Résolution du Parlement européen du 9 septembre 2010 sur les droits de l'homme en Syrie, et en particulier le cas de Haytham al-Maleh
Le Parlement européen,
– vu ses précédentes résolutions sur la Syrie, et notamment celles du 8 septembre 2005 sur les prisonniers politiques en Syrie(1), du 15 juin 2006 sur les droits de l'homme en Syrie(2), du 24 mai 2007 sur les droits de l'homme en Syrie(3) et du 17 septembre 2009 sur la Syrie: le cas de Muhannad Al-Hassani(4),
– vu son rapport, adopté le 10 octobre 2006, contenant la recommandation du Parlement européen au Conseil relative à la conclusion d'un accord euro-méditerranéen d'association entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et la République arabe syrienne, d'autre part,
– vu son rapport, adopté le 17 juin 2010, sur la politique de l'UE en faveur des défenseurs des droits de l'homme,
– vu la déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée en 1948,
– vu le pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques, auquel la Syrie est partie,
– vu la convention des Nations unies contre la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants de 1975, qui a été ratifiée par la Syrie le 18 septembre 2004,
– vu la déclaration des Nations unies de 1998 sur les défenseurs des droits de l'homme,
– vu les lignes directrices de l'Union européenne sur les défenseurs des droits de l'homme,
– vu la déclaration commune du sommet de Paris pour la Méditerranée, du 13 juillet 2008,
– vu la déclaration du 27 juillet 2010 de la haute représentante de l'Union européenne, Mme Catherine Ashton, concernant des cas de violation des droits de l'homme en Syrie,
– vu l'article 122, paragraphe 5, de son règlement,
A. conscient de l'importance des liens politiques, économiques et culturels instaurés entre l'Union européenne et la Syrie,
B. considérant que M. Haytham al-Maleh, avocat syrien de 80 ans spécialisé dans les droits de l'homme, a été arrêté le 14 octobre 2009 par les services généraux du renseignement, détenu au secret jusqu'à son interrogatoire par le procureur militaire le 20 octobre 2009 et condamné, le 4 juillet 2010, par le second tribunal militaire de Damas à trois ans d'emprisonnement en application des articles 285 et 286 du code pénal syrien, au motif qu'il a «véhiculé des informations fallacieuses et exagérées qui portent atteinte aux sentiments nationaux», alors que les tribunaux militaires ne sont pas habilités à juger des civils,
C. considérant que, selon les rapports des missions de contrôle ad hoc dépêchées par les organisations internationales de la société civile, le procès de M. al-Maleh n'était pas équitable au sens des normes internationales, notamment en ce qui concerne la présomption d'innocence et les droits de la défense,
D. considérant que M. al-Maleh, qui souffre d'arthrite, de diabète et de problèmes thyroïdiens, est privé de tout accès normal à des médicaments et que son état de santé s'est sérieusement dégradé durant l'été 2010,
E. considérant que d'autres grands défendeurs syriens des droits de l'homme tels que MM. Muhannad Al-Hassani et Ali Al-Abdullah, demeurent emprisonnés dans le pays,
F. considérant que la poursuite et la condamnation de M. al-Maleh pour des faits liés à des déclarations publiques sur les systèmes juridique et politique syriens, et de M. Muhannad Al-Hassani pour des activités liées à sa profession d'avocat, notamment ses observations et ses rapports sur les auditions publiques devant la Cour de sûreté de l'État, reviennent à punir l'exercice du droit légitime d'expression, ancré dans le pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel la Syrie est partie,
G. considérant que les autorités syriennes ont régulièrement recours au harcèlement, à la restriction de la liberté de mouvement et aux arrestations arbitraires à l'égard des défenseurs des droits de l'homme dans leur pays; que ces pratiques ne cadrent pas avec le rôle majeur de la Syrie dans la région,
H. considérant que l'application permanente de la loi d'urgence limite, de fait, l'exercice, par les citoyens, de leur droit à la liberté d'expression, d'association et de réunion,
I. considérant que l'accord d'association entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et la République arabe syrienne, d'autre part, n'est toujours pas signé; que la signature de cet accord a été reportée depuis octobre 2009 à la demande de la Syrie; que le respect des droits de l'homme constitue un volet majeur de cet accord,
J. considérant que le partenariat entre les pays participant à l'Union pour la Méditerranée se fonde sur le respect plein et entier des principes démocratiques, des droits de l'homme et des libertés fondamentales, consacrés par le droit international applicable en la matière,
1. exprime sa profonde inquiétude quant à la situation de M. Haytham al-Maleh et invite les autorités syriennes à le relâcher immédiatement et sans condition, ainsi qu'à garantir, quelles que soient les circonstances, son bien-être physique et psychologique;
2. demande au gouvernement syrien de réexaminer l'ensemble des cas des prisonniers d'opinion en se conformant à la constitution nationale et aux engagements internationaux du pays et l'exhorte à libérer immédiatement la totalité des prisonniers d'opinion, notamment MM. Muhannad Al-Hassani, Ali Al-Abdullah, Anour Al-Bunni et Kamal Labwani;
3. demande aux autorités syriennes de mettre un terme aux exécutions et au harcèlement des défenseurs des droits de l'homme et de leurs familles, ainsi que de veiller à ce que les intéressés puissent librement exercer leurs activités sans entrave ni intimidation;
4. demande aux autorités syriennes de se conformer aux normes internationales en matière de droits de l'homme et aux engagements internationaux auxquels le pays a librement souscrit et qui garantissent tant la liberté d'opinion et d'expression que le droit à un procès équitable, ainsi que de veiller à ce que les prisonniers soient bien traités, qu'ils ne fassent pas l'objet de torture ou de mauvais traitements et qu'ils puissent s'entretenir rapidement, régulièrement et sans restriction avec leurs familles, leurs avocats et leurs médecins;
5. demande aux autorités syriennes de garantir un fonctionnement transparent du système judiciaire, et notamment de la Cour suprême de sûreté de l'État;
6. demande une nouvelle fois l'abrogation de l'état d'urgence en Syrie, instauré voici plus de quarante ans;
7. voit dans la perspective de signer l'accord d'association une excellente occasion d'aborder le problème de la violation continue des droits de l'homme et de consolider le processus de réforme en Syrie; invite le Conseil et la Commission à se servir sans réserve de ce puissant levier en adoptant un plan bilatéral d'action en faveur des droits de l'homme et de la démocratie, qui définit clairement les progrès précis attendus des autorités syriennes dans le domaine des droits de l'homme;
8. souligne que, conformément à l'article 218 du traité FUE, le Parlement est pleinement informé à toutes les étapes des négociations d'accords internationaux; exhorte donc la Commission à faire rapport au Parlement sur l'état des négociations avec les autorités syriennes sur la signature de l'accord d'association;
9. se félicite de la poursuite du dialogue entre l'Union européenne et la Syrie et espère que ces efforts constants conduiront à améliorer, non seulement la situation économique et sociale en Syrie, ce qui est déjà le cas, mais également la situation politique et celle des droits de l'homme;
10. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, ainsi qu'au gouvernement et au parlement de la République arabe de Syrie.