Résolution du Parlement européen du 18 décembre 2008 contenant des recommandations à la Commission sur la protection juridique des adultes: implications transfrontalières (2008/2123(INI))
Le Parlement européen,
— vu l'article 192, deuxième alinéa, du traité CE,
— vu la convention de la Haye du 13 janvier 2000 sur la protection internationale des adultes,
— vu la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, du 13 décembre 2006,
— vu la proposition de décision du Conseil sur la conclusion, par la Communauté européenne, de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées (COM(2008)0530),
— vu la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen du 10 mai 2005 intitulée "Le programme de La Haye: dix priorités pour les cinq prochaines années. Un partenariat pour le renouveau européen dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice" (COM(2005)0184),
— vu les articles 39 et 45 de son règlement,
— vu le rapport de la commission des affaires juridiques et l'avis de la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures (A6-0460/2008),
A. considérant que, dans le cadre de sa communication précitée sur le programme de la Haye, la Commission a fait valoir au titre de ses priorités la nécessité de garantir un véritable espace européen dans le cadre de la justice civile, et notamment en ce qui concerne la reconnaissance et l'exécution des décisions judiciaires,
B. considérant les travaux et les consultations effectués dans ce cadre sur les décisions concernant le patrimoine familial, les successions et les testaments, en vue de préparer de nouvelles propositions législatives,
C. considérant la nécessité de favoriser également la reconnaissance et l'exécution des décisions judiciaires ou administratives prises à l'égard de personnes faisant l'objet de mesures de protection,
D. considérant l'attention à accorder aux situations, caractérisées par la fragilité et la vulnérabilité, des personnes faisant l'objet de mesures de protection, ainsi que la nécessaire célérité à apporter dans le traitement des demandes de coopération, d'information ou de reconnaissance et d'exécution,
E. considérant le développement des situations où la mise en œuvre d'une protection juridique concerne deux États membres ou plus,
F. considérant également le développement des situations dans lesquelles la question de la protection juridique concerne au moins deux États membres et concerne des États membres et des pays tiers, en particulier à cause des flux migratoires traditionnels (anciennes colonies, États-Unis et Canada),
G. considérant que des problèmes ont surgi à cause de la circulation croissante entre les États membres qui connaissent un flux migratoire net négatif des personnes retraitées, parmi lesquelles des personnes vulnérables, et les États membres où affluent ces personnes retraitées,
H. considérant que, dans la recommandation du Conseil de l'Europe n° R (99) 4 du Comité des ministres aux États membres sur les principes concernant la protection juridique des majeurs incapables, adoptée le 23 février 1999, tous les États membres de l'Union européenne se sont accordés sur la nécessité d'une protection juridique des adultes vulnérables ainsi que sur les principes régissant une telle protection,
I. considérant que la protection juridique des adultes vulnérables doit constituer un pilier du droit des personnes à circuler librement,
J. considérant les disparités existant entre les législations des États membres dans le domaine des mesures de protection,
K. considérant qu'il convient d'avoir à l'esprit les dispositions de la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées,
L. considérant que les dispositions de la convention de la Haye sont à même de participer à l'objectif d'instaurer un espace de justice, de liberté et de sécurité, en facilitant la reconnaissance et l'exécution des décisions prononçant une mesure de protection, la détermination de la loi applicable et la coopération entre autorités centrales,
M. considérant qu'il serait opportun de mettre en œuvre des mesures spécifiques et appropriées de coopération entre États membres, qui pourraient s'appuyer sur les outils mis à disposition par cette convention,
N. considérant que des formulaires communautaires uniques pourraient être mis en place afin de favoriser l'information sur les décisions de protection ainsi que la circulation, la reconnaissance et l'exécution de ces décisions,
O. considérant qu'un formulaire unique pourrait être créé à l'échelle de l'Union dans le cas des mandats d'inaptitude, afin de garantir qu'ils sont effectifs dans tous les États membres,
P. considérant que des mécanismes pourraient être introduits pour faciliter la reconnaissance, l'enregistrement et l'utilisation des mandats permanents ("lasting powers of attorney") dans l'ensemble de l'Union,
1. salue l'engagement de la présidence française vis-à-vis de la situation des adultes vulnérables et de leur protection juridique transfrontalière; félicite les États membres qui ont signé et ratifié la convention de La Haye et encourage les États membres qui ne l'ont pas encore signée ou ratifiée à le faire;
2. demande à la Commission de lui présenter, sur la base de l'article 65 du traité CE, et dès qu'une expérience suffisante du fonctionnement de la convention de La Haye aura été acquise, une proposition législative visant à renforcer la coopération entre États membres ainsi qu'à améliorer la reconnaissance et l'exécution des décisions sur la protection des adultes ainsi que les mandats d'inaptitude et les mandats permanents ("lasting powers of attorney"), conformément aux recommandations détaillées exposées ci-après;
3. demande à la Commission de suivre la mise en œuvre de la convention de La Haye et son application dans les États membres et de soumettre en temps utile au Parlement et au Conseil un rapport répertoriant les problèmes rencontrés et les meilleures pratiques observées dans son application pratique et qui pourrait, si nécessaire, contenir des propositions de mesures communautaires complétant ou précisant la manière d'appliquer la convention;
4. invite la Commission à évaluer la possibilité pour la Communauté d'adhérer à la convention de La Haye; suggère de faire de cette thématique un domaine de coopération renforcée entre les États membres;
5. invite tous les États membres qui ne l'ont pas encore signée ou ratifiée à adhérer à la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, dans la mesure où cela permettrait d'améliorer la protection des adultes vulnérables dans l'Union;
6. demande à la Commission de financer une étude comparant les législations des États membres relatives aux adultes vulnérables et les mesures de protection mises en place par eux afin de déceler les problèmes juridiques qui pourraient se poser, et de définir les mesures qui seront nécessaires au niveau de l'Union ou des États membres pour résoudre ce type de problèmes; estime que cette étude devrait traiter également la question des adultes placés en institution et souffrant de handicaps mentaux en ce qui concerne leur tutelle et leur capacité à exercer leurs droits juridiques; invite la Commission à organiser une série de conférences s'adressant aux juristes professionnels directement concernés par ce type de questions et à tenir compte des résultats de l'étude ainsi que de l'opinion des professionnels dans l'élaboration de la future législation;
7. invite les États membres à s'assurer que les mesures de protection soient proportionnées à la condition des adultes vulnérables concernés, de manière à éviter que des citoyens de l'Union ne soient déchus d'un droit légal alors qu'ils sont toujours aptes à l'exercer;
8. invite les États membres à prendre des mesures pour protéger les adultes vulnérables contre les vols d'identité ou les fraudes et autres délits téléphoniques et la cybercriminalité, y compris des mesures juridiques pour améliorer la protection des données à caractère personnel des adultes vulnérables et/ou limiter l'accès à celles-ci;
9. soutient la création de mécanismes sûrs, soumis à des règles solides de protection des données à caractère personnel et des règles de limitation d'accès, pour l'échange entre les États membres des meilleures pratiques et d'autres informations relatives aux mesures de protection actuellement en vigueur, y compris la possibilité pour les systèmes judiciaires des États membres de partager des informations relatives au statut de protection d'un adulte vulnérable;
10. rappelle à la Commission et aux États membres que tous les adultes qui sont vulnérables ne le sont pas nécessairement en raison de leur âge avancé et demande que des mesures soient prises pour renforcer la protection juridique et les droits non seulement des adultes vulnérables âgés, mais également des adultes vulnérables en raison d'un grave handicap physique et/ou mental, et de tenir compte également de leurs besoins lors de l'adoption des prochaines mesures sociales destinées à garantir ces droits légaux;
11. constate que ces recommandations respectent le principe de subsidiarité et les droits fondamentaux des citoyens;
12. estime que la proposition demandée n'a pas d'incidences financières;
13. charge son président de transmettre la présente résolution ainsi que les recommandations détaillées en annexe à la Commission et au Conseil, ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres.
ANNEXE
RECOMMANDATIONS DÉTAILLÉES CONCERNANT LE CONTENU DE LA PROPOSITION DEMANDÉE
A.PRINCIPES ET OBJECTIFS DE LA PROPOSITION
1. Promouvoir la reconnaissance et l'exécution des décisions judiciaires ou administratives relatives aux personnes faisant l'objet de mesures de protection.
2. Mettre en place des dispositions contribuant à atteindre l'objectif d'instaurer un espace de justice, de liberté et de sécurité, en facilitant la reconnaissance et l'exécution de décisions prononçant une mesure de protection, déterminer la loi applicable et promouvoir la coopération entre les autorités centrales.
3. Mettre en œuvre des mesures spécifiques et appropriées pour la coopération entre les États membres, en s'appuyant sur les outils mis à disposition par la convention de La Haye.
4. Mettre en place des formulaires communautaires uniques pour favoriser l'information sur les décisions de protection ainsi que la circulation, la reconnaissance et l'exécution de ces décisions.
5. Créer un formulaire communautaire unique au niveau de l'Union européenne pour les mandats d'inaptitude, afin de garantir qu'ils sont effectifs dans tous les États membres.
B.ACTIONS À proposer
1. Demande à la Commission de lui présenter, sur la base de l'article 65 du traité CE, et dès qu'une expérience suffisante du fonctionnement de la convention de La Haye aura été acquise, une proposition législative visant à renforcer la coopération entre États membres ainsi qu'à améliorer la reconnaissance et l'exécution des décisions sur la protection des adultes, les mandats d'inaptitude et les mandats permanents.