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Procédure : 2014/2997(RSP)
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PV 11/02/2015 - 9.17
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P8_TA(2015)0031

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Mercredi 11 février 2015 - Strasbourg
Rapport du Sénat américain sur l'utilisation de la torture par la CIA
P8_TA(2015)0031B8-0098/2015

Résolution du Parlement européen du 11 février 2015 sur le rapport du Sénat américain sur l'utilisation de la torture par la CIA (2014/2997(RSP))

Le Parlement européen,

–  vu le traité sur l'Union européenne (UE), et notamment ses articles 2, 3, 4, 6, 7 et 21,

–  vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et notamment ses articles 1, 2, 3, 4, 18 et 19,

–  vu la convention européenne des droits de l'homme et les protocoles qui l'accompagnent,

–  vu les instruments des Nations unies en matière de droits de l'homme, et notamment le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 et les protocoles y afférents, et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées du 20 décembre 2006,

–  vu les arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme dans les affaires Al Nasiller contre Pologne, Abu Zubaydah contre Lituanie, Husayn (Abu Zubaydah) contre Pologne, El-Masri contre l'ancienne République yougoslave de Macédoine, Nasr et Ghali contre Italie, et Al Nashiri contre Roumanie,

–  vu l'arrêt rendu par un tribunal italien, en vertu duquel ont été déclarés coupables et condamnées à des peines de prison, in absentia, 22 agents de la CIA, un pilote de l'armée de l'air et deux agents italiens en raison du rôle qu'ils ont joué dans l'enlèvement de l'imam de Milan, Abou Omar, en 2003,

–  vu sa résolution du 6 juillet 2006 sur l'utilisation alléguée de pays européens par la CIA pour le transport et la détention illégale de prisonniers, à mi-parcours des travaux de la commission temporaire(1),

–  vu sa résolution du 14 février 2007 sur l'utilisation alléguée de pays européens par la CIA pour le transport et la détention illégale de prisonniers(2),

–  vu sa résolution du 11 septembre 2012 intitulée "Allégations de transport et de détention illégale de prisonniers par la CIA dans des pays européens: suivi du rapport de la commission TDIP du PE"(3),

–  vu sa résolution du 10 octobre 2013 intitulée "Allégations de transport et de détention illégale de prisonniers par la CIA dans des pays européens(4),

–  vu l'étude de la commission des renseignements (Select Committee on Intelligence ou SSCI) du Sénat américain sur le programme de détention et d'interrogatoire de l'Agence centrale de renseignement (CIA), et de l'utilisation qu'elle a faite de diverses formes de torture sur les détenus entre 2001 et 2006,

–  vu ses résolutions sur Guantánamo, dont la plus récente est celle du 23 mai 2013 intitulée "Guantánamo: grève de la faim de plusieurs détenus"(5),

–  vu les conclusions du Conseil sur les droits fondamentaux et l'état de droit et sur le rapport 2013 de la Commission sur l'application de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (Luxembourg, 5 et 6 juin 2014),

–  vu sa résolution du 27 février 2014 sur la situation des droits fondamentaux dans l'Union européenne (2012)(6),

–  vu la communication de la Commission intitulée "Un nouveau cadre de l'UE pour renforcer l'état de droit" du 11 mars 2014 (COM(2014)0158),

–  vu le rapport de la Commission intitulé "Rapport anticorruption de l'UE" du 3 février 2014 (COM(2014)0038),

–  vu sa résolution du 12 mars 2014 sur le programme de surveillance de la NSA, les organismes de surveillance dans divers États membres et les incidences sur les droits fondamentaux des citoyens européens et sur la coopération transatlantique en matière de justice et d'affaires intérieures(7),

–  vu la directive 2012/29/UE du 25 octobre 2012 établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité et remplaçant la décision-cadre 2001/220/JAI du Conseil,

–  vu l'article 123, paragraphe 2, de son règlement,

A.  considérant que le respect des droits fondamentaux et de l'État de droit est un élément essentiel au succès des politiques de lutte contre le terrorisme;

B.  considérant que le Parlement a condamné à plusieurs reprises les détentions secrètes de la CIA et le programme sur les restitutions extraordinaires, qui ont donné lieu à de multiples violations des droits de l'homme, y compris à l'utilisation de la torture et d'autres traitements inhumains ou dégradants, à des enlèvements, à des détentions secrètes, à des détentions sans procès et à des violations du principe de non-refoulement;

C.  considérant que, malgré leur caractère singulier, les politiques de sécurité nationale et de lutte contre le terrorisme se doivent de respecter le principe de responsabilité, et qu'il ne peut être question d'impunité dans les cas de violations du droit international et des droits de l'homme;

D.  considérant que l'obligation de rendre des comptes pour les restitutions extraordinaires, les enlèvements, les détentions secrètes illégales et les tortures est essentielle pour protéger et promouvoir efficacement les droits de l'homme dans le cadre des politiques internes et externes de l'Union, ainsi que pour garantir l'adoption de politiques de sécurité légitimes et efficaces fondées sur l'état de droit;

E.  considérant que le Parlement a demandé à plusieurs reprises que soient menées des enquêtes approfondies sur la collaboration des États membres de l'Union avec le programme secret de détention et de restitutions extraordinaires de la CIA;

F.  considérant que l'ancien Parlement, dans sa résolution du 10 octobre 2013 mentionnée ci-dessus, a invité le Parlement actuel à continuer à remplir et à mettre en œuvre le mandat de la commission temporaire sur l'utilisation alléguée de pays européens par la CIA pour le transport et la détention illégale de prisonniers, et, par conséquent, à veiller à ce que ses recommandations soient suivies d'effets, à examiner les nouveaux éléments susceptibles de se faire jour et à exercer pleinement, en les étendant, ses droits d'enquête;

G.  considérant que le rapport de la commission des renseignements du Sénat américain met en lumière de nouveaux faits qui renforcent les allégations selon lesquelles un certain nombre d'États membres de l'Union européenne, les administrations, les fonctionnaires ainsi que les agents de leurs services de sécurité et de renseignement étaient complices du programme secret de détention et de restitutions extraordinaires de la CIA, usant parfois de la corruption et du versement de sommes d'argent substantielles par la CIA en échange de leur coopération;

H.  considérant que le rapport de la commission des renseignements du Sénat américain réfute les affirmations de la CIA selon lesquelles la torture a permis d'obtenir des informations qui n'auraient pu être obtenues au moyen de techniques d'interrogatoire traditionnelles et non violentes;

I.  considérant qu'une procédure pénale ouverte (n° 150/09 devant le tribunal central n° 5 (Juzgado Central No 5)) concernant la torture pratiquée sur la base navale de la baie de Guantánamo, est en cours d'examen devant la Cour nationale (Audiencia Nacional) du Royaume d'Espagne;

J.  considérant que le président des États-Unis, Barack Obama, s'est engagé à fermer, d'ici janvier 2010, le centre de détention de Guantánamo, où sont détenus, sans que des poursuites pénales aient été engagées contre eux devant une juridiction pénale, 122 prisonniers, dont 54 ont été officiellement déclarés libérables;

K.  considérant que l'assistance apportée par les États membres de l'Union européenne pour la réinstallation d'une partie des détenus de Guantánamo a été lente et limitée;

1.  se félicite de la décision de la commission des renseignements du Sénat américain de publier le résumé de son rapport sur le programme de détention et d'interrogatoire de l'Agence centrale de renseignement; encourage la publication de ce rapport dans sa totalité, sans qu'y soient apportées de modifications excessives et inutiles;

2.  fait part de sa vive condamnation à l'égard des pratiques d'interrogatoires illégales qui ont caractérisé ces opérations de lutte contre le terrorisme; souligne les conclusions tirées par le Sénat américain, selon lesquelles les violentes méthodes utilisées par la CIA n'ont pas permis d'apporter des éléments de renseignement qui auraient empêché d'autres attentats terroristes; rappelle sa condamnation absolue de la torture;

3.  estime que le climat d'impunité qui entoure le programme de la CIA a permis que se poursuivent les violations des droits fondamentaux, ainsi que l'illustrent les programmes de surveillance de masse de l'Agence nationale de sécurité américaine et des services secrets de plusieurs États membres de l'Union;

4.  invite les États-Unis à enquêter et à engager des poursuites à l'encontre des multiples violations des droits de l'homme résultant des programmes de restitution et de prisons secrètes de la CIA, et à répondre à toutes les demandes d'information, d'extradition ou de recours effectifs présentées par les États membres de l'Union en rapport avec le programme de la CIA;

5.  demande une fois encore aux États membres d'enquêter sur les allégations selon lesquelles il y avait sur leur territoire des prisons secrètes où des personnes ont été détenues dans le cadre du programme de la CIA, et de poursuivre les personnes ayant participé à ces opérations, en tenant compte de tous les nouveaux éléments de preuve mis au jour;

6.  demande aux États membres de faire toute la lumière sur les récentes allégations d'après lesquelles des cas de restitution illicite, de détention et de torture auraient eu lieu sur leur territoire et de poursuivre les responsables;

7.  exprime sa préoccupation face aux obstacles auxquels se sont heurtées les enquêtes parlementaires et judiciaires nationales sur la participation de certains États membres au programme de la CIA, aux recours abusifs au secret d'État et à la classification de documents ayant pour effet la clôture d'une procédure pénale et garantissant de facto l'impunité aux auteurs de violations des droits de l'homme;

8.  demande que les conclusions des enquêtes relatives à la participation des États membres au programme de la CIA, notamment l'enquête Chilco, soient publiées sans délai;

9.  plaide pour l'adoption d'une stratégie interne propre à l'Union en matière de droits fondamentaux et invite la Commission à proposer l'adoption d'une telle stratégie ainsi que d'un plan d'action correspondant;

10.  charge sa commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures, en association avec sa commission des affaires étrangères, et notamment avec sa sous-commission des droits de l'homme, de reprendre son enquête sur les allégations de transport et de détention illégale de prisonniers par la CIA dans les pays européens, et d'en faire rapport en plénière dans un délai d'un an:

   en assurant le suivi des recommandations formulées dans sa résolution du 11 septembre 2012 mentionnée ci-dessus sur des allégations de transport et de détention illégale de prisonniers par la CIA dans des pays européens: suivi du rapport de la commission TDIP du PE";
   en facilitant et en soutenant l'entraide et la coopération judiciaires entre les autorités chargées des enquêtes, dans le respect des droits de l'homme, ainsi que la coopération entre les avocats participant à l'établissement des responsabilités dans les États membres;
   en organisant une audition, à laquelle participeraient les parlements et les praticiens nationaux pour faire le point sur toutes les enquêtes parlementaires et judiciaires passées et en cours;
   en organisant une mission parlementaire d'information, associant tous les groupes politiques intéressés, dans les États membres de l'Union où auraient existé des sites de détention secrets de la CIA;
   en recueillant tous les informations et éléments probants sur d'éventuels pots-de-vin ou autres actes de corruption en lien avec le programme de la CIA;

11.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission ainsi qu'aux gouvernements et aux parlements des États membres.

(1)JO C 303 E du 13.12.2006, p. 833.
(2)JO C 287 E du 29.11.2007, p. 309.
(3)JO C 353 E du 3.12.2013, p. 1.
(4)Textes adoptés de cette date, P7_TA(2013)0418.
(5)Textes adoptés de cette date, P7_TA(2013)0231.
(6)Textes adoptés de cette date, P7_TA(2014)0173.
(7)Textes adoptés de cette date, P7_TA(2014)0230.

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