Violations des droits de l’homme, y compris de la liberté de religion, au Burkina Faso
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Résolution du Parlement européen du 19 décembre 2019 sur les violations des droits de l’homme, y compris de la liberté de religion, au Burkina Faso (2019/2980(RSP))
– vu la déclaration du 10 décembre 2019 du vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR), au nom de l’Union européenne, à l’occasion de la Journée des droits de l’homme,
– vu le communiqué de presse de la Commission publié le 13 novembre 2019 et annonçant l’octroi d’une aide humanitaire supplémentaire de 35 millions d’euros en faveur de la région africaine du Sahel,
– vu la déclaration du 7 novembre 2019 de la porte-parole de la VP/HR sur les attaques au Burkina Faso,
– vu la visite de la VP/HR, Federica Mogherini, dans la région du Sahel en juillet 2019 et son discours du 9 juillet 2019 au Burkina Faso,
– vu la déclaration faite au nom de la VP/HR, Federica Mogherini, le 17 septembre 2019 lors du débat en plénière sur la situation en matière de sécurité au Burkina Faso,
– vu l’étude intitulée «The Freedom of Religion or Belief and the Freedom of Expression» (la liberté de religion ou de conviction et la liberté d’expression), publiée par sa direction générale des politiques externes de l’Union en février 2009,
– vu l’audition publique de sa sous-commission «Droits de l’homme», intitulée «La liberté de religion ou de conviction: la situation des minorités persécutées, et notamment des chrétiens», qui s’est tenue le 22 novembre 2017,
– vu le rapport du 21 novembre 2019 de l’envoyé spécial pour la promotion de la liberté de religion ou de conviction, intitulé «The mandate of the Special Envoy for the promotion of freedom of religion or belief outside the European Union: activities and recommendations» (le mandat de l’envoyé spécial pour la promotion de la liberté de religion ou de conviction à l’extérieur de l’Union européenne: activités et recommandations),
– vu les orientations de l’Union relatives à la promotion et à la protection de la liberté de religion ou de conviction, de 2013,
– vu l’accord de partenariat entre les membres du groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, d’une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d’autre part (accord de Cotonou),
– vu la déclaration communiquée le 1er décembre 2019 par le porte-parole du Haut Représentant de l’Alliance des civilisations des Nations unies sur l’attaque perpétrée contre une église au Burkina Faso,
– vu le rapport au Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU) sur la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel, du 11 novembre 2019,
– vu les informations sur les opérations par pays du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) mises à jour en octobre 2019 concernant le Burkina Faso,
– vu la déclaration du 13 octobre 2019 du secrétaire général de l’ONU sur l’attaque perpétrée contre une mosquée au nord du Burkina Faso,
– vu le rapport nº 8 sur la situation humanitaire au Burkina Faso, publié par l’UNICEF en octobre 2019,
– vu le rapport sur le développement humain 2019 axé sur les inégalités de développement humain au XXIe siècle, et en particulier le rapport sur le développement humain concernant le Burkina Faso,
– vu la déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, dont le Burkina Faso est signataire,
– vu le plan d’action des Nations unies pour la protection des sites religieux, du 12 septembre 2019,
– vu la Constitution du Burkina Faso,
– vu la déclaration des évêques, des prêtres et des délégués laïcs des conférences épiscopales du Burkina Faso, du Niger, du Mali, de Côte d’Ivoire et du Ghana, à l’issue de l’atelier interconférences sur la sécurité au Sahel, qui s’est tenu les 12 et 13 novembre 2019,
– vu la déclaration de l’évêque de Dori, Laurent Birfuoré Dabiré, qui s’est adressé à l’organisation caritative catholique Aide à l’Église en détresse le 5 juillet 2019,
– vu la charte africaine des droits de l’homme et des peuples, adoptée le 27 juin 1981 et entrée en vigueur le 21 octobre 1986,
– vu le Forum de Paris sur la paix des 12 et 13 novembre 2019,
– vu l’article 144, paragraphe 5, et l’article 132, paragraphe 4, de son règlement intérieur,
A. considérant qu’il existe, au Burkina Faso, une longue tradition de tolérance religieuse et de laïcité, mais que le pays est devenu vulnérable à l’instabilité – en particulier du fait de la radicalisation islamiste, qui frappe la région du Sahel dans son ensemble – et qu’il est confronté à une accumulation des difficultés que sont l’escalade de la violence, les déplacements forcés, la faim, la pauvreté et le changement climatique;
B. considérant que l’insécurité croissante au Burkina Faso a débouché sur des crimes terribles commis par des djihadistes et par d’autres groupes armés; que d’après un rapport de l’organisation Human Rights Watch, ces groupes armés présents au Burkina Faso ont exécuté des personnes soupçonnées de collaborer avec le gouvernement, intimidé des professeurs et terrorisé la population civile dans l’ensemble du pays; que les forces de sécurité burkinabè ont réalisé, en 2017 et en 2018, des opérations de lutte contre le terrorisme qui ont entraîné des exécutions extrajudiciaires, des brutalités contre les suspects en détention provisoire et des arrestations arbitraires; que le gouvernement burkinabè s’est engagé à enquêter sur ces allégations;
C. considérant que depuis 2015, des djihadistes et d’autres groupes armés qui opéraient auparavant au Mali, pays voisin, ont terrorisé la population burkinabè et perpétré plusieurs attaques contre des symboles de l’État tels que des cibles militaires, des écoles et des établissements de santé, ainsi que, plus particulièrement, contre des églises et des chrétiens; que depuis 2015, les attaques menées par des djihadistes et d’autres groupes armés ont tué au moins 700 personnes et blessé des milliers d’autres à Ouagadougou et dans les provinces du nord, notamment la province du Soum, puis se sont étendues aux provinces de l’est et de l’ouest en 2018; que la violence ne touche pas seulement les chrétiens; que le 11 octobre 2019, par exemple, une mosquée de la ville de Salmossi, au nord du Burkina Faso, a été attaquée pendant la prière du vendredi;
D. considérant qu’en matière de sécurité, 520 incidents ont été signalés entre janvier et novembre 2019, contre 404 incidents enregistrés entre 2015 et 2019; que rien qu’au mois d’octobre 2019, 52 incidents liés à des groupes armés non étatiques ont été recensés, et que près de 70 % d’entre eux visaient des civils et les forces de sécurité;
E. considérant que des attaques ont été perpétrées tant par des groupes armés transnationaux opérant depuis l’autre côté des frontières avec le Mali et le Niger, y compris le groupe Jamaat Nusrat al-Islam wal-Muslimin et le groupe État islamique dans le Grand Sahara, que par des groupes nationaux, principalement le groupe Ansarul Islam, qui opèrent depuis les provinces du nord et de l’est du Burkina Faso;
F. considérant qu’en 2019, plus de 60 chrétiens ont été tués dans différentes attaques au Burkina Faso, y compris la dernière attaque perpétrée le 1er décembre 2019 contre des fidèles qui assistaient à l’office du dimanche dans une église protestante de la ville de Hantoukoura, à l’est du pays, qui a provoqué la mort de 14 personnes;
G. considérant que plusieurs prêtres, membres du clergé et fidèles des communautés chrétiennes ont été victimes d’assassinats ciblés et d’enlèvements dans l’ensemble du pays; qu’en raison de la montée de la violence, beaucoup de personnes, en particulier dans le nord du pays, ont abandonné leur foyer, comme cela est arrivé dernièrement dans les villages de Hitté et de Rounga, pour fuir vers des camps de déplacés internes (PDI) ou ailleurs dans le pays, notamment vers la capitale, Ouagadougou;
H. considérant que la population du Burkina Faso est principalement sunnite malékite, avec d’importantes minorités religieuses autochtones et chrétiennes; que les frontières religieuses sont floues au Burkina Faso, puisqu’il est courant que les croyants de toutes les religions participent aux pratiques syncrétiques et que la tolérance religieuse est la norme; que des lieux de culte tant chrétiens que sunnites ont été visés récemment par des attaques de guérilla perpétrées par des groupes armés salafistes; que cela a contribué à la montée des tensions entre les religions et que la persécution de communautés religieuses, notamment de personnes d’un grand nombre de confessions chrétiennes, déstructure le tissu social et entraîne une hausse de l’émigration;
I. considérant que les groupes djihadistes cherchent à mettre à rude épreuve la coexistence interconfessionnelle au Burkina Faso, ce qui s’inscrit dans leur stratégie plus large d’alimenter les conflits entre ethnies et entre religions, et de déplacer les populations;
J. considérant que, le gouvernement n’assurant pas de protection suffisante, l’évêque Justin Kientega du diocèse de Ouahigouya, au nord-est du Burkina Faso, a recommandé des mesures de sécurité afin de mieux protéger les chrétiens;
K. considérant qu’à la suite des violences commises au mois d’août, l’évêque de Dori, Laurent Birfuoré Dabiré, président de la conférence épiscopale du Burkina Faso et du Niger, a lancé un appel à la communauté internationale afin qu’elle soutienne davantage les chrétiens du Burkina Faso pour empêcher «l’élimination de la présence chrétienne» dans la région; que des appels répétés ont été lancés pour dénoncer les menaces de censure et soutenir la poursuite du dialogue interreligieux;
L. considérant que le secrétaire général de l’ONU souligne, dans son plan d’action pour la protection des sites religieux, publié le 12 septembre 2019, que les lieux de culte du monde entier doivent être des havres de réflexion et de paix, et non pas des lieux ensanglantés et de terreur, et que les personnes doivent pouvoir suivre et pratiquer leur religion en paix;
M. considérant que les organisations humanitaires, dont beaucoup sont religieuses, jouent un rôle essentiel en apportant une aide aux victimes des violences, notamment aux femmes, aux enfants et aux PDI;
N. considérant que le gouvernement du Burkina Faso ne semble pas être en mesure de mettre efficacement en œuvre des solutions visant à répondre aux immenses défis économiques, sociaux et sécuritaires du pays; que certaines régions, notamment dans le nord-est du pays, sont dans les faits coupées du gouvernement central;
O. considérant que le Burkina Faso fait partie des 10 pays les plus pauvres du monde; que l’instabilité, le changement climatique et le conflit auxquels le pays est confronté réduisent encore ses perspectives économiques, aggravent la pauvreté et entraînent des pénuries alimentaires critiques; que ces conséquences sont aggravées par la désertification rapide de la région nord et les pénuries d’eau, la dégradation des sols et la raréfaction des ressources qui en découlent; que, par conséquent, plus d’un million de personnes sont menacées par les pénuries alimentaires et 1,5 million de personnes ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence;
P. considérant qu’en 2014, le taux d’alphabétisation des adultes était, selon les estimations, de 34,5 %; que la hausse de l’insécurité et du terrorisme dans certaines régions du pays ont des répercussions négatives sur les secteurs de l’éducation et de la santé; que 85 établissements de santé et plus de 2 000 écoles ont dû fermer, fermetures qui ont pénalisé, respectivement, plus d’un million de patients et 300 000 élèves; que 93 autres établissements de santé fonctionnent à un niveau opérationnel minimal en raison de la situation actuellement désastreuse en matière de sécurité;
Q. considérant que les violences au Burkina Faso ont entraîné le déplacement de près d’un demi-million de personnes; que bon nombre d’entre elles sont vulnérables et que les enfants représentent 44 % des personnes déplacées; que le Burkina Faso accueille en outre 31 000 réfugiés maliens; que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés éprouve de graves difficultés pour accéder aux personnes déplacées à l’intérieur du pays et aux réfugiés au Burkina Faso; que les personnes déplacées à l’intérieur du pays et les réfugiés touchés par la crise humanitaire dans la région sont exposés à des risques en matière de protection, et que leur présence peut générer des conflits avec la population locale en raison de la rareté des ressources naturelles si aucune mesure adéquate n’est prise pour leur fournir un toit, un emploi et de quoi se nourrir; que les conflits au sujet des ressources qui résultent de cette situation menacent, à leur tour, de contribuer au cycle des violences dans le pays;
R. considérant qu’au cours des sept dernières années, l’Union européenne a mobilisé plus d’1 milliard d’EUR pour différents programmes de développement au Burkina Faso et a récemment affecté 15,7 millions d’EUR à la lutte contre le problème majeur de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition chez les personnes déplacées à l’intérieur du pays; que le pays est l’un des principaux bénéficiaires du soutien financier du Fonds européen de développement (FED), avec 628 millions d’EUR et reçoit aussi des sommes importantes au titre du fonds fiduciaire d’urgence financé par le FED, à savoir 245,8 millions d’EUR pour la période 2016-2020;
S. considérant que le Burkina Faso participe à la mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), à l’opération hybride de l’Union africaine et des Nations unies au Darfour (MINUAD), au partenariat transsaharien de lutte contre le terrorisme et au G5 Sahel; que sa participation à ces missions et initiatives a fait de ce pays l’une des cibles principales des groupes armés non étatiques qui cherchent à perturber et à entraver la contribution du Burkina Faso à la sécurité régionale; qu’un rapport du Secrétaire général des Nations unies a mis en lumière les violations des droits de l’homme commises par les troupes maliennes du G5 Sahel;
T. considérant que l’Union contribue directement à la stabilité dans la région du Sahel par l’intermédiaire des missions civiles EUCAP Sahel au Mali et au Niger et de la mission de formation de l’Union européenne au Mali (EUTM Mali), ainsi que, de manière indirecte, par la participation des États membres à la MINUSMA et à l’opération Barkhane; que le G5 Sahel, soutenu par l’Union, est une initiative de défense concertée entre le Burkina Faso, le Tchad, le Mali, la Mauritanie et le Niger qui renforce la coordination du développement régional et de la sécurité afin de neutraliser les groupes armés et de diminuer leur attractivité; que l’attentat contre une base militaire à Tahoua (Niger) du 11 décembre 2019, qui a tué 71 soldats nigériens et en a blessé 12 autres, est l’agression unique la plus meurtrière dans la région depuis 2016;
U. considérant que lors d’un sommet qui s’est tenu à Ouagadougou le 14 septembre 2019, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a annoncé un plan à hauteur d’1 milliard d’USD pour lutter contre l’insécurité croissante dans la région du Sahel;
V. considérant que la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) de l’Union européenne vise à faire progresser et à consolider la démocratie et l’état de droit, ainsi que le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales;
1. condamne fermement toute forme de violence, les intimidations et les enlèvements de civils, actes qui visent les services de sécurité, les sites religieux et les pratiquants au Burkina Faso, en particulier les actes de violence visant certaines communautés religieuses, ainsi que l’instrumentalisation politique et l’utilisation abusive de la religion pour légitimer la persécution des chrétiens et d’autres minorités religieuses;
2. présente ses condoléances aux familles des victimes et au gouvernement du Burkina Faso; exprime sa solidarité avec le peuple burkinabè, aujourd’hui endeuillé presque quotidiennement par des agressions dirigées contre les civils, les forces de sécurité et les membres de communautés chrétiennes et d’autres minorités religieuses;
3. invite les autorités nationales à miser davantage sur le dialogue national en tant que composante importante de la cohésion; souligne la nécessité de favoriser l’unité et le dialogue entre toutes les communautés du Burkina Faso, y compris les dirigeants traditionnels et les organisations de la société civile, afin de contrer toute tentative de propager la haine et de créer des tensions intercommunautaires;
4. invite le gouvernement du Burkina Faso à renforcer le soutien et la protection qu'il apporte aux communautés musulmanes, chrétiennes et animistes afin de maintenir la tradition ancestrale burkinabè de coexistence pacifique entre l’islam et le christianisme; appelle de ses vœux un soutien accru en faveur des victimes de violences, en particulier des femmes et des enfants;
5. réaffirme que la lutte contre le terrorisme ne peut porter ses fruits que si les forces de sécurité respectent l’état de droit et les droits de l’homme; demande instamment au gouvernement burkinabè, dans ce contexte, de mettre fin sans attendre à sa stratégie de lutte abusive contre l’insurrection, notamment aux exécutions sommaires de suspects, qui risquent d’exacerber le conflit en incitant davantage de gens à céder aux appels des recruteurs islamistes;
6. invite le gouvernement burkinabè à respecter son engagement d’enquêter sur les abus qu’auraient commis les forces de l’État, à prendre des mesures concrètes pour empêcher tout nouvel abus et à fonder sa stratégie de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent sur l’état de droit et le respect des droits fondamentaux, conformément aux obligations qui lui incombent en vertu du droit international, en particulier le droit international relatif aux droits de l’homme, le droit international humanitaire et le droit des réfugiés;
7. insiste sur la nécessité d’une approche globale de la prévention de la radicalisation et du terrorisme, axée sur le renforcement de la cohésion sociale et la prévention de la criminalité; invite les autorités burkinabè à redoubler d’efforts pour réduire la pauvreté, dégager de meilleures perspectives d’emploi, en particulier pour les jeunes, et renforcer l’autonomie et le respect de la personne, afin d’éliminer à la source les frustrations qui pourraient être exploitées par des extrémistes violents; réaffirme que l’investissement dans l’éducation est essentiel pour la prévention des conflits et la reconstruction de sociétés pacifiques et inclusives;
8. rappelle qu’il sera essentiel d’allier la politique, la sécurité et le développement durable, sans oublier la conscience religieuse, au moyen d’un dialogue interreligieux, pour parvenir à une solution durable aux différents défis auxquels sont confrontés le Burkina Faso et la région du Sahel;
9. appelle de ses vœux une coordination internationale dans l’ensemble de la région, en particulier dans le cadre de la CEDEAO, qui se fixe comme objectifs politiques la préservation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de ses membres, l’instauration d’institutions démocratiques régionales ainsi que la sécurité de l’ensemble des citoyens et de leurs possessions; rappelle que la situation au Burkina Faso a une incidence directe sur celle des États voisins; invite le gouvernement burkinabè à intensifier encore sa coopération avec ses voisins, notamment au nord, avec les États directement touchés par la violence, comme le Mali et le Niger;
10. félicite l’Union et ses États membres pour le soutien qu’ils apportent au G5 Sahel, à la MINUSMA et à l’opération Barkhane; salue également les efforts déployés par les missions civiles EUCAP SAHEL au Mali et au Niger ainsi que par la mission militaire de formation EUTM Mali; invite l’Union à accroître encore son soutien au Burkina Faso de manière à résoudre les énormes enjeux en matière de sécurité dans le pays; souligne la nécessité d’une action internationale plus globale et plus concertée en matière de sécurité au Burkina Faso; invite les pays du G5 Sahel et les bailleurs de fonds internationaux à accroître leurs efforts afin de transformer sans plus tarder la force militaire conjointe du G5 Sahel en une force opérationnelle dotée de moyens suffisants, tout en respectant pleinement les droits de l’homme;
11. souligne l’importance fondamentale de la sécurité, en indiquant qu’elle ne constitue pas la seule réponse aux défis auxquels le Burkina Faso est confronté et que, dès lors, la coordination entre la sécurité et les politiques commerciales et de développement constitue l’un des défis essentiels; rappelle que la sécurité de la population locale devrait être le principe directeur de la réforme du secteur de la sécurité de l’Union et de son action d’assistance dans les régions et pays fragiles;
12. constate que les conflits, les migrations et la désertification compliquent le recours aux types d’emploi traditionnels; souligne que 65 % de la population burkinabè est âgée de moins de 25 ans; estime que les opérations de sécurité au Burkina Faso doivent s’accompagner d’efforts de développement local visant à réduire les inégalités et à améliorer les infrastructures, la participation politique, la justice, l’émancipation des femmes et les perspectives économiques;
13. prend acte de la détérioration de la situation au Burkina Faso et de ses implications géopolitiques internationales; souligne qu’il est impératif que l’Union poursuive ses efforts d’assistance dans le domaine de la sécurité et de la politique, en plus des efforts coordonnés par le G5 dans la région, notamment au regard du processus de paix au Mali; demande le renforcement du soutien dont bénéficient les forces de sécurité au Burkina Faso, afin de leur permettre de faire face aux menaces que représentent les attentats et les actes de violence perpétrés par les djihadistes, et d’appuyer le contrôle des régions du nord et de l’est par le gouvernement;
14. souligne que la coordination internationale est tout aussi fondamentale, et que l’Union devrait être prête à coopérer encore davantage avec l’ensemble de la région ainsi qu’à l’intégrer dans sa nouvelle «stratégie UE-Afrique - un partenariat pour un développement durable et inclusif»;
15. invite le SEAE à ajouter le dialogue interreligieux, dont l’efficacité a été prouvée, aux instruments de sa stratégie de communication à l’égard des pays tiers et à favoriser la médiation dans les situations de conflit en vue de la protection des minorités religieuses et de la liberté de religion et de conviction;
16. se félicite du plan d’action des Nations unies pour la sauvegarde des sites religieux, développé par l’Alliance des civilisations des Nations unies et annoncé par le secrétaire général des Nations unies, M. António Guterres, le 12 septembre 2019.
17. souligne que dans la lutte contre le terrorisme, les priorités sont de mettre fin au financement international des groupes djihadistes armés, d’une part, et de remédier aux causes profondes de la pauvreté et de l’inégalité, d’autre part;
18. estime que l’Union doit travailler conjointement avec la CEDEAO, le gouvernement et toutes les parties prenantes au Burkina Faso afin de redoubler d’efforts dans les domaines du développement, de l’éducation et de l’adaptation au changement climatique dans le but de lutter contre la pauvreté et de prévenir toute radicalisation future; souligne que le changement climatique est un multiplicateur de risque important pour les conflits, les sécheresses, les famines et les migrations; presse le gouvernement du Burkina Faso de donner la priorité à la lutte contre la corruption et l’impunité;
19. s’inquiète tout particulièrement de l’incidence des menaces en matière de sécurité sur l’efficacité de l’aide humanitaire et de la coopération au développement; exhorte les États membres et la communauté internationale à renforcer l’assistance humanitaire qu’ils fournissent Burkina Faso, en particulier sous la forme de denrées alimentaires, d’eau et de services médicaux; met en garde contre l’imminence d’une autre crise humanitaire si les besoins fondamentaux des communautés déplacées et d’accueil (comme la nourriture, l’eau, le logement et les soins de santé) ne sont pas satisfaits;
20. invite le gouvernement du Burkina Faso à garantir l’acheminement de l’aide humanitaire et alimentaire, en particulier dans les zones où l’accès à l’aide humanitaire est restreint, et à prendre des mesures spécifiques pour renforcer les actions de prévention et de gestion de la malnutrition aiguë dans les camps de personnes déplacées à l’intérieur du pays, en portant une attention particulière aux groupes les plus vulnérables, qui comprennent les femmes et les enfants;
21. presse le gouvernement du Burkina Faso de sécuriser et de faciliter les mouvements de transhumance du bétail afin de prévenir les conflits communautaires, et de renforcer la disponibilité des points d’eau, du fourrage et des soins vétérinaires ainsi que l’accès du bétail à ces ressources dans les régions où elles sont bien trop rares;
22. témoigne sa gratitude aux ONG, y compris les ONG religieuses, et aux organisations internationales, pour le travail important qu’elles accomplissent, notamment en venant en aide aux nombreuses victimes des violences et plus particulièrement aux femmes et aux enfants;
23. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au président du Burkina Faso, au président du Parlement burkinabè et à l’Union africaine ainsi qu’à ses institutions.
Afghanistan, notamment les allégations d’abus sexuels sur des garçons dans la province de Logar
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Résolution du Parlement européen du 19 décembre 2019 sur l’Afghanistan, notamment les allégations d’abus sexuels dont sont victimes des garçons dans la province de Logar (2019/2981(RSP))
– vu ses résolutions antérieures sur l’Afghanistan, en particulier celle du 14 décembre 2017(1),
– vu sa résolution du 26 novembre 2019 sur les droits de l’enfant à l’occasion du 30e anniversaire de la convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant(2),
– vu les déclarations du 3 décembre 2019 du Groupe des amis des enfants touchés par les conflits armés (CAAC), dont le Parlement européen est membre, concernant les allégations d’abus sexuels dont sont victimes des garçons dans la province de Logar et les actions menées contre des défenseurs des droits de l’homme dans ce contexte;
– vu la loi afghane sur la protection des droits de l’enfant ratifiée le 5 mars 2019,
– vu la déclaration universelle des droits de l’homme,
– vu la Convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989,
– vu rapport de l’Unicef de novembre 2019 intitulé Convention on the Rights of the Child at a crossroads,
– vu les rapports du 23 mars 2018 et du 29 mars 2019 adressés par le secrétaire général des Nations unies au Conseil de sécurité sur les violences sexuelles liées aux conflits, ainsi que le rapport du 10 mars 2019 sur les enfants et le conflit armé en Afghanistan,
– vu les orientations de l’UE pour la promotion et la protection des droits de l’enfant, les orientations de l’UE sur les enfants face aux conflits armés et les orientations de l’UE concernant les défenseurs des droits de l’homme,
– vu les conclusions du Conseil du 8 avril 2019 sur l’Afghanistan,
– vu l’accord de coopération en matière de partenariat et de développement entre l’UE et l’Afghanistan signé le 18 février 2017,
– vu l’article 144, paragraphe 5, et l’article 132, paragraphe 4, de son règlement intérieur,
A. considérant qu’entre 2015 et 2018, 14 000 violations ont été commises à l’encontre d’enfants en Afghanistan selon le rapport 2019 du secrétaire général des Nations unies sur les enfants et le conflit armé en Afghanistan; qu’au moins 12 599 enfants ont été tués ou mutilés, soit près d’un tiers des victimes civiles; que les violences sexuelles, les viols et l’exploitation dont sont victimes des garçons, une pratique qui est connue sous le nom de «bacha bazi» et revient à réduire des enfants à l’état d’esclaves sexuels, sont répandus dans plusieurs provinces afghanes;
B. considérant que la mission d’assistance des Nations unies en Afghanistan (MANUA) a signalé que 136 garçons afghans dans au moins six écoles de la province de Logar ont été victimes d’abus sexuels commis par un réseau de pédophilie; qu’une enquête a permis de repérer plus de cent vidéos en ligne jusqu’ici; qu’au moins sept garçons qui apparaissaient dans ces vidéos ont été retrouvés morts et que cinq autres ont été assassinés par leur famille;
C. considérant que des «bachas», généralement des garçons âgés de 10 à 18 ans, sont achetés à des familles pauvres ou enlevés par des membres influents de l’élite dans les zones rurales, parmi lesquels des politiciens et des officiers de l’armée; que ces garçons doivent s’habiller en femme et danser lors de fêtes privées, après quoi ils subissent souvent des violences sexuelles exercées par des hommes;
D. considérant que des directeurs d’écoles, des enseignants et les autorités locales de la province de Logar sont impliqués; que l’impunité pour des violences sexuelles est fréquente en raison de la position de pouvoir occupée par leurs auteurs, de l’incrédulité de la famille et de la communauté des victimes, ainsi que d’un système de valeurs qui place l’honneur au-dessus de l’intérêt de l’enfant;
E. considérant que les enfants afghans victimes de viol et d’exploitation sexuelle ont un accès très limité à la justice ou à une aide; que, bien au contraire, comme en témoigne certaines sources, les enfants qui signalent des abus sexuels subissent des violences, sont stigmatisés, ostracisés, voire assassinés par les auteurs des violences, les autorités, des chefs de milice ou leur propre famille, ce qui aggrave encore les traumatismes physiques et psychologiques;
F. considérant que l’institution d’action civile et sociale pour la jeunesse de Logar enquête sur la situation dans d’autres écoles de la région; que l’on estime à plusieurs milliers le nombre de garçons victimes du «bacha bazi»;
G. considérant que l’Afghanistan a réformé son code pénal en 2018 et criminalisé les abus sexuels à l’encontre d’enfants; qu’en 2019, les autorités afghanes ont adopté une loi sur la protection des droits de l’enfant; que la mise en application des dispositions qui criminalisent le recrutement d’enfants et leur exploitation ainsi que les abus et violences sexuels dont ils sont victimes reste problématique;
H. considérant que les défenseurs des droits de l’homme Mohammad Musa Mahmudi et Ehsanullah Hamidi, de l’institution d’action civile et sociale pour la jeunesse de Logar, ont été arbitrairement détenus par la direction nationale de la sécurité alors qu’ils s’apprêtaient à rencontrer l’ambassadeur de l’Union à Kaboul; qu’ils ont tous deux été relâchés le 27 novembre 2019 mais que des inquiétudes subsistent quant à leur sécurité; que ces deux défenseurs des droits de l’homme ont précédemment été menacés sur les médias sociaux, y compris par des représentants des pouvoirs publics; que le gouverneur de la province les a en outre menacés de les punir pour avoir diffusé de fausses informations;
I. considérant qu’en Afghanistan, les défenseurs des droits de l’homme subissent des attaques de plus en plus fréquentes de la part des autorités et de groupes armés afghans et font l’objet de harcèlement, d’intimidations, de menaces et de violences; que les pouvoirs publics afghans se sont abstenus, de manière répétée, d’enquêter sur des attaques contre des défenseurs des droits de l’homme;
1. déplore les pratiques persistantes et largement répandues d’abus et d’esclavage sexuels dont sont victimes des garçons en Afghanistan; exprime son soutien plein et entier et sa solidarité à l’endroit des victimes; est vivement préoccupé par l’étendue de ces pratiques profondément ancrées d’abus sexuels dont sont victimes des garçons, l’impunité des auteurs de ces actes et la vulnérabilité des victimes;
2. reconnaît que les autorités afghanes ont récemment réagi et pris des mesures pour enquêter sur les responsables de ces actes et engager des poursuites à leur encontre; rappelle aux autorités que la protection des enfants et d’autres groupes vulnérables doit être au cœur de toute politique de protection des droits de l’homme, et demande aux autorités centrales et locales afghanes de poursuivre leur action pour éradiquer la pratique du «bacha bazi» du pays;
3. déplore vivement que des cas d’abus sexuel soient survenus dans des écoles, des institutions qui doivent inspirer confiance et respect, et qu’ils aient été commis par des enseignants et des chefs d’établissement, qui ont une influence considérable sur leurs élèves et portent une grande responsabilité au regard de l’épanouissement de ceux-ci, sur le plan intellectuel et psychologique;
4. demande au gouvernement afghan de démettre immédiatement de leurs fonctions les personnes accusées d’abus et de violences sexuels jusqu’au terme de l’enquête, et d’apporter aux victimes et à leur famille l’aide médicale, psychologique et sociale nécessaire;
5. demande au parquet d’ouvrir une enquête indépendante et impartiale sur les accusations d’abus et de violences sexuels contre des garçons dans la province de Logar et de garantir les droits et la protection des victimes; rappelle que, des accusations ayant été portées contre des représentants des autorités nationales, il convient que l’enquête soit menée en coopération avec des organismes internationaux, dont la MANUA, et ce en toute transparence;
6. exhorte les autorités afghanes à établir immédiatement un mécanisme de protection et de signalement pour les organisations et les militants qui dénoncent et signalent les violations des droits d’enfants; presse les autorités afghanes de mettre en place un numéro national d’assistance pour les victimes de violations des droits de l’enfant;
7. demande aux autorités afghanes d’appliquer pleinement le droit national et international pour la protection des droits de l’enfant; presse les autorités afghanes d’appliquer pleinement le nouveau code pénal afghan de 2018 et la loi de 2019 sur la protection des droits de l’enfant afin de garantir que les auteurs d’abus et de violences sexuels contre des enfants aient à répondre de leurs actes;
8. exhorte le gouvernement afghan à entamer une campagne nationale pour éduquer la société à l’interdiction du «bacha bazi» et au droit des mineurs à être protégés de telles violences physiques et sexuelles; souligne qu’au regard de ce problème, conjuguer répression et éducation est le seul moyen de parvenir à l’évolution culturelle nécessaire pour éradiquer cette pratique de la société afghane; met l’accent sur le fait que ces efforts doivent prioritairement porter sur la lutte contre la stigmatisation des victimes du «bacha bazi» et empêcher que celles-ci soient ostracisées par leur communauté, rejetées par leur famille ou tuées;
9. salue le travail de Mohammad Musa Mahmudi, d’Ehsanullah Hamidi et de tous les défenseurs des droits de l’homme en Afghanistan, qui exercent dans l’un des environnements les plus dangereux au monde, sont menacés par des acteurs étatiques et non étatiques et ne bénéficient pas de la protection dont ils ont besoin pour accomplir leur mission sans devoir craindre de représailles; souligne que les autorités afghanes sont tenues, en toute circonstance, de veiller à ce que les défenseurs des droits de l’homme puissent faire leur travail sans être l’objet de menaces, d’intimidations ou d’entraves;
10. préconise instamment de renforcer le contrôle et le suivi de l’aide financière que l’Union accorde à l’Afghanistan afin de garantir que l’appui budgétaire apporté contribue effectivement à instaurer un environnement propice à la protection et à l’action en faveur des droits de l’homme;
11. presse les autorités afghanes d’assurer la sécurité de Mohammad Musa Mahmudi et d’Ehsanullah Hamidi; demande en outre aux autorités de libérer immédiatement et sans condition tous les défenseurs des droits de l’homme, prisonniers d’opinion et journalistes détenus et condamnés pour avoir simplement exercé leur droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique;
12. demande au parquet d’ouvrir une enquête indépendante et impartiale sur la détention arbitraire de membres de la société civile qui ont été arrêtés après avoir signalé des cas d’abus et de violences sexuels, avant d’être relâchés après quelques jours;
13. invite tous les États membres de l’Union européenne qui ont des missions diplomatiques en Afghanistan, ainsi qu’à leurs agences de développement présentes sur le terrain, de prêter main-forte aux autorités et aux acteurs de la société civile locale qui œuvrent à l’éradication de la pratique du «bacha bazi» dans la société afghane;
14. invite les États membres qui disposent de missions diplomatiques sur place à suivre sans réserve les orientations de l’Union sur les défenseurs des droits de l’homme et à apporter tout le soutien nécessaire à ceux d’entre eux qui sont placés en détention, notamment en leur rendant visite en prison et en assurant un suivi de leurs procès; rappelle aux délégations et aux États membres de l’Union qu’il importe d’appliquer pleinement les orientations de l’Union pour la promotion et la protection des droits de l’enfant, ainsi que celles sur les enfants face aux conflits armés;
15. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission européenne, à la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au représentant spécial de l’UE pour les droits de l’homme, aux gouvernements et aux parlements des États membres, ainsi qu’au gouvernement et au parlement de l’Afghanistan.
– vu ses résolutions antérieures sur la Russie et sur les relations entre l'Union européenne et la Russie,
– vu les déclarations du porte-parole du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) du 23 novembre 2019 sur les modifications apportées à la loi sur les «agents de l’étranger» dans la Fédération de Russie, et du 26 novembre 2017 sur la loi russe permettant l’enregistrement des médias étrangers en tant qu’«agents de l’étranger»,
– vu la déclaration du 11 décembre 2019 de la délégation de l’Union européenne auprès du Conseil de l’Europe sur les modifications apportées à la loi sur les «agents de l’étranger» dans la Fédération de Russie,
– vu la déclaration universelle des droits de l’homme, en particulier son article 19 relatif au droit à la liberté d'opinion et d'expression, et son article 20 relatif au droit à la liberté de réunion et d'association pacifiques,
– vu la déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme, en particulier son article 13 sur la liberté d’association,
– vu le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en particulier son article 22 sur le droit à la liberté d’association,
– vu la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (convention européenne des droits de l’homme),
– vu la Convention européenne des droits de l’homme et ses protocoles, en particulier son article 10 relatif au droit à la liberté d'expression, et son article 11 relatif au droit à la liberté de réunion et d'association,
– vu les orientations de l'Union européenne concernant les défenseurs des droits de l'homme,
– vu la Constitution de la Fédération de Russie, notamment son chapitre 2 sur les droits et les libertés des citoyens,
– vu la déclaration du 20 novembre 2019 du représentant de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe à propos de la liberté des médias,
– vu l’avis du 15 juillet 2013 du commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe sur la législation de la Fédération de Russie relative aux organisations non commerciales à la lumière des normes du Conseil de l’Europe, et vu son avis mis à jour sur la législation et la pratique de la Fédération de Russie concernant les organisations non commerciales à la lumière des normes du Conseil de l’Europe: Mise à jour», publié le 9 juillet 2015,
– vu l’avis du 27 juin 2014 de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (commission de Venise) sur la loi fédérale relative aux organisations non commerciales («loi relative aux agents de l’étranger»), l’avis du 13 juin 2016 sur la loi fédérale russe n° 129-FZ (relative aux activités indésirables d’organisations non gouvernementales étrangères et internationales), et le rapport de la Commission de Venise du 18 mars 2019 sur le financement d’associations,
– vu l'article 144, paragraphe 5, et l'article 132, paragraphe 4, de son règlement intérieur,
A. considérant que la liberté de pensée et d’expression, d’association et de rassemblement pacifique sont inscrits dans la constitution de la Fédération de Russie;
B. considérant que la Fédération de Russie est signataire de la déclaration universelle des droits de l’homme et de la convention européenne des droits de l’homme, ainsi que membre du Conseil de l’Europe, et qu’elle donc tenue de respecter les normes et principes internationaux régissant l’état de droit, les droits de l’homme et les libertés fondamentales;
C. considérant qu’en juillet 2012, le Parlement russe a adopté une loi sur les «agents de l’étranger» qui impose aux ONG russes de s’enregistrer auprès du ministère de la justice de la Fédération de Russie en tant qu’«organisations exerçant les fonctions d'agents de l’étranger» si elles reçoivent des financements étrangers et participent à des activités vaguement décrites comme «activités politiques»; qu’en juin 2014, la loi a été modifiée de manière à permettre au ministère de la justice d’enregistrer des ONG en tant qu’«agents de l’étranger» de sa propre initiative; qu’en novembre 2017, le champ d’application de la loi a été élargi pour imposer l’utilisation de la désignation d’«agent de l’étranger» pour tout média étranger recevant, directement ou indirectement, un financement étranger;
D. considérant que les dernières modifications de la loi sur les «agents de l’étranger», qui élargit le statut d’«agents de l’étranger» afin d’y inclure des personnes privées, notamment des blogueurs et des journalistes indépendants, ont été approuvées par le Parlement russe le 21 novembre 2019 et promulguées le 2 décembre 2019 par le président Vladimir Poutine; que la loi impose des exigences spécifiques en matière d’enregistrement, de comptabilité et de marquage des publications, et fait du non-respect de ces dispositions une infraction pénale, en prévoyant la possibilité de sanctions, avec de lourdes amendes administratives ou jusqu’à deux années d’emprisonnement;
E. considérant qu’en vertu de cette loi, les Russes et les étrangers qui travaillent avec des médias qualifiés d’«agents de l’étranger», ou distribuent leur contenu, seraient eux-mêmes déclarés «agents de l’étranger», ce qui est de nature à exposer les journalistes, leurs sources, ou même ceux qui partagent des documents sur les réseaux sociaux à la stigmatisation en tant qu’«agents de l’étranger», et pourrait ainsi les amener à s’auto-censurer tout en les décourageant non seulement de publier mais également de partager des publications;
F. considérant que la loi russe sur les «agents de l’étranger» enfreint la Convention européenne des droits de l’homme, l’accord international du Conseil de l’Europe, qui protège, entre autres, la liberté d’expression et des médias; que la Russie ne satisfait donc pas à ses obligations de membre du Conseil de l’Europe; que le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a jugé cette loi incompatible avec les normes internationales et européennes en matière de droits de l’homme; que la loi sur les «agents de l’étranger » viole les engagements de la Russie en tant que membre de l’OSCE et en tant que signataire de la déclaration universelle des droits de l’homme; que l’Union européenne attend de la Fédération de Russie, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, qu’elle se conforme pleinement aux engagements internationaux qu’elle a pris;
G. considérant que plusieurs organisations et ONG de défense des droits de l’homme, telles qu’Amnesty International et Human Rights Watch, estiment que la loi modifiée aura un effet préjudiciable sur l’environnement déjà restrictif imposé au journalisme indépendant en Russie, en affaiblissant encore, de la sorte, la liberté d’expression; que les médias de qualité, indépendants des structures gouvernementales ou pro-gouvernementales, qui travaillent avec de nombreux correspondants russes à travers le pays et sont souvent la seule source d’informations fiables et une alternative aux médias officiels dans les régions reculées, sont la cible de la loi, ce qui entrave leur travail et, donc, l’accès à une couverture médiatique impartiale;
H. considérant que les restrictions législatives et les poursuites ciblées au titre de la loi sur les agents de l’étranger en Russie ont pris des formes plus répressives ces derniers mois, avec pour résultat de limiter l’accès des médias et de la société civile au financement indépendant, et de ternir leur réputation et faire obstruction à leurs activités, en restreignant ainsi l’exercice des libertés fondamentales et en réduisant l’espace dont disposent les acteurs indépendants et dissidents en Russie;
I. considérant que la loi sur les «agents de l’étranger» fait partie d’une campagne plus large visant à étouffer la dissidence, l’opposition et la société civile à travers la Russie; que le rétrécissement de l’espace dont dispose la société civile indépendante en Russie permet aux organisations non-gouvernementales non indépendantes, organisées par le gouvernement (GONGO), de renforcer leur présence; que le gouvernement russe utilise les GONGO pour promouvoir ses propres politiques tout en maintenant l’apparence d’une société civile indépendante;
J. considérant que la loi a jusqu’à présent principalement ciblé les ONG; qu’au total, environ 80 ONG sont considérées comme des «agents étrangers» en vertu de cette loi, parmi lesquelles la quasi-totalité des principales ONG de défense des droits de l’homme en Russie; que des demandes déposées par 49 ONG russes sont en cours devant la Cour européenne des droits de l’homme, fondées sur l’argument que la loi sur les «agents étrangers» viole divers droits de l’homme, notamment la liberté d’expression et d’association, et protestant contre la qualité de la loi et leur persécution pour ne s’être pas enregistrées comme «agents étrangers», ainsi que contre un contrôle excessif de l’État;
K. considérant que des dizaines d’organisations actives dans le domaine de l’environnement ont été placées de force sur la liste des «agents étrangers» depuis 2014, en dépit de l’arrêt de la Cour constitutionnelle russe excluant explicitement les groupes de protection de l’environnement du champ d’application de cette loi; que bon nombre des groupes affectés ont dû fermer pour ne pas être étiquetés comme «agents étrangers» ou en raison de leur incapacité à payer les amendes;
L. considérant qu’une tendance mondiale alarmante est apparue au cours de la dernière décennie, selon laquelle de plus en plus d’États mettent en place et utilisent des lois pour entraver le droit à la liberté d’expression, qui comprend la liberté de recevoir et de communiquer des informations et des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière, ainsi que la liberté de réunion et d’association; que ces lois nuisent également au travail des particuliers et des organisations de la société civile;
M. considérant que la Cour européenne des droits de l’homme a, dans plusieurs arrêts, souligné que le rôle d’observateur critique que jouent les ONG est essentiel à une société démocratique et revêt une importance similaire à celui des médias;
N. considérant que l’objectif légitime de garantir la transparence des ONG recevant des fonds étrangers ne peut justifier des mesures qui restreignent les activités des ONG agissant dans le domaine de la démocratie, des droits de l’homme et de l’état de droit;
1. invite les autorités russes à abroger immédiatement la loi sur les «agents étrangers» et à aligner sa législation existante sur la constitution russe et sur les obligations du pays en vertu du droit international; exhorte la Fédération de Russie à cesser de créer délibérément un climat hostile à la société civile, et condamne donc l’utilisation de la loi sur les «agents étrangers» comme un moyen de harceler et de faire taire les organisations de la société civile qui coopèrent avec des donateurs internationaux ou expriment des opinions politiques;
2. condamne les modifications récemment approuvées de la loi sur les «agents étrangers», qui élargissent considérablement son champ d’application et permettront de stigmatiser les individus en les qualifiant d’«agents étrangers», ce qui constitue une violation de leurs droits de l’homme, en particulier leur liberté d’expression et d’association, ainsi que de leurs droits en tant que citoyens, restreint leur engagement et leur contribution à la société civile russe et les met personnellement en danger en les stigmatisant ainsi;
3. condamne les efforts soutenus des autorités russes visant à restreindre le débat en ligne et hors ligne, ainsi que le journalisme indépendant; leur rappelle que la liberté d’expression est un droit de l’homme fondamental qui renforce tous les autres droits de l’homme et permet à la société de se développer et de progresser; invite la Fédération de Russie à reconnaître la contribution positive qu’apporte une société civile riche et active pour l’état de la démocratie et de la société;
4. estime que cette loi et l’usage excessif d’amendes et de règlements à l’encontre des médias, des organisations de défense des droits de l’homme et de la société civile visent délibérément à les forcer à concentrer leurs ressources sur le paiement d’amendes et de frais de défense en justice, et à limiter ainsi la liberté d’expression; est profondément inquiet du fait que les organisations et les défenseurs des droits de l’homme sont pris pour cible, ce qui aggrave la dégradation de la situation des droits de l’homme en Russie; condamne entre autres la dissolution du «Mouvement pour les droits de l’homme», d’une grande importance historique;
5. exprime son inquiétude quant au risque que la loi s’applique de manière sélective pour cibler des individus spécifiques, en particulier des journalistes indépendants et des militants politiques de l’opposition, en raison de l’absence de critères clairs, ainsi que des incertitudes juridiques quant aux motifs et aux conséquences de l’application de la loi aux citoyens ordinaires; invite les autorités russes à mettre en place un cadre clair, cohérent et homogène, ainsi que conforme aux normes européennes et internationales pour les activités des organisations (ONG) non commerciales, en particulier en utilisant des définitions claires, en évitant l’utilisation de termes stigmatisants tels qu’«agents étrangers» ou des dispositions juridiques discriminatoires liées aux sources de financement, ainsi qu’en prévenant les poursuites pénales contre les ONG, les médias et les blogueurs, ou encore les individus menant des activités pour les ONG ou les médias; exprime son inquiétude quant à l’éviction des organisations indépendantes de la société civile par les ONG organisées par les pouvoirs publics; relève en particulier avec inquiétude la situation concernant Anastasia Shevchenko à Rostov-sur-le-Don;
6. s’oppose fermement aux méthodes employées par les autorités russes, qui utilisent le pouvoir de l’État pour étouffer la liberté d’expression et de parole et semer ainsi la peur dans la société; invite les autorités russes à soutenir l’impartialité des médias, y compris ceux détenus par des entreprises publiques russes, et à améliorer la sécurité et l’environnement de travail des journalistes en Russie, notamment en renforçant leurs compétences professionnelles grâce à des programmes internationaux existants; souligne la nécessité de garantir des procédures de recours juridique efficaces pour les journalistes dont la liberté de travail est menacée, afin d’éviter l’autocensure;
7. salue et soutient tous les individus et organisations qui mènent toujours leur travail légitime et pacifique de défense des droits de l’homme bien qu’ils soient ciblés par la répression; exhorte les autorités russes à cesser tout harcèlement, intimidation et attaque à l’encontre de la société civile, des médias et des organisations et défenseurs des droits de l’homme; condamne l’incapacité des autorités russes à protéger ces acteurs contre les attaques, le harcèlement et l’intimidation de tiers ou à enquêter de manière impartiale sur de telles attaques;
8. constate que le registre russe des médias «agents étrangers» comporte 10 noms, qui sont tous des canaux liés soit à Radio Free Europe, soit à Voice of America; rappelle que le gouvernement russe a critiqué d’autres médias étrangers pour avoir couvert les manifestations en Russie;
9. attend du vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR), du Conseil et de la Commission qu’ils fassent part de leur inquiétude concernant la loi sur les «agents étrangers» lors de leurs contacts, réunions et communications avec des représentants russes, y compris aux plus hauts niveaux, et leur demande de rendre compte au Parlement de leurs échanges avec les autorités russes;
10. invite de nouveau la Commission, le SEAE et les États membres à continuer de suivre de près la situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie et invite la délégation de l’Union européenne en Russie et les ambassades des États membres à continuer de suivre les affaires en justice concernant les organisations et les militants de la société civile; invite également le VP/HR et le SEAE à s’assurer que les cas de personnes poursuivies pour des raisons politiques soient mentionnés dans leurs communications avec les autorités russes et qu’il soit officiellement demandé aux représentants russes de fournir une réponse pour ces cas; demande au VP/HR et au SEAE de rendre compte au Parlement de leurs échanges avec les autorités russes;
11. appelle le VP/HR à utiliser chaque occasion pour soutenir une société civile qui favorise les valeurs démocratiques, l’état de droit, les libertés fondamentales et les droits de l’homme en Russie et pour renforcer les contacts interpersonnels avec les citoyens russes;
12. demande aux États membres de l’Union d’aborder le sujet de la loi sur les «agents étrangers» au sein des institutions du Conseil de l’Europe, en particulier au Comité des ministres et à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE); demande à la Commission de Venise d’examiner la loi modifiée sur les «agents étrangers» en vue d’émettre un avis juridique et des recommandations adéquates; appelle les autorités russes à mettre pleinement en œuvre l’ensemble des recommandations de la Commission de Venise du Conseil de l’Europe, conformément aux obligations internationales de la Russie à cet égard; invite les États membres de l’Union à exercer sans relâche des pressions sur les autorités russes au sein des forums de l’OSCE pour qu’elles satisfassent aux normes de l’OSCE en matière de droits de l’homme, de démocratie, d’état de droit et d’indépendance du pouvoir judiciaire;
13. encourage l’Union européenne à continuer de demander à la Russie d’abroger ou de modifier toute législation incompatible avec les normes internationales; invite le VP/HR à élaborer une nouvelle stratégie globale UE-Russie qui aura pour objectif de renforcer la paix et la stabilité; réaffirme que tout dialogue devrait reposer sur des principes fermes, parmi lesquels le respect du droit international et l’intégrité territoriale des voisins de la Russie; rappelle que les sanctions prises à l’encontre de la Russie ne pourront être levées que lorsque le pays respectera pleinement ses obligations;
14. charge son Président de transmettre la présente résolution au vice-président de la commission/haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au Conseil, à la Commission, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au Conseil de l’Europe, à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et au président, au gouvernement et au parlement de la Fédération de Russie.
Commémoration du trentième anniversaire de la révolution roumaine de décembre 1989
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Résolution du Parlement européen du 19 décembre 2019 sur la commémoration du trentième anniversaire de la révolution roumaine de décembre 1989 (2019/2989(RSP))
– vu les principes universels des droits de l’homme et les principes fondamentaux de l’Union européenne en tant que communauté fondée sur des valeurs communes,
– vu la déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 10 décembre 1948,
– vu sa résolution du 19 septembre 2019 sur l’importance de la mémoire européenne pour l’avenir de l’Europe(1),
– vu les résolutions et les déclarations sur les crimes des régimes communistes totalitaires, adoptées par plusieurs parlements nationaux,
– vu l’article 132, paragraphe 2, de son règlement intérieur,
A. considérant que 2019 marque la commémoration du trentième anniversaire de la révolution roumaine, qui a éclaté avec les soulèvements de Timișoara, s’est propagée à l’ensemble du pays et a débouché sur une révolution antitotalitaire à Bucarest qui a conduit à la chute du régime communiste et à l’avènement de la démocratie; que cette révolution était, pour le peuple roumain, synonyme d’une transition vers la liberté et l’état de droit qui a malheureusement fait 1 142 morts, 3 138 blessés graves et a entraîné la détention illégale et la torture de plus de 760 personnes;
B. considérant que la révolution roumaine de décembre 1989 a été la plus violente de tous les soulèvements qui ont conduit à la chute du communisme dans les États situés derrière le rideau de fer;
C. considérant que la révolution de décembre 1989 et le sacrifice des citoyens roumains ayant bravé les tirs ont placé le pays sur la voie de l’OTAN, de l’Union européenne et du monde démocratique auquel il avait été arraché après la fin de la Seconde Guerre mondiale contre la volonté de son peuple;
D. considérant que le recours à la force contre le peuple roumain en décembre 1989 a douloureusement ébranlé le cœur de la société roumaine, et que l’identification des véritables auteurs de ces crimes reste un sujet de préoccupation pour les victimes, leurs familles et tous les citoyens roumains;
E. considérant qu’aucune agression militaire contre son propre peuple ne doit rester impunie;
F. considérant que la Cour européenne des droits de l’homme a constaté, dans les affaires Association «21 décembre 1989» et autres c. Roumanie, Acatriei et autres c. Roumanie, Șandru et autres c. Roumanie, que des violations massives des droits fondamentaux, telles que les violations du droit à la vie, de l’interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, et du droit au respect de la vie privée et familiale, avaient été commises pendant la révolution par les forces du régime dictatorial communiste, lequel avait ouvert le feu sur des manifestants pacifiques et privé de leur liberté un grand nombre d’opposants au régime oppressif de Ceaușescu; que, même après de longues années, ni les victimes ni leurs héritiers n’ont appris la vérité sur les circonstances exactes de ces drames;
G. considérant que conformément à l’article 2 du traité sur l’Union européenne, l’Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’état de droit, ainsi que de respect des droits de l’homme; que ces valeurs sont communes à tous les États membres;
H. considérant que l’État roumain a inutilement tardé à rechercher la vérité et à la rendre publique, alors qu’elle est essentielle pour garantir le droit des victimes et de leurs héritiers à une indemnisation et à une réparation équitables; que les autorités nationales n’ont pas agi avec toute la diligence nécessaire conformément aux normes internationales en matière de droits de l’homme;
1. rend hommage aux victimes de la révolution de décembre 1989 qui ont sacrifié leur vie pour renverser la dictature totalitaire en Roumanie, ainsi qu’à leurs familles.
2. convient que le sacrifice des manifestants pacifiques en décembre 1989 a ouvert la voie à la transition de la Roumanie vers la démocratie, l’état de droit et la mise en place d’une économie de marché, ainsi qu’à l’intégration ultérieure du pays dans l’Alliance atlantique et l’Union européenne;
3. invite l’État roumain à redoubler d’efforts pour établir la vérité sur les événements de la révolution, démarche absolument nécessaire pour le pays, la population roumaine, l’Europe et l’Union européenne, car les citoyens roumains ont le droit d’apprendre la vérité trente ans après la révolution de décembre 1989;
4. invite les institutions de l’Union européenne et ses États membres, y compris la Roumanie, à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour veiller à ce que les crimes commis par les régimes communistes ne soient pas oubliés, et à garantir qu’il n’en sera jamais commis de nouveaux;
5. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission, ainsi qu’aux gouvernements et aux parlements de tous les États membres.
– vu ses précédentes résolutions sur la situation en Chine, en particulier celles du 18 avril 2019 sur la Chine, notamment sur la situation des minorités religieuses et ethniques(1), du 4 octobre 2018 sur la détention arbitraire de masse d’Ouïgours et de Kazakhs dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang(2), du 12 septembre 2018 sur l’état des relations entre l’Union européenne et la Chine(3), du 15 décembre 2016 sur les cas de l’académie bouddhiste tibétaine de Larung Gar et d’Ilham Tohti(4), du 10 mars 2011 sur la situation et le patrimoine culturel de Kashgar (Chine, région autonome ouïghoure du Xinjiang)(5) et du 26 novembre 2009 sur la situation en Chine: droits des minorités et application de la peine de mort(6),
– vu sa décision de décerner le prix Sakharov 2019 à Ilham Tohti, économiste ouïgour qui se bat pacifiquement pour les droits de la minorité ouïgoure de Chine,
– vu la déclaration conjointe du 21e sommet UE-Chine du 9 avril 2019,
– vu le 37e sommet bilatéral UE-Chine qui s’est tenu à Bruxelles les 1er et 2 avril 2019,
– vu la communication conjointe de la Commission et de la haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité du 12 mars 2019 sur les relations UE-Chine – Une vision stratégique (JOIN(2019)0005),
– vu les orientations de l’Union européenne relatives à la promotion et à la protection de la liberté de religion ou de conviction, adoptées par le Conseil «Affaires étrangères» le 24 juin 2013,
– vu la déclaration du 26 octobre 2018 du porte-parole du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) sur la situation au Xinjiang,
– vu la décision du Conseil des affaires étrangères du 9 décembre 2019 sur le lancement de travaux préparatoires à un régime de sanctions global face aux graves violations des droits de l’homme,
– vu sa résolution du 14 mars 2019 sur un régime de sanctions européen pour les violations des droits de l’homme(7),
– vu les déclarations orales de l’Union au titre du point 4 de la 39e session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies du 18 septembre 2018, ainsi que celles du Royaume-Uni, de l’Allemagne, de la France, de la Finlande et du Canada, qui se sont déclarés préoccupés par la détention arbitraire d’Ouïgours dans des camps dans le Xinjiang,
– vu la déclaration commune sur les violations des droits de l’homme et les abus dans le Xinjiang, prononcée le 29 octobre 2019 par le représentant permanent du Royaume-Uni auprès des Nations unies au nom de 23 États, dont 14 États membres de l’Union, devant le comité pour l’élimination de la discrimination raciale des Nations unies,
– vu l’article 36 de la constitution de la République populaire de Chine, qui garantit à tous les citoyens le droit à la liberté de religion, et son article 4, qui garantit les droits des nationalités minoritaires,
– vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, que la Chine a signé en 1998 sans jamais le ratifier,
– vu la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948,
– vu les principes directeurs des Nations unies de 2011 relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme,
– vu les observations finales du rapport sur la Chine du comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale,
– vu l’article 132, paragraphes 2 et 4, de son règlement intérieur,
A. considérant que la défense et le respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’état de droit devraient demeurer au cœur de la politique de l’Union à l’égard de la Chine, conformément à l’engagement pris par l’Union de respecter ces valeurs dans son action extérieure et à l’engagement pris par la Chine d’y adhérer dans le cadre de sa coopération au développement et de sa coopération internationale;
B. considérant que, depuis l’arrivée au pouvoir du président Xi Jinping en mars 2013, la situation des droits de l’homme en Chine a continué de se détériorer; que le gouvernement chinois a accru son hostilité à l’opposition pacifique, aux libertés d’expression et de religion ainsi qu’à l’état de droit; que les autorités chinoises ont détenu et poursuivi des centaines des défenseurs des droits de l’homme, d’avocats et de journalistes;
C. considérant que la situation dans la région du Xinjiang, où vivent plus de 10 millions de musulmans ouïgours et kazakhs, s’est rapidement détériorée au cours de ces dernières années, en particulier depuis le lancement de la campagne coup de poing contre l’extrémisme violent en 2014, les autorités chinoises ayant fait du contrôle du Xinjiang une priorité absolue en raison de l’instabilité et des menaces pour la sécurité imputées aux Ouïgours dans le Xinjiang, d’une part, et de l’emplacement stratégique de la région autonome ouïgoure du Xinjiang pour l’initiative «Ceinture et route», d’autre part, qui poursuit des objectifs ambitieux en matière de production future de textiles et d’autres produits manufacturés à forte intensité de main-d’œuvre; que la guerre du gouvernement chinois contre la terreur au Xinjiang devient de plus en plus une guerre contre la religion et les groupes ethniques; que, selon certaines informations, le système de camps du Xinjiang a été élargi à d’autres régions de la Chine;
D. considérant que les autorités chinoises mènent une campagne de plus en plus intense d’internement de masse, de surveillance numérique intrusive (notamment avec la technologie de reconnaissance faciale et la collecte de données), d’endoctrinement politique et d’assimilation culturelle forcée; qu’il ressort en outre d’informations fiables que les Ouïgours et d’autres minorités ethniques principalement musulmanes dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang ont fait l’objet de détentions arbitraires, de tortures, de restrictions draconiennes pour ce qui est de la pratique et de la culture religieuses, et d’une surveillance numérique envahissante au point que tous les aspects de la vie sont contrôlés, au moyen de caméras de reconnaissance faciale, d’inspection du contenu de leurs téléphones mobiles, de prélèvements d’ADN et d’une présence policière étendue et intrusive;
E. considérant qu’il ressort de témoignages crédibles qu’environ un million de personnes sont ou ont été détenues arbitrairement dans des centres dits «de rééducation politique» pour une durée indéterminée, sous prétexte de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme religieux; que ces centres de rééducation sont parfois désignés sous le nom de «centres de formation professionnelle»; qu’il s’agit de l’incarcération de masse la plus importante d’une minorité ethnique à l’heure actuelle dans le monde; que, d’après certains anciens détenus, le traitement et les conditions dans ces camps sont notamment caractérisés par la surpopulation et l’insalubrité, la privation alimentaire, les passages à tabac et les abus sexuels; qu’il est signalé que de jeunes enfants ont été envoyés dans des orphelinats publics si ne serait-ce qu’un de leurs parents était interné dans l’un de ces camps de rééducation; qu’il y aurait dans certains camps de rééducation des usines fabriquant des produits destinés à l’exportation;
F. considérant que les «China Cables», qui ont été révélés en novembre 2019, sont une enquête sur la surveillance et l’internement massif sans chef d’accusation ni procès d’Ouïgours et d’autres minorités musulmanes dans la province chinoise du Xinjiang, sur la base de documents classifiés du gouvernement chinois ayant fait l’objet de fuites; que des documents secrets ont été transmis au Consortium international des journalistes d’investigation par l’intermédiaire d’une chaîne d’exilés Ouïgours et que leur authenticité a été confirmée par plusieurs experts de premier plan; que la publication de ces documents a également permis de dévoiler des informations classifiées du gouvernement chinois révélant le fonctionnement interne des camps, la sévérité des conditions qui règnent derrière les clôtures et le régime déshumanisant qui règle le quotidien des détenus; que les documents mettent en lumière le lavage de cerveau systématique infligé par la Chine à des centaines de milliers de musulmans dans un réseau de camps de prisonniers de haute sécurité et les aspects pratiques du système de surveillance de masse et de police prédictive mis en place dans le Xinjiang, confirmant ainsi les conclusions des experts fondées sur l’imagerie satellite, les données et les témoignages publiés ces dernières années; que le gouvernement chinois a constamment affirmé que les camps proposaient une éducation et une formation volontaires; que les China Cables révèlent des éléments sans précédent permettant d’attester que les plus hautes instances politiques ont posé les jalons des mesures répressives prises à l’encontre des Ouïgours, des Kazakhs et des autres minorités depuis avril 2014;
G. considérant que la détention et la persécution des Ouïgours et d’autres minorités musulmanes du Xinjiang ont contraint de nombreuses personnes à cesser de communiquer avec leur famille et leurs amis à l’étranger, notamment en Europe, par crainte de représailles de la part des autorités;
H. que la répression s’est intensifiée depuis l’entrée en vigueur, le 1er février 2018, des nouvelles réglementations concernant les affaires religieuses qui restreignent les activités des groupes religieux et les obligent se conformer davantage à la ligne du parti; qu’en vertu de ces réglementations, les manifestations publiques ou même privées d’affiliation religieuse et culturelle peuvent être considérées comme extrémistes; que ces nouvelles règles menacent les personnes associées à des communautés religieuses qui n’ont pas de statut juridique dans le pays; que la répression à laquelle font face les communautés religieuses va croissant en Chine, si bien que c’est dans ce pays que se trouve l’une des plus grandes populations de prisonniers religieux;
I. considérant qu’en août 2018, le comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale a mis en cause le gouvernement de la République populaire de Chine en raison des abus commis au Xinjiang, notamment la création de camps de détention arbitraires de masse; qu’en septembre 2018, lors de son tout premier discours après sa prise de fonction, Michelle Bachelet, Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, a pris acte des «allégations profondément préoccupantes d’arrestations arbitraires à très grande échelle d’Ouïgours et de membres d’autres communautés musulmanes, internés dans des camps dits de rééducation dans tout le Xinjiang»; considérant que le gouvernement chinois a refusé de nombreuses demandes du Groupe de travail des Nations unies sur les disparitions forcées ou involontaires, de la Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme et d’autres titulaires de mandats au titre de procédures spéciales des Nations unies en vue de l’envoi d’enquêteurs indépendants au Xinjiang et de leur accès aux camps;
J. considérant que les camps d’internement au Xinjiang ont connu une expansion rapide après la nomination de Chen Quango au poste de secrétaire du Parti communiste de la région en août 2016; que Shohrat Zakir, président de la région du Xinjiang, a affirmé en décembre 2019 que les 1,5 million de personnes placées dans des camps de rééducation et d’internement avaient toutes été «rendues à la société», sans fournir aucune preuve;
K. considérant que certaines communautés minoritaires chinoises qui résident dans l’Union européenne ont été harcelées par les autorités chinoises; que des pressions ont été exercées sur les Ouïgours se trouvant à l’étranger pour qu’ils rentrent en Chine; que les documents China Cables contiennent des directives explicites instruisant d’arrêter les Ouïgours qui ont une citoyenneté étrangère et de traquer les Ouïgours du Xinjiang qui vivent à l’étranger, dont certains ont été renvoyés en Chine par des gouvernements autoritaires; que les documents indiquent que des ambassades chinoises ont contribué à cette pratique;
L. considérant que le Congrès des États-Unis a adopté le 4 décembre 2019 le «Uyghur Human Rights Policy Act», ou loi sur les droits de l’homme de la communauté ouïgoure, par lequel il presse le gouvernement fédéral des États-Unis de prendre des mesures immédiates afin de protéger les droits de l’homme et d’envisager d’imposer des sanctions économiques et en matière de visas, conformément à la loi Magnitsky, à l’encontre des fonctionnaires chinois dans la province du Xinjiang, tout en protégeant les Ouïgours résidant aux États-Unis contre le harcèlement et les persécutions exercés par la Chine;
M. considérant que le prix Sakharov pour la liberté de l’esprit a été décerné en 2019 au professeur d’économie ouïgour Ilham Tohti, qui a été condamné à la réclusion à perpétuité le 23 septembre 2014 pour séparatisme présumé après avoir été arrêté en janvier de la même année; que sept de ses anciens étudiants ont également été incarcérés et condamnés à des peines d’emprisonnement allant de trois à huit ans pour collaboration présumée avec M. Tohti; qu’Ilham Tohti a toujours rejeté le séparatisme et la violence et qu’il a toujours cherché la réconciliation basée sur le respect de la culture ouïgoure;
N. considérant que, dans son cadre stratégique en matière de droits de l’homme et de démocratie, l’Union s’engage à promouvoir les droits de l’homme, la démocratie et l’état de droit dans tous les domaines de son action extérieure, et à placer les droits de l’homme au cœur de ses relations avec l’ensemble des pays tiers, y compris ses partenaires stratégiques;
1. exprime sa profonde préoccupation face aux mesures répressives de plus en plus draconiennes que doivent subir les Ouïghours et les autres minorités ethniques musulmanes et demande que les autorités chinoises respectent leurs libertés fondamentales, comme le recommandent des informations fiables; condamne vivement l’envoi de centaines de milliers d’Ouïgours et de membres de la minorité kazakhe dans des «camps de rééducation politique» sur la base d’un système de «police prédictive», y compris pour des motifs tels que des voyages à l’étranger ou une foi religieuse jugée trop ardente; invite les autorités chinoises du Xinjiang à fournir des informations sur l’emplacement et les conditions médicales des personnes retenues; demande au gouvernement chinois de mettre un terme sans attendre à la pratique des détentions arbitraires, sans chef d’inculpation, procès ou condamnation pour une infraction pénale, de membres des minorités ouïgoure et kazakhe, de fermer tous les camps et centres de détention et de libérer les détenus immédiatement et sans condition; souligne que toute forme de détention, lorsqu’elle est appliquée en violation des lois internationales fondamentales, ainsi que la persécution à l’encontre de personnes ou de groupes donnés en raison de motifs ethniques, culturels ou religieux, ou d’autres actes inhumains causant de profondes souffrances ou de graves blessures aux populations civiles sont inacceptables à la lumière du cadre juridique international;
2. invite les autorités chinoises à libérer immédiatement et sans condition le professeur ouïgour Ilham Tohti et tous les autres défenseurs des droits de l’homme, militants, avocats et pétitionnaires détenus au seul motif de l’exercice pacifique de leur liberté d’expression, ainsi qu’à mettre un terme à la répression dont ils font l’objet, sous forme de détention, de harcèlement judiciaire et d’intimidation; invite le gouvernement chinois à veiller à ce qu’ils puissent entretenir un contact régulier avec leur famille et les avocats de leur choix, et à garantir que ni eux, ni leurs familles, ni leurs avocats ne soient victimes de tortures ou d’autres mauvais traitements; insiste sur le fait que les conditions de toutes les personnes en détention doivent être conformes aux normes établies dans l’«ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement», adopté par la résolution 43/173, du 9 décembre 1988, de l’Assemblée générale des Nations unies, y compris au regard de l’accès aux soins de santé; plaide pour qu’une enquête immédiate, efficace et impartiale soit ouverte sur les tortures dont aurait été victime Ilham Tohti, et que les responsables soient traduits en justice;
3. invite une nouvelle fois les autorités chinoises à octroyer aux journalistes indépendants et aux observateurs internationaux, y compris au Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme et aux titulaires de mandats au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, un accès libre, véritable et sans entrave à la région autonome ouïgoure du Xinjiang; constate le déséquilibre en matière d’accès et de liberté de la presse entre l’Union européenne et la Chine; demande à la Chine d’accorder aux organes de presse de l’Union européenne les mêmes droits et le même accès que ceux que les États membres de l’Union européenne accordent aux organes de presse chinois; estime que l’Union européenne et les États membres devraient se poser en chef de file pendant la prochaine session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies en vue d’une résolution mettant en place une mission d’information au Xinjiang;
4. est profondément préoccupé par les informations faisant état du harcèlement des Ouïgours à l’étranger par les autorités chinoises, parfois par la détention de membres de leur famille, qui vise à les contraindre à espionner d’autres Ouïgours, à retourner dans le Xinjiang ou à ne pas commenter la situation qui y règne; exhorte la Commission et tous ses États membres à enquêter d’urgence sur ces signalements, à garantir la protection des membres de la diaspora du Xinjiang sur leurs territoires respectifs au moyen de mesures spécifiques et à accélérer les demandes d’asile présentées par les Ouïgours et d’autres musulmans turciques; se félicite, à cet égard, des décisions prises par certains États membres de suspendre le rapatriement vers la Chine de tous les Ouïgours, Kazakhs ou autres musulmans turciques en raison du risque de détention arbitraire, de torture ou d’autres mauvais traitements auxquels ils seraient soumis dans ce pays, et invite tous les États membres à leur emboîter le pas;
5. observe avec inquiétude que l’importance vitale de la «stabilité à long terme» dans le Xinjiang pour le succès de l’initiative «Une ceinture, une route» a entraîné l’intensification des stratégies de contrôle déployées de longue date, qui ont été étayées par diverses innovations technologiques et par une augmentation rapide des dépenses en matière de sécurité intérieure, ainsi que le recours à des mesures de lutte contre le terrorisme pour criminaliser la dissidence et les individus dissidents à la faveur de l’application d’une définition large du terrorisme; s’inquiète vivement des mesures appliquées par l’État chinois pour assurer la «surveillance étroite» de la région grâce au déploiement de la technologie chinoise de surveillance électronique «Skynet» dans les principales zones urbaines, à l’installation de traceurs GPS dans tous les véhicules à moteur, à l’utilisation de scanners de reconnaissance faciale à des points de contrôle, aux gares et aux stations-service, et aux campagnes de collecte de sang menées par la police du Xinjiang pour alimenter la base de données génétiques de la Chine; s’inquiète en outre de voir que la Chine exporte déjà de telles technologies vers des États autoritaires à travers le monde;
6. se déclare profondément préoccupé par les informations faisant état de l’utilisation possible du travail forcé des camps d’internement dans la chaîne d’approvisionnement d’entreprises internationales présentes dans la région du Xinjiang et par les signalements de collaboration avec les institutions chinoises impliquées dans la surveillance de masse ou la détention de membres de la population ouïgoure; souligne que les acteurs du secteur privé devraient évaluer leur engagement au Xinjiang et contrôler leurs chaînes d’approvisionnement afin de s’assurer qu’ils ne sont pas associés à des violations des droits de l’homme, notamment en instaurant un système solide de diligence en matière de droits de l’homme afin d’exclure toute implication dans des travaux forcés et toute complicité avec des actes de répression contre les Ouïgours; souligne que si des produits sont fabriqués dans des camps de rééducation, ils devraient être interdits sur les marchés de l’Union;
7. presse le gouvernement chinois de publier sans délai une liste de toutes les personnes en détention et de toutes celles qui ont été libérées, ainsi que de communiquer les coordonnées complètes des personnes disparues au Xinjiang à leurs familles;
8. presse la Commission, le Conseil et les États membres de prendre toutes les mesures nécessaires pour convaincre le gouvernement chinois de fermer les camps, de mettre un terme à toutes les violations des droits de l’homme au Xinjiang et de préserver la liberté linguistique, culturelle, religieuse et les autres libertés fondamentales des Ouïgours; presse le vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR), le SEAE et les États membres de surveiller de plus près les évolutions préoccupantes en matière de droits de l’homme au Xinjiang, y compris la répression et la surveillance accrues des pouvoirs publics, et de dénoncer les violations des droits de l’homme en Chine, tant en privé que publiquement, et ce aux échelons les plus élevés; exprime sa déception face au fait que la 37e session du dialogue UE-Chine sur les droits de l’homme n’ait apporté aucun résultat substantiel, en dépit du fait que l’Union ait insisté sur le caractère inquiétant du système des camps de rééducation politique; regrette que l’approche adoptée et les outils utilisés jusqu’à présent par l’Union n’aient pas conduit à des progrès tangibles dans le bilan de la Chine en matière de droits de l’homme, qui s’est encore détérioré au cours de la dernière décennie; invite le VP/HR à insister pour qu’une enquête indépendante soit menée sur l’ampleur et la nature du système de camps d’internement et les nombreuses allégations de violations graves et systématiques des droits de l’homme; demande instamment à la nouvelle Commission d’élaborer et de mettre en œuvre une stratégie globale de l’Union qui vise à garantir de réels progrès en matière de droits de l’homme en Chine;
9. souligne que l’Union européenne et la Chine, dans leur déclaration commune publiée à l’issue du 21e sommet UE - Chine, ont réaffirmé que tous les droits de l’homme sont universels, indivisibles, interdépendants et indissociables; souligne que la défense des droits de l’homme et de l’état de droit doit être un élément central de la collaboration de l’Union avec la Chine;
10. insiste pour que l’Union européenne, ses États membres et la communauté internationale stoppent toutes les exportations et tous les transferts technologiques liés à des biens et services utilisés en Chine pour étendre et améliorer la cybersurveillance et l’appareil de profilage prédictif; invite les colégislateurs, à cet égard, à arrêter une position commune sur la réforme du règlement sur les biens à double usage, en raison de considérations urgentes relatives à la sécurité nationale et aux droits de l’homme; souligne que le Parlement a développé et renforcé la proposition de la Commission sur l’inclusion de contrôles stricts des exportations de technologies de cybersurveillance énumérées ou non;
11. rappelle que l’Union européenne se doit de continuer à évoquer la question des violations des droits de l’homme en Chine, et notamment le cas des minorités du Xinjiang, lors de chaque cycle du dialogue politique et du dialogue sur les droits de l’homme avec les autorités chinoises, conformément à l’engagement de l’Union européenne à s’exprimer d’une voix unique, forte et claire lorsqu’elle dialogue avec le pays; rappelle que, dans le prolongement de son processus actuel de réforme et du rôle accru qu’elle joue sur la scène internationale, la Chine a choisi de s’inscrire dans le cadre international des droits de l’homme en signant un grand nombre de traités internationaux relatifs aux droits de l’homme; appelle de ses vœux, par conséquent, l’ouverture d’un dialogue avec la Chine afin de l’encourager à respecter ces engagements; demande instamment à la Chine de poursuivre la mise en œuvre des réformes nationales requises pour la ratification du pacte international relatif aux droits civils et politiques, signé en 1998, et de mettre en œuvre les recommandations des organes des Nations unies chargés des droits de l’homme;
12. se félicite de l’adoption par le Congrès américain du «Uyghur Human Rights Policy Act», ou loi sur les droits de l’homme de la communauté ouïgoure, et de la décision prise récemment par le Conseil des affaires étrangères de commencer à élaborer un régime européen global de sanctions en raison des violations des droits de l’homme; invite le Conseil à adopter des sanctions ciblées et à avoir recours au gel d’actifs, si ces mesures sont jugées appropriées et efficaces, contre les fonctionnaires chinois à l’origine de la conception et de l’application de la politique de détention massive d’Ouïgours et d’autres musulmans turciques au Xinjiang, ainsi que contre les auteurs de la répression sévère de la liberté de religion, de la liberté de circulation et d’autres droits fondamentaux dans la région;
13. invite le SEAE à inclure les bonnes pratiques du dialogue interreligieux en tant qu’outil dans sa stratégie de communication à l’égard des pays tiers et à favoriser la médiation dans les situations de conflit en vue de la protection des minorités religieuses et de la liberté de religion et de conviction;
14. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aux gouvernements et aux parlements des États membres ainsi qu’au gouvernement et au Parlement de la République populaire de Chine.
– vu ses résolutions antérieures sur le Nicaragua, en particulier celles du 18 décembre 2008(1), du 26 novembre 2009(2), du 16 février 2017(3), du 31 mai 2018(4) et du 14 mars 2019(5),
– vu l’accord d’association entre l’Union européenne et l’Amérique centrale de 2012,
– vu le document de stratégie par pays de l’Union et le programme indicatif pluriannuel 2014-2020 pour le Nicaragua,
– vu les conclusions du Conseil sur le Nicaragua et en particulier celles du Conseil du 14 octobre 2019 établissant un cadre pour des sanctions ciblées,
– vu les déclarations de la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR), au nom de l’Union européenne, sur la situation au Nicaragua, notamment la déclaration du 20 novembre 2019,
– vu la déclaration du porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), Rupert Colville, du 19 novembre 2019,
– vu le rapport du 19 novembre 2019 de la commission de haut niveau sur le Nicaragua de l’Organisation des États américains (OEA),
– vu les bulletins d’information publiés par le mécanisme spécial de suivi pour le Nicaragua (MESENI), mis en place par la Commission interaméricaine des droits de l’homme,
– vu le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) de 1966,
– vu la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948,
– vu les lignes directrices de l’Union européenne sur les défenseurs des droits de l’homme de juin 2004,
– vu la Constitution nicaraguayenne,
– vu l’article 132, paragraphes 2 et 4, de son règlement intérieur,
A. considérant que les défenseurs des droits de l’homme et les autres personnes qui critiquent le bilan du gouvernement nicaraguayen en matière de droits de l’homme font de plus en plus l’objet de menaces de mort, d’intimidations, de campagnes de diffamation en ligne, de harcèlement, de surveillance, d’agressions et de persécution judiciaire; que des organisations internationales de défense des droits de l’homme signalent que plus de 80 000 personnes ont été contraintes de quitter le Nicaragua en raison de la crise actuelle, et que la répression s’est accrue dans le pays;
B. considérant que, selon les derniers chiffres du MESENI, 328 personnes sont mortes, des centaines ont été blessées, plus de 150 prisonniers politiques restent détenus arbitrairement pour avoir simplement exercé leurs droits et 144 étudiants ont été renvoyés des universités pour avoir participé à des manifestations en faveur de la démocratie, d’une plus grande liberté et du respect des droits de l’homme; que le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) a indiqué que plus de 100 journalistes et professionnels des médias ont dû quitter le pays; que le gouvernement nicaraguayen a bloqué les importations de papier journal, forçant ainsi plusieurs journaux à cesser leur activité, notamment l’emblématique Nuevo Diario;
C. considérant que le respect de l’indépendance du pouvoir judiciaire, le pluralisme politique et la liberté de réunion et d’expression sont des droits fondamentaux et des piliers essentiels de la démocratie et de l’état de droit;
D. considérant que le 14 novembre 2019, huit parents d’opposants politiques emprisonnés ont, parmi d’autres, entamé une grève de la faim dans l’église San Miguel de Masaya, demandant la libération de 130 personnes qui auraient été arrêtées à la suite des manifestations; que la police a encerclé l’église et a coupé l’eau et l’électricité, que la police n’a laissé personne entrer dans l’église et a empêché qu’une assistance humanitaire et médicale soit fournie;
E. considérant que la même nuit, un groupe d’au moins treize membres de l’opposition ont été placés en détention après avoir apporté de l’eau aux personnes encerclées par la police, dont Amaya Eva Coppens, militante des droits de l’homme belgo-nicaraguayenne qui avait été détenue pendant huit mois à la suite des manifestations, puis libérée le 11 juin 2019 en vertu de la loi d’amnistie, en même temps que plus de cent prisonniers politiques; que cette loi est incompatible avec les normes internationales et perpétue l’impunité en excluant toute enquête sur les crimes qui ont pu être perpétrés contre les manifestants;
F. considérant que le Parquet nicaraguayen a injustement porté plusieurs accusations contre ce groupe de personnes, y compris pour enlèvement, détention illégale d’armes à feu et terrorisme, ce qui constitue une violation manifeste des garanties du respect de la légalité et de leur droit à un procès équitable; que les conditions carcérales au Nicaragua ne répondent pas non plus aux normes internationales; que des membres de l’opposition nicaraguayenne ont explicitement signalé des cas de torture et de violences sexuelles en prison;
G. considérant que, selon le MESENI, le gouvernement nicaraguayen soumet les familles des victimes de la crise démocratique, institutionnelle et politique à une persécution accrue, en les intimidant et les plaçant sous surveillance, dans le but de les empêcher de mener toute action, privée ou publique, à la mémoire de leurs proches et en quête de justice;
H. considérant que, selon le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, le gouvernement nicaraguayen exerce des représailles contre ceux qui dénoncent la situation des droits de l’homme au Nicaragua et entrent en contact avec des responsables et des mécanismes des Nations unies et d’autres organisations internationales;
I. considérant que le gouvernement nicaraguayen a expulsé du pays des organisations internationales telles que la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) et le Bureau régional pour l’Amérique centrale du HCDH, qui demandaient que les droits de l’homme soient respectés dans le pays et cherchaient à parvenir à une résolution pacifique du conflit et à la réconciliation nationale; que le retour de telles organisations serait un gage pour le respect des accords en cours avec l’opposition; que la répression exercée à l’encontre des organisations de la société civile s’est intensifiée du fait qu’elles ont été privées de leur statut juridique dans un pays doté d’un cadre institutionnel défaillant, ce qui pénalise doublement les victimes de la répression;
J. considérant que de hauts responsables de certains États membres de l’Union européenne se sont vu refuser l’entrée sur le territoire nicaraguayen à plusieurs reprises; considérant que le gouvernement du Nicaragua a empêché la commission de haut niveau de l’OEA sur le Nicaragua, qui a demandé une réforme électorale, d’entrer dans le pays; considérant qu’une réforme électorale est un élément essentiel sur la voie de l’établissement régulier d’institutions démocratiques au Nicaragua;
K. considérant que le gouvernement nicaraguayen ne semble nullement intéressé par une reprise d’un dialogue crédible et ouvert avec l’Alliance civique, ni par une mise en œuvre des accords de mars 2019 dans leur intégralité; qu’en février 2019, les négociations ont repris entre le gouvernement et l’Alliance civique; qu’un accord a été conclu le 27 mars 2019 sur la libération des personnes privées de liberté à la suite des manifestations de 2018; qu’un autre accord a été conclu le 29 mars 2019 sur le renforcement des droits et des garanties des citoyens; que, le 20 mai 2019, l’Alliance civique a quitté la table des négociations, estimant que les deux accords étaient d’une application limitée; qu’au 11 juin 2019, le gouvernement a libéré 492 personnes arrêtées à la suite des manifestations de 2018; que les négociations restent au point mort malgré les tentatives de reprise;
L. considérant que la commission de haut niveau de l’OEA sur le Nicaragua est d’avis que les mesures prises ou autorisées par le gouvernement nicaraguayen depuis avril 2018 vont à l’encontre des droits et garanties protégés dans la Constitution nicaraguayenne de 1987 et qu’elles donnent lieu à une modification du régime constitutionnel qui porte gravement atteinte à l’ordre démocratique au Nicaragua, comme indiqué à l’article 20 de la Charte démocratique interaméricaine;
M. considérant que l’épanouissement et le renforcement de la démocratie et de l’état de droit ainsi que le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales doivent faire partie intégrante de la politique extérieure de l’Union, notamment de l’accord d’association qu’elle a conclu en 2012 avec les pays d’Amérique centrale; que cet accord comporte une clause démocratique, qui en constitue un aspect essentiel; que dans les circonstances actuelles, la clause démocratique devrait être déclenchée et que la participation du Nicaragua à l’accord devrait être suspendue;
1. exprime sa solidarité avec la population du Nicaragua et condamne toutes les actions répressives du gouvernement nicaraguayen, notamment les morts ainsi causées, la restriction généralisée des libertés d’expression, de réunion et de manifestation, la mise hors-la-loi des organisations non gouvernementales et de la société civile, l’expulsion des organisations internationales du pays, la fermeture des médias et les agressions menées contre eux, les limitations du droit à l’information et l’exclusion d’étudiants des universités;
2. demande instamment au gouvernement nicaraguayen de mettre un terme à la répression continuelle de l’opposition ainsi qu’à la pratique actuelle d’arrestations arbitraires, de la torture et de violences sexuelles, de s’abstenir de criminaliser, de persécuter et d’attaquer les défenseurs des droits de l’homme, les opposants politiques, les familles des victimes et toute autre voix dissidente, et de démanteler immédiatement les forces paramilitaires agissant dans le pays; demande que soient menées à bref délai des enquêtes approfondies, transparentes et impartiales sur les violences;
3. demande que toutes les personnes détenues arbitrairement, y compris Amaya Eva Coppens, soient immédiatement libérées, que tous les chefs d’accusation à leur encontre soient abandonnés et que les garanties juridiques fondamentales soient respectées en ce qui les concerne; demande que ceux qui violent les droits de l’homme et portent atteinte à la démocratie et à l’état de droit aient à répondre de leurs actes; souligne que les autorités nicaraguayennes doivent garantir la sécurité et le bien-être physique et psychologique de tous les détenus et leur apporter les soins médicaux dont ils ont besoin;
4. demande un examen indépendant des condamnations et des peines en vue de réformer le système judiciaire, y compris les nominations, conformément aux normes internationales telles que les principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature et les principes directeurs applicables au rôle des magistrats du parquet;
5. demande une révision de la loi d’amnistie et de la loi sur la prise en charge intégrale des victimes afin de garantir à celles-ci le droit à la vérité, à la justice et à une réparation adéquate;
6. demande avec insistance la restitution aux organes de presse des biens confisqués et le rétablissement de leurs licences suspendues, et insiste pour que ces médias soient autorisés à mener à bien leur mission sans aucun obstacle ni représailles;
7. salue la décision du Conseil d’adopter le cadre de mesures restrictives ciblées à l’encontre des responsables de violations des droits de l’homme, d’atteintes à ces droits et d’actes de répression à l’égard de la société civile et de l’opposition démocratique au Nicaragua; invite les États membres à s’accorder sans tarder sur la liste spécifique des personnes et entités à sanctionner, y compris le président et la vice-présidente;
8. condamne le manque de volonté du gouvernement nicaraguayen en ce qui concerne la restauration d’un dialogue interne constructif; invite instamment les autorités à renouer le dialogue avec l’Alliance civique en vue de parvenir à une solution démocratique, durable et pacifique qui permettrait de mettre pleinement en œuvre les accords de mars 2019; insiste sur la nécessité de garantir les libertés civiles et politiques de tous les Nicaraguayens, le retour des exilés, le retour des organisations internationales et la collaboration avec celles-ci, le rétablissement de la personnalité juridique des organisations de défense des droits de l’homme, ainsi que la mise en place d’un processus électoral crédible où la réforme du Conseil suprême électoral donnerait l’assurance de la tenue immédiate d’élections justes et transparentes, en présence d’observateurs internationaux;
9. demande au VP/HR et à la délégation de l’Union au Nicaragua de suivre de près la tournure des événements dans le pays et de poursuivre leurs efforts visant à résoudre les problèmes d’atteinte aux droits de l’homme qui touchent, entre autres, les prisonniers, les étudiants, les manifestants, les familles de victimes et les journalistes, et découlent de la situation dans le pays; invite la Commission à veiller à ce que son aide à la coopération soutienne davantage la société civile, notamment les défenseurs des droits de l’homme, et à ce qu’elle ne contribue en aucune manière aux politiques répressives actuelles des autorités nicaraguayennes;
10. rappelle que, à la lumière de l’accord d’association entre l’Union européenne et les pays d’Amérique centrale, le Nicaragua doit respecter et consolider les principes de l’état de droit, de la démocratie et des droits de l’homme, et demande instamment que, compte tenu de la situation actuelle, la clause démocratique de l’accord d’association soit activée;
11. invite la délégation de l’Union et les États membres qui disposent de missions diplomatiques sur place à suivre sans réserve les orientations de l’Union sur les défenseurs des droits de l’homme et à apporter tout le soutien nécessaire à ceux d’entre eux qui sont placés en détention, notamment en leur rendant visite en prison et en assurant un suivi de leurs procès;
12. demande l’envoi d’une délégation du Parlement au Nicaragua dans les plus brefs délais afin de pouvoir suivre à nouveau de près la situation dans le pays et prie instamment les autorités nicaraguayennes de lui permettre l’entrée sans entrave sur leur territoire et de lui donner accès à tout interlocuteur et à tout lieu;
13. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux gouvernements et aux parlements des États membres ainsi qu’au secrétaire général de l’Organisation des États américains, à l’Assemblée parlementaire euro-latino-américaine, au Parlement d’Amérique centrale, au groupe de Lima et au gouvernement et au Parlement de la République du Nicaragua.
– vu ses résolutions antérieures sur l’Iran, en particulier la plus récente, celle du 19 septembre 2019 sur l’Iran, notamment sur la situation des défenseurs des droits des femmes et des binationaux européens(1),
– vu les conclusions du Conseil du 4 février 2019 sur l’Iran,
– vu la déclaration du 8 décembre 2019 du vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR), Josep Borrell Fontelles, au nom de l’Union européenne sur les récentes manifestations en Iran,
– vu la déclaration de la porte-parole du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) du 21 novembre 2019 sur les développements intervenus en Iran,
– vu la décision du Conseil du 12 avril 2018 de prolonger de douze mois ses mesures restrictives en réaction à de graves violations des droits de l’homme en Iran,
– vu les orientations de l’Union européenne concernant les défenseurs des droits de l’homme,
– vu les orientations de l’Union concernant la peine de mort et la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que les orientations de l’Union relatives à la liberté d’expression en ligne et hors ligne;
– vu sa résolution du 25 octobre 2016 sur la stratégie de l’Union à l’égard de l’Iran après l’accord sur le nucléaire(2),
– vu la résolution 73/181, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 17 décembre 2018, sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran,
– vu le rapport du 30 janvier 2019 du rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran,
– vu la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948,
– vu le Pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel la Syrie est partie,
– vu l’article 132, paragraphes 2 et 4, de son règlement intérieur,
A. considérant que des dizaines de milliers de personnes issues de toutes les régions d’Iran et de toutes les catégories sociales ont exercé leur droit fondamental de liberté de réunion et ont, lors d’une révolte sans précédent depuis 40 ans, exprimé leurs doléances économiques après la hausse d’au moins 50 % des prix du carburant;
B. considérant que malgré des appels répétés à la retenue, les forces de sécurité iraniennes ont employé des moyens disproportionnés et fait un usage démesuré de la force à l’encontre des manifestants; que, selon des informations émanant de la société civile, les forces de sécurité iraniennes auraient ouvert le feu, dans l’intention de tuer, sur des manifestants non armés qui ne représentaient aucun risque immédiat;
C. considérant que, selon Amnesty International, au moins 304 personnes, parmi lesquelles des enfants, ont été tuées, et que bien plus encore ont été blessées; que des milliers de manifestants ainsi que des journalistes, des défenseurs des droits de l’homme et des étudiants ont été arrêtés; que les autorités iraniennes n’ont pas officiellement annoncé le bilan officiel des victimes et ont refusé de restituer les corps aux familles;
D. considérant que, le 16 novembre 2019, les autorités iraniennes ont pendant cinq jours presque complètement coupé les communications par internet et qu’elles ont, de ce fait, privé les personnes se trouvant en Iran de pratiquement tous moyens de communication en ligne et empêché toute diffusion d’informations liées aux répressions violentes; que la suspension des communications par internet constitue une violation du droit fondamental d’accès à l’information; qu’elle a pour effet de limiter de manière disproportionnée la liberté d’expression et représente désormais le modus operandi habituel des autorités;
E. considérant que sa résolution du 25 octobre 2016 sur la stratégie de l’Union à l’égard de l’Iran après l’accord sur le nucléaire(3) souligne la nécessité de veiller au respect des lignes directrices de l’Union européenne en matière de droits de l’homme, notamment en ce qui concerne les défenseurs des droits de l’homme, dans le contexte des relations entre l’Union et l’Iran;
F. considérant qu’en Iran, défenseurs des droits de l’homme, journalistes, avocats et militants sur internet continuent de subir harcèlement, arrestations arbitraires, détention et poursuites en raison de leur travail; que le ministère du renseignement iranien ainsi que d’autres services ont exercé une intense répression à l’encontre de la société civile; que 77 membres de l’opposition réformiste, membres pour la plupart du Front de participation à l’Iran islamique, ont, dans une déclaration ouverte, condamné le recours excessif à la force pour réprimer les manifestations; que certains d’entre eux ont été traduits devant la justice iranienne pour «diffusion de propagande à l’encontre de la République islamique» et que deux d’entre eux ont été arrêtés, à savoir Mohammad Kianoush Rad et Mehdi Mahmoudian;
G. considérant que les tribunaux iraniens sont souvent incapables d’assurer des procès équitables, en ce qu’ils refusent l’accès à un conseil juridique et les visites de représentants des consulats, des Nations unies ou d’organisations humanitaires, et autorisent l’utilisation d’aveux obtenus sous la torture à titre de preuves; qu’aucun mécanisme indépendant ne garantit que le pouvoir judiciaire doit rendre des comptes et que de graves préoccupations subsistent quant à la politisation des juges, en particulier ceux qui président les tribunaux révolutionnaires;
H. considérant que de nombreux ressortissants binationaux de l’Union européenne sont détenus en raison de leur militantisme en faveur des droits de l’homme ou de leurs travaux universitaires; que, depuis juin 2019, deux chercheurs français sont incarcérés en Iran, à savoir Fariba Adelkhah et, comme cela a récemment été confirmé, Roland Marchal;
1. exprime ses condoléances aux familles des victimes; souhaite un prompt rétablissement aux blessés;
2. déplore l’usage généralisé et disproportionné de la force par l’Iran à l’encontre de manifestants non violents qui ne faisaient qu’exercer leurs droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique; souligne que de telles actions sont inacceptables et demande instamment aux autorités iraniennes de communiquer le nombre total de morts et de détenus, d’enquêter promptement et de manière impartiale, indépendante et transparente sur les accusations de recours excessif à la force, notamment le fait que les forces de sécurité ont pris pour cible directe des manifestants, et de faire en sorte que tous les auteurs de violences répondent de leurs actes;
3. exige la libération sans condition de tous les manifestants, défenseurs des droits de l’homme et journalistes actuellement placés en détention en Iran pour avoir exercé leurs droits légitimes à la liberté d’expression et de réunion; exige en outre que les autorités communiquent le lieu de détention des prisonniers à leurs familles, et demande que les avocats et les observateurs internationaux aient l’autorisation sans restriction de rencontrer toutes les personnes détenues pendant les manifestations et que l’identité des détenus soit communiquée à la communauté internationale; demande une nouvelle fois la libération de Nazanin Zaghari-Ratcliffe et des nombreuses autres personnes détenues illégalement;
4. condamne fermement la décision de l’Iran de couper l’accès aux réseaux mondiaux sur internet, qui a privé les citoyens iraniens d’un moyen de communication et de libre circulation de l’information; souligne que ces actions constituent une violation manifeste de la liberté d’expression; invite instamment les autorités iraniennes à mettre fin à tous les blocages qui touchent les communications et services en ligne;
5. rappelle que les droits fondamentaux, tels que la liberté d’expression et de réunion, doivent toujours être respectés, et invite les autorités iraniennes à honorer leurs obligations internationales, notamment le PIDCP;
6. invite les Nations unies, notamment le Conseil des droits de l’homme, à diligenter, sous la direction du rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Iran, une enquête approfondie sur les événements de ces dernières semaines dans le but de faire la lumière sur les allégations de violations graves des droits de l’homme dans le pays depuis le début des manifestations, et de demander à l’Iran d’accorder un accès total et sans restriction à cette enquête;
7. rappelle sa résolution du 19 septembre 2019; regrette profondément l’absence de progrès dans les affaires relatives aux ressortissants binationaux de l’Union européenne et d’Iran détenus en Iran; demande instamment aux autorités iraniennes de libérer immédiatement Roland Marchal et Fariba Adelkhah, ainsi que tous les défenseurs des droits de l’homme qui ont été emprisonnés et condamnés pour avoir simplement exercé leurs droits à la liberté d’expression, à la liberté d’association et à la liberté de réunion pacifique;
8. demande à l’Union, notamment au VP/HR, de continuer à soulever les préoccupations en matière de droits de l’homme auprès des autorités iraniennes dans les enceintes bilatérales et multilatérales, en particulier dans le cadre du dialogue politique de haut niveau entre l’Union européenne et l’Iran;
9. réitère son soutien plein et entier aux lauréats du prix Sakharov, Nasrin Sotoudeh et Jafar Panahi; déplore que Nasrin Sotoudeh reste aujourd’hui détenue, après avoir été condamnée à une peine de 33 ans et de 148 coups de fouet, et exige sa libération immédiate et inconditionnelle; demande aux autorités iraniennes de lever l’interdiction de voyager imposée à Jafar Panahi depuis 2010;
10. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, au Service européen pour l’action extérieure, au vice-président de la Commission et haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au Guide suprême de la République islamique d’Iran, au Président de la République islamique d’Iran et aux membres du Parlement iranien.