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Procédure : 2015/2599(RSP)
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RC-B8-0240/2015

Débats :

PV 12/03/2015 - 6.1
CRE 12/03/2015 - 6.1

Votes :

PV 12/03/2015 - 8.1

Textes adoptés :

P8_TA(2015)0071

Textes adoptés
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Jeudi 12 mars 2015 - Strasbourg
Récents attentats et enlèvements, notamment d'Assyriens, commis par Daech au Proche-Orient
P8_TA(2015)0071RC-B8-0240/2015

Résolution du Parlement européen du 12 mars 2015 sur les récents attentats et enlèvements, notamment d'Assyriens, commis par Daech au Proche-Orient (2015/2599(RSP))

Le Parlement européen,

–  vu l'article 18 de la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948,

–  vu l'article 9 de la convention européenne des droits de l'homme (CEDH) de 1950,

–  vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966,

–  vu la déclaration des Nations unies de 1981 sur l'élimination de toutes formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction,

–  vu la déclaration des Nations unies de 1992 sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques,

–  vu la convention internationale des Nations unies pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées,

–  vu ses résolutions antérieures sur l'Iraq, la Syrie, la Libye et l'Égypte, notamment sa déclaration du 10 octobre 2013 sur les violences et persécutions perpétrées récemment contre des Chrétiens, entre autres à Maaloula (Syrie) et à Peshawar (Pakistan), et sur le sort du pasteur Saeed Abedini (Iran)(1), sa résolution du 18 septembre 2014 sur la situation en Iraq et en Syrie: offensive de l'État islamique et persécution des minorités(2), et sa résolution du 12 février 2015 sur la crise humanitaire en Iraq et en Syrie, et le rôle de Daech en particulier(3),

–  vu les lignes directrices de l'Union sur la promotion et la protection de la liberté de religion ou de conviction,

–  vu les déclarations de la vice-présidente de la Commission/haute représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR) sur la violence et les persécutions à l'encontre des Chrétiens et d'autres communautés du Proche-Orient , notamment celle du 16 février 2015 sur la décapitation de 21 Chrétiens coptes égyptiens en Libye,

–  vu la communication conjointe de la Commission et de la VP/HR au Parlement européen et au Conseil sur des éléments relatifs à une stratégie régionale de l'UE pour la Syrie et l'Iraq, ainsi que pour la menace que représente Daech,

–  vu la déclaration du Conseil de sécurité des Nations unies du 25 février 2015 condamnant l'enlèvement de plus de 100 Assyriens par l’État islamique d’Iraq et du Levant,

–  vu le rapport de la commission d'enquête internationale indépendante des Nations unies sur la République arabe syrienne intitulé "L'état de terreur: vivre sous l'EIIL en Syrie", publié le 14 novembre 2014,

–  vu les rapports annuels et les rapports intérimaires du rapporteur spécial des Nations unies sur la liberté de religion ou de conviction,

–  vu l'article 135, paragraphe 5, et l'article 123, paragraphe 4, de son règlement,

A.  considérant que la promotion de la démocratie et le respect des droits de l'homme et des libertés civiles constituent des principes et des objectifs fondamentaux de l'Union européenne, et sont le dénominateur commun de ses relations avec les pays tiers;

B.  considérant que, conformément au droit international en matière de droits de l'homme et à l'article 18 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion; que ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou en commun, tant en public qu'en privé, par le culte, l'accomplissement des rites, les pratiques et l'enseignement; que, d'après le comité des droits de l'homme des Nations unies, la liberté de religion ou de conviction protège toutes les croyances, déistes, non déistes ou athées;

C.  considérant que l'Union européenne a exprimé à plusieurs reprises son attachement à la liberté de pensée, à la liberté de conscience et à la liberté de religion ou de croyance et a souligné que les gouvernements sont tenus de garantir ces libertés à travers le monde;

D.  considérant que les Nations unies et d'autres organisations internationales font état de graves violations généralisées, tant des droits internationaux en matière de droits de l'homme que du droit humanitaire, par Daech et par ses groupes inféodés en Syrie et en Iraq, en particulier à l'encontre des minorités ethniques et religieuses, notamment d'assassinats ciblés, de conversions de force, de rapts, de traite de femmes, de réduction en esclavage de femmes et d'enfants, de recrutements d'enfants destinés à commettre des attentats-suicides, d'agressions physiques et sexuelles ainsi que d'actes de torture; que le sort de celles et de ceux qui n'ont pu encore s'échapper des zones tombées aux mains des forces de Daech suscite des lourdes inquiétudes car pratiquement aucune aide humanitaire internationale ne peut parvenir dans ces régions;

E.  considérant que Daech s'est lancé dans une campagne visant à effacer toute trace des communautés religieuses et confessionnelles qui ne prônent pas la même interprétation de l'islam en tuant ou en expulsant les fidèles, en détruisant leurs lieux saints, leurs sites et symboles historiques, notamment les œuvres uniques et irremplaçables que l'Unesco a classées patrimoine mondial, exactions que le groupe terroriste qualifie d'"épuration culturelle";

F.  considérant que dans les zones qu'il contrôle, Daech cause un préjudice inacceptable et irréparable aux civilisations millénaires; que, notamment en Iraq et en Syrie mais également dans d'autres régions du Proche-Orient, la situation à laquelle sont confrontées les communautés chrétiennes est telle qu'elle est de nature à mettre en danger l'existence même de ces populations qui, si elles venaient à disparaître, se traduirait par la perte d'une partie importante de l'héritage religieux de ces pays;

G.  considérant que Daech vise les populations chrétiennes, yézidies, turkmènes, chiites, chabaks, sabéennes, kaka'e et sunnites, qui refusent son interprétation de l'islam, ainsi que diverses minorités religieuses; que certaines de ces communautés étaient déjà la cible de mouvements radicaux avant l'avancée de Daech; que les Chrétiens notamment sont, depuis de nombreuses années, la cible de divers groupes extrémistes ou djihadistes, obligeant ainsi plus de 70 % des Chrétiens d'Iraq et plus de 700 000 Chrétiens syriens à fuir leur pays;

H.  considérant qu'en Iraq, 250 000 Chaldéens, Assyriens et Syriaques constituent un groupe ethno-religieux distinct et que le nombre de ces populations vivant en Syrie avant l'éclatement de la guerre civile en 2011 était estimé à 40 000;

I.  considérant que Daech a posté, le 15 février 2015, une vidéo montrant la décapitation de 21 Coptes égyptiens en Libye; que ces Coptes, qui étaient des travailleurs migrants originaires d'une région pauvre d'Égypte, ont été kidnappés à Syrte, en Libye;

J.  considérant que, le 23 février 2015, quelque 220 Assyriens ont été enlevé par Daech près de Tel Tamer sur la rive sud du Khabur, dans le nord-est de la Syrie; que, durant la même campagne, les extrémistes ont également détruit des biens et des lieux saints des Chrétiens; que des douzaines d'Assyriens ont succombé à l'attaque de Daech; que Daech aurait publié une déclaration en février 2015 demandant aux villageois assyriens de la province syrienne de Hasaka de verser le djizia, l'impôt prélevé sur les non-Musulmans et datant de l'ancienne loi islamique avant d'être aboli en 1856 dans l'Empire ottoman, ou de se convertir à l'islam sous peine d'être exterminés; que les informations font état d'importantes attaques de Daech contre des villes chrétiennes assyriennes de la région du Khabur depuis le 9 mars 2015;

K.  considérant que, depuis le 1er mars 2015, Daech a libéré des douzaines d'Assyriens, en majorité des enfants et des personnes âgées, à la suite de négociations avec les chefs tribaux mais que la plupart des Assyriens demeurent toutefois prisonniers et que les terroristes ont menacé de les tuer si les bombardements de la coalition continuaient;

L.  considérant que Daech, dans le cadre d'une politique délibérée d'épuration culturelle et religieuse, aurait détruit plus de 100 églises en Iraq et au moins 6 en Syrie, sans compter plusieurs mosquées chiites en Iraq; qu'en février 2015, des combattants de Daech ont délibérément donné un large écho à la destruction dans le musée de Mossoul de statues et de symboles datant des anciens empires assyrien et akkadien; que Daech a ensuite rasé au bulldozer l'ancienne cité assyrienne de Nimrud et que, tout dernièrement, on lui impute la destruction du site de Hatra, classé au patrimoine mondial de l'Unesco; que le régime syrien aurait pilonné des églises dans des quartiers tenus par l'opposition, par exemple à Homs en 2012 et à Idlib en 2013;

M.  considérant que Daech continue de persécuter, de mutiler et d'assassiner, parfois de manière particulièrement cruelle et inimaginable, des membres des minorités religieuses et ethniques, des journalistes, des prisonniers de guerre ou des militants; que des crimes de guerre et diverses violations du droit international humanitaire et du droit international en matière de droits de l'homme ne cessent d'être perpétrés jour après jour, à grande échelle et par d'autres parties au conflit également, notamment par le régime Assad;

N.  considérant que l'une des origines de la violence de Daech est le salafisme, notamment une interprétation wahhabite extrémiste de l'islam;

1.  est consterné et attristé par les exactions de Daech contre les Assyriens de Syrie et les Coptes de Libye et condamne en des termes les plus vifs ces actes commis par des extrémistes; exprime sa solidarité envers les familles des victimes et envers la communauté chrétienne assyrienne de Syrie et la communauté copte d'Égypte, ainsi qu'envers tous les autres groupes ou personnes touchés par la violence de Daech;

2.  condamne vigoureusement Daech et ses violations caractérisées des droits de l'homme qui équivalent à des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre en vertu du statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) et qu'il serait possible de qualifier de génocide; est particulièrement inquiet que ce groupe terroriste vise délibérément les communautés chrétienne, yézidies, turkmènes, chiites, chabaks, sabéennes, kaka'e et sunnites qui refusent son interprétation de l'islam et qu'il tente ainsi d'exterminer les minorités religieuses dans les régions qu'il contrôle; fait observer que les auteurs de ces actes ne sauraient restés impunis et qu'ils doivent être traduits devant la CPI; en profite pour rappeler que l'enlèvement des évêques Yohanna Ibrahim et Paul Yazigi par des rebelles armés dans la province syrienne d'Alep le 22 avril 2013 n'a toujours pas été tiré au clair;

3.  condamne par ailleurs les tentatives de Daech d'exporter son idéologie extrémiste et totalitaire, ainsi que la violence, dans d'autres pays de la région sans toutefois s'y limiter;

4.  soutient les efforts déployés contre Daech par la communauté internationale, notamment les actions militaires de la coalition internationale menée par les États‑Unis et invite les États membres de l'Union qui ne l'ont pas déjà fait à réfléchir aux moyens d'y contribuer, notamment en identifiant et en bloquant les fonds secrets détenus par Daech à l'étranger;

5.  appelle la coalition internationale à s'engager plus avant pour éviter l'enlèvement des minorités, telles que les centaines de Chrétiens assyriens dans le nord de la Syrie; souligne l'importance de garantir un refuge pour les Chaldéens, Assyriens, Syriaques et autres populations exposées des plaines de Ninive, en Iraq, une région où de nombreuses minorités ethniques et religieuses sont historiquement établies et cohabitent pacifiquement;

6.  invite instamment l'Union et ses États membres à adopter une approche anticipative visant à prévenir la menace que constitue l'expansion de Daech dans autres pays et régions que l'Iraq et la Syrie; est, dans ce contexte, particulièrement préoccupé par la situation en Libye, notamment en raison de la proximité géographique avec l'Union et les zones de conflit en Afrique;

7.  invite instamment l'Union et ses États membres, ainsi que les partenaires de l'OTAN, à se pencher sur le rôle ambivalent de certains pays dans le conflit, notamment quand ils contribuent ou continuent de contribuer, activement ou passivement, à la montée en force de Daech et de divers autres groupes extrémistes; s'inquiète particulièrement dans ce contexte du financement de la diffusion de l'interprétation wahhabite de l'islam par les organismes publics et privés de pays du Golfe et demande à ces pays de mettre un terme à leur financement; invite par ailleurs ces pays à mettre fin au financement des organisations terroristes opérant depuis leur territoire; demande à la Turquie de jouer un rôle positif dans la lutte contre Daech et de permettre sans plus attendre aux minorités chrétiennes et aux diverses populations persécutées de fuir la Syrie en traversant la frontière turque pour y chercher refuge;

8.  encourage la coopération avec les forces locales et régionales nouvellement émergentes telles que le gouvernement régional kurde en Iraq et les différents groupuscules kurdes tout en se félicitant du rôle joué par les unités de protection du peuple (YPG) dans la libération de Kobané, avec le Conseil militaire syriaque ainsi qu'avec les entité autonomes de la région qui ont montré un attachement plus profond aux droits de l'homme et à la démocratie que les dirigeants de leurs pays; salue notamment le courage des forces kurdes peshmergas qui ont tant fait pour protéger les minorités en danger;

9.  se montre préoccupé par les informations indiquant que les minorités chrétiennes n'ont pas accès aux camps de réfugiés de la région car ils seraient trop dangereux pour eux; demande que l'Union veille à ce que son aide au développement cible l'ensemble des minorités déplacées par le conflit; exhorte l'Union à utiliser l'expérience et les réseaux en place des églises locales et régionales ainsi que les organisations confessionnelles internationales de secours pour fournir un appui financier ou autre, afin que l'ensemble des minorités puisse bénéficier de la protection et du concours de l'aide européenne;

10.  estime qu'il est impératif que le Conseil et le Service européen pour l'action extérieure engagent une coopération avec les partenaires internationaux et régionaux sur un scénario post-Daech en tenant compte du besoin urgent de dialogue et de réconciliation entre les cultures et les religions;

11.  dénonce la destruction des sites et des symboles culturels par Daech en Syrie et en Iraq, qui sont autant d'agressions contre le patrimoine culturel de toutes les populations de ces pays et de l'humanité en général;

12.  invite instamment l'Union et ses États membres à coopérer avec les partenaires internationaux et locaux pour préserver aussi largement que possible les patrimoines, qu'ils soient assyriens ou culturel et religieux, dans les territoires occupés par Daech; invite par ailleurs le Conseil à se mobiliser contre le commerce illégal d'objets anciens provenant de ces territoires;

13.  confirme et promeut le droit inaliénable de toutes les minorités religieuses et ethniques d'Iraq et de Syrie, dont les Chrétiens, de continuer à vivre sur leurs terres d'origine dans la dignité, sur un pied d'égalité et en sécurité, et de pratiquer librement leurs religions; à cet égard, invite instamment tous les pays membres des Nations unies à dénoncer catégoriquement la violence et à défendre en particulier les droits des minorités; estime que pour soulager les souffrances et endiguer l'exode massif des Chrétiens et d'autres populations autochtones de la région, il est nécessaire que les responsables politiques et religieux régionaux se déclarent clairement et sans équivoque en faveur du maintien de leur présence et de leurs droits en tant que citoyens de leurs pays;

14.  estime illégitime et désapprouve sans réserve l'annonce par l'État islamique de la création d'un califat dans les régions sur lesquelles il a désormais le contrôle; souligne que la création et l'expansion du "califat islamique", ainsi que les agissements d'autres groupes extrémistes au Proche-Orient, constituent une menace directe pour la sécurité de la région et des pays européens;

15.  confirme son engagement en faveur de la liberté de pensée, de conscience, de religion ou de conviction, dès lors qu'elle constitue un droit de l'homme fondamental garanti par les instruments juridiques international auxquels la plupart des pays du monde ont souscrit et qui sont reconnus comme ayant une valeur universelle;

16.  soutient toutes les initiatives, notamment dans l'Union, visant à promouvoir le dialogue et le respect mutuel entre les communautés religieuses; invite toutes les autorités religieuses à promouvoir la tolérance et à prendre des initiatives contre la haine et la radicalisation violente et extrémiste;

17.  invite instamment l'Union à étudier plus avant des politiques antiterroristes autres que celles déjà en place, et ce dans le cadre des droits de l'homme, et à continuer d'œuvrer avec les États membres pour promouvoir des politiques qui font obstacle à la radicalisation sur le sol européen, au développement d'un discours haineux et à l'incitation de la violence sur Internet; invite instamment les États membres à collaborer par ailleurs avec le Conseil de sécurité et l'Assemblée générale des Nations unies pour battre en brèche le développement d'une idéologie djihadiste et extrémiste dans le monde;

18.  charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice‑présidente de la Commission/haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aux gouvernements et aux parlements des États membres, à la coalition nationale syrienne, au gouvernement et au Parlement d'Iraq, au gouvernement régional du Kurdistan en Iraq, au président de la République arabe d'Égypte, au Conseil des députés à Tobrouk (Libye) et au gouvernement libyen, à la Ligue des États arabes, au secrétaire général des Nations unies et au Conseil des droits de l'homme des Nations unies.

(1)Textes adoptés de cette date, P7_TA(2013)0422.
(2)Textes adoptés de cette date, P8_TA(2014)0027.
(3)Textes adoptés de cette date, P8_TA(2015)0040.

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