Résolution du Parlement européen du 8 juillet 2010 sur le régime d'importation dans l'UE des produits de la pêche et de l'aquaculture dans la perspective de la réforme de la PCP (2009/2238(INI))
Le Parlement européen,
– vu la convention des Nations unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982,
– vu l'accord du 4 août 1995 aux fins de l'application des dispositions de la convention des Nations unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 relatives à la conservation et à la gestion des stocks de poissons dont les déplacements s'effectuent tant à l'intérieur qu'au-delà de zones économiques exclusives (stocks chevauchants) et des stocks de poissons grands migrateurs (l'«Accord de New York»),
– vu le Code de conduite de la FAO pour une pêche responsable, adopté le 31 octobre 1995,
– vu la déclaration finale faite lors du sommet mondial sur le développement durable, qui s'est tenu à Johannesburg du 26 août au 4 septembre 2002,
– vu le règlement (CE) n° 2371/2002 du Conseil du 20 décembre 2002 relatif à la conservation et à l'exploitation durable des ressources halieutiques dans le cadre de la politique commune de la pêche(1),
– vu le règlement (CE) n° 104/2000 du Conseil du 17 décembre 1999 portant organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l'aquaculture(2),
– vu sa résolution du 12 décembre 2007 sur l'organisation commune des marchés dans le secteur des produits de la pêche et de l'aquaculture(3),
– vu le règlement (CE) nº 1005/2008 du Conseil du 29 septembre 2008 établissant un système communautaire destiné à prévenir, à décourager et à éradiquer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée(4),
– vu le règlement (CE) n° 66/2010 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 établissant le label écologique de l'UE(5),
– vu le Livre vert de la Commission intitulé «Réforme de la politique commune de la pêche» (COM(2009)0163),
– vu sa résolution du 25 février 2010 sur le Livre vert sur la réforme de la politique commune de la pêche(6),
– vu la communication de la Commission intitulée «Construire un avenir durable pour l'aquaculture - Donner un nouvel élan à la stratégie pour le développement durable de l'aquaculture européenne» (COM(2009)0162),
– vu sa résolution du 17 juin 2010 sur un nouvel élan à la stratégie pour le développement durable de l'aquaculture européenne(7),
– vu l'accord de Marrakech du 15 avril 1994 instituant l'Organisation mondiale du commerce,
– vu la déclaration ministérielle de l'OMC adoptée à Doha le 14 novembre 2001,
– vu la communication de la Commission intitulée «Une Europe compétitive dans une économie mondialisée» (COM(2006)0567),
– vu sa résolution du 7 mai 2009 sur le rôle nouveau et les responsabilités nouvelles du Parlement européen en vertu du traité de Lisbonne(8),
– vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE),
– vu l'article 48 de son règlement,
– vu le rapport de la commission de la pêche et l'avis de la commission du commerce international (A7-0207/2010),
A. considérant l'importance stratégique que revêtent les secteurs de la pêche et de l'aquaculture pour l'approvisionnement de la population et pour l'équilibre de la balance alimentaire des différents États membres et de l'Union européenne dans son ensemble, ainsi que la contribution considérable de ces secteurs au bien-être socioéconomique des communautés côtières, au développement local, à l'emploi et au maintien des traditions culturelles,
B. considérant que le poisson constitue une ressource naturelle qui, si elle fait l'objet d'une gestion raisonnée, peut être renouvelable et permettre de fournir de l'alimentation et des emplois dans l'Union européenne et à travers le monde et qu'il faut la préserver afin d'éviter l'épuisement des stocks halieutiques et dès lors la mise en difficulté des communautés côtières de l'Union européenne et des pays tiers; considérant, à cette fin, la nécessité de renforcer la gestion efficace de la pêche, notamment la dimension et l'impact du commerce international sur les ressources halieutiques dans le monde,
C. considérant l'ambitieuse réforme de la politique commune de la pêche engagée par la Commission européenne avec l'adoption du Livre vert du 22 avril 2009 en vue de revoir la plupart des aspects de cette politique,
D. considérant également la nouvelle stratégie pour le développement durable de l'aquaculture européenne définie par la Commission européenne dans sa communication du 8 avril 2009 (COM(2009)0162),
E. considérant les objectifs spécifiques qui ont été fixés pour la gestion des pêches lors du sommet mondial sur le développement durable, qui s'est tenu en 2002 à Johannesburg, dont celui de ramener l'exploitation des stocks halieutiques à un niveau compatible avec la production maximale équilibrée (PME) d'ici à 2015,
F. considérant que la production communautaire de produits de la pêche et de l'aquaculture (PPA) a connu une baisse d'environ 30 % au cours des dix dernières années,
G. considérant que cette baisse est liée à la fois à la diminution des ressources halieutiques dans les eaux européennes et aux mesures mises en place, à juste titre, pour limiter les prélèvements et assurer la gestion durable des stocks dans le cadre de la PCP, dans les eaux européennes comme à l'extérieur de celles-ci, notamment dans les zones où l'UE pratique la pêche dans le cadre d'accords de partenariat dans le domaine de la pêche,
H. considérant que la pêche européenne représente moins de 6 % des captures mondiales,
I. considérant que, même si le Livre vert sur la réforme de la PCP présente la vision à long terme d'un possible renversement de cette tendance à la baisse des captures, les mesures radicales envisagées pour permettre aux ressources naturelles de se régénérer (réduction de la capacité des flottes, mesures de gestion plus contraignantes, contrôles renforcés, etc.) ne pourront, au contraire, que l'accentuer à court et moyen termes,
J. considérant par ailleurs que, malgré la nouvelle stratégie définie en la matière, les contraintes multiples pesant sur le développement de la production aquacole communautaire sont telles qu'il est improbable que ce développement puisse compenser significativement à court et à moyen termes la baisse tendancielle de production dans le secteur extractif,
K. considérant qu'il est à cet égard essentiel de favoriser l'augmentation de la production européenne, en particulier dans les nouveaux États membres de l'UE qui ont un potentiel manifeste en matière d'aquaculture,
L. considérant que la demande communautaire de PPA est, au contraire, à la hausse de manière générale dans l'Union européenne, avec une dynamique particulièrement forte sur les marchés des nouveaux États membres d'Europe centrale et orientale, et que l'on s'attend, sous l'effet de divers facteurs, à une croissance soutenue de la consommation dans les vingt prochaines années,
M. considérant que l'Union européenne (12 millions de tonnes et 55 milliards d'euros en 2007) est d'ores et déjà le plus grand marché du monde pour les PPA, devant le Japon et les États-Unis, qu'il dépend très fortement des importations en provenance de pays tiers qui couvrent plus de 60 % des besoins, et que cette dépendance est encore appelée à s'aggraver,
N. considérant que la question des importations de PPA dans l'UE et des conditions dans lesquelles ces importations sont réalisées apparaît dès lors comme absolument centrale dans toute analyse des politiques menées par l'Union européenne en matière de pêche et d'aquaculture et qu'elle doit faire l'objet d'une attention toute particulière dans le cadre des réformes en cours,
O. considérant que cette question doit être envisagée sous tous ses aspects: commercial, environnemental, social, sanitaire et qualitatif,
P. considérant qu'en raison de la pêche non sélective et du pourcentage élevé de rejets dans certaines pêcheries qui exportent vers les marchés de l'UE, une quantité importante de poisson qui pourrait être propre à la consommation humaine est perdue,
Q. considérant que la réflexion doit porter notamment sur l'organisation commune des marchés (OCM) dans le secteur des PPA, dont la règlementation actuelle apparaît comme périmée à plusieurs égards et nécessite une révision urgente,
R. considérant que cette réflexion exige également un regard critique sur la politique commerciale commune, telle qu'elle est appliquée dans ce secteur particulier, et sur la cohérence des décisions prises dans ce cadre avec le maintien d'un secteur européen de la pêche viable et responsable,
S. considérant que, bien que les PPA fassent encore l'objet d'une protection douanière théorique au titre du Tarif douanier commun (TDC) un peu supérieure à la moyenne pour les produits non agricoles, cette protection est significativement réduite en pratique par diverses exemptions et réductions, autonomes ou conventionnelles, dont l'application fait que les importations effectivement frappées des droits NPF (applicables par défaut) représentent environ 5 % du total,
T. considérant que la politique consistant à ouvrir aux importations les marchés communautaires des PPA est appelée à se poursuivre, à la fois sur le plan multilatéral, dans le cadre des négociations à l'OMC et notamment du volet AMNA (accès aux marchés non agricoles) du cycle de Doha, et dans celui d'une série de négociations préférentielles en cours avec toutes sortes de partenaires commerciaux en Asie, en Amérique latine, en Amérique du Nord, dans le bassin méditerranéen et avec différents groupes de pays ACP,
U. considérant notamment que la conclusion du volet AMNA du cycle de Doha sur la base actuellement envisagée de la «formule suisse» avec un coefficient 8 aurait pour effet de ramener le taux maximum de droit de douane applicable aux PPA dans l'UE de 26 % à environ 6 % et le taux moyen de 12 % à environ 5 %,
V. considérant qu'une telle décision, outre le fait qu'elle réduirait à presque rien l'effet protecteur des tarifs encore en place, priverait de toute signification, en les érodant sévèrement, les préférences déjà accordées ou en cours de négociation au bénéfice des pays en développement, et qu'elle saperait les fondements même des mécanismes de l'OCM permettant la modulation de l'accès au marché communautaire en fonction des besoins de l'industrie européenne de transformation des PPA (suspensions et contingents tarifaires),
W. considérant que, l'UE étant tenue d'assurer une certaine cohérence entre les objectifs de sa politique de développement (éradiquer la pauvreté, développer une pêche locale durable) et sa politique commerciale, les pays en développement devraient être encouragés à exporter des produits de la pêche ayant une plus grande valeur ajoutée, à condition que le poisson provienne de stocks bien gérés et durables et remplisse les conditions sanitaires requises,
X. considérant également la tendance constatée ces dernières années de la part des négociateurs commerciaux de l'UE à consentir plus facilement des dérogations aux règles d'origine préférentielle traditionnellement appliquées au PPA, tant pour les produits bruts (critères de rattachement des navires) que pour les produits transformés (possibilité de conserver l'origine préférentielle malgré l'utilisation de matières premières non originaires),
Y. considérant qu'une étude de la FAO a démontré que, même si le commerce international des produits halieutiques peut conduire à une plus grande sécurité alimentaire dans les pays en développement, il a également engendré une augmentation des prises, afin d'alimenter le marché de l'exportation, ce qui peut aggraver l'épuisement des stocks, d'où la nécessité de garantir que les pêches sont gérées correctement et contrôlées, pour éviter l'épuisement des stocks,
Z. considérant les intérêts en partie divergents des producteurs communautaires de PPA (pêcheurs et aquaculteurs), des industries de transformation, des distributeurs, des importateurs et des consommateurs, que les politiques menées au niveau européen devraient s'efforcer de concilier de manière efficace et équilibrée,
AA. considérant la nécessité d'assurer des débouchés satisfaisants aux producteurs communautaires (pêcheurs et aquaculteurs) à des prix suffisamment rémunérateurs, compte tenu des coûts, contraintes et aléas divers liés à leur activité,
AB. considérant la nécessité de garantir aux transformateurs communautaires la disponibilité de matières premières de qualité homogène, en quantité suffisante, à des prix stables, tout au long de l'année,
AC. considérant la nécessité de satisfaire la demande des consommateurs communautaires pour des produits de bonne qualité à des prix compétitifs et de tenir compte de leur souci croissant d'information concernant les caractéristiques, l'origine et les conditions de capture ou de production de ces produits,
AD. considérant l'impact différencié des importations sur le marché communautaire en fonction des espèces concernées, du degré de transformation des produits et des circuits de distribution empruntés,
AE. considérant, par exemple, qu'un effet déprimant sur les prix à la première vente de la concurrence des importations apparaît plus sensible pour les espèces à usage industriel (destinées à l'industrie de transformation) que pour les espèces non industrielles,
Considérations générales
1. déplore que le Livre vert sur la réforme de la politique commune de la pêche ne consacre que quelques lignes à la question des importations et sous-estime, à l'évidence, l'importance d'un traitement approprié de cette question pour la crédibilité et le succès de la réforme;
2. constate que la libéralisation de l'accès au marché communautaire pour les PPA importés est déjà très avancée comme résultat de la politique commerciale menée par l'UE au cours des vingt dernières années;
3. constate que la production communautaire de PPA est nettement insuffisante pour couvrir les besoins de l'industrie de transformation et la demande croissante des consommateurs et qu'elle le restera; reconnaît, par conséquent, la nécessité de promouvoir une consommation responsable, fondée sur la qualité et la viabilité plutôt que sur la quantité, la nécessité de renforcer la gestion de la pêche afin de favoriser le renouvellement des stocks et le fait que les importations continueront de jouer un rôle important dans l'approvisionnement communautaire;
4. a conscience qu'il existe une limite maximale à la quantité de poisson qui peut être prise de manière viable, pour la consommation humaine ou à des fins industrielles, ce qui signifie que l'approvisionnement en poisson du marché communautaire ne peut pas croître à l'infini;
5. insiste cependant sur la nécessité impérieuse d'assurer le maintien dans l'UE de secteurs de la pêche et de l'aquaculture respectueux de l'environnement sur le long terme et économiquement viables, y compris dans leur composante artisanale, harmonieusement répartis sur son littoral et contribuant à la préservation de l'identité culturelle des régions concernées, pourvoyeurs d'emplois tout au long de la filière, et fournisseurs d'aliments sûrs et de bonne de qualité, ce qui implique que les pêcheurs puissent obtenir un prix juste pour leurs produits; souligne, par ailleurs, que les travailleurs du secteur de la pêche devraient exercer leur activité dans des conditions raisonnables et conformément aux conventions de l'OIT sur la santé et la sécurité des travailleurs;
6. note que la possibilité actuelle d'exporter aisément des PPA vers le marché communautaire peut – dans certaines circonstances – avoir un impact négatif sur l'économie locale de certaines régions, comme les régions ultrapériphériques, en ce qui concerne la vente de leurs produits locaux;
Considérations spécifiques Politique commerciale et douanière
7. estime qu'il est de la responsabilité politique de l'Union européenne, qui est le premier importateur de produits de la pêche au monde, et d'autres grands pays importateurs de poisson de s'assurer que les règles commerciales de l'OMC respectent les normes internationales les plus élevées quant à la gestion de la pêche et à la conservation des stocks; demande à la Commission, à cet effet, de veiller à ce que le commerce équitable, transparent et durable du poisson soit renforcé dans le cadre de la politique commerciale bilatérale et multilatérale de l'Union;
8. considère qu'une protection tarifaire raisonnable est et devrait demeurer un instrument important et légitime de régulation des importations à la disposition du pouvoir politique; rappelle qu'une protection tarifaire erga omnes fait toute la valeur des préférences accordées par l'UE à certains pays, notamment ceux en développement; rappelle que l'élimination de cette protection priverait les pays bénéficiaires de préférences de tous les avantages dont ils disposent actuellement; rappelle également l'utile caractère modulable de cette protection tarifaire dont il est possible pour l'UE de suspendre l'application lorsque la production communautaire de matières premières est insuffisante pour assurer l'approvisionnement correct de son industrie de transformation;
9. réfute par conséquent la vision, promue à travers la politique commerciale actuellement menée, d'une disparition inéluctable de toute protection tarifaire du secteur des PPA à laquelle les producteurs communautaires – pêcheurs, aquaculteurs et transformateurs – n'auraient d'autre alternative que de se résigner;
10. considère que, comme le secteur agricole, les secteurs de la pêche et de l'aquaculture sont des secteurs stratégiques, multifonctionnels, dépendant de la conservation et de l'exploitation viable des ressources naturelles, et très vulnérables dans certaines de leurs composantes, qui se prêtent mal à une approche purement libre-échangiste fondée sur le libre jeu des avantages comparatifs;
11. regrette que, contrairement aux négociations commerciales portant sur les produits agricoles qui sont menées par le commissaire chargé de l'agriculture, celles qui portent sur les PPA soient considérées comme des négociations «non agricoles» et relèvent de la compétence du commissaire chargé du commerce, pour lequel elles ne représentent souvent qu'une variable d'ajustement dans une problématique plus vaste;
12. demande le transfert de la compétence pour mener les négociations commerciales portant sur les PPA du commissaire chargé du commerce à celui chargé des affaires maritimes et de la pêche;
13. demande que soit développée, à travers une série d'études et de consultations, une vision claire et globale du marché communautaire des PPA, espèce par espèce, de l'évolution prévisible de la demande et de la production communautaire et des débouchés que l'on entend maintenir pour cette dernière dans des conditions de concurrence loyale;
14. demande également que la Commission s'efforce d'évaluer de manière plus fiable et plus précise l'impact des importations de PPA sur le marché communautaire, notamment en matière de prix, et travaille à la mise en place d'un système de collecte et d'échange de données destiné à faciliter cette évaluation;
15. exige le traitement des PPA comme produits sensibles aux fins de l'application de la «formule suisse» dans le cadre des négociations AMNA du cycle de Doha à l'OMC, afin d'éviter l'écrêtement de la protection tarifaire dont bénéficient encore certains produits au titre du TDC et de préserver, ce faisant, la valeur des préférences accordées à certains partenaires et l'efficacité des mécanismes de l'OCM;
16. rappelle que, conformément au paragraphe 47 de la déclaration ministérielle de Doha du 14 novembre 2001, les négociations du cycle en cours sont menées sur la base du principe de l'engagement unique et que, tant que le cycle n'aura pas été conclu dans son ensemble, il reste loisible à l'Union européenne de revoir sa position sur certains chapitres de celui-ci;
17. encourage également les négociateurs communautaires à l'OMC à continuer de refuser catégoriquement d'engager l'Union européenne dans toute initiative de libéralisation plurilatérale sectorielle des PPA;
18. appelle la Commission à exiger que l'éventuelle conclusion d'un accord sur les subventions dans le secteur de la pêche en cours de négociation à l'OMC, notamment concernant les mesures de régulation du marché, n'entraîne pas pour les producteurs européens une situation de désavantage concurrentiel par rapport aux fournisseurs des pays tiers; est opposé par principe à toute éventuelle mise en œuvre séparée et anticipée («early harvest») d'un tel accord, qui doit rester indissociable des autres éléments du cycle de Doha;
19. invite les négociateurs communautaires pour les négociations bilatérales et régionales à exiger plus systématiquement des contreparties effectives aux concessions commerciales accordées aux pays tiers en matière d'importation de PPA en défendant avec détermination les intérêts offensifs de l'Union européenne dans ce secteur, lorsqu'ils existent;
20. insiste sur la nécessité pour l'Union européenne de garder le contrôle des préférences commerciales qu'elle accorde à certains partenaires en exigeant l'application de règles d'origine strictes, basées sur le concept de produits «entièrement obtenus»; invite à la prudence dans l'octroi d'assouplissements éventuels des critères traditionnels de rattachement des navires pour les produits bruts et exige le rejet de toute nouvelle demande de dérogation en matière de produits transformés; considère que la règle dite du «non drawback» devrait être systématiquement appliquée et les possibilités de cumul limitées;
21. demande instamment à la Commission d'améliorer, quantitativement et qualitativement, l'analyse de l'impact dans les secteurs de la pêche et de l'aquaculture des préférences tarifaires, accordées à certains pays, en termes notamment de rentabilité des entreprises et d'emploi, tant dans l'UE que dans les pays bénéficiaires, en particulier les ACP; demande également que ces analyses fournissent des résultats dûment quantifiés et qu'elles tiennent compte en particulier des espèces sensibles;
22. rappelle la possibilité, pour l'industrie communautaire, de recourir aux instruments de défense commerciale de l'UE en cas de dumping, de subventionnement ou d'augmentation massive et soudaine des importations de certaines catégories de PPA;
Aspects environnementaux, sociaux, sanitaires et qualitatifs
23. estime que l'un des objectifs essentiels de la politique communautaire en matière d'importation de PPA doit être d'assurer que les produits importés satisfassent aux mêmes exigences, dans tous les domaines, que celles qui s'imposent à la production communautaire; considère que cet objectif correspond à des préoccupations fondamentales d'équité, de cohérence et d'efficacité des mesures actuellement appliquées dans ce secteur ou envisagées dans le cadre de la réforme; fait en outre remarquer que le respect par les pays tiers des exigences imposées par l'UE contribuera à favoriser une concurrence plus équitable entre la production dans l'UE et celle dans les pays tiers, étant donné que la production de poisson selon les normes de l'UE entraînera des coûts plus élevés pour ces derniers;
24. craint que l'entrée massive sur le marché communautaire de PPA en provenance de pays tiers pourrait influencer les habitudes d'achat des consommateurs;
25. considère que l'intensification des efforts de l'UE en matière de conservation des stocks et de durabilité de la pêche, dans le cadre de la PCP, est incompatible avec l'importation de PPA provenant de pays qui accroissent leur effort de pêche sans se préoccuper de la durabilité de celle-ci et en visant exclusivement un rendement immédiat;
26. souligne que la politique communautaire de conservation des ressources contribue, au travers notamment des plans de récupération et de gestion, à favoriser les importations de PPA en provenance des pays tiers et à leur permettre de se substituer, de manière souvent irréversible, à la production communautaire; demande à la Commission de tenir dûment compte de ce risque dans l'élaboration de ces plans;
27. craint, en l'absence d'une politique déterminée en la matière, que l'attrait considérable d'un marché communautaire des PPA très largement libre d'accès et caractérisé par une demande en forte croissance, ne constitue pour ces pays une incitation permanente à la surpêche;
28. se félicite de la récente entrée en vigueur d'une réglementation concernant la lutte contre la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN) et imposant la certification de tous les produits mis sur le marché communautaire; encourage une application rigoureuse et efficace de cette règlementation, tout en reconnaissant la nécessité d'aider de nombreux pays en développement à appliquer correctement celle-ci et à lutter contre la pêche illicite; rappelle toutefois qu'il s'agit ici d'une exigence minimum qui ne suffit pas à garantir la durabilité des pêcheries dont sont issus les produits en question;
29. estime qu'outre l'application de la réglementation communautaire en matière de pêche INN, il importe de procéder en aval à un contrôle plus strict du processus de commercialisation de ce type de pêche, notamment par des vérifications plus rigoureuses auprès des États membres et des entreprises soupçonnés de s'approvisionner en produits provenant de la pêche illicite;
30. invite la Commission à mettre en œuvre tous les instruments à sa disposition pour assurer le respect par les principaux pays exportateurs de PPA vers l'UE des engagements pris à Johannesburg et l'application par ces pays de politiques rigoureuses en matière de conservation des ressources; l'encourage à coopérer avec ces pays dans toutes les enceintes appropriées et notamment dans le cadre des Organisations régionales de gestion des pêches (ORGP);
31. estime, d'autre part, que l'Union doit renforcer ces engagements afin de garantir que tous les produits exportés vers l'Union européenne proviennent, sans exception, de pays qui ont ratifié les principales conventions internationales en matière de droit de la mer, en particulier la Convention des Nations unies sur le droit de la mer et l'accord sur les stocks chevauchants et les stocks de poissons grands migrateurs, et qui sont parties contractantes aux ORGP respectives, dans le cas où les exportations proviennent d'eaux couvertes par l'une de ces organisations;
32. souligne les graves handicaps dont souffrent les pêcheurs, les aquaculteurs et les transformateurs communautaires, face à la concurrence de certains pays tiers, du fait du coût beaucoup plus faible de la main d'œuvre dans ces pays et des normes sociales moins exigeantes qui y sont appliquées;
33. estime que le problème du «dumping social», également présent dans plusieurs autres secteurs de l'économie, est particulièrement aigu dans celui des PPA et notamment dans les activités de transformation, fortes utilisatrices de main-d'œuvre;
34. invite la Commission à mettre en œuvre tous les instruments à sa disposition pour assurer au minimum le respect par les principaux pays exportateurs de PPA vers l'UE des huit conventions de l'OIT sur les droits fondamentaux du travail;
35. exige que toutes les préférences commerciales accordées par l'UE sur les PPA soient systématiquement assorties de conditionnalités rigoureuses tant en matière environnementale qu'en matière sociale; demande également que les dispositions incluses à cette fin dans les accords conclus comprennent des mécanismes crédibles de surveillance du respect des engagements pris et de suspension ou de retrait pur et simple des préférences en cas de violation; réclame, dans le cas des pays en développement, la mise en œuvre de programmes spécifiquement conçus pour accorder une assistance technique et, le cas échéant, un soutien financier, afin d'aider les États concernés à respecter leurs engagements sociaux et environnementaux;
36. insiste sur l'importance d'une application rigoureuse aux PPA importés, y compris aux aliments pour les animaux et aux matières premières destinées à la fabrication de ces derniers, de la législation communautaire en matière de normes et de contrôles sanitaires dans tous ses aspects (sécurité alimentaire, traçabilité, prévention), qui sont indispensables à la protection des consommateurs; demande instamment à la Commission, à cet égard, de parfaire son programme d'inspection dans les pays tiers grâce à une amélioration des missions de l'Office alimentaire et vétérinaire, essentiellement en augmentant le nombre d'établissements inspectés au cours de chaque mission, afin d'obtenir des résultats plus conformes à la réalité du pays tiers;
37. appelle à la plus grande prudence dans la reconnaissance des exigences appliquées dans certains pays tiers comme étant équivalentes à celles de l'Union européenne aux fins de l'application de cette législation et dans la validation des listes de pays et établissements autorisés à exporter des PPA vers l'UE; estime que la DG SANCO devrait pouvoir retirer de ces listes certains navires ou usines de transformation lorsqu'ils ne respectent pas les normes minimales;
38. invite à une très grande vigilance à l'égard des produits issus de nouvelles formes d'aquaculture particulièrement intensives pratiquées dans certaines régions du monde et à un examen critique des techniques et procédés utilisés pour augmenter la productivité de ces exploitations et de leurs possibles répercussions en matière de santé, ainsi que de leur impact en matière sociale et environnementale;
39. exige une intensité et une fréquence des contrôles opérés à tous les niveaux, et notamment des contrôles aux frontières effectivement harmonisés et transparents, proportionnelles aux risques présentés par les produits concernés en fonction notamment de leur nature et de leur provenance; demande aux États membres d'y consacrer toutes les ressources financières et humaines nécessaires;
Réforme de l'OCM
40. rappelle ses diverses résolutions, adoptées dans le courant de la 6e législature, invitant la Commission à procéder d'urgence à une réforme ambitieuse de l'OCM des produits de la pêche afin qu'elle contribue davantage à garantir les revenus dans ce secteur, la stabilité des marchés, une meilleure commercialisation des produits de la pêche et une augmentation de la valeur ajoutée qu'ils présentent; déplore le retard pris dans ce domaine; renvoie aux résolutions susmentionnées sur la question de savoir quels devraient être les grands axes d'une telle réforme;
41. insiste sur le fait que les nouveaux mécanismes mis en place dans ce cadre devront absolument tenir compte de la réalité incontournable que représente la concurrence très vive des importations à bas prix, produites grâce à des techniques dommageables pour l'environnement ou qui s'apparentent à une forme de dumping social, et s'efforcer de garantir néanmoins l'écoulement normal de la production communautaire à des prix suffisamment rémunérateurs;
Information du consommateur
42. exprime la conviction que les consommateurs européens feraient souvent des choix différents s'ils étaient mieux informés sur la nature réelle, l'origine géographique et les conditions relatives à la production, à la capture et à la qualité des produits proposés à la vente;
43. souligne l'urgence d'introduire des critères de certification et un étiquetage rigoureux et transparents en ce qui concerne la qualité et la traçabilité des produits de la pêche et de l'aquaculture européennes et de promouvoir l'introduction le plus tôt possible d'un label écologique communautaire spécifique pour ces produits afin de mettre un terme à la prolifération incontrôlée des systèmes de certification privés;
44. considère que le processus de certification et d'étiquetage écologiques des produits de la pêche et de l'aquaculture doit être transparent et aisé à comprendre pour le consommateur et être accessible à toute la filière sans exception, dans la mesure où les critères servant de base à son attribution sont scrupuleusement respectés;
Aquaculture
45. souligne la part croissante des produits aquacoles dans les importations de PPA de l'Union européenne;
46. attribue ce phénomène à une expansion considérable de la production aquacole dans certaines régions du monde au cours des dix dernières années alors que l'aquaculture communautaire, qui ne représente plus que 2 % de la production mondiale, connaissait une période de stagnation;
47. constate d'importants effets de substitution, dans les habitudes des consommateurs et dans la demande des entreprises de distribution européennes, entre les produits frais d'origine communautaire et certains types de produits aquacoles importés;
48. estime qu'une politique volontariste d'aide au développement d'une aquaculture communautaire durable, ayant un impact réduit sur l'environnement, est l'une des clés d'une politique visant à réduire la dépendance des importations dans le secteur des PPA, à favoriser l'activité au sein de l'Union européenne, et à satisfaire une demande en forte croissance à travers une offre plus abondante et plus diversifiée; souligne, à cet égard, la nécessité de miser massivement sur la recherche et le développement concernant les produits aquacoles européens;
49. renvoie à ce sujet à sa résolution du 17 juin 2010 sur le thème «Donner un nouvel élan à la stratégie pour le développement durable de l'aquaculture européenne»;
50. demande à la Commission et aux États membres de tenir dûment compte des principales recommandations contenues dans ce rapport dans leurs propositions et décisions relatives à la réforme de la politique commune de la pêche;
o o o
51. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.