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Procédure : 2015/2550(RSP)
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RC-B8-0143/2015

Débats :

PV 12/02/2015 - 3.2
CRE 12/02/2015 - 3.2

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PV 12/02/2015 - 4.2

Textes adoptés :

P8_TA(2015)0037

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Jeudi 12 février 2015 - Strasbourg
Arabie Saoudite: le cas de Raïf Badawi
P8_TA(2015)0037RC-B8-0143/2015

Résolution du Parlement européen du 12 février 2015 sur le cas de Raïf Badawi en Arabie Saoudite (2015/2550(RSP))

Le Parlement européen,

–  vu ses résolutions antérieures sur l'Arabie saoudite, notamment celles portant sur les droits de l'homme, et, en particulier, sa résolution du 11 mars 2014 sur l'Arabie saoudite, ses relations avec l'Union et son rôle au Moyen-Orient et en Afrique du Nord(1),

–  vu le communiqué du 9 janvier 2015 du porte-parole de Federica Mogherini, vice-présidente de la Commission et haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité,

–  vu le communiqué de Zeid Ra’ad Al Hussein, haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, dans lequel il demande aux autorités saoudiennes de mettre fin au châtiment de Raïf Badawi,

–  vu l'article 18 de la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 et l'article 19 du pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966,

–  vu la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

–  vu la charte arabe des droits de l'homme, ratifiée par l'Arabie saoudite en 2009, dont l'article 32, paragraphe 1, garantit le droit à l'information et la liberté d'opinion et d'expression, et l'article 8 interdit la torture physique ou psychologique et les traitements cruels, dégradants, humiliants et inhumains,

–  vu les orientations de l'Union européenne sur la torture et les mauvais traitements et celles concernant les défenseurs des droits de l'homme,

–  vu l'article 135, paragraphe 5, et l'article 123, paragraphe 4 de son règlement,

A.  considérant que Raïf Badawi, blogueur et militant des droits de l'homme, qui avait créé un site web, intitulé "Réseau libéral saoudien", consacré aux débats sociaux, politiques et religieux, et considéré comme insultant pour l'islam, a été accusé d'apostasie puis condamné, en mai 2014, par le tribunal pénal de Djedda, à dix années d'emprisonnement, à mille coups de fouet et à une amende d'un million de SAR (soit 228 000 EUR); que le jugement prononcé interdit également à M. Badawi d'utiliser les médias et de quitter le pays pendant dix ans après sa libération;

B.  considérant que, le 9 janvier 2015, M. Badawi a reçu, sur l'esplanade de la mosquée de Djedda, une première cinquantaine de coups de fouet, qui lui ont occasionné des blessures si profondes que, lors de l'examen médical qu'il a subi dans une clinique carcérale, les médecins ont estimé qu'il ne supporterait pas une nouvelle flagellation;

C.  considérant que les décisions de justice prévoyant des châtiments corporels, dont la flagellation, sont strictement interdites par le droit international en matière de droits de l'homme, et notamment par la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, que l'Arabie saoudite a ratifiée;

D.  considérant que, le 6 juillet 2014, Walid Abou Al-Khaïr, avocat de Raïf Badawi et éminent défenseur des droits de l'homme, qui a créé l'association de défense des droits de l'homme intitulée "Observatoire des droits de l'homme en Arabie saoudite", a été condamné par le tribunal pénal spécial à 15 années d'emprisonnement et à 15 autres années d'interdiction de voyager;

E.  considérant que le cas de M. Badawi fait partie des nombreuses affaires dans lesquelles, en Arabie saoudite, des militants des droits de l'homme et autres partisans des réformes font l'objet de lourdes peines et de harcèlement, mais aussi de persécutions pour avoir exprimé leur avis, nombre d'entre eux ayant été condamnés au terme de procédures ne respectant pas les normes internationales d'équité des procès, comme l'a confirmé l'ancien haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme en juillet 2014;

F.  considérant que l'Arabie saoudite possède une communauté active de militants en ligne et compte le plus grand nombre d'utilisateurs de Twitter au Moyen-Orient; que, cependant, l'internet y est soumis à une censure rigoureuse, que des milliers de sites web y sont bloqués et qu'il faut obtenir une autorisation du ministère de l'information pour pouvoir créer des blogues et des sites web; que l'Arabie saoudite figure sur la liste des "ennemis d'internet", tenue par Reporters sans frontières, en raison de la censure qui frappe les médias saoudiens et des peines infligées à celles et à ceux qui critiquent le gouvernement ou la religion;

G.  considérant que la liberté d'expression et la liberté de la presse et des médias, aussi bien en ligne qu'hors ligne, sont des conditions préalables cruciales et des catalyseurs de la démocratisation et des réformes, et sont essentielles pour l'équilibre des pouvoirs;

H.  considérant que, malgré l'instauration de quelques réformes prudentes durant le règne du feu roi Abdallah, le système politique et social saoudien demeure profondément antidémocratique, relègue les femmes et les chiites au rang de citoyens de deuxième ordre, est résolument discriminatoire à l'encontre des nombreux travailleurs étrangers présents dans le pays et réprime vigoureusement les opinions dissidentes;

I.  considérant que le nombre des exécutions et le rythme auquel elles se succèdent est extrêmement préoccupant; que plus de 87 personnes ont été exécutées en 2014, la plupart par décapitation publique; qu'au moins 21 personnes ont été exécutées depuis le début de l'année  015; que 423 exécutions ont été signalées entre 2007 et 2012; que toute une série d'infractions sont passibles de la peine de mort;

J.  considérant que le Royaume d'Arabie saoudite est un acteur politique, économique, culturel et religieux qui jouit d'une grande influence au Moyen-Orient et dans le monde islamique, et est un membre fondateur de premier plan du Conseil de coopération du Golfe et du G20;

K.  considérant qu'en novembre 2013, l'Arabie saoudite a été élue membre du Conseil des droits de l'homme de l'ONU pour trois ans;

L.  considérant que, pour quantité de crimes et délits, l'État islamique autoproclamé et l'Arabie saoudite prévoient des peines presque identiques, ce notamment en punissant le blasphème, l'assassinat, la pratique de l'homosexualité, le vol et la trahison de la peine de mort, l'adultère de la mort par lapidation et le banditisme de l'amputation des mains et des pieds;

M.  considérant que l'Arabie saoudite est un acteur majeur du financement, de la diffusion et de la promotion dans le monde d'une interprétation particulièrement extrémiste de l'islam; que la conception la plus sectaire de l'islam a inspiré des organisations terroristes telles que l'État islamique autoproclamé et Al-Qaïda;

N.  considérant que les autorités saoudiennes se posent comme partenaire des États membres, dans la lutte mondiale contre le terrorisme tout particulièrement; qu'une nouvelle loi contre le terrorisme adoptée en janvier 2014 comporte des dispositions permettant d'interpréter toutes les manifestations de divergence et les associations indépendantes comme des infractions terroristes;

1.  condamne vigoureusement la flagellation de Raïf Badawi, y voyant un acte de cruauté révoltant des autorités saoudiennes; demande aux autorités saoudiennes d'empêcher toute nouvelle flagellation de Raïf Badawi et de libérer immédiatement, sans condition, cet homme regardé comme un prisonnier d'opinion, qui n'a été emprisonné et condamné que pour avoir exercé son droit à la liberté d'expression; demande aux autorités saoudiennes de veiller à ce que la condamnation et les peines qui ont été prononcées contre lui, dont l'interdiction de quitter le territoire, soient annulées;

2.  demande aux autorités saoudiennes de veiller à ce que Raïf Badawi soit préservé de la torture et de toute autre mauvais traitement, à ce qu'il reçoive tous les soins médicaux que son état requiert, et à ce qu'il bénéficie sans plus tarder d'un accès régulier à sa famille et aux avocats de son choix;

3.  demande aux autorités saoudiennes de libérer sans condition l'avocat de Raïf Badawi ainsi que tous les défenseurs des droits de l'homme et autres prisonniers d'opinion qui n'ont été emprisonnés et condamnés que pour avoir exercé leur droit à la liberté d'expression;

4.  condamne fermement toutes les formes de châtiments corporels, qui constituent des traitements intolérables et dégradants contraires à la dignité humaine, déplore le recours de certains États à la flagellation et réclame avec vigueur son abolition pure et simple; demande aux autorités saoudiennes de respecter l'interdiction de la torture, consacrée tout particulièrement par la convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, que l'Arabie saoudite a signée et ratifiée; invite l'Arabie saoudite à signer le pacte international relatif aux droits civils et politiques;

5.  relève que la réforme de la justice engagée par l'Arabie saoudite permet d'envisager une meilleure protection des droits de la personne, mais reste vivement préoccupé par la situation des droits de l'homme dans ce pays, qui figure toujours parmi les États les plus répressifs du monde; estime que le cas de Raïf Badawi est symptomatique des atteintes à la liberté d'expression et d'opposition pacifique dans le pays, et, plus largement, de la doctrine d'intolérance et d'interprétation extrémiste du droit islamique prônée par le royaume;

6.  demande instamment aux autorités saoudiennes d'abolir le tribunal pénal spécial, qui a été mis en place en 2008 pour juger les affaires de terrorisme, mais devant lequel ont été traduits de plus en plus de dissidents pacifiques pour des raisons manifestement politiques et dans des procédures violant le droit fondamental à un procès équitable;

7.  demande aux autorités saoudiennes d'autoriser la presse et les médias indépendants et de garantir la liberté d'expression, d'association et de réunion pacifique à tous les habitants du royaume; condamne la répression dont les militants et manifestants font l'objet lorsqu'ils manifestent pacifiquement; souligne que la défense pacifique des droits juridiques fondamentaux ou la formulation d'observations critiques sur les médias sociaux sont un droit élémentaire;

8.  rappelle aux dirigeants saoudiens qu'ils se sont engagés à "respecter les normes les plus élevées dans la promotion et la protection des droits de l'homme" lorsque leur pays a été élu membre du Conseil des droits de l'homme de l'ONU en 2013;

9.  estime que l'Arabie saoudite serait un partenaire plus crédible et efficace de la lutte contre les organisations terroristes, dont l'État islamique autoproclamé et Al-Qaïda, si elle ne se livrait pas à des pratiques anachroniques et extrémistes, telles que la décapitation publique, la lapidation et d'autres formes de torture, semblables à celles appliquées par Daech;

10.  invite le Service européen pour l'action extérieure et la Commission à apporter, aux organisations de la société civile et aux particuliers qui défendent les droits de l'homme en Arabie saoudite, un soutien actif et inventif, pouvant prendre la forme de visites de prison, d'observations de procès et de déclarations publiques;

11.  charge sa délégation pour les relations avec la péninsule arabique d'aborder le cas de Raïf Badawi et des autres prisonniers d'opinion au cours de son prochain déplacement en Arabie saoudite, puis d'en rendre compte à sa sous-commission des droits de l'homme;

12.  demande que l'Union européenne et ses États membres repensent leurs relations avec l'Arabie saoudite, de façon à ce que celle-ci puisse promouvoir ses intérêts économiques et en matière d'énergie et de sécurité, tout en ne donnant pas matière à douter de ses grands engagements dans le domaine des droits de l'homme;

13.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au Service européen pour l'action extérieure, au secrétaire général de l'ONU, au haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, à Sa Majesté Salman ben Abdulaziz, au gouvernement du Royaume d'Arabie saoudite et au secrétaire général du centre pour le dialogue national du Royaume d'Arabie saoudite.

(1) Textes adoptés de cette date, P7_TA(2014)0207.

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