé des différentes actions dans ce domaine et à l'y associer; estime que, conformément à l'esprit du traité de Lisbonne, l'ACAC devrait être ratifié par le Parlement européen au titre de la procédure d'avis conforme;
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73. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres et des pays candidats.
L'article 3, paragraphe 2, dispose que "Les mesures, procédures et réparations doivent également être effectives, proportionnées et dissuasives et être appliquées de manière à éviter la création d'obstacles au commerce légitime et à offrir des sauvegardes contre leur usage abusif".