Résolution du Parlement européen du 12 décembre 2013 sur l'infrastructure verte – Renforcer le capital naturel de l'Europe (2013/2663(RSP))
Le Parlement européen,
– vu le 7e programme d'action pour l'environnement,
– vu la communication de la Commission européenne intitulée "Infrastructure verte – Renforcer le capital naturel de l'Europe" (COM(2013)0249),
– vu la communication de la Commission intitulée "Europe 2020 – Une stratégie pour une croissance intelligente, durable et inclusive" (COM(2010)2020),
– vu la feuille de route pour une Europe efficace dans l'utilisation des ressources (COM(2011)0571),
– vu la stratégie de l'Union européenne en faveur de la biodiversité à l'horizon 2020 (COM(2011)0244),
– vu la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages(1),
– vu la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages(2),
– vu les conclusions du Conseil "Environnement" de juin 2011 et celles du 17 décembre 2012 (point 14),
– vu sa résolution du 20 avril 2012 intitulée "Notre assurance-vie, notre capital naturel – Stratégie de l'Union européenne en faveur de la biodiversité à l'horizon 2020"(3) , en particulier le paragraphe 50,
– vu l’étude sur la composante économique des écosystèmes et de la biodiversité (TEEB)(4) ,
– vu le Livre blanc de la Commission de 2009 intitulé "Adaptation au changement climatique: vers un cadre d'action européen" (COM(2009)0147) et sa communication intitulée "La stratégie de l'UE relative à l'adaptation au changement climatique" (COM(2013)0216),
– vu la question à la Commission sur l'infrastructure verte – Renforcer le capital naturel de l'Europe (O-000094/2013 – B7-0525/2013),
– vu l'Agenda territorial de l'Union européenne 2020: Vers une Europe plus compétitive et durable avec des régions diverses",
– vu les Objectifs d'Aichi du "Plan stratégique pour la biodiversité 2011-2020" pour la planète, adopté par les Parties à la Convention sur la diversité biologique (CDB) en octobre 2010
– vu l'article 115, paragraphe 5, et l'article 110, paragraphe 2, de son règlement,
A. considérant que des mesures doivent être prises pour lutter contre le déclin de la biodiversité et la dégradation de l'état de nos écosystèmes afin de garantir la pérennité des services écosystémiques et la protection de notre capital naturel aux générations présentes et futures;
B. considérant que l'infrastructure verte contribue à permettre à la nature de déployer dans leur plein potentiel les services écosystémiques qu'elle peut offrir à la société;
C. considérant que des mesures doivent être prises pour lutter contre l'érosion de la biodiversité afin de préserver ce capital naturel à l'intention des générations présentes comme futures;
D. considérant que la pression anthropique menace la biodiversité et l'intégrité des écosystèmes dans l'Union européenne, notamment par le biais de la fragmentation et la destruction des habitats naturels, du changement climatique et de l'usage accru d'habitats semi-naturels;
E. considérant que la biodiversité et le bien-être de la société humaine sont étroitement liés;
F. considérant que, pour préserver et renforcer la biodiversité au sein de l'Union, il est important de réduire au minimum le niveau de fragmentation et d'améliorer la connectivité écologique;
G. considérant que selon l'Objectif d'Aichi C.11 pour la planète "d'ici à 2020, au moins 17 % des zones terrestres et d'eaux intérieures et 10 % des zones marines et côtières, y compris les zones qui sont particulièrement importantes pour la diversité biologique et les services fournis par les écosystèmes, sont conservées au moyen de réseaux écologiquement représentatifs et bien reliés d'aires protégées gérées efficacement et équitablement et d'autres mesures de conservation efficaces par zone, et intégrées dans l'ensemble du paysage terrestre et marin";
H. considérant que l'infrastructure verte et l'agriculture sont étroitement liées en ce qui concerne la productivité agricole et la protection du patrimoine agricole et compte tenu des incidences des activités agricoles en termes d'aménagement et de développement du territoire;
I. considérant que l'expérience montre que les projets d'infrastructure verte se prêtent particulièrement bien à donner à la nature sa place au sein de la société, et notamment dans les environnements urbains, où vit une part croissante de la population qui est exposée aux graves conséquences des "îlots thermiques urbains";
J. considérant qu'il conviendrait de partager entre les différents acteurs, et de publier, l'information relative à la mise en place, à la protection, au développement et à l'utilisation efficace de l'infrastructure verte au sein des divers milieux;
K. considérant que l'expérience montre que la planification et le développement des projets d'infrastructure constituent des phases clés, au cours desquelles il est impératif d'assurer l'intégration des besoins écologiques, économiques et sociétaux, en milieu urbain comme en milieu rural;
L. considérant que les programmes et les projets d'infrastructure régionaux et urbains cofinancés par l'Union devraient intégrer des éléments de l'infrastructure verte et atténuer les incidences sur les écosystèmes existants, afin de renforcer les bénéfices environnementaux, économiques et sociaux de ces programmes et projets;
M. considérant que l'infrastructure verte présente une multitude d'avantages écologiques, économiques et sociaux, à travers des solutions naturelles qui sont généralement moins onéreuses et plus durables et qui peuvent contribuer à la création d'emplois;
N. considérant que les investissements dans l'infrastructure verte offrent généralement un retour élevé;
Observations générales
1. salue la communication relative à l'infrastructure verte et l'intention de la Commission de poursuivre activement les objectifs fixés par celle-ci;
2. reconnaît l'importance majeure de l'infrastructure verte pour la protection efficace du capital naturel européen, la conservation des habitats naturels et des espèces ainsi que le bon état écologique des masses d'eau;
3. souligne que l'infrastructure verte peut contribuer aux différents objectifs de la stratégie "Europe 2020", et insiste sur l'urgence que revêtent son déploiement et son intégration dans les outils pour mettre en œuvre le cadre financier pluriannuel, afin de contribuer efficacement à la réalisation des objectifs de l'Union en matière de biodiversité;
4. reconnaît que le déploiement de l'infrastructure verte aidera l'Union à tenir les engagements internationaux qu'elle a pris dans le cadre des objectifs d'Aichi pour la biodiversité et du plan stratégique pour la biodiversité 2011-2020;
5. salue l'approche innovante associée à l'infrastructure verte, qui offre un bon rapport coût-efficacité grâce à ses nombreux avantages et solutions à même de concilier les objectifs environnementaux, sociaux et économiques;
Intégration aux différentes politiques
6. souligne la nécessité d'intégrer l'infrastructure verte dans toutes les politiques sectorielles de l'Union, ainsi que dans les mécanismes de financement correspondants en prenant pour exemple les meilleures pratiques utilisées par les États membres;
7. insiste sur le fait que l'infrastructure verte peut jouer un rôle particulièrement important dans les villes, dans lesquelles elle peut offrir des services tels que l'amélioration de la qualité de l'air, l'atténuation de l'effet d'"îlot thermique urbain" au niveau local, la mise à disposition d'aires de loisirs, la rétention de l'eau de pluie et la lutte contre les inondations, le maintien du niveau des eaux souterraines, la restauration de la biodiversité ou l'enraiement de son érosion, l'amélioration de la santé et des conditions sociales des citoyens et l'amélioration de la qualité de vie en général, notamment en offrant des espaces accessibles et abordables réservés à l'activité physique; souligne le lien existant entre l'infrastructure verte et la santé publique et estime que les investissements réalisés dans l'infrastructure verte valent également pour la santé publique;
8. souligne la contribution de l'infrastructure verte en tant qu'élément vital du réseau Natura 2000, en ce qu'elle améliore la cohérence et la résilience de ce réseau qui contribue à la conservation d'espèces et d'habitats essentiels de la nature européenne, et qu'elle aide à maintenir la fourniture de services écosystémiques qu'on estime à plusieurs centaines de milliards d'euros par an; souligne à cet égard la complémentarité entre l'instrument juridique Natura 2000 et l'initiative de promotion de l'infrastructure verte;
9. invite instamment les États membres à intégrer l'infrastructure verte et à lui donner la priorité dans le cadre de l'aménagement et du développement du territoire en consultant et en sensibilisant les acteurs de terrain et la population locale avec pédagogie en associant tous les niveaux de décision (local, régional, national), et demande à la Commission de promouvoir des orientations et l'évaluation comparative dans ce domaine afin de garantir que l'infrastructure verte devienne partie intégrante de l'aménagement et du développement du territoire dans l'ensemble de l'Union; souligne que les procédures d'octroi d'autorisation pour de nouveaux développements ou l'infrastructure grise doivent prévoir une évaluation complète de toutes les incidences négatives sur les écosystèmes et l'infrastructure verte existante pour éviter ou atténuer ces incidences et garantir des bénéfices sociétaux réels à long terme;
10. encourage la Commission et les États membres à recourir à tous les instruments de financement européens, notamment ceux contenus dans la politique de cohésion et dans la politique agricole commune, et particulièrement aux surfaces d'intérêt écologique, pour promouvoir l'infrastructure verte lorsqu'il y a lieu, dans le but de garantir la fourniture d'une large gamme de services écosystémiques variés ainsi que la protection des processus naturels dans les zones rurales et urbaines; demande à la Commission de rendre compte régulièrement au Parlement de l'utilisation des fonds de la PAC pour soutenir l'infrastructure verte; souligne en ce sens le rôle important de l'infrastructure verte pour la protection des abeilles et donc pour le bon fonctionnement de la pollinisation;
11. souligne les effets positifs de l'infrastructure verte en termes d'atténuation du changement climatique, en raison de son influence positive sur les stocks de carbone et sur le bilan des gaz à effet de serre, notamment en ce qui concerne la conservation des tourbières, des régions boisées et des forêts semi-naturelles et naturelles, et d'autres écosystèmes riches en carbone, contribuant ainsi à la mise en œuvre de la politique climatique de l'Union;
12. soutient les efforts visant à intégrer l'infrastructure verte dans l'aménagement du territoire des zones côtières afin de conserver la biodiversité et d'assurer le développement durable du paysage côtier;
13. note le rôle vital de l'infrastructure verte en matière d'adaptation au changement climatique, car elle améliore la cohérence écologique entre les sites Natura 2000, favorise l'augmentation des déplacements et des changements dans la répartition des espèces entre les sites Natura 2000, permet une adaptation à l'échelle du paysage pour la biodiversité, et contribue de ce fait à la mise en œuvre des politiques de l'Union liées à la nature, tout en encourageant et en permettant une adaptation basée sur les écosystèmes pour d'autres secteurs, notamment ceux liés à la gestion de l'eau et à la sécurité alimentaire;
14. juge nécessaire que les États membres, en particulier les États côtiers, mettent en place une infrastructure verte autour des zones portuaires et développent des schémas de transport appropriés pour favoriser l'écologisation de ces espaces;
15. attire l'attention sur le fait que la réduction des risques associés aux catastrophes naturelles, telles que les inondations ou les feux de forêt, compte également parmi les effets positifs de la création ou de la restauration d'infrastructures vertes, telles que les plaines inondables naturelles, les zones boisées, les zones humides, etc., qui peuvent améliorer la résilience face aux catastrophes naturelles et contribuer à l'adaptation au changement climatique, et ainsi réduire de manière significative les coûts qu'il impose à la société;
16. insiste sur la nécessité d'inclure pleinement le secteur de la sylviculture dans ces politiques afin de retirer, en sus de la production de bois et de biomasse, les nombreux bénéfices associés à une gestion durable des forêts et à une conservation des forêts naturelles et afin de restaurer des zones boisées fragmentées ou disparues;
17. salue l'initiative de promotion de l'infrastructure verte en tant qu'instrument contribuant au filtrage de l'eau, à la prévention de l'érosion et à la préservation de la nappe phréatique et donc, par là même, à la bonne mise en œuvre de la directive-cadre sur l'eau, de la directive sur les inondations, et de la législation applicable dans le domaine de l'eau, comme proposé par le plan d'action, ainsi qu'à la gestion intégrée des zones côtières et à l'aménagement de l'espace marin;
18. insiste sur l'importance de correctement intégrer les exigences relatives à l'infrastructure verte dans la mise en œuvre des instruments de la politique de cohésion et de la politique structurelle de l'Union, notamment pour financer l'infrastructure verte urbaine, et demande instamment aux autorités compétentes de prendre des mesures en ce sens;
19. souligne la nécessité d'intégrer l'infrastructure verte à des programmes opérationnels prévus au titre des instruments financiers européens pour la période 2014-2020;
20. invite instamment la Commission à finaliser en temps voulu, c'est-à-dire d'ici la fin de l'année 2013, les outils d'orientation, comme annoncé dans sa communication, afin de faire progresser la connaissance et la promotion de l'infrastructure verte dans les domaines appropriés et d'offrir des opportunités de financement par le biais de programmes opérationnels;
21. invite les États membres et les autorités régionales et locales à faire bon usage des opportunités de financement existantes, en vue de promouvoir les investissements dans des projets d'infrastructure verte cohérents et coordonnés;
Élaboration d'une stratégie en faveur d'une infrastructure verte
22. souligne la nécessité d'accroître les investissements du secteur privé dans l'infrastructure verte et appelle la Commission et la BEI à rapidement mettre en place et rendre opérationnel un dispositif de financement comprenant des mécanismes de financement innovants afin d'encourager les investissements dans l'infrastructure verte et autres projets en lien avec le capital naturel, tout en évaluant le soutien réel et à long terme à apporter aux fonctions écosystémiques; insiste sur le fait qu'il conviendra d'explorer également d'autres sources de financement, au niveau local, régional et national;
23. est convaincu que le déploiement de l'infrastructure verte doit reposer sur des données solides et des connaissances approfondies, et encourage la Commission, en collaboration avec l'Agence européenne pour l'environnement, les États membres et d'autres intervenants, à s'assurer que l'Union renforce sa capacité d'inventaire et d'évaluation des écosystèmes et des services écosystémiques associés et que ces informations et connaissances soient dûment prises en considération, notamment dans la planification et l'exécution de projets cofinancés par l'Union;
24. invite instamment la Commission à soutenir la recherche, l'innovation, le renforcement des capacités et les projets éducatifs, de diffusion, de sensibilisation et de conscientisation de la population dans ce domaine et à encourager les échanges d'informations et de meilleures pratiques; insiste sur le fait que les compétences et la formation d'un personnel à même de s'approprier cette approche innovante et d'évaluer de manière juste les avantages associés aux écosystèmes, notamment dans les secteurs de l'approvisionnement en eau, de la purification de l'eau, des déchets, de la construction, de la gestion des catastrophes, de l'agriculture, du tourisme et de la santé, facilitent le développement de l'infrastructure verte;
25. estime que l'intégration de l'infrastructure verte dans tous les secteurs est une condition sine qua non à la conduite d'une politique crédible dans ce domaine;
26. souligne le rôle que les propriétaires et les gestionnaires des sols, les organisations de la société civile, les sciences citoyennes, la responsabilité citoyenne et la participation publique peuvent jouer dans la planification, la mise en œuvre, le maintien et la surveillance des projets d'infrastructure verte au niveau local, et demande instamment aux États membres de faciliter ces processus; [Am. 3]
27. approuve l'élaboration d'une stratégie consistant à définir des axes prioritaires pour les projets d'infrastructure verte en Europe et souligne la nécessité d'augmenter le nombre de stratégies et de projets interrégionaux et transfrontaliers;
28. soutient l'initiative RTE-V annoncée dans la communication et appelle la Commission à initier l'élaboration d'un projet de RTE-V d'ici 2015;
29. met l'accent sur le potentiel d'innovation associé à l'infrastructure verte et sur le rôle déterminant que les PME peuvent jouer dans ce domaine; rappelle que les normes, certifications et labellisations communes doivent encourager les investissements dans l'infrastructure verte et dégager un espace ad hoc pour les premiers entrants;
30. attend avec intérêt l'évaluation, en 2015, de la stratégie en faveur de la biodiversité ainsi que l'évaluation qui suivra, en 2017, de la communication relative à l'infrastructure verte, en vue d'ancrer plus encore l'infrastructure verte dans les investissements pertinents prévus au niveau de l'Union, et les évaluations à mi-parcours des politiques concernées (bilan de santé de la PAC, évaluation à mi-parcours de la DG REGIO, etc.);
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31. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.